N° 32

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 18 octobre 1995.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur :

1°) la proposition de loi de MM. Jacques LARCHE. Jean-Paul DELEVOYE. Pierre FAUCHON. André BOHL. Philippe de BOURGOING. Yann GAILLARD. Charles PELLETIER. Michel RUFIN, Lucien LANIER et François BLAIZOT relative à la responsabilité pénale des élus locaux pour des faits d'imprudence ou de négligence commis dans l'exercice des fonctions.

2°) la proposition de loi de M. Claude HURIET relative à la protection pénale des exécutifs locaux à raison des actes commis dans l'exercice de leurs fonctions.

3°) la proposition de loi de MM. Hubert HAENEL. Louis ALTHAPÉ. Jean BERNARD. Éric BOYER. Jacques BRACONNIER. Mme Paillette BRISEPIERRE. MM. Auguste CAZALET. Jacques CHAUMONT. Jacques DELONG. Michel DOUBLET. Jean CHAMANT. Désiré DEBAVELAERE. Luc DEJOIE. Charles DESCOURS. Roger FOSSE. Yann GAILLARD. François GERBAUD. Daniel GOULET. Georges GRUILLOT. Emmanuel HAMEL. Jean-Paul HAMMANN, Jean-Paul HUGOT. Roger HUSSON. André JARROT. André JOURDAIN. Jean-François LE GRAND. Maurice LOMBARD. Philippe MARINI. Michel MAURICE-BOKANOWSKI. Lucien NEUWIRTH. Jean-Pierre SCHOSTECK. Joseph OSTERMANN. Jacques OUDIN. Roger RIGAUDIÈRE. Jean-Jacques ROBERT. Michel RUFIN et Alain VASSELLE visant à étendre aux districts les règles applicables à la responsabilité des syndicats de communes pour les accidents survenus aux membres de leur comité et à leur président, en complétant l'article L. 164-5 du code des communes.

Par M. Pierre FAUCHON.

Sénateur.

Voir les numéros :

Sénat : 406. 255 et .161 (1994 1995)

(1) La commission est composée de MM Jacques Larché, président : René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, vice-présidents . Robert Pages, Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires : Guy Allouche. Jean-Paul Amoudry. Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Claude Cornac, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Charles Jolibois, Lucien Lanier, Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Türk, Maurice Ulrich.

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 18 octobre sous la présidence de M. Germain Authié, la commission des Lois a adopté, sur le rapport de M. Pierre Fauchon la proposition de loi relative à la responsabilité pénale des élus locaux pour des faits d'imprudence ou de négligence commis dans l'exercice de leurs fonctions, présentée par MM. Jacques Larché, président de la commission des Lois, Jean-Paul Delevoye, président de l'Association des maires de France et Pierre Fauchon, rapporteur du groupe de travail de la commission des Lois. Cette proposition de loi est également cosignée par MM. François Blaizot. André Bohl, Philippe de Bourgoing. Yann Gaillard, Lucien Lanier et Michel Rufin.

Suivant cette proposition, la condamnation pénale d'un élu local Pour des faits d'imprudence ou de négligence ne pourrait intervenir qu'après la prise en compte effective des circonstances concrètes dans lesquelles le dommage s'est produit. Ainsi, l'élu local pourrait être condamné pénalement Pour imprudence ou pour négligence « s'il est établi qu'il n'a pas accompli toutes diligences normales compte tenu des moyens dont il disposait et des difficultés propres aux missions que la loi lui confie ».

La proposition de loi traduit la recommandation de modification législative formulée par le groupe de travail qui, constitué au sein de la commission des Lois du Sénat à l'initiative de son président M. Jacques Larché, avait rendu publiques ses conclusions le 21 juin dernier. Elle répond à l'attente très forte des élus locaux qui s'inquiètent d'une dérive conduisant à recourir de manière systématique au procès pénal pour toutes sortes de litiges relatifs à la gestion locale.

Ce groupe de travail, présidé par M. Jean-Paul Delevoye et dont le rapporteur était M. Pierre Fauchon, avait fait suite à des condamnations Pénales récentes d'élus locaux pour des faits non-intentionnels qui ont soulevé des interrogations essentielles pour le fonctionnement de la démocratie locale :

- un maire doit-il être tenu pour personnellement responsable et donc condamné pénalement pour des pollutions causées par une station d'épuration communale alors même que la commune soit ne disposait pas des moyens nécessaires pour effectuer les travaux d'épuration soit avait mis en oeuvre tous les moyens à sa disposition ?

- des accidents survenus à l'occasion de fêtes locales répondant à des traditions séculaires -telles que les courses de taureaux- justifient-ils la condamnation automatique pénale du maire de la commune où ces fêtes se déroulent ?

- plus généralement, tout accident survenu sur le territoire d'une commune -un défaut présenté par un lampadaire, une plaque d'égout mal installée, des nuisances sonores- doit-il conduire systématiquement à condamner pénalement l'exécutif local ?

- la sanction pénale personnelle de l'élu ne devrait-elle pas, au contraire, demeurer exceptionnelle et être réservée aux cas les plus graves, c'est-à-dire à ceux où le préjudice résulte d'une véritable faute personnelle et non d'une simple insuffisance de moyens, voire de l'ignorance d'un règlement complexe étant entendu que la commune, personne morale, demeurerait pénalement responsable dans les conditions prévues par le nouveau code pénal.

Le groupe de travail avait mis en évidence le fait que l'assimilation des élus locaux à des chefs d'entreprise amenait les juridictions répressives à adopter un raisonnement abstrait, qui ne tenait aucun compte des modalités concrètes d'exercice du mandat local et en particulier des contraintes auxquelles les élus locaux ont à faire face.

Le groupe de travail avait par ailleurs souligné que la généralisation de la mise en cause d'élus locaux pour des faits involontaires commis dans l'exercice de leur mission comportait un triple risque pour la démocratie locale : le risque d'un déficit de candidatures né d'un découragement des élus locaux, le risque d'une professionnalisation de la fonction d'élu local, le risque d'une paralysie de la gestion locale par le risque pénal.

Pour autant, il avait exclu toute démarche susceptible de créer une sorte d'immunité voire d'impunité au profit d'une catégorie de citoyens. Il avait de même refusé de créer un délit d'imprudence ou de négligence propre aux élus locaux.

Il avait retenu l'idée selon laquelle l'appréciation de la négligence ou de l'imprudence, s'agissant d'un élu local, ne pouvait faire abstraction des conditions dans lesquelles celui-ci exerce sa mission. Elle doit tenir compte des contraintes, notamment financières et techniques, auxquelles l'élu local doit faire face. Elle doit également intégrer les exigences de la démocratie qui veut que tout citoyen puisse accéder aux fonctions électives.

La proposition de loi permet donc la prise en considération par les tribunaux des contraintes inhérentes à la gestion locale lorsqu'ils auront à apprécier la responsabilité pénale des élus locaux pour imprudence ou négligence.

Le nouveau texte s'appliquerait aux maires et aux élus municipaux les suppléant, aux présidents et vice-présidents de la délégation spéciale, aux Présidents des établissements publics de coopération ainsi qu'aux présidents des conseils généraux et régionaux.

L'examen de cette proposition de loi a donné lieu, au sein de la commission des Lois, à un débat approfondi auquel ont participé Mme Nicole Borvo ainsi que MM. Christian Bonnet, Jean-Marie Girault, Robert Badinter. Maurice Ulrich, Jean-Paul Delevoye, Charles Jolibois, Guy Allouche, Michel Rufin, François Blaizot, Patrice Gelard, Lucien Lanier et Michel Dreyfus-Schmidt.

Certains commissaires ont évoqué la possibilité d'étendre la solution proposée à d'autres catégories de personnes que les élus locaux et notamment aux fonctionnaires d'autorité et aux présidents d'association.

L'idée a également été émise de substituer à cette solution un aménagement de la procédure en exigeant par exemple la saisine du juge administratif préalablement à l'engagement des poursuites pénales.

A l'issue de ce débat, la commission des Lois a adopté le texte de la proposition de loi qui lui était soumis par son rapporteur.

Le Sénat examinera cette proposition de loi le 26 octobre prochain à 15 heures lors de la séance qui -conformément à la récente reforme constitutionnelle- est désormais réservée par priorité à l'ordre du jour fixé par chaque assemblée.

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