N° 128

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2023

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 3

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊTS ET AFFAIRES RURALES

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : DÉVELOPPEMENT AGRICOLE
ET RURAL

Rapporteurs spéciaux : MM. Christian KLINGER et Victorin LUREL

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) : 1680, 1715, 1719, 1723, 1745, 1778, 1781, 1805, 1808, 1820 et T.A. 178

Sénat : 127 et 128 à 134 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Le total des dépenses publiques en direction de l'agriculture (25,5 milliards d'euros, contre 24 milliards d'euros en 2023 selon les montants communiqués par le ministère de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire) se répartit entre 5,3 milliards d'euros inscrits dans la mission « agriculture, alimentation, affaires rurales et forêt », 9,4 milliards d'euros provenant de financements européens et 8,5 milliards d'euros couvrant des dépenses fiscales et des dispositifs sociaux. La part de la mission dans le total des concours publics à l'agriculture augmente toutefois substantiellement en 2024 en raison de la forte revalorisation des crédits qui lui sont alloués.

I. UNE HAUSSE SUBSTANTIELLE DES CRÉDITS POUR ÉVITER LE SOUS-DIMENSIONNEMENT CONSTATÉ AU COURS DES EXERCICES PRÉCÉDENTS

A. UN DÉBUT DE RÉPONSE AU SOUS-DIMENSIONNEMENT JUSQU'ALORS CONSTATÉ DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'AGRICULTURE

Après une évolution substantielle de l'architecture de la mission entre 2022 et 2023 (crédits de la pêche transférés au Secrétariat d'État à la mer, programme supplémentaire destiné au soutien aux associations consacrée à la lutte contre les violences animales, réorganisation des compétences s'agissant des aides surfaciques/non surfaciques, plein exercice de la police alimentaire, etc.), ses contours se stabilisent cette année, exception faite des nouvelles actions consacrées à la planification écologique dans les programmes 149 et 206. En revanche, les moyens alloués connaissent une hausse sans précédent, en valeur absolue, en loi de finances initiale (+ 1,5 milliard d'euros, soit + 37,6 %).

Évolution des crédits en PLF 2024 par rapport à la LFI pour 2023

(en millions d'euros)

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programmes

LFI
pour 2023

PLF
pour 2024

Évolution

LFI
pour 2023

PLF
pour 2024

Évolution

149 - Compétitivité
et durabilité de l'agriculture,
de l'agroalimentaire, de la forêt (de la pêche et de l'aquaculture)

2 108,40

3 167,36

+ 50,2 %

2 100,71

2 762,59

+ 28,8 %

206 - Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation

657,54

1 035,12

+ 57,4 %

654,62

904,70

+ 38,2 %

215 - Conduite et pilotage
des politiques de l'agriculture

689,05

717,21

+ 4,1 %

675,00

697,41

+ 3,3 %

381 - Allègements du coût
du travail en agriculture

427,00

423,00

- 0,9 %

427,00

423,00

- 0,9 %

382 - Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

1,00

1,00

=

1,00

1,00

=

Total pour la mission AAFAR

3 882,99

5 343,69

+ 37,6 %

3 858,32

4 752,70

+ 23,2 %

Source : projet annuel de performances annexé au PLF pour 2024

Les rapporteurs spéciaux voient dans ce revirement un rattrapage opéré par le Gouvernement, après plusieurs années durant lesquelles le Sénat a souligné l'insuffisance des moyens alloués au secteur agricole : le décalage entre les propositions formulées en LFI et l'exécution constatée commandait d'ailleurs d'opérer cette mise à jour. En 2022, dernière année d'exécution connue, les crédits inscrits en LFI s'étaient révélés insuffisants, au cours de l'année, à hauteur de 30 %. Si l'on fait abstraction des deux nouveaux programmes créés en 2023 et des actions désormais spécifiquement consacrées au verdissement, le montant des crédits alloués à la mission dans le PLF 2024 correspond, peu ou prou, à l'exécution 2022. Les rapporteurs spéciaux constatent que cette démarche consistant à évaluer les crédits ouverts en LFI au plus près de la réalité des besoins, plutôt qu'à procéder par des ajustements successifs (par des mouvements de crédits ou des ouvertures de crédits en lois de finances rectificatives) répond davantage aux exigences liées au principe de sincérité budgétaire.

B. UN BUDGET QUI NE TRADUIT QUE PARTIELLEMENT LES NÉCESSAIRES EFFORTS À CONSENTIR POUR RENDRE SON ATTRACTIVITÉ AU SECTEUR

Dans l'attente du dépôt du projet de « pacte et de loi d'orientation et d'avenir agricoles », pour lequel les attentes sont fortes pour rendre au secteur son attractivité, le soutien aux travailleurs agricoles apparait mitigé au sein du PLF 2024. S'agissant des aides à l'installation, le désengagement progressif de l'État au bénéfice des régions trouve sa traduction budgétaire. Du fait de la transmission aux conseils régionaux de la gestion des aides non-surfaciques, en application de la PAC 2023-2027, incluant la « dotation aux jeunes agriculteurs » ainsi que les aides liées à la modernisation des installations, lesquelles constituent un vecteur indispensable avant toute transmission, l'action 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » voit ses crédits diminuer substantiellement : 123 millions d'euros pour 2024, contre 172 millions d'euros en 2023.

À l'inverse, l'État renforce les effectifs de certains de ses services, ce qui se traduit par une hausse des dépenses du titre 2. Les dépenses de personnel atteignent en 2024 un total de 996,5 millions d'euros en AE et CP (incluant les contributions au CAS Pensions) réparties entre les programmes 206 (390,4 millions d'euros) et 215 (606,1 millions d'euros), soit 44 millions d'euros supplémentaires par rapport à la LFI 2023 (+ 4,5 %).

Enfin, le dispositif d'exonérations de cotisations patronales sur bas salaires TO-DE (travailleurs ouvriers demandeurs d'emplois) bénéficiant à un employeur agricole qui souhaite recruter un travailleur saisonnier est reconduit : 71 000 entreprises, soit près de la moitié des structures du secteur de la production agricole employant des salariés, sont concernées pour un total d'exonérations représentant 31 % du volume global des heures salariées dans le secteur agricole, donnant lieu à compensation à la Mutualité sociale agricole (MSA). Compte tenu du désavantage compétitif que représente le coût du travail dans un secteur aussi concurrentiel, les rapporteurs spéciaux soulignent l'importance de ce type de dispositif, en ce qu'il permet en particulier de lutter contre le travail non déclaré.

II. UNE MISSION COMPRENANT DES PROGRAMMES HÉTÉROGÈNES AUX MOYENS DISPARATES

La mission comprend cinq programmes et contribue à des politiques publiques particulièrement hétérogènes. Il s'agit par ordre décroissant d'importance budgétaire des programmes 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt (3,17 milliards d'euros en autorisation d'engagement contre 2,1 milliards en 2022), 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation (1,03 milliard contre 657 millions d'euros en LFI 2023 en AE), 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » (717 millions d'euros contre 689 millions d'euros en 2023) ainsi que deux programmes plus récents, à savoir les programmes 382 « Soutien aux associations de protection animale et aux refuges » doté, comme l'an passé, d'un million d'euros et 381 « Allègements du cout du travail en agriculture » (423 millions d'euros en PLF 2024 contre 427 millions d'euros l'année précédente) pour un total de 5,3 milliards d'euros en AE.

Le programme 149 rassemble les dotations visant à soutenir les filières agricoles et forestières, notamment par la transformation des modèles de production, l'amélioration de la performance économique et environnementale de l'agriculture, le soutien aux revenus des producteurs et une répartition plus équilibrée entre les différents maillons des filières. Ces objectifs doivent contribuer à la souveraineté alimentaire et venir en soutien à l'économie.

Le programme 206 finance les démarches renforçant la durabilité de l'alimentation et prévenant les maladies végétales ou animales, ainsi que leurs effets sur l'homme, via le contrôle de l'utilisation des pesticides et du bien-être animal.

Le programme 215 rassemble les dotations allouées aux moyens en personnel et en fonctionnement de l'administration centrale et de certains services déconcentrés départementaux ou régionaux.

Le programme 382 finance le retrait d'animaux maltraités (transport, soins vétérinaires, hébergement, etc.) en collaboration avec les associations comme la Société protectrice des animaux par exemple.

Le programme 381 retrace une partie des allègements du coût du travail en agriculture, en compensant le manque à gagner pour la MSA.

III. UN « VERDISSEMENT » PROGRESSIF DE LA MISSION POUR MIEUX CONCILIER AGRICULTURE ET PRÉSERVATION DE L'ENVIRONNEMENT

A. 1,25 MILLIARD D'EUROS SUPPLÉMENTAIRES DIRECTEMENT CONSACRÉS À LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE

Une action « planification écologique » est créée dans chacun des programmes 149 et 206. Dans le premier cas, il s'agit de consacrer 1,04 milliard d'euros dans le cadre de dix sous-actions menées contre le dérèglement climatique et d'atténuation de ses effets : 250 millions d'euros consacrés au soutien au renouvellement forestier, 200 millions d'euros pour dynamiser l'aval bois - matériaux et 15 millions d'euros pour la préservation de la forêt en Guyane, 110 millions d'euros pour financer un plan « haies », 80 millions d'euros consacrés à la stratégie de décarbonation, tandis que 65 millions d'euros porteraient un « plan protéine » visant à structurer davantage les recherches sur les protéines végétales et 20 millions d'euros seraient consacrés à la réalisation d'un bilan-carbone au moment de la transmission des exploitations.

Au sein du programme 206, la nouvelle action consacrée à la planification écologique permettra de consacrer 250 millions d'euros à la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires.

B. LE RÔLE CLÉ DES OPÉRATEURS

La mission compte dix opérateurs qui lui sont budgétairement rattachés, parmi lesquels huit relèvent du programme 149 (Agence de services et de paiement, Centre national de la propriété forestière, FranceAgriMer, l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique, l'Institut français du cheval et de l'équitation, l'Institut national de l'origine et de la qualité, l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer et l'Office national des forêts). Les deux autres opérateurs sont rattachés, pour l'un au programme 206 (l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail - ANSES) et l'autre au programme 215 (l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture). Parmi ces dix opérateurs, huit exercent des missions en lien avec la transition écologique, dont quatre connaîtront, en 2024, une revalorisation de la subvention étatique versée : l'Office national des forêts (50,2 millions d'euros contre 43 millions d'euros l'an dernier), l'ANSES (121,6 millions d'euros contre 114 millions d'euros), l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique (25,9 millions d'euros contre 10,8 millions d'euros) et de l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer (109,5 millions d'euros contre 95,8 millions d'euros).

IV. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » (CAS DAR), DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'INNOVATION EN MATIÈRE AGRICOLE

A. SES CRÉDITS SONT RÉGULIÈREMENT SOUS-CONSOMMÉS

Ce CAS a été conçu pour soutenir la mise en oeuvre d'actions de recherche appliquée, d'études et d'expérimentations et de développement, pour détecter les innovations de terrain, permettre leur analyse et faciliter leur diffusion, notamment dans le cadre du Programme national de développement agricole et rural (PNDAR). Le programme 775 tend à financer le renouvellement par les agriculteurs de la conception des systèmes agricoles plus innovants et performants d'un point de vue économique et mettant en oeuvre des principes agro-écologiques. Il comprend principalement une action consacrée au « Développement et transfert » mobilisant 62,9 millions d'euros. Le programme 776 doté de 78 millions d'euros vise à soutenir l'innovation par l'émergence de projets, notamment dans le domaine de la transition agro-écologique, tout en favorisant une dynamique de capitalisation.

Le plafond de dépenses du CAS-DAR a été rehaussé de 15 millions d'euros pour atteindre 141 millions d'euros en 2024, un montant qui devrait rester, inférieur aux recettes, générées uniquement par la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. Ce différentiel qui se reproduit chaque année conduit le compte à présenter un solde comptable de 121,09 millions d'euros à fin 2022 soit bientôt l'équivalent d'une année de dépenses.

B. UN COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE CRITIQUÉ

Les comptes d'affectation spéciale doivent, conformément à la LOLF, présenter une « relation directe, par nature, entre la recette et la dépense ». Le différentiel, année après année, entre les dépenses et les recettes dans le CAS DAR illustre le fait que cette relation directe n'est pas avérée. Par ailleurs, ainsi que le souligne régulièrement la Cour des comptes, le CAS DAR déroge en tous points aux principes d'annualité et d'universalité budgétaires auxquels il est en théorie soumis, d'une part par la pratique systématique et massive des reports de crédits, d'autre part en isolant du budget général des politiques qui devraient en relever. Les rapporteurs spéciaux notent par exemple avec étonnement la contradiction qui consiste à conférer au programme 776 une mission d'appui à la « souveraineté alimentaire », alors même que c'est une politique publique d'autant plus générale qu'elle figure depuis 2022 dans l'intitulé même du ministère. Comme la Cour des comptes, ils invitent à une réflexion sur la rebudgétisation du compte.

Réunie le mardi 7 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission, après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » tels que modifiés par l'Assemblée nationale et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2023, 28 % des réponses attendues étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

PREMIÈRE PARTIE
UNE HAUSSE SUBSTANTIELLE DES CRÉDITS DE LA MISSION « AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT
ET AFFAIRES RURALES » (AAFAR) POUR ÉVITER LE SOUS-DIMENSIONNEMENT DES EXERCICES PRÉCÉDENTS ET « VERDIR » LE BUDGET

Comme beaucoup d'autres missions budgétaires des projets de loi de finances successifs, la mission « agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) fait l'objet d'un intitulé qui n'est que partiellement représentatif de l'effort budgétaire consenti à destination des politiques publiques afférentes.

En effet, en examinant cette mission, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ne sont formellement saisis que d'un cinquième environ des dépenses destinées au secteur agricole entendu au sens large. Le total des dépenses publiques en direction de l'agriculture, qui s'élèvera en 2024 à environ 25,5 milliards d'euros, contre environ 24 milliards d'euros en 2023 selon les montants communiqués par le Ministère de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), comprend en effet, en sus des 5,3 milliards d'euros figurant, à proprement parler, dans la mission, 9,4 milliards d'euros provenant de financements européens et 8,5 milliards d'euros couvrant des dépenses fiscales et des dispositifs sociaux.

La part de la mission dans le total des concours publics à l'agriculture augmente toutefois substantiellement en 2024 en raison de la forte revalorisation des crédits qui lui sont alloués (5,34 milliards d'euros en autorisations d'engagement contre 3,88 milliards votés en LFI 2023) du fait notamment de la création d'une nouvelle action consacrée à la planification écologique dans deux des programmes (cf. infra).

Cette hausse, importante si l'on se contente de comparer le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 et la loi de finances initiale (LFI) pour 2023, doit être considérablement nuancée, non seulement parce que le contexte inflationniste annihile une part de l'effort consenti, mais aussi parce que le Gouvernement, après plusieurs exercices de surexécution budgétaire sur la mission, aligne pour partie les crédits sollicités en LFI sur les montants exécutés antérieurement. La répartition de ces différents concours publics est récapitulée dans le tableau ci-après.

Concours publics à l'agriculture, l'alimentation et la forêt - total de 25,5 milliards d'euros

(Montants exprimés en milliard(s) d'euros)

Co-financements européens 9,4

Dispositifs sociaux et fiscaux nationaux 8,5

Dispositifs budgétaires nationaux 7,4

Mission AAFAR 5,3

Pilier I PAC

Aides directes couplées ou découplées 6,7

Aides découplées 5,7 :

- aides de base 3,7

- éco-régime 1,7

- aide redistributive complémentaire 0,68

- aide à l'installation des jeunes agriculteurs 0,12

Aides couplées 1 :

- filières animales (bovin, etc.)

- filières végétales (légumineuses, etc.)

Dépenses fiscales et sociales spécifiques à l'agriculture, inférieures à 100 millions d'euros

6,4

Programme 149

Compétitivité et durabilité agriculture, agroalimentaire, pêche, aquaculture 3,2

Programme 206

Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation alimentation

1

Programme 215

Conduite et pilotage des politiques agricoles

0,7

Programme 
381

Travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi (TO-DE)

0,42

Programme 382

Soutien aux associations de protection animale et aux refuges 0, 001

Pilier II PAC

Développement rural

2,4

- Indemnités compensatoires de handicaps naturels 0,72

- Via régions 0,7

- Mesures agro-environnementales et climatiques surfaciques 0,21

- Aide à la conversion à l'agriculture 0,2

Biologique

- Co-financement assurance récolte 0,19

Interventions hors plan stratégique national

0,3

Tarif réduit de gazole non routier travaux agricoles ou forestiers

1,6

Exonération coopératives agricoles 0,17

Programmes hors mission AAFAR

Crédit d'impôt « conversion à l'agriculture biologique »

0,16

Programme 143

Enseignement technique agricole 1,7

Programme 142

Enseignement supérieur et recherche agricole 0,4

Crédit d'impôt « sortie du glyphosate » 0,14

Source : Commission des finances du Sénat à partir de données du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA MISSION POUR 2024

Outre une volonté de « verdissement », objectif assigné au projet de loi de finances dans son ensemble, et qui fait l'objet de développements spécifiques (cf. infra III.), le budget 2024 de la mission « AAFAR » présente deux caractéristiques majeures.

En premier lieu, le projet de budget opère un rattrapage des moyens nécessaires à l'agriculture française, après plusieurs exercices caractérisés par un sous-dimensionnement des crédits.

En second lieu, il témoigne enfin des efforts qu'il convient de consentir pour garantir une meilleure attractivité au secteur agricole.

A. UN DÉBUT DE RÉPONSE AU SOUS-DIMENSIONNEMENT JUSQU'ALORS CONSTATÉ DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'AGRICULTURE

Après une évolution substantielle de l'architecture de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) entre 2022 et 2023 (crédits de la pêche transférés au Secrétariat d'État à la mer, programme supplémentaire destiné au soutien aux associations consacrée à la lutte contre les violences animales, réorganisation des compétences entre l'État et les collectivités s'agissant des aides surfaciques/non surfaciques, plein exercice de la police alimentaire, etc.), ses contours se stabilisent cette année, exception faite des actions consacrées à la planification écologique dans les programmes 149 et 206.

En revanche, les moyens alloués connaissent une hausse sans précédent, en valeur absolue, en loi de finances initiale (+ 1,5 milliard d'euros, soit + 37,62 %), principalement pour traduire le verdissement budgétaire d'une mission particulièrement concernée par l'enjeu écologique.

Deux des principaux programmes en termes de montants, à savoir les programmes 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » et 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » voient leurs crédits augmenter de plus de 50 % ainsi que l'illustre le tableau ci-après.

Toutefois, les éléments sur lesquels le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire dispose d'une marge de manoeuvre effective, en particulier le programme 215, demeurent contenus, ce qui permet au ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de prendre sa part dans l'objectif de réduction de la dépense publique.

Évolution des crédits en PLF 2024 par rapport à la LFI pour 2023

(en millions d'euros)

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programmes

LFI
pour 2023

PLF
pour 2024

Évolution

LFI
pour 2023

PLF
pour 2024

Évolution

149 - Compétitivité
et durabilité de l'agriculture,
de l'agroalimentaire, de la forêt (de la pêche et de l'aquaculture)

2 108,40

3 167,36

+ 50,2 %

2 100,71

2 762,59

+ 28,8 %

206 - Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation

657,54

1 035,12

+ 57,4 %

654,62

904,70

+ 38,2 %

215 - Conduite et pilotage
des politiques de l'agriculture

689,05

717,21

+ 4,1 %

675,00

697,41

+ 3,3 %

381 - Allègements du coût
du travail en agriculture

427,00

423,00

- 0,9 %

427,00

423,00

- 0,9 %

382 - Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

1,00

1,00

=

1,00

1,00

=

Total pour la mission AAFAR

3 882,99

5 343,69

+ 37,6 %

3 858,32

4 752,70

+ 23,2 %

775 - Développement
et transfert en agriculture

60,48

62,93

+ 4,1 %

60,48

62,93

+ 4,1 %

776 - Recherche appliquée
et innovation en agriculture

65,52

78,07

+ 19,2 %

65,52

78,07

+ 19,2 %

Total pour le CAS DAR

126,00

141,00

+ 11,9 %

126,00

141,00

+ 11,9 %

Total des crédits budgétaires consacrés à l'agriculture

4 008,99

5 484,69

+ 36,8 %

3 984,32

4 893,70

+ 22,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au PLF pour 2024

Les rapporteurs spéciaux voient aussi dans ce revirement un rattrapage opéré par le Gouvernement, après plusieurs années durant lesquelles le Sénat a souligné l'insuffisance des moyens alloués au secteur agricole : le décalage entre les propositions formulées en LFI et l'exécution constatée commandait d'opérer cette mise à jour1(*).

En effet, en 2022, dernier exercice dont l'exécution est connue, l'exécution budgétaire avait, comme en 2021, largement excédé la prévision initiale. Comme l'illustre le tableau ci-après, la loi de finances initiale pour 2022 avait abouti à ouvrir des crédits inférieurs de 30 % à ce qui avait finalement été nécessaire.

Exécution des crédits de la mission « AAFAR » sur l'exercice 2022

(en millions d'euros)

Programmes

 

Exécution 2021

Crédits ouverts en LFI 20222(*)

Total des crédits ouverts en 2022

Exécution 2022

Variation exécution 2022/2021

Écart exécution 2022/LFI 2022

149 « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires »

AE

2 365,7

1 774,9

3 555,9

3 264,9

899,2

1 490

CP

2 383,1

1 764,5

3 590,4

3 283

899,9

1 518,5

206 « Sécurité et qualité
sanitaires de l'alimentation »

AE

612

614,1

865,6

797,5

185,5

183,4

CP

608,3

611,3

845,5

791,7

183,4

180,4

215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture »

AE

604,8

641,1

658,4

602,5

- 2,3

- 38,6

CP

609

630,4

639

596,1

- 12,99

- 34,3

Total Mission

AE

3 582,5

3 030,1

5 079,8

5 075

1 492,5

2 044,9

CP

3 600,3

3 006,2

4 664,9

4 670,9

1 070,6

1 664,7

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du RAP 2022

Si l'on fait abstraction des deux programmes créés entre temps (le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture » et 382 » Soutien aux associations de protection animale et aux refuges ») et des nouvelles actions spécifiquement consacrées au verdissement, le montant des crédits alloués à la mission dans le PLF 2024 correspond donc, peu ou prou, à l'exécution constatée en 2022 et qui devrait être relativement proche pour 2023.

Les rapporteurs spéciaux constatent que cette démarche consistant à évaluer les crédits ouverts en LFI au plus près de la réalité des besoins, plutôt qu'à procéder par des ajustements successifs (par des mouvements de crédits ou des ouvertures de crédits en lois de finances rectificatives) répond davantage aux exigences liées au principe de sincérité budgétaire.

En particulier, ils considèrent qu'il n'est pas opportun de soutenir que des événements aléatoires n'auraient pas vocation à être budgétairement anticipés dans leur globalité : aussi regrettables soient ces aléas, et qu'elle que soit leur nature, ils sont malheureusement devenus le quotidien du secteur agricole. L'alignement des crédits du PLF 2024 sur les derniers exercices exécutés traduit donc bien le sous-dimensionnement de la mission lors des précédentes lois de finances initiale.

B. UN BUDGET QUI NE TRADUIT QUE PARTIELLEMENT LES NÉCESSAIRES EFFORTS À CONSENTIR POUR RENDRE SON ATTRACTIVITÉ AU SECTEUR

Le renouvellement des générations constitue un défi d'ampleur pour le secteur agricole. Alors que 43 % des agriculteurs sont âgés de plus de 55 ans et devraient être partis à la retraite d'ici 2030, et compte tenu du fait que désormais la moitié des nouveaux entrants dans le secteur n'est pas issu du monde agricole3(*), et ne dispose en conséquence d'aucun bien foncier agricole, la mise en place de politiques volontaristes pour attirer de nouveaux exploitants et travailleurs agricoles constitue une nécessité pour rétablir notre souveraineté alimentaire.

Cette démarche volontariste pour rétablir l'attractivité du secteur agricole doit concerner tous les aspects de la vie professionnelle des intervenants : l'accès à la profession par des formations de qualité, l'accès au foncier agricole, le bénéfice d'un revenu digne, un juste rapport de force avec les autres acteurs économiques, une fiscalité adaptée, etc. Se sont ainsi multipliées les initiatives législatives4(*), en particulier pour l'accès au foncier, que ce soit pour faciliter l'accès à la propriété, ou à la location (comme c'est le cas de 40 % des exploitants agricoles aujourd'hui).

Ces éléments devront trouver leur traduction dans le projet de » pacte et de loi d'orientation et d'avenir agricoles » à propos duquel les consultations5(*) se poursuivent, sans que les rapporteurs spéciaux ne disposent, à ce stade, d'un calendrier prévisionnel d'examen par le Parlement.

Au sein du présent projet de loi de finances, le soutien aux travailleurs agricoles apparait mitigé. S'agissant des aides à l'installation, le désengagement progressif de l'État au bénéfice des régions trouve ici sa traduction budgétaire. À l'inverse, l'État renforce les effectifs de certains de ses services, ce qui conduit à une hausse des dépenses du titre 2. Il poursuit également sa politique de soutien aux travailleurs agricoles.

1. La confirmation du transfert aux régions d'une partie de l'aide à l'installation-transmission

Le financement de l'aide à l'installation des agriculteurs provient à la fois de financements européens, alloués par l'intermédiaire des régions, de dispositifs fiscaux et de dotations budgétaires finançant des aides directes à l'installation ou des prêts bonifiés6(*).

Du fait de la transmission aux conseils régionaux de la gestion des aides non-surfaciques, en application de la PAC 2023-2027, incluant la « dotation aux jeunes agriculteurs » ainsi que les aides liées à la modernisation des installations, lesquelles constituent un vecteur indispensable avant toute transmission, l'action 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » voit ses crédits diminuer substantiellement : l'action 23 se voit allouer 123 millions d'euros pour 2024 (contre 172 millions d'euros en 2023) mais le cumul des crédits supplémentaires dont bénéficieront les régions et de cette action aboutissent au final à maintenir les aides à l'installation.

Les crédits de cette action ont donc vocation à se tarir partiellement dans les années à venir, ce qui constituera un point d'attention des rapporteurs spéciaux.

2. Une hausse des dépenses de personnels en lien avec de nouvelles activités de contrôles supportées par la mission

La mission est également caractérisée par une hausse des dépenses de personnel. Celles-ci atteignent en 2024 un total de 996,5 millions d'euros en AE et CP (incluant les contributions au CAS Pensions) réparties entre les programmes 206 (390,4 millions d'euros) et 215 (606,1 millions d'euros), soit 44 millions d'euros supplémentaires par rapport à la LFI 2023 (+ 4,5 %).

Cette évolution traduit notamment le recours à des personnels supplémentaires pour assurer des opérations de contrôle relevant auparavant, partiellement ou totalement, d'autres missions budgétaires (comme le contrôle de la sécurité alimentaire ou le contrôle des cosmétiques et tatouages) ainsi qu'à des personnels venant renforcer des missions de contrôle existantes mais ayant vocation à être accentuées (le respect de la législation sur les pesticides par exemple).

Pour le programme 215 « conduite et pilotage de l'agriculture » qui comprend à lui seul les deux-tiers des dépenses de personnel, cette évolution des crédits de personnel est principalement liée aux mesures détaillées dans le tableau ci-dessous.

Facteur pris en compte pour l'évaluation 2024 des dépenses de personnel du programme 215 « conduite et pilotage de l'agriculture » (hors CAS Pensions)

 

Exécution 2022

Estimatif 2023

PLF 2024

Exécution n- 1

387,59

404,88

421,64

Impact des transferts

- 0,23

0

- 6,69

Impact du schéma d'emplois

- 0,91

1,4

5,63

Mesures catégorielles

0,35

9,31

2

Mesures générales

5,99

10,46

7,28

(dont hausse du point d'indice)

(4,92)

 -

(4,29)

Glissement vieillesse technicité solde

3,42

4,39

4,57

Autres variations

- 1,37

16,41

14,41

Autres variations diverses (GIPA, CET, etc.)

- 11,87

- 1

1,39

Total

383,2

445,84

456,92

Source : réponse au questionnaire budgétaire

3. Des dispositifs d'allègement du coût du travail, en particulier via le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture (TO-DE) »

Le dispositif d'exonérations de cotisations patronales sur bas salaires TO-DE (travailleurs ouvriers demandeurs d'emplois) bénéficiant à un employeur agricole qui souhaite employer un travailleur saisonnier est reconduit cette année encore.

Les crédits y afférant sont retracés dans l'action 25 « Protection sociale » du programme 149 (cf supra).

Les allègements du coût du travail en agriculture, qui sont destinés à compenser le manque à gagner lié à cette exonération à la Mutualité Sociale Agricole (MSA), ont été isolés dans le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture ». Ce programme ne comprend qu'une seule action intitulée « Allègement du coût du travail de la main-d'oeuvre saisonnière » pour un montant de 423 millions d'euros en 2024 (contre 427 millions l'année précédente).

Cette action facilite l'embauche de travailleurs occasionnels pour réaliser des activités agricoles à travers une exonération partielle de cotisations patronales, pour un montant qui correspond au différentiel avec le coût des contrats concernés si ces derniers n'avaient bénéficié que des allégements généraux renforcés.

71 000 entreprises, soit près de la moitié des structures du secteur de la production agricole employant des salariés, sont concernées pour un total d'exonérations représentant 31 % du volume global des heures salariées dans le secteur agricole. Compte tenu du désavantage compétitif que pourrait représenter le coût du travail dans un secteur aussi concurrentiel, les rapporteurs soulignent l'importance de ce programme, en particulier en ce qu'il permet de lutter contre le travail non déclaré et la dégradation des conditions de travail qui en résulterait.

Enfin, il faut souligner qu'une partie de la compensation versée à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole provient, par ailleurs, du programme 149 (cf. supra).

II. UNE MISSION COMPRENANT DES PROGRAMMES HÉTÉROGÈNES AUX MOYENS DISPARATES

La mission comprend cinq programmes et contribue à des politiques publiques particulièrement hétérogènes. Il s'agit par ordre décroissant d'importance budgétaire des programmes 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt (« 3,17 milliards d'euros en autorisation d'engagement contre 2,1 milliards en 2022 »), 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation (1,03 milliard contre 657 millions d'euros en LFI 2023 en AE), 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » (717 millions d'euros contre 689 millions d'euros en 2023) ainsi que deux programmes plus récents, à savoir les programmes 382 « Soutien aux associations de protection animale et aux refuges » doté, comme l'an passé, d'un million d'euros et 381 « Allégements du cout du travail en agriculture » (423 millions d'euros en PLF 2024 contre 427 millions d'euros l'année précédente) pour un total de 5,3 milliards d'euros en AE.

A. LE PROGRAMME 149 « COMPÉTITIVITÉ ET DURABILITÉ DE L'AGRICULTURE, DE L'AGROALIMENTAIRE ET DE LA FORÊT » FORTEMENT REVALORISÉ

Ce programme rassemble les dotations visant à soutenir les filières agricoles et forestières, notamment par la transformation des modèles de production, l'amélioration de la performance économique et environnementale de l'agriculture, le soutien aux revenus des producteurs et une répartition plus équilibrée entre les différents maillons des filières. Ces objectifs doivent contribuer à la souveraineté alimentaire et venir en soutien à l'économie.

Il intervient dans le financement des aides nationales ou européennes en faveur des exploitations agricoles et des opérateurs des filières agroalimentaires, forestières et halieutiques.

La plupart de ces aides relèvent du second pilier de la politique agricole commune (PAC) à travers le Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (ou FEADER), telles que l'appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations, le soutien aux investissements du Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE), la dotation aux jeunes agriculteurs), le soutien au secteur de l'élevage dans les zones soumises à des contraintes naturelles principalement via les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN7(*)), les mesures en faveur de pratiques agricoles respectueuses de l'environnement et de la biodiversité (Mesures agro-économiques et climatiques, ou MAEC, et soutien à l'agriculture biologique) ainsi que les mesures contre la prédation.

Les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC)

Les mesures agroenvironnementales et climatiques permettent d'accompagner les exploitations agricoles qui s'engagent dans le développement de pratiques combinant performance économique et performance environnementale, ou dans le maintien de telles pratiques lorsqu'elles sont menacées de disparition.

Initialement instaurées dans le cadre de la PAC 2014-2020, elles prennent la forme d'aides ou d'indemnités compensatoires et contribuent à la préservation de la qualité de l'eau, de la biodiversité, des sols ou à la lutte contre le changement climatique. Les paramètres initiaux des MAEC (montant et forme du soutien en fonction du type d'activités) ont été définis en mai 2014 par le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire (CSO). Ces enjeux locaux sont donc très variables d'un territoire à un autre : dans les outre-mer par exemple, les MAEC sont principalement sectorielles (banane, canne, vergers, etc.)8(*).

Outre le fait qu'elles répondent à des enjeux localisés, les MAEC peuvent aussi s'inscrire dans une logique de système (système herbivore, etc.) ou contribuer à la préservation des ressources génétiques : sont prévus dans ce cadre des financements pour les races animales et végétales menacées ainsi que pour l'apiculture.

En 2022, les MAEC et les aides à l'agriculture biologique ont représenté en tout 418 millions d'euros, pour 64 500 dossiers traités.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2023, la gouvernance des aides a été repensée : l'État est désormais l'autorité de gestion des aides surfaciques (MAEC, aides à l'agriculture biologique, etc.) tandis que les régions sont en charge de la gestion des aides non surfaciques, par exemple l'attribution des aides à l'installation versées dans le cadre du FEADER. 

Le périmètre des MAEC devra probablement être ajusté dès lors que le plan stratégique national (PSN) français entrera en vigueur. À l'initiative de la commission européenne, chacun des États-membres de l'Union Européenne doit définir un plan stratégique national (PSN), qui constitue la feuille de route agricole des États européens. Le projet de PSN français a été approuvé par la commission mais la phase de consultation avec les acteurs nationaux se poursuit, alors même que la définition d'une stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), prévue par la loi du 22 août 2021, dite loi « Climat et résilience »9(*), aurait dû intervenir au plus tard le 1er juillet 2023.

Source : Site Internet du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire10(*)

Le programme 149 contribue à la souveraineté alimentaire française et au développement de l'emploi et de l'activité économique dans les territoires. Il retrace principalement les cofinancements nationaux des mesures du deuxième pilier de la Politique agricole commune (PAC) dans le cadre de huit actions : adaptation des filières à l'évolution des marchés (action 21), gestion des crises et des aléas de la production agricole (action 22), appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles (action 23), gestion équilibrée et durable des territoires (action 24), protection sociale (action 25), gestion durable de la forêt et développement de la filière bois (action 26), moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions (action 27), ainsi que la nouvelle action 29 consacrée à la planification écologique qui mobilisera 1,03 milliard d'euros et qui explique, presque à elle seule, les deux-tiers de la hausse des crédits du programme.

Au sein de ce programme, outre cette nouvelle action, quatre sous-actions ou opérateurs connaissent en 2024 une évolution sensible de leurs crédits : le fonds avenir bio, l'intervention en faveur des filières ultra marines, le fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) ainsi que les exonérations de charges sociales pour les travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi (TO-DE).

Le Fonds Avenir Bio, mis en place dans le cadre du programme Ambition Bio 2017, vise à soutenir des projets de développement et de consolidation des filières biologiques. Il accompagne financièrement les opérateurs économiques ayant des projets collectifs impliquant l'amont et l'aval des filières. Une nouvelle augmentation des moyens est prévue à partir de 2024 (+ 5 millions d'euros par an), ce qui permettra de porter son enveloppe annuelle à hauteur de 18 millions d'euros contre 13 millions d'euros en 2023 (8 millions d'euros initialement, majorés de 5 millions d'euros ces deux dernières années), afin de soutenir l'effort de structuration des filières biologiques dans un secteur particulièrement frappé par la situation inflationniste.

La sous-action « Intervention en faveur des filières ultra-marines » comprend les crédits du Comité interministériel des Outre-Mer (CIOM), certains crédits de l'Office de développement de l'économie agricole d'outre-mer (ODEADOM) ainsi que les crédits du plan urgence Guyane. Jusqu'en 2023, les crédits du CIOM s'élevaient à 45 millions d'euros par an conformément aux engagements pris par le Président de la République en octobre 2019.

Le Comité interministériel des outre-mer (CIOM)

Lancé par Nicolas SARKOZY, puis redynamisé par Édouard PHILIPPE, le comité interministériel des outre-mer (CIOM) a pour objectif de fluidifier l'action publique dans les outre-mer et d'assurer le suivi des mesures figurant dans le livre bleu des outre-mer. Plusieurs des actions suivies dans le cadre du CIOM sont donc portées budgétairement par la mission AAFAR.

Ces crédits financent différentes mesures et filières : le régime spécifique d'approvisionnement, les actions en faveur des productions animales (primes animales, importation d'animaux vivants, structuration de l'élevage), les productions végétales de diversification, la filière canne-sucre-rhum, la filière banane, mais aussi la protection de la forêt amazonienne.

Lors du CIOM qui s'est tenu au mois de juillet 2023, la Première ministre a annoncé un soutien renforcé pour atteindre les objectifs des plans de souveraineté alimentaire élaborés par les territoires ultramarins à hauteur de 15 millions d'euros supplémentaires dès 2024, pour atteindre un montant total de crédits du complément national CIOM de 60 millions d'euros. Le CIOM du mois de juillet a également été l'occasion pour le Gouvernement de procéder à plusieurs annonces spécifiques aux outre-mer comme le classement de la canne à sucre parmi les « cultures mineures » concernant l'encadrement des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytosanitaires, afin de faciliter les demandes d'extension d'usage de la canne à sucre, par exemple à des produits phytosanitaires.

Source : Site Internet du Ministère de l'Intérieur et des Outre-Mer11(*)

Sera également ré-abondé, en 2024, le fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA). Créé en 2010, ce fonds a pris le relai du régime de garantie contre les calamités agricoles qui existait depuis 1964. Il est en effet prévu une enveloppe de 275,5 millions d'euros pour le FNGRA. Aux crédits alloués à ce fonds s'ajoutent le produit, qui lui est dévolu, de la taxe additionnelle sur les contrats d'assurance agricole, dont le produit augmente à la suite d'une revalorisation du taux appliqué et d'une augmentation progressive du taux de couverture (120 millions d'euros), ainsi que l'enveloppe de FEADER dévolue aux subventions à l'assurance récolte (184,5 millions d'euros en moyenne par an pour la programmation 2023 à 2027).

Les 20 millions d'euros supplémentaires inscrits au PLF pour 2024 correspondent aux arbitrages arrêtés lors de la réforme de l'assurance récolte, qui prévoit une montée en puissance progressive des financements de l'État.

Cet effort budgétaire résulte de la réforme de l'assurance récolte en 202212(*). Depuis lors, le système assurantiel du secteur agricole repose sur un partage rééquilibré du risque entre l'État, les agriculteurs et les assureurs afin d'accompagner davantage le secteur qui subit la multiplication des aléas (épisodes climatiques d'ampleur, crises sanitaires, incendies, dégradations commises par des tiers, vol de matériel agricole, impact de la situation internationale sur les cours de matière première, etc.) et alors que les acteurs sont parfois contraints de renoncer à ce type d'assurance pour des motifs économiques. L'année 2024 constituera la deuxième année d'application de la réforme qui devrait à terme aboutir à une couverture des risques à « trois étages » :

- une absorption des risques de faible intensité à l'échelle individuelle de l'exploitation agricole ;

- une mutualisation entre les territoires et les filières concernant les risques d'intensité moyenne ;

- une indemnisation directe de l'État contre les risques dits « catastrophiques ».

Les exonérations de charges sociales pour les travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi (TO-DE) font également l'objet d'un effort budgétaire : sont sollicités 155 millions d'euros en PLF pour 2024, contre 134 millions d'euros en LFI pour 2023 au sein du programme 149, auxquels s'ajoutent 423 millions d'euros inscrits au programme 381.

Alors qu'entre 2019 et 2022, le dispositif était financé par une fraction de la TVA et par crédits budgétaires du ministère chargé de l'agriculture, il est depuis financé intégralement, comme avant 2019, sur crédits budgétaires du ministère chargé de l'agriculture. Ainsi, la part des exonérations correspondant aux allégements généraux n'est plus compensée par une fraction de TVA mais par les crédits ouverts sur le programme budgétaire 381 créé à cette fin (cf. infra). Le surplus d'exonération lié au maintien d'un plateau d'exonération totale à 1,2 SMIC par rapport aux allègements généraux, reste compensé sur les crédits du programme budgétaire 149. Les estimations ont été réalisées en tenant compte des prévisions d'évolution du SMIC, en raison de la forte élasticité des rémunérations des travailleurs saisonniers à ce salaire minimum, ce qui en fait le principal facteur d'évolution du coût du dispositif TO-DE13(*).

B. LE PROGRAMME 206 « SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L'ALIMENTATION »

Placé sous la responsabilité de la direction générale de l'alimentation (DGAL), le programme 206 est doté, pour 2024, d'un milliard d'euros en AE et de 904,7 millions d'euros en CP, soit des hausses respectives de 57,4 % et de 38,2 % par rapport à la LFI 2023.

Il finance les démarches renforçant la durabilité de l'alimentation et prévenant les maladies végétales ou animales, ainsi que leurs effets sur l'homme, via le contrôle de l'utilisation des pesticides et du bien-être animal. Ces dotations sont regroupées au sein de sept actions : santé, qualité et protection des végétaux (action 01), santé et protection des animaux (action 02), sécurité sanitaire de l'alimentation (action03), actions transversales (action 04), élimination des cadavres et des sous-produits animaux (action 05), mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation (action 06), qualité de l'alimentation et offre alimentaire (action 08) ainsi qu'une nouvelle action (action 09, dotée de 250 millions d'euros) consacrée à la planification écologique, et plus spécifiquement dédiée à la stratégie de réduction des produits phytosanitaires.

Le cofinancement de certaines activités par l'Union européenne donne lieu à l'encaissement de fonds de concours (FDC). Sont ainsi attendus 8,2 millions d'euros en 2024 : 2,8 millions d'euros sur l'action 01, dont 1,5 million d'euros pour les interventions d'urgence sur les foyers de nuisibles et 1,3 million d'euros pour leur surveillance, ainsi que 3,4 millions d'euros sur l'action 02 et 2 millions d'euros sur l'action 03 pour la lutte contre les zoonoses dans la chaîne alimentaire.

Le programme 206 ne porte aucune dépense fiscale.

Il s'appuiera en 2024 sur un plafond de 5 158 ETPT - expliquant les 390,4 millions d'euros de dépenses de titre 2 -, soit 90 de plus qu'en 2023, auxquels s'ajoutent 60 postes transférés depuis le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie », géré par la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) au titre de la police unique en matière de sécurité sanitaire de l'alimentation : sur ces 150 effectifs supplémentaires, 23 seront affectés à l'administration centrale et 127 aux services régionaux et départementaux.

Trois objectifs et six indicateurs sont associés au programme 206. Le premier objectif est de favoriser le changement de pratiques afin de préserver la santé publique et l'environnement.

Le nombre d'autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits contenant du glyphosate demeure difficile à anticiper dès lors que le ministère indique que « les évolutions dépendent de la décision de renouvellement ou non de l'approbation du glyphosate qui sera prise par la Commission européenne à l'expiration de l'approbation actuelle ». Le pourcentage de bovins, porcs et oiseaux traités à la colistine14(*) diminue : il serait de 3,4 % entre 2023 et 2026, au lieu de 3,7 % dans la prévision antérieure et de 4,7 % en 2019. D'autre part, le soutien massif de la mission « Plan de relance » a conduit la totalité des départements à être couverts par un projet alimentaire territorial (PAT).

Le deuxième objectif vise à évaluer, prévenir et réduire les risques sanitaires à tous les stades de la production.

Le troisième objectif a trait à la réactivité et à l'efficience du système de contrôle sanitaire. Le taux de réalisation des exercices de préparation à la gestion des épizooties a nettement progressé puisqu'il est passé de 25 % à 55 % entre 2022 et 2023 et devrait être de 80 % en 2024, même si l'organisation des jeux olympiques et paralympiques en 2024, qui mobiliseront la DGAL et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) - qui seront sollicités - devrait conduire à une diminution mécanique de ces exercices de préparation. Les deux sous-indicateurs concernant le délai de traitement des dossiers de contrôle et leur complétude sont satisfaisants, avec respectivement moins de trois semaines et de 83 % à 86 % sur les années considérées. L'annonce par la Première ministre d'une hausse de 10 % des contrôles dans les abattoirs et de 80 % dans les établissements de vente directe en 2024 devra être suivie.

C. LE PROGRAMME 215 « CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L'AGRICULTURE »

Ce programme rassemble les dotations allouées aux moyens en personnel et en fonctionnement de l'administration centrale et de certains services déconcentrés départementaux ou régionaux pour le pilotage et la mise en oeuvre opérationnelle sur tout le territoire des politiques publiques portées par le ministère, hors celles relevant du secteur sanitaire (programme 206) et de l'enseignement à travers le programme 143 « enseignement technique agricole » relevant de la mission « Enseignement scolaire ».

Ses crédits sont rassemblés dans 4 actions : moyens de l'administration centrale (action 01), évaluation de l'impact des politiques publiques et information économique (action 02), moyens des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, des directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (action 03) et moyens communs (action 04).

Géré par le secrétariat général du ministère, le programme comprend les moyens de personnel et de fonctionnement en matière d'accessibilité pour les usagers, de développement des systèmes d'information, de projets immobiliers, de formation continue, d'action sanitaire et sociale ou encore de communication.

L'enveloppe sollicitée pour 2024 s'élève à 717,2 millions d'euros en AE et à 697,4 millions d'euros en CP, incluant 6 millions d'euros de fonds de concours (FDC), soit une hausse de respectivement 4,1 % et 3,3 % par rapport à l'exercice 2023.

D. LE PROGRAMME 382 « SOUTIEN AUX ASSOCIATIONS DE PROTECTION ANIMALE ET AUX REFUGES ».

Le programme 382, qui comporte une seule action « Protection animale », a été créé par la LFI pour 2023 à la faveur de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement en application du troisième alinéa de l'article 49 de la Constitution. Comme l'an dernier, il est doté d'un million d'euros en AE et en CP, répartis à parts égales entre des charges de fonctionnement (titre 3) et des dépenses d'intervention (titre 6).

Dans la continuité de réformes prises sur le fondement de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, le programme finance le retrait d'animaux maltraités 15(*) (transport, soins vétérinaires, hébergement, etc.) en collaboration avec les associations comme la Société protectrice des animaux, la Fondation Brigitte Bardot et l'oeuvre d'assistance aux bêtes d'abattoir.

Les actes de cruauté peuvent conduire, suivant les cas, le procureur de la République, le juge d'instruction ou le président du tribunal judiciaire, par ordonnance motivée prise sur les réquisitions du premier et après avis d'un vétérinaire, à prononcer un placement ou une cession dans les conditions prévues à l'article 99-1 du code de procédure pénale.

III. UN « VERDISSEMENT » PROGRESSIF DE LA MISSION POUR MIEUX CONCILIER AGRICULTURE ET PRÉSERVATION DE L'ENVIRONNEMENT

La loi de finances pour 202016(*) a prévu que le Gouvernement remette au Parlement, en annexe à chaque projet de loi de finances, un rapport consacré à « l'impact environnemental du budget ». Le PLF pour 2024 contiendrait 29 % de crédits favorables à l'environnement17(*), contre 25 % lors du dépôt du PLF 2023, contribuant au verdissement budgétaire progressif.

Ce résultat est obtenu en comptabilisant « les crédits budgétaires, taxes affectées et dépenses fiscales ayant un impact favorable sur l'environnement ».

En l'espèce, le budget porte 2,3 milliards d'euros visant à préserver la biodiversité cultivée et à accompagner la transition écologique de l'agriculture. À l'inverse, « en cohérence avec le reste de la méthodologie du budget vert », quatre actions ou sous-actions du programme 206 sont désormais cotées comme neutres, soit qu'elles correspondent essentiellement à des dépenses de personnel, soit « du fait de l'absence de consensus scientifique clair ».

A. 1,25 MILLIARD D'EUROS SUPPLÉMENTAIRES DIRECTEMENT CONSACRÉS À LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE

Comme indiqué supra, une action « planification écologique » est créée dans chacun des programmes 149 et 206.

Dans le premier cas, il s'agit de consacrer 1,04 milliard d'euros à dix sous-actions menées dans le cadre de la lutte contre le dérèglement climatique et afin d'atténuer ses effets notamment par la décarbonation, mais aussi en réduisant la pression sur la biodiversité et en gérant mieux les ressources naturelles.

La filière bois fait l'objet d'un effort particulier avec 250 millions d'euros consacrés au soutien au renouvellement forestier, 200 millions d'euros pour dynamiser l'aval bois - matériaux et 15 millions d'euros pour la préservation de la forêt en Guyane.

En parallèle, 110 millions d'euros sont inscrits en AE pour financer un plan « haies ». En effet, l'extension de la taille moyenne des exploitations a conduit à la disparition d'un très grand nombre de haies ce qui est particulièrement néfaste pour la biodiversité.

Enfin, 80 millions d'euros seront consacrés à la stratégie de décarbonation, tandis que 65 millions d'euros sont inscrits pour porter un » plan protéine » visant à structurer davantage les recherches sur les protéines végétales et que 20 millions d'euros seront consacrés à la réalisation d'un bilan-carbone au moment de la transmission des exploitations.

Au sein du programme 206, la nouvelle action consacrée à la planification écologique permettra de consacrer 250 millions d'euros à la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires.

B. LE RÔLE CLÉ DES OPÉRATEURS

La mission compte dix opérateurs qui lui sont budgétairement rattachés, parmi lesquels huit relèvent du programme 149 (Agence de services et de paiement, Centre national de la propriété forestière, FranceAgriMer, l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique, l'Institut français du cheval et de l'équitation, l'Institut national de l'origine et de la qualité, l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer et l'Office national des forêts). Les deux autres opérateurs sont rattachés, pour l'un au programme 206 (l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail) et l'autre au programme 215 (l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture).

Parmi ces opérateurs, seuls l'agence de services et de paiement et l'Institut français du cheval et de l'équitation n'exercent pas de missions directement en lien avec la transition écologique. Cela n'empêche pas les crédits de ces deux derniers opérateurs d'être revalorisés en 2024, en raison de missions spécifiques.

L'Agence de services et de paiement (ASP) - bénéficie d'une revalorisation de ses subventions de fonctionnement et d'investissement (à hauteur de 16 millions d'euros, dont 4 millions d'euros sont dédiés à la compensation des mesures salariales et 12 millions d'euros seront consacrés à la sécurisation des projets de l'agence en matière de systèmes d'information, pour un total de 168,8 millions d'euros en PLF 2024, contre 152,7 millions d'euros en LFI pour 2023. La mise en oeuvre de la PAC 2023-2027 constitue en effet un fort enjeu pour l'établissement et nécessite des moyens budgétaires importants pour financer les dépenses de fonctionnement et d'investissement de ses systèmes d'informations, notamment pour l'implémentation de technologies numériques de pointe (lac de données, recours à l'intelligence artificielle).

L'institut français du cheval et de l'équitation, opérateur unique de l'État pour la filière équine, verra ses crédits passer de 43,47 à 45,18 millions d'euros.

Parmi les huit autres opérateurs, quatre bénéficient d'une consolidation de leurs moyens, entre autres afin de faire face à la densification progressive de leurs missions.

C'est le cas de l'Office national des forêts (50,2 millions d'euros en PLF 2024 contre 43 millions d'euros en LFI 2023) dont la revalorisation des crédits s'explique principalement par le renforcement du dispositif de prévention des incendies et de contrôle sur l'ensemble du territoire métropolitain, mais également par la volonté de financer les emplois supplémentaires demandés sur les missions d'intérêt général (MIG) « adaptation au changement climatique » et « risques ».

L'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), unique opérateur du programme 206, est placée sous la responsabilité de six directions d'administration centrale, ce qui témoigne de la transversalité de ses missions.

Aux subventions étatiques qui s'élèveront en 2024 à 121,6 millions d'euros (+ 6,2 %), auxquelles le MASA contribuera à hauteur de 77,4 millions d'euros (+ 7,1 %), s'ajoutent 27,7 millions d'euros via l'affectation du produit écrêté de quatre taxes. La hausse des moyens de l'ANSES répond à l'extension de ses prérogatives (contrôle des cosmétiques et tatouages, jusqu'alors partagé avec l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, création d'un observatoire pour la qualité de l'environnement intérieur des bâtiments, etc.).

C'est également le cas de l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique dont le financement étatique passera en 2024 de 10,8 à 25,9 millions d'euros, de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (114 à 121 millions d'euros) et de l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer (de 95,8 à 109,5 millions d'euros en AE comme en CP).

L'Office de développement de l'économie agricole (ODEADOM)

Établissement public administratif (EPA) fondé en 1984, placé sous la tutelle du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, d'une part, et du ministère des outre-mer, d'autre part, l'Office de développement de l'économie agricole (ODEADOM) est chargé d'accompagner cinq départements et régions d'outre-mer au sens de l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion) et de trois collectivités d'outre-mer18(*) régies par l'article 74 (Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon) dans leur politique de développement durable de l'économie agricole. Une convention avec Wallis-et-Futuna est par ailleurs en cours de rédaction.

Financé à hauteur de 90 % sur les crédits du programme 149, l'ODEADOM perçoit le reliquat - 6 millions d'euros - du programme 123 de la mission outre-mer qui permet aux directions de l'alimentation, de l'agriculture et des forêts (DAAL) d'apporter une contribution à des projets contribuant aux objectifs de l'ODEADOM.

L'ODEADOM est également l'organisme payeur du régime spécifique d'approvisionnement (RSA) : le RSA vise à « garantir l'approvisionnement des régions ultrapériphériques en produits agricoles essentiels et à pallier les surcoûts induits par l'ultrapériphéricité de ces régions19(*)«. Prenant le relais de mesures spécifiques d'approvisionnement des outre-mer qu'avait initié le POSEIDOM20(*), devenu le POSEI21(*), le RSA peut prendre la forme d'exonérations de droits d'importation ou d'aides pour l'approvisionnement. Les collectivités éligibles (La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Mayotte) ont un recours très contrasté au dispositif : très prisé à La Réunion où le tissu économique facilite l'accès au dispositif, il est à l'inverse fréquent que Mayotte ou la Guyane n'utilisent pas des crédits pourtant destinés à lutter contre la vie chère.

Source : projet annuel de performances, annexé au projet de loi de finances pour 2024

Les trois derniers opérateurs voient leurs moyens se stabiliser, voire légèrement diminuer, pour des raisons conjoncturelles :

- le Centre national de la propriété forestière bénéficiera de 16,45 millions d'euros en AE, contre 16,8 millions en LFI 2023 ;

FranceAgriMer verra ses AE diminuer de 900 000 euros (de 186,4 à 185,5 millions d'euros) principalement en raison du transfert au Secrétariat d'État à la mer d`emplois dédiés à la mission « pêche ;

- l'Institut national de l'origine et de la qualité bénéficiera d'une très légère augmentation de sa subvention pour charges de service public (18,2 millions d'euros en 2024 contre 18,02 millions d'euros en 2023).

SECONDE PARTIE
ANALYSE DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » (CAS-DAR)

I. UN COMPTE DÉDIÉ À L'INNOVATION EN MATIÈRE AGRICOLE

Le Compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CAS-DAR) a pour objet d'accompagner la transformation des systèmes agricoles et de favoriser la transition des filières face aux nouveaux défis. Il retrace en recettes le produit de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles prévue à l'article 302 bis MB du code général des impôts et en dépenses, les opérations relatives au développement agricole et rural.

Ce CAS a été conçu pour soutenir la mise en oeuvre d'actions de recherche appliquée, d'études et d'expérimentations et de développement, pour détecter les innovations de terrain, permettre leur analyse et faciliter leur diffusion, notamment dans le cadre du Programme national de développement agricole et rural (PNDAR).

Son plafond de dépenses a été rehaussé de 15 millions d'euros pour atteindre 141 millions d'euros en 2024, un montant qui devrait rester, comme lors des précédents exercices, inférieur aux recettes générées par la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. Cette taxe est assise sur le chiffre d'affaires de l'année précédente ou du dernier exercice clos et comprend une part forfaitaire « comprise entre 76 euros et 92 euros par exploitant et d'une partie variable fixée à 0,19 % jusqu'à 370 000 euros de chiffre d'affaires et à 0,05 % au-delà »22(*).

A. LE PROGRAMME NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL (PNDAR) 2022-2027

Le compte est étroitement lié au PNDAR car il en finance les objectifs. Le PNDAR 2014-2020 prolongé en 2021 visait à soutenir l'orientation de l'agriculture française vers la triple performance économique, environnementale et sociale.

Le PNDAR 2022-2027 met l'accent sur la transition agro-écologique afin de prendre en compte la dimension environnementale et la création de valeur économique. Il tend à favoriser une diffusion plus large des connaissances et des méthodes en agro-écologie, notamment s'agissant des « innovations de rupture »23(*).

Ayant réduit les 21 objectifs du précédent PNDAR à 9, le PNDAR 2022-2027 cible d'avantage son périmètre d'action : il comprend un volet de mobilisation en faveur de l'économie, de l'emploi et des territoires, un volet d'autonomie vis-à-vis des ressources fossiles et d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre, un volet d'amélioration de la résilience de l'agriculture et des systèmes alimentaires face aux changements globaux et aux aléas biotiques, climatiques et économiques, et un volet de bien-être animal.

Le CAS-DAR finance les démarches entreprises au titre de 9 objectifs, dans le cadre des programmes 775 et 776.

Les neuf objectifs du PNDAR

1) La création des chaînes de valeur équitables favorisant une relocalisation des productions agricoles et la compétitivité des filières et des entreprises ;

2) Le renouvellement des générations en agriculture par l'accompagnement de l'installation et la transmission, ainsi que l'amélioration de la qualité de vie au travail et les démarches de réflexion sur le sens des métiers en agriculture ;

3) La réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture, et le développement des techniques permettant de stocker du carbone et sa valorisation ;

4) L'autonomie protéique et azotée de l'agriculture française et des territoires ;

5) La valorisation et préservation de l'agro-biodiversité ;

6) L'adaptation des systèmes de production animale et végétale face aux aléas et au changement climatique, en s'appuyant notamment sur une gestion économe et efficiente de l'eau ;

7) La gestion intégrée de la santé animale et végétale ;

8) L'amélioration du bien-être animal ainsi que la poursuite des transitions pour rester acteur des marchés et générer de la valeur au sein des filières ;

9) La mobilisation du levier du numérique pour soutenir la conception, le pilotage, le déploiement et la valorisation de systèmes de production agricole innovants et performants.

À cet effet, le programme mobilise le réseau des chambres d'agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), les organismes de sélection animale (OS), les dynamiques de groupes, les démarches territorialisées et les approches inter-filières agricoles.

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

B. DES PROGRAMMES TOURNÉS VERS LE DÉVELOPPEMENT ET LA RECHERCHE

1. Le programme 775 « Développement et transfert en agriculture »

Ce programme tend à financer le renouvellement par les agriculteurs de la conception des systèmes agricoles plus innovants et performants d'un point de vue économique, environnemental et social, en mettant en oeuvre des principes agro-écologiques24(*). Il comprend deux actions, une action principale consacrée au « Développement et transfert », mobilisant 62,9 millions d'euros, soit 99,9 % des crédits de la mission (cf. infra pour le détail des interventions conduites) et une action regroupant les fonctions supports pour 74 400 euros.25(*)

2. Le programme 776 « Recherche appliquée et innovation en agriculture »

Le programme 776 vise à soutenir le cercle vertueux de l'innovation dès l'émergence des projets, notamment dans le domaine de la transition agro-écologique, tout en favorisant une dynamique de capitalisation, de diffusion massive, impliquant notamment le conseil et la formation agricole26(*). Ses crédits sont rassemblés au sein de deux actions consacrées à la « Recherche appliquée et [à l'] innovation » et aux « Fonctions supports ».

C. LA RECONDUCTION DE LA MAQUETTE DE PERFORMANCE DU CAS-DAR

Chacun des deux programmes est doté d'un objectif qui a été reconduit en 2024.

Pour le programme 775, l'objectif est le suivant : « Orienter l'action des structures chargées du conseil aux agriculteurs et de l'accompagnement des démarches collectives de développement, en cohérence avec les objectifs principaux du PNDAR : accompagner les transitions des exploitations agricoles vers des systèmes plus résilients et sobres en intrants, tenant compte des besoins des agriculteurs, des consommateurs et des attentes des citoyens, par le conseil dans le cadre de démarches collectives, le transfert de connaissances, de méthodes et d'outils actionnables par les agriculteurs, le développement des compétences ».

Il vise à transmettre aux agriculteurs les éléments à caractère scientifique, organisationnel et technique nécessaires à l'évolution de leur activité vers une agriculture performante, du point de vue économique, environnemental et social.

S'agissant du programme 776, l'objectif est le suivant : « Renforcer le continuum entre recherche et innovation agricole pour accélérer l'émergence et l'appropriation d'innovations répondant aux enjeux d'une quadruple performance sociale, économique, sanitaire et environnementale. »

En effet, la recherche ne peut être coupée de son application dans le monde agricole. Il convient de développer des partenariats et des synergies entre l'ensemble des acteurs que sont les instituts techniques agricoles, les chambres d'agriculture, les organismes de développement agricole et rural, la recherche publique, les établissements d'enseignement supérieur et technique agricole.

II. UNE SOUS-CONSOMMATION CHRONIQUE DES CRÉDITS

Les crédits du CAS-DAR contribuent à la souveraineté alimentaire, à la résilience aux aléas économiques, climatiques et sanitaires, notamment via la transition agro-écologique des exploitations agricoles vers des systèmes plus sobres.

A. DES RECETTES RÉGULIÈREMENT SUPÉRIEURES AU PLAFOND DEPUIS 2018

Le plafond du CAS-DAR a été rehaussé de 15 millions d'euros dans le PLF 2024 pour atteindre 141 millions d'euros, après plusieurs années de stabilité à 126 millions d'euros.

Les rapporteurs spéciaux se réjouissent du fait que cette recommandation d'un rehaussement du plafond, portée par leurs prédécesseurs, aient enfin été prise en compte.

En effet, il n'est pas durablement justifiable de constater un différentiel important entre les recettes et les dépenses d'un compte d'affectation spéciale, justement fait pour contourner le principe de non-affectation et mettre en regard recettes et dépenses liées à une même politique publique.

Paradoxalement, ce différentiel conduit le CAS-DAR à présenter un solde comptable largement excédentaire, qui atteindra probablement en 2023 l'équivalent d'une année de recettes, alors même qu'il est principalement financé par les agriculteurs. Les recettes du compte d'affectation spéciale proviennent, en effet, depuis 201527(*), de la taxe « développement agricole et rural » qui lui est intégralement affectée. Elle est calculée sur le chiffre d'affaires total des exploitations agricoles28(*), sans distinction du type ou du mode de production. À défaut de minorer ladite taxe, un rehaussement du plafond de dépenses apparaissait incontournable.

Exécution des recettes et des dépenses du CAS-DAR

(en millions d'euros)

Année

Recettes

Dépenses

Plafond

Solde cumulé

2009

113,50

110,55

113,5 en AE et 118,5 en CP

53,02

2010

105,06

108,50

114,5 en AE et 119,5 en CP

46,7

2011

110,45

108,38

110,5

48,72

2012

116,75

114,35

110,5

51,13

2013

120,47

106,98

110,5

64,73

2014

117,10

132,40

125,5

49,43

2015

137,10

131,20

147,5

55,23

2016

130,80

129,20

147,5

56,83

2017

133,4

128, 9

147,5

62,13

2018

136,5

131,2

136

67,6

2019

142,9

130,5

136

80

2020

140,3

127,1

136

93,2

2021

138,4

113,7

126

118

2022

136

132

126

121,09

2023 (estimatif)

Entre 154 et 166

145

126

Non connu

2O24 (prévisionnel)

141

141

141

Non connu

Source : Commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

La prévision de recettes est fondée sur la publication par l'INSEE du compte prévisionnel de l'agriculture pour 2023 qui serait en augmentation de 16,6 % par rapport à celui de 2022, du fait d'une progression de la production agricole de 16,6 % (soit 96,3 milliards d'euros). Au 31 juillet 2023, la recette s'établissait déjà à 126,6 millions d'euros, soit 7 millions d'euros supplémentaires par rapport à la même période en 2022 (toutefois, l'année 2022 avait été impactée par la pandémie de covid- 19 et ne saurait être considérée comme une année de référence).

La recette de 2023 devrait donc de nouveau dépasser le plafond de la LFI d'un montant d'environ 10 millions d'euros.

B. UNE GESTION FINANCIÈRE COMPLEXE

1. Une lisibilité du compte affectée par les reports

La gestion budgétaire et comptable du CAS-DAR est soumise aux règles suivantes quant aux reports.

a) Règles relatives aux crédits budgétaires

Les crédits budgétaires (AE et CP) sont ouverts à hauteur des montants prévus en loi de finances initiale qui se fondent sur une estimation du montant de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles.

Les AE et les CP budgétaires non consommés en fin d'année donnent lieu un arrêté de report sur l'année suivante. Les raisons en sont multiples. Un porteur de projet peut, à titre d'illustration, demander une prolongation de son projet ce qui diffère les décaissements prévus.

En outre, il convient de relever qu'une partie des crédits ouverts sont en réalité gagés sur des projets déjà engagés. Le niveau élevé des reports de crédits de paiement29(*) résulte des crédits non consommés qui proviennent principalement des restes à payer. Un programme financé par le CAS-DAR fait généralement l'objet de paiements répartis sur plusieurs années.

b) Règles relatives aux recettes

Si la recette est supérieure au montant ouvert en LFI, cette ressource supplémentaire ne peut être engagée à moins d'une ouverture de crédits.

Cette dernière prend deux formes, celle d'un arrêté conjoint d'ouverture en gestion de l'excédent de recettes constaté, entre le ministre chargé de l'agriculture et celui chargé des comptes publics, ou se traduit par une utilisation d'excédents de recettes autorisée en loi de finances rectificative, y compris pour les années antérieures. Ces ouvertures de crédits supplémentaires apportent une souplesse de gestion malgré la fixation d'un plafond.

Toutefois, elle n'est en rien obligatoire et, dans les faits, le différentiel entre les ressources et les dépenses contribue généralement à alimenter le solde comptable du CAS-DAR, en application du II de l'article 21 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF)30(*).

Ce solde comptable cumulé constaté sur le CAS au 31 décembre 2022 s'établissait à 121,09 millions d'euros contre 117,9 millions d'euros un an auparavant, soit une augmentation de 2,7 %.

2. Une sous-consommation du CAS constatée ces dernières années

S'agissant de l'évolution des crédits du CAS-DAR, le tableau ci-dessous, en lecture combinée avec le tableau supra, met en évidence, trois tendances :

une ouverture de crédits annuelle structurellement supérieure aux montants disponibles, en raison des restes à payer et du caractère pluriannuel des dépenses ;

une sous-consommation des crédits par rapport aux recettes. Comme constaté depuis plusieurs exercices par la Cour des comptes31(*), ce faible taux d'exécution [en 2022] s'explique par des « prévisions de recettes extrêmement prudentes [qui] conduisent à des ouvertures de crédits en fin d'année qui ne peuvent, de fait, être consommées » ;

une dynamique des recettes qui dépasse le plafond depuis six ans, et qui justifiait d'autant plus que ce dernier soit relevé.

Évolution de 2015 à 2024 des AE et CP du CAS-DAR en euros

 

Crédits32(*)

Exécution33(*)

Solde

AE

CP

AE

CP

AE

CP

2015

138 958 426

180 206 929

137 346 485

131 320 500

1 611 941

48 886 429

2016

132 423 401

179 697 888

126 045 839

129 207 058

6 377 562

50 490 830

2017

139 797 774

183 911 042

131 669 045

128 949 787

8 128 729

54 961 255

2018

139 694 988

190 961 255

131 655 785

131 220 395

8 039 203

59 740 860

2019

144 411 404

195 740 860

139 475 784

130 480 516

4 935 620

65 260 344

2020

141 091 317

203 260 344

135 457 011

127 146 729

5 634 306

76 113 615

2021

139 695 593

212 113 614

126 400 574

113 716 634

13 295 019

98 396 979

2022

136 639 043

224 396 979

132 732 712

141 501 272

19 502 723

82 895 707

2023(1)

145 502 723

227 223 683

145 502 723

149 412 600

0

77 811 083

2024(2)

141 000 000

218 143 070

141 000 000

141 000 000

-

-

(1) Estimations (2) Prévisions.

Source : Commission des finances du Sénat, d'après les données recueillies dans les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

III. UNE LÉGÈRE ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DES CRÉDITS ENTRE LES PROGRAMMES

Afin de s'aligner sur le plafond de dépenses, parallèlement rehaussé de 15 millions d'euros, les dotations des deux programmes du CAS DAR augmentent, dans des proportions différentes afin de privilégier le programme 776 consacré à la recherche appliquée et à l'innovation en agriculture : ce choix apparait cohérent au regard de l'objectif affiché de verdissement budgétaire.

A. LE PROGRAMME 775, UNE DOTATION DE 63 MILLIONS D'EUROS POUR LA CONCEPTION DE SYSTÈMES AGRICOLES PLUS INNOVANTS ET PERFORMANTS

La dotation du programme 775 « Développement et transfert en agriculture », augmente de presque 2,5 millions d'euros en LFI 2023, et s'élève à 62,93 millions en AE et en CP, contre 60,48 millions d'euros en LFI 2022.

Ce programme comprend le financement d'actions de développement des nouvelles pratiques dans les exploitations agricoles, à travers le réseaux des chambres d'agriculture, mais supporte aussi des actions innovantes à travers les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) ainsi qu'un programme d'appui à la génétique animale.

B. LE PROGRAMME 776, 78 MILLIONS D'EUROS POUR LA RECHERCHE APPLIQUÉE ET L'INNOVATION

Les crédits du programme 776 « recherche appliquée et innovation en agriculture » sont substantiellement relevés, en AE comme en CP, pour atteindre 78,07 millions d'euros, contre 65,02 millions d'euros en LFI 2023, soit une hausse de 19,15 %.

Piloté par la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, le programme vise à orienter l'action des acteurs de la recherche appliquée et à fluidifier les partenariats entre organismes de recherche, d'enseignement et de développement. Pour cette raison, figurent parmi les indicateurs de performance du programme la capacité des acteurs à développer des partenariats multi-acteurs au niveau européen, la capacité à diffuser les résultats des recherches menées (quantifiable par le nombre d'articles publiés) et l'audience des actions de formations.

Chaque année, le tiers de l'enveloppe environ est dédié aux appels à projets dans la maquette prévisionnelle. Rappelons que ces projets de recherche appliquée et de développement agricole ainsi que les programmes annuels des instituts techniques agricoles financés par le CASDAR doivent produire des résultats utilisables par les agriculteurs car les recettes du CAS-DAR proviennent de la taxe sur les exploitations agricoles. En conséquence, la plupart des projets sont réalisés sous le mode innovation non protégée.

Comme pour le programme 775, les recettes du programme proviennent de la taxe « développement agricole et rural » qui est calculée sur le chiffre d'affaires total des exploitations agricoles34(*), sans distinction du type ou du mode de production.

IV. UN COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE CRITIQUÉ PAR LA COUR DE COMPTES ET DONT L'EXISTENCE MÊME QUESTIONNE

De nouvelles modalités de gestion ont été définies dans le cadre du Programme national pour le développement agricole et rural (PNDAR) 2022 2027. Parmi ces 9 priorités figure notamment une rationalisation de la gestion des appels à projets et des modalités d'évaluation des programmes.

Les rapporteurs spéciaux formulent le souhait que ces priorités tiendront enfin compte des améliorations, déjà préconisées par leurs prédécesseurs, en particulier la mise en place d'une évaluation effective des activités, une juste estimation de leur impact environnemental et un recours accru aux procédures d'appel à projets.

Les rapporteurs spéciaux seront attentifs à l'évaluation de la performance associée à ce programme. Il importe que le ministère de l'agriculture s'attache à restituer les résultats des recherches appliquées financées par les exploitations agricoles, qui, de leur côté, ont droit à cette information.

De manière plus globale, les rapporteurs spéciaux partagent le point de vue exprimé à plusieurs reprises par la Cour des comptes sur le caractère visiblement inadapté d'un compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural ». Parmi les comptes spéciaux, les comptes d'affectation spéciale doivent, conformément à la LOLF, présenter une « relation directe, par nature, entre la recette et la dépense ». Le différentiel, année après année, entre les dépenses et les recettes dans le CAS DAR illustre le fait que cette relation directe n'est pas avérée. Par ailleurs, le CAS DAR déroge en tous points aux principes d'annualité et d'universalité budgétaire auxquels il est en théorie soumis, d'une part par la pratique systématique et massive des reports de crédits, d'autre part en isolant du budget général des politiques qui devraient en relever.

Les rapporteurs spéciaux notent par exemple avec étonnement la contradiction qui consiste à maintenir un compte d'affectation spéciale contenant le programme 776, auquel est conféré une mission d'appui à la « souveraineté alimentaire », alors même que c'est une politique publique d'autant plus générale qu'elle figure depuis 2022 dans l'intitulé même du ministère.

Outre leurs objections théoriques, les rapporteurs spéciaux partagent aussi les inquiétudes de la Cour sur le coût élevé de gestion du CAS DAR, pour un montant modeste au regard du budget global de l'État, ainsi que la porosité avec le budget général et la récurrence des subventions versées à certaines structures, malgré la mise en oeuvre du nouveau PNDAR.

Enfin, dans le prolongement des observation de la Cour, les rapporteurs spéciaux indiquent qu'ils porteront une attention spéciale sur le devenir de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles instituée à l'article 302 bis MB précité du code général des impôts, principalement assise sur les petites exploitations et dont le rendement est dérisoire. Sans aller, comme la Cour, jusqu'à proposer sa suppression, ils appellent à en revoir l'assiette.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Dans le cadre de l'application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, quatre amendements de crédits sur la mission et un amendement de crédits sur le compte d'affectation spéciale qui y est rattaché ont été considérés comme adoptés.

Le premier amendement de Mme Sophie Panonacle et plusieurs de ses collègues abonde de 3 millions d'euros la sous-action 29-08 du programme « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » pour majorer les crédits à destination du dispositif de Défense des Forêts Contre les Incendies (DFCI).

Le deuxième amendement de Mme Magnier et plusieurs de ses collègues insère un nouveau programme dans la mission consacré à un fonds de soutien aux technologies immatérielles agricoles. Celui-ci est doté de 5 millions d'euros, lesquels sont retranchés du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation ».

Le troisième amendement de M. Lecamp et plusieurs de ses collègues procède au transfert de 967 286 euros de l'action 01 « Moyens de l'administration centrale » du programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » vers l'action 27 « Moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et de gestion des interventions » du programme 149 « Compétitivité et durabilité », laquelle comprend les concours du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire à destination de la plupart de ses opérateurs. Ce transfert vise à prendre davantage en compte la hausse des besoins humains et budgétaires du Centre national de la propriété forestière (CNPF) au regard des dispositions de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque d'incendie.

Le quatrième amendement de M. Brun et plusieurs de ses collègues tend à majorer de 5 millions d'euros l'action 01 « Santé, qualité et protection des végétaux » du programme 206 « sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation », en ponctionnant l'action 01 « moyens de l'administration centrale » du programme 215 « conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », cela afin que soient soutenus les travaux de recherche consacrés spécifiquement à la châtaigne, particulièrement frappée par le Phytophtora combivora, les nuisibles et la sécheresse.

Enfin, a été retenu un amendement de M. Lecamp et plusieurs de ses collègues majorant de 5 millions d'euros, en AE comme en CP, les crédits ouverts au sein de l'action 01 « Développement et transfert » du programme 775 du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural », afin de renforcer la diffusion des connaissances et des méthodes en agro-écologie, la conception d'innovations de rupture et l'adoption massive par les agriculteurs des approches innovantes durables.

Compte tenu des enjeux ainsi soutenus, les rapporteurs spéciaux approuvent ces cinq modifications budgétaires.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 7 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de M. Christian Klinger, rapporteur spécial, sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural »

M. Christian Klinger, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». - Il faut bien reconnaître que les enjeux couverts par la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », et par le compte d'affectation spéciale (CAS) « Développement agricole et rural » (DAR), qui y est rattaché, sont particulièrement transversaux.

Entre la concurrence économique, les conséquences de la situation géopolitique mondiale, le réchauffement climatique, le manque d'attractivité d'une partie des professions agricoles, les crises sanitaires successives, les handicaps propres à la ruralité, le recul de notre souveraineté alimentaire, la nécessité de mettre la recherche au service de l'innovation agricole et j'en passe, c'est peu dire que presque toutes les politiques publiques sont concernées par cette mission. Dès lors, seul un volontarisme politique fort peut contribuer au renouvellement de l'agriculture française.

Or, ces dernières années, ce volontarisme politique a fait défaut sur le plan budgétaire. Alors que, régulièrement, notre assemblée tirait la sonnette d'alarme sur la situation du monde agricole, les gouvernements successifs se sont entêtés à sous-dimensionner le budget de l'agriculture, ce qui avait probablement conduit à rejeter, l'an dernier, les crédits de la mission.

Il faut croire que nous avons davantage été entendus cette année, puisque le total des concours publics consacrés à l'agriculture, l'alimentation et la forêt atteindra 25,5 milliards d'euros en 2024.

J'inclus dans ce montant 9,4 milliards d'euros de cofinancements européens, 8,5 milliards d'euros de dispositifs fiscaux et sociaux, ainsi que les crédits de la présente mission, revalorisés de 38 % par rapport à l'an dernier, pour atteindre 5,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement.

Présenté ainsi, vous pourriez avoir le sentiment d'un « quoiqu'il en coûte agricole », mais je tiens à rassurer la commission des finances : en dehors de nouvelles actions supplémentaires destinées à verdir le budget, et si l'on fait abstraction des quelques compétences transférées aux régions, le Gouvernement présente finalement un projet de budget proche de l'exécution moyenne des derniers exercices.

Le budget 2024 apparaît plus près des besoins réels que par le passé, en tenant compte notamment des aléas, qui n'ont paradoxalement plus rien d'aléatoire. Il faut y voir un rattrapage du sous-dimensionnement antérieur, ainsi que l'occasion, peut-être, de porter de nouvelles ambitions.

L'effort budgétaire est donc important concernant la question du verdissement et sur les moyens de contrôler, à l'avenir, les nouvelles règles en place. En revanche, il est plus inégal sur d'autres grands postes de dépenses.

D'abord, on constate que, en matière agricole comme ailleurs, l'État a tendance à transférer aux collectivités des compétences qui ne sont pas durablement assorties de moyens correspondants. Je fais confiance aux régions pour gérer les aides à l'installation si on leur en donne les moyens. En revanche, je constate que l'État se désengage rapidement de politiques jusqu'alors nationales, puisque l'action qui portait la dotation jeunes agriculteurs (DJA) ainsi que diverses aides à l'installation sera dotée de 123 millions d'euros, contre 172 millions d'euros jusqu'alors.

Sur le premier exercice budgétaire, cela devrait être neutre. En revanche, sur les suivants, nous serons très attentifs, en tant que rapporteurs spéciaux, à la question des moyens conférés aux régions et, plus généralement, au contenu du pacte et du projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, pour lequel les attentes sont fortes pour rendre au secteur son attractivité. Nous avons d'ailleurs eu récemment l'occasion d'aborder l'une des composantes de cette attractivité, à savoir l'accès au foncier.

Lors des auditions que nous avons organisées, en commun avec nos trois collègues de la commission des affaires économiques, nous avons eu le sentiment que les attentes du secteur agricole tournaient davantage autour de questions qui ne relèvent finalement qu'indirectement de la mission, que ce soit la lutte contre la concurrence déloyale, l'adéquation entre la fiscalité d'entreprises et les objectifs poursuivis, ou encore la question des revenus agricoles.

En revanche, l'objectivité commande de reconnaître un réel effort budgétaire, consenti ou maintenu, sur d'autres dispositifs, en particulier ceux qui sont consacrés aux travailleurs agricoles - c'est l'un des points qu'abordera Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». -, Mes chers collègues je me satisfais partiellement des nouvelles orientations de cette mission. Dans le rapport, nous mettons en avant, entre autres, deux aspects positifs de ce budget 2024. Premièrement, les moyens en personnel sont consolidés, sans toutefois exploser, afin que le ministère puisse assumer ses nombreuses missions de contrôle - écologique, sanitaire, alimentaire, préventif... La liste est longue. Les dépenses en personnel sont ainsi en augmentation de 4,5 %. Au regard des missions et compte tenu des critères exogènes qui conduisent à la hausse des frais de personnel, il s'agit d'une augmentation nécessaire, mais finalement mesurée.

Deuxièmement, certains dispositifs favorables aux travailleurs sont consolidés. L'agriculture est un secteur très concurrentiel et, si l'on n'adapte pas nos règles, on favorisera une certaine précarisation. L'exonération de certaines charges ou cotisations dont bénéficient 71 000 entreprises - soit à peu près la moitié des structures agricoles employant un salarié - assure le maintien de 31 % du volume global des heures salariées dans le secteur agricole, tout en donnant lieu à compensation à la Mutualité sociale agricole (MSA). C'est l'un des moyens de lutter contre le travail illégal et les conséquences qu'il entraîne, en particulier pour les emplois à faible valeur ajoutée. C'est également un point auquel je prête évidemment une attention particulière dans les outre-mer, car le salariat agricole y joue un rôle central.

Notre proposition finale consistera en l'adoption des crédits, sans amendement à ce stade, du fait d'un bilan coût-avantages positif résultant des nouveaux moyens. Cela ne nous empêchera pas, ensuite, de soutenir des amendements.

Vous noterez, à la lecture du rapport, que nous précisons le fonctionnement de certains dispositifs, comme le régime spécifique d'approvisionnement, l'aide à la transformation du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (Poséi), ou encore les soutiens à des filières comme la canne à sucre ou la banane. Ce n'est sans doute pas étranger à des positions que mon groupe politique pourra porter.

Reste à souligner deux caractéristiques du budget. La première, que précisera Christian Klinger, porte sur le verdissement. Quelle que soit notre position politique, il nous semble aujourd'hui impossible de rejeter les moyens supplémentaires consacrés à la transition écologique du secteur agricole.

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. - La mission « Agriculture » du PLF 2024 contribue particulièrement au verdissement du budget. Certes, toute l'agriculture ne peut pas s'organiser en fonction de la transition écologique, mais nous ne pouvons plus faire l'économie de politiques adaptées et soutenues par l'État. Deux des programmes de la mission comprendront désormais une action « Planification écologique ».

Sans être exhaustif, je note que des sous-actions sont consacrées au soutien au renouvellement forestier, pour 250 millions d'euros, au dynamisme du lien bois-matériaux, à hauteur de 200 millions d'euros, mais également que 15 millions d'euros sont alloués à la préservation de la forêt en Guyane, 110 millions d'euros au financement d'un « plan haies », 80 millions d'euros à la stratégie de décarbonation, tandis que 65 millions d'euros porteront un « plan protéine » visant à structurer davantage les recherches sur les protéines végétales. En outre, 20 millions d'euros seront consacrés à la réalisation d'un bilan carbone au moment de la transmission des exploitations. Enfin, la nouvelle action dédiée à la planification écologique du programme 206 permettra de consacrer 250 millions d'euros à la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires.

En tout, 1,25 milliard d'euros supplémentaires sont donc inscrits dans le programme pour verdir l'agriculture, ce qui me semble, tout comme le renouvellement des générations, la possibilité de vivre dignement des métiers agricoles ou l'adéquation de la fiscalité aux objectifs poursuivis, un objectif louable.

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial. - Nous développons, dans le rapport, le rôle crucial des dix opérateurs rattachés à la mission. La plupart d'entre eux voient leurs moyens consolidés, car ils jouent un rôle en matière de développement durable. Je ne citerai que l'Office national des forêts (ONF), dont je ne me satisfait pas des moyens que je juge encore insuffisants, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ou encore l'Office de développement de l'économie agricole d'outre-mer (Odéadom).

La dernière caractéristique des crédits que nous avons examinés porte sur le compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural ». Dès lors que l'on parle de « compte d'affectation spéciale », le débat pourrait apparaître comme celui de techniciens, mais nous souhaitons, comme nos prédécesseurs, vous soumettre cette question de principe.

Précisons d'abord que les objectifs visés par les deux programmes de ce compte ne souffrent d'aucune remise en cause. Qu'il s'agisse de concevoir des systèmes agricoles plus innovants et performants ou de favoriser l'émergence de projets contribuant à des diffusions de compétences en matière agricole, les ambitions portées relèvent sans nul doute de la politique publique que nous détaillons. En revanche, le fait de porter ces crédits sur un compte d'affectation spéciale plutôt que sur le budget général nous semble critiquable. D'abord, en raison de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), tous les types de comptes spéciaux doivent présenter un lien direct entre les recettes et les dépenses. Or, la Cour des comptes souligne que ce lien s'est progressivement étiolé dans le CAS DAR.

Par ailleurs, le différentiel entre les recettes et les dépenses se creuse année après année. Le plafond de dépenses du CAS a, certes, été rehaussé de 15 millions d'euros en 2024, pour atteindre 141 millions d'euros, mais c'est un montant qui devrait, malgré tout, rester inférieur aux recettes, générées uniquement par la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. Ce différentiel a conduit le compte à présenter un solde comptable positif, en cumulé, de 121,09 millions d'euros fin 2022, et ce solde représentera bientôt l'équivalent d'une année de dépenses.

De plus, comme le souligne régulièrement la Cour des comptes, le CAS DAR déroge en tous points aux principes d'annualité et d'universalité budgétaires auxquels il est en théorie soumis, par la pratique systématique et massive des reports de crédits, et parce que des politiques qui devraient en relever sont isolées du budget général. Nous notons, avec un étonnement relatif, la contradiction qui consiste à conférer au programme 776 une mission d'appui à la « souveraineté alimentaire », alors même que c'est une politique publique d'autant plus générale qu'elle figure depuis 2022 dans l'intitulé même du ministère. Nous préconisons donc une réflexion sur la rebudgétisation du compte.

Si nous avons insisté sur les facteurs d'amélioration, le nouveau dimensionnement des crédits et la tentative, même timide, de réorienter budgétairement la politique agricole française, nous incitent à préconiser l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.|

M. Laurent Duplomb, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». - Une fois n'est pas coutume, nous souscrivons à ce budget - comment ne pas être d'accord avec l'augmentation de plus de 1,3 milliard d'euros en 2024, et 750 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sur la même année ? Cependant, nous avons plusieurs réserves marquées, que je développerai en quatre grands points.

Avant cela, j'apprécie que, pour une fois, nous n'ayons pas à nous battre pour conserver certaines lignes, habituellement critiquées. Je pense, par exemple, aux travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE) ou encore au CAS DAR lui-même, dont la suppression a maintes fois été évoquée par le passé. Une alerte importante a toutefois été faite sur la hausse du taux d'accis sur le gazole non routier (GNR), compensé pour partie par des mesures fiscales en faveur de l'agriculture, qui, je le rappelle au passage, ont été reprises de la proposition de loi Compétitivité, - elles avaient été diminuées par la commission des finances, pour finalement être reprises par le Gouvernement dans leur version initiale.

J'en reviens aux quatre réserves que j'évoquais, qui correspondent malheureusement à la politique du Gouvernement, c'est-à-dire à beaucoup de communication et à une dépense excessive.

Premièrement, nos réserves concernent le plan France 2030, qui, certes, est en dehors du périmètre de la mission, mais qu'il importe de mentionner puisqu'il consacre 2,9 milliards d'euros à l'agriculture et à la forêt sur cinq ans. Notre étonnement est lié à l'utilisation de cette somme, puisque seulement 17 % de son montant ont été engagés à mi-parcours. Il va falloir aller très vite sur la fin, sans quoi nous risquons une déconvenue sur la consommation des crédits.

Deuxièmement, je veux évoquer le fonds « entrepreneurs du vivant », annoncé à grand renfort de communications par le ministre de l'agriculture et le Président de la République, doté de 400 millions d'euros, dont à peu près 15 % seraient consacrés au foncier, sans que l'on comprenne très bien à quoi cette somme servira, si ce n'est à un fonds de portage foncier ou à une aide au groupement foncier agricole d'épargnants (GFAE) - en tout état de cause rien de très précis ni de très correct pour appuyer la transmission et l'installation des jeunes agriculteurs ou du moins favoriser les entrepreneurs du vivant.

Troisièmement, l'augmentation du budget s'explique en totalité par « la planification écologique », soit plus de 1,3 milliard d'euros, qu'il serait bien d'expliquer plus dans le détail pour les représentants du peuple... Par exemple, on nous explique que l'on consacre 150 millions d'euros aux haies pour planter 50 000 kilomètres de haies. En clair, nous ne disposons que de trop peu d'explications et, surtout, de très peu d'éléments d'appréciation, et d'aucun élément de mesure permettant de vérifier si l'utilisation des moyens correspond bien aux objectifs fixés - de fait, nous ne pouvons même pas réellement connaître les objectifs de départ. Au final, nous sommes amenés à voter un budget totalement à l'aveugle et, comme la majorité l'approuve, nous devons la suivre.

Enfin, ma quatrième réserve concerne le plan Écophyto, qui, selon moi, se trompe d'objectif. Celui-ci s'appuie, au départ, sur un principe simple : réduire le volume des produits phytosanitaires. Or, aujourd'hui, nous tentons, de façon dogmatique, de réduire, non pas les volumes, mais le nombre de molécules phytosanitaires. Si l'on peut se féliciter, dans ce domaine, de la réussite depuis 2008 des fermes Dephy, nous peinons malheureusement à les vulgariser auprès des agriculteurs. Je pense à l'augmentation de 37 millions d'euros cette année de la redevance pour pollution diffuse - elle atteindra 217 millions d'euros -, alors que l'on demande aux agriculteurs d'être plus compétitifs, mais aussi à la hausse de 10 millions d'euros de la redevance eau, en décalage avec les évolutions du climat. Si l'on voulait réorienter correctement les 250 millions d'euros destinés à la réduction des phytos, il faudrait inciter les agriculteurs à investir dans du matériel innovant capable de diminuer drastiquement les volumes. Des techniques basées sur l'intelligence artificielle existent déjà et permettent, dans certaines cultures, de diminuer jusqu'à 80 % les volumes de phytos, mais, comme ce n'est pas l'objectif que nous visons, bien que ce soit celui qui est affiché, les chemins que nous prenons ne sont, par définition, pas les bons.

M. Franck Menonville, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » - La forêt n'est pas en reste et figure au coeur du budget de cette mission, puisqu'elle bénéficie de 509 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 359 millions d'euros en CP de la planification écologique, pérennisant ainsi, en particulier, le soutien au renouvellement forestier, engagé dans le plan de relance et relayé par France 2030.

C'est un effort financier important, nécessaire, qui doit être salué, mais, assurément, il n'est pas de trop, tant la forêt française souffre et a souffert, ces dernières années, notamment en raison des dépérissements liés aux scolytes et à la crise sanitaire. À titre d'exemple, l'ONF a évoqué, lors des auditions, une division par deux du puits de carbone en dix ans, à cause des sécheresses à répétition et alors même que la forêt progresse.

Afin de ne pas être redondants avec le travail des rapporteurs spéciaux, nous avons souhaité réaliser deux focus sur ce thème de la forêt. Le premier porte sur un inventaire forestier outre-mer, le second sur les moyens de l'ONF et du Centre national de la propriété forestière (CNPF) pour la bonne application de la loi du 10 juillet 2023 sur les feux de forêt.

S'agissant de l'inventaire forestier outre-mer, force est de reconnaître que le Gouvernement a enfin pris la mesure de l'enjeu, car il en finance l'amorçage parmi 15 millions d'euros de la planification écologique dédiés à la forêt outre-mer. Il était temps : rappelons que cette mesure a été votée dès 2014 dans la loi d'avenir et précisée à nouveau à travers les travaux du Sénat dans la loi Climat et résilience en 2021. Cependant, la réalisation d'un tel inventaire forestier prendra au minimum quatre ou cinq années, d'après l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et l'ONF, qui en seront les maîtres d'oeuvre. Or aucun des 24 équivalents temps plein (ETP) associés à cette hausse ne figure précisément dans le budget. Nous craignons que cela ne renvoie cet inventaire à l'horizon 2030, alors que nous en aurions un besoin crucial au plus vite, surtout quand on sait que la forêt guyanaise stocke, à elle seule, autant de carbone que la forêt hexagonale. Nous appelons le Gouvernement à accélérer la cadence et à clarifier les ambitions affichées en termes de moyens humains.

Pour ce qui concerne les moyens des deux établissements publics chargés de la forêt, dans la lignée des travaux de nos collègues Anne-Catherine Loisier, Olivier Rietmann, Jean Bacci et Pascal Martin sur les feux de forêt, notre diagnostic, encore en cours d'affinage, est qu'il faudrait 15 ETP de plus pour le CNPF en 2024, quand le budget n'en prévoit que 5, et au moins une stabilisation durable des effectifs pour l'ONF jusqu'en 2025.

Nous proposerons donc un amendement en ce sens pour le CNPF, afin qu'il soit au niveau des nouvelles missions de la défense des forêts contre l'incendie (DFCI), mais également pour assurer le flux supplémentaire de documents de gestion durable de la forêt, puisque le seuil de 25 hectares a été ramené à 20 hectares.

Pour l'ONF, la suspension du schéma d'emplois a été une bouffée d'air frais, après des années de diminution des moyens. L'ONF comptait, voilà plus d'une dizaine d'années, plus de 12 500 employés ; ils ne sont aujourd'hui plus que 7 500. Plutôt que demander de nouveaux ETP, la priorité nous semble d'abord de garantir cette stabilisation durablement dans le temps, même si nous sentons aujourd'hui, au regard des moyens redéployés dans l'ONF, de véritables tensions sur les territoires. Il convient donc, parallèlement à ce budget, de veiller à la dynamique et à l'attractivité des entreprises de travaux forestiers, qui, aujourd'hui, rencontrent de grandes difficultés pour répondre aux besoins croissants des forêts, publiques comme privées.

M. Claude Raynal, président. - Merci, messieurs les rapporteurs pour avis, pour vos remarques.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je constate que le budget de l'agriculture suscite plus d'apaisement cette année.

Néanmoins, on ne peut rattraper le retard aussi vite qu'on le souhaiterait. Concernant la performance de la ferme France, nous sommes, en effet, encore loin de redonner à l'agriculture française toute son attractivité. Il faudrait continuer à travailler de la manière la plus harmonieuse possible, sans privilégier l'une ou l'autre des pratiques ou des productions agricoles.

J'entends, à ce propos, les remarques de M. Duplomb au sujet des produits phytosanitaires. Si l'on prend l'exemple de la jaunisse de la betterave, il est possible que les travaux de recherche phytosanitaire sur cette maladie ne soient pas au rendez-vous à l'horizon 2026. Prenons garde à ne pas handicaper nos agriculteurs et nos producteurs par rapport à leurs concurrents exerçant chez un certain nombre de nos partenaires et qui sont moins précautionneux.

Enfin, si le CAS DAR n'est pas un sujet de tension cette année, je note tout de même qu'une question reste en suspens sur sa compatibilité avec la Lolf. Pourrait-on formuler nous-mêmes des propositions sur cette question?

Sur tous ces sujets, nos deux commissions pourraient unir leurs efforts pour redonner de la vigueur, du dynamisme et de la performance à ce secteur, qui a longtemps fait la fierté de la France, y compris dans sa capacité exportatrice au niveau européen. Ce serait, il me semble, une bonne initiative, que je laisse le soin à nos rapporteurs respectifs d'étudier.

M. Stéphane Sautarel. -Votre rapport mentionne que l'État renforce les effectifs de certains de ses services, ce qui se traduit par une hausse des dépenses du titre 2. Quels seront l'impact de ce renforcement et son poids financier ?

Je veux également évoquer la gestion de l'ONF. Pour avoir participé dernièrement à une assemblée générale des communes forestières de mon département, de nombreuses insatisfactions nous sont remontées, sur le service lui-même, sur sa contractualisation, sur les prix et sur les conditions d'exploitation mises en place. Par-delà le renforcement du service, dont on peut se satisfaire, je voudrais m'assurer que ses moyens permettent bien d'accompagner nos territoires sur le terrain et de répondre aux enjeux de la forêt française et des communes forestières.

Mme Florence Blatrix Contat. - Je salue les moyens consacrés à la planification écologique. Les enjeux d'adaptation, mais aussi d'atténuation du réchauffement climatique sont essentiels pour l'agriculture.

Comme M. Menonville l'a rappelé, la forêt est en grande difficulté et ne satisfait plus à sa mission de puits de carbone. Je souscris, bien sûr, au budget supplémentaire dont bénéficient la gestion forestière et le renouvellement forestier. Toutefois, je tiens à souligner que, dans certaines régions, la gestion forestière est rendue difficile par un important morcellement forestier, lié à de multiples successions de parcelles, dont on ne sait plus très bien qui en sont les propriétaires - eux-mêmes, parfois, ne savent pas qu'ils le sont. Des crédits sont-ils prévus pour accompagner les collectivités dans une forme de remembrement forestier ?

Par ailleurs, si l'on peut se satisfaire de la fin de la décrue des postes à l'ONF, j'observe une hausse de 7 millions d'euros de son budget cette année. Peut-on savoir comment celle-ci sera ventilée concrètement ?

Je souscris aux propositions d'amendement sur le renforcement des moyens du CNPF et de l'ONF.

Mme Christine Lavarde. - Je m'interroge sur le milliard d'euros supplémentaire compris dans les 7 milliards d'euros de communication qui figurent au budget « Écologie » du PLF 2024 : quelle va être son opérationnalité immédiate ? Ce n'est pas demain que les haies produiront les services agrosystémiques espérés... On note un décalage entre la communication et l'argent mis à disposition, mais c'est bien normal lorsque l'on agit sur le vivant.

Je comprends toutes les raisons pour lesquelles il serait pertinent de rebudgétiser le CAS DAR, mais n'y a-t-il pas un risque de reproduire les ratés du fonds Barnier ? Lui aussi avait été rebudgétisé. Or, aujourd'hui, on constate que les recettes collectées sont inférieures au plafond de dépenses. Au regard de ce que fournit le CAS, de nombreuses dépenses entrent en interaction, y compris avec d'autres missions que la mission « Agriculture ». Il faudrait au moins s'assurer que tout ce que les agriculteurs versent pour la politique agricole leur revient bien in fine.

M. Bernard Delcros. -Je partage l'avis de mes collègues sur les enjeux liés à la forêt, qui doit se renouveler pour tenir compte de la nouvelle donne climatique.

Je note que 110 millions d'euros seront affectés au « plan haies ». Avez-vous des précisions sur la déclinaison concrète de ce plan sur le terrain ? Qui en aura la charge ? J'observe que nous n'avons pas attendu ces financements pour réimplanter des haies dans les territoires et réparer ainsi les dégâts causés dans les années 70 - toutes les haies, sans distinction, avaient alors été supprimées.

De même, concernant les 80 millions d'euros consacrés à la stratégie de décarbonation, connaissez-vous les déclinaisons concrètes de ce plan ? Les haies peuvent mettre effectivement un peu de temps à pousser, mais, plus tôt on commence, mieux c'est.

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial. - Nous avons rencontré quelques difficultés pour obtenir certaines précisions, notamment sur les moyens décentralisés dans les territoires.

Je note, comme M. Duplomb et M. le rapporteur général, que les débats sont plus apaisés cette année, y compris dans les auditions que nous avons menées. L'augmentation des crédits et la mise en place d'une planification écologique y sont peut-être pour quelque chose.

Ensuite, certaines mesures ont été bien acceptées, comme la pérennisation du TO-DE, qui contribue à la compétitivité et à l'amélioration des conditions de travail.

S'agissant du CAS DAR, nous avons nous-mêmes été dubitatifs sur le plan juridique. Comme Mme Lavarde nous l'a fait remarquer, le fonds Barnier est un précédent qui s'est avéré décevant. Nous devons donc être prudents et nous poser la question de l'efficacité des moyens mis à la disposition de nos agriculteurs, afin que le financement qu'ils fournissent leur revienne.

La question relative au GNR concerne la partie fiscale du PLF, dont le rapporteur général a la charge. C'est une question importante, qu'il faudra approfondir.

La communication est la marque de fabrique des gouvernements du président Macron. Dans le cadre de France 2030, le programme 362, « Écologie » de la mission « Plan de relance » prévoit bien des sommes importantes, malgré des crédits de paiement dégressifs.

Concernant le plan Entrepreneurs du Vivant, des crédits sont bien évidemment prévus dans le cadre de France 2030 pour le financement des écosystèmes - pas seulement agricoles, d'ailleurs. Il y a effectivement une relation entre ce plan de relance et la mission « Agriculture ». Dans le plan, 15 % des crédits seraient consacrés au foncier, mais je ne saurais vous dire s'il s'agit d'un portage selon des vecteurs à trouver, ou bien d'un financement par les groupements forestiers d'investissement (GFI).

Mon collègue Christian Klinger développera les objectifs de départ de la planification écologique, ils sont expliqués dans le projet annuel de performances, même si je conviens qu'ils ne sont pas très complets. Ce que je peux dire, c'est que les objectifs sont clairs, même s'ils sont généraux : il s'agit d'assurer la transition écologique et de se donner les moyens budgétaires de verdir le budget. Un effort budgétaire important est fait en ce sens ; il faudra en observer l'exécution. Le programme 149 compte 1,04 milliard d'euros, auxquels s'ajoutent 250 millions d'euros du programme 206, ce qui fait bien 1,3 milliard d'euros consacrés à la planification écologique. Celle-ci se décline en dix sous actions, qui décrivent les objectifs recherchés.

Mon collègue reviendra sur le plan Écophyto, mais l'objectif est bien de réduire le volume, et non les molécules ! Il y aura un nouveau vote sur le glyphosate le 16 novembre prochain au Parlement européen, pour savoir quelle attitude il convient d'adopter vis-à-vis de cet herbicide.

Oui, monsieur Menonville, j'ai changé d'opinion sur la Guyane : c'est un puits de carbone qu'il nous faut préserver d'urgence. Aurons-nous le temps de dépenser 15 millions d'euros en CP pour réaliser la cartographie ? Avec les drones et autres nouvelles technologies de type radar, par exemple, nous pourrons peut-être aller très vite. J'accueille donc les crédits favorablement.

Au sujet du CNPF, nous nous félicitons d'avoir renversé la dynamique de suppression de postes. 5 ETP sont créés. C'est mieux que rien, même s'il est vrai que c'est insuffisant, d'autant plus que l'on ne sait toujours pas comment ce sera délégué au niveau des centres régionaux de la propriété forestière (CRPF).

Pour ce qui concerne l'ONF, je suis d'accord : il faut faire plus. Voilà des années qu'il y a trop de suppressions de postes - je le sais d'expérience.

Vous nous avez fait remarquer, monsieur le rapporteur général, que l'on ne rattrapait pas le retard accumulé. Si 1,3 milliard d'euros sont générés par la création de la nouvelle action, il est vrai que les autres programmes sont tout au plus stabilisés par rapport aux dépenses exécutées auparavant, et donc - soyons honnêtes - que, compte tenu de l'inflation, on fait plutôt face à une diminution.

Ensuite, je partage l'interrogation de notre collègue Christine Lavarde sur la manière d'anticiper ce qui relève de l'agrosystémique. Cela s'appelait auparavant « la vulgarisation agricole », et il y avait alors un vrai lien entre la recherche appliquée et ce qui était diffusé par les chambres d'agriculture, les organisations de producteurs et les interprofessions auprès des agriculteurs. Aujourd'hui, on a l'impression que le lien est plus lâche. À cet égard, l'action de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) peut sembler décevante.

Oui, il faut être prudent sur le changement qui va affecter le CAS DAR.

Mme Blatrix Contat nous demande comment lutter contre le morcellement forestier ou l'indivision forestière. C'est un problème de droit civil et d'économie. Je n'ai pas de réponse spécifique sur la transmission des propriétés foncières. Peut-être faut-il voir cela plutôt avec le CNPF et les CRPF.

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. - Concernant, monsieur Sautarel, l'augmentation des dépenses de personnel, l'évolution est de +4,5 % et se traduit par le recours à des personnels supplémentaires pour assurer des opérations de contrôle dans des missions budgétaires, comme le contrôle de la sécurité alimentaire ou le contrôle des cosmétiques et tatouages, ainsi que du personnel supplémentaire qui vient renforcer les missions de contrôle existantes mais ayant vocation à être accentuées, comme le respect de la législation sur les pesticides.

La fiscalité agricole du GNR ne relève pas directement de notre mission, mais nous avons tout de même eu quelques réponses lors de nos auditions. La hausse sur le gazole non routier serait compensée par une augmentation du plafond du microbénéfice agricole, mais aussi par une dotation d'épargne de précaution ainsi que par une modification des règles d'imposition des plus-values agricoles.

Pour ce qui concerne le 1,3 milliard d'euros avancé pour la planification écologique, ce montant ne sera évidemment pas décaissé en totalité en 2024. Si l'on prend le « plan haies », par exemple, les 110 millions d'euros prévus, auxquels il faut ajouter des crédits provenant de la politique agricole commune (PAC), de l'agence de l'eau et de l'Office français de la biodiversité, vont, bien sûr, s'étaler au fur et à mesure. L'objectif est d'implanter 7 000 à 8 000 kilomètres par an, soit 50 000 kilomètres de haies d'ici à 2030. Plusieurs actions doivent être menées, dont le premier axe consiste à faire l'inventaire des dégâts opérés. Nous ne connaissons pas la répartition géographique à ce jour, n'ayant pas de définition juridique d'une haie - quelles doivent être sa largeur, sa hauteur ? Un travail de concertation doit donc être mené avant d'implanter les premiers kilomètres de haies.

La philosophie est la même pour la décarbonation, avec trois composantes : la réduction d'épandage des déjections d'élevage, celle des engrais azotés et celle des émissions liées aux énergies fossiles. Les 80 millions d'euros budgétés seront décaissés au fur et à mesure de l'avancement de ces projets.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission, après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » tels que modifiés par l'Assemblée nationale et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet de M. Marc FESNEAU, Ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

- M. Emmanuel HONORÉ, conseiller chargé des élus et des discours ;

- M. Tom MICHON, conseiller budgétaire et financements ;

- M. Hugues de FRANCLIEU, conseiller France 2030, innovation et investissements ;

- M. Simon LAPORTE, conseiller économie et suivi des filières alimentaires, référent outre-mer.

Cour des comptes

- Mme Catherine PERIN, conseillère maître ;

- M. Hervé BOULLANGER, conseiller maître ;

-M. Guillaume BRÛLÉ, conseiller référendaire en service extraordinaire.

Secrétariat général du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

- Mme Cécile BIGOT-DEKEYZER, secrétaire générale ;

- M. Sébastien COLLIAT, chef du service des affaires financières, sociales et logistiques.

Direction générale de l'alimentation (DGAL) du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

- Mme Emmanuelle SOUBEYRAN, directrice générale adjointe ;

- M. Philippe SAPPEY, sous-directeur pilotage des ressources ;

- Mme Clémence BOURELY, cheffe du bureau du pilotage budgétaire du programme 206 ;

- Mme Aurèle HENAUT, adjointe à la cheffe du pilotage budgétaire du programme 206.

Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

- M. Philippe DUCLAUD, directeur général adjoint ;

- Mme Marie-Agnès VIBERT, cheffe du service Gouvernance et gestion de la PAC ;

- Mme Jeanne LANQUETOT-MORENO, cheffe du bureau Budget et établissements publics.

Sous-direction des affaires budgétaires et comptables - Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

- M. Sébastien COLLIAT, chef du service des affaires financières, sociales et logistiques ;

- M. Jean-Philippe TRÉBILLON, adjoint au sous-directeur ;

- M. Philippe AUZARY, directeur financier.

Confédération paysanne

- Mme Sylvie COLAS, secrétaire nationale ;

- Mme Aurélie BOUTON, animatrice technique.

Coordination rurale

- Mme Véronique LE FLOC'H, présidente.

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA)

- M. Luc SMESSAERT, vice-président de la FNSEA, président de la commission fiscale-sociale ;

- M. Jean-Louis CHANDELLIER, directeur général adjoint, chef du service fiscal.

Jeunes agriculteurs

- M. Timothée APPERT-COLLIN, membre du conseil d'administration ;

- M. Xavier JAMET, responsable des affaires publiques.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2024.html


* 1 Le rapport rt° 771 (2022-2023), tome II, annexe 3, de MM. Vincent SEGOUIN et Patrice JOLY, déposé le 28 juin 2023 sur la mission « agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022 est consultable via ce lien.

* 2 Crédits ouverts en loi de finances initiale hors fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP).

* 3 Sur ces deux points, on se reportera utilement au rapport d'information « On ne naît pas agriculteur, on le devient », de MM. Vincent SEGOUIN et Patrice JOLY, fait au nom de la commission des finances, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur la politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles.

* 4 Sur le contexte défavorable à l'accès au foncier agricole, on se reportera utilement au rapport n° 61 (2023-2024), déposé le 25 octobre 2023, de M. Christian Klinger sur la proposition de loi visant à associer les épargnants à la transmission des exploitations agricoles françaises.

* 5 Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a publié la méthodologie de la concertation en cours consultable sur son site Internet : https://agriculture.gouv.fr/pacte-et-loi-dorientation-et-davenir-agricoles-les-principes-et-la-methode

* 6 À la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour des comptes a établi, en avril 2023, une synthèse de ces divers dispositifs dans son enquête consacrée à « La politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles ».

* 7 L'ICHN est une aide en faveur des agriculteurs exerçant leur activité dans des zones défavorisées par l'altitude, de fortes pentes ou d'autres caractéristiques physiques pénalisantes du territoire.

* 8 Le Préfet de Région a compétence pour publier, par voie d'arrêté, les MAEC ouvertes sur le territoire de la Région concernée : voir pour exemple l'arrêté du 5 octobre 2023 du Préfet de la région Guadeloupe.

* 9 Article 265 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

* 10  https://agriculture.gouv.fr/maec-les-nouvelles-mesures-agro-environnementales-et-climatiques-de-la-pac.

* 11 Consulté le samedi 4 novembre 2023.

* 12 Loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d'orientation relative à une meilleure diffusion de l'assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

* 13 À cet effet, les rapporteurs spéciaux suivent avec intérêt une disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en cours d'examen à l'Assemblée nationale, visant à modifier le régime d'exemption de cotisations dont bénéficient certains travailleurs agricoles dans les outre-mer.

* 14 Il s'agit d'un médicament, surveillé dans le cadre du plan « Écoantibio », dont la DGAL a souligné l'efficacité.

* 15 Frais de capture au sens de l'article L. 214-24 du code rural et de la pêche maritime.

* 16 Cf. article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

* 17 Cette proportion atteint 35 % si l'on exclut les dépenses fiscales, moins vertueuses, du calcul.

* 18 Une convention avec Wallis-et-Futuna est par ailleurs en cours d'adoption.

* 19 Considérant 6 du Règlement (UE) n° 228/2013 du Parlement européen et du Conseil du 13 mars 2013 portant mesures spécifiques dans le domaine de l'agriculture en faveur des régions ultrapériphériques de l'Union et abrogeant le règlement (CE) n o 247/2006 du Conseil.

* 20 Article 229 paragrahe 2, entré en vigueur le 1er mai 1999, devenu l'article 349 du TFUE et décision du Conseil du 22 décembre 1989 instituant un programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité des départements d'outre-mer (Poséidom) (89/687/CEE).

* 21 En raison de son élargissement à des régions ultra périphériques de trois États de l'Union européenne, le POSEI a pris cette appellation car il ne concerne plus seulement les DOM français.

* 22 Cf. II de l'article 302 bis MB précité du code général des impôts.

* 23 Ce terme, théorisé par le Professeur Clayton Christensen vise les innovations qui révolutionnent radicalement les habitudes d'un marché et qui peuvent altérer substantiellement le poids économique d'entreprises bien implantées qui n'auraient pas anticipé l'évolution.

* 24 À cet effet, le programme mobilise le réseau des chambres d'agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), les organismes de sélection animale (OS), les dynamiques de groupes, les démarches territorialisées et les approches inter-filières agricoles (source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux).

* 25 Ces 74 400 euros couvrent des frais de fonctionnement (déplacements, réunion, jury, stages, formations) ainsi que les frais engagés pour des travaux d'évaluation des programmes et des projets (comités scientifiques, évaluation externe...) ou de contrôle de l'utilisation des crédits par les corps de contrôle de l'État.

* 26 Ce programme fait appel au réseau des instituts techniques agricoles (ITA) ainsi qu'à l'ensemble des acteurs de la recherche, de l'enseignement et du développement dans le cadre de partenariats (source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux).

* 27 Avant 2014, le CAS-DAR ne recevait que 85 % des recettes collectées.

* 28 Forfait de 90 euros auquel s'ajoute 0,19 % du chiffre d'affaires jusqu'à 370 000 euros et 0,05 % au-delà.

* 29 Le projet annuel de performances, annexé au projet de loi de finances pour 2024, fait état d'un montant global de crédits ouverts en 2023 qui seront réglés en 2024, 2025 et 2026, en raison de reports, de 11 391 939 euros.

* 30 « II. - Sauf dérogation expresse prévue par une loi de finances, aucun versement au profit du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial ne peut être effectué à partir d'un compte d'affectation spéciale. [...]

Si, en cours d'année, les recettes effectives sont supérieures aux évaluations des lois de finances, des crédits supplémentaires peuvent être ouverts, par arrêté du ministre chargé des finances, dans la limite de cet excédent. Au préalable, le ministre chargé des finances informe les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances des raisons de cet excédent, de l'emploi prévu pour les crédits ainsi ouverts et des perspectives d'exécution du compte jusqu'à la fin de l'année. »

Les autorisations d'engagement et les crédits de paiement disponibles en fin d'année sont reportés sur l'année suivante, dans les conditions prévues aux II et IV de l'article 15, pour un montant qui ne peut excéder le solde du compte. »

* 31 Cf. la note d'exécution budgétaire du Compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », pour l'exercice 2022.

* 32 Les crédits en AE et CP correspondent aux crédits ouverts en LFI, dans la limite de la recette du CAS-DAR, majorés des reports de crédits de l'année N-1 sur l'année N et des éventuelles ouvertures de crédits en gestion (décret de virement, arrêté, loi de finances rectificative).

* 33 L'exécution en AE est minorée des retraits sur engagements des années antérieures (données Chorus).

* 34 Forfait de 90 euros + 0,19 % du chiffre d'affaires jusqu'à 370 000 euros + 0,05 % au-delà.

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