N° 128

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2023

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 22

PLAN DE RELANCE

Rapporteur spécial : M. Jean-François HUSSON

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) : 1680, 1715, 1719, 1723, 1745, 1778, 1781, 1805, 1808, 1820 et T.A. 178

Sénat : 127 et 128 à 134 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Cette mission a été créée en réponse aux conséquences économiques de la crise sanitaire par la loi de finances initiale pour 2021, qui l'a dotée de 36,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 21,8 milliards d'euros en crédits de paiement. Elle porte la majorité des crédits du budget de l'État consacrés au plan de relance de 100 milliards d'euros et comprend trois programmes : 362 « Écologie », 363 « Compétitivité » et 364 « Cohésion ».

L'ensemble des autorisations d'engagement ont été ouvertes en 2021 et, pour une partie minoritaire, en 2022. Le projet de loi de finances pour 2024, comme celui pour 2023, n'ouvre en conséquence que des crédits de paiement.

I. EN 2024 COMME EN 2023, DES OUVERTURES DE CRÉDITS DE PAIEMENT UNIQUEMENT

Pour 2024, les crédits demandés par le projet de loi de finances sont de 1,4 milliard d'euros, uniquement en crédits de paiement.

Crédits de la mission « Plan de relance »

(en millions d'euros)

   

2022 exécution

2023 LFI

2024 PLF

Évolution PLF 2024 / LFI 2023

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (%)

362 - Écologie

AE

3 473,1

-

-

-

 

CP

5 012,5

3 556,4

1 169,1

- 2 387,3

- 67,1 %

363 - Compétitivité

AE

1 155,0

-

-

-

 

CP

1 944,3

380,4

66,0

- 314,4

- 82,7 %

364 - Cohésion

AE

2 950,3

-

-

-

 

CP

4 636,9

460,7

178,9

- 281,8

- 61,2 %

Total mission

AE

7 578,4

-

-

-

 

CP

11 593,6

4 397,5

1 414,0

- 2 983,5

- 67,8 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Selon l'échéancier prévisionnel des paiements fourni par le projet annuel de performances, le montant total des crédits de paiements devrait poursuivre sa diminution au cours des années à venir.

Échéancier prévisionnel des dépenses sur la mission « Plan de relance »

Source : commission des finances, à partir du projet annuel de performances

Ces montants inscrits en loi de finances ne correspondent toutefois pas au montant réel des crédits dépensés chaque année, car la mission « Plan de relance » se caractérise par l'emploi de procédures spécifiques, dont les reports de crédit, qui éloignent la consommation réelle des prévisions retracées par les documents budgétaires.

II. AU DELÀ DU BUDGET OFFICIEL, UN « BUDGET MASQUÉ » S'AFFRANCHIT DES CONTRAINTES D'ANNUALITÉ

La mission « Plan de relance » se caractérise par des modalités de gestion très dérogatoires des procédures budgétaires habituelles, qui permettent aux gestionnaires des crédits de s'affranchir très largement des principes budgétaires afin de gérer et réallouer les crédits dans une perspective largement pluriannuelle, rendant le suivi particulièrement complexe et l'évaluation très difficile.

A. LES CRÉDITS OUVERTS EN LOI DE FINANCES ALIMENTENT UN IMPORTANT FONDS DE CRÉDITS REPORTÉS D'ANNÉE EN ANNÉE

Alors que les crédits ont été autorisés principalement en 2021 et 2022, les sous-consommations ont conduit à des reports de crédits, non indiqués précisément dans les documents budgétaires. Le montant total des crédits disponibles en 2023 a ainsi été égal à 2,4 fois le montant des crédits de paiement soumis à l'autorisation parlementaire cette année-là.

Crédits initiaux et crédits totaux disponibles en 2023
sur la mission « Plan de relance »

Source : commission des finances, à partir du système d'information Chorus

Au lieu d'annuler les crédits non consommés et d'ouvrir en loi de finances initiale le montant des crédits réellement nécessaires, le Gouvernement fait le choix de reporter les crédits non consommés d'année en année. Le montant qu'il prévoit de consacrer en 2024 à chaque mesure du plan de relance n'est donc pas connu.

Les documents budgétaires ne présentent que de manière très parcellaire l'utilisation des crédits reportés, qui financeront de nombreux dispositifs pour lesquels aucun crédit n'est ouvert dans le projet de loi de finances pour 2024.

B. DES PROGRAMMES HÉTÉROCLITES PERMETTENT DE CONTOURNER LE PRINCIPE DE SPÉCIALITÉ BUDGÉTAIRE

Dès l'origine, la mission « Plan de relance » a été fondée sur trois programmes de grande taille, pratique contestable au regard de la définition même d'un programme budgétaire, qui devrait regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère. Les gestionnaires de programme peuvent ainsi faire varier les lignes de crédit avec une grande liberté entre dispositifs, sans que les redéploiements soient présentés de manière détaillée au Parlement.

Le suivi des crédits est d'autant plus difficile que ceux-ci sont parfois transférés à d'autres ministères ou à des opérateurs.

C. LA MISSION « PLAN DE RELANCE », QUI DEVAIT PORTER DES MESURES TEMPORAIRES DE RELANCE, FINANCE DES MESURES QUI AURAIENT DÛ ÊTRE IMPUTÉES AU BUDGET DES MINISTÈRES

La mission « Plan de relance » a servi dès le début, en 2021, et sert encore de véhicule budgétaire commode pour financer des mesures sans lien avec la relance de l'économie et qui, dès le début, auraient dû être inscrites dans le budget ordinaire des ministères concernés.

À titre d'exemple, la mission « Plan de relance » continuera en 2024 à financer un projet de portail public de facturation (qui aurait dû relever des dépenses ordinaires du ministère de l'économie et des finances) ou l'acquisition d'hélicoptères par la gendarmerie nationale.

Le financement de la rénovation énergétique des bâtiments publics ou privés, politique de long terme, ne présentait pas le caractère temporaire qui justifiait son inscription dans une mission ayant vocation à s'éteindre progressivement, comme le montre la croissance des crédits du dispositif MaPrimeRénov', aujourd'hui imputée sur les missions ordinaires du budget général.

III. LA MULTIPLICATION DES PLANS REND LEUR ÉVALUATION PARTICULIÈREMENT DIFFICILE

Les rapports du comité de suivi du plan de relance ne parviennent pas à conclure sur le rôle spécifique du plan de relance dans l'amélioration de la situation économique à la sortie de la crise sanitaire.

En tout état de cause, le plan de relance est marqué par des recouvrements avec d'autres plans (programme d'investissements d'avenir, plan France 2030...), ce qui rend pratiquement impossible, en pratique, de déterminer l'apport spécifique de chacun d'entre eux.

Le dispositif de performance de la mission, pour sa part, est largement défaillant et ne semble avoir été mis en place que pour respecter formellement les obligations de la loi organique relative aux lois de finances

IV. LE FINANCEMENT EUROPÉEN DU PLAN DE RELANCE RESTE SOUMIS À DE NOMBREUSES INCERTITUDES

Le plan national de relance et de résilience (PNRR), présenté par le Gouvernement le 29 avril 2021, prévoit un co-financement européen à hauteur de 41 milliards d'euros.

La rapidité de la reprise économique a entraîné, par application des règles de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), une réduction à 37,5 milliards d'euros du montant de subvention que pourra recevoir la France. Toutefois, le PNRR a fait l'objet d'une mise à jour en avril 2023, qui donne droit à la France à 2,8 milliards d'euros supplémentaires au titre du nouvel instrument REPowerEU.

Le calendrier des versements est toutefois soumis à l'atteinte de « cibles » et « jalons » définis dans le PNRR, au moyen d'un dispositif d'audit et de contrôle lourd. Des versements ont eu lieu pour un montant de 5,1 millions en 2021 et 7,4 milliards d'euros au printemps 2022. Si aucun versement n'a encore eu lieu en 2023, c'est surtout parce que la demande n'a été faite qu'à la fin du mois de juillet, après la révision du PNRR. L'affirmation du Gouvernement selon laquelle que les versements européens sont liés notamment à l'adoption d'une loi de programmation des finances publiques n'est pas établie.

Par ailleurs, le remboursement, pour l'Europe, des subventions données aux États membres était fondé à l'origine sur la mise en place de ressources propres. Parmi ces ressources propres devait figurer une taxe carbone instaurée aux frontières de l'Union européenne, dont le rendement pourrait être moindre qu'espéré. En outre, la hausse des taux d'intérêt va nécessairement renchérir le coût des emprunts réalisés par la Commission européenne.

Au total, l'impact budgétaire net du plan de relance pour la France demeure incertain.

Réunie le mercredi 25 octobre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a proposé au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Plan de relance ».

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Plan de relance ».

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues pour la mission « Plan de relance ».

PREMIÈRE PARTIE :
LA MISSION « PLAN DE RELANCE » EST DÉSORMAIS FINANCÉE PRINCIPALEMENT PAR DES REPORTS DE CRÉDITS

La mission « Plan de relance » a été créée par la loi de finances initiale pour 20211(*) afin de porter la majeure partie des crédits du budget de l'État consacrés au plan de relance dont le montant a été chiffré à 100 milliards d'euros par le Gouvernement.

Elle-même dotée de plus de 36 milliards d'euros, elle comprend trois programmes, 362 « Écologie », 363 « Compétitivité » et 364 « Cohésion », dont les crédits seront présentés plus en détail dans la deuxième partie du présent rapport.

I. LES CRÉDITS DE PAIEMENT INSCRITS EN LOI DE FINANCES SONT EN FORTE DIMINUTION

La mission « Plan de relance » a reçu la totalité de ses autorisations de paiement au cours de ses deux premières années d'existence en 2021 et 2022. Le montant des crédits de paiement demandés au cours des années suivantes tend à couvrir le montant de ces autorisations d'engagement.

Évolution des crédits de la mission « Plan de relance »

(en millions d'euros et en pourcentage)

   

2022 exécution

2023 LFI

2024 PLF

Évolution PLF 2024 / LFI 2023

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (%)

362 - Écologie

AE

3 473,1

-

-

-

 

CP

5 012,5

3 556,4

1 169,1

- 2 387,3

- 67,1 %

363 - Compétitivité

AE

1 155,0

-

-

-

 

CP

1 944,3

380,4

66,0

- 314,4

- 82,7 %

364 - Cohésion

AE

2 950,3

-

-

-

 

CP

4 636,9

460,7

178,9

- 281,8

- 61,2 %

Total mission

AE

7 578,4

-

-

-

 

CP

11 593,6

4 397,5

1 414,0

- 2 983,5

- 67,8 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les lois et projets de lois de finances

Ces crédits sont en forte diminution par rapport aux premières années de mise en oeuvre de la mission « Plan de relance ».

Évolution des crédits de paiement des trois programmes
de la mission « Plan de relance »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires et des arrêtés de report. Les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2023 sont complétés des crédits reportés, dont la consommation n'est toutefois pas certaine. Le montant des crédits reportés de 2023 vers 2024 n'est pas encore connu.

Selon l'échéancier prévisionnel des paiements fourni par le projet annuel de performances, le montant total des crédits de paiements serait de 658,8 millions d'euros en 2025, 629,0 millions d'euros en 2026 et 139,1 millions d'euros après 2026.

Ces montants inscrits en loi de finances ne correspondent toutefois pas au montant réel des crédits dépensés chaque année, car la mission « Plan de relance » se caractérise par l'emploi de procédures spécifiques, dont les reports de crédit, qui éloignent la consommation réelle des prévisions retracées par les documents budgétaires.

II. AU-DELÀ DU BUDGET OFFICIEL, UN « BUDGET MASQUÉ » S'AFFRANCHIT DES CONTRAINTES D'ANNUALITÉ

La mission « Plan de relance » se caractérise par des modalités de gestion très dérogatoires des procédures budgétaires habituelles.

Ces procédures permettent aux gestionnaires des crédits de s'affranchir très largement des principes budgétaires afin de gérer et réallouer les crédits dans une perspective largement pluriannuelle, rendant le suivi particulièrement complexe et l'évaluation très difficile.

A. LES CRÉDITS OUVERTS EN LOI DE FINANCES ALIMENTENT UN IMPORTANT FONDS DE CRÉDITS REPORTÉS D'ANNÉE EN ANNÉE

Comme les années précédentes, les crédits de paiement ouverts par la loi de finances initiale pour 2023, soit 4,4 milliards d'euros, ont été complétés par de très importants reports de crédits ouverts au cours des années précédentes mais non consommés, à hauteur de 6,0 milliards d'euros.

1. Les crédits mis à disposition résultent principalement, en 2023, de crédits reportés...

Le montant total des crédits disponibles en 2023 a ainsi été égal à 2,4 fois le montant des crédits de paiement soumis à l'autorisation parlementaire. Cette pratique concerne chacun des programmes de la mission.

Crédits initiaux et crédits totaux disponibles
sur les programmes de la mission « Plan de relance »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, à partir du système d'information Chorus

S'agissant des autorisations d'engagement, si aucune n'a été prévue par la loi de finances initiale pour 2023, 602,8 millions d'euros d'autorisations d'engagement ont été ouvertes par report de crédits.

Au 16 octobre dernier, sur ce montant, seuls 67,6 millions d'euros d'autorisations d'engagement avaient été consommées. Il paraît donc probable que les autorisations d'engagement ne seront toujours pas consommées intégralement à la fin 2023. Si elles étaient de nouveau reportées et consommées en 2024, il y aurait un écart supérieur à trois années entre l'autorisation parlementaire, accordée principalement par le projet de loi de finances pour 20212(*), et le début de réalisation des projets concernés.

Cette situation conforte la position prise par le Sénat l'an passé, qui avait adopté, sur la proposition du rapporteur, un amendement3(*) fondé sur le principe selon lequel il n'était plus approprié, bien après le retour de l'économie à la normale, d'ouvrir de nouveaux engagements au titre d'un plan conçu à l'été 2020 pour relancer l'économie à la sortie des phases de confinement. Les nouveaux projets devraient en effet être financés sur les missions de droit commun du budget général.

2. ... et le Gouvernement prévoit manifestement de poursuivre cette pratique dans les années à venir

Il ressort des données issues du système d'information Chorus que l'état de consommation des crédits en 2023 est très faible. Au 16 octobre, seuls 3,0 milliards d'euros de crédits de paiement avaient été consommés, soit un taux de consommation de 28,9 %.

L'échéancier pluriannuel des dépenses présenté par les documents budgétaires permet lui-même de prévoir une très importante sous-consommation des crédits en 2023.

Le besoin en crédits de paiement à partir de 2023 peut en effet être estimé à 13,3 milliards d'euros. Ce montant résulte, d'une part, des engagements pris avant 2023 et non encore couverts par des décaissements, soit 12,7 milliards d'euros4(*), et, d'autre part, des engagements qui pourraient être pris en 2023, soit, dans l'hypothèse maximale d'une consommation de toutes les autorisations d'engagement en fin d'année 2023, 602,8 millions d'euros.

Or le montant des crédits de paiement disponibles en 2023, y compris les reports, est de 10,4 milliards d'euros. Si tous ces crédits de paiement étaient consommés dès 2023, le montant des engagements restant à couvrir par des paiements à la fin 2023 serait donc de 2,9 milliards d'euros. Cela ne sera pas le cas, car le projet annuel de performances indique que 7,3 milliards d'euros d'engagements n'auront toujours pas été couverts par des crédits de paiement à la fin 2023 : on peut donc prévoir que quelque 4,4 milliards d'euros de crédits n'auront pas été consommés.

La bonne pratique serait d'annuler la majeure partie de ces crédits dans la loi de finances rectificative de fin de gestion5(*) et d'ouvrir en loi de finances pour 2024 les seuls crédits nécessaires.

Or le Gouvernement, de manière constante, a reporté les crédits non consommés d'année en année sur les trois programmes de cette mission et les documents budgétaires indiquent que « en tant que de besoin, les crédits de paiement non consommés pourront être reportés » et « complèteront la chronique de CP ici présentés ».

C'est ce que confirme la description des actions menées par le projet annuel de performances, qui indique d'ores et déjà qu'un grand nombre de dispositifs, dont les crédits sont nuls ou très faibles dans les documents budgétaires, seront en réalité financés par des crédits reportés (voir infra la description des programmes).

Cette volonté du Gouvernement est également exprimée à l'article 44 du projet de loi de finances pour 2024, qui autorise les trois programmes de la mission à déroger à la règle, fixée par l'article 15 de la loi organique relative aux lois de finances, limitant à 3 % les reports de crédits.

Ainsi, alors que le projet annuel de performances présente, pour chacun des programmes, un échéancier prévisionnel des crédits de paiement pour les années à venir, cette programmation n'a certainement que peu à voir avec les décaissements réels.

Cela ressort clairement de l'absence d'égalité entre la prévision d'autorisations d'engagement non couvertes par des paiements fin 2023 et la somme des crédits de paiement qu'il est prévu d'ouvrir au cours des années à venir.

Échéancier prévisionnel des crédits de paiement

(en milliards d'euros)

Source : calculs commission des finances, à partir de l'échéancier des crédits de paiement du projet annuel de performances. AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement.

B. DES PROGRAMMES HÉTÉROCLITES PERMETTENT DE CONTOURNER LE PRINCIPE DE SPÉCIALITÉ BUDGÉTAIRE, RENDANT LE SUIVI DES CRÉDITS TRÈS DIFFICILE

Dès l'origine, la mission « Plan de relance » a été fondée sur trois programmes de grande taille : lors de la première année d'exécution en 2021, 6,6 milliards d'euros de crédits de paiement ont été ouverts pour le programme 362 « Écologie », 3,9 milliards d'euros pour le programme 363 « Compétitivité » et 11,4 milliards d'euros pour le programme 364 « Cohésion ». Ce mode de gestion était présenté comme une manière de permettre une réallocation souple des crédits au profit des dispositifs dont la mise en oeuvre était la plus rapide.

Cette pratique était contestable au regard de la définition même d'un programme budgétaire qui, aux termes de l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances, « regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère ».

Elle a permis de contourner largement le principe de spécialité budgétaire, les gestionnaires de programme pouvant faire varier librement les lignes de crédit entre un dispositif et un autre.

Or ces redéploiements n'ont été décrits que de manière incomplète dans les documents budgétaires et les réponses apportées au rapporteur sur cette question demeurent souvent très sommaires.

En outre, ces crédits ont été partiellement attribués à d'autres ministères par des procédures de transfert ou de virement. Enfin, dans le cas où les crédits sont attribués aux bénéficiaires finaux par des opérateurs ou des entités publiques autres que l'État, c'est le versement des crédits aux tiers qui est retracé dans le système d'information Chorus, et non le versement effectif aux bénéficiaires.

Si certaines administrations ont mis en place un suivi plus approfondi des mesures dont elles assurent le pilotage, ce suivi n'est pas centralisé et peut réunir des mesures labellisées « plan de relance » et d'autres qui relèvent des politiques de droit commun.

Au total, le constat d'un suivi budgétaire « partiel » fait l'an passé par la Cour des comptes dans un rapport remis à la commission des finances du Sénat sur la mise en oeuvre des crédits du plan de relance6(*), reste pleinement d'actualité.

C. LA MISSION « PLAN DE RELANCE », QUI DEVAIT PORTER DES MESURES TEMPORAIRES DE RELANCE, FINANCE DES MESURES QUI AURAIENT DÛ ÊTRE IMPUTÉES AU BUDGET DES MINISTÈRES

Comme le rapporteur l'a fait observer dès la présentation de la mission « Plan de relance » en 2020, cette mission a servi et sert encore de véhicule budgétaire commode pour financer des mesures sans lien avec la relance de l'économie et qui, dès le début, auraient dû être inscrites, si leur utilité était avérée, dans le budget ordinaire des ministères concernés.

À titre d'exemple, la mission « Plan de relance » continuera en 2024 à financer un projet de portail public de facturation piloté par la direction générale des finances publiques (18,6 millions d'euros) ou l'acquisition d'hélicoptères par la gendarmerie nationale (10 millions d'euros). Cette dernière mesure, portée en crédits de paiement par la mission « Plan de relance », résulte d'ailleurs d'autorisations d'engagements ouvertes dès l'été 2020 non pas sur cette mission, qui n'existait pas encore, mais sur la mission « Sécurités » et reportées par la suite sur la mission « Plan de relance ».

La mission a également servi à financer des politiques qui, tout en ayant un effet sur la relance de l'économie, ne présentaient guère le caractère temporaire qui, en principe, devait justifier leur inscription dans une mission dédiée : ces dépenses qui ne devaient durer que pendant deux années sont d'ailleurs souvent devenues pérennes.

L'un des cas les plus manifestes est le soutien à la rénovation énergétique des logements privés, politique connue pour le nom MaPrimeRénov'. La France compte 37,8 millions de logements, dont 31,0 millions de résidences principales, de sorte que l'adaptation de ce parc au changement climatique, qui passe par une rénovation massive, est un enjeu de long, voire de très long terme, dont la mise en oeuvre prendra certainement plusieurs décennies. Ainsi l'ouverture à tous les propriétaires de cette prime, mesure qui, fin 2020, devait être prise « de manière exceptionnelle et dans le cadre de la relance »7(*), est-elle désormais pérennisée sur les crédits des missions de droit commun.

La rénovation des bâtiments publics et le fonds « friches » font également l'objet, depuis 2023, d'un nouveau programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », créé sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables », même si des crédits seront encore versés sur la mission « Plan de relance » au titre des projets déjà lancés.

De même, la recherche duale civile et militaire, portée par la mission « Plan de relance » pendant deux années, est à nouveau financée par la mission « Recherche et enseignement supérieur » à compter de 2023, comme c'était le cas jusqu'en 2021.

Enfin, l'activité partielle, imputée à la fois sur la mission « Plan d'urgence » et sur le programme 364 « Cohésion » de la présente mission, a été transférée en 2023 sur la mission « Travail et emploi ».

III. LA MULTIPLICATION DES PLANS REND LEUR ÉVALUATION PLUS DIFFICILE

Un comité de suivi du plan de relance est chargé de l'évaluation du plan de relance. Il a remis un premier rapport en octobre 2021, un deuxième rapport en décembre 2022 et rendra son rapport final en décembre 2023.

Le comité de suivi note d'abord « l'intrication du plan de relance avec d'autres plans mis en oeuvre par le Gouvernement »8(*). La Cour des comptes faisait également part de « recouvrements incertains entre France Relance, le programme d'investissements d'avenir et « France 2030 » » dans sa communication précitée à la commission des finances du Sénat.

Au plan de relance se sont en effet ajoutées de nombreuses mesures de grande ampleur liées au soutien aux entreprises face à l'inflation, ou au plan France 2030 qui porte parfois sur les mêmes politiques que le plan France Relance, par exemple le financement du plan de soutien à l'hydrogène.

En outre, si la situation économique s'est bien évidemment améliorée par rapport à la période de la crise sanitaire, les rapports du comité de suivi peinent à déterminer un effet spécifique du plan de relance. Le niveau de la production était d'ailleurs revenu à son état d'avant-crise dès le second semestre 2021, à une époque où le plan de relance était loin d'avoir produit tous ses effets.

Comme le fait observer le projet annuel de performances de la mission, le prochain rapport ne pourra probablement pas statuer sur l'effet pérenne du plan de relance, faute de recul suffisant.

Quant au dispositif de performance de la mission, il est largement défaillant et ne semble avoir été mis en place que pour respecter formellement les obligations de la loi organique relative aux lois de finances.

En se limitant aux indicateurs de mission9(*), l'indicateur 1.1 « Taux de consommation des crédits » ne porte pas sur la qualité de la dépense mais sur le montant brut des engagements et des décaissements : il ne peut être considéré comme une mesure de la performance des politiques publiques. Sa présence permet surtout de constater la lenteur de mise en oeuvre du plan de relance, puisque le taux de consommation des crédits de paiement n'a été que de 72 % en 2021, qui était l'année cruciale pour le redémarrage de l'économie, et de 66 % en 2022.

L'indicateur 2.1 « Créations d'emplois liées aux mesures de relance » n'est renseigné pour aucune année, car il porte sur une grandeur particulièrement difficile à mesurer. Le deuxième rapport du comité d'évaluation du plan France Relance n'était pas encore en mesure de donner de conclusions sur l'effet en termes d'emploi du plan ; il notait seulement le plan « 1 jeune, 1 solution », financé par le programme 364 « Cohésion », pouvait expliquer la moitié de la hausse du taux d'emploi des jeunes entre la fin 2019 et le troisième trimestre 2022. Il précisait toutefois qu'il s'agissait d'une hausse fortement subventionnée, de sorte qu'on peut s'interroger sur son caractère véritablement durable.

IV. LE FINANCEMENT EUROPÉEN DU PLAN DE RELANCE RESTE SOUMIS À DE NOMBREUSES INCERTITUDES

Le plan national de relance et de résilience (PNRR) a été présenté par le Gouvernement le 29 avril 2021 afin de placer les actions du plan de relance français dans la perspective des priorités fixées au niveau européen.

Il prévoit un co-financement européen à hauteur de 41 milliards d'euros, qui s'impute sur l'enveloppe totale de 100 milliards d'euros du plan de relance français. Si le PNRR ne précise pas explicitement la proportion de ce co-financement qui correspond aux dépenses de la mission « Plan de relance », celle-ci porte une grande partie des priorités européennes. Les noms des trois programmes de la mission reprennent d'ailleurs les intitulés des trois piliers du plan de relance européen.

Prise en charge des composantes du plan de relance par la Facilité pour la reprise et la résilience

(en milliards d'euros)

En vert : pilier « Écologie ». En rouge : pilier « Compétitivité ». En bleu : « Cohésion ».

Source : commission des finances, à partir du programme national de relance et de résilience

La rapidité de la reprise économique, par application des règles de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), a entraîné une réduction à 37,5 milliards d'euros du montant de subvention que pourra recevoir la France.

Toutefois, le PNRR a fait l'objet d'une mise à jour en avril 2023, qui donne droit à la France à 2,8 milliards d'euros supplémentaires au titre du nouvel instrument REPowerEU. Ce plan, qui comporte 20 milliards d'euros de subventions supplémentaires au niveau européen, a été mis en place après l'invasion de l'Ukraine afin de renforcer l'indépendance et la sécurité de l'approvisionnement énergétique de l'Union.

Le calendrier des versements est toutefois soumis à l'atteinte de « cibles » et « jalons » définis dans le PNRR. Ces cibles et jalons concernent des investissements ou des réformes : à titre d'exemple, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit, dans son article 21, la mise en place d'un dispositif d'évaluation de la qualité des politiques publiques qui correspond à un jalon défini dans le PNRR10(*).

Ce processus nécessite la mise en place d'un dispositif d'audit et de contrôle lourd aussi bien pour l'État, en termes de gestion, que pour des organismes et administrations, notamment locales, peu habituées aux financements européens.

Si un premier versement de 5,1 milliards d'euros a eu lieu en 2021 au titre du préfinancement du plan de relance, les versements suivants font suite à des demandes de la France fondées sur l'atteinte d'un certain nombre de jalons et de cibles. La première demande de paiement a conduit au versement de 7,4 milliards d'euros au printemps 2022. Après la révision du PNRR, acceptée par la Commission européenne le 14 juillet dernier, une deuxième demande de versement d'un montant supérieur à 10 milliards d'euros a été transmise à la fin du mois de juillet à la Commission européenne.

Le financement du plan de relance européen demeure toutefois soumis à des incertitudes qui pourraient avoir un impact sur son coût pour la France.

D'une part, le Gouvernement considère que les versements européens sont liés notamment à l'adoption d'une loi de programmation des finances publiques. Ayant pu consulter, en tant que rapporteur général de la commission des finances, des échanges entre la Commission européenne et le Gouvernement français sur la réalisation des jalons et cibles du PNRR, le rapporteur constate qu'une telle automaticité n'est pas établie.

D'autre part, le remboursement, pour l'Europe, des subventions données aux États membres était fondé à l'origine sur la mise en place de ressources propres en application de l'accord interinstitutionnel du 16 décembre 202011(*). Parmi ces ressources propres devait figurer une taxe carbone instaurée aux frontières de l'Union européenne, dont le rendement pourrait être moindre qu'espéré12(*). En outre, la hausse des taux d'intérêt va nécessairement renchérir le coût des emprunts réalisés par la Commission européenne.

Au total, l'impact budgétaire net du plan de relance pour la France demeure incertain.

DEUXIÈME PARTIE :
LES CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE
DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2024

I. LE PROGRAMME 362 « ÉCOLOGIE »

Le programme 362 « Écologie » regroupe les crédits budgétaires relatifs aux mesures de soutien du plan de relance ayant le lien le plus direct avec la transition écologique.

En 2024, il fait l'objet de demandes de crédits à hauteur de 1,2 milliard d'euros de crédits de paiement, sans ouverture d'autorisations d'engagement nouvelles. Les montants seront donc exprimés dans les développements qui suivent en crédits de paiement, sauf mention contraire.

Évolution des crédits par action du programme 362

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2023

PLF 2024

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (volume)

Évolution PLF 2023 / LFI 2021 (%)

01 - Rénovation énergétique

AE

-

-

   

CP

982,6

682,6

- 300,0

- 30,5 %

02 - Biodiversité, lutte contre l'artificialisation

AE

-

-

   

CP

523,4

29,3

- 494,1

- 94,4 %

03 - Décarbonation de l'industrie

AE

-

-

   

CP

288,0

-

- 288,0

- 100,0 %

04 - Économie circulaire et circuits courts

AE

-

-

   

CP

100,0

-

- 100,0

- 100,0 %

05 - Transition agricole

AE

-

-

   

CP

206,0

42,4

- 163,6

 - 79,4 %

06 - Mer

AE

-

-

   

CP

76,8

35,3

- 41,5

- 54,0 %

07 - Infrastructures et mobilité vertes

AE

-

-

   

CP

394,7

246,7

- 148,0

- 37,5 %

08 - Énergies et technologies vertes

AE

-

-

   

CP

801,6

67,2

- 734,4

- 91,6 %

09 - Dotation régionale d'investissement

AE

-

-

   

CP

183,3

65,5

- 117,9

- 64,3 %

Total programme 362

AE

-

-

-

-

CP

3 556,4

1 169,1

- 2 387,3

- 67,1 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Contrairement aux années précédentes, ces ouvertures de crédits ne concernent pas toutes les actions de la mission.

Près de la moitié des ouvertures de crédit se concentrent sur l'action 01 « Rénovation énergétique » (682,6 millions d'euros), en particulier pour le financement des projets de rénovation thermique des bâtiments publics de l'État et des opérateurs d'une part (373,9 millions d'euros), des collectivités territoriales de l'autre (296 millions d'euros).

Un autre quart des crédits porte sur l'action 07 « Infrastructure et mobilité vertes », qui reçoit 246,7 millions d'euros de crédits de paiement nouveaux pour financer le soutien aux transports en commun et au vélo.

Une telle présentation des crédits ouverts dans le projet de loi de finances est toutefois très éloignée de la réalité des crédits qui seront dépensés et de leur répartition entre les différentes actions.

Ainsi, alors que la loi de finances pour 2023 n'avait elle non plus pas ouvert d'autorisations d'engagement nouvelles, le programme 362 a bénéficié de 91,8 millions d'euros d'autorisations d'engagement reportées de 2022, qui n'avaient été consommées qu'à hauteur de 8,1 millions d'euros à la mi-octobre.

Surtout, la plupart des dispositifs, qu'ils soient ou non destinataires d'ouvertures de crédits, seront financés par des crédits reportés.

Pour ne citer que les montants de reports les plus élevés mentionnés par le projet annuel de performances, les projets de rénovation et de réhabilitation des logements sociaux devraient dépenser 149,2 millions d'euros, entièrement par report de crédits. Les projets de recyclage des friches reçoivent 29 millions d'euros de crédits dans le présent projet de loi de finances, mais leur prévision de consommation est de 189,1 millions d'euros et sera financée de la même manière.

Il en est de même des mesures de soutien à l'économie circulaire et aux circuits courts (134,5 millions d'euros) et aux lignes ferroviaires (98,4 millions d'euros).

Le projet annuel de performance mentionne également l'utilisation de crédits reportés sans en préciser le montant sur certaines mesures importantes telles que le financement du projet important d'intérêt européen commun (PIIEC) sur l'hydrogène (financé à hauteur de 1,3 milliard d'euros par le plan de relance et de 2 milliards d'euros par le plan France 2030), les plans de soutien aéronautique et automobile ou l'action de soutien à la filière nucléaire.

S'agissant de l'efficacité des actions menées, elle demeure difficile à déterminer, comme il a été précisé supra dans la présentation d'ensemble de la mission.

S'agissant par exemple du dispositif MaPrimeRénov', le rapport précité du comité de suivi du plan France Relance notait en décembre 2022 que l'évaluation de l'apport spécifique du plan de relance dans un dispositif qui avait été mis en place dès le 1er janvier 2020 est particulièrement difficile.

En tout état de cause, et indépendamment de cet effet spécifique, « la contribution de MaPrimeRénov' aux trajectoires de réduction des émissions de gaz à effets de serre et de consommations énergétiques ne peut pas être précisément estimée » : cette estimation nécessiterait en effet des informations sur la consommation d'énergie avant et après travaux, qu'il n'a pas été prévu de recueillir dans le cadre du dispositif.

II. LE PROGRAMME 363 « COMPÉTITIVITÉ »

Dans une mission pourtant caractérisée par sa diversité, le programme 363 « Compétitivité » est sans doute le plus hétérogène.

Il finançait, dans son périmètre d'origine et pour un montant total de 6,0 milliards d'euros en autorisations d'engagement, aussi bien des aides aux entreprises pour renforcer leurs fonds propres (action 01 « Financement des entreprises »), favoriser la relocalisation d'activités (action 02 « Souveraineté technologique et résilience ») et soutenir leur activité à l'export (action 03 « Plan de soutien à l'export) que des investissements dans des équipements culturels (action 05 « Culture ») ou des commandes militaires lancées avant le démarrage du plan de relance (action 06 « Commandes militaires »), auxquels se sont ajoutées, regroupées dans une action générique 04 « Mise à niveau numérique de l'État, des territoires et des entreprises - modernisation des administrations régaliennes », un très vaste ensemble de dépenses d'équipement ou d'entretien des ministères dont le lien avec la relance de l'économie était dans l'ensemble inexistant.

En 2024, le projet de loi de finances ne demande plus que des ouvertures très limitées de crédits de paiement pour le programme 363.

Évolution des crédits par action du programme 363

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2023

PLF 2024

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (volume)

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (%)

01 - Financement des entreprises

AE

-

-

   

CP

-

-

   

02 - Souveraineté technologique et résilience

AE

-

-

   

CP

263,9

27,4

- 236,5

- 89,6 %

03 - Plan de soutien à l'export

AE

-

-

   

CP

8,0

8,0

+ 0,0

+ 0,0 %

04 - Mise à niveau numérique de l'État, des territoires et des entreprises - modernisation des administrations régaliennes

AE

-

-

   

CP

30,0

20,6

- 9,4

- 31,4 %

05 - Culture

AE

-

-

   

CP

42,0

-

- 42,0

- 100,0 %

06 - Commandes militaires

AE

-

-

   

CP

36,5

10,0

- 26,5

- 72,6 %

Total programme 363

AE

-

-

   

CP

380,4

66,0

- 314,4

- 82,7 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les actions 01 et 05 sont dépourvues de crédits nouveaux. Les mesures relatives au financement des entreprises feront toutefois l'objet de décaissements à partir de crédits reportés, pour un montant non précisé par les documents budgétaires.

S'agissant des relocalisations relevant de l'action 02, les derniers paiements devraient intervenir en 2024 pour le soutien à des projets industriels dans les territoires.

Le soutien à l'export ne prévoit que 8 millions d'euros de paiements en 2024 afin de doter des fonds d'études et d'aide au secteur privé.

Si la plupart des actions relevant de l'action 04 semblent à présent terminées, 20,5 millions d'euros seront encore consacrés à deux projets numériques, dont un projet de facturation électronique et un audit de des systèmes de sécurité de l'État. Cette dernière action n'a bien entendu qu'un lien difficile à déterminer avec l'objectif de relance et relève des missions normales de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI).

Enfin, comme il a été mentionné supra, le plan de commandes d'équipements par les forces de sécurité se poursuit et consacre 10 millions d'euros à la commande d'hélicoptères par la gendarmerie nationale.

L'échéancier pluriannuel des dépenses du programme 363 prévoit une légère augmentation des décaissements en 2025 (69,3 millions d'euros), suivie d'une diminution graduelle.

L'ensemble de cette présentation, comme pour les autres programmes de la mission, est à considérer avec une certaine distance compte tenu de l'importance des crédits reportés.

Leur niveau s'est en effet élevé à 1 785,8 millions d'euros en 2023, pour des crédits ouverts en loi de finances initiale de 332,0 millions d'euros seulement. La consommation à la mi-octobre est de 445,8 millions d'euros, soit 20,6 %, ce qui permet de présumer que les 66,0 millions d'euros de crédits de paiement prévus par le projet de loi de finances seront complétés en 2024 par une masse considérable de crédits supplémentaires, dont l'utilisation n'est en rien documentée pour ce programme dans le projet annuel de performances.

Or ces crédits reportés depuis 2022 paraissent plus que suffisants pour couvrir, à eux seuls, les engagements déjà pris par l'État ou pris au cours de l'année 2023.

En effet, les autorisations d'engagement disponibles en 2023 sont de 331,9 millions d'euros (entièrement par report depuis 2022), mais seule une fraction de 59,5 millions d'euros avait été consommée à la mi-octobre 2023.

Or, même si la conclusion de contrats importants d'ici à la fin de l'année conduisait, par hypothèse, à transformer en engagements fermes la totalité des autorisations d'engagement, le montant des crédits de paiement disponibles en 2023, soit 2 166,2 milliards d'euros13(*), serait supérieur de 93,6 millions d'euros à la somme des engagements pris avant 2023 ou courant 2023, soit 2 072,6 millions d'euros14(*).

Comparaison entre les engagements et les crédits de paiement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

III. LE PROGRAMME 364 « COHÉSION »

L'intitulé du programme 364 « Cohésion » doit être compris dans un sens à la fois social (mesures en faveur de l'emploi, des jeunes, des personnes en situation de handicap, des personnes précaires) et territorial (mesures relevant de l'aménagement du territoire).

Ce programme était en partie redondant avec les actions menées dans le cadre du plan d'urgence face à la crise sanitaire, à tel point qu'il avait été mobilisé, en 2021, pour réalimenter le programme d'activité partielle d'urgence à hauteur de 4 milliards d'euros, dans une confusion entre les véhicules budgétaires qu'avait dénoncée la commission des finances15(*). En conséquence, la plupart de ses actions n'ont reçu des crédits nouveaux qu'en 2021 et 2022. Seules les actions 02 « Jeunes » et 07 « Cohésion territoriale » ont reçu des crédits de paiement en loi de finances initiale pour 2023.

En 2024, le programme 364 ne prévoit des crédits de paiement que pour l'action 07, à hauteur de 178,9 millions d'euros.

Évolution des crédits par action du programme 364

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2023

PLF 2024

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (volume)

Évolution PLF 2024 / LFI 2023 (%)

01 - Sauvegarde de l'emploi

AE

-

-

   

CP

-

-

   

02 - Jeunes

AE

-

-

   

CP

155,2

-

- 155,2

- 100,0 %

03 - Handicap

AE

-

-

   

CP

-

-

   

04 - Formation professionnelle

AE

-

-

   

CP

-

-

   

05 - Recherche

AE

-

-

   

CP

-

-

   

06 - Coopération sanitaire

AE

-

-

   

CP

-

-

   

07 - Cohésion territoriale

AE

-

-

   

CP

305,5

178,9

- 126,6

- 41,4 %

08 - Soutien aux personnes précaires

AE

-

-

   

CP

-

-

   

Total programme 364

AE

-

-

   

CP

460,7

178,9

- 281,8

- 61,2 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

En effet, cette action, contrairement aux autres actions du programme, sert de support au financement d'actions de nature pluriannuelle. En 2024, seront ainsi soutenus notamment des projets s'inscrivant dans le plan « Avenir Montagne », dans les contrats de plan États-régions (CPER), dans le plan de transformation et d'investissement de la Corse (PTIC) et dans les programmes de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). D'autres mesures concernent le déploiement du numérique, le renforcement du réseau routier et des ponts et l'offre de tourisme durable.

Ce programme est toutefois concerné par les reports de crédits au même titre que les autres programmes de la mission. En 2023, les crédits inscrits en loi de finances, d'un montant de 460,7 millions d'euros, ont été complétés par des reports d'un montant de 1 170,9 millions d'euros. Les crédits disponibles étant encore de 1 062,5 millions d'euros à la mi-octobre, il est probable que des reports de crédits très importants seront effectués en 2024.

Leur utilisation éventuelle ne fait l'objet d'aucune documentation dans les documents budgétaires et n'apparaîtra donc que dans les rapports annuels de performance publiés au printemps 2025, en annexe au projet de loi relative aux résultats de la gestion.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, le Gouvernement n'a retenu aucun amendement relatif aux crédits de la mission « Plan de relance ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 25 octobre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-François Husson, rapporteur spécial, sur la mission « Plan de relance ».

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. - Depuis l'an dernier, cette mission ouvre uniquement des crédits de paiement, qui s'élèveront en 2024 à 1,4 milliard d'euros, dont 1,2 milliard d'euros pour le programme 362 « Écologie », 66 millions d'euros pour le programme 363 « Compétitivité » et 179 millions d'euros pour le programme 364 « Cohésion ».

Les principales dépenses devraient concerner, sur le programme 362, la rénovation thermique des bâtiments publics de l'État et des opérateurs à hauteur de 374 millions d'euros, d'une part, des collectivités territoriales à hauteur de 296 millions d'euros, d'autre part, ainsi que le soutien aux transports en commun et au vélo pour un montant de 247 millions d'euros. Le programme 364 financera, pour 179 millions d'euros, des actions pluriannuelles s'inscrivant dans plusieurs programmes d'aménagement du territoire.

Dans les années à venir, la consommation de crédits devrait encore diminuer, puisque le même montant de crédits, soit 1,4 milliard d'euros, est prévu sur les années 2025 et suivantes.

Ce sont là les chiffres figurant dans le projet de loi de finances, c'est-à-dire ceux qui sont soumis à l'autorisation parlementaire.

Mais, je dois le dire, la réalité est malheureusement un peu différente. En effet, si 42,5 milliards d'euros d'autorisations de crédits ont été consommés en 2021 et 2022, le montant des crédits de paiement utilisés jusqu'à présent est de 33,4 milliards d'euros seulement. Il faudra donc beaucoup plus de crédits dans les années à venir que ceux qui sont inscrits dans les textes.

La technique utilisée par le Gouvernement nous est désormais bien connue : il s'agit des fameux reports de crédits.

Ainsi, de nouveaux engagements sont encore pris en 2023, et probablement encore en 2024, grâce aux reports d'autorisations d'engagement non consommées les années précédentes, alors que les dernières autorisations d'engagement ouvertes en loi de finances remontent à 2022.

Quant aux crédits de paiement - ceux qui ont été ouverts par la loi de finances initiale pour 2023 -, d'un montant de 4,4 milliards d'euros, ils ont été complétés par des reports de 6 milliards d'euros de crédits ouverts les années précédentes, et non encore consommés. Le montant total des crédits disponibles en 2023 a ainsi été égal à 2,4 fois le montant soumis à l'autorisation parlementaire.

Il ressort d'ailleurs des documents budgétaires qu'il resterait encore, à la fin de 2023, 7,3 milliards d'euros d'engagements non couverts par des paiements. Seul le report de crédits autorisés plusieurs années auparavant permettra d'y faire face.

Nous avons souvent regretté l'utilisation massive de cette procédure. Il serait préférable d'annuler les crédits non nécessaires en loi de finances de fin de gestion, voire plus tard en loi de règlement, et d'ouvrir en loi de finances initiale les crédits nécessaires, aussi bien en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement.

Au lieu de cela, les documents budgétaires, lorsqu'ils décrivent les différents dispositifs financés par le plan de relance, sont parsemés de mentions sibyllines telles que « En 2024, aucune ouverture de crédits de paiement n'est prévue sur ce dispositif. Les versements intermédiaires seront assurés par des reports de crédits de 2023 sur 2024. »

Disons-le, au-delà du budget officiel présenté dans le projet de loi de finances, il y a quelque part un budget « masqué », permettant aux gestionnaires de programme et au Gouvernement de gérer les crédits avec une grande liberté, souvent plusieurs années après l'autorisation parlementaire, et avec un suivi très insuffisant.

Car ce n'est pas seulement le principe d'annualité budgétaire qui est contourné, c'est aussi celui de spécialité. Alors que les crédits sont normalement ouverts en loi de finances pour une politique publique donnée, les programmes ont été définis de manière tellement large qu'ils permettent des réallocations de crédits sur lesquelles l'information est extrêmement parcellaire.

À titre d'exemple, le programme 363 continuera à financer en 2024 aussi bien l'acquisition d'hélicoptères par la gendarmerie nationale qu'un projet de portail public de facturation piloté par la direction générale des finances publiques. Le premier dispositif a été lancé dès l'été 2020, avant même la création de la mission « Plan de relance », puis lui a été rattaché. Le portail de facturation, quant à lui, fait partie des nombreux dispositifs qui auraient dû être imputés sur les dépenses ordinaires des ministères, et non sur le plan de relance.

On le voit bien, et certains rapporteurs spéciaux le constateront certainement, un grand nombre de dispositifs du plan de relance présentés comme temporaires sont devenus pérennes et ont désormais rejoint les crédits des missions dites « ordinaires ». C'est le cas, notamment, de la rénovation énergétique des bâtiments publics ou des logements privés - politique essentielle, et de long terme, qui, bien sûr, ne présentait absolument pas le caractère temporaire d'un plan de relance.

Au total, l'évaluation d'un tel dispositif est particulièrement difficile. Les rapports du comité de suivi du plan de relance constatent, certes, l'amélioration de la situation économique par rapport à la période de la crise sanitaire, mais ils restent très prudents sur le rôle spécifique du plan de relance.

La Cour des comptes constate par ailleurs une accumulation des plans d'urgence ou de transformation de l'économie depuis trois ans, ce qui, selon elle, ne permet pas de déterminer l'apport spécifique de chacun d'entre eux.

Enfin, le financement du plan de relance doit être assuré en partie par l'Union européenne. Cette question dépasse le cadre strict de la mission « Plan de relance », car il s'agit d'une recette versée au budget général dans la catégorie des recettes non fiscales. Elle est toutefois importante. Les subventions européennes sont soumises à la mise en place d'un dispositif lourd de cibles et de jalons. Toutefois, si le versement au titre de 2023 n'a pas encore eu lieu, c'est d'abord parce que la demande a été déposée à la fin du mois de juillet seulement, après une révision du dossier soumis à la Commission européenne qui tendait à intégrer le nouvel instrument REPowerEU, introduit après l'invasion de l'Ukraine. Le Gouvernement allègue de manière répétée que les versements européens ne viendront qu'après l'adoption de la loi de programmation des finances publiques... Cela reste à démontrer !

En outre, et surtout, le plan de relance européen devait être financé par de nouvelles ressources propres, dont la taxe carbone aux frontières, ainsi que par des emprunts. Or le niveau incertain de ces ressources et la hausse des taux d'intérêt risquent de remettre en cause ce schéma de financement, ce qui pourrait finir par peser sur les États membres.

Nous avons déjà dénoncé, l'an passé, le manque de lisibilité des crédits, la confusion entre les véhicules budgétaires et, en définitive, l'utilisation de cette mission comme un support de financement bien pratique pour des mesures plus hétéroclites les unes que les autres. Nous avions d'ailleurs réduit les crédits d'un montant de 1 milliard d'euros, réduction portant sur des crédits n'ayant plus vocation à être utilisés.

Le constat que je fais cette année est encore plus sévère : contournement massif de l'autorisation parlementaire, absence de transparence sur la dépense, évaluation impossible. Pour un budget qui, d'après les ministres, devait être géré « à l'euro près », ce sont des milliards d'euros de dépenses qui ne sont pas documentées, ou de manière très évasive. J'imagine la réaction d'une chambre régionale des comptes si une collectivité locale venait à présenter un tel budget...

Pour moi, le Gouvernement va trop loin. Je vous propose donc, mes chers collègues, de rejeter les crédits de la mission « Plan de relance ». Les crédits en caisse sont tellement importants que cela n'empêchera aucunement l'administration de faire face aux engagements déjà pris.

M. Claude Raynal, président. - Je n'avais pas connaissance de cette conclusion, qui, néanmoins, ne me surprend pas. Tout en partageant l'ensemble des éléments développés par le rapporteur spécial, ma vision sera un peu plus positive. J'estime en effet qu'il faut se replacer dans le contexte de la pandémie de covid-19, qui impliquait d'agir vite. Dans le cadre d'une procédure de toute évidence d'exception, des crédits massifs ont été ouverts, avec des affectations peu précises, et nous sommes aujourd'hui dans la continuité de ce plan, sortant du cadre ordinaire des pratiques en matière de finances publiques. Il faut donc garder en tête le contexte particulier.

En revanche, le rapporteur spécial a bien fait d'insister sur ce point, il est impossible de réaliser un suivi de cette opération. Il est clair que l'injection de crédits dans l'économie a des effets bénéfiques, mais mesurer la réalité de ces effets point par point devient extrêmement compliqué, d'autant que les crises se sont succédé. Quel élément est lié à la période du covid-19 ? Quel autre à l'augmentation du coût de l'énergie ? Le suivi est extrêmement complexe, et nous restons dubitatifs face aux échanges auxquels nous assistons dans le cadre du comité de suivi.

Dans mon analyse globale, j'aurai donc une approche plus compréhensive, tout en partageant les mêmes constats.

Mme Nathalie Goulet. - Si nous pouvons comprendre la nécessité de faire preuve de souplesse et de rapidité la première année de la crise sanitaire, des questions se posent davantage aujourd'hui. Par ailleurs, je suis frappée par l'éclectisme des mesures relevant de la mission « Plan de relance ». Dans l'Orne, cette mission a ainsi financé la protection de chauves-souris, pour plus de 250 000 euros ! Je ne suis pas sûre que cela entre dans les priorités du plan de relance. Même s'il existe d'autres investissements intéressants, un contrôle plus thématique et plus ferme de ces fonds serait bienvenu.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. - La pérennisation de ce dispositif dérogatoire n'est-elle pas de nature à compromettre la sincérité des comptes, ce qui pourrait avoir des conséquences constitutionnelles ? Si l'état de crise est une notion compréhensible, l'état de crise permanente l'est beaucoup moins.

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. - Une crise est survenue. Des principes dérogatoires ont été instaurés pour y faire face, assortis de moyens importants. Nous les avons votés, en 2021 et 2022. Cependant, nous demander de les voter de nouveau pour 2024 relève d'une forme d'abus. Je rappelle les bonnes règles d'utilisation de l'argent public. Nous ne pouvons pas continuer de déroger ainsi au droit ordinaire. L'exemple de Mme Goulet est parlant à cet égard. Il faut rester sérieux. Si nous dressions la liste des dépenses curieuses effectuées au titre du plan de relance dans chaque département, la presse et les courants populistes en feraient leurs choux gras. Le Gouvernement doit se ressaisir et améliorer la tenue de ces comptes.

La commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Plan de relance ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Plan de relance ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Le présent rapport n'a pas fait l'objet d'audition.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2024.html


* 1 Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

* 2 La quasi-totalité des autorisations d'engagement de la mission « Plan de relance » résultent de la loi de finances pour 2021 (36,2 milliards d'euros) et même pour certaines d'autorisations d'engagement ouvertes dès l'été 2020 (2,9 milliards d'euros), la loi de finances pour 2022 n'ayant ouvert que des autorisations d'engagement résiduelles (1,5 milliard d'euros) pour un nombre limité de dispositifs.

* 3 Amendement n° II-27, présenté par Jean-François Husson au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2022.

* 4 Échéancier des crédits de paiement des programmes 362, 363 et 364, projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2024.

* 5 À compter de l'exercice 2023, en application de l' article 1er de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), la loi de finances rectificative de fin d'année peut prendre la forme d'une loi de finances de fin de gestion limitée à des mesures d'ajustement des crédits nécessaires en fin d'exercice.

* 6 Cour des comptes, La préparation et la mise en oeuvre du plan de relance, rapport remis à la commission des finances du Sénat en application de l'alinéa 2 de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances, annexé au rapport d'information n° 571 (2021-2022) de Jean-François Husson, fait au nom de la commission des finances et déposé le 9 mars 2022.

* 7 Projet annuel de performances de la mission « Plan de relance », annexé au projet de loi de finances pour 2020.

* 8 Deuxième rapport du comité de suivi du plan France Relance, décembre 2022, p. 21.

* 9 Si chaque programme est assorti d'objectifs déclinés en indicateurs chiffrés, certains de ces indicateurs, considérés comme particulièrement importants, sont placés au niveau de la mission.

* 10 Mesure « Construction des lois financières articulée avec les évaluations de la dépense publique couvrant le champ des APU dans le respect de la trajectoire de dépenses de la loi de programmation des finances publiques » (année 2023), Plan national de relance et de résilience, p. 383.

* 11 Accord interinstitutionnel du 16 décembre 2020 entre le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres.

* 12 Plan de relance européen : l'équation se complique pour la France, Banque des territoires / Localtis, 22 septembre 2023.

* 13 Soit 1,8 milliard d'euros de crédits de 2022 reportés à 2023 et 0,4 milliard d'euros ouverts en loi de finances initiale pour 2023.

* 14 L'échéancier des paiements inscrit dans le projet annuel de performances indique que le montant des engagements non couverts par des paiements à la fin de 2022 était de 1 740,7 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter 331,9 millions d'euros d'engagement nouveaux dans l'hypothèse où toutes les autorisations d'engagement disponibles seraient consommées.

* 15 Rapport information n° 576 (2020-2021) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, sur le projet de décret d'avance relatif au financement de l'activité partielle et du fonds de solidarité pour les entreprises, déposé le 12 mai 2021.

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