D. LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES PLATEFORMES NUMÉRIQUES À L'ÉGARD DE LEURS COLLABORATEURS : UN DISPOSITIF INABOUTI

Sur proposition de vos rapporteurs et du groupe socialiste et républicain, la commission avait supprimé l' article 40 A , introduit tardivement en séance publique à l'Assemblée nationale, qui est censé renforcer la responsabilité sociale des plateformes numériques de type Uber à l'égard de leurs collaborateurs à travers l'incitation à rédiger une charte .

La commission avait en effet considéré que le débat de fond sur le modèle économique des plateformes avait une nouvelle fois été escamoté, alors qu'il est au centre de nombreuses réflexions sur l'avenir du salariat. Déjà en 2016, lors de l'examen de la loi « Travail », la commission, soutenue par le Sénat, avait rejeté le principe d'une responsabilité sociale des plateformes, qui avait été introduit en commission à l'Assemblée nationale et n'avait donc pas été précédé d'une étude d'impact.

En outre, le recours à une charte apparaît quelque peu en retrait par rapport aux enjeux soulevés par les plateformes. À ce titre, votre commission s'oppose à la disposition selon laquelle l'existence de la charte et son respect par la plateforme ne peuvent pas « caractériser l'existence d'un lien de subordination entre la plateforme et les travailleurs ». Cette disposition est soit inutile, soit néfaste en ce qu'elle rendrait difficile voire impossible une éventuelle requalification par le juge de la relation contractuelle en contrat de travail.

En nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, la commission a adopté un amendement du rapporteur rétablissant l'article 40 A.

L'amendement comprend un alinéa supplémentaire pour étendre le champ d'application de la charte aux garanties de protection sociale complémentaire négociées par la plateforme à l'attention de leurs collaborateurs (risque décès, incapacité de travail, invalidité, ainsi que les avantages liées à la retraite comme les pensions, les indemnités ou les primes).

En séance publique, deux amendements présentés par Carole Grandjean et plusieurs membres du groupe La République En Marche ont été adoptés pour préciser les garanties accordées aux collaborateurs en cas de rupture des relations commerciales avec la plateforme et simplifier les règles d'alimentation de leur CPF.

À rebours des dispositions prévues à l'article 40 A, vos rapporteurs appellent de leurs voeux la création d'un groupe de travail , associant notamment des parlementaires, des membres des services des ministères et des experts, pour définir les critères permettant de requalifier au cas par cas une relation commerciale entre une plateforme et un collaborateur en relation salariale. Compte tenu de l'importance que revêtent les plateformes numériques dans notre société, il est nécessaire d'avoir une réflexion sereine sur ce sujet et d'éviter les approches segmentées qui pourraient s'avérer à terme contreproductives et favoriser la concurrence sociale déloyale.

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