II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Le retour à un niveau de fréquentation normal des établissements culturels

La fréquentation des établissements culturels en 2017 s'établit à nouveau à un niveau normal, quasiment équivalent à celui de l'année 2014 . 42,8 millions de visiteurs ont ainsi été comptabilisés, conformément à l'objectif de fréquentation fixé par le projet annuel de performances 2017, au-delà du seuil de 40 millions de visiteurs.

Les années 2015 et 2016 avait été marquées par les conséquences des attentats, en particulier ceux du 13 novembre, mais également par les crues importantes qui avaient conduit certains établissements culturels parisiens à restreindre l'accès du public, en particulier pour mettre à l'abri des oeuvres stockées en réserves et menacées par la montée des eaux. La fréquentation ne s'était alors élevée qu'à 38,3 millions de visiteurs, entraînant une perte de ressources pour les musées.

L'augmentation de la fréquentation est également notable chez les publics jeunes , à la fois dans la catégorie des moins de 18 ans qui inclut les scolaires et dans la catégorie des jeunes de 18 à 25 ans.

Évolution de la fréquentation physique payante et gratuite
des institutions patrimoniales et architecturales
(indicateur 2.2 du programme « Patrimoines »)

(en millions de visiteurs)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Les salles de spectacles avaient été également durement touchées par ces attentats. Leur fréquentation avait sensiblement diminué et les exigences de sécurisation de ces lieux avaient nécessité une aide de l'État.

Le fonds d'intervention pour la sécurité et le risque économique lié à des évènements imprévisibles des structures du spectacle vivant , créé par la loi de finances rectificative pour 2015 et géré par le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), a ainsi pu bénéficier en fin d'exercice de 7,52 millions d'euros de dotation complémentaire . Ces crédits ont permis, comme l'annonçait le ministère de la culture à l'automne 2017 à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, de financer un ensemble de projets de sécurisation qui avaient été déposés auprès de la commission chargée de répartir les crédits de ce fonds. 280 dossiers ont ainsi été soutenus par le fonds en 2017. Le rapport annuel de performances indique que la dotation complémentaire a été financée par une levée partielle des crédits mis en réserve au programme.

2. L'exécution confirme la budgétisation en hausse pour la deuxième année consécutive

Vos rapporteurs spéciaux se félicitent que l'exécution du budget de la mission « Culture » confirme l'effort consacré dans la loi de finances initiale pour la deuxième année consécutive en faveur des politiques culturelles, après plusieurs années de nette diminution des crédits de la mission.

L'ensemble des programmes est concerné par cette budgétisation 2017 à la hausse.

Cette budgétisation a ainsi permis de maintenir le niveau des crédits consacrés à l'entretien et à la restauration des monuments historiques, qui constituent une part importante des crédits du programme « Patrimoines ». Ces crédits permettent non seulement de réaliser des travaux sur les monuments historiques dont l'État est propriétaire, mais ils viennent également, par un effet de levier, participer à l'entretien et la restauration de monuments dont les collectivités locales ou des personnes privées sont propriétaires.

Évolution du montant des crédits de paiement de la mission « Culture »
par programme entre l'exécution 2016 et l'exécution 2017

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le Gouvernement avait donné, dans le budget 2017, la priorité à la création , avec une augmentation des moyens consacrés à ce pan de la politique culturelle de plus de 30 millions d'euros par rapport au budget 2016. Le taux d'exécution élevé , tant pour les autorisations d'engagement que pour les crédits de paiement du programme, montre que cette priorité s'est confirmée dans l'exécution budgétaire.

La réduction des inégalités territoriales dans l'accès à la culture et l'éducation artistique et culturelle (EAC) constituaient des priorités fortes de la mission « Culture » , que le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » porte, notamment grâce au renforcement des moyens consacrés à l'EAC. Un effort budgétaire important avait été réalisé en 2016, il a été maintenu et renforcé dans le budget 2017 et confirmé par l'exécution 2017.

Cette priorité donnée à l'éducation artistique et culturelle se traduit par davantage d'actions éducatives menées à l'attention des jeunes en âge scolaire , ce que confirme l'évolution des résultats de l'indicateur 2.1 du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui mesure la proportion de jeunes scolaires ayant eu accès à des telles actions. Le Gouvernement a par ailleurs fixé dans la loi de finances pour 2018 un objectif ambitieux de 100 % de jeunes pour cet indicateur à l'horizon 2020. Cependant, vos rapporteurs spéciaux avaient souligné le biais méthodologique de cet indicateur qui peut comptabiliser plusieurs fois un même enfant qui aurait bénéficié de plusieurs actions éducatives.

Évolution du montant des crédits de l'action n° 2
« Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle »
du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »
comparée à l'évolution de l'indicateur 2.1 « Part des enfants et adolescents
ayant bénéficié d'une action d'EAC » (2014 à 2017)

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

3. L'incertaine soutenabilité du vaste programme immobilier du ministère de la culture et de ses opérateurs

Le constat a été formulé à plusieurs reprises, tant par la Cour des comptes dans ses notes d'exécution que par vos rapporteurs spéciaux, mais il convient de le souligner à nouveau à l'occasion de l'examen du présent projet de loi de règlement : la soutenabilité de la mission « Culture » apparaît incertaine au regard de l' important programme immobilier entrepris par le ministère de la culture et ses différents opérateurs. Il se traduit, après une diminution sensible au cours des derniers exercices budgétaires, par une nouvelle hausse des dépenses d'investissement de titre 5. La hausse constatée peut également être observée dans les dépenses de titre 7, les dépenses d'opérations financières, qui correspondent au financement des investissements des opérateurs de la mission.

La Cour des comptes souligne donc que « avec le retour programmé d'opérations d'investissement, le montant des restes à payer connaît une hausse sensible en 2017 et devrait continuer à augmenter dans un proche avenir (en particulier sur le programme 175) » .

Le programme immobilier du ministère de la culture
et de ses opérateurs

1) Les grands chantiers

Le coût du projet de restauration et d'aménagement du Grand Palais est évalué à 488 millions d'euros, dont 128 millions d'euros de subventions du ministère de la culture.

La réalisation de la cité du Théâtre aux ateliers Berthier, qui réunira la Comédie française, le Théâtre de l'Odéon et le Conservatoire national supérieur d'art dramatique sur un même site, représente un coût de 86 millions d'euros pour le ministère de la culture.

Le projet Bastille , qui consiste à rassembler des fonctions logistiques de l'Opéra sur le site de Bastille et à aménager une salle modulable, est évalué à 59 millions d'euros.

Le coût de la relocalisation du Centre national des arts plastiques à Pantin restant encore à la charge du ministère de la culture est évalué à 43,45 millions d'euros , sur les 56,9 millions d'euros de coût global pour le ministère.

2) Les schémas directeurs des opérateurs

Plusieurs établissements publics sont dotés de schémas directeurs de rénovation ou de réhabilitation : le château de Fontainebleau (environ 60 millions d'euros restant à mobiliser sur les 88 millions d'euros de coût global), Versailles ( 80 millions d'euros restant sur les 192 millions d'euros de coût du projet) ou encore la Bibliothèque nationale de France pour le site du Quadrilatère Richelieu ( 168 millions d'euros environ sur les 233 millions d'euros de coût global).

Par ailleurs, des travaux seront à réaliser pour la rénovation du Centre Pompidou , pour un montant estimé de 150 millions d'euros , sans que ceux-ci soient programmés compte tenu du coût.

Les chantiers en cours appellent, compte tenu de leur ampleur et de leur coût financier, à une vigilance particulière . En particulier, la restauration du Grand Palais représente à elle seule un poids important pour la soutenabilité de la mission et implique une maîtrise des dépenses d'investissement et une modération dans l'engagement de nouveaux projets d'envergure au ministère de la culture.

4. L'insuffisante montée en puissance du Fonpeps en 2017

L'exécution 2017 des crédits de la mission « Culture » a mis en évidence la difficulté de mise en oeuvre du fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle , le Fonpeps . Dès la discussion budgétaire de l'automne dernier, vos rapporteurs spéciaux avaient souligné le retard pris dans la signature des décrets mettant en oeuvre les dispositions en faveur de l'emploi dans le domaine du spectacle, qui se manifestait par une consommation des autorisations d'engagement et des crédits de paiement nettement inférieure aux prévisions de la loi de finances pour 2017.

Les données d'exécution confirment ce constat puisque seulement 10 millions d'euros ont été engagés sur les 90 millions d'euros d'autorisations d'engagement inscrites en loi de finances. Le montant est identique en crédits de paiement, alors que 55 millions avaient été prévus initialement.

Cette très nette sous-consommation a conduit à un recalibrage du dispositif en loi de finances pour 2018. L'action 8 du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » n'a été dotée que de 25 millions d'euros en crédits de paiement. Le redimensionnement du dispositif conduit à s'interroger, au-delà du retard pris dans la signature des décrets de mise en oeuvre, sur l'adaptation des mesures envisagées aux besoins du secteur . Vos rapporteurs spéciaux s'attacheront à vérifier la montée en puissance effective du Fonpeps dans la budgétisation 2019.

5. La situation financière fragile de l'INRAP

Les difficultés persistantes de trésorerie de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) appellent à une vigilance particulière quant à l'achèvement des réformes structurelles en cours. La Cour des comptes observe ainsi que la situation financière de l'INRAP reste préoccupante .

L'institut bénéficie depuis 2016 d'une dotation budgétaire en lieu et place de l'affectation de la redevance d'archéologie préventive (RAP), qui a été entièrement reversée au budget général de l'État.

Si l'intervention du ministère de la culture n'a pas été nécessaire au cours de l'année 2017 pour combler les difficultés de trésorerie de l'INRAP, l'institut a en revanche bénéficié cette année de 12 millions d'euros au titre du crédit d'impôt recherche (CIR).

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