Rapport général n° 164 (2015-2016) de M. Albéric de MONTGOLFIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2015

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N° 164

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME II

Fascicule 1

LES CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

( Article liminaire et première partie de la loi de finances )

Volume 1 : Examen des articles

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André, présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung, vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc, secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 165 à 170 (2015-2016)

ARTICLE LIMINAIRE - Prévision de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques de l'année 2016, de l'exécution 2014 et de la prévision d'exécution 2015

Commentaire : le présent article retrace l'exécution de solde structurel et de solde effectif des administrations publiques pour 2014, la prévision d'exécution pour 2015 et la prévision pour 2016.

I. L'ÉVOLUTION DU SOLDE STRUCTUREL ET DU SOLDE EFFECTIF

Les évolutions du solde structurel et du solde effectif, ainsi que leur contexte, font l'objet d'un traitement approfondi dans le cadre du tome I du présent rapport.

L'article 7 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques 1 ( * ) prévoit que les lois de finances de l'année comprennent un article liminaire « présentant un tableau de synthèse retraçant, pour l'année sur laquelle elles portent, l'état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques » et qui indique « les soldes structurels et effectifs de l'ensemble des administrations publiques de la dernière année écoulée et les prévisions d'exécution de l'année en cours ».

Il revient au Haut Conseil des finances publiques d'« apprécier la cohérence de l'article liminaire du projet de loi de finances de l'année au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques ». Ainsi, celui-ci a rendu, le 25 septembre dernier, un avis relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2016 2 ( * ) .

Il convient de préciser que cet exercice a été quelque peu perturbé en raison de la modification, par le Gouvernement, des hypothèses de croissance potentielle intervenant dans le calcul du solde structurel lors de la présentation du programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 3 ( * ) . Après avoir regretté cette modification, y voyant un « problème de principe » 4 ( * ) , le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a rappelé, dans son avis précité, que « pour comparer les trajectoires de solde structurel entre le projet de loi de finances et la loi de programmation, il faut utiliser les hypothèses de calcul de celle-ci » et qu'« en particulier, les hypothèses de croissance potentielle doivent être celles de la loi de programmation pour calculer le solde structurel ».

Or, la trajectoire de solde structurel figurant à l'article liminaire (cf. tableau ci-après) est calculée sur la base des hypothèses de croissance potentielle du programme de stabilité 2015-2018 et non de celles retenues par la loi de programmation des finances publiques 2014-2019.

Article liminaire du projet de loi de finances pour 2016

(en % du PIB)

Exécution 2014

Prévision d'exécution 2015

Prévision 2016

Solde structurel (1)

- 2,0

- 1,7

- 1,2

Solde conjoncturel (2)

- 1,9

- 2,0

- 1,9

Mesures exceptionnelles (3)

-

- 0,1

- 0,1

Solde effectif (1+2+3)

- 3,9

- 3,8

- 3,3

Source : projet de loi de finances pour 2016

Aussi le Haut Conseil s'est-il attaché à examiner les estimations de solde structurel calculées avec les hypothèses de croissance potentielle figurant dans la loi de programmation, conformément aux dispositions précitées de la loi organique du 17 décembre 2012 ; sur cette base, celui-ci a relevé que « la trajectoire de solde structurel [était] en avance sur les objectifs de la loi de programmation ». En effet, le HCFP a indiqué que « pour l'année 2014, le déficit structurel des administrations a été inférieur de 0,4 point à l'objectif de la loi de programmation, notamment en raison d'une augmentation de la dépense publique moins rapide que prévu. Cet écart se reporte en niveau les années suivantes : les déficits structurels présentés dans le projet de loi de finances sont également inférieurs en 2015 et 2016 à ceux fixés en loi de programmation (- 1,7 % du PIB en 2015 contre - 2,1 % en loi de programmation, et - 1,3 % du PIB en 2016 contre - 1,8 %) ».

Par suite, en raison de l'exécution 2014, le déficit structurel pour l'année 2016 serait inférieur aux orientations pluriannuelles des finances publiques (- 1,8 % du PIB), que celui-ci soit calculé à partir des hypothèses de croissance potentielle de la dernière loi de programmation (- 1,3 % du PIB) ou de celles du projet de loi de finances pour 2016 (- 1,2 % du PIB) (cf. tableau ci-après).

Trajectoire du solde structurel calculée à partir des hypothèses
de la LPFP 2014-2019

(en % du PIB potentiel)

2014

2015

2016

LPFP 2014-2019

- 2,4

- 2,1

- 1,8

PLF pour 2016 (article liminaire)

- 2,0

- 1,7

- 1,2

PLF pour 2016 (croissance potentielle de la LPFP)

- 2,0

- 1,7

- 1,3

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données publiées par le Haut Conseil des finances publiques)

En tout état de cause, il convient de revenir sur la décomposition du solde public au titre de l'exercice 2016, telle qu'elle découle des modalités de calcul retenues par le Gouvernement.

Décomposition du solde public 2014-2016

(en % du PIB potentiel, sauf mention contraire)

2014

2015

2016

Solde public (en % du PIB)

- 3,9

- 3,8

- 3,3

Solde conjoncturel (en % du PIB)

- 1,9

-2,0

- 1,9

Mesures ponctuelles et temporaires

0,0

- 0,1

- 0,1

Solde structurel

- 2,0

- 1,7

- 1,3

Ajustement structurel

0,6

0,4

0,5

dont effort structurel

0,5

0,6

0,5

dont mesures nouvelles en recettes

0,2

- 0,1

- 0,1

dont effort en dépense hors crédit d'impôt

0,4

0,7

0,5

dont composante non discrétionnaire

0,1

- 0,2

0,0

dont effet d'élasticités des prélèvements obligatoires

0,1

- 0,1

0,0

dont clef en crédits d'impôt

- 0,1

0,0

0,0

Source : rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2016

Ainsi que le fait apparaître le tableau ci-avant, l'année 2016 serait marquée par une légère amélioration du déficit conjoncturel (1,9 % du PIB, après 2 % du PIB en 2015), soit la part du déficit imputable au caractère dégradé de la conjoncture économique, en raison d'une stabilisation de l'écart entre le PIB et son niveau potentiel du fait de l'accélération de la croissance (+ 1,5 % en 2016, contre + 1 % en 2015).

De même, le solde effectif intégrerait des mesures ponctuelles et temporaires qui, par convention, sont exclues du solde structurel (cf. tableau ci-après). Il s'agirait des contentieux fiscaux, qui pourraient représenter un coût de 2,5 milliards d'euros en 2016 , sous les effets des affaires dites « précompte », « OPCVM », « de Ruyter » et « Stéria », ainsi que des intérêts associés à ces contentieux - désormais comptabilisés en dépenses (0,4 milliard d'euros en 2016).

Hypothèses retenues au titre des mesures ponctuelles et temporaires

(en milliards d'euros)

2014

2015

2016

Évènements en recettes (contentieux)

- 0,7

- 1,6

- 2,5

dont précompte

0,0

0,0

- 0,3

dont contentieux OPCVM

- 0,7

- 1,5

- 1,4

dont de Ruyter

0,0

0,0

- 0,3

dont Stéria

0,0

0,0

- 0,3

Évènements en dépenses

1,0

- 1,4

- 0,4

dont intérêts des contentieux

- 0,1

- 0,3

- 0,4

dont budget rectificatif n° 6 de l'Union européenne

1,1

- 1,1

0,0

Note de lecture : l'inscription des montants dans ce tableau ne préjuge pas de l'issue des contentieux, mais reflète une volonté de prudence dans les projections pluriannuelles de finances publiques. En outre, les montants affichés sont susceptibles de changer avec les jugements définitifs.

Source : rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2016

Comme cela a été indiqué, le solde structurel s'élèverait à - 1,3 % du PIB potentiel en 2016 - en retenant les nouvelles hypothèses de croissance potentielle retenues par le Gouvernement -, marquant une amélioration de 0,5 point. Cet ajustement résulterait d' un effort en dépenses compris entre 0,5 et 0,6 point, minoré par un effort « négatif » en recettes de - 0,1 point , d'un montant de 2,4 milliards d'euros, lié aux mesures de baisse des prélèvements obligatoires. À la différence des années précédentes, la composante non discrétionnaire du solde public, soit la part de celui-ci qui échappe au contrôle des autorités publiques mais demeure comptabilisée dans le solde structurel, serait neutre , en raison d'un retour de l'élasticité des prélèvements obligatoires à un niveau proche de l'unité et du ralentissement de la montée en charge du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) - au titre de la « clef en crédits d'impôt ».

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

S'il y a lieu de se féliciter de ce que le Gouvernement respecte la trajectoire de solde structurel arrêtée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, ce qui ne saurait surprendre eu égard au « calibrage » initial de celle-ci, il n'en demeure pas moins gênant que les données figurant dans le présent article liminaire n'aient pas été calculées avec les hypothèses de croissance potentielle inscrites dans cette même loi de programmation .

En effet, la modification de ces hypothèses, critiquée par le Haut Conseil des finances publiques (cf. supra ), contrevient aux dispositions de l'article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, qui prévoit que ce dernier examine, dans le cadre du mécanisme de correction, le respect des objectifs de solde structurel « en retenant la trajectoire de produit intérieur brut potentiel figurant dans le rapport annexé » à la loi de programmation.

Cette disposition, adoptée par le Sénat à l'initiative de notre collègue Jean-Pierre Caffet, visait à ce que les hypothèses de PIB potentiel soient communes au Gouvernement, au Haut Conseil, mais également au Parlement, qui ratifie la trajectoire, et ce tout au long de la période de programmation. Par conséquent, en modifiant les hypothèses de croissance potentielle, le Gouvernement « gêne » considérablement le contrôle qui peut être exercé sur le respect de la trajectoire des finances publiques . Par ailleurs, cela signifie que deux trajectoires de solde structurel ont vocation à coexister : celle de la loi de programmation et celle du dernier programme de stabilité - qui se retrouve dans ce projet de loi de finances.

Dans le programme de stabilité 2015-2018, le Gouvernement justifiait la révision de ses hypothèses de croissance potentielle par les effets du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et du Pacte de responsabilité et de solidarité 5 ( * ) . Néanmoins, ces différentes mesures étaient déjà connues lors de l'élaboration et du vote de la dernière loi de programmation. Par ailleurs, les arguments avancés par le ministre des finances et des comptes publics, Michel Sapin, afin de justifier cette modification n'ont aucunement convaincu votre rapporteur général qui y voit essentiellement un choix d'opportunité du Gouvernement, comme cela est explicité dans le tome I du présent rapport.

Pour autant, en raison de sa nature spécifique, votre commission ne peut que proposer l'adoption du présent article sans modification.

Décision de la commission : sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

PREMIÈRE PARTIE - CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER - DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. - IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A. - Autorisation de perception des impôts et produits

ARTICLE PREMIER - Autorisation de percevoir les impôts existants

Commentaire : le présent article autorise la perception des impôts, produits et revenus affectés à l'État et précise les modalités d'entrée en vigueur des dispositions fiscales de la loi de finances.

Traduction du principe de consentement à l'impôt , l'article 1 er met en application l'article 34 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), selon lequel la loi de finances de l'année « autorise, pour l'année, la perception des ressources de l'État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État » .

Aux termes du présent article, et sauf dispositions particulières, les dispositions fiscales de la loi de finances s'appliquent :

1) à l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2015 et des années suivantes, en raison du décalage d'un an caractérisant la perception des revenus et leur assujettissement ;

2) à l'impôt dû par les sociétés sur leurs résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2015, ce qui, pour un grand nombre d'entre elles, se traduit par une imposition sur des activités antérieures à l'année en question ;

3) à compter du 1 er janvier 2016 pour les autres dispositions fiscales.

Les recettes fiscales prévues pour 2016 font l'objet d'une analyse détaillée au sein du tome I du présent rapport.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

B. - Mesures fiscales

ARTICLE 2 (Art. 196 B et 197 du code général des impôts) - Baisse de l'impôt sur le revenu des ménages aux revenus moyens et modestes et indexation du barème

Commentaire : le présent article tend à réduire l'impôt sur le revenu (IR) de 8 millions de foyers fiscaux en procédant à un nouvel aménagement de la décote pour l'imposition des revenus perçus en 2015. Il procède également à la revalorisation des limites des tranches du barème de l'IR en fonction de l'inflation.

I. LE DROIT EXISTANT

A. DEPUIS 2012, DES HAUSSES D'IMPÔT AFFECTANT PRINCIPALEMENT LES MÉNAGES AUX REVENUS MOYENS ET SUPÉRIEURS

1. Des mesures ciblées sur les plus aisés...

Tandis que le candidat à l'élection présidentielle François Hollande s'engageait à revenir « sur les cadeaux fiscaux et les multiples niches fiscales accordées depuis dix ans aux ménages les plus aisés » 6 ( * ) , le Gouvernement issu des urnes en 2012 a introduit deux mesures principales ciblant les hauts, voire les très hauts revenus.

Tout d'abord, une nouvelle tranche à 45 % , pour les revenus supérieurs à 150 000 euros par part de quotient familial, a été ajoutée par la loi de finances pour 2013 7 ( * ) au barème de l'impôt sur le revenu (IR). Prévu initialement à 320 millions d'euros, le gain budgétaire de cette mesure s'est élevé à 344 millions d'euros en 2013, au titre des revenus perçus en 2012. Environ 63 000 foyers fiscaux relevaient de cette tranche d'imposition en 2014, ce qui représente 0,2 % des contribuables, et le montant moyen de l'impôt acquitté s'élevait à environ 146 200 euros, pour un revenu fiscal de référence moyen de 505 000 euros.

La seconde mesure visant à augmenter l'imposition des revenus les plus élevés est la soumission au barème progressif de l'IR des revenus du capital , prévue par la loi de finances pour 2013 8 ( * ) . Couramment appelée « barémisation », celle-ci a consisté à supprimer la possibilité pour les contribuables d'opter pour un prélèvement forfaitaire libératoire pour les dividendes et les produits de placement à revenu fixe, de façon à imposer ces derniers comme les revenus du travail. Le rendement brut de cette mesure, hors suppression du prélèvement forfaitaire libératoire, était estimé à 3,3 milliards d'euros en 2013 mais le gain budgétaire net se serait élevé à 1,3 milliard d'euros . 4,8 millions de foyers fiscaux ont été concernés par cette mesure, pour une perte moyenne de 681 euros. Les estimations de la direction générale du Trésor indiquent que 90 % de la hausse d'impôt issue de la « barémisation » des revenus du capital est supportée par le dixième décile de foyers fiscaux 9 ( * ) .

2. ... et des augmentations affectant les classes « moyennes »

La politique fiscale menée depuis 2012 a également consisté en des hausses d'impôt touchant un large nombre de contribuables, et ce dès le quatrième décile de niveau de vie, ce qui correspond à des foyers dont les revenus mensuels sont compris entre 1 360 euros et 1 550 euros.

Parmi les principales mesures ayant eu un effet significatif sur le niveau d'imposition, il convient de citer :

- la fiscalisation des heures supplémentaires . Auparavant totalement exonérées d'IR en vertu de l'article 1 er de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA) 10 ( * ) , les rémunérations versées au titre des heures supplémentaires ou complémentaires sont désormais assujetties à l'IR depuis le 1 er août 2012 11 ( * ) . La suppression de cette exonération a entraîné une hausse globale des recettes de l'IR de 1,6 milliard d'euros en 2013, répartie entre 8,9 millions de salariés , ce qui correspond à une perte moyenne de 190 euros. Selon les estimations de la direction générale du Trésor, 230 000 foyers fiscaux auraient été rendus imposables en 2013 en raison de cette mesure , dont 80 % situés entre le quatrième et le sixième décile de niveau de vie. Néanmoins, près de 30 % du surcroît d'IR lié à la fiscalisation des heures supplémentaires aurait été acquitté par les 10 % des foyers les plus riches ;

- les deux baisses successives du plafonnement du quotient familial 12 ( * ) . La loi de finances pour 2013 13 ( * ) a tout d'abord réduit, à compter des revenus perçus en 2012, le plafond de l'avantage procuré par l'application du quotient familial de 2 336 euros à 2 000 euros par demi-part . L'année suivante, ce même plafond est passé de 2 000 euros à 1 500 euros par demi-part, à compter de l'imposition des revenus de 2013 14 ( * ) . La première baisse a entraîné un surcroît de recettes d'IR d'environ 550 millions d'euros, répartis entre 1 million de foyers fiscaux, tandis que la seconde s'est traduite par une hausse globale d'IR d'environ 1,1 milliard d'euros, touchant plus de 1,38 million de foyers fiscaux appartenant principalement aux trois derniers déciles de niveau de vie, c'est-à-dire aux ménages dont les revenus mensuels sont supérieurs à environ 2 300 euros. De plus, le plafond spécifique de la demi-part bénéficiant aux « parents isolés » , élevant seuls un ou plusieurs enfants a été réduit de 500 euros par la loi de finances pour 2014 - passant ainsi de 4 040 à 3 540 euros. Cette mesure aurait concerné environ 60 000 foyers fiscaux, pour un gain budgétaire estimé à près de 50 millions d'euros. Au total, selon les informations transmises par la direction générale des finances publiques, ces trois mesures ont entraîné une hausse globale d'impôt d'environ 1,6 milliard d'euros, soit une hausse moyenne de 1 190 euros de l'impôt dû pour 1,38 million de familles. Parmi les perdants, on compte environ 160 000 familles ayant au moins trois enfants à charge ;

- l'assujettissement à l'IR de la participation de l'employeur aux contrats de complémentaire santé . La loi de finances pour 2014 15 ( * ) a supprimé la possibilité de déduire du revenu imposable la participation versée par l'employeur au titre des contrats de complémentaire santé collectifs et obligatoires, proposés par les entreprises à leurs salariés. Seule la déductibilité du revenu imposable de la cotisation versée par le salarié a été maintenue. La suppression de cette dépense fiscale s'est traduite par une hausse de recettes d'IR d'environ 1 milliard d'euros . Sur les quelques 13,2 millions de salariés du secteur privé, 7,9 millions ont enregistré une perte - en moyenne de 118 euros - du fait de cette mesure en 2014. Selon les simulations réalisées par la direction générale du Trésor, environ 210 000 foyers fiscaux situés dans les quatrième et cinquième déciles seraient devenus imposables du fait de cette mesure ;

- la fiscalisation des majorations de pensions pour les retraités ayant eu ou élevé au moins trois enfants . Auparavant exonérées d'IR, les majorations de pensions versées aux retraités ayant eu trois enfants ou plus à charge - et qui représentent en règle générale 10 % du montant de la pension - sont désormais prises en compte pour établir le revenu fiscal de référence des retraités depuis l'imposition 2014. Cette mesure, introduite par la loi de finances pour 2014 16 ( * ) , s'est traduite par un gain budgétaire de 1,2 milliard d'euros en 2014 et a touché environ 4 millions de retraités , pour une perte moyenne de 368 euros sur un an. Par ailleurs, cette mesure entraîne des effets indirects en matière de fiscalité locale et de contribution sociale généralisée (CSG), qui n'ont pas été évalués à ce jour, dans la mesure où divers avantages fiscaux relatifs à ces impositions dépendent du montant de revenu fiscal de référence.

Par ailleurs, il convient de noter que les seuils du barème de l'IR , « gelés » au titre de l'imposition 2012 et 2013, n'ont été à nouveau réindexés en fonction de l'inflation qu'à partir de 2014 17 ( * ) . La revalorisation de 0,8 % des seuils du barème décidée par la loi de finances pour 2014 n'a toutefois pas compensé les conséquences de la non indexation du barème pour les revenus perçus en 2011 et 2012, années au cours desquelles l'indice des prix à la consommation a progressé respectivement de 2,1 % et de 2 % selon l'Insee.

3. Une hausse cumulée de 10 milliards d'euros du produit de l'IR entre 2012 et 2015, dont 8,7 milliards d'euros du fait de mesures nouvelles

Après avoir stagné aux alentours de 50 milliards d'euros tout au long des années 2000 et 2010, le produit de l'IR a fortement augmenté depuis 2012 , notamment sous l'effet des mesures présentées ci-dessus.

Sur les 10 milliards d'euros de recettes supplémentaires constatées entre 2012 et 2015, 8,7 milliards d'euros proviendraient en effet des hausses d'impôt adoptées entre l'été 2012 et fin 2014 et décrites précédemment. Plus précisément, la fiscalisation des heures supplémentaires (600 millions d'euros), la baisse du plafond de l'avantage retiré du quotient familial (600 millions d'euros), la création d'une tranche à 45 % (300 millions d'euros), l'imposition au barème de l'IR des revenus du capital (1,3 milliard d'euros) et la désindexation du barème (1,6 milliard d'euros) ont procuré un rendement global de 4,4 milliards d'euros en 2013. L'effet en année pleine de la fiscalisation des heures supplémentaires (1 milliard d'euros), la nouvelle baisse du plafond du quotient familial à 1 500 euros (1 milliard d'euros), l'assujettissement à l'IR des majorations de pensions pour charges de famille et de la participation des employeurs au titre de la complémentaire santé ont entraîné, quant à elles, une hausse de recettes de 4,3 milliards d'euros.

Évolution du rendement de l'impôt sur le revenu depuis 2011

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe « Voies et moyens » et des rapports économiques sociaux et financiers annexés aux projets de lois de finances pour 2014, 2015 et 2016)

Il convient néanmoins de préciser qu'un certain nombre de mesures décidées en 2011 - telles que la désindexation du barème de l'IR en fonction de l'inflation, la création d'une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ou encore l'aménagement du crédit d'impôt développement durable (CIDD) - avaient déjà conduit à une hausse significative des recettes en 2012. De plus, les effets de certaines de ces mesures, comme l'extinction du bénéfice de la demi-part supplémentaire pour les personnes n'ayant pas élevé un enfant seules pendant au moins cinq années, dite demi-part « vieux parent » ou demi part « des veuves », ont eu un effet prolongé sur plusieurs années.

À compter de 2014, un ralentissement de la progression des recettes d'IR peut être observé en raison de l'adoption de plusieurs mesures de baisses d'impôt, ciblées sur les ménages à revenus faibles, puis moyens.

B. À PARTIR DE 2014, DES EFFETS ATTÉNUÉS UNIQUEMENT POUR LES FOYERS PERCEVANT DE FAIBLES RESSOURCES

Afin de limiter les effets de sa politique fiscale sur le pouvoir d'achat des ménages, le Gouvernement a proposé depuis 2014 différentes mesures, ciblées en priorité sur les ménages dits « modestes » à « moyens » , c'est-à-dire dont le revenu imposable par part de quotient familial est compris entre environ 6 000 et 26 000 euros 18 ( * ) .

1. La réduction exceptionnelle d'impôt sur le revenu de 2014

Constatant l'insuffisance des effets des revalorisations exceptionnelles du plafond de la décote intervenues en 2013 19 ( * ) et en 2014 20 ( * ) , le Gouvernement a proposé au printemps 2014, dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité , une réduction exceptionnelle d'IR au titre des revenus perçus en 2013 .

L'article 1 er de la loi de finances rectificative pour 2014 21 ( * ) a ainsi prévu une réduction d'impôt de 350 euros pour les personnes seules dont le revenu n'excède pas 1,1 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) et de 700 euros pour les couples soumis à imposition commune, dont le revenu n'excède pas 2,2 fois le SMIC . Afin de limiter les effets de seuil, un mécanisme de lissage à la sortie du dispositif a également été mis en place pour les revenus compris entre 1,1 et 1,13 fois le SMIC.

Environ 4,1 millions de foyers fiscaux ont bénéficié d'un allègement d'impôt de 312 euros en moyenne du fait de ce dispositif exceptionnel en 2014, dont environ 2,1 millions sont devenus non imposés. Le nombre de contribuables gagnants ayant été plus important qu'initialement prévu 22 ( * ) , le coût budgétaire de la mesure s'est élevé à 1,27 milliard d'euros . L'analyse par revenu fiscal de référence indique que près de 60 % de l'allègement d'impôt résultant de cette mesure a concerné les foyers fiscaux dont le revenu est compris entre 21 700 euros et 31 500 euros environ (soit environ 1,6 à 2,3 fois le SMIC net).

En l'absence de cette réduction exceptionnelle, environ 750 000 foyers fiscaux n'ayant acquitté aucun impôt sur le revenu ou ayant bénéficié d'une restitution en 2013 seraient devenus imposés en 2014.

Effets de la réduction exceptionnelle d'IR prévue par la loi de finances rectificative d'août 2014

Déciles

Bornes inférieurs de RFR

(en euros)

Bornes supérieures de RFR

(en euros)

Foyers fiscaux gagnants

(en milliers)

Coût budgétaire (en millions d'euros)

Gain moyen (en euros)

1

15

12 947

414

42

103

2

12 947

13 605

414

101

248

3

13 605

14 116

414

100

246

4

14 116

19 068

414

36

89

5

19 068

21 788

414

64

457

6

21 788

24 743

414

138

338

7

24 743

26 450

414

206

505

8

26 450

28 083

414

207

507

9

28 083

31 437

414

189

464

10

31 437

-

414

188

460

Total

4 140

1 271

312

Source : DGFiP

Pour compléter cette mesure en faveur des ménages, le Pacte de responsabilité et de solidarité prévoyait initialement une réduction de cotisation salariale de sécurité sociale. Celle-ci a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel , conduisant ainsi le Gouvernement à proposer une « mesure pérenne » d'allègement de l'imposition des revenus des ménages dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015.

La censure de la baisse dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale
en août 2014

L'article 1 er du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 prévoyait initialement une réduction dégressive de cotisations de sécurité sociale pour les salariés dont la rémunération était comprise entre 1 et 1,3 fois le SMIC . Un dispositif analogue était proposé pour les fonctionnaires, civils et militaires, des trois fonctions publiques.

Selon les évaluations présentées, cette réduction de cotisations se serait élevée à 520 euros sur l'année pour un salarié à temps plein rémunéré au SMIC, et à 330 euros pour un fonctionnaire dont le traitement équivaudrait au SMIC. Au total, 5,2 millions de salariés du secteur privé et 2,2 millions de fonctionnaires auraient bénéficié de cette mesure, pour un coût estimé à 2,5 milliards d'euros en 2015 .

Dans sa décision n° 2014-698 DC du 6 août 2014 , le Conseil constitutionnel a déclaré ce dispositif contraire à la Constitution. Il a en effet considéré que cette réduction dégressive méconnaissait le principe d'égalité dans la mesure où « un même régime de sécurité sociale continuerait, en application des dispositions contestées, à financer, pour l'ensemble de ses assurés, les mêmes prestations malgré l'absence de versement par près d'un tiers de ceux-ci, de la totalité des cotisations salariales ouvrant droit aux prestations pour ce régime » et que « dès lors, le législateur a [vait] institué une différence de traitement , qui ne repose pas sur une différence de situation entre les assurés d'un même régime de sécurité sociale, sans rapport avec l'objet des cotisations salariales de sécurité sociale ». Cette décision exclut donc la prise en compte des facultés contributives pour moduler le niveau des cotisations sociales.

2. La réforme du « bas de barème » mise en oeuvre par la loi de finances pour 2015

La réforme de l'impôt sur le revenu prévue à l'article 2 de la loi de finances initiale pour 2015 23 ( * ) , dénommée par le Gouvernement réforme du « bas de barème », a consisté, d'une part, en une suppression de la « première tranche » du barème et, d'autre part, en une modification du mécanisme de la décote. En outre, les seuils et limites associés au barème ont été revalorisés de 0,5 %, soit une hausse correspondant à l'évolution prévisionnelle de l'indice des prix à la consommation hors tabac en 2014 par rapport à 2013.

a) La suppression de la « première tranche » et l'abaissement du seuil d'entrée dans la tranche à 14 %

En premier lieu, la loi de finances initiale pour 2015 a supprimé la tranche à 5,5 % du barème de l'IR , qui s'appliquait à la fraction de revenus comprise entre 6 011 euros et 11 991 euros par part de quotient familial en 2014 . Couramment désignée comme la « première tranche » du barème, celle-ci correspondait en réalité à la deuxième tranche (après la tranche au taux de 0 %, applicable aux revenus compris entre 0 et 6 011 euros jusqu'en 2014).

Parallèlement, le seuil d'entrée dans la nouvelle « première tranche » à 14 % a été abaissé de 11 991 euros à 9 690 euros afin de « concentrer les effets de cette suppression sur les ménages disposant de revenus modestes et moyens » 24 ( * ) , en neutralisant l'allègement d'impôt procuré par la suppression de la tranche à 5,5 % pour les contribuables des tranches suivantes. Tous les foyers fiscaux n'ont donc pas bénéficié de la suppression de cette tranche.

Comparaison du barème de l'IR en 2014 et 2015

Barème 2014 (revenus 2013)

Barème 2015 (revenus 2014)

Fraction du revenu
imposable par part

Taux

Fraction du revenu
imposable par part

Taux

Jusqu'à 6 011 euros

0 %

Jusqu'à 9 690 euros

0 %

De 6 011 euros à 11 991 euros

5,5 %

De 11 991 euros à 26 631 euros

14 %

De 9 690 euros à 26 764 euros

14 %

De 26 631 euros à 71 397 euros

30 %

De 26 764 euros à 71 754 euros

30 %

De 71 397 euros à 151 200 euros

41 %

De 71 754 euros à 151 956 euros

41 %

Plus de 151 200 euros

45 %

Plus de 151 956 euros

45 %

Source : article 197 du code général des impôts

Bien que la suppression de la tranche à 5,5 % ait été la mesure la plus médiatisée dans le cadre de la réforme de l'IR, cette dernière n'a eu en réalité qu'un effet relativement modeste pour les contribuables concernés . Elle n'a en effet concerné qu'environ 2,6 millions de foyers fiscaux , dont principalement des familles dont le revenu fiscal de référence est situé entre 17 000 et 38 000 euros environ, pour un coût total d'environ 500 millions d'euros , équivalent à celui de la revalorisation des seuils du barème de l'IR.

b) La réforme de la décote

La mesure ayant l'impact financier le plus important en 2015 en matière d'IR est la réforme de la décote (environ 2,2 milliards d'euros sur un coût total de 3,2 milliards d'euros).

Introduite en 1981, la décote avait initialement pour objet de retarder l'entrée dans le barème de l'IR des célibataires qui ne pouvaient bénéficier du quotient conjugal. Généralisé à l'ensemble des contribuables en 1986, ce mécanisme favorise depuis tous les foyers fiscaux disposant de faibles revenus, en permettant de minimiser, voire d'annuler l'impôt dû.

Après avoir revalorisé à deux reprises le montant du plafond de la décote en 2013 puis en 2014 25 ( * ) , le Gouvernement a introduit une modification de son mode de calcul afin d'amplifier ses effets . Correspondant auparavant à la différence entre le plafond de la décote (soit 508 euros en 2014) et la moitié du montant de la cotisation brute d'impôt, le montant de la décote correspond désormais à la différence entre le plafond de la décote - soit 1 135 euros pour une personne seule et 1 870 euros pour un couple en 2015 - et le montant de la cotisation d'impôt due .

En outre, une « décote conjugale » a été introduite, d'un montant 1,65 fois plus élevé à celui de la « décote individuelle » afin de favoriser également les couples soumis à imposition commune dont les revenus sont également partagés entre chaque membre.

Les deux nouvelles décotes appliquées en 2015 ont ainsi repoussé significativement le seuil d'entrée dans l'IR - de 13 490 euros à 15 508 euros de revenu annuel déclaré pour un célibataire entre 2013 et 2015 - et ont procuré un allègement d'impôt à environ 7,5 millions de contribuables, pour un gain moyen estimé à environ 350 euros par foyer fiscal .

Le coût budgétaire total de la décote devrait ainsi atteindre 3,6 milliards d'euros en 2015 - contre environ 2 milliards d'euros en 2013 - pour 10,4 millions de bénéficiaires, soit une baisse d'environ 2 millions par rapport aux années précédentes 26 ( * ) .

*

Les données provisoires de l'imposition 2015 indiquent que la réforme du « bas de barème » a concerné 9,3 millions de foyers fiscaux pour un coût de 2,8 milliards d'euros . Elle a fait sortir ou évité de faire entrer dans l'impôt sur le revenu environ 3,2 millions de foyers et a diminué l'imposition de 4,4 millions de foyers 27 ( * ) . Le gain moyen s'établirait à 300 euros , l'effet étant concentré entre les quatrièmes et huitièmes déciles de revenu fiscal de référence - soit entre 13 000 et 36 890 euros environ - qui représentent près de 90 % des bénéficiaires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE NOUVELLE RÉFORME DU « BAS DE BARÈME » PAR UN AMÉNAGEMENT DU MÉCANISME DE LA DÉCOTE

Le 3° du I du présent article tend à modifier, une nouvelle fois, le mécanisme de la décote prévu au 4 de l'article 197 du code général des impôts, afin d' augmenter le nombre de ses bénéficiaires et d'adoucir sa pente pour réduire l'entrée brutale dans l'impôt et améliorer la progressivité du « bas de barème ».

Selon le dispositif proposé, le montant de la décote serait désormais calculé en faisant la différence entre le plafond de la décote , qui serait porté de 1 135 euros à 1 165 euros pour un célibataire (décote simple) et de 1 870 euros à 1 920 euros pour un couple (décote conjugale), et les trois quarts du montant de la cotisation d'impôt due , alors qu'actuellement c'est l'intégralité de ce montant qui est retenu.

Comparaison de la formule de calcul de la décote

Imposition des revenus pour 2013

Imposition des revenus pour 2014

Imposition des revenus pour 2015

Pour un contribuable célibataire, veuf ou divorcé

I = IB - (508 euros - IB/2)

I = IB - (1 135 euros - IB)

I = IB - (1 165 euros - ¾ IB)

Pour un couple soumis à imposition commune

I = IB - (1 870 euros - IB)

I = IB - (1 920 euros - ¾ IB)

Note de lecture : I correspond au montant dû après application de la décote et IB au montant de la cotisation d'impôt brut avant décote.
Source : commission des finances du Sénat

La décote s'appliquerait donc jusqu'à ce que le montant de l'impôt brut avant décote atteigne 1 553 euros pour un célibataire et 2 560 euros pour un couple , contre respectivement 1 135 euros et 1 870 euros pour l'imposition 2015 (des revenus 2014).

Le « seuil d'exonération » de l'impôt sur le revenu est, par ailleurs, considérablement relevé puisqu'il passe de 598 euros pour l'imposition 2015 à 701 euros pour l'imposition 2016 d'un célibataire, et de 965 euros à 1 132 euros pour l'imposition d'un couple, compte tenu du seuil de 61 euros en-deçà duquel l'impôt n'est pas recouvré.

Évolution des seuils d'application du mécanisme de la décote

(en euros)

Année d'imposition des revenus

2012

2013

2014

2015

2016

Montant du plafond de la décote

439

480

508

1 135 (1)

1 870 (2)

1 165 (1)

1 920 (2)

« Seuil de sortie » de la décote : montant d'IR maximum pour un allègement

878

960

1 016

1 135

1 870

1 153

2 560

« Seuil d'exonération » d'imposition : montant d'IR maximum pour une exonération

293

320

339

568

935

666

1 097

Compte tenu du seuil de 61 euros à recouvrer

333

360

379

598

965

701

1 132

(1) Pour un célibataire
(2) Pour un couple
Source : commission des finances du Sénat

Les graphiques ci-après permettent de constater l'atténuation de la pente des décotes permise par la modification de leur modalité de calcul et la revalorisation de leur montant. Le taux marginal effectif s'appliquant à l'entrée dans l'imposition passera ainsi de 28 % à 24,5 %. L'augmentation du revenu conduira ainsi à une augmentation moins rapide de l'impôt dû .

Évolution du montant de la décote simple
en fonction du revenu imposable par part

(en euros)

Source : direction de la législation fiscale

B. L'INDEXATION DU BARÈME

Le présent article propose également l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation .

Ainsi, le 1° du I , qui modifie le 1 de l'article 197 du code général des impôts, prévoit la revalorisation de 0,1 % 28 ( * ) des seuils et des limites applicables pour les tranches du barème de l'IR.

Indexation des seuils et des limites associés
aux tranches du barème de l'IR

(en euros)

Tranches du barème de l'IR

Pour les revenus de 2014

Pour les revenus de 2015

Tranche à 14 %

de 9 690 à 26 764

de 9 700 à 26 791

Tranche à 30 %

de 26 764 à 71 754

de 26 791 à 71 826

Tranche à 41 %

de 71 754 à 151 956

de 71 826 à 152 108

Tranche à 45 %

Plus de 151 956

Plus de 152 108

Source : commission des finances d'après l'article 2 du présent projet de loi

Le 2° du I, qui modifie le 2 du même article, ainsi que le II , qui concerne l'article 196 B du code général des impôts, procèdent également à l'indexation des autres limites et seuils applicables dans le cadre du calcul de l'IR, hormis la décote qui fait l'objet de la réforme présentée ci-dessus.

Indexation des autres limites et seuils associés au calcul de l'impôt sur le revenu

(en euros)

Objet de la limite ou du seuil

Pour les revenus de 2014

Pour les revenus de 2015

Plafonnement de chaque demi-part de quotient familial
(article 197 du CGI)

1 508

1 510

Plafonnement de la part entière de quotient familial accordée au titre du premier enfant à charge des personnes vivant seules et élevant seules leurs enfants (article 197 du CGI)

3 558

3 562

Plafonnement de la demi-part supplémentaire accordée aux personnes célibataires, divorcées ou veuves sans charge de famille et ayant élevé pendant au moins cinq ans un enfant âgé de plus de 25 ans imposé distinctement (article 197 du CGI)

901

902

Réduction d'impôt accordée au titre de la demi-part supplémentaire accordée aux contribuables anciens combattants, invalides ou parents d'enfants majeurs âgés de moins de 26 ans et imposés distinctement (article 197 du CGI)

1 504

1 506

Réduction d'impôt pour les contribuables veufs ayant des enfants à charge (article 197 du CGI)

1 680

1 682

Montant de l'abattement accordé en cas de rattachement d'un enfant majeur marié ou chargé de famille (article 196 B du CGI)

5 726

5 732

Source : commission des finances d'après l'article 2 du présent projet de loi

Cet article tend ainsi à neutraliser les effets de l'inflation sur le calcul de l'impôt sur le revenu, même si celle-ci s'avère très basse.

Par ailleurs, l'application de nombreux dispositifs ou régimes est directement liée à l'évolution du barème . Comme l'indique l'évaluation préalable, il en est ainsi des « régimes dérogatoires en matière de fiscalité directe locale ou de contributions sociales ciblés sur des ménages modestes, qui sont placés soit sous condition de ressources indexées sur le barème de l'IR, soit sous condition d'impôt ». Le tableau ci-après présente l'ensemble des dispositifs concernés.

Liste des dispositifs dont les seuils, plafonds ou abattements évoluent en fonction de la revalorisation du barème de l'IR

Dispositifs

Référence

Dans le domaine de l'IR

Seuils de chiffre d'affaires du régime micro-entreprise

article 50-0.1 du CGI

Limite d'exonération des titres-restaurant

article 81.19° du CGI

Déduction forfaitaire des frais professionnels du revenu brut

article 83.3° du CGI

Seuil de recettes annuelles du régime de la déclaration contrôlée

article 96. I du CGI

Seuil de recettes annuelles du régime déclaratif spécial

article 102 ter 1 du CGI

Régime de l'auto-entrepreneur

article 151-0 du CGI

Modalités d'imputation des déficits agricoles

article 156.I.1° du CGI

Déductibilité du revenu global d'une somme représentative des avantages en nature des personnes âgées de plus de 75 ans vivant sous le toit du contribuable

article 156. II-2° ter du CGI

Abattement forfaitaire sur le revenu en faveur des personnes modestes invalides ou âgées de plus de 65 ans

article 157 bis du CGI

Abattement applicable aux pensions et retraites

article 158.5.a du CGI

Évaluation forfaitaire minimale du revenu imposable d'après certains éléments du train de vie

article 168.1 du CGI

Retenue à la source sur les traitements, salaires, pensions et rentes viagères de source française servis à des personnes qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France

article 182 A du CGI

Réduction d'impôt accordée au titre de certains dons faits par les particuliers

article 200.1 ter du CGI

Seuil de chiffre d'affaires pour le régime simplifie d'imposition en bénéfices industriels et commerciaux (BIC)

302 septies A bis du CGI

Seuil d'exigibilité des acomptes provisionnels

article 1664.1 du CGI

En matière de fiscalité directe locale

Exonération de taxe d'habitation (TH) afférente à l'habitation principale des titulaires de l'allocation adulte handicape, des contribuables âgés de plus de 60 ans ainsi que les veufs et veuves, de ceux atteints d'une infirmité ou d'une invalidité

article 1411 I du CGI

Exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) en faveur des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans, afférente à leur habitation principale

article 1391 du CGI

Dégrèvement d'office de 100 € de la TFPB afférente à l'habitation principale des redevables âgés de plus

de soixante-cinq ans au 1 er janvier de l'année d'imposition

article 1391 B CGI

Dégrèvement de la fraction de la cotisation de TFPB afférente à l'habitation principale supérieure à 50 % des revenus

article 1391 B ter du CGI

Plafonnement de la cotisation de TH pour la fraction de leur cotisation qui excède 3,44 % de leur RFR, diminue

d'un abattement variable selon le nombre de parts de quotient familial

I de l'article 1414 A du CGI

Les plafonds de revenus, limites et abattements retenus pour l'application de ces dispositifs évoluent chaque année

comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'IR

articles 1414 A et 1417 du CGI

Autres domaines fiscaux

Barème de la taxe sur les salaires (TS)

article 231-2 bis du CGI

Seuil de chiffre d'affaires pour la franchise en base

article 293 B du CGI

Seuil de chiffre d'affaires pour le régime simplifie d'imposition en taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

article 302 septies A du CGI

Biens exonérés de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF)

(article 885 H du CGI)

Dégrèvement de contribution à l'audiovisuel public de certains contribuables modestes

(article 1605 bis du CGI)

Taxe spéciale d'équipement au profit de l'agence pour la mise en valeur d'espaces urbains

articles 1609 C et 1609 D du CGI

Exigibilité de la TS pour les associations

article 1679 A du CGI

C. LES EFFETS DE LA RÉFORME

1. Un coût global de 2,1 milliards d'euros

Selon l'évaluation préalable, le présent article devrait conduire à une nouvelle baisse de recettes de 2,1 milliards d'euros pour l'État, avec deux milliards d'euros pour la réforme de la décote et le reste (100 millions d'euros) compte tenu de l'indexation du barème.

Coût de la réforme pour l'État

Mesure

Coût

Réforme de la décote

2 milliards d'euros

Hausse des montants

0,19 milliard d'euros

Pente adoucie à ¾ au lieu de 1

1,81 milliard d'euros

Indexation du barème

0,1 milliard d'euros

Total

2,1 milliards d'euros

Source : direction de la législation fiscale

Sous l'effet de cette réforme, le coût de la décote passerait globalement de 3,62 milliards d'euros en 2015 à 5,53 milliards d'euros en 2016 , selon le tome II du Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016, soit une augmentation de 53 % .

Plus précisément, la hausse des montants de la décote entraînerait une perte de recettes relativement peu importante, de 200 millions d'euros, l'essentiel du coût de la réforme provenant de la modification du mode de calcul des décotes (1,81 milliard d'euros).

2. Une mesure exonérant 1,1 million de foyers du paiement de l'IR en 2016

La réforme de la décote entraînerait une sortie de l'impôt ou une baisse du montant dû pour 8 millions de foyers , parmi lesquels 3 millions de foyers qui n'avaient pas bénéficié des précédentes mesures de la loi de finances initiale pour 2015. Il n'y aurait, en revanche, aucun foyer perdant.

Le bénéfice de la réforme devrait conduire 1,1 million de foyers à ne pas être imposés au titre de l'IR en 2016 sur leurs revenus 2015 , dont 500 000 d'entre eux n'entrant pas dans l'impôt tandis que les autres en sortiraient. Les 6,9 millions de foyers restants verraient quant à eux le montant de leur impôt diminuer.

Les nouvelles décotes bénéficieraient à un célibataire ayant des revenus équivalant jusqu'à 1,6 SMIC , soit 1 850 euros net par mois, contre 1,4 SMIC auparavant et, pour un couple avec deux enfants , lorsqu'ils disposent de revenus ne dépassant pas 3,7 SMIC , soit 4 200 euros mensuels nets.

L'analyse de la répartition des bénéficiaires de la réforme par décile de revenu fiscal de référence permet de constater que ses effets sont concentrés entre 15 000 et 38 500 euros, ce qui correspond aux quatrième à huitième déciles de revenu fiscal de référence .

Répartition des bénéficiaires de la réforme de la décote par décile de revenu fiscal de référence (RFR)

Bornes inférieures de RFR

(en euros)

Bornes supérieures de RFR

(en euros)

Déciles des foyers fiscaux gagnants

Gain moyen des foyers

(en euros)

-

15 125

803 695

172

15 125

16 327

802 695

237

16 327

17 581

802 695

279

17 581

18 883

802 695

261

18 883

20 137

802 695

149

20 137

24 569

802 695

159

24 569

30 052

802 695

265

30 052

34 265

802 695

403

34 265

38 510

802 695

286

38 510

-

802 695

310

Total

8 026 950

252

Source : direction de la législation fiscale

Le gain moyen de cette nouvelle baisse de l'IR s'établirait à 252 euros . Un célibataire sans enfant bénéficierait ainsi d'une réduction de son impôt sur le revenu de 207 euros en moyenne, tandis que pour un couple elle attendrait environ 330 euros , quel que soit le nombre d'enfants à charge.

3. Des bénéficiaires constitués à 78 % de contribuables sans charge de famille

Si la réforme proposée tend à avantager les couples, qui bénéficient d'un montant de décote plus élevé que les célibataires, elle concernera seulement 1,7 million de familles , dans la mesure où le revenu global de ces dernières, sur lequel s'impute la décote, est généralement plus élevé que celui des contribuables sans charge de famille. Parmi les 8 millions de gagnants à la réforme, 4,5 millions seront des célibataires sans enfant à charge .

Répartition des bénéficiaires de la réforme de la décote en fonction de la situation familiale

(gain moyen en euros)

Contribuables gagnants célibataires, divorcés ou veufs

Contribuables gagnants mariés ou pacsés

Ensemble des contribuables gagnants

Situation de famille *

(dénombrements en milliers)

Nombre

Gain moyen en émission

Nombre

Gain moyen en émission

Nombre

Gain moyen en émission

Sans charge de famille

4 515

207 €

1 760

335 €

6 275

243 €

1 enfant ou personne invalide à charge

512

207 €

469

334 €

981

268 €

2 enfant(s) et/ou personne(s) invalide(s) à charge

150

204 €

489

331 €

639

301 €

3 enfant(s) et/ou personne(s) invalide(s) à charge

13

203 €

107

336 €

120

322 €

Plus 3 enfant(s) et/ou personne(s) invalide(s) à charge

1

159 €

11

319 €

12

304 €

Total

5 191

207 €

2 836

334 €

8 027

252 €

Source : direction de la législation fiscale

L'observation de l'évolution du montant d'IR acquitté entre 2009 et 2016 pour différents cas types - qui n'étaient pas concernés par la réforme du « bas de barème » de 2015 - confirme que la modification de la décote tend surtout à avantager les célibataires et les couples sans enfants . En effet, pour un célibataire salarié, percevant un salaire mensuel net de 1 593 euros, le montant d'impôt payé en 2016 sera inférieur de 178 euros à celui acquitté en 2009. De même, un couple de retraité sans enfant verra la hausse d'impôt de ces dernières années plus que compensée par la réforme du présent article, sa cotisation d'impôt devenant inférieure de 245 euros à celle de 2009. En revanche, un couple avec deux enfants dont les revenus mensuels s'élèvent à 3 800 euros, dont 254 euros au titre d'heures supplémentaires, acquittera un montant d'impôt très proche de celui payé en 2012.

Évolution du montant d'impôt acquitté entre 2009 et 2016 pour trois cas types

Montant d'impôt payé en 2009 (revenus 2008)

Montant d'impôt payé en 2010 (revenus 2009)

Montant d'impôt payé en 2011 (revenus 2010)

Montant d'impôt payé en 2012 (revenus 2011)

Montant d'impôt payé en 2013 (revenus 2012)

Montant d'impôt payé en 2014 (revenus 2013)

Montant d'impôt payé en 2015 (revenus 2014)

Montant d'impôt à payer en 2016 (revenus 2015)

Célibataire salarié sans enfant (1)

1 006 €

1 010 €

1 025 €

1 075 €

1 123 €

1 132 €

1 138 €

828 €

Couple de retraités (2)

1 673 €

1 678 €

1 705 €

1 797 €

1 887 €

1 902 €

1 911 €

1 428 €

Couple de salariés avec deux enfants (3)

1 222 €

1 227 €

1 245 €

1 355 €

1 463 €

1 870 €

1 879 €

1 372 €

(1) Célibataire sans enfant salarié dont le revenu mensuel net s'élève à 1 593 euros (1,4 SMIC)

(2) Couple de retraités, sans enfant, percevant chacun une pension mensuelle nette de 1 480 euros.

(3) Couple de salariés, avec deux enfants, dont le revenu mensuel net s'élève à 3 800 euros, dont 254 euros au titre d'heures supplémentaires

Source : direction de la législation fiscale

*

Au total, les réformes de l'impôt sur le revenu intervenues entre 2014 et 2015 devraient ainsi concerner 12 millions de foyers fiscaux , par une sortie de l'impôt ou une baisse du montant dû. Cela correspond à deux tiers des foyers qui acquittaient jusqu'à présent de l'IR, pour un montant de 5 milliards d'euros correspondant aux engagements du Pacte de responsabilité et de solidarité de janvier 2014.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue députée Christine Pirès Beaune, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement tendant à revaloriser pour l'année 2016 de 2 % - en plus de la revalorisation de 0,1 % correspondant à la revalorisation des seuils du barème - les plafonds de revenu mentionnés au III de l'article 1417 du code général des impôts et les montants d'abattement prévus par l'article 1414 A , qui conditionnent le bénéfice d'abattements, de dégrèvements et d'exonérations en matière de fiscalité locale, de contribution à l'audiovisuel public et de CSG pour les foyers aux revenus modestes.

L'objectif de cette mesure est d'étendre, en 2016, le bénéfice des allègements de taxe d'habitation, de taxe foncière, de contribution à l'audiovisuel public ou encore de CSG en faveur des contribuables modestes, en particulier ceux âgés de plus de 60 ans , ou tout du moins d'éviter de faire sortir un certain nombre d'entre eux, dont le revenu fiscal de référence augmenterait en 2016, notamment sous l'effet de la fiscalisation des majorations de pensions des retraités ayant élevé au moins trois enfants ou de la suppression de la demi-part pour les personnes visant seules qui n'auraient pas assumé seules pendant au moins cinq années la charge d'un enfant (couramment appelée demi-part « des veuves » ou demi-part « vieux parent »).

Selon l'exposé sommaire de l'amendement, la mesure proposée procurerait un gain de pouvoir d'achat de 270 millions d'euros, dont 160 millions d'euros au titre des impositions locales en 2016 et 110 millions d'euros au titre de la CSG et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) en 2017 29 ( * ) . Le Gouvernement a toutefois estimé son coût à 100 millions d'euros , en soulignant que le chiffrage précis d'une telle mesure était complexe.

Tout en annonçant que cette nouvelle dépense serait financée par la hausse d'un centime par litre de la fiscalité du gazole en 2016 - ce qui, en tenant compte de la baisse à due concurrence de celle sur l'essence, entraînerait un surcroît de recettes de 245 millions d'euros en - le secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, a indiqué que le Gouvernement se réserver « le droit d'adapter » la mesure proposée : « nous calibrerons donc le dispositif afin que les personnes âgées modestes bénéficient d'une diminution des impôts locaux qui corresponde exactement au surplus de recettes de ce mouvement sur la fiscalité » 30 ( * ) .

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE MESURE PEU NOVATRICE ET PEU LISIBLE POUR LES CONTRIBUABLES

Un an à peine après la refonte de la décote mise en oeuvre par la loi de finances pour 2015, le Gouvernement propose une nouvelle modification de ses modalités de calcul, tendant, certes, à atténuer sa pente mais aussi à complexifier ce mécanisme . En effet, le montant de la décote ne correspondra plus à la différence entre le plafond fixé en loi de finances et le montant de la cotisation d'impôt, mais à la différence entre le plafond et les trois quarts du montant de la cotisation d'impôt due. De plus, la décote est désormais double : l'une s'appliquant aux célibataires, l'autre aux couples.

La réforme proposée aboutit ainsi à une situation paradoxale : elle renforce de façon considérable les effets de la décote , dans la mesure où celle-ci procurerait en 2016 un allègement global de 5,5 milliards d'euros, tout en accentuant l'opacité de ce mécanisme pour les contribuables.

Avec le présent article, le Gouvernement s'inscrit ainsi largement dans la continuité des ajustements de la décote auxquels il a déjà largement eu recours les années passées . Afin de limiter les effets du gel du barème de l'impôt sur le revenu pour les foyers ayant de faibles revenus, la loi de finances pour 2013 31 ( * ) avait en effet déjà procédé à une revalorisation exceptionnelle de 9 % du plafond de la décote et une nouvelle revalorisation exceptionnelle de 5,8 % était intervenue en loi de finances pour 2014 32 ( * ) .

Loin de la grande réforme fiscale annoncée à l'automne 2014, le Gouvernement ne propose donc qu' un nouveau « rafistolage » pour tenter de limiter les effets de la politique menée les années passées .

Les récentes annonces concernant la prolongation des exonérations et abattements de taxe d'habitation et de taxe foncière pour les retraités modestes en 2015 33 ( * ) illustrent le manque de vision du Gouvernement en matière de politique fiscale et son incapacité à mesurer les conséquences en chaîne de certaines mesures qu'il a introduites ou qu'il a décidé de ne pas remettre en cause.

B. UNE HYPER-CONCENTRATION DE L'IMPÔT SUR UNE MINORITÉ DE MÉNAGES

1. Une réforme repoussant encore le seuil d'entrée dans l'IR

En décalage avec ce que laisse supposer le barème, qui fixe le seuil d'entrée dans la tranche à 14 % à 9 700 euros de revenu imposable par part, la décote conduit à repousser de façon significative le seuil d'entrée dans l'IR . Ainsi, le revenu à partir duquel un célibataire serait effectivement soumis à l'impôt passerait, pour un célibataire, de 0,98 SMIC en 2013 , soit 1 100 euros de revenu mensuel net, à 1,16 SMIC en 2016 , soit environ 1 300 euros.

Pour un couple soumis à imposition commune, le seuil d'entrée dans l'IR serait de 2,16 SMIC (3 300 euros mensuels nets) en 2016 contre 1,49 SMIC en 2013, tandis qu'un couple avec deux enfants, bénéficiant par conséquent de 3 parts de quotient familial, verrait son seuil d'entrer passer de 2,85 SMIC en 2013 (3 271 euros mensuels nets) à 3,73 SMIC (4 383 euros mensuels nets) en 2016.

Le tableau ci-dessous présente l'évolution du seuil d'entrée dans l'IR sous l'effet de la décote depuis 2013 en fonction du revenu fiscal de référence.

Évolution du seuil d'entrée dans l'IR sous l'effet de la décote

(revenu fiscal de référence en euros)

IR 2013

IR 2014

IR 2015

IR 2016

1 part

12 141

13 832

Décote simple

13 957

14 704

1,5 part

15 500

17 546

18 799

19 554

Décote conjugale

2 parts

18 481

25 322

24 404

27 484

3 parts

24 444

33 405

34 104

37 182

4 parts

30 406

39 415

43 804

46 884

Source : direction de la législation fiscale

2. Seulement 46 % de foyers fiscaux acquittant l'IR en 2016, malgré une hausse des recettes

Après une augmentation importante du nombre de contribuables acquittant effectivement l'impôt sur le revenu en 2012 et 2013, une tendance à la baisse peut être observée depuis 2014. Cette décrue s'explique principalement par la réduction exceptionnelle adoptée durant l'été 2014 et par la réforme du « bas de barème » de 2015.

Évolution du nombre de foyers fiscaux imposés et non imposés

(en milliers)

Nombre total de foyers fiscaux

Foyers fiscaux imposés

Foyers fiscaux non imposés

2009

36,4

15,8

43,0%

20,6

57,0%

2010

36,6

16,8

46,0%

19,8

54,0%

2011

36,9

17,2

47,0%

19,7

53,0%

2012

36,4

18,2

50,0%

18,2

50,0%

2013

36,7

19,1

52,0%

17,6

48,0%

2014

37,1

17,8

47,9%

19,3

52,1%

2015

35,7

16,6

46,5%

19,1

53,5%

2016(p)

36,5

16,9

46,3%

19,6

53,7%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses de la direction de la législation fiscale au questionnaire du rapporteur général)

Selon les estimations transmises par la direction de la législation fiscale, le pourcentage de foyers fiscaux imposés diminuerait à nouveau légèrement en 2016, pour atteindre 46,3 % contre 46,5 % en 2015 . Seuls 16,6 millions de ménages ont ainsi payé l'impôt sur le revenu en 2015, contre un maximum de 19,1 millions en 2013.

La réforme proposée par le Gouvernement, en faisant sortir ou évitant de faire entrer dans l'IR 1,1 million de foyers fiscaux, tendrait donc à accroître le phénomène de concentration de l'impôt sur le revenu .

Parallèlement, les recettes d'IR ont pourtant fortement augmenté et continueraient à progresser. Les recettes fiscales issues de l'IR s'établiraient à 72,3 milliards d'euros en 2016 , contre 69,6 milliards d'euros en 2015 34 ( * ) et 69,2 milliards d'euros en 2014. Elles augmenteraient ainsi de 4,5 % en deux ans (2014-2016).

Évolution du produit de l'impôt sur le revenu et du nombre de contribuables de 2009 à 2016

(en millions de contribuables et en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses du Gouvernement au questionnaire du rapporteur général)

L'effet de la réforme de la décote sur le nombre de contribuables imposés et sur les recettes d'IR sera toutefois partiellement compensé par la suppression de la prime pour l'emploi (PPE) , remplacée par la prime d'activité à compter du 1 er janvier 2016. La suppression de la PPE entraînera, en effet, une hausse de 2 milliards d'euros du produit de l'impôt sur le revenu, dont 1,8 milliard d'euros de moindres réductions d'impôt et 200 millions de moindres remboursements. Sur les quelques 5,4 millions d'individus concernés par la suppression de la PPE, seuls 10 % seraient concernés par la réforme de la décote proposée par le présent article. Cette situation s'explique par le fait qu'un nombre important de bénéficiaires de la PPE appartiennent à des foyers fiscaux dont le revenu global est relativement élevé.

3. Près de 82 % de la charge fiscale reposant sur 20 % des foyers fiscaux

Une analyse plus fine par décile de revenu imposable confirme la tendance à la concentration de l'impôt sur le revenu. Les 20 % des foyers les plus riches, dont les revenus représentent 49 % du revenu imposable total, acquittent en effet 82 % du produit de l'impôt en 2015 , selon les données provisoires au titre de la deuxième émission. Ces données mettent donc en évidence la forte progressivité de l'impôt sur le revenu en France.

Répartition par décile de revenu imposable du produit de l'IR en 2015
(revenus 2014*)

Borne inférieure du revenu imposable

Borne inférieure du revenu imposable

Nombre de contribuables

Revenu imposable

Impôt sur le revenu

Montant

Part

Montant

Part

(milliards d'€)

(milliards d'€)

0 €

3 669 €

3 568 828

2,62

0,3%

-0,09

-0,1%

3 670 €

8 964 €

3 569 628

23,45

2,5%

-0,39

-0,6%

8 965 €

12 641 €

3 568 814

38,73

4,2%

-0,56

-0,8%

12 642 €

15 716 €

3 568 964

50,96

5,5%

-0,12

-0,2%

15 717 €

18 781 €

3 568 443

61,4

6,6%

1,46

2,2%

18 782 €

23 007 €

3 568 192

73,77

8,0%

2,46

3,7%

23 008 €

28 730 €

3 569 030

92,15

10,0%

3,08

4,6%

28 731 €

36 647 €

3 568 581

115,66

12,5%

5,33

8,0%

36 648 €

50 882 €

3 568 763

152,92

16,5%

9,92

14,9%

50 883 €

3 568 790

301,35

32,6%

44,65

66,9%

Total

35 688 033

913,01

98,7%

65,73

98,4%

* Issus de la deuxième émission des revenus, correspondant à 95 % du nombre total de contribuables escomptés. Le nombre total de foyers fiscaux ne sera connu qu'à la sixième émission des revenus, en février 2016.

Source : direction de la législation fiscale

Cette très forte progressivité est également confirmée par la répartition du produit de l'IR et des foyers fiscaux par tranche du barème de l'IR. Les 63 000 foyers fiscaux assujettis à la tranche à 45 % acquittent ainsi, au total, 9,2 milliards d'euros d'impôt 35 ( * ) . Les quelques 4,5 millions de foyers fiscaux assujettis à l'IR jusqu'à la tranche de 30 % , s'appliquant aux revenus situés entre 26 764 euros et 71 754 euros par part, paient plus de 30 milliards d'euros d'impôt sur le revenu .

. Répartition des foyers fiscaux et du produit de l'IR par tranche du barème
en 2015 (revenus 2014*)

. (en milliards d'euros)

Tranches marginales du barème

Nombre de foyers fiscaux (en milliers)

Montant de l'impôt sur le revenu

0%

11 929

-1,5

14%

18 816

16 4

30%

4 517

30,1

41%

361

11,5

45%

63

9,2

Total

35 688

65,7

* Issus de la deuxième émission des revenus, correspondant à 95 % du nombre total de contribuables escomptés. Le nombre total de foyers fiscaux ne sera connu qu'à la sixième émission des revenus, en février 2016.

Source : direction de la législation fiscale

C. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR LA COMMISSION DES FINANCES : ALLÉGER L'IMPÔT DES CONTRIBUABLES AYANT LE PLUS CONTRIBUÉ À LA HAUSSE DES RECETTES

1. La suppression de la réforme de la décote

Pour les raisons développées précédemment, liées à la complexité de la décote, à sa faible lisibilité et à ses effets sur la concentration de l'IR, la commission des finances a adopté, sur proposition de votre rapporteur général, un amendement tendant à supprimer la réforme de la décote proposée par le présent article .

2. Le relèvement du plafond du quotient familial de 1 508 euros à 1 750 euros par demi-part

Comme l'année passée, votre rapporteur général a souhaité proposer l'adoption d'une mesure spécifique en faveur des familles, pénalisées par les deux baisses successives du plafond du quotient familial, en 2013 puis en 2014.

Afin de compenser en partie les effets de ces mesures, la commission des finances a adopté un amendement relevant de 1 508 euros à 1 750 euros par demi-part le plafond de l'avantage retiré du quotient familial au titre de l'imposition 2016. Le coût de cette mesure est estimé à 550 millions d'euros ; elle bénéficierait à 1,38 million de familles pour un gain moyen de 400 euros .

Ce relèvement apparaît d'autant plus justifié que, depuis le 1 er juillet 2015, plus de 600 000 familles ont vu le montant de leurs allocations familiales diminuer, en moyenne de 110 euros par mois, sous l'effet de la modulation du montant de ces allocations en fonction des revenus, prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

3. Une baisse de 30 % à 28 % du taux marginal de la troisième tranche du barème de l'IR

Afin d'alléger en priorité l'imposition des contribuables sur lesquels repose en large partie l'effort fiscal et qui n'ont jusqu'ici pas bénéficié des mesures des années précédentes, la commission des finances a adopté, à l'initiative de votre rapporteur général, un amendement diminuant de deux points, soit de 30 à 28 %, le taux marginal de la troisième tranche du barème de l'IR . Selon les données disponibles au titre de la deuxième émission de l'impôt sur le revenu 2015, les contribuables situés dans la tranche à 30 % ont en effet acquitté 30 milliards d'euros d'impôt sur un produit total de 65,7 milliards d'euros.

Le coût budgétaire de cette mesure est estimé à 2,3 milliards d'euros. Elle représenterait un gain moyen d'environ 430 euros pour 5,2 millions de foyers.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2 bis (nouveau) (Art. 80 duodecies du code général des impôts) - Régime fiscal des indemnités de cessation forcée des fonctions de mandataire social ou de dirigeant

Commentaire : le présent article vise à abaisser à environ 114 000 euros le seuil à partir duquel les indemnités de cessation forcée de fonctions versées aux mandataires sociaux ou aux dirigeants (ou « parachutes dorés ») sont soumises à l'impôt sur le revenu.

I. LE DROIT EXISTANT

À l'instar des indemnités de rupture de contrat de travail et en vertu du 2 de l'article 80 duodecies du code général des impôts, introduit par la loi de finances pour 2000 36 ( * ) , les indemnités de cessation des fonctions de dirigeant de sociétés ou de mandataire social, dits « parachutes dorés » sont, en principe, assujetties à l'impôt sur le revenu . Cette règle s'applique de la même façon aux indemnités contractuelles, négociées au préalable par le mandataire ou le dirigeant lors de sa prise de fonction, et aux indemnités transactionnelles, versées par l'entreprise afin de prévenir ou de clore une contestation.

Toutefois, une exception est prévue en cas de cessation forcée de leurs fonctions , notamment lors d'une révocation 37 ( * ) . Une exonération s'applique alors pour la fraction de l'indemnité inférieure à l'un des montants suivants :

- deux fois la rémunération annuelle brute perçue au cours de l'année civile précédant la cessation forcée des fonctions (3° du 1 de l'article 80 duodecies précité). La rémunération annuelle brute correspond à l'ensemble des sommes imposables perçues par les dirigeants ou mandataires, dont les rémunérations correspondant aux fonctions de directions et les jetons de présence spéciaux ;

- ou 50 % du montant des indemnités perçues (4° du 1 du même article).

Cette fraction exonérée est, elle-même, soumise à un plafond correspondant à six fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) , soit 228 240 euros en 2015. S'il s'agit d'une mise à la retraite, le plafond d'exonération s'élève en revanche à cinq fois le PASS (190 200 euros).

Lorsqu'une même personne exerce à la fois des fonctions de salarié et de mandataire social au sein d'une même société, ou de plusieurs sociétés, les limites d'exonération définies ci-avant s'appliquent au montant global des indemnités perçues au titre de l'ensemble des fonctions.

Régime fiscal des indemnités de cessation des fonctions de mandataire social ou de dirigeant de société

Cessation forcée des fonctions

Exonération d'impôt sur le revenu dans la limite de six fois le PASS (228 240 euros), à concurrence du montant le plus élevé :

- du double de la rémunération annuelle brute de l'année civile précédant la cessation des fonctions ;

- ou de 50 % de l'indemnité totale.

Exemple : un dirigeant d'une société percevant une indemnité de 200 000 euros et dont la rémunération annuelle brute de l'année précédente s'élève à 90 000 euros exonération à hauteur de 180 000 euros (soit deux fois la rémunération imposable) et 20 000 euros imposables.

Autres cas de cessation des fonctions

Indemnité entièrement imposable à l'impôt sur le revenu.

Source : bulletin officiel des finances publiques

Par ailleurs, un mécanisme de déduction du bénéfice imposable des indemnités de cessation des fonctions de dirigeant ou de mandataire social est prévu pour les entreprises par le 5 bis de l'article 39 du code général des impôts 38 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit en première lecture par l'Assemblée nationale à l'initiative du député Laurent Grandguillaume et de plusieurs membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, et a reçu un avis de « sagesse » du Gouvernement.

Il vise à abaisser le seuil d'exonération au titre de l'impôt sur le revenu pour les indemnités de cessation forcée des fonctions de mandataire social ou de dirigeant afin, selon les termes de l'exposé sommaire de l'amendement, de réduire l'avantage fiscal existant et d'« inciter les entreprises et leurs dirigeants à adopter des pratiques plus raisonnables en termes de rémunérations et d'indemnités ».

Il prévoit ainsi de remplacer les seuils d'imposition en vigueur , correspondant soit à deux fois la rémunération annuelle brute perçue l'année précédant les fonctions, soit à 50 % du montant des indemnités, par un plafond unique fixé à trois fois le PASS . Par conséquent, la fraction d'indemnité de cessation forcée des fonctions exonérée d'impôt sur le revenu serait limitée à 114 120 euros .

Ce nouveau plafond introduit une différence de traitement entre les indemnités de cessation forcée des fonctions des dirigeants ou mandataires sociaux, d'une part, et les indemnités de licenciement et de mise à la retraite des salariés, d'autre part, qui resteraient exonérées dans la limite du double de la rémunération annuelle brute ou de la moitié du montant total des indemnités perçues.

L'impact financier du présent article n'a fait l'objet d' aucune évaluation chiffrée .

Afin d'harmoniser ce plafond avec celui prévu en matière d'impôt sur les sociétés, un amendement portant article additionnel au présent projet de loi de finances a été adopté, à l'initiative de la rapporteur générale du budget, Valérie Rabault (cf. infra commentaire de l'article 6 bis ).

Par ailleurs, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, un nouvel article 7 bis a été introduit, à l'initiative du député Laurent Grandguillaume, afin de réduire de dix à cinq fois le PASS, soit de 380 400 euros à 190 200 euros, le seuil d'assujettissement à la contribution sociale généralisée et aux cotisations sociales dès le premier euro des indemnités de cessation forcée des fonctions de dirigeant ou de mandataire social ainsi que des indemnités de licenciement, de mise à la retraite ou de rupture du contrat de travail.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'adoption du présent article s'inscrit dans une actualité récente concernant des indemnités de départ particulièrement élevées de dirigeants de grandes entreprises françaises.

Pour autant, le durcissement du régime fiscal proposé par cet article ne devrait avoir qu' une faible incidence sur les indemnités de cessation forcée de fonctions les plus élevées . Ainsi, les indemnités susceptibles d'être versées à l'occasion du départ du directeur général d'Alcatel-Lucent, soit 7,9 millions d'euros, ainsi que celles susceptibles d'être versées au président-directeur général de Lafarge, soit 5,9 millions d'euros, sont significativement au-dessus du plafond existant.

À l'instar des mesures adoptées dans le cadre de la loi pour la croissance l'activité et l'égalité des chances économiques concernant les retraites dites « chapeau » 39 ( * ) , le présent article présente donc avant tout une portée symbolique , en appelant les grandes entreprises à la modération .

Pour les sociétés cotées, la question se pose de savoir si le vote des actionnaires sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux , y compris leurs indemnités de départ, constituerait un moyen plus efficace que celui de l'imposition pour réguler le comportement des entreprises. Le code de l'Association française des entreprises privées (Afep) et du Mouvement des entreprises de France (Medef) relatif au gouvernement d'entreprise des sociétés cotées prévoit actuellement une information sur la rémunération des dirigeants devant l'assemblée générale ordinaire annuelle - y compris les indemnités liées à la cessation des fonctions - et la possibilité de procéder à un vote consultatif, un avis négatif impliquant une nouvelle délibération du comité des délibérations 40 ( * ) . Or selon le dernier rapport de l'autorité des marchés financiers (AMF) sur le gouvernement d'entreprise et la rémunération des dirigeants, seules 83 % des indemnités de cessation de fonctions versées par des sociétés du CAC 40 avaient fait l'objet d'une information complète aux actionnaires en 2014 41 ( * ) . La Commission européenne a quant à elle récemment proposé d'accorder obligatoirement aux actionnaires le droit de se prononcer sur la rémunération des administrateurs, par un vote contraignant sur la politique de rémunération tous les trois ans 42 ( * ) .

En outre, dans son rapport précité, l'AMF souligne également les failles du code Afep-Medef, dont les règles « contraignantes » (limitation à deux ans de salaire des indemnités de cessation de fonctions) « sont contournables par les sociétés qui le souhaitent ». L'AMF propose ainsi une modification de ce code afin d'adopter une approche globale de l'ensemble des rémunérations versées à l'occasion de la cessation des fonctions d'un dirigeant, de préciser la rémunération variable devant être prise en compte dans le plafond actuellement prévu par le code, ainsi que de mieux prendre en compte la pratique, croissante, de distribution (éventuellement différée) sous la forme d'actions . Elle préconise, enfin, la publication systématique d'un communiqué de presse par l'entreprise au moment du départ d'un dirigeant, permettant de rassembler l'ensemble des informations relatives à sa rémunération, dans un souci de transparence et de moralisation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2 ter (nouveau) (Art 195 du code général des impôts) - Abaissement de la condition d'âge pour l'obtention par les anciens combattants d'une demi-part supplémentaire

Commentaire : le présent article prévoit d'abaisser l'âge à partir duquel les anciens combattants ou leurs veuves peuvent bénéficier d'une demi-part supplémentaire de quotient familial en application du f du 1 de l'article 195 du code général des impôts.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE DISPOSITIF LÉGAL EXISTANT

Le f du 1 de l'article 195 du code général des impôts prévoit que les contribuables célibataires, divorcés ou veufs, âgés de plus de 75 ans et titulaires de la carte du combattant 43 ( * ) ou d'une pension servie en vertu des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, bénéficient d'une demi-part supplémentaire de quotient familial . Cet avantage est également accordé aux veuves âgées de plus de 75 ans , dès lors qu'avant leur décès, leur conjoint a bénéficié de la demi-part supplémentaire, au moins au titre d'une année d'imposition. Les contribuables mariés ou pacsés, lorsque l'un des conjoints remplit ces conditions, peuvent également en bénéficier 44 ( * ) . Cette demi-part supplémentaire ne se cumule pas avec les avantages de quotient familial en faveur des contribuables mariés invalides.

L'avantage est plafonné en application du 2 du I de l'article 197 du code général des impôts. Ce plafonnement spécifique est fixé à 3 012 euros à compter de l'imposition des revenus de l'année 2014 45 ( * ) .

Comme l'a rappelé notre ancien collègue Philippe Marini, dans son rapport n° 653 (2013-2014) consacré à la dépense fiscale en faveur des anciens combattants, cette mesure a été introduite par amendement dans la loi de finances pour 1982 46 ( * ) . Le minimum d'âge requis à l'origine était de quatre-vingts ans . Un sous-amendement a abaissé ce minimum à soixante-quinze ans, tout en introduisant une condition de ressources 47 ( * ) . À l'issue de la discussion, le minimum requis a finalement été maintenu à soixante-quinze ans et la condition de ressources supprimée.

B. LE COÛT DE L'AVANTAGE FISCAL

La dépense fiscale liée à la demi-part supplémentaire accordée aux anciens combattants est une dépense fiscale extrêmement dynamique .

Évolution de la dépense fiscale liée à la demi-part supplémentaire
au titre du
f du 1 de l'article 195 du code général des impôts

(En millions d'euros)

Source : Rapport n° 653 (2013-2014) de M. Philippe Marini, complété par le projet annuel de performances pour 2016

Son dynamisme est lié à l'accroissement de la population de ses bénéficiaires . Son estimation pour 2016 est ainsi de 550 millions d'euros, soit 90 millions de plus que l'estimation initiale en projet de loi de finances pour 2015. La population de bénéficiaires, qui a été décroissante jusqu'en 2007, connaît une hausse depuis 2008 en raison de l'entrée progressive dans le dispositif des anciens combattants ayant participé à la guerre d'Algérie .

Nombre de foyers bénéficiaires de la demi-part supplémentaire
au titre du
f du 1 de l'article 195 du code général des impôts

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014 48 ( * )

Nombre de foyers bénéficiaires

450 000

435 000

413 000

399 000

412 200

424 000

468 000

516 500

578 000

656 600

742 700

Source : Rapport n° 653 (2013-2014) de M. Philippe Marini, complété par le projet annuel de performances pour 2016

Selon les informations qu'avait obtenues Philippe Marini, la dépense fiscale continuerait à croître jusqu'en 2019 49 ( * ) .

Par ailleurs, d'importants écarts sont constatés chaque année entre l'évaluation initiale, celle qui figure en projet de loi de finances d'une année N, l'actualisation qui est mentionnée en projet de loi de finances de l'année N+1 et enfin, le chiffrage définitif qui est présenté en année N+2.

Ainsi, la dépense fiscale liée à la demi-part supplémentaire accordée aux anciens combattants a été évaluée à 370 millions d'euros en projet de loi de finances pour 2014. Elle a été réévaluée à 425 millions d'euros en projet de loi de finances pour 2015. Elle est finalement arrêtée à 465 millions d'euros en projet de loi de finances pour 2016. Cela représente un écart de 95 millions d'euros entre son évaluation initiale et le chiffrage final, soit une réévaluation de plus de 25 %.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Par amendement portant article additionnel, présenté par nos collègues députés Valérie Rabault, rapporteure générale au nom de la commission des finances, et Dominique Baert, l'Assemblée nationale a abaissé d'un an l'âge permettant aux anciens combattants et à leurs veuves de bénéficier de la demi-part supplémentaire, passant ainsi de 75 à 74 ans .

Les auteurs ont justifié leur amendement par la volonté de faire bénéficier de cet avantage fiscal d'anciens combattants de la guerre d'Algérie qui n'y ont pas encore droit .

Le Gouvernement a donné un avis défavorable à cette mesure, dont il évalue le coût à 44 millions d'euros 50 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'octroi d'une demi-part supplémentaire de quotient familial constitue une mesure de reconnaissance importante en faveur des anciens combattants. Elle vient compléter les dispositifs directs tels que la retraite du combattant dont le montant est de 672 euros par an.

Votre rapporteur général ne s'opposera pas à la mesure adoptée par l'Assemblée nationale, qui vise en particulier les anciens de la guerre d'Algérie.

Il vous propose d'adopter un amendement de cohérence pour appliquer ce même minimum d'âge, de 74 ans au lieu de 75 ans, pour les titulaires de carte du combattant ou d'une pension militaire d'invalidité mariés ou pacsés, qui bénéficient également d'une demi-part supplémentaire de quotient familial.

Il est précisé que cette mise en cohérence ne crée pas de surcoût par rapport à l'évaluation de 44 millions d'euros communiquée par le secrétaire d'État au budget.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2 quater (nouveau) (Art. 199 tervicies du code général des impôts) - Prorogation de l'application du dispositif « Malraux » dans les quartiers anciens dégradés jusqu'au 31 décembre 2017

Commentaire : le présent article prévoit de prolonger de deux ans, jusqu'au 31 décembre 2017, la durée pendant laquelle le dispositif fiscal « Malraux » est applicable dans les quartiers anciens dégradés (QAD).

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RÉGIME « MALRAUX » : À L'ORIGINE, UNE DÉDUCTION DE CERTAINES DÉPENSES DU REVENU FISCAL, DESTINÉE À ENCOURAGER LA RÉNOVATION DES CENTRES VILLES ANCIENS

Le régime « Malraux » est conçu dans le contexte de l'urbanisation d'après-guerre , où l'important besoin de logements et les nécessités de la reconstruction ont pu conduire à dégrader des centres villes historiques. L'objectif est d'abord d'assurer la préservation de l'intérêt patrimonial de ces bâtiments urbains . Le dispositif, créé par la loi du 4 août 1962, s'appuie sur la notion de « secteurs sauvegardés » qui peuvent être créés et délimités lorsqu'ils « présentent un caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble d'immeubles ». Un « plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur » (PSMV) au sein des secteurs sauvegardés est établi par décret en Conseil d'État : tous les travaux ayant pour effet de modifier l'état des immeubles sont soumis à permis ou à déclaration préalable et doivent, pour être autorisés, être jugés « compatibles » avec ce plan . Aucune disposition fiscale n'est intégrée à la loi de 1962, qui précise simplement que « la loi de finances déterminera chaque année les conditions de financement des opérations prévues par la présente loi ».

Quinze ans plus tard, la loi de finances pour 1977 associe aux secteurs sauvegardés une fiscalité dérogatoire à caractère incitatif , précisée et codifiée aux articles 31 et 156 du code général des impôts par la loi de finances rectificative pour 1994 : les opérations de restauration immobilières sont encouragées par un droit offert à l'investisseur de déduire de ses revenus les dépenses résultant des travaux . L'accès au dispositif est conditionné par différents critères relatifs non seulement à l'emplacement de l'immeuble, mais aussi à son affectation : il doit s'agir d'un immeuble d'habitation destiné, après l'opération, à la location pour une durée de six ans, à usage de résidence principale du locataire .

B. LA REDÉFINITION DU DISPOSITIF EN 2009 : LE « NOUVEAU MALRAUX »

La nature de l'avantage fiscal octroyé aux investisseurs a été profondément redéfinie par la loi de finances pour 2009 51 ( * ) : est alors créé un nouveau régime « Malraux », codifié à l'article 199 tervicies du code général des impôts, sans que l'ancien régime « Malraux » ne soit complètement supprimé.

La déduction est transformée en réduction d'impôt sur le revenu , laquelle se trouve soumise à un mécanisme de plafonnement . En effet, les propriétaires procédant à des opérations de restauration immobilière « Malraux » pour lesquelles une demande de permis de construire ou une déclaration de travaux est déposée à compter du 1 er janvier 2009 bénéficient non plus d'un régime d'imputation des déficits mais d'une réduction d'impôt , assise sur le montant des dépenses exposées dans un délai de quatre ans à compter de la délivrance de l'autorisation de travaux et dans une limite de 100 000 euros par an . En outre, les taux sont différenciés selon que l'immeuble est situé en secteur sauvegardé (40 %) ou en zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager , dites « ZPPAUP » (30 %). La durée de l'engagement de location est allongée à neuf ans . Une condition relative à l'absence de liens de parenté entre le locataire et le contribuable est également instaurée : la location ne peut pas être conclue avec un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant du contribuable.

À cette réforme de structure du dispositif se sont ajoutées plusieurs modifications paramétriques : les taux ont été abaissés à deux reprises 52 ( * ) par réduction homothétique ou « rabot » pour atteindre 30 % en secteur sauvegardé et 22 % dans les autres cas . Le régime « Malraux » a été dans un premier temps soumis au plafonnement global des réductions et crédits d'impôts, avant d'en être de nouveau exclu par la loi de finances pour 2013 53 ( * ) . Enfin, la durée au cours de laquelle les dépenses peuvent être prises en compte a été réduite de quatre à trois ans à compter de la date de délivrance du permis de construire.

Au total, la dépense fiscale « Malraux » issue de la réforme de 2009 devrait s'élever à 32 millions d'euros en 2016 et bénéficier à 5 000 foyers fiscaux 54 ( * ) .

C. L'EXTENSION DU DISPOSITIF MALRAUX AUX QUARTIERS ANCIENS DÉGRADÉS

Si le régime fiscal était au départ limité aux immeubles situés en secteur sauvegardé, le bénéfice de l'avantage fiscal a ensuite été étendu à de nouveaux secteurs protégés : outre les « zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager » (ZPPAUP) , créées en 1983 55 ( * ) et remplacées par les « aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine » (AVAP), créées en 2010 56 ( * ) , doivent également être cités les « quartiers anciens dégradés » (QAD) prévus par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion et dont la liste est fixée par décret 57 ( * ) . Il s'agit de quartiers « présentant soit une concentration élevée d'habitat indigne et une situation économique et sociale des habitants particulièrement difficile, soit une part élevée d'habitat dégradé vacant et un déséquilibre important entre l'offre et la demande de logements ».

Le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) 58 ( * ) n'était au départ pas adossé à un dispositif fiscal et faisait exclusivement intervenir des acteurs publics, parmi lesquels l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) joue un rôle clé puisque c'est à elle qu'il revient d'accorder, à travers la passation de conventions pluriannuelles, « des concours financiers aux collectivités territoriales, aux établissements publics de coopération intercommunale compétents et aux organismes publics ou privés qui conduisent les opérations concourant à la réalisation de ce programme » 59 ( * ) .

À ce jour, d'après les chiffres annoncés par le ministère du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité 60 ( * ) , 40 projets ont été retenus dans le cadre du PNRQAD , dont 25 bénéficient du financement de l'État et des agences.

Par amendement 61 ( * ) déposé au projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion par plusieurs collègues députés, membres de la majorité gouvernementale de l'époque, les opérations de restauration immobilière dans le périmètre des QAD ont été incluses dans le dispositif Malraux prévu à l'article 199 tervicies du code général des impôts et peuvent ainsi ouvrir droit au bénéfice de cet avantage fiscal jusqu'au 31 décembre 2015 . Le taux est le même que pour les secteurs sauvegardés (30 %).

Les auteurs de l'amendement précisaient alors qu'il s'agissait de « mobiliser l'investissement privé sur ces quartiers , en accompagnement de l'effort public très important mis en place . En effet, les opérations d'investissements n'apparaissent pas immédiatement rentables dans ces quartiers dont le marché se désintéresse et il est donc indispensable d'attirer les capitaux privés par des avantages fiscaux limités et encadrés de manière à optimiser leur impact économique et social. »

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Par amendement portant article additionnel, présenté par Valérie Rabault, rapporteure générale, au nom de la commission des finances, l'Assemblée nationale a prévu la prorogation de l'application du régime « Malraux » dans les quartiers anciens dégradés jusqu'au 31 décembre 2017, soit une prolongation de deux années supplémentaires .

Le Gouvernement a donné un avis favorable à cette mesure .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général déplore le manque de données relatives au coût de la dépense fiscale « Malraux » : il n'est ainsi pas possible de savoir quel sera le coût exact de cette réforme. Cependant, il estime que le dispositif « Malraux » est utile dans le cadre du PNRQAD car il permet de compléter les fonds publics par l'incitation à l'investissement privé . Dans la mesure où le PNRQAD s'étend au-delà de 2015, il paraît logique que le dispositif fiscal qui l'accompagne soit prorogé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2 quinquies (nouveau) (Art. 199 novovicies du code général des impôts) - Abrogation de la condition de mixité des logements dans les programmes immobiliers pour bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu en faveur de l'investissement locatif intermédiaire, dit dispositif « Pinel »

Commentaire : Dans le cadre du dispositif d'incitation fiscale à l'investissement locatif intermédiaire des particuliers, dit dispositif « Pinel », le présent article prévoit de supprimer l'obligation selon laquelle un pourcentage de logements doit être acquis, au sein d'un immeuble neuf qui comporte au moins cinq logements, sans ouvrir droit au bénéfice de cette réduction d'impôt sur le revenu.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE DISPOSITIF « DUFLOT » DEVENU « PINEL » : UN DISPOSITIF D'INCITATION FISCALE À L'INVESTISSEMENT LOCATIF INTERMÉDIAIRE

L'article 199 novovicies du code général des impôts, issu de l'article 80 de la loi n° 2012-1509 du 20 décembre 2012 de finances pour 2013, crée un dispositif d'incitation fiscale à l'investissement locatif intermédiaire , initialement appelé dispositif « Duflot » , du nom de la ministre chargée du logement de l'époque.

Il a depuis fait l'objet d'importants aménagements afin de le rendre plus attractif , en vertu de l'article 5 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, devenant ainsi le dispositif « Pinel » 62 ( * ) .

Depuis le 1 er janvier 2013 et jusqu'au 31 décembre 2016, les particuliers, propriétaires d'un bien immobilier neuf ou acquis en état futur d'achèvement, bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu dès lors que ledit bien (dont le prix d'acquisition ne peut dépasser 300 000 euros) est situé dans certaines zones considérées comme les plus tendues (zones A et B1 63 ( * ) , voire, sur le reste du territoire, dans celles qui sont caractérisées par un déséquilibre entre l'offre et la demande) et qu'ils s'engagent à louer le bien pendant une certaine durée (de six ou neuf ans, éventuellement renouvelable pour atteindre la durée maximale de douze ans 64 ( * ) ), sous certaines conditions de ressources des locataires et de plafonds de loyers . L'avantage fiscal vise ainsi à favoriser la construction de logements intermédiaires .

Le taux de la réduction d'impôt s'élève désormais à 12 % du prix d'acquisition pour un engagement de location de six ans et 18 % pour une location de neuf ans 65 ( * ) . En outre-mer, les taux de réduction s'élèvent à 23 % pour une durée de six ans et 29 % pour neuf ans.

À l'issue de cette première période de location, le contribuable peut prolonger son engagement pour une durée total maximale de 12 ans , soit :

- pour une période de trois ans , renouvelable une fois , dans le cas où le premier engagement avait été de six ans. La réduction d'impôt s'élève alors à 6 % du prix de revient du bien pour les trois premières années (jusqu'à neuf ans) puis à 3 % pour les trois années suivantes (pour un total de douze ans) ;

- pour une unique période de trois ans , faisant suite à une première période de neuf ans, avec un taux de réduction d'impôt de 3 % .

L'article 5 de la loi de finances initiale pour 2015 a également ouvert la possibilité pour les particuliers bailleurs de louer leur bien à un ascendant ou à un descendant , dès lors que les conditions nécessaires pour être éligible à la réduction d'impôt sont remplies (nature du bien, durée de la location, plafonds de loyers et de ressources du locataire).

En vertu du même article, lorsque la réduction d'impôt est réalisée dans le cadre de souscriptions au capital des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI), elle s'effectue désormais sur 100 % du montant des souscriptions (et non plus sur 95 %).

Selon le tome II de l'annexe Voies et Moyens au projet de loi de finances pour 2016, la dépense fiscale résultant de cette réduction d'impôt équivaut à 20 millions d'euros en 2014, 85 millions d'euros en 2015 et 240 millions d'euros en 2016.

B. L'OBLIGATION PAR LA LOI DE MIXITÉ DES LOGEMENTS DANS UN IMMEUBLE COMPRENANT AU MOINS CINQ HABITATIONS

En vertu du IX de l'article 199 novovicies du code général des impôts, le bénéfice du dispositif « Duflot » devenu « Pinel » ne peut être accordée pour l'acquisition de tous les logements d'un même immeuble neuf dès lors que celui-ci en comporte au moins cinq .

Le pourcentage de logements qui ne peut ouvrir droit au bénéfice de la réduction d'impôt doit ainsi être fixé par décret, sans être toutefois inférieur à 20 % . Cette disposition ne s'applique pas lorsqu'une SCPI est propriétaire de l'ensemble de l'immeuble.

L'article 199 novovicies du code général des impôts prévoit que « le respect de cette limite [du nombre de logements ne pouvant ouvrir droit au bénéfice de la réduction d'impôt] s'apprécie à la date de la signature de l'acte authentique d'acquisition du dernier logement acquis ».

Le non-respect de cette obligation est sanctionné, pour la personne qui le commercialise, par une amende de 18 000 euros par logement qui excèderait la limitation du nombre de logements éligibles à la réduction d'impôt dans l'immeuble neuf concerné.

Le décret fixant le pourcentage de logements n'ouvrant pas droit au bénéfice de la réduction d'impôt doit également déterminer les conditions et les modalités d'application de ce dispositif, en particulier les modalités de recouvrement de l'amende.

L'article 199 novovicies du code général des impôts prévoit que l' obligation de mixité des logements dans un même ensemble doit s'appliquer aux immeubles faisant l'objet d'un permis de construire accordé à compter de la publication du décret. Toutefois, celui-ci n'a jamais été pris.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative de Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, et Christophe Caresche, député, avec l'avis favorable du Gouvernement, le présent article tend à abroger , à compter du 1 er janvier 2016, la condition selon laquelle, au sein d'un même immeuble neuf comportant au moins cinq logements, un pourcentage de logements d'au moins 20 % doit être acquis sans pouvoir ouvrir droit au bénéfice du dispositif d'incitation fiscale « Duflot » devenu « Pinel ».

À l'Assemblée nationale, cette suppression a été justifiée par l'absence de publication du décret permettant la mise en oeuvre dudit dispositif depuis le 1 er janvier 2013 .

Aucun chiffrage du coût de cette mesure n'a été indiqué par le Gouvernement dans son amendement à l'article d'équilibre tendant à tirer les conséquences des mesures adoptées par l'Assemblée nationale dans la première partie de la loi de finances pour 2016.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'absence de parution d'un décret d'application ne saurait, bien entendu, suffire à justifier la suppression d'une disposition législative . Dans le cadre du bilan annuel de l'application des lois au 31 mars 2015 66 ( * ) , la commission des finances avait déjà constaté que ce texte restait à prendre et que, bien que le ministère du logement ait auparavant indiqué que le décret était en cours de finalisation et devait paraître en 2014 67 ( * ) , sa publication n'était finalement plus si certaine.

Plusieurs explications peuvent être avancées pour expliquer l'absence de parution de ce décret.

Tout d'abord, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, il existe des difficultés techniques de mise en oeuvre du dispositif . Il serait, en particulier, difficile de contrôler la destination du bien acquis par les acheteurs au moment de la vente. Le promoteur verrait ainsi sa charge particulièrement alourdie et la procédure serait rendue plus complexe, avec des mentions supplémentaires à inscrire dans l'acte authentique d'achat.

Ensuite, il n'est pas certain que cette condition de mixité permette effectivement de répondre à l'objectif qui semble lui avoir été initialement assigné, à savoir d' assurer un équilibre dans l'immeuble entre différentes catégories d'occupants . En particulier, rien ne garantit la présence de propriétaires occupants.

Enfin, l'obligation introduite par le IX de l'article 199 novovicies du code général des impôts limite le nombre de logements susceptibles d'ouvrir droit au bénéfice du dispositif d'incitation fiscale « Pinel » . Or, le Gouvernement a, au contraire, souhaité renforcer le recours au dispositif d'incitation fiscale, dans le cadre de son plan de relance en faveur du logement annoncé à l'été 2014, en procédant, comme indiqué précédemment, à de nombreux aménagements dans la loi de finances initiale pour 2015.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, votre rapporteur général ne s'oppose pas à la suppression de cette condition qui n'a, en tout état de cause, jamais pu être mise en oeuvre , faute de parution du décret d'application.

Il semblerait que le dispositif « Pinel » permette effectivement de soutenir le marché de la construction de logements neufs puisque selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), celui-ci aurait ainsi connu une augmentation de 19,3 % au premier semestre 2015, avec une progression de 66,7 % des ventes aux investisseurs au second trimestre qui serait « tirée par l'adhésion au dispositif Pinel ». Lors de la commission élargie relative à l'examen de la mission « Égalité des territoires et logement », Sylvia Pinel a confirmé cette tendance, indiquant que cette réduction d'impôt aurait contribué à l'augmentation de 23 % des ventes de logements neufs au deuxième trimestre 2015 par rapport au deuxième trimestre 2014 68 ( * ) .

Face à ces résultats, votre rapporteur général ne peut que constater, une nouvelle fois, que ces dispositifs d'incitation fiscale semblent utiles pour déclencher des ventes auprès de particuliers - même si des effets d'aubaine existent pour certains investisseurs -, augmenter le nombre de logements intermédiaires disponibles dans les zones les plus tendues et stimuler un marché de la construction de logements qui reste, par ailleurs, exsangue 69 ( * ) .

Pour autant, il convient surtout de s'assurer que les constructions réalisées dans le cadre de ce dispositif répondent effectivement aux besoins des territoires concernés, tant en termes de localisation que de biens proposés .

En outre, l'effet conjoncturel du dispositif « Pinel » sur les chiffres de la construction neuve ne peut cacher les difficultés rencontrées plus globalement par le secteur , la Fédération française du bâtiment annonçant, en particulier, la perte de 44 600 emplois au premier semestre 2015 (par rapport au premier semestre 2014). La fiscalité particulièrement élevée qui s'applique au patrimoine immobilier des particuliers et, plus globalement, la baisse inéluctable des investissements des collectivités territoriales ne devraient pas non plus favoriser la reprise dans ce secteur fondamental pour notre économie.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 157 du code général des impôts) - Aménagement du régime d'imposition des plus-values mobilières

Commentaire : le présent article prévoit d'exonérer d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les plus-values de cession de titres, valeurs et droits considérés comme des biens professionnels au moment de leur cession.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RÉGIME D'IMPOSITION DES PLUS-VALUES MOBILIÈRES

Le régime d'imposition des plus-values mobilières a été refondu par l'article 17 de la loi n° 2013-1278 de finances pour 2014 .

Au titre de l'article 150-0 A du code général des impôts (CGI), les gains nets réalisés lors des cessions à titre onéreux d'actions, de parts, de droits ou de titres sont désormais soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu .

Toutefois, en application du deuxième alinéa du 1 de l'article 150-0 D du CGI, un abattement permet de réduire le taux effectif d'imposition . Son taux varie en fonction de la durée de détention :

- 50 % pour les titres détenus depuis deux ans et moins de huit ans ;

- 65 % pour les titres détenus depuis au moins huit ans.

Un abattement pour durée de détention renforcé est également prévu au 1 quater de l'article 150-0 D du CGI. L'abattement renforcé est applicable dans trois situations :

- lorsque la société dont les titres, droits ou actions sont cédés, est une petite ou moyenne entreprise (PME) créée depuis moins de dix ans à la date de souscription ;

- lorsque la cession est réalisée au profit de l'un des membres du groupe familial du cédant ;

- lorsque la société est une PME et que la cession est effectuée par les dirigeants lors de leur départ à la retraite (dans ce cas, les gains nets sont également réduits d'un abattement fixe de 500 000 euros).

Dans ces situations, le taux est de :

- 50 % pour les titres détenus depuis au moins un an et moins de quatre ans ;

- 65 % pour les titres détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans ;

- 85 % pour les titres détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession.

Il convient de préciser que ces abattements ne permettent pas de réduire la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue à l'article 223 sexies du CGI.

Par ailleurs, il n'est pas fait application de ces abattements pour diminuer l'assiette des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, dont le taux est de 15,5 %.

En application de l'article 154 quinquies du CGI, une fraction de la contribution sociale généralisé (CSG) est toutefois admise en déduction du revenu imposable, à hauteur de 5,1 points .

D'après les informations transmises par le Gouvernement, le produit fiscal de l'imposition des plus-values mobilières, droits sociaux et gains assimilés peut être estimé pour l'exercice 2014 à :

- 1,3 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu ;

- 1,2 milliard d'euros au titre des prélèvements sociaux.

B. UNE EXIT TAX POUR LIMITER LE PHÉNOMÈNE D'ÉVASION FISCALE

Pour limiter le phénomène d'exil fiscal, l'article 48 de la loi n° 2011-900 de finances rectificative pour 2011 a instauré une exit tax , qui permet d' imposer les plus-values latentes en cas de transfert du domicile fiscal hors de France.

Le 1 du I de l'article 167 bis du CGI précise néanmoins que l'assiette de l' exit tax est réduite aux plus-values latentes constatées sur les titres, valeurs et droits qui représentent au moins 50 % des bénéfices sociaux d'une entreprise ou dont la valeur globale excède 800 000 euros .

Par ailleurs, l'impôt est dégrevé d'office (ou restitué s'il avait fait l'objet d'un paiement immédiat) à l'expiration d'un délai de quinze ans suivant le transfert de domicile fiscal hors de France ou si le contribuable revient en France.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à exonérer d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les plus-values de cession de titres, valeurs mobilières et droits sociaux considérés comme des biens professionnels au moment de leur cession.

Aux termes de l'article 885 O bis du CGI, les parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés sont considérées comme des biens professionnels lorsque les trois conditions suivantes sont remplies :

- le propriétaire exerce une fonction de dirigeant au sein de l'entreprise ;

- cette fonction lui procure plus de la moitié de ses revenus professionnels ;

- il détient au moins 25 % des droits de vote attachés aux titres ou les titres représentent plus de 50 % de la valeur brute de ses biens imposables.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LE TAUX D'IMPOSITION GLOBAL DES PLUS-VALUES MOBILIÈRES RESTE FORTEMENT SUPÉRIEUR À CELUI APPLICABLE CHEZ CERTAINS DE NOS PLUS PROCHES VOISINS

En dépit de la mise en place en 2013 d'un système d'abattement pour durée de détention plus incitatif à la suite de la mobilisation dite des « pigeons », le taux d'imposition global applicable aux plus-values mobilières reste particulièrement élevé en France.

Taux global d'imposition des plus-values mobilières selon la durée de détention lorsque l'abattement renforcé n'est pas applicable

(en %)

Détention inférieure à 2 ans

Détention comprise entre 2 et 8 ans

Détention supérieure à 8 ans

Contribuable situé dans la tranche à 45 % de l'IR et redevable de la surtaxe de 4 %

62 %

39,5 %

32,8 %

Contribuable situé dans la tranche à 30 % de l'IR

44 %

29 %

24,5 %

Source : commission des finances du Sénat

Ce constat est également valable en cas d'application de l'abattement renforcé . Pour une contribuable situé dans la tranche à 45 % de l'impôt sur le revenu redevable de la surtaxe au taux de 4 %, le taux global d'imposition varie entre 23,8 % et 62 % selon la durée de détention.

Taux global d'imposition des plus-values mobilières selon la durée de détention lorsque l'abattement renforcé est applicable

(en %)

Détention inférieure à 1 an

Détention comprise entre 1 et 4 ans

Détention comprise entre 4 et 8 ans

Détention supérieure à 8 ans

Contribuable situé dans la tranche à 45 % de l'IR et redevable de la surtaxe

62 %

39,5 %

32,8 %

23,8 %

Contribuable situé dans la tranche à 30 % de l'IR

44 %

29 %

24,5 %

18,5 %

Note de lecture : l'abattement fixe prévu pour les dirigeants partant à la retraite n'est pas pris en compte.

Source : commission des finances du Sénat

En comparaison, nos principaux voisins ont des taux effectifs beaucoup plus faibles , sauf en cas de durée de détention particulièrement longue.

Taux d'imposition des plus-values mobilières

(en %)

Taux

Précision

Belgique

0 %

Sauf opérations à caractère « spéculatif ».

Luxembourg

0 %

Sauf si la participation est détenue depuis moins de six mois (les taux progressifs ordinaires s'appliquent) ou est supérieure à 10 % du capital de la société (taux maximum de 21,4 % et abattement de 50 000 euros).

Suisse

0 %

Exonération au niveau fédéral.

États-Unis

15 %

Au niveau fédéral, pour une durée de détention supérieure à un an. Taux de 20 % pour les contribuables dont le revenu imposable est supérieur à 406 750 dollars. Une imposition complémentaire de 3,8 % au titre de la Net investment income tax (NIIT), mise en place pour financer l' Affordable Care Act , est également applicable pour les contribuables dont le revenu brut ajusté est supérieur à 200 000 dollars.

Allemagne

26,4 %

Royaume-Uni

28 %

Taux de 18 % lorsque les plus-values sont inférieures à 32 010 livres.

Suède

30 %

Source : commission des finances du Sénat

Surtout, la France se situe dans une situation très défavorable par rapport à certains pays voisins comme la Belgique, qui n'impose pas les plus-values mobilières , sauf dans le cas très particulier où l'opération présente un caractère spéculatif.

Compte tenu de l'ampleur du différentiel de taux d'imposition, il apparaît que l' exit tax n'a pas permis de prévenir le départ des dirigeants d'entreprises français, et en particulier des créateurs d'entreprises.

B. L'INCAPACITÉ DE L'EXIT TAX À PRÉVENIR L'EXIL DES JEUNES CRÉATEURS D'ENTREPRISES FRANÇAIS REND NÉCESSAIRE LA MISE EN PLACE D'UN RÉGIME PLUS INCITATIF

Le nombre de redevables de l' exit tax et la valeur globale des titres concernés suggèrent l'existence d'un mouvement important d'exil fiscal que la mise en place de cette taxe n'a pas permis de contenir.

Évolution du nombre de redevables de l' exit tax et des plus-values afférentes

(en millions d'euros)

Année

Nombre de départs

Valeur des titres

Plus-values brutes

2011

194

2 321

1 947

2012

356

3 540

2 806

2013

437

2 798

2 294

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le Gouvernement)

Ce sont notamment les jeunes entrepreneurs qui sont amenés à quitter la France pour des pays où les plus-values mobilières ne sont pas ou peu taxées car :

- s'ils quittent la France suffisamment tôt, la taxation des plus-values latentes au titre de l'exit tax sera faible (société en phase d'amorçage) voire nulle (à l'expiration du délai de quinze ans hors de France) ;

- ils partent dans la perspective de créer de nouvelles entreprises après une première expérience en France (les plus-values afférentes seront totalement exonérées d'imposition).

Aussi, il apparaît opportun de mettre en place un régime particulièrement incitatif pour empêcher le départ des entrepreneurs français de notre territoire.

Dans cette perspective, le ciblage de l'exonération sur les plus-values de cession de titres, valeurs mobilières et droits sociaux considérés comme des biens professionnels permet de répondre à cet objectif tout en limitant à la fois les effets d'aubaine et le coût du dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 150-0 D du code général des impôts) - Non-application de l'abattement pour durée de détention aux moins-values mobilières

Commentaire : le présent article vise à préciser que l'abattement pour durée de détention ne s'applique pas aux moins-values de cession de valeurs mobilières.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'IMPOSITION DES PLUS-VALUES DE CESSIONS MOBILIÈRES

Depuis le 1 er janvier 2013, les plus-values de cession de titres sont soumises au barème de l'impôt sur le revenu. Avant cette réforme introduite par la loi de finances pour 2013, elles étaient soumises à un prélèvement forfaitaire de 24 % auquel s'ajoutaient les prélèvements sociaux de 15,5 %.

Le passage au barème progressif de l'impôt sur le revenu s'est accompagné de la mise en place d'un mécanisme d'abattement afin de prendre en compte la durée de détention des titres cédés.

La loi de finances pour 2014 a modifié ce mécanisme, désormais constitué de deux dispositifs applicables rétroactivement aux cessions intervenues depuis le 1 er janvier 2013 70 ( * ) : un dispositif de droit commun (1 ter de l'article 150-0 D du CGI) et un dispositif particulier soumis à conditions dit abattement « renforcé » (1 quater de l'article 150-0 D du CGI).

Les prélèvements sociaux restent, quant à eux, calculés sur la plus-value avant abattement.

Les moins-values s'imputent sur les éventuelles plus-values de même nature constatées la même année. Si une perte nette est constatée une année donnée, celle-ci est reportable sur les dix années suivantes.

L'abattement de droit commun s'établit à :

- 50 % du montant des gains nets lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins deux ans et moins de huit ans à la date de la cession ou de la distribution ;

- et de 65 % du montant des gains nets lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession ou de la distribution.

Un abattement renforcée est applicable aux gains de cessions nets de titres de petites et moyennes entreprises (PME) de moins de dix ans, aux gains de cession de titres à l'intérieur d'un groupe familial et aux gains de cession de titres de PME réalisés par les dirigeants lors de leur départ en retraite.

Son taux est de :

- 50 % lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins un an et moins de quatre ans à la date de la cession ;

- 65 % lorsqu'ils sont détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans à la date de la cession ;

- 85 % lorsqu'ils sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession.

Les gains de cession de titres de PME réalisés par un dirigeant lors de son départ à la retraite sont au préalable réduits d'un abattement fixe de 500 000 euros (article 150-0 D ter du CGI), l'abattement renforcé s'appliquant au surplus.

B. LA DOCTRINE FISCALE

L'administration fiscale a souhaité respecter une symétrie dans le traitement des plus-values et moins-values et a ainsi considéré que l'abattement pour durée de détention et l'abattement fixe propre aux dirigeants partant à la retraite, qui s'appliquent aux « gains nets », concernait aussi bien les plus-values que les moins-values.

Cette interprétation a, dans un premier temps, été formulée dans la notice 2074-NOT accompagnant la déclaration de plus et moins-values de cession de valeurs mobilières, qui indique désormais que « depuis le 1 er janvier 2013, les plus et moins-values réalisées lors de certaines opérations imposables sont diminuées pour leur prise en compte à l'impôt sur le revenu d'un abattement pour durée de détention dont le montant est fonction de la durée de détention des titres cédés » et, de manière redondante, que « cet abattement s'applique tant aux plus-values qu'aux moins-values ».

Elle a ensuite été confirmée lors de la mise à jour du 14 octobre 2014 de la section BOI-RPPM-PVBMI du bulletin officiel des finances publiques-impôts (BOFIP-Impôts) qui affirme que « l'abattement s'applique aux gains nets (plus-values et moins-values) de cession à titre onéreux réalisés à compter du 1 er janvier 2013 » ou encore que « le montant de la moins-value imputable ou le cas échéant reportable est le montant de la moins-value constatée réduit des abattements prévus au 1 de l'article 150-0 D du CGI et à l'article 150-0 D ter du CGI ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à préciser que l'abattement pour durée de détention prévu au 1 du D de l'article 150-0 D du CGI ne s'applique pas aux moins-values.

Compte tenu de sa visée interprétative, il est prévu que cette précision concerne les moins-values réalisées à compter du 1 er janvier 2013.

III.  LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'interprétation de l'administration fiscale contredit à la fois le sens commun, la lettre de la loi, l'intention du législateur et l'objet de l'abattement.

Elle contredit le sens commun car elle considère que le « gain » mentionné par les articles 150-0 D et 150-0 D ter du CGI et auquel s'applique l'abattement peut en fait être une perte. À la connaissance de votre rapporteur général, aucun dictionnaire ne donne une définition du terme « gain » qui permette cette assimilation, le terme « perte » étant au contraire désigné comme l'antonyme de « gain ».

Quand bien même admettrait-on une définition proprement fiscale du gain, la doctrine fiscale n'en contredirait pas moins la lettre de la loi.

L'administration fiscale s'appuie en effet sur la définition des « gains nets » donnée par l'article 150-0 D du code général des impôts. Les gains nets étant constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits et leur prix effectif d'acquisition 71 ( * ) , ils pourraient, selon l'administration fiscale, être positifs comme négatifs. Pourtant, les « gains nets » dont l'article 150-0 D du CGI donne la définition sont ceux « mentionnés au I de l'article 150-0 A » du même code.

Or le I de cet article dispose que les « gains nets » retirés de cessions de valeurs mobilières sont « soumis à l'impôt sur le revenu » et il est incontestable que l'article 150-0 A ne soumet pas les moins-values de cession à l'impôt sur le revenu, mais seulement les plus-values.

Dès lors la définition que l'article 150-0 D donne des gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A est celle des plus-values de cession, seules concernées par l'abattement pour durée de détention.

La doctrine fiscale contrevient clairement à l'intention du législateur qui, d'après les travaux parlementaires, n'a, à aucun moment, envisagé que l'abattement puisse s'appliquer aux moins-values mais a toujours considéré que l'abattement visait les plus-values.

Par exemple, dans le rapport de Christian Eckert, alors rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, sur le projet de loi de finances pour 2014 72 ( * ) , il n'est fait nulle part référence aux moins-values et la réforme est présentée comme procédant à un « allègement de l'imposition des plus-values mobilières par l'introduction de deux abattements pour durée de détention ».

Enfin, l'interprétation de l'administration fiscale contrevient à l'objet même de l'abattement qui visait à « réduire fortement les risques pris par les investisseurs », selon les termes du rapport précité, et à encourager les épargnants à investir à long terme au capital d'entreprises. En effet, elle incite, au contraire, les contribuables qui subissent une moins-value latente sur des titres à vendre rapidement ceux-ci ou, au mieux, à mettre en place des stratégies d'évitement consistant à purger régulièrement la moins-value (vente-rachat) qui reste déductible pendant dix ans.

Si l'objectif est bien de compenser une partie du risque pris par l'investisseur et d'encourager une détention de long terme, c'est au contraire un abattement décroissant avec la durée de détention qu'il faudrait envisager.

À cet égard, on signalera que la doctrine fiscale fragilise la constitutionnalité du dispositif.

En effet, pour déclarer, dans sa décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012 sur la loi de finances pour 2013, que la soumission des plus-values mobilières au barème progressif de l'impôt sur le revenu était conforme à la Constitution, le Conseil constitutionnel a pris en considération le fait qu'était instauré « un abattement progressif sur le montant des gains nets de cession de valeurs mobilières soumis au barème de l'impôt sur le revenu selon la durée de détention des valeurs mobilières à la date de leur cession », que cet abattement pouvait « atteindre 40 % du montant des gains nets de cession » et que, « l'augmentation de l'imposition » qui résulte du passage au barème progressif s'en trouvait réduite « dans des proportions importantes ». Il en a déduit qu' « en augmentant l'imposition pesant sur les plus-values de cession de valeurs mobilières tout en prenant en compte la durée de détention de ces valeurs mobilières pour diminuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, le législateur n'a pas instauré des modalités d'imposition qui méconnaîtraient les capacités contributives des contribuables ».

Or l'interprétation de l'administration fiscale affaiblit le caractère modérateur de l'abattement et remet donc en cause l'équilibre sur lequel le Conseil constitutionnel a fondé son appréciation.

Dans certains cas, la « méconnaissance des capacités contributives des contribuables » peut aller jusqu'à leur imposer le versement d'un impôt alors qu'ils ont subi une perte nette .

Un contribuable possède un portefeuille constitué de titres X, détenus depuis moins de deux ans, et de titres Y, détenus depuis plus de huit ans. Pour faire face à des besoins liquidités, il vend l'intégralité de son portefeuille. Sur les titres X, il réalise une plus-value de 8 000 euros et ne bénéficie pas de l'abattement. Sur les titres Y, il réalise une moins-value de 10 000 euros.

Le contribuable a donc perdu 2 000 euros. En application de la doctrine fiscale actuelle, il sera pourtant imposé sur 4 500 euros 73 ( * ) .

Il faut également souligner qu'en maintenant sa position, malgré une forte contestation, l'administration fiscale crée un risque pour l'État sous la forme d'une accumulation de contentieux pouvant conduire à restitution. Plusieurs recours ont d'ailleurs été formés, qui n'ont pas encore trouvé leur conclusion. En revanche, le Conseil d'État a rendu, le 4 février dernier, une décision fragilisant le principe de symétrie de traitement entre plus-values et moins-values par laquelle il donne raison à un contribuable en considérant que l'exonération des plus-values réalisées dans un cadre intrafamilial n'empêchait pas que d'éventuelles moins-values réalisées dans le même cadre ne puissent s'imputer, dans leur intégralité, sur des plus-values de même nature réalisées au cours de la même année.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 163 bis G du code général des impôts) - Élargissement du dispositif d'attribution des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE)

Commentaire : le présent article prévoit d'étendre le dispositif des BSPCE aux sociétés non cotées ou de petite capitalisation boursière de plus de quinze ans.

Prévu à l'article 163 bis G du code général des impôts (CGI), le dispositif des BSPCE, mis en place par l'article 76 de la loi de finances pour 1998, constitue un mode de rémunération analogue aux options sur titres en ce qu'il permet aux entreprises éligibles d'intéresser salariés et dirigeants à leur capital.

D'après le tome II du rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016, le coût du dispositif devrait s'établir à 10 millions d'euros en 2015 et 2016 .

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN RÉGIME D'IMPOSITION FAVORABLE

L'attribution de BSPCE ouvre le droit de souscrire des titres représentatifs du capital de l'entreprise à un prix fixe . L'ampleur du gain réalisé lors de la cession dépend de l'évolution de la valeur des titres depuis la date d'attribution des BSPCE.

Si les BSPCE constituent des titres proches des options sur titre, ils bénéficient d'un traitement fiscal plus favorable.

En effet, le gain net réalisé lors de la cession est soumis à l'impôt sur le revenu au taux proportionnel de 19 % . Lorsque le bénéficiaire exerce son activité au sein de la société depuis moins de trois ans à la date de la cession, le taux est toutefois porté à 30 %. Par ailleurs, l'application de l'abattement pour durée de détention prévu à l'article 150-0 A du CGI a été explicitement écartée par l'article 17 de la loi de finances rectificative pour 2014.

S'agissant des prélèvements sociaux, le gain net est soumis aux taux de 15,5 % applicable aux revenus du patrimoine.

À titre de comparaison, la plus-value d'acquisition réalisée lors de la levée de stock-options est désormais imposée dans la catégorie des traitements et salaires, conformément au I de l'article 80 bis du CGI. En complément, le gain d'acquisition est également soumis :

- aux prélèvements sociaux sur les revenus d'activité, au taux de 8 % (article L. 136-2 du code de la sécurité sociale) ;

- à une contribution salariale spécifique, dont le taux est de 10 % (article L. 137-14 du code de la sécurité sociale) ;

- à une contribution patronale spécifique, dont le taux est de 30 % (article L. 137-13 du code de la sécurité sociale).

B. UN DISPOSITIF CIBLÉ SUR LES PETITES ENTREPRISES DE MOINS DE QUINZE ANS

Aux termes du II de l'article 163 bis G du CGI, pour pouvoir attribuer des BSPCE, une société doit en principe remplir les six conditions suivantes :

- être une société par actions ;

- avoir moins de quinze ans ;

- être une société non cotée ou de petite capitalisation boursière (jusqu'à 150 millions d'euros) ;

- être détenue directement et de manière continue pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes directement détenues pour 75 % au moins de leur capital par des personnes physique ;

- être passible en France de l'impôt sur les sociétés ;

- ne pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes.

Ces conditions ont été récemment assouplies par l'article 141 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Désormais, toute société créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes peut attribuer des BSPCE si toutes les sociétés prenant part à l'opération répondent aux cinq premières conditions relatives aux entreprises précédemment décrites. Par ailleurs, les sociétés émettrices peuvent dorénavant attribuer des BSPCE aux salariés et aux dirigeants de leurs filiales.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'élargir le dispositif des BSPCE à l'ensemble des sociétés non cotées ou de petite capitalisation boursière, quelle que soit leur ancienneté.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article s'inscrit dans la continuité des assouplissements apportés par la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des changes économiques aux dispositifs permettant d'intéresser au capital les salariés et dirigeants qui prennent le risque de renoncer à la stabilité et à la rémunération offertes par les grandes entreprises pour participer au développement d'une société de taille plus modeste.

S'agissant du dispositif des BSPCE, la condition d'âge actuellement prévue ne semble pas adaptée à la réalité du tissu entrepreneurial français . Par exemple, une entreprise ancienne de taille modeste qui a fait l'objet d'une reprise en vue d'intégrer un nouveau marché géographique ou de produits est dans l'impossibilité d'attribuer des BSPCE afin d'attirer les employés et dirigeants qu'elle ne peut encore rémunérer à leur juste valeur sous forme de salaire.

Le caractère restrictif de la condition d'âge est d'autant plus marqué que la maturité s'apprécie à compter de la date d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés - et non, par exemple, à compter de la première vente commerciale - et ne comporte aucune exception.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 787 B du code général des impôts) - Assouplissement des conditions d'application du dispositif « Dutreil » en présence de sociétés interposées

Commentaire : le présent article prévoit de supprimer l'obligation de conserver les participations inchangées à chaque niveau d'interposition pendant la phase d'engagement collectif du dispositif « Dutreil ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. UNE EXONÉRATION PARTIELLE DE DROITS DE MUTATION À TITRE ONÉREUX, EN CONTREPARTIE D'UNE STABILISATION DE L'ACTIONNARIAT

Au titre de l'article 787 B du code général des impôts (CGI), les transmissions de parts ou actions de sociétés ayant fait l'objet d'un pacte « Dutreil » sont exonérées de droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 75 % de leur valeur.

D'après le tome II du rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016, le coût du dispositif devrait s'établir à 500 millions d'euros en 2015 et 2016 .

Seules les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale peuvent bénéficier de cette exonération partielle.

Par ailleurs, dans un objectif de stabilisation de l'actionnariat, l'exonération est subordonnée au respect de trois conditions :

- un engagement collectif de conservation de deux ans minimum ;

- un engagement individuel de conservation de quatre ans à compter de l'expiration de l'engagement collectif ;

- l'exercice d'une fonction de direction par l'un des signataires durant la phase d'engagement collectif et pendant 3 ans à compter de la transmission.

L'engagement collectif, d'une durée qui ne peut être inférieure à 2 ans, doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par une société cotée ou, pour les sociétés non cotées, sur au moins 34 % des parts ou actions de la société .

Le bénéfice de l'exonération est cumulable avec la réduction de droits de mutation de 50 % prévue à l'article 790 du CGI, si donateur est âgé de moins de 70 ans.

B. LE CAS DES SOCIÉTÉS INTERPOSÉES

Il est précisé au b de l'article 787 B que l'exonération partielle est applicable en présence d'un simple niveau d'interposition (aux titres d'une société qui possède directement des parts ou actions faisant l'objet d'un engagement de conservation) ou d'un double niveau d'interposition (aux titres d'une société qui possède une participation dans une société qui a souscrit un engagement de conservation).

Toutefois, le bénéfice de l'exonération est subordonné à la condition que les participations demeurent inchangées à chaque niveau d'interposition pendant toute la durée de l'engagement collectif , sauf en cas d'augmentation de la participation détenue par les sociétés interposées.

Ainsi, toute cession de titres entraîne la remise en cause de l'exonération partielle , sauf en cas de fusion entre sociétés interposées (les titres obtenus en contrepartie restent toutefois soumis à l'engagement) ou en cas de cession ou de donation entre signataires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose de supprimer l'obligation de conserver les participations inchangées à chaque niveau d'interposition pendant la phase d'engagement collectif du pacte « Dutreil ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'obligation de conserver les participations inchangées à chaque niveau d'interposition impose que chaque associé personne morale ou personne physique de la chaîne des participations conserve l'ensemble de ses titres pendant la phase d'engagement collectif.

Cette condition inutilement restrictive , source de contentieux , a pour effet pervers de retarder la réorganisation des sociétés.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 787 B du code général des impôts) - Application de l'engagement réputé acquis aux sociétés interposées

Commentaire : le présent article vise à permettre, dans le cadre du dispositif « Dutreil », l'application de l'engagement collectif réputé acquis à certaines situations d'interposition.

I. LE DROIT EXISTANT

Le régime général du pacte « Dutreil » est présenté dans le commentaire de l'article additionnel après l'article 2 quinquies relatif à l'assouplissement des conditions d'application du dispositif « Dutreil » en présence de sociétés interposées.

Il convient toutefois de préciser que le b de l'article 787 B du code général des impôts prévoit que « l'engagement collectif de conservation est réputé acquis lorsque les parts ou actions détenues depuis deux ans au moins par une personne physique seule ou avec son conjoint ou le partenaire avec lequel elle est liée par un pacte civil de solidarité » respectent les conditions de cet engagement, « sous réserve que cette personne ou son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité exerce depuis plus de deux ans au moins dans la société concernée son activité professionnelle principale » ou l'une des fonctions permettant l'application du régime des biens professionnels 74 ( * ) (article 885 O bis du même code).

Cette disposition permet ainsi de procéder directement à une donation de titres, sans engagement collectif de conservation préalable, celui-ci étant réputé acquis.

Toutefois, l'engagement collectif de conservation des titres transmis ne peut être réputé acquis cas de détention indirecte des titres, via une société interposée, par le donateur ou le défunt .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à modifier le b de l'article 787 B du code général des impôts de manière à étendre la possibilité de considérer que l'engagement est réputé acquis dans l'hypothèse où les titres sont détenus par une société interposée . Pour cela, les conditions suivantes, adaptées de celles applicables lorsque les titres sont détenus de manière directe, devraient être réunies :

- le redevable détient depuis deux ans au moins, seul ou avec son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, les titres de la société qui possède une participation dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, ou les titres de la société qui possède les titres de la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement de conservation ;

- les parts ou actions de la société qui peuvent être soumises à un engagement collectif, sont détenues par la société interposée, depuis deux ans au moins, et atteignent les seuils prévus au premier alinéa du b de l'article 787 B du code général des impôts ;

- le redevable ou son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité exerce depuis plus de deux ans au moins, dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, son activité professionnelle principale ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis lorsque la société est soumise à l'impôt sur les sociétés.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article reprend une mesure adoptée par le Sénat lors de l'examen de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Il permet de mettre fin à une différence de traitement injustifiée entre détention directe et indirecte, qui empêche l'application du dispositif « Dutreil » à certaines transmissions d'entreprises.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 quinquies (Art. 787 B du code général des impôts) - Applicabilité du pacte « Dutreil » en cas d'apport de titres

Commentaire : le présent article vise à permettre les opérations d'apport de titres dans le cadre d'un pacte « Dutreil » durant la période d'engagement collectif.

I. LE DROIT EXISTANT

Le régime général du pacte « Dutreil » est présenté dans le commentaire de l'article additionnel après l'article 2 quinquies relatif à l'assouplissement des conditions d'application du dispositif « Dutreil » en présence de sociétés interposées.

Il convient toutefois de préciser que le f de l'article 787 B du code général des impôts permet à l'héritier ou au donataire d'apporter, sans remise en cause de l'exonération, les titres qui sont soumis à un engagement individuel de conservation à une société holding avec prise en charge par cette dernière du montant de l'emprunt souscrit pour financer la soulte qu'il doit verser aux autres héritiers ou donataires à l'issue du partage. Les conditions suivantes doivent toutefois être réunies :

- « la société bénéficiaire de l'apport est détenue en totalité par les personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Le donateur peut toutefois détenir une participation directe dans le capital social de cette société, sans que cette participation puisse être majoritaire. Elle est dirigée directement par une ou plusieurs des personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Les conditions tenant à la composition de l'actif de la société, à la détention de son capital et à sa direction doivent être respectées à l'issue de l'opération d'apport et jusqu'au terme de l'engagement » individuel ;

- « la société bénéficiaire de l'apport prend l'engagement de conserver les titres apportés jusqu'au terme de l'engagement » individuel ;

- les héritiers, donataires ou légataires, associés de la société bénéficiaire des apports doivent conserver, pendant la durée de l'engagement individuel, les titres reçus en contrepartie de l'opération d'apport.

Le Bulletin officiel des finances publiques indique cependant que, pendant l'engagement collectif de conservation, les héritiers, donataires ou légataires qui souhaitent bénéficier de l'exonération partielle ne peuvent effectuer de cession ou de donation au profit d'autres signataires de l'engagement collectif car cela aurait pour conséquence de rendre impossible le respect de la condition relative à l'engagement individuel de conservation des titres transmis 75 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à étendre à la période d'engagement collectif de conservation la possibilité ouverte par le f de l'article 787 B du code général des impôts d'apporter des titres à une holding.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article reprend une mesure adoptée par le Sénat lors de l'examen de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Son objet est notamment de faciliter la transmission d'entreprises familiales. Celle-ci peut utilement être réalisée dans le cadre d'un rachat familial avec effet de levier qui permet de confier l'entreprise à un enfant repreneur sans pour autant remettre en cause l'égalité successorale avec ses frères et soeurs, qui touche en effet une soulte en compensation. Or, pour financer cette soulte, le donataire est souvent amené à constituer une société qui détiendra à la fois les titres reçus et la dette de soulte.

C'est justement ce que ne permet pas la doctrine fiscale durant la période d'engagement collectif, ce qui peut conduire à un règlement différé de la soulte et donc à une éventuelle réévaluation de son montant. L'opération de transmission s'en trouve fragilisée.

L'aménagement proposé permet donc de lever un obstacle aux transmissions d'entreprises familiales, sans pour autant affaiblir la phase d'engagement individuel prévue par le dispositif Dutreil, qui demeure.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 2 sexies (nouveau) - Rapport au Parlement sur les créances fiscales et les procédures de surendettement des particuliers

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1 er juin 2016, un rapport sur les créances fiscales et les procédures de surendettement des particuliers.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 35 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine a modifié les articles L. 331-7 et L. 331-7-1 du code de la consommation afin d' aligner le régime des dettes fiscales ou parafiscales sur celui des autres dettes en matière de procédure de surendettement des particulier . Ainsi, en application de ces dispositions, les dettes d'impôt sur le revenu d'un particulier peuvent faire l'objet d'un rééchelonnement ou d'un effacement décidé par la commission départementale de surendettement dans les mêmes conditions que les autres dettes.

Si de nombreuses modifications sont intervenues depuis lors dans la procédure de surendettement, en particulier à l'occasion de la loi n° 2010-737 du 1 er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite loi « Lagarde », ainsi que la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite loi « Hamon », ce principe d'indifférenciation des dettes fiscales dans le cadre des procédures de surendettement n'a pas été remis en cause.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Monique Rabin avec avis favorable de la commission des finances et après que le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée, a pour objet de prévoir que le Gouvernement remet un rapport au Parlement avant le 1 er juin 2016 sur « les créances fiscales et les procédures de surendettement des particuliers » .

Ce rapport aura pour objet de dresser un bilan de « l'application du droit de la consommation aux dettes dont les services fiscaux ont la charge » ainsi que les « évolutions institutionnelles et juridiques susceptibles de garantir équitablement la sauvegarde des deniers publics, tout en la conciliant avec la nécessité concrète de prévenir et traiter le surendettement des particuliers débiteurs des collectivités publiques ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Dans son rapport public thématique de 2013 sur la lutte contre le surendettement des particuliers, la Cour des comptes a chiffré à 128 millions d'euros en 2012 le montant total des créances fiscales et sociales effacées dans le cadre du surendettement des particuliers 76 ( * ) , soit environ 10 % du total des créances publiques et privées effacées. Comme l'a souligné Christian Eckert lors de l'examen de l'amendement par l'Assemblée nationale, ce rapport ne signale pas de difficultés particulières concernant l'application aux créances fiscales de la procédure de surendettement.

Il convient de souligner que le présent article, qui n'a aucun impact sur le solde du budget de l'État en 2016, aurait dû trouver sa place en deuxième partie de la loi de finances.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 sexies (Art. 50-0, 53A et 302 septies A du code général des impôts) - Instauration d'un abattement de 5 000 euros
sur les revenus de l'économie collaborative

Commentaire : le présent article vise à instaurer un abattement fiscal de 5 000 euros sur les revenus bruts tirés par les particuliers de leurs activités sur les plateformes en ligne, sous réserve d'une déclaration automatique de ces revenus par les plateformes.

I. LE DROIT EXISTANT

A. EN THÉORIE, LES REVENUS TIRÉS DE L'ÉCONOMIE COLLABORATIVE SONT IMPOSABLES DANS LES CONDITIONS DE DROIT COMMUN

L'économie collaborative permet à des particuliers de se vendre ou de se louer entre eux des biens (une voiture sur Drivy , un logement sur Airbnb , une perceuse sur Zilok etc.) ou des services (transport avec Uber , covoiturage avec Blablacar , cuisine avec Monvoisincuisine , bricolage avec Stootie etc.), par l'intermédiaire de plateformes Internet de mise en relation .

Avec plusieurs millions d'adeptes en France seulement, l'économie collaborative connaît une croissance très rapide et a aujourd'hui dépassé le simple phénomène de société. Par exemple, le revenu annuel moyen d'un conducteur UberPop (avant la suspension du service) était de 8 200 euros par an, et celui d'un hôte Airbnb de 3 600 euros par an. Certains jours, près d'un million de nouvelles annonces sont postées sur le site de petites annonces Leboncoin .

Cette nouvelle réalité économique n'est pas apparue dans un vide juridique - qu'il s'agisse de fiscalité ou de réglementations sectorielles. En principe, les revenus que les particuliers tirent de l'économie collaborative

sont en effet imposables dans les conditions de droit commun , c'est-à-dire dès le premier euro, dès lors qu'ils proviennent d'activités exercées à titre habituel 77 ( * ) .

Ces revenus relèvent, pour l'essentiel, de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) définis à l'article 34 du code général des impôts 78 ( * ) comme « les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale ». Ces revenus sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu (IR) . Il existe plusieurs régimes d'imposition des BIC, dont le champ d'application est lié au chiffre d'affaires réalisé (cf. encadré). Toutefois, compte tenu des montants en jeu, l'immense majorité des particuliers tirant un revenu de l'économie collaborative relèvent du régime des « micro-BIC ».

Les trois régimes d'imposition
des bénéfices industriels et commerciaux

1. Le régime de la micro-entreprise, ou « micro-BIC ».

Ce régime, défini à l'article 50-0 du code général des impôts, est réservé aux entreprises (et notamment aux auto-entreprises) dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes n'excède pas 82 200 euros pour les activités de commerce et de fourniture de logement, et 32 900 euros pour les prestations de service 79 ( * ) .

Le bénéfice imposable est déterminé de manière forfaitaire, par l'application d'un abattement égal à 71 % du CA pour les activités d'achat-revente ou de fourniture de logement, ou 50 % du CA pour les autres activités relevant des BIC. En compensation, il est impossible de déduire les charges et d'amortir les investissements. Il est également possible d'opter pour un versement libératoire social et fiscal 80 ( * ) , qui permet de régler en une seule fois l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, au taux 14,3 % pour les ventes de marchandises et de 24,6 % pour les prestations de services. Enfin, les contribuables relevant du régime « micro » peuvent opter pour le régime réel (simplifié ou normal).

2. Le régime réel simplifié.

Ce régime, défini à l'article 302 septies A bis du code général des impôts, est applicable aux contribuables dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes n'excède pas 783 000 euros pour les activités de commerce et de fourniture de logement, et 236 000 euros pour les prestations de service et les professions libérales. Le bénéfice imposable est déterminé dans les conditions de droit commun , c'est-à-dire qu'il s'agit d'un bénéfice net égal à la différence entre les produits perçus et les charges supportées, mais les contribuables bénéficient d' allègements de leurs obligations déclaratives et comptables.

3. Le régime réel normal.

Ce régime, défini à l'article 53 A du code général des impôts, s'applique obligatoirement aux entreprises dépassant les seuils ci-dessus, et sur option aux entreprises qui ne dépassent pas ces seuils. Le bénéfice imposable est déterminé dans les conditions de droit commun, et les contribuables doivent tenir une comptabilité complète et régulière .

Source : commission des finances

Par ailleurs, certains revenus réalisés par l'intermédiaire d'une plateforme de mise en relation sont susceptibles d'être exonérés , en application de certains régimes spécifiques. On citera notamment :

- les ventes d'occasion par un particulier , dès lors que celles-ci n'ont pas un caractère régulier. Revendre ses vêtements, sa télévision ou sa voiture sur Leboncoin ou sur eBay n'entraîne donc pas d'obligation déclarative ni d'impôt supplémentaires ;

- la mise en location d'une chambre chez l'habitant, dans la résidence principale du particulier , qui est par exemple à la base du business model du site Homestay ;

- le covoiturage : le conducteur n'est pas imposable et n'est soumis à aucune obligation déclarative dès lors qu'il se limite à réaliser une économie sur ses frais de déplacement ; cette exonération se justifie à la fois par une volonté de simplification et une préoccupation écologique.

B. EN PRATIQUE, LE SYSTÈME FISCAL EST INADAPTÉ À L'ÉCONOMIE COLLABORATIVE, ET L'IMPÔT EST RAREMENT PAYÉ

La réalité est toutefois très éloignée des règles théoriques exposées ci-dessus : en pratique, les revenus tirés de l'économie collaborative sont rarement déclarés, rarement contrôlés, et in fine rarement imposés , comme l'a montré le rapport du groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique, intitulé « L'économie collaborative : propositions pour une fiscalité simple, juste et efficace » et publié le 17 septembre 2015 81 ( * ) .

Souvent, les particuliers cherchent seulement à « arrondir leurs fins de mois » par un complément de revenu modeste , comme cela se pratique d'ailleurs depuis longtemps dans le monde « physique » - mais cette fois avec un changement d'échelle qui modifie la nature du problème. Les utilisateurs des plateformes collaboratives n'ont d'ailleurs pas toujours connaissance de leurs obligations fiscales, ce que renforcent deux carences du système actuel :

- d'une part, il n'existe à ce jour aucun seuil à partir duquel une activité doit être regardée comme commerciale , et donc imposable, que ce soit dans la loi, dans la doctrine administrative ou dans la jurisprudence. Or le fait que des millions d'utilisateurs gagnent désormais un revenu d'appoint de manière « standardisée », via une plateforme, rend nécessaire d'aller au-delà de l'approche au « cas par cas » qui prévaut actuellement et de clarifier les choses. Certaines plateformes ont d'ailleurs mis en place des seuils « officieux » pour repérer les « professionnels », mais ces seuils n'ont aucune base légale et n'offrent donc guère de sécurité juridique aux contribuables ;

- d'autre part, il n'existe aucun moyen simple pour un particulier de déclarer ses revenus tirés de l'économie collaborative , par exemple via un système de déclaration automatique ou de déclaration pré-remplie à l'impôt sur le revenu.

En outre, au-delà des particuliers de bonne foi, on trouve aussi sur les plateformes de nombreux « faux particuliers », qui exercent en fait une véritable activité commerciale avec un chiffre d'affaires important, et s'exonèrent délibérément de leurs obligations fiscales. Certaines plateformes apparaissent particulièrement complaisantes à leur égard.

Face à cette réalité économique nouvelle, l'administration fiscale apparaît bien démunie : ses moyens, limités, reposent sur le contrôle fiscal a posteriori et n'ont de sens que lorsqu'il s'agit de cibler un petit nombre de contribuables, bien identifiés et présentant chacun un enjeu significatif. Or l'économie collaborative se caractérise par une multitude de contribuables au statut peu défini, et présentant chacun un enjeu financier modeste - mais collectivement très important . La tâche est de surcroît compliquée par les traits propres à l'économie numérique : utilisation de pseudonymes, présence sur de multiples plateformes etc.

Plus particulièrement, le « droit de communication », qui permet en principe à l'administration d'obtenir les informations nécessaires auprès des plateformes et des sites de paiement (régularité des transactions, nature de l'activité, montant des revenus, localisation etc.), souffre d'une faiblesse majeure : il n'a pas de portée extraterritoriale , et s'expose donc à une fin de non-recevoir de la part des plateformes situées à l'étranger - ce qui est très souvent le cas.

Cette inadaptation du système fiscal aux enjeux de l'économie collaborative est problématique :

- pour l'État, elle aboutit à une perte de recettes fiscales , certes impossible à chiffrer mais nécessairement en forte hausse, et sans commune mesure avec les « fuites » liées aux échanges non-déclarés entre particuliers dans le monde « physique » (petites annonces traditionnelles etc.) ;

- pour les particuliers, elle est source d'insécurité juridique , y compris lorsque ceux-ci sont de bonne foi et n'entendent pas se livrer à la fraude. Les plateformes souffrent elles aussi de cette insécurité juridique, dans la mesure où elle fragilise leur business model ;

- pour les entreprises traditionnelles, elle constitue une concurrence déloyale lorsque, dans certains secteurs, de « faux particuliers » exerçant les mêmes activités échappent à leurs obligations fiscales.

Compte tenu de ces problèmes, le groupe de travail déplore que l'administration et les décideurs politiques tardent à se mobiliser sur le sujet , bien qu'une prise de conscience soit actuellement à l'oeuvre.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Afin d'adapter le cadre fiscal au développement de l'économie du partage, le présent article vise à instaurer une franchise de 5 000 euros sur les revenus bruts tirés par les particuliers de leurs activités sur les plateformes en ligne .

Plus précisément, le dispositif proposé consiste en un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur les revenus bruts perçus par les redevables de l'impôt sur le revenu et relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), soumis à l'impôt sur le revenu. Dans la mesure où cet abattement forfaitaire tient notamment lieu de charges, celui-ci ne peut pas se cumuler avec la déduction des charges - qu'elle soit forfaitaire ou au réel . Il s'agit donc d'un « abattement alternatif », dont les modalités de calcul diffèrent selon le régime applicable aux BIC :

- lorsque le bénéfice imposable est déterminé en application du régime du micro-BIC , c'est-à-dire avec un abattement forfaitaire de 71 % ou 50 % sur le chiffre d'affaires hors taxes, il est proposé que cet abattement ne puisse pas être inférieur à 5 000 euros ;

- lorsque le bénéfice imposable est déterminé en application du régime réel ou réel simplifié , c'est-à-dire avec déductibilité des charges réelles, il est proposé que le chiffre d'affaires hors taxe soit diminué d'un abattement de 5 000 euros, et que seule la fraction des charges déductible le cas échéant supérieure à 5 000 euros puisse être déduite.

Le bénéfice de l'avantage fiscal proposé par le présent article est exclusivement applicable aux revenus qui font l'objet d'une déclaration automatique sécurisée par les plateformes en ligne , et non aux revenus déclarés par les particuliers eux-mêmes. Il s'agit donc d'un avantage lié non seulement à la nature du revenu, mais aussi aux modalités de sa déclaration.

Aux termes du présent article, « sont qualifiées de plateformes en ligne, au sens du présent article, les activités consistant à` classer ou référencer des contenus, biens ou services proposés ou mis en ligne par des tiers, ou de mettre en relation, par voie électronique, plusieurs parties en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service, y compris à titre non rémunéré, ou de l'échange ou du partage d'un bien ou d'un service. Sont qualifiées de plateformes en ligne les personnes exerçant cette activité à titre professionnel ».

Les dispositions proposées par le présent article doivent être précisées par décret.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif proposé reprend les propositions du groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique précité , intitulé « L'économie collaborative : propositions pour une fiscalité simple, juste et efficace ». Le groupe de travail, composé de sept sénateurs de toutes sensibilités politiques, a élaboré ses propositions après avoir entendu plus de 70 personnes et effectué plusieurs déplacements.

A. LE CALCUL DE LA FRANCHISE : « LAISSER VIVRE » L'ÉCONOMIE DU PARTAGE TOUT EN ÉVITANT LES EFFETS D'AUBAINE

Avec le dispositif proposé, les revenus bruts inférieurs à 5 000 euros par an seraient non imposables : ils seraient « protégés » par la franchise, qui correspond à la fois à une « tolérance » et à une prise en compte du « partage des charges » qui caractérise l'économie collaborative. De fait, les sommes gagnées par les particuliers servent avant tout à réduire leur budget d'entretien, d'assurance, de carburant, ou encore d'électricité 82 ( * ) .

Les revenus bruts supérieurs à 5 000 euros seraient imposables dans les conditions de droit commun , c'est-à-dire au barème de l'impôt sur le revenu. Ils sont donc assimilables à des revenus de nature commerciale. Les régimes spécifiques, et notamment le statut de l'auto-entrepreneur, s'appliquent de plein droit, au choix du contribuable. Les revenus qui sont habituellement exonérés, par exemple les ventes d'occasion sur un site de petites annonces ou le covoiturage, demeureraient évidemment exonérés. Il ne s'agit en aucun cas de créer un nouvel impôt spécifique .

Le seuil unique de 5 000 euros correspond à un choix assumé de simplicité et de lisibilité pour les utilisateurs des plateformes . Il est préférable à une série de seuils ou de critères sectoriels.

Le montant proposé de 5 000 euros est suffisamment élevé pour « laisser vivre » l'économie du partage, tout en imposant justement ceux qui exercent une véritable activité commerciale . Il ne s'agit ni de taxer l'équivalent numérique du vide-grenier, ni d'imposer aucune obligation déclarative supplémentaire aux particuliers.

Par ailleurs, les effets d'aubaine devraient être limités. En effet, la rédaction proposée revient à instaurer un abattement alternatif : soit c'est la franchise de 5 000 euros qui s'applique, soit, si cela est plus avantageux pour le contribuable, c'est l'abattement forfaitaire du régime micro-BIC ou la déduction des charges réelles. Par conséquent, l'application de la franchise de 5 000 euros est neutre dès lors que :

- le contribuable réalise un chiffre d'affaires annuel supérieur à 7 042 euros 83 ( * ) ou à 10 000 euros 84 ( * ) selon la catégorie de revenu à laquelle se rattache son activité, dans le cas d'un régime d'imposition au micro-BIC ;

- le contribuable supporte des charges supérieures à 5 000 euros dans le cas d'un régime d'imposition au réel ou au réel simplifié.

Il apparaît donc que le dispositif proposé cible bien les particuliers qui réalisent un revenu modeste sur des plateformes collaboratives , et non pas l'ensemble des TPE qui pourraient, le cas échéant, faire une concurrence déloyale aux entreprises présentes dans l'économie traditionnelle. On rappellera à cet égard que les seuils du régime de la micro-entreprise sont respectivement de 82 200 euros et 32 900 euros par an, soit un montant bien plus élevé que celui qui rend la franchise avantageuse.

Le dispositif proposé, applicable à l'impôt sur le revenu dans le cadre du présent projet de loi de finances, a vocation à être étendu aux prélèvements sociaux .

B. LE COROLLAIRE INDISPENSABLE : UN SYSTÈME DE DÉCLARATION AUTOMATIQUE DES REVENUS PAR LES PLATEFORMES

Pour que le système de franchise soit juste et efficace, il importe que l'administration fiscale sache à quel moment le seuil est franchi par un particulier. Le pendant nécessaire à l'abattement de 5 000 euros est donc la mise en place d'un système de déclaration automatique sécurisée des revenus par les plateformes collaboratives, via un tiers de confiance.

Cette condition de déclaration automatique sécurisée (DAS) est expressément prévue par le présent article. Toutefois, le système lui-même, qui constitue l'autre pilier de la proposition du groupe de travail, a vocation à figurer en seconde partie du projet de loi de finances.

L'abattement proposé est donc lié non pas à la nature des revenus, mais bien à la méthode de déclaration , ce qui justifie le traitement spécifique accordé à certains revenus 85 ( * ) . De fait, cette méthode garantit une déclaration exhaustive et une imposition au juste niveau des revenus concernés, ce qui est loin d'être le cas dans le monde « physique ». Si la franchise « seule » constitue une moindre recette fiscale pour l'État, son application combinée avec la déclaration automatique devrait en réalité produire un surcroît notable de recettes fiscales .

Concrètement, le mécanisme serait le suivant :

1) les plateformes labellisées transmettent les revenus réalisés par leurs utilisateurs à raison de leurs différentes activités (vente de biens, prestation de services, location etc.) à une plateforme tierce indépendante , constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP) ;

2) cette plateforme centrale calcule le revenu agrégé de chaque personne sur Internet et le transmet à l'administration fiscale, une fois par an , en vue d'établir une déclaration pré-remplie de chaque contribuable dans la catégorie des BIC, analogue à celle qui existe pour les salariés (déclaration sociale nominative - DSN). Les contribuables, qui donneront leur accord à l'occasion de leur inscription sur la plateforme, n'auront aucune démarche supplémentaire à accomplir.

Il s'agit là d'un système simple et sécurisé pour le contribuable, et efficace pour l'État . Il se fonde sur le précédent récent de la collecte de la taxe de séjour mise en place à Paris par Airbnb depuis le 1 er octobre 2015. Les plateformes ont en effet l'avantage, pour beaucoup d'entre elles, de connaître en direct et à l'euro près le revenu de chacun de leurs utilisateurs : à cet égard, la révolution numérique n'est peut-être pas seulement une menace pour nos systèmes fiscaux, mais aussi une formidable opportunité - si les États sont capables de se saisir des possibilités qu'elle ouvre.

La participation des plateformes au système serait volontaire , afin de ne pas peser sur les plateformes les plus modestes et de laisser une certaine « souplesse » aux différents modèles de l'économie collaborative, en permanente évolution. Il existe toutefois une forte incitation à participer au système , dans la mesure où celui-ci constitue une forte garantie juridique apportée aux utilisateurs - et donc un argument commercial. Les plateformes participantes devront être labellisées, afin d'assurer la fiabilité et la confidentialité des informations transmises.

Cette condition de transmission automatique permettra également de limiter les potentiels effets d'aubaine de la franchise : en effet, pour que les contribuables concernés puissent en bénéficier, encore faut-il que leur activité corresponde à celles qui sont proposées par les plateformes - à ce jour, ceci est loin de couvrir l'ensemble des activités. De plus, si de nouvelles plateformes venaient à être créées afin de proposer de nouvelles activités, il faudrait plutôt s'en féliciter : cela étendrait encore davantage le système de déclaration sécurisé de l'impôt.

La définition retenue pour les plateformes est celle qui est retenue par l'avant-projet de loi pour une République numérique , soumis à consultation publique, et qui devrait être présenté prochainement en Conseil des ministres par Axelle Lemaire, la secrétaire d'État chargée du numérique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 3 (Art. 258 B du code général des impôts) - Régime des ventes à distance : abaissement de 100 000 € à 35 000 € du seuil de déclenchement de la taxation à la TVA en France

Commentaire : le présent article prévoit d'abaisser de 100 000 euros à 35 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes le seuil d'application de la taxation à la TVA en France pour les ventes à distance de biens matériels au sein de l'Union européenne, correspondant notamment au commerce en ligne.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RÉGIME SPÉCIFIQUE DE LA TVA SUR LES VENTES À DISTANCE

La TVA sur les ventes à distance intracommunautaires de biens matériels, et plus particulièrement sur le e-commerce 86 ( * ) , relève du régime spécifique des « ventes à distance » , prévu par l'article 34 de la directive TVA 87 ( * ) et l'article 258 B du code général des impôts.

Ce régime spécifique, prévu dès la mise en place du marché unique en 1993, s'applique aux échanges présentant simultanément trois caractéristiques : la livraison porte sur des biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, à destination de l'acquéreur ; la livraison est faite d'un autre État membre vers la France, ou inversement ; l'acquéreur est un particulier, c'est-à-dire une personne physique non assujettie 88 ( * ) (il s'agit donc d'une vente business to consumer , ou B2C).

La localisation de la vente, et donc sa taxation, obéit à des règles spécifiques :

- jusqu'à 100 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes, le lieu de livraison est réputé se situer dans l'État de départ des biens (celui du vendeur), ce qui entraîne l'application de la TVA de cet État. Ceci correspond aux règles de droit commun en matière de territorialité ;

- au-delà de 100 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes, le lieu de livraison est réputé se situer dans l'État d'arrivée des biens (celui de l'acheteur), ce qui entraîne l'application de la TVA de cet État. Le vendeur peut toutefois exercer une option, s'il le désire, afin que le principe de la taxation dans l'État d'arrivée s'applique à la totalité de ses ventes à distance, dès le premier euro.

Aux termes de l'article 34 de la directive TVA, les États membres ont la faculté d'abaisser ce seuil à 35 000 euros, « dans le cas où cet État membre craint que le seuil de 100 000 euros ne conduise à de sérieuses distorsions de concurrence ». En pratique, les États membres ont dans leur grande majorité opté pour un seuil de 35 000 euros, le choix de la France de conserver le seuil de 100 000 euros étant relativement isolé.

Seuils d'application du principe de destination
en matière de ventes à distance

Allemagne

100 000 euros

Italie

35 000 euros

Autriche

35 000 euros

Lettonie

35 000 euros

Belgique

35 000 euros

Lituanie

35 000 euros

Bulgarie

35 791 euros

Luxembourg

100 000 euros

Chypre

35 000 euros

Malte

35 000 euros

Croatie

35 621 euros

Pays-Bas

100 000 euros

Danemark

37 498 euros

Pologne

39 822 euros

Espagne

35 000 euros

Portugal

35 000 euros

Estonie

35 000 euros

République tchèque

41 583 euros

Finlande

35 000 euros

Roumanie

26 700 euros

France

100 000 euros

Royaume-Uni

97 656 euros

Grèce

35 000 euros

Slovaquie

35 000 euros

Hongrie

35 000 euros

Slovénie

35 000 euros

Irlande

35 000 euros

Suède

34 366 euros

Source : Commission européenne, 2015. Les seuils sont exprimés en euros ou en équivalent euros

Le régime des ventes à distance est le résultat d'un compromis entre, d'une part, le principe de taxation à la consommation finale qui est le fondement même de la TVA, et d'autre part, la nécessité de ne pas faire peser sur les petits vendeurs des charges administratives excessives, en leur imposant de calculer de multiples taux de TVA et de reverser celle-ci à plusieurs États membres.

Il faut enfin noter que le régime des ventes à distance ne s'applique pas aux moyens de transport neufs (voitures etc.), qui sont taxables dans l'État d'arrivée en vertu d'un régime spécifique. Les seuils ci-dessus ne s'appliquent pas non plus aux produits soumis à accises (alcools, tabacs etc.), qui sont eux aussi toujours taxables dans l'État d'arrivée, quel que soit le chiffre d'affaires du vendeur.

B. DISTORSION DE CONCURRENCE ET FRAUDE FISCALE

Le régime spécifique de la TVA sur les ventes à distance a été conçu à une époque où le commerce en ligne n'existait pas ; or celui-ci représente aujourd'hui un chiffre d'affaires de 57 milliards d'euros en France (+ 11 % en 2014), et de 424 milliards d'euros en Europe (+ 14 % en 2014) 89 ( * ) . Dans ce contexte, les insuffisances du régime spécifique des ventes à distance apparaissent aujourd'hui clairement.

D'une part, ce régime induit des distorsions de concurrence entre les vendeurs établis en France, où le taux normal de TVA est de 20 %, et les vendeurs établis dans un autre État membre de l'Union européenne, qui peuvent bénéficier de taux de TVA plus réduits. À cet égard, le seuil de 100 000 euros choisi par la France, soit le plus élevé possible, « retarde » le moment du basculement à la taxation dans l'État de destination, et accroît donc le risque de « sérieuses distorsions de concurrence », pour reprendre les termes mêmes de la directive TVA.

D'autre part, et surtout, le régime particulier des ventes à distance est particulièrement vulnérable à la fraude fiscale , comme l'a montré l'un des deux rapports du groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique, publié le 17 septembre 2015 90 ( * ) .

Le schéma le plus courant fait d'ailleurs partie des quinze « montages abusifs » publiés par la direction générale des finances publiques le 1 er avril 2015 : « une entreprise établie hors de France dans un pays qui pratique des taux de TVA inférieurs aux taux français réalise la majeure partie, voire la totalité de ses ventes sur Internet auprès de clients français non professionnels. Alors qu'elle réalise un chiffre d'affaires annuel dépassant le seuil des 100 000 euros, elle continuera à appliquer la TVA du pays européen dans lequel elle est implantée, sans se faire connaître de l'administration française . Cette première fraude peut, le cas échéant, se doubler d'une autre fraude s'il apparaît que la domiciliation à l'étranger est fictive et que l'ensemble de l'activité est gérée à partir du territoire français ».

Or il est en pratique très difficile de contrôler le dépassement du seuil de 100 000 euros , et par conséquent de recouvrer les recettes fiscales qui y sont liées. En effet, les entreprises de vente à distance qui ne sont pas résidentes en France mais y réalisent des opérations soumises à la TVA (c'est-à-dire celles qui dépassent le seuil de 100 000 euros) sont en principe tenues de s'immatriculer auprès de la direction des résidents à l'étranger et des services généraux (DRESG), afin d'acquitter la TVA au Trésor français 91 ( * ) . Toutefois, il s'agit d'une démarche volontaire, difficile à contrôler , et dont les petites entreprises n'ont d'ailleurs pas toujours connaissance.

De fait, le rapport du groupe de travail de la commission des finances a montré que seules 979 entreprises de vente à distance sont immatriculées à la DRESG, alors que plus de 715 000 sites de e-commerce sont actifs en Europe 92 ( * ) ... Si ce chiffre est en augmentation depuis deux ans, il n'en demeure pas moins très en-deçà de ce que l'on pourrait attendre. Sur le total de 746 entreprises enregistrées en 2014, 217 étaient établies en Allemagne, 201 au Royaume-Uni, 77 aux Pays-Bas et 64 en Belgique.

Évolution du nombre de sociétés immatriculées à la DRESG

2013

2014

2015

Vente à distance sur catalogue général (4791A)

78

77

77

Vente à distance sur catalogue spécialisé (4791B)

521

669

902

TOTAL

599

746

979

Source : rapport n° 691 (2014-2015), « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source », 17 septembre 2015, d'après les chiffres fournis par la DGFiP. Les données ne permettent pas de distinguer les sociétés établies dans l'UE et hors UE.

Le montant moyen de TVA nette par entreprise immatriculée, de l'ordre de 300 000 euros (soit 294 millions d'euros de TVA nette répartis en 979 entreprises), suggère que la démarche d'enregistrement à la DRESG est, sans surprise, surtout effectuée par les vendeurs les plus importants.

Évolution des montants de TVA des sociétés immatriculées
à la DRESG sur les secteurs d'activité 4791A et 9791B

Année de dépôt des déclarations

Nombre de déclarants à la TVA

TVA collectée

(en M€)

TVA déductible (en M€)

TVA nette (en M€)

2012

422

418,6

273,8

167,2

2013

612

559,9

333

238

2014

834

724,9

442,4

293,8

Source : rapport n° 691 (2014-2015), « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source », 17 septembre 2015, d'après les chiffres fournis par la DGFiP. Les données ne permettent pas de distinguer les sociétés établies dans l'UE et hors UE.

À défaut d'immatriculation, l'administration fiscale française n'a pour seule solution que de se tourner vers chacune de ses homologues européennes , qui ne font pas forcément preuve d'un zèle excessif pour collecter un impôt qui ne leur revient pas, voire qui leur échappe. De plus, la coopération administrative en matière fiscale est une procédure lourde, et encore faut-il savoir quelles informations demander aux administrations partenaires.

Lors du déplacement du groupe de travail à Bruxelles le 4 juin 2015, les services de la DG TAXUD (Fiscalité et union douanière) ont admis que le respect du plafond de 100 000 euros n'était « pratiquement pas contrôlé par les administrations fiscales des États membres » et donnait lieu à des « fraudes énormes » , sans pour autant pouvoir les chiffrer. Pour résumer, le régime fiscal applicable aux ventes à distance est « peu connu, peu utilisé, peu contrôlé », pour reprendre les termes employés à l'occasion d'une audition.

Les failles particulières du régime des ventes à distance de biens matériels se cumulent avec les difficultés inhérentes au contrôle des échanges sur Internet : éclatement en une multitude de vendeurs présents sur des marketplaces , des sites d'enchères ou de petites annonces ou encore des réseaux sociaux, domiciliation ou hébergement à l'étranger, anonymat, transformation permanente etc. Compte tenu des moyens très limités de l'administration fiscale , et plus particulièrement de l'absence de portée extraterritoriale de son droit de communication 93 ( * ) , il lui sera presque impossible d'avoir connaissance de l'activité réelle de ces vendeurs, et plus encore de mener à son terme une procédure de redressement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Afin de réduire les distorsions de concurrence imputables au régime spécifique des ventes, le présent article vise à abaisser de 100 000 euros à 35 000 euros le seuil de déclenchement de la taxation à la TVA en France , en application du principe de destination, ce que permet l'article 34 de la directive TVA précitée.

Le rendement budgétaire de cette mesure est estimé à 5 millions d'euros , soit 1 million d'euros au titre des entreprises déjà enregistrées à la DRESG, dont l'assiette taxable serait étendue, et 4 millions d'euros au titre des entreprises qui seraient désormais tenues de s'immatriculer.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue député Razzy Hammadi, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à élargir l'application du seuil de 35 000 euros aux groupements d'opérateurs et aux distributeurs, et non plus aux seuls assujettis.

Cet amendement a toutefois été adopté contre l'avis de la commission des finances et du Gouvernement, au motif que celui-ci est satisfait par le droit existant. D'après le secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, « on entend ici par vendeur à distance tout assujetti à la TVA établi dans un autre État membre de l'Union européenne qui effectue des livraisons de biens. Aussi sont donc également placés dans le champ d'application du régime des ventes à distance les livraisons de biens réalisés par des groupements d'opérateurs et des distributeurs. Il apparaît donc que cet amendement est satisfait ».

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général ne peut qu'approuver l'abaissement du seuil de déclenchement de la taxation à la TVA en France à 35 000 euros, dans la mesure où il s'agit de l'une des recommandations du rapport du groupe de travail sur le recouvrement de l'impôt à l'heure du numérique précité . Cet abaissement du seuil permettra non seulement de lutter contre les distorsions de concurrence au détriment des opérateurs établis en France, mais aussi, dans une certaine mesure, contre la fraude fiscale en matière de commerce en ligne.

Outre le fait qu'il soit imprécis, l'élargissement du dispositif aux groupements d'opérateurs et de distributeurs proposé par l'Assemblée nationale semble en revanche inutile . En effet, l'article 11 de la directive TVA dispose que « chaque État membre peut considérer comme un seul assujetti les personnes établies sur le territoire de ce même État membre qui sont indépendantes du point de vue juridique mais qui sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l'organisation ». Les groupements d'opérateurs et de distributeurs sont donc d'ores et déjà concernés par le seuil de 35 000 euros. En conséquence, votre rapporteur général vous propose un amendement tendant à supprimer cette modification et à revenir au texte initial de l'article du projet de loi de finances.

Ces remarques étant faites, la solution proposée par le présent article ne saurait être que transitoire, et demeure en tout état de cause insuffisante à long terme .

D'une part, dans sa communication du 6 mai 2015 relative à la « stratégie pour le marché unique numérique en Europe » , la Commission européenne a annoncé qu'elle fera, en 2016, une proposition législative relative au régime de TVA applicable aux ventes à distance. Il est notamment envisagé d' étendre aux ventes de biens matériels le principe du « mini-guichet unique » applicable depuis le 1 er janvier 2015 aux ventes de services en ligne (accès à Internet, messagerie, téléchargement de films, musiques, logiciels etc.), qui prévoit que les entreprises qui offrent de tels services s'enregistrent et acquittent la TVA auprès d'un seul et unique État membre. Celui-ci est ensuite chargé d'en répartir le produit entre les autres États membres en application du principe de destination dès le premier euro, sans application d'un quelconque seuil. Le passage au système du guichet unique pour les ventes de biens matériels permettrait donc une suppression du seuil de 35 000 euros pour les ventes de biens matériels, et surtout une application du principe de destination au premier euro . Cette hypothèse est explicitement évoquée dans l'évaluation préalable du présent article, et a par ailleurs été confirmée aux membres du groupe de travail de la commission des finances du Sénat par le commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l'union douanière, Pierre Moscovici, lors de leur déplacement à Bruxelles le 4 juin 2015. Il s'agit d'une proposition du groupe de travail.

D'autre part, et surtout, votre rapporteur général estime que la lutte contre les distorsions de concurrence et contre la fraude fiscale en matière de commerce en ligne doit inévitablement passer par un changement total de paradigme . En effet, tant que le système continuera de reposer sur des obligations purement déclaratives, quel que soit le seuil retenu, il ne s'appliquera qu'aux seuls vendeurs qui jouent le jeu. L'administration fiscale, condamnée à opérer ses contrôles aux cas par cas et a posteriori , avec des moyens humains et juridiques très limités, demeurera largement impuissante face à la multitude des vendeurs, des acheteurs, des transactions et des envois.

C'est pourquoi le groupe de travail a proposé une réforme ambitieuse du mode de collecte de la TVA, adapté aux spécificités du commerce sur Internet : prélever la TVA au moment de la transaction, par un mécanisme de « paiement scindé » .

Le « paiement scindé » de la TVA : schéma simplifié

Source : rapport n° 691 (2014-2015), « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source », 17 septembre 2015

Concrètement, lorsque l'acheteur paie en ligne, sa banque prélèverait automatiquement 20 % du montant (taux normal de TVA), et le reverserait sur un compte du Trésor. Il s'agit d'un système simple, valable pour toutes les ventes en ligne (biens et services, ventes intra-UE et depuis des pays tiers), efficace et sécurisé , que les établissements financiers sont techniquement capables de mettre en place. Un mécanisme spécifique serait prévu pour prendre en compte le cas des vendeurs non assujettis à la TVA (particuliers sur des plateformes collaboratives, auto-entrepreneurs etc.) et des ventes à taux réduit (livres, alimentation etc.).

La faible estimation du rendement de la mesure proposée , soit 5 millions d'euros par an, un montant sans commune mesure avec le chiffre d'affaires du e-commerce en Europe, sonne à cet égard comme un aveu des limites du système actuel , quel que soit le seuil retenu. C'est pourquoi l'abaissement de celui-ci à 35 000 euros, aussi souhaitable soit-il, devra être complété à moyen terme par un prélèvement à la source de la TVA sur les ventes en ligne.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3 bis (nouveau) (Art. 278 sexies du code général des impôts) - Aménagement de l'obligation de signature des contrats de ville pour l'application du taux réduit de TVA aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville

Commentaire : le présent article vise à aménager l'obligation de signature des contrats de ville pour l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES QUARTIERS PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE, UNE NOUVELLE GÉOGRAPHIE POUR LA MISE EN oeUVRE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

La loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la rénovation urbaine 94 ( * ) a retenu une nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville , plus resserrée afin de mieux cibler les actions menées et concentrer les moyens d'intervention. Les quartiers prioritaires de la politique de la ville ont ainsi vocation à remplacer les 751 zones urbaines sensibles (ZUS), les 416 zones de redynamisation urbaine (ZRU) ainsi que les 2 492 quartiers couverts par des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS). Les 100 zones franches urbaines (ZFU) ont, quant à elles, été maintenues tout en refondant les avantages fiscaux qui leur étaient associés.

Les décrets n° 2014-1750 et n° 2014-1751 du 30 décembre 2014 ont fixé à 1 511 le nombre de quartiers prioritaires sur l'ensemble du territoire français , dont 1 294 en métropole et 217 dans les départements d'outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française. Ils ont été définis en retenant le critère unique du revenu de leurs habitants, afin de déterminer leur « écart de développement économique et social » par rapport au territoire national et à l'unité urbaine à laquelle ils appartiennent.

La mise en oeuvre de la politique de la ville dans ces quartiers doit s'exercer dans le cadre de nouveaux contrats de ville , définis à l'article 6 de la loi du 21 février 2014 précitée et signés à l'échelle intercommunale . Ils ont vocation à remplacer les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) pour la mise en oeuvre de la politique de la ville.

Des avantages fiscaux ont également été associés à ces nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville, dans le but d'assurer leur développement économique et de favoriser la mixité sociale.

Ainsi, les petites entreprises exerçant une activité commerciale dans un quartier prioritaire , entre le 1 er janvier 2015 et le 31 décembre 2020, bénéficient, pendant cinq ans, d'une exonération facultative de cotisation foncière d'entreprises (CFE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) 95 ( * ) , en vertu respectivement des articles 1466 A et 1383 C ter du code général des impôts tels qu'issus de l'article 49 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 96 ( * ) . Sont ainsi ciblées les entreprises de moins de 10 salariés et ayant un chiffre d'affaires annuel hors taxe inférieur à 2 millions d'euros.

Par ailleurs, l'abattement de 30 % sur la base d'imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), applicable pour certains logements sociaux situés dans les zones urbaines sensibles (ZUS), a été maintenu dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville jusqu'en 2020 , par l'article 62 de la loi de finances initiale pour 2015 97 ( * ) .

Enfin, l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % pour les opérations d'accession sociale à la propriété a été étendue aux 1 500 quartiers prioritaires .

B. L'APPLICATION DE LA TVA À TAUX RÉDUIT POUR LES OPÉRATIONS D'ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ RÉALISÉES DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

En complétant d'un 11 bis le I de l'article 278 sexies du code général des impôts, l'article 17 de la loi de finances initiale pour 2015 précitée a étendu le bénéfice du taux réduit de TVA aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville , ou entièrement situés dans une bande de 300 mètres autour de ces quartiers. Ces quartiers doivent, en outre, avoir fait l'objet d'un contrat de ville tel que prévu par l'article 6 de la loi précitée du 21 février 2014.

Auparavant, figuraient déjà parmi les opérations immobilières « réalisées dans le cadre de la politique sociale » - et donc éligibles au taux réduit de TVA à 5,5 % en vertu de l'article 278 sexies précité - les opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans un « quartier ANRU », c'est-à-dire ceux faisant l'objet d'une convention de rénovation urbaine, dans le cadre du programme national de rénovation urbaine (PNRU). Le bénéfice du taux à 5,5 % était étendu aux opérations entièrement situées à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers 98 ( * ) (11 du I de l'article 278 sexies du code général des impôts).

Ces opérations peuvent couvrir à la fois les livraisons d'immeubles neufs, l'acquisition de terrains à bâtir, les travaux réalisés en application d'un contrat unique de construction 99 ( * ) de logements ainsi que les livraisons à soi-même pour les biens dont l'acquisition aurait ouvert le droit à taux réduit.

Le taux réduit de TVA s'applique également aux livraisons à soi-même dès lors qu'elles remplissent les conditions exigées pour les acquisitions (II de l'article 278 sexies du code général des impôts).

Ces opérations d'accession sociale à la propriété concernent des biens acquis à usage de résidence principale , par des personnes physiques respectant certains plafonds de ressources 100 ( * ) .

Plafonds de ressources annuelles retenus à compter du 1 er janvier 2015

Catégorie de ménages

Paris et communes limitrophes (en euros)

Ile-de-France
hors Paris et communes limitrophes
(en euros)

Autres régions
(en euros)

1 personne

33 372

33 372

29 014

2 personnes

49 877

49 877

38 746

3 personnes

65 384

59 957

46 596

4 personnes

78 063

71 817

56 251

5 personnes

92 879

85 017

66 173

6 personnes

104 515

95 671

74 577

Par personne supplémentaire

+ 11 645

+ 10 661

+ 8 319

Source : Bulletin officiel des finances publiques

Des plafonds sont également applicables pour les prix de vente ou de construction des logements bénéficiant du taux réduit de TVA.

Plafonds de prix de vente ou de construction pour 2015

Zone géographique concernée

Prix maximum
(par m 2 de surface utile)

Zone A bis

4 534 euros

Reste de la zone A

3 437 euros

Zone B1

2 753 euros

Zone B2

2 402 euros

Zone C

2 102 euros

Source : Bulletin officiel des finances publiques

Le II de l'article 17 de la loi de finances pour 2015 prévoit que le taux réduit de TVA dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville « s'applique aux opérations pour lesquelles la demande de permis de construire est déposée à compter du 1 er janvier 2015 et jusqu'au 31 décembre 2024 pour les opérations situées dans les quartiers faisant l'objet d'une convention prévue à l'article 10-3 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, François Pupponi et Yves Blein, avec un avis défavorable du Gouvernement 101 ( * ) , le présent article vise à étendre l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées au sein des quartiers prioritaires de la politique de la ville et pour lesquelles la demande de permis de construire a été déposée entre le 1 er janvier 2015 et la date de signature du contrat de ville. Il complète ainsi le premier alinéa du 11 bis du I de l'article 278 sexies du code général des impôts.

En effet, les constructions dont la demande de permis de construire est intervenue depuis le 1 er janvier 2015 dans des quartiers non encore couverts par un contrat de ville ne peuvent , en vertu du dispositif actuellement prévu à l'article 278 sexies du code général des impôts, bénéficier du taux réduit de TVA à 5,5 % .

En vertu de l'article 6 de la loi précitée du 21 février 2014, les contrats de ville doivent être signés dans l'année du renouvellement général des conseils municipaux, lequel a eu lieu en mars 2014. Toutefois, les contrats qui ne peuvent être signés dans ce délai le sont, au plus tard, l'année suivant celle du renouvellement général , soit d'ici au 31 décembre 2015.

Cette mesure aurait pour conséquence un coût de 24 millions d'euros pour l'État d'après l'amendement du Gouvernement à l'article d'équilibre tendant à tirer les conséquences des mesures adoptées par l'Assemblée nationale dans la première partie de la loi de finances pour 2015.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2015, votre commission avait soutenu l'extension du champ d'application de la TVA à taux réduit aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. En effet, cette mesure favorise la mixité sociale et correspond à une dépense fiscale efficace , comme l'a notamment démontré le rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, dit « rapport Guillaume », de juin 2011 102 ( * ) .

Concernant l'extension du champ d'application du taux réduit aux opérations réalisées entre le 1 er janvier 2015 et la signature des contrats de ville, votre rapporteur général constate qu' effectivement, ces contrats n'ont pas tous été signés dans l'année de renouvellement des conseils municipaux et qu'un certain nombre doit encore aboutir . Ainsi, selon les chiffres publiés par le ministère en charge de la ville, 73 % des contrats de ville étaient signés en métropole au 1 er septembre 2015, soit 321 contrats sur les 438 attendus d'ici la fin de l'année.

Il est incontestablement peu satisfaisant de constater qu'en attendant la signature des contrats, qui n'est pas toujours aisée, des opérations d'accession sociale à la propriété ne puissent bénéficier de cette mesure et donc aboutir dans ces quartiers . La seule solution consisterait alors à attendre la signature du contrat de ville et à redéposer une demande de permis de construire afin de pouvoir bénéficier du taux réduit de TVA. La procédure serait alors engagée de nouveau et les délais de recours réouverts.

L'administration fiscale avait d'ores et déjà tenté de répondre à cette difficulté en indiquant que, pour l'année 2015, « la condition d'existence du contrat de ville serait réputée remplie si le quartier prioritaire de la politique de la ville faisait l'objet d'un contrat cadre ou d'un protocole de préfiguration présentant les orientations stratégiques sur les trois piliers du contrat de ville (cohésion sociale, renouvellement urbain et cadre de vie, développement de l'activité économique et de l'emploi) et signé par [...] le représentant de l'État dans le département, le président de l'établissement public de coopération intercommunale et le ou les maires des communes concernés » (réponse ministérielle à la question écrite de notre collègue député Philippe Bies n° 75788).

Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget, s'est appuyé sur cette réponse offrant de la souplesse pour être défavorable à l'amendement ayant inséré le présent article. Il a par ailleurs évoqué un possible effet d'aubaine.

Toutefois, il semblerait que ce type de documents exigé par l'administration fiscale (contrat cadre, protocole de préfiguration) ne permette pas de couvrir un certain nombre d'opérations.

Votre rapporteur général comprend le sens de cet article, tout en considérant qu'il convient de garantir qu'il s'agit d'un dispositif transitoire, réservé à l'année 2015 au cours de laquelle les contrats de ville devraient tous être signés.

Il propose donc un amendement tendant à préciser que le taux réduit de TVA à 5,5 % s'appliquerait dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour les opérations dont la demande de permis de construire a été déposée entre le 1 er janvier 2015 et la date de signature du contrat de ville, dès lors que celui-ci intervient au plus tard le 31 décembre 2015 .

L'amendement procède également à une amélioration rédactionnelle en visant le II de l'article 17 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances initiale pour 2015 qui prévoit les conditions d'entrée en vigueur du dispositif plutôt que directement l'article 278 sexies du code général des impôts.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3 ter (nouveau) (Art. 279-0 bis A du code général des impôts) - Suppression, pour certains quartiers et communes, de la condition de présence de 25 % de surface de logements sociaux dans un ensemble immobilier pour bénéficier du régime d'incitation fiscale à l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire

Commentaire : le présent article tend à supprimer la condition selon laquelle la construction de logements intermédiaires doit être réalisée au sein d'un ensemble immobilier comprenant au minimum 25 % de surface de logements sociaux pour bénéficier du régime d'incitation fiscale à l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire (TVA à 10 % et exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant 20 ans), dès lors que l'immeuble est situé dans une commune comptant déjà plus de 50 % de logements sociaux ou dans un quartier entrant dans le champ du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).

I. LE DROIT EXISTANT

Un régime d'incitation fiscale à l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire a été institué par l'article 73 de la loi de finances pour 2014 103 ( * ) . Il est destiné à encourager les investisseurs institutionnels à investir dans le secteur de l'immobilier d'habitation, tout en développant le logement intermédiaire dans les zones les plus tendues. Parallèlement, une réduction d'impôt sur le revenu tendant à inciter les particuliers à réaliser un investissement locatif intermédiaire était également mis en place (dispositif « Duflot » devenu « Pinel »).

Ce régime applicable aux investisseurs institutionnels se compose à la fois du bénéfice du taux réduit de TVA à 10 % pour les livraisons - éventuellement à soi-même - de logements (article 279-0 bis A du code général des impôts) et d'une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant 20 ans (article 1384-0 A du code général des impôts).

A. L'APPLICATION D'UN TAUX RÉDUIT DE TVA À 10 %

Les investisseurs institutionnels relevant de ce régime sont les bailleurs sociaux, les personnes morales dont le capital est intégralement détenu par des personnes passibles de l'impôt sur les sociétés, les filiales des organismes collecteurs agréés et les établissements publics administratifs.

Sont concernés les immeubles neufs « résultant d'une construction nouvelle achevée ou en état futur d'achèvement » ainsi que ceux résultant de travaux de transformation de locaux à usage de bureaux.

En vertu de l'article 279-0 bis A du code général des impôts, ces logements doivent, pour bénéficier du taux de TVA à 10 %, être intégrés dans un ensemble immobilier comprenant au moins 25 % de surface de logements sociaux (mentionnés aux 2 à 6, 8 et 10 du I de l'article 278 sexies du code général des impôts et bénéficiant de ce fait du taux réduit de TVA à 5,5 %).

Ils doivent également être situés dans les communes « classées , par arrêté des ministres chargés du budget et du logement, dans les zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l'offre et la demande de logements entraînant des difficultés d'accès au logement sur le parc locatif existant ». Ces zones, qui correspondent aux zones A et B1, sont celles retenues pour l'application du dispositif « Duflot » devenu « Pinel » (article 199 novovicies du code général des impôts).

Enfin, les logements doivent être loués à la fois à des personnes respectant certains plafonds de ressources et pour un montant de loyer qui ne doit pas dépasser non plus certains plafonds . Le bailleur s'y engage pour une période de 20 ans

Plafonds de ressources annuelles des locataires pour 2015

(en euros)

Composition du foyer locataire

Lieu de situation du logement

Zone A bis

Reste de la
zone A

Zone B 1

Personne seule

36 971

36 971

30 133

Couple

55 254

55 254

40 241

Personne seule ou couple ayant une personne à charge

72 433

66 420

48 393

Personne seule ou couple ayant deux personnes à charge

86 479

79 558

58 421

Personne seule ou couple ayant trois personnes à charge

102 893

94 183

68 725

Personne seule ou couple ayant quatre personnes à charge

115 782

105 985

77 453

Majoration par personne à charge supplémentaire à partir de la cinquième

+ 12 900

+ 11 809

+ 8 641

Source : commission des finances en vertu de l'article 2 terdecies D de l'annexe III du code général des impôts

Plafonds de loyers par mètre carré pour 2015

Zone géographique concernée

Plafond de loyer applicable

Zone A bis

16,82 euros

Reste de la zone A

12,49 euros

Zone B1

10,06 euros

Source : Article 2 terdecies D de l'annexe III du code général des impôts

Ces plafonds de ressources et de loyers, identiques à ceux fixés pour l'application du dispositif « Pinel », permettent de qualifier les logements intermédiaires dont l'offre est destinée à être développée par le biais du présent régime d'incitation fiscale.

Enfin, les opérations immobilières concernées doivent également faire l'objet d'un agrément entre le propriétaire ou le gestionnaire des logements et le représentant de l'État dans le département. Dans cet acte, il est notamment précisé les logements susceptibles de bénéficier du régime incitatif réservé aux investisseurs institutionnels pour la construction de logements.

Le tome II du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2016 indique une prévision de dépense fiscale de 45 millions d'euros en 2015 et en 2016 pour ce dispositif.

B. L'EXONÉRATION DE TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES PENDANT 20 ANS

En vertu de l'article 1384-0 A du code général des impôts, une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties est prévue pendant 20 ans pour les logements ayant déjà bénéficié du taux réduit de TVA à 10 % au titre de l'article 279-0 bis A du code général des impôts.

Les logements doivent être loués à titre de résidence principale dans des conditions respectant les plafonds nécessaires pour entrer dans la catégorie de logements intermédiaires (tant en termes de conditions de ressources des locataires que de montant maximum de loyer exigé).

Lors de la création de cette exonération, son coût était estimé à 10 millions d'euros par an .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, François Pupponi et Yves Blein, avec un avis défavorable du Gouvernement 104 ( * ) , le présent article prévoit de supprimer la condition de construction d'au moins 25 % de surface de logements sociaux pour octroyer le bénéfice du taux de TVA réduit à 10 % à la construction des logements intermédiaires du même ensemble immobilier, dès lors qu'ils sont implantés :

- dans des communes ayant déjà plus de 50 % de logements locatifs sociaux , au sens de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation (ayant pour origine l'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU » ) ;

- et dans les quartiers visés par le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) , c'est-à-dire faisant l'objet d'une convention de renouvellement urbain prévue à l'article 10-3 de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine 105 ( * ) .

Comme l'ont indiqué en séance publique, à l'Assemblée nationale, les auteurs de l'amendement dont le présent article est issu, cette exception constituerait l'une des concrétisations des engagements pris par le Gouvernement, à l'issue du Comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015. En effet, afin de « mieux répartir le parc social sur les territoires », deux mesures étaient avancées :

- d'une part, construire des logements sociaux dans les communes défaillantes et, inversement, donner des instructions aux préfets « pour limiter la construction de logements sociaux dans les 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville dès lors que le taux de logement y dépassera 50 % » ;

- d'autre part, dans le cadre du NPNRU, « l'offre de logements sociaux démolis sera reconstituée en priorité en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le logement intermédiaire et l'accession à la propriété seront favorisés dans ces quartiers . »

Pour mémoire, le NPNRU a été lancé pour la période 2014-2024 par la loi précitée du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Doté de 5 milliards d'euros, il doit bénéficier à 216 quartiers d'intérêt national présentant les « dysfonctionnements urbains les plus importants » et dont la liste a été fixée par un arrêté du 29 avril 2015 106 ( * ) . 250 quartiers d'intérêt régional identifiés dans le cadre des contrats de plan État-région s'y ajouteront également.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

D'un point de vue global, l'État s'est fixé pour objectif la production de 35 000 logements intermédiaires d'ici 2019, avec, en particulier, l'intervention de la société nationale immobilière (SNI) qui prendra plusieurs formes : programme de production de 12 000 logements, fonds pour le logement intermédiaire et fonds pour l'investissement dans le logement intermédiaire.

Votre rapporteur général ne peut que soutenir le développement du logement intermédiaire, en particulier dans les zones les plus tendues où les difficultés d'accès au logement s'avèrent les plus importantes. Il suivra avec une attention particulière la mise en oeuvre concrète des engagements du Gouvernement sur ce point.

Il est également sensible à la nécessité de développer la mixité sociale , notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les quartiers bénéficiant de l'intervention du NPNRU. Il a d'ailleurs soutenu les dispositifs permettant de favoriser l'accession sociale à la propriété dans ces quartiers (taux réduit de TVA à 5,5 % en particulier).

Il convient d'ailleurs de noter qu'afin de tenir compte des mesures prises dans le cadre du comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté, le règlement général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) relatif au NPNRU 107 ( * ) du 8 août 2015 prévoit déjà que la reconstitution de l'offre de logements à bas loyer sera, pour favoriser la mixité sociale, « située en dehors des quartiers prioritaires de la ville (QPV) et des quartiers hors QPV ayant fait l'objet du programme national de rénovation urbaine (PNRU), ainsi que des communes dont la part de logements locatifs sociaux (LLS) dans le parc de logement est supérieure à 50%, sauf contexte spécifique argumenté. » À titre exceptionnel, les constructions pourront être réalisées à l'intérieur des quartiers.

Toutefois, la question de la conformité du dispositif proposé vis-à-vis de la directive communautaire TVA 108 ( * ) mérite d'être posée. En effet, un taux réduit de TVA peut uniquement s'appliquer dans le secteur du logement pour la mise en oeuvre d'une politique sociale ou la rénovation et la réparation de logements privés.

Interrogée sur le point de savoir si le développement du logement intermédiaire entrait dans le cadre de la mise en oeuvre d'une politique sociale, la direction de la législation fiscale a indiqué que la question était en cours d'analyse. Il ne semble pas que la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne tranche clairement dans un sens ou dans l'autre et le risque d'un contentieux communautaire ne peut donc être totalement écarté.

Ce sujet méritera donc d'être suivi attentivement et pourrait conduire à remettre en cause la pertinence du dispositif d'exception proposé par cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter l'article sans modification.

ARTICLE 4 (Art. 44 quindecies, 235 ter D, 235 ter KA, 239 bis AB, 244 quater T, 1451, 1466 A, 1647 C septies et 1679 A du code général des impôts, art. L.6121-3, L. 6122-2, L. 6331-2, L. 6331-8, L. 6331-9, L. 6331-15, L. 6331-17, L. 6331-33, L. 6331-38, L. 6331-53, L. 6331-55, L. 6331-63, L. 6331-64, L. 6332-3-1, L. 6332-3-4, L. 6332-6, L. 6332-15 et L. 6332-21 du code du travail, art. L. 137-15, L. 241-18 et L. 834-1 du code de la sécurité sociale, art. L. 2333-64 et L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales) - Limitation des effets de seuils dans les TPE et les PME

Commentaire : le présent article prévoit de limiter les effets de seuil d'effectifs dans les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises, en repoussant d'un salarié les seuils ou plafonds applicables à certains dispositifs fiscaux, ainsi qu'en permettant aux entreprises de continuer de bénéficier du régime fiscal avantageux pendant deux ou trois ans après le franchissement du seuil.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : REPOUSSER ET LISSER DANS LE TEMPS LES EFFETS DE SEUIL

Notre système fiscal applicable aux entreprises est caractérisé par une différence de traitement entre les petites entreprises, dont les capacités financières sont plus réduites et la sensibilité à une évolution du taux ou de l'assiette plus importante, et les grandes entreprises. Cette différence de traitement se traduit par la fixation de seuils ou de plafonds d'application de certaines mesures fiscales, souvent exprimés en chiffres d'affaires ou en effectifs .

Ce seuil ou ce plafond peut concerner l'entrée dans une mesure fiscale, la sortie d'un dispositif dérogatoire d'exonération ou de taux réduit, ou encore la perte du bénéficie d'un crédit d'impôt.

Le présent article a pour objet, selon son exposé des motifs, de « [ limiter] les effets de seuil d'effectif de certains régimes fiscaux, afin de supprimer les risques de désincitation à l'embauche de salariés supplémentaires auxquels conduiraient le franchissement d'un seuil ». De façon générale, il vise à repousser d'un salarié le seuil d'effectif de certains dispositifs fiscaux , et à geler temporairement les conséquences d'un franchissement de seuil par une entreprise .

A. LES EXONÉRATIONS ET CRÉDITS D'IMPÔTS EN ZONES PRIORITAIRES

1. L'exonération d'impôt en zone de revitalisation rurale (article 44 quindecies du CGI)

a) Le droit existant

L'article 129 de la loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a institué, à l'article 44 quindecies du code général des impôts (CGI), une exonération d'impôt pour une entreprise créée ou reprise dans une zone de revitalisation rurale entre le 1 er janvier 2011 et le 31 décembre 2015 et soumise à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés.

Pour bénéficier de l'exonération, l'entreprise doit employer « moins de dix salariés bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée ou d'une durée d'au moins six mois à la date de clôture du premier exercice et au cours de chaque exercice de la période [...] ; si l'effectif varie en cours d'exercice, il est calculé compte tenu de la durée de présence des salariés en cause pendant l'exercice » 109 ( * ) . L'exonération est totale pendant cinq ans après la reprise ou la création, puis fait l'objet d'une sortie en sifflet sur trois ans.

Le coût de cette dépense fiscale est évalué à 14 millions d'euros en 2015 et à 18 millions d'euros en 2015 d'après le tome II de l'évaluation des voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016 110 ( * ) .

b) Le dispositif proposé

Le présent article vise à modifier l'article 44 quindecies du CGI afin de rendre l'exonération applicable aux entreprises qui emploient au maximum dix salariés, contre neuf actuellement .

Par ailleurs, il vise à geler les conséquences d'un franchissement de seuil dans le temps , en prévoyant que, au titre des exercices clos entre le 31 décembre 2015 et le 31 décembre 2018 , lorsqu'une entreprise bénéficiant déjà de cette exonération d'impôt constate un dépassement du seuil de dix salariés, « cette circonstance ne lui fait pas perdre le bénéfice de l'exonération pour l'exercice au cours duquel ce dépassement est constaté, ainsi que pour les deux exercices suivants ».

2. Le crédit de CFE en faveur des micro-entreprises situées dans une zone de restructuration de la défense (article 1647 C septies du CGI)

a) Le droit existant

L'article 1647 C septies du code général des impôts (CGI) prévoit un crédit d'impôt de cotisation foncière des entreprises (CFE) pour les micro-entreprises - dont l'effectif comporte au maximum dix salariés - redevables ou exonérées de cotisation foncière des entreprises et qui sont situées dans une zone de restructuration de la défense 111 ( * ) . Son montant, depuis sa création, est égal à « 750 € par salarié employé depuis au moins un an au 1 er janvier de l'année d'imposition dans l'établissement au titre duquel le crédit d'impôt est demandé 112 ( * ) ».

Le coût de ce crédit d'impôt est estimé à 3 millions d'euros par an par l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016.

b) Le dispositif proposé

Le présent article vise à relever le plafond d'éligibilité au crédit d'impôt de dix salariés à onze salariés . La dénomination de « micro-entreprise » telle qu'elle résulte de l'article 2 de l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008, ne peut donc plus être utilisée et la rédaction de l'article est modifiée en conséquence, sans toutefois que le critère de chiffre d'affaires définissant une micro-entreprise (soit 2 millions d'euros maximum) ne soit modifié.

Afin de lisser l'effet d'un dépassement de seuil dans le temps, le présent article prévoit également que, pour les impositions établies au titre des années 2016 à 2018, une entreprise qui bénéficie déjà du crédit d'impôt et qui constate, au 1 er janvier de l'année de son application, un dépassement du seuil de onze salariés, continue de bénéficier de ce crédit d'impôt pour cette année .

3. L'exonération de CFE pour les activités commerciales dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (article 1466 A du CGI)

Le I septies de l'article 1466 A du CGI prévoit une exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) pour les établissements qui font l'objet d'une création ou d'une extension entre le 1 er janvier 2015 et le 31 décembre 2020 dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville , ainsi que pour les établissements existant au 1 er janvier 2015 situés dans ces mêmes quartiers. Cette exonération est facultative, les collectivités pouvant, par délibération, décider de ne pas l'appliquer. Elle est plafonnée par un montant actualisé annuellement 113 ( * ) . Par ailleurs, à l'issue de la période d'exonération de 5 ans, les entreprises bénéficient pendant trois années d'un abattement dégressif (sortie « en sifflet »).

Pour bénéficier de cette exonération, l'entreprise doit employer moins de dix salariés au 1 er janvier 2015 ou à sa date de création .

L'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016 estime à 1 million d'euros le coût de ce dispositif en 2015.

Le présent article a pour objet de porter de dix à onze l'effectif maximum de salariés permettant de bénéficier de l'exonération .

B. L'EXONÉRATION DE CFE POUR CERTAINES SOCIÉTÉS AGRICOLES (ARTICLE 1451 DU CGI)

a) Le droit existant

Aux termes de l'article 1451 du code général des impôts (CGI), certaines coopératives agricoles et vinicoles , leurs unions et les sociétés d'intérêt collectif agricole qui emploient au plus trois salariés, ainsi que les caisses locales d'assurances mutuelles agricoles qui ont au plus deux salariés ou mandataires rémunérés, sont exonérées de la cotisation foncière des entreprises .

Le coût de cette exonération, sans doute très limité, n'est pas estimé par l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances.

b) Le dispositif proposé

Le présent article a pour unique objet de geler les conséquences d'un franchissement de seuil , en prévoyant que, pour les impositions établies de 2016 à 2018, lorsqu'une entreprise bénéficiant déjà de l'exonération constate un dépassement des seuils d'effectifs mentionnés précédemment, elle continue de bénéficier de l'exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) pour l'année d'imposition correspondante à la période où ce dépassement est constaté, ainsi que pour les deux années suivantes.

C. LA PARTICIPATION DE L'EMPLOYEUR DUE AU TITRE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE (ARTICLES 235 TER D ET 235 TER KA DU CGI)

Les montants versés par les employeurs aux organismes collecteurs paritaires, chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle continue et de financer la formation des salariés, dépendent du nombre de salariés de l'entreprise : si elle en compte dix ou plus, elle verse 1 % de sa masse salariale de l'année à ces organismes, aux termes de l'article 235 ter D ; si elle en compte moins de dix, ce pourcentage est de 0,55 %, aux termes de l'article 235 ter KA. Si les taux ont évolué au cours des années, le seuil de dix salariés n'a jamais été modifié depuis l'instauration de ce dispositif de financement en 1992.

D'après le tome I de l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016, les recettes des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) sont estimées à 581 millions d'euros s'agissant des entreprises de moins de 10 salariés et à 4 355 millions d'euros pour les entreprises de plus de dix salariés 114 ( * ) .

Le présent article a pour objet de porter de dix à onze salariés le seuil d'effectif à partir duquel l'entreprise est assujettie au taux de 1 %. Il procède, par coordination, à l'adaptation de plusieurs articles du code du travail relatifs à ce dispositif de financement de la formation professionnelle.

D. L'OPTION POUR LE RÉGIME DES SOCIÉTÉS DE PERSONNES (ARTICLE 239 BIS AB DU CGI)

L'article 30 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, codifié à l'article 239 bis AB du CGI, permet, sous certaines conditions 115 ( * ) , à des sociétés de capitaux (sociétés anonymes, sociétés par actions simplifiées et sociétés à responsabilité limitée), d'opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes. Les membres de ces sociétés ayant opté pour ce régime sont donc personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. L'option est valable pour une période de cinq exercices, sauf renonciation.

Cette option est néanmoins subordonnée à certaines conditions d'activité, de chiffre d'affaires et d'effectif. En particulier, la société doit employer moins de cinquante salariés.

En conséquence, le présent article prévoit que, si le seuil de cinquante salariés est atteint ou dépassé au cours d'un exercice clos entre le 31 décembre 2015 et le 31 décembre 2018, le régime continue de s'appliquer pour l'exercice en cours, ainsi que pour les deux exercices suivants, sauf expiration de la période de validité de l'option.

E. LE CRÉDIT D'IMPÔT INTÉRESSEMENT (ARTICLE 244 QUATER T DU CGI)

L'article 244 quater T du CGI, créé par la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail, permet, sous certaines conditions, aux entreprises ayant conclu un accord d'intéressement de « bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des primes d'intéressement dues en application de cet accord ». Ce crédit d'impôt est égal à « 30 % de la différence entre, d'une part, les primes d'intéressement dues au titre de l'exercice et, d'autre part, la moyenne des primes dues au titre de l'accord précédent ou, si leur montant est plus élevé, les primes d'intéressement dues au titre de l'exercice précédent ».

Sont éligibles à ce crédit d'impôt les entreprises assujetties à un régime réel d'imposition et qui emploient moins de cinquante salariés. Ce seuil n'a pas été modifié depuis la loi du 3 décembre 2008 précitée.

D'après le tome 2 de l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016, ce crédit d'impôt représente un coût estimé à 29 millions d'euros en 2015.

Le présent article permet aux entreprises qui dépassent le seuil de cinquante salariés, pour les exercices clos entre le 1 er janvier 2015 et le 31 décembre 2017, de bénéficier de ce crédit d'impôt au titre de l'exercice durant lequel le seuil de cinquante salariés est dépassé, ainsi qu'aux titres des deux exercices suivants.

F. LA TAXE SUR LES SALAIRES (ARTICLE 1679 A DU CGI)

En vertu de l'article 1679 A du CGI, les mutuelles, assujetties à la taxe sur les salaires, lorsqu'elles emploient moins de trente salariés, ne sont redevables de cette taxe que pour la partie de son montant qui excède 20 262 euros 116 ( * ) . Cette dépense fiscale n'est pas chiffrée par l'évaluation des voies et moyens, ni par l'évaluation préalable annexée au présent article.

Le présent article vise à prévoir qu'une mutuelle qui, entre le 1 er janvier 2015 et le 31 décembre 2018, constate un dépassement du seuil de trente salariés, conserve le bénéfice de cet avantage fiscal, au titre de l'année du franchissement de ce seuil et des trois années suivantes.

G. LE FORFAIT SOCIAL (ARTICLE L. 137-15 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE)

Depuis la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009, les rémunérations ou gains exclus de l'assiette des cotisations de sécurité sociale mais assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG) sont soumis à une contribution à la charge de l'employeur, dénommée « forfait social ». La loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012 a cependant prévu que les employeurs de moins de dix salariés ne sont pas assujettis au forfait social « au titre des contributions versées au bénéfice des salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit pour le financement de prestations complémentaires de prévoyance 117 ( * ) ».

Le présent article vise à prévoir que le plafond d'effectifs en deçà duquel cette exonération s'applique passe de dix à onze salariés.

Il prévoit par ailleurs que cette exonération « s'applique également pendant trois ans aux employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent, au titre de l'année 2016, 2017 ou 2018 l'effectif de onze salariés ».

H. LA DÉDUCTION FORFAITAIRE SUR LES HEURES SUPPLÉMENTAIRES (ARTICLE L. 241-18 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE)

Depuis la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, « dans les entreprises employant moins de vingt salariés, toute heure supplémentaire effectuée par les salariés ouvre droit à une déduction forfaitaire des cotisations patronales à hauteur d'un montant fixé par décret ». Cette déduction forfaitaire était applicable, depuis la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat , à toutes les entreprises nonobstant leur effectif, mais le montant fixé par décret pouvait alors être majoré dans les entreprises employant au plus vingt salariés.

Le présent article prévoit un gel temporaire des conséquences d'un franchissement du seuil en précisant que cette déduction « continue de s'appliquer pendant trois ans aux employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent au titre de l'année 2016, 2017 ou 2018 l'effectif de vingt salariés ».

I. LA PARTICIPATION AU FINANCEMENT DE L'ALLOCATION LOGEMENT (ARTICLE L. 834-1 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE)

Le fonds national d'aide au logement (FNAL), qui assure le financement des aides au logement, est alimenté par le produit d'une contribution à la charge des employeurs assise sur les rémunérations qu'ils versent d'une part et par une contribution de l'État d'autre part.

Le taux de la contribution due par les employeurs est fixé, en vertu de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, à 0,1 % de la part des rémunérations perçues par les assurés dans la limite d'un plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale pour les employeurs occupant moins de vingt salariés et pour certaines professions agricoles, et à 0,5% de la totalité des rémunérations pour les autres employeurs.

Le présent article vise à prévoir que le taux de 0,1% « continue de s'appliquer, pendant trois ans, aux employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent au titre de l'année 2016, 2017 ou 2018 l'effectif de vingt salariés ».

J. LE VERSEMENT TRANSPORT (ARTICLES L. 2333-64 ET L. 2531-2 DU CODE GÉNÉRAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES)

1. Le relèvement de dix à onze salariés du seuil d'application du versement transport

Les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, en dehors de la région Ile-de-France, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif dont l'activité est de caractère social 118 ( * ) , lorsqu'elles emploient plus de neuf salariés, peuvent être assujetties à un versement destiné au financement des transports en commun (versement transport)

La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier , a d'ores et déjà prévu un mécanisme de limitation des effets de seuil qui s'étale sur six années : « les employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent l'effectif de dix salariés sont dispensés pendant trois ans du paiement du versement. Le montant du versement est réduit de 75 p. 100, 50 p. 100 et 25 p. 100, respectivement chacune des trois années suivant la dernière année de dispense ».

Le présent article a pour objet de relever de dix à onze l'effectif à partir duquel une entreprise est redevable du versement transport.

2. La création d'un mécanisme de compensation aux collectivités territoriales

La réduction du champ des entreprises assujetties au versement transport se traduit par une perte de recettes pour les entités qui en bénéficient . Le VI du présent article vise à compenser cette perte de ressources , à travers un prélèvement sur les recettes de l'État.

Cette compensation est versée aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) ainsi qu'à la métropole de Lyon.

Le montant de la compensation revenant à chaque AOM est égal à la différence entre le produit recouvré et le montant qui aurait été perçu si le seuil d'application du versement transport n'avait pas été relevé par le présent article.

Cette compensation conserve donc, pour les bénéficiaires, le dynamisme du versement transport. Une augmentation de base, comme une augmentation de taux, se traduiront par une hausse de la compensation versée .

La compensation sera versée par l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), selon une périodicité trimestrielle.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du Gouvernement et avec un avis favorable de la commission des finances, adopté un amendement visant à compléter le dispositif de compensation de la perte de recettes de versement transport pour les entités en bénéficiant.

Il est ainsi précisé que bénéficient également de cette compensation :

- le syndicat des transports d'Île de France, qui n'est pas une AOM au sens de l'article L. 1231-1 du code des transports ;

- l'autorité organisatrice de transports urbains auquel la métropole de Lyon a transféré une partie de ses compétences en matière de mobilité ;

- les syndicats mixtes de transport, qui ne sont pas non plus une AOM au sens du code des transports.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a également, à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, adopté plusieurs amendements de nature rédactionnelle.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. DES EFFETS DE SEUIL QUI CONTRIBUENT À EXPLIQUER LES DIFFICULTÉS DE DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES

La croissance interne des entreprises françaises est souvent freinée, sinon entravée, par les conséquences du franchissement d'un seuil fixé par la loi en matière fiscale ou réglementaire.

Une récente note du Conseil d'analyse économique 119 ( * ) a montré que l'appareil économique français était caractérisé, en comparaison de la situation allemande et britannique, par un nombre important de PME de 1 à 9 salariés, qui représentent 95 % des entreprises en France , contre 83 % en Allemagne et 89 % au Royaume-Uni. Le Conseil d'analyse économique soulignait ainsi qu' « il existe, d'une part, des barrières à l'entrée nécessitant d'atteindre d'emblée une taille critique, et, d'autre part, des obstacles importants à l'expansion de ces entreprises ».

A cet égard, d'après une étude de l'Insee, publiée en 2010 et citée par l'évaluation préalable annexée au présent article 120 ( * ) , l'on dénombrait en 2005 « 33 000 entreprises de 9 salariés pour 17 000 entreprises de 10 salariés » sur la base des données fiscales - l'écart étant moins important si l'on se réfère aux données sociales (DADS). Cette étude, tout en soulignant que les effets de seuil ne peuvent pas, à eux seuls, rendre compte de la concentration des entreprises françaises entre 0 et 9 salariés, indiquait également, au terme de son analyse statistique, qu' en l'absence de discontinuité dans la législation (fiscale, sociale), « la probabilité que l'effectif augmente d'un salarié augmenterait de 3 points pour les entreprises de 9 salariés , de 3 points pour les entreprises de 19 salariés et de 4 points pour les entreprises de 19 salariés ».

B. UN DISPOSITIF DE LISSAGE ET D'HARMONISATION VERS LE HAUT DE CERTAINS SEUILS FISCAUX

L'article 48 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie avait entrepris de réduire ces effets de seuil , en matière de fiscalité et de prélèvement de cotisations sociales , en permettant aux entreprises qui franchissent certains seuils de continuer à bénéficier du régime ou du taux favorable antérieur pendant 3 ans. Ce dispositif, initialement prévu pour les trois années 2008, 2009 et 2010, a été prolongé pour l'année 2011 par l'article 135 de la loi de finances pour 2011, puis à nouveau pour l'année 2012 par l'article 76 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011.

Étaient concernés par ce dispositif de neutralisation temporaire des effets de seuil le financement de la formation professionnelle, les cotisations sociales sur le salaire des apprentis, la réduction dite « Fillon » de cotisations patronales, les exonérations de cotisations sociales au titre des heures supplémentaires, la contribution des employeurs au Fonds national d'aide au logement (FNAL), ainsi que le versement transport.

Le présent article s'inspire de cette première expérience, tout en y ajoutant la modification pérenne du seuil d'entrée dans un certain nombre de dispositifs fiscaux . En pratique, les seuils de neuf et dix salariés sont supprimés, pour ne conserver que le seuil de onze salariés . En outre, le présent article généralise un mécanisme de neutralisation ou de « gel », sur trois ans et pendant trois ans (de 2016 à 2018) des conséquences d'un franchissement du seuil pour une entreprise. Il convient de souligner que pour un dispositif - le crédit de CFE en faveur des très petites entreprises en zone de restructuration de la défense - le présent article prévoit une neutralisation d'une année seulement.

Le coût de la présente mesure est estimé, par l'évaluation préalable, à 125,75 millions d'euros en 2016 pour l'ensemble des administrations publiques, et à 152 millions d'euros par an à terme , dont 105 millions d'euros pour l'Etat, 27 millions d'euros pour la sécurité sociale et 20 millions d'euros pour les autres administrations publiques. En pratique, trois modifications représentent l'essentiel du coût :

- le relèvement du seuil du versement transport , dont le coût est supporté par l'Etat en raison du mécanisme de compensation prévu à cet effet (78,75 millions d'euros en 2016 puis 105 millions d'euros par an à compter de 2017) ;

- le relèvement du seuil (20 millions d'euros) et le gel pendant trois ans de tout franchissement de seuil (7 millions d'euros) pour le forfait social ;

- le relèvement du seuil pour la participation de l'employeur à la formation professionnelle continue (20 millions d'euros).

C. UNE LIMITATION DES EFFETS DE SEUIL QUI DEVRAIT ÊTRE PROLONGÉE PAR UNE RÉFORME EN MATIÈRE DE DROITS SOCIAUX

Le présent article constitue un effort louable de prise en compte de l'impact des effets de seuil sur la croissance de nos entreprises et d'harmonisation des seuils pour les TPE.

Toutefois, l'impact sur l'emploi de ces mesures devrait rester marginal . En effet, de l'ensemble des dispositifs fiscaux qui sont concernés, trois seulement présentent un coût suffisamment important pour être chiffré par l'évaluation préalable . Votre rapporteur général doute que des modifications de dispositifs dont la plupart sont à ce point marginaux qu'ils ne peuvent pas être chiffrés puissent être de nature à véritablement lutter contre les conséquences des effets de seuil sur l'emploi.

Surtout, les effets de seuil sont moins durement ressentis par les entreprises en matière de fiscalité qu'en matière règlementaire et sociale . Une étude de l' Institut für Wirtschaftsforschung , réalisée à la demande de la délégation aux entreprises du Sénat et citée par l'évaluation préalable au présent article, a ainsi montré que les entreprises françaises étaient plus concentrées au niveau des seuils que les entreprises allemandes. Elle démontrait également l'impact négatif sur l'emploi, en indiquant que les entreprises françaises qui ne croissent pas en taille « augmentent leur investissement en capital comme facteur de production. Ceci indique une substitution de la main d'oeuvre par le capital de manière à éviter les coûts marginaux croissants de la main d'oeuvre » 121 ( * ) .

À cet égard, dans le cadre de la discussion du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances, le Sénat avait adopté, à l'initiative de notre collègue Catherine Deroche, rapporteur au nom de la commission spéciale, deux amendements visant à réduire et lisser ces effets de seuils sociaux :

- un amendement ayant pour objet de suspendre pendant trois ans l'obligation de conclure un accord de participation pour les entreprises bénéficiant d'un accord d'intéressement et franchissant le seuil de cinquante salariés ; (article 36 quater ) ;

- un amendement ayant pour objet de relever de onze à vingt et un le nombre de salariés à partir duquel une entreprise doit organiser l'élection d'un délégué du personnel et de mettre en place un mécanisme de lissage dans le temps des conséquences du franchissement des seuils sociaux (article 87 A).

Si le premier amendement, devenu article 156 de la loi ° 2015-990 du 6 août 2015, permet désormais de neutraliser temporairement l'impact d'un franchissement de seuil en matière de participation et d'intéressement, le second, en revanche, a été supprimé par l'Assemblée nationale. Faute de s'attaquer à cette contrainte réglementaire et à d'autres de même type, précisées dans l'étude précitée de l'IFO (telle que, par exemple, l'obligation de constituer un comité d'entreprise à partir de 50 salariés), le présent article, tout en allant dans le sens d'une harmonisation bienvenue de certains seuils fiscaux, ne devrait pas avoir d'impact majeur sur la croissance des PME .

*

Votre rapporteur général vous propose par ailleurs d'adopter un amendement rédactionnel .

Enfin, il nous propose d'aligner le dispositif de neutralisation des conséquences d'un franchissement de seuil pour le crédit de cotisation foncière des entreprises dans les ZRD sur les autres dispositifs de neutralisation prévus par le présent article : en effet, celui-ci n'est proposé que pour le seul exercice au cours duquel le franchissement est constaté, alors que la neutralisation vaut pour trois années pour les autres mesures fiscales. En conséquence, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement visant à prévoir que la neutralisation de crédit de CFE vaut pour l'exercice au cours duquel le franchissement est constaté, ainsi que l'exercice suivant 122 ( * ) .

D. LA COMPENSATION DES CONSÉQUENCES DU RELÈVEMENT DU SEUIL DU VERSEMENT TRANSPORT

Les modalités de compensation prévues par le VI du présent article permettent de réellement neutraliser l'effet du relèvement du seuil du versement transport pour les entités qui le perçoivent.

Un doute subsiste sur le montant qu'atteindra cette compensation . Le Gouvernement prévoit un coût de 105 millions d'euros en année pleine et de 78,75 millions d'euros en 2016, la compensation au titre du dernier trimestre étant versée au début de l'année suivante.

Cependant, ce montant est fortement inférieur aux estimations des associations d'élus . Le groupement des autorités organisatrices de transport (Gart), l'association des maires de grandes villes de France (AMGVF), l'association des communautés urbaines de France (ACUF) et l'assemblée des communautés de France (AdCF) estiment que ce relèvement du seuil représenterait une perte pouvant atteindre 500 millions d'euros.

En tout état de cause, le montant indiqué dans l'évaluation préalable de l'article et rappelé à l'article 13 du présent projet de loi de finances récapitulant le montant des prélèvements sur recettes bénéficiant aux collectivités territoriales, n'a qu'un caractère évaluatif qui ne limitera pas la compensation versée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5 (Art. 214 du code général des impôts) - Augmentation du plafond de la provision déductible à l'impôt sur les sociétés des groupements d'employeurs

Commentaire : le présent article vise à permettre aux membres d'un groupement d'employeurs de déduire de leur bénéfice imposable une somme égale au maximum à 2 % de leur masse salariale, provisionnée dans le but d'honorer les obligations salariales du groupement ; ce plafond viendrait s'ajouter au plafond de 10 000 euros existant.

I. LE DROIT EXISTANT

Prévus par les articles L. 1253-1 à L. 1253-18 du code du travail, les groupements d'employeurs sont des structures à forme associative ou coopérative, créées à l'initiative d'entreprises ou d'associations, pour mettre à disposition de celles-ci du personnel et leur apporter des conseils en matière de gestion des ressources humaines et de formation professionnelle.

Les groupements permettent ainsi à des très petites entreprises (TPE) et à des petites et moyennes entreprises (PME) de recourir à des salariés aux compétences spécifiques, employés en contrat à durée indéterminée (CDI) , qu'elles ne pourraient pas embaucher séparément. Les groupements d'employeurs jouent notamment un rôle important dans le secteur de l'agriculture .

Les membres du groupement d'employeurs, qui sont solidairement responsables des dettes de celui-ci à l'égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires 123 ( * ) , sont autorisés, en application du 8° du 1 de l'article 214 du code général des impôts (CGI), à déduire de leur bénéfice imposable les sommes provisionnées dans le but de couvrir la rémunération des salariés de ce groupement, dans la limite de 10 000 euros par exercice et par groupement. Afin de bénéficier de cet avantage fiscal, les sommes concernées doivent :

- être inscrites à un compte d'affectation spéciale ouvert auprès d'un établissement de crédit ;

- provenir des recettes de l'exercice des membres du groupement ;

- être utilisées au cours des cinq exercices qui suivent leur versement sur le compte du groupement.

Lorsque les sommes déposées ne sont pas utilisées au cours des cinq années suivantes, ou lorsqu'elles sont utilisées à d'autres fins que celles prévues, le montant correspondant est rapporté au résultat de l'exercice au cours duquel cette utilisation a été effectuée.

Ce plafond de 10 000 euros apparaît toutefois trop faible dans le cas de groupements employant plus d'une vingtaine de salariés , ou même moins si les salariés bénéficient de rémunérations supérieures, ou en cas de difficultés économiques ou de défaillances durables et/ou simultanées de plusieurs membres du groupement. Comme l'explique l'évaluation préalable du présent article, « le maintien de la situation actuelle peut fragiliser certains groupements et peut constituer un frein à la création de nouveaux groupements ou à l'adhésion de nouvelles entreprises à des groupements existants. Il conduit également à limiter les embauches au sein d'un groupement d'employeurs ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Afin de mettre fin aux problèmes exposés ci-dessus, le présent article propose de permettre aux membres d'un groupement d'employeurs de déduire une somme supérieure au plafond actuel de 10 000 euros, dans la limite de 2 % de leur masse salariale .

Il existerait dès lors deux plafonds, l'un en valeur absolue, l'autre en proportion de la masse salariale, au choix de l'entreprise ou de l'association membre du groupement. Le recours au second plafond trouve à s'appliquer dès lors que l'entreprise dépasse les 500 000 euros de masse salariale (2 % x 500 000 = 10 000 euros). Ce sont donc 2 400 groupements qui seraient concernés, sur un total de 4 500 groupements existants en France

Sur cette base, le coût de cette modification est évalué à 2 millions d'euros par an pour l'État, qui viendraient d'ajouter aux 6 millions d'euros par an que représente le dispositif dans sa version actuelle 124 ( * ) , soit un total de 8 millions d'euros par an.

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les groupements d'employeurs constituent un outil important au service des TPE et des PME. À cet égard, le dispositif proposé permettra de favoriser leur développement, au-delà d'ailleurs du seul secteur agricole, et donc de favoriser les embauches sous la forme d'emplois partagés . À cet égard, votre rapporteur général approuve l'élargissement de la possibilité de déduction fiscale des sommes provisionnées pour le versement des salaires et des charges sociales afférents.

Le choix d'un plafond en proportion de la masse salariale des membres du groupement permet d' éviter tout effet d'aubaine , ce que n'aurait pas permis un relèvement du plafond de 10 000 euros en valeur absolue. Par ailleurs, si le montant de 2 % est relativement faible, il correspond à la demande des groupements d'employeurs eux-mêmes, et paraît à ce titre suffisant.

La mesure proposée fait partie des 18 annonces faites par le Premier ministre le 9 juin 2015 (mesure n° 12), à l'occasion de sa conférence de presse sur les mesures en faveur de l'emploi dans les TPE et les PME. Il s'agit toutefois d'une mesure relativement simple à mettre en oeuvre, tout comme les autres mesures du plan du Gouvernement, alors même que celui-ci repousse certains des chantiers les plus ambitieux et les plus importants pour les TPE et les PME : simplification du code du travail et de la fiscalité, réforme en profondeur du régime social des indépendants (RSI) etc.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5 bis (nouveau) (Art. 214 du code général des impôts) - Extension de l'exonération d'impôt sur les sociétés de la quote-part des bénéfices distribuée aux travailleurs pour les sociétés coopératives de production (Scop) ayant constitué un groupement

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre aux sociétés coopératives de production (Scop) qui ont constitué un groupement de Scop de continuer à bénéficier de la déduction de la part des bénéfices nets distribuée aux travailleurs au titre des bénéfices imposables.

I. LE DROIT EXISTANT

Les sociétés coopératives de production (Scop) sont des sociétés coopératives, définies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives de production, dont certains des associés sont salariés de l'entreprise. Le statut de Scop est présent dans toutes les branches de l'activité économique, qu'il s'agisse des services (société Chèque Déjeuner ; Ethiquable , etc.), de l'artisanat ou de l'industrie ( Acome ; Sopelec , etc.).

A. LA DÉDUCTION DE L'ARTICLE 214 DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS

Le 2° de l'article 214 du code général des impôts (CGI) prévoit que les bénéfices des Scop qui sont distribués aux travailleurs de la société sont déduits du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés.

Cependant, le 7 ° de ce même article précise que cette déduction est admise seulement pour les Scop qui sont détenues à plus de 50 % par des associés coopérateurs . Deux exceptions sont toutefois d'ores et déjà prévues : les Scop d'amorçage, c'est-à-dire dans le cas où une société transformée en Scop s'engage à présenter, après un délai de sept années après la transformation de l'entreprise en Scop, une détention du capital à 50 % au moins par des salariés ; et les Scop qui sont détenues en majorité par une autre Scop pendant une durée maximale de dix ans.

B. LES GROUPEMENTS DE SCOP

Afin de favoriser la diffusion de la forme coopérative et les regroupements de Scop, l'article 29 de la loi n° 2014-856 du 3 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire a introduit la possibilité pour les Scop de former des groupements .

Il a, en particulier, consacré les groupements de Scop au sein d'un nouveau titre de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978, constitué des articles 47 bis à 47 septies . Il a, surtout, favorisé les prises de participation croisées entre les membres d'un groupement, notamment de la part du personnel salarié , permettant ainsi la constitution de grands groupes de Scop. L'objectif poursuivi était, selon notre collègue Marc Daunis, rapporteur du projet de loi au nom de la commission des affaires économiques, de constituer des « méga-Scop » qui « atteindraient une masse critique leur permettant de soutenir la concurrence face aux grands groupes intégrés de l'économie marchande, comme c'est le cas par exemple en Espagne » 125 ( * ) .

Cependant, si les groupements de Scop relèvent désormais d'un régime juridique spécifique favorable à leur développement, les participations croisées qu'ils impliquent n'ouvrent pas droit aux mêmes avantages fiscaux que les participations des travailleurs salariés . En particulier, si une Scop est détenue à plus de 50 % par des associés coopérateurs, d'autres Scop ou des salariés d'autres Scop dans le cadre d'un groupement, mais à moins de 50 % par des seuls associés coopérateurs, elle ne peut pas bénéficier de l'exonération d'imposition sur la quotepart des bénéfices distribués aux travailleurs prévue par l'article 214 du CGI.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale en séance publique à l'initiative de notre collègue député Yves Blein, après avis favorable de la commission des finances, a pour objet d' ouvrir l'exonération d'impôt précitée du 2° de l'article 214 du CGI aux Scop qui ont constitué un groupement .

Le Gouvernement a donné un avis favorable à cet amendement, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement qu'il a proposé, visant à préciser que l'exonération est ouverte à condition que les Scop qui ont constitué un groupement soient détenues à majorité par une ou plusieurs autres Scop de ce groupement ou par des salariés employés par ces dernières . Il s'agit en effet d'éviter que la simple adhésion à un groupement permette à une Scop de bénéficier de l'exonération d'impôt en question, indépendamment de la composition de son capital.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

En l'absence des dispositions fiscales permettant d'aligner le régime des Scop ayant adhéré à un groupement avec celui des Scop hors groupement, ce statut n'a pas encore connu le développement escompté . L'exposé des motifs de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale souligne ainsi que « si le dispositif fiscal continue à faire défaut, il n'y aura vraisemblablement pas la moindre création de groupements de Scop ».

En conséquence, la perte de recettes d'impôt sur les sociétés qu'entraîne cet amendement n'a pas été chiffrée à l'article d'équilibre .

En tout état de cause, votre rapporteur général souscrit à l'objectif de favoriser la constitution de groupements de Scop leur permettant d'atteindre une taille suffisante pour être compétitive d'un point de vue international . À cet égard, les articles 5 bis et 5 ter se bornent à tirer les conséquences, sur le plan fiscal, de la création des groupements de Scop, les Scop y adhérant devant bénéficier des mêmes avantages fiscaux que si elles n'y avaient pas adhéré.

Ainsi, le présent article permet aux Scop qui ont constitué un groupement, et dont le seuil de détention à 50 % par des associés coopérateurs qui ouvre le droit à l'exonération de l'article 214 du code général des impôts n'est plus atteint en raison des participations croisées auxquelles ils consentent dans le cadre du groupement, de continuer à bénéficier du dispositif d'exonération de la quote-part des bénéfices distribués aux salariés.

Il convient de souligner que le présent article, ainsi que l'article 5 ter , ont seulement pour objet de neutraliser les conséquences fiscales, pour les Scop, des participations croisées qu'elles-mêmes et leurs salariés consentent dans le cadre de la constitution d'un groupement de Scop . En effet, le groupement de Scop ne constitue pas, en tant que tel, un objet de droit fiscal.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5 ter (nouveau) (Art. 237 bis A du code général des impôts) - Extension de la provision pour investissement aux Scop ayant constitué un groupement

Commentaire : le présent article prévoit que le dispositif de la provision pour investissement assise sur la part supplémentaire versée à la réserve spéciale de participation au-delà de l'obligation légale par la société est également ouvert aux Scop qui ont constitué un groupement.

I. LE DROIT EXISTANT

La participation a « pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l'entreprise » (article L. 3322-1 du code du travail). Elle prend la forme d'une « participation financière à effet différé, calculée en fonction du bénéfice net de l'entreprise, constituant la réserve spéciale de participation » (article L. 3322-1 précité).

Elle est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés - tandis que l'intéressement demeure toujours facultatif. La formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) est fixée par l'article L. 3324-1 du code du travail .

Conformément aux règles du droit du travail, les entreprises peuvent déroger de manière plus favorable aux dispositions légales en matière de participation. Ce choix de distribuer une part plus importante des bénéfices sous forme de participation vient amputer les bénéfices de l'entreprise et, partant, réduire ses capacités d'investissement . En conséquence, l'article 32 de l'ordonnance du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés 126 ( * ) avait instauré une « provision pour investissement » , régie par le II de l'article 237 bis A du code général des impôts (CGI).

Cette provision permet à l'entreprise de déduire de son résultat fiscal un montant équivalent à un pourcentage de la part supplémentaire de participation versée à la RSP, avant même la réalisation d'un investissement.

Comme toute provision, la « provision pour investissement » est déductible du résultat fiscal . Dans les deux ans suivant sa constitution , elle doit être utilisée pour l'acquisition ou la création d'immobilisations .

Cela confère ainsi à l'entreprise un avantage de trésorerie - également présent si l'entreprise ne réalise pas d'investissement, puisqu'elle sera finalement imposée sur le montant en question, mais avec un décalage de deux ans.

Si elle n'est pas utilisée conformément à son objet (l'investissement), la provision est rapportée au bénéfice fiscal et imposée selon le droit commun de l'impôt sur les sociétés.

Cette provision réglementée, de nature purement fiscale, a pour objet de concilier une participation avantageuse pour les salariés sans pour autant réduire les capacités d'autofinancement - et donc d'investissement - de l'entreprise .

La provision pour investissement bénéficiait, jusqu'en 2012, à l'ensemble des entreprises. Cependant, l'article 13 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a supprimé cette provision à compter de 2012, la réservant aux seules sociétés coopératives de production, en application du 3 du II de l'article 237 bis A du CGI.

Les Scop peuvent, en application de ce dispositif, constituer une provision pour investissement équivalant à 100 % du montant de la part supplémentaire de participation versée à la RSP en sus du droit commun.

Ce dispositif n'est toutefois pas applicable aux Scop qui sont détenues, à plus de 50 %, par des associés non coopérateurs 127 ( * ) ou par des titulaires de certificats coopératifs d'investissement, sauf en cas de Scop d'amorçage 128 ( * ) .

Exemple chiffré

Une Scop S doit, en application du droit commun, constituer une réserve spéciale de participation (RSP) de 100 000 euros. Elle conclut un accord de participation dans lequel elle s'engage à augmenter de 30 % la RSP par rapport au droit commun. La réserve est donc portée à 130 000 euros.

La Scop peut passer une provision de 30 000 euros (100 % x 30 000) au titre de la « provision pour investissement » en franchise d'impôt.

Dans un délai de deux ans, elle acquiert un équipement de 30 000 euros. La provision est alors effacée. Dans le cas contraire, les 30 000 euros sont imposés.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale en séance publique à l'initiative de notre collègue député Yves Blein, après avis favorable de la commission des finances, a pour objet d' ouvrir le bénéfice de la provision pour investissement prévue à l'article 237 bis A du CGI aux Scop qui ont constitué un groupement .

Le Gouvernement a donné un avis favorable à cet amendement, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement qu'il a proposé, visant à préciser que la provision pour investissement bénéficie aux Scop qui ont constitué un groupement à condition que ces dernières soient détenues à majorité par une ou plusieurs autres Scop de ce groupement ou par des salariés employés par ces dernières. Il s'agit, là encore, d'éviter que la simple adhésion à un groupement permette à une Scop de bénéficier de la provision pour investissement, indépendamment de la composition de son capital.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Comme pour l'article 5 bis et pour les mêmes raisons, la perte de recettes induite par le présent article n'a pas été chiffrée à l'article d'équilibre .

A l'instar de l'article 5 bis , le présent article se borne à tirer les conséquences, sur le plan fiscal, de la création des groupements de Scop , les Scop y adhérant devant bénéficier des mêmes avantages fiscaux que si elles n'y avaient pas adhéré. Ainsi, le présent article permet aux Scop qui ont constitué un groupement, et dont le seuil de détention à 50 % par des associés coopérateurs qui ouvre le droit à la provision pour investissement de l'article 237 bis A du code général des impôts n'est plus atteint en raison des participations croisées auxquelles ils consentent dans le cadre du groupement, de continuer à bénéficier de ce dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5 quater (nouveau) (Art. 199 undecies B, 217 duodecies et 244 quater Q du code général des impôts) - Élargissement du crédit d'impôt en faveur des maîtres-restaurateurs

Commentaire : le présent article vise à étendre le crédit d'impôt en faveur des maîtres-restaurateurs aux entreprises dont un salarié, et non plus seulement le dirigeant, est titulaire de ce titre, et à recentrer les dépenses éligibles sur les seules dépenses d'investissement et d'audit externe.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE TITRE DE MAÎTRE-RESTAURATEUR

Afin de valoriser la cuisine traditionnelle française et l'excellence de ses professionnels, le décret n° 2007-1359 du 14 septembre 2007 a créé un titre de maître-restaurateur , délivré par le préfet du département pour une durée de 4 ans, sur le fondement d'un audit de conformité réalisé par des organismes certificateurs agréés, indépendants et dont la compétence dans le secteur de la restauration traditionnelle est reconnue. Initialement réservé aux dirigeants des entreprises, le titre de maître-restaurateur peut, depuis le décret n° 2015-348 du 26 mars 2015, être accordé à un salarié .

Concrètement, ce titre est accordé aux entreprises de restauration indépendantes qui respectent un cahier des charges précis , consistant notamment à servir des plats préparés sur place à base de produits majoritairement frais, à respecter un ensemble de règles garantissant une prestation de service de qualité, qu'il s'agisse de l'accueil, du service à table ou de la décoration, et à se conformer à la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité. Le titre est accordé sur la base de la qualification professionnelle du restaurateur ou de son chef cuisinier.

La création du titre de maître-restaurateur fait partie des mesures inscrites dans le « contrat de croissance en faveur de l'emploi et de la modernisation » signé le 17 mai 2006 entre l'État et les six organisations professionnelles les plus représentatives du secteur de la restauration. Le premier titre de maître-restaurateur a été remis le 22 avril 2008.

B. UN CRÉDIT D'IMPÔT RÉSERVÉ AUX SEULES DIRIGEANTS

Le titre de maître-restaurateur ouvre droit à un crédit d'impôt , institué par l'article 63 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 et codifié à l'article 244 quater Q du code général des impôts (CGI).

Ce crédit d'impôt est ouvert aux entreprises dont le dirigeant est titulaire du titre de maître-restaurateur .

Il est égal à 50 % des dépenses de modernisation engagées sur une durée maximale de 3 ans et pour un montant maximal de 30 000 euros, soit un crédit d'impôt pouvant atteindre 15 000 euros . Sont éligibles à la fois les dépenses d'investissement et certaines dépenses de fonctionnement courant (dépenses vestimentaires, petit équipement, formation du personnel à l'accueil, à l'hygiène, à la sécurité, aux techniques culinaires et à la maîtrise de la chaîne du froid etc.), ainsi que les dépenses d'audit externe permettant de vérifier le respect du cahier des charges relatif au titre de maître-restaurateur.

D'après l'exposé des motifs du présent article additionnel, 3 080 titres de maîtres-restaurateurs ont été attribués depuis la création du dispositif, et 1 400 entreprises ont bénéficié du crédit d'impôt en 2013 129 ( * ) . Pour mémoire, la France compte environ 100 000 restaurateurs traditionnels 130 ( * ) .

Le crédit d'impôt en faveur des maîtres-restaurateurs demeure donc un dispositif d'ampleur modeste mais en progression , dont le coût budgétaire est évalué à 6 millions d'euros pour 2016 et 2017 131 ( * ) , contre 4 millions d'euros en 2015. Ce dispositif été prorogé jusqu'au 31 décembre 2017 par l'article 13 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances initiale pour 2015, après plusieurs prorogations antérieures.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de nos collègues députés Dominique Lefebvre et Bruno Le Roux, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant :

- d'une part, à étendre le bénéfice du crédit d'impôt aux entreprises dont un salarié est titulaire du titre de maître-restaurateur , conformément à ce que prévoit le décret n° 2015-348 du 26 mars 2015 modifiant le décret initial n° 2007-1359 du 14 septembre 2007 précité ;

- d'autre part, à limiter les dépenses éligibles aux seules dépenses d'investissement et aux dépenses d'audit externe permettant de vérifier le respect du cahier des charges relatif au titre de maître-restaurateur, à l'exclusion de toute autres dépenses de fonctionnement courant .

Afin d'éviter tout effet d'aubaine, deux conditions sont prévues . D'abord, le contrat de travail doit avoir été conclu avec le salarié depuis au moins un mois, le cas échéant après une période d'essai, au 31 décembre de l'année au titre de laquelle le crédit d'impôt est demandé. Ensuite, il doit s'agir d'un contrat à durée indéterminée (CDI) ou d'un contrat à durée déterminée (CDD) pour une période d'un an , et pour un temps de travail qui ne peut être inférieur à la durée minimale d'un travail à temps partiel définie à l'article L. 3123-14-1 du code du travail, c'est-à-dire vingt-quatre heures hebdomadaires.

À cette fin, l'article 244 quater Q du code général des impôts serait modifié, et diverses modifications de coordination relatives à l'outre-mer seraient effectuées.

Le Gouvernement a émis un avis favorable à cet amendement. À l'inverse, la commission des finances de l'Assemblée nationale a émis un avis défavorable, la rapporteure générale du budget, Valérie Rabault, estimant que « cela fait quand même une dépense supplémentaire », et observant que le Gouvernement « a refusé des amendements moins coûteux ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Bien que d'ampleur modeste, le crédit d'impôt en faveur des maîtres restaurateurs constitue une forte incitation à investir dans la modernisation des établissements de restauration , afin d'offrir un service de qualité et une cuisine authentique. Rappelons à cet égard que le repas gastronomique à la française a été inscrit le 16 novembre 2010 au patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO).

À cet égard, il n'apparaît pas illégitime d'étendre ce dispositif aux entreprises dont un salarié, et non plus seulement le dirigeant, est titulaire du titre de maître-restaurateur . De fait, la qualité de la cuisine servie ne tient pas au statut juridique de la personne qui en a la charge. L'élargissement proposé correspond d'ailleurs à une demande de la profession.

Le coût de cet élargissement est évalué à « 6 à 10 millions d'euros » par la rapporteure générale du budget, Valérie Rabault, mais à seulement « moins de quelques dizaines de milliers d'euros » par notre collègue Dominique Lefebvre, auteur de l'amendement. La direction de la législation fiscale a en définitive indiqué que le coût actuel du crédit d'impôt étant de 6 millions d'euros, l'élargissement le majorerait de 0,5 million d'euros. En tout état de cause, votre rapporteur général note que l'élargissement du crédit d'impôt aux salariés titulaire du titre de maître-restaurateur s'accompagne d'un resserrement bienvenu des dépenses éligibles aux seules dépenses d'investissement et d'audit , même si celui-ci ne devrait pas permettre une compensation intégrale du surcoût.

Votre rapporteur général souligne néanmoins la nécessité de procéder à une évaluation de cette dépense fiscale, afin d'en cibler au mieux tous les paramètres , comme le prévoit l'article 23 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 : « Pour toute mesure, entrée en vigueur pour une durée limitée à partir du 1 er janvier 2015, de création ou d'extension d'une dépense fiscale (...), le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard six mois avant l'expiration du délai pour lequel la mesure a été adoptée, une évaluation de celle-ci et, le cas échéant, justifie son maintien pour une durée supplémentaire de trois années ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6 (Art. 39 AH du code général des impôts) - Prorogation du dispositif d'amortissement accéléré applicable au matériel de robotique industrielle

Commentaire : le présent article prévoit de proroger d'un an le dispositif d'amortissement accéléré sur vingt-quatre mois des robots industriels acquis par les PME mis en place par l'article 20 de la loi de finances pour 2014, en permettant aux PME d'en bénéficier pour les biens acquis ou créés jusqu'au 31 décembre 2016.

I. LE DROIT EXISTANT

A. DES DISPOSITIFS D'AMORTISSEMENT NON LINÉAIRES POUR ENCOURAGER L'INVESTISSEMENT

En application de l'article 39 du code général des impôts (CGI), le bénéfice net, ou bénéfice imposable, « est établi sous déduction de toutes charges », pour autant qu'elles soient exposées dans l'intérêt de l'entreprise, régulièrement comptabilisées, et qu'elles se traduisent par une diminution nette de l'actif de l'entreprise.

Les investissements réalisés par les entreprises ( immobilisations ) connaissent une usure dans le temps qui se traduit par une perte de valeur patrimoniale . Cette diminution de l'actif constitue une charge qui vient en déduction du bénéfice imposable : l'amortissement .

L'étalement dans le temps de la perte de valeur de l'investissement initial se traduit dans les modalités de calcul de l'amortissement . Trois grandes modalités sont possibles :

- l 'amortissement linéaire (consistant à appliquer une annuité constante sur l'ensemble de la durée normale d'utilisation) ;

- l 'amortissement dégressif (consistant à appliquer des annuités plus importantes pour les premières années d'utilisation du bien) ;

- les amortissements exceptionnels , prévus par des textes législatifs particuliers ou par la doctrine (soit sous la forme d'un amortissement consistant en une dotation supplémentaire la première année d'amortissement, soit sous la forme d'un amortissement accéléré , consistant à prévoir une période d'amortissement plus réduite).

Dans le cadre d'un amortissement accéléré , l'amortissement s'effectue sur le mode linéaire, mais sur une durée plus courte, définie par la loi. Par exemple, dans le cas d'un amortissement accéléré sur 24 mois, un investissement de 50 000 euros, mis en service le 1 er janvier de l'année N, pourra être amorti à hauteur de 25 000 euros au titre de l'année N et de 25 000 euros au titre de l'année N+1, au lieu d'être étalé sur sa durée normale d'utilisation de 10 ou 15 ans.

De façon générale, les amortissements dégressifs ou exceptionnels ont pour objet de favoriser l'investissement des entreprises en leur permettant d'augmenter les charges imputables aux bénéfices de la première ou des premières années de mise en service des immobilisations et, ainsi, de réduire leur impôt pour ces exercices. Pour l'État, ces possibilités d'amortissement se traduisent par un coût de trésorerie , dans la mesure où les charges venant en déduction de l'assiette de l'impôt sont « avancées » ou « anticipées » par rapport aux exercices suivants.

B. LE DISPOSITIF D'AMORTISSEMENT EXCEPTIONNEL DES ROBOTS INDUSTRIELS DANS LES PME

L'article 20 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 a mis en place, à l'article 39 AH du code général des impôts , un dispositif d' amortissement accéléré exceptionnel, sur vingt-quatre mois, pour l'investissement des petites et moyennes entreprises (PME) dans les robots industriels .

Les entreprises peuvent bénéficier de cet amortissement à plusieurs conditions :

- seules les PME au sens communautaire , telles que définies par le règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie), peuvent en bénéficier. Il s'agit, en pratique, des entreprises occupant moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 50 millions d'euros ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros ;

- sont concernés les investissements dans les robots industriels définis comme « manipulateurs multi-applications reprogrammables commandés automatiquement, programmables dans trois axes ou plus, qui sont fixés ou mobiles et destinés à une utilisation dans des applications industrielles d'automation », définition retenue par l'organisation internationale de normalisation (norme ISO 8373) ;

- seuls les investissements acquis ou créés entre le 1 er octobre 2013 et le 31 décembre 2015 sont éligibles ;

- enfin, le bénéfice du dispositif d'amortissement est, pour être compatible avec les règles européennes en matière d'aides d'État subordonné au respect du règlement de minimis 132 ( * ) , en application duquel le montant brut total d'aide sur trois exercices fiscaux ne peut dépasser 200 000 euros.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article a pour objet de prolonger d'une année supplémentaire le dispositif d'amortissement accéléré des robots industriels des PME . Ainsi, l'article 39 AH précité s'appliquerait aux robots acquis ou créés jusqu'au 31 décembre 2016 , et non plus jusqu'au 31 décembre 2015.

Par ailleurs, le présent article actualise la référence au règlement européen définissant les PME , qui est désormais le règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

*

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN DISPOSITIF CIBLÉ ET UTILE

Dans la mesure où ils permettent d'accélérer la déduction, au titre des bénéfices imposables, des investissements réalisés, les dispositifs d'amortissements accélérés ou dégressifs constituent des outils utiles pour renforcer la reprise économique et la croissance par l'investissement des entreprises .

Le Sénat, et en particulier sa commission des finances, ont déjà eu l'occasion de soutenir et de proposer des dispositifs d'amortissement non linéaires. En particulier, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, puis du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2014, votre commission des finances avait adopté un amendement visant à prévoir un dispositif d'amortissement dégressif accéléré pour l'ensemble des investissements industriels des PME .

Le Gouvernement, qui avait rejeté cette proposition pourtant adoptée par le Sénat à la quasi-unanimité de ses groupes politiques, a ensuite proposé, dans le cadre de l'examen du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques un dispositif de « sur-amortissement » consistant à permettre à toutes les entreprises de déduire de leur résultat imposable 40 % de la valeur des investissements réalisés, en plus de l'amortissement réalisé. La mesure, prévue par l'article 142 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, est codifiée à l'article 39 decies du code général des impôts . Ce dispositif, plus large dans son champ d'application, est également plus coûteux, puisqu'il entraîne une perte de recettes nette pour l'État, estimée à 2,5 milliards d'euros sur cinq ans, et non plus seulement une perte de trésorerie.

Il convient de souligner que le dispositif d'amortissement accéléré des robots industriels, prévu par l'article 39 AH du CGI, peut être cumulé avec celui du suramortissement prévu par l'article 39 decies . Ainsi, un même investissement de 100 000 euros dans un robot industriel, normalement amorti sur 10 ans, pourra bénéficier :

- d'une part, d'un amortissement accéléré sur 24 mois, soit une déduction de 50 000 euros la première année et 50 000 euros la deuxième année ;

- d'autre part, de la possibilité de déduire 40 % du montant de l'investissement, soit 40 000 euros, somme qui devra être répartie sur l'ensemble de la durée normale d'utilisation du bien (soit 4 000 euros par an pendant 10 ans).

Le présent dispositif présente comme avantage d'être ciblé sur un l'investissement dans la robotique industrielle, vecteur essentiel de la modernisation de notre appareil productif, et sur lequel les entreprises françaises enregistrent un retard significatif par rapport à leurs concurrentes européennes 133 ( * ) . D'après les données des professionnels, le nombre de robots installés par les entreprises a augmenté de 35 % entre 2013 et 2014.

B. UN DISPOSITIF AU COÛT LIMITÉ QUI PERMET D'EN PRÉVOIR L'EXTENSION

Le coût pour l'État du dispositif d'amortissement accéléré des robots industriels a fait l'objet d'un nouveau calcul par rapport à la première estimation réalisée au moment de sa présentation dans le projet de loi de finances pour 2014, qui estimait la perte de recettes à 4 millions d'euros en 2014, 12 millions d'euros en 2015 et 22 millions d'euros en 2016. Notre collègue François Marc, alors rapporteur général de la commission des finances, avait souligné le caractère « optimiste » de cette prévision , qui faisait le pari d'un fort effet incitatif de la mesure, alors même qu'une très faible partie des robots industriels sont installés par des PME 134 ( * ) .

Prenant acte du faible coût effectivement constaté sur les deux années d'application (soit 1 million d'euros en 2014 et 2 millions d'euros en 2015 d'après l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016), l'évaluation préalable annexée au présent article prévoit, sur la base d'une hypothèse d'acquisition de 220 robots par an dans les PME françaises, que le coût pour l'Etat de l'extension d'un an de la présente mesure sera de 700 000 euros en 2016, 1,6 million d'euros en 2017 et 500 000 euros en 2018 .

En conséquence, votre rapporteur général vous propose d'adopter deux amendements visant à étendre le bénéfice de cet amortissement accéléré :

- tout d'abord, il propose d'en élargir le bénéfice aux entreprises de taille intermédiaire présentant un chiffre d'affaires inférieur à 250 millions d'euros. En effet, au-delà des PME, ce sont les ETI qui concentrent les besoins pour ce type d'investissements industriels. Cet amendement avait déjà été adopté, à l'initiative de notre collègue François Marc, alors rapporteur général, par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2014. Au regard du faible nombre de robots industriels concernés, ainsi que de l'application du plafond de minimis, le coût de cet amendement est limité et peut être estimé à environ 5 millions d'euros.

- ensuite, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement prorogeant le dispositif jusqu'au 31 décembre 2017. En effet, sa prorogation sur une seule année, jusqu'au 31 décembre 2016, n'est pas cohérente avec la durée sur laquelle se prépare et se finance un tel investissement, en particulier dans une PME. Notre collègue députée Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, l'a noté dans son rapport général, en soulignant que l'on pouvait « s'interroger sur l'impact qu'aura la prorogation de cette mesure d'amortissement exceptionnel d'une année, compte tenu du temps nécessaire pour élaborer un projet de robotisation dans une petite entreprise - environ dix-huit mois, d'après les organisations professionnelles ». Ainsi, la prorogation, limitée à une seule année, présenterait davantage un effet d'aubaine pour les entreprises qui auraient, en tout état de cause, acquis un robot, qu'un véritable effet incitatif. Cet amendement présente un coût nul en 2016, et un coût de 700 000 euros en 2017.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6 bis (nouveau) (Art. 39 du code général des impôts) - Réduction à trois fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale du plafonnement de la déductibilité des indemnités de cessation des fonctions de mandataire social ou de dirigeant au titre de l'impôt sur les sociétés

Commentaire : le présent article prévoit que les indemnités perçues par les dirigeants ou les mandataires sociaux à raison de la cessation de leurs fonctions (ou « parachutes dorés ») seront déductibles du bénéfice imposable de l'entreprise jusqu'à trois fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale, contre six fois aujourd'hui.

I. LE DROIT EXISTANT

Les indemnités perçues par les dirigeants ou les mandataires sociaux à raison de la cessation de leurs fonctions 135 ( * ) (ou « parachutes dorés ») sont, comme toute rémunération, des charges pour l'entreprise et sont donc, à ce titre, déductibles du bénéfice imposable , conformément au principe général posé par l'article 39 du code général des impôts (CGI).

Cependant, le 5 bis de l'article 39 du CGI prévoit un plafonnement de cette déductibilité : ainsi, ces indemnités ne peuvent être déduites du bénéfice imposable que jusqu'à un montant équivalent à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 228 240 euros . Il convient de souligner que cette disposition a vocation à préciser, par l'intermédiaire d'un plafonnement exprimé en valeur absolue, le principe, déjà prévu par l'article 39, selon lequel les rémunérations ne sont déductibles que dans la mesure où elles « correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ». En effet, seules les dépenses qui sont exposées dans l'intérêt de l'exploitation de l'entreprise peuvent être déduites de son résultat.

Le plafonnement à six fois le montant du PASS a été introduit par l'article 21 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 , qui avait été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture à l'initiative de Didier Migaud, alors président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, et de notre collègue Michel Bouvard, alors député.

En séance, Didier Migaud avait notamment indiqué qu'« il est anormal que l'État contribue, en quelque sorte, à des rémunérations décidées par un conseil d'administration ou un directoire d'entreprise . Dès lors que ceux-ci souhaitent rémunérer un dirigeant, il n'est pas illégitime que cette rémunération soit prélevée sur les bénéfices et ne puisse être totalement déduite de l'impôt sur les sociétés : elle doit être prise en charge par les actionnaires eux-mêmes » 136 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault, rapporteur générale du budget, après que le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

Il a pour objet de modifier le 5 bis de l'article 39 du CGI, afin d'abaisser le plafond de déductibilité des indemnités de cessation de fonctions au titre de l'impôt sur les sociétés de six fois (228 240 euros) à trois fois (114 120 euros) le montant du plafond annuel de la sécurité sociale .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale en « miroir » de l'article 2 bis précédemment mentionné et afin de conserver un plafonnement harmonisé, en ce qui concerne l'imposition des dirigeants et celle des entreprises.

L'adoption de ces articles s'inscrit dans une actualité récente concernant des indemnités de départ particulièrement élevées de dirigeants de grandes entreprises françaises.

Pour autant, le durcissement du régime fiscal proposé par cet article ne devrait avoir qu' une faible incidence sur les indemnités de cessation forcée de fonctions les plus élevées , qui sont bien supérieures au plafond actuellement en vigueur. Comme indiqué précédemment dans le commentaire de l'article 2 bis , des dispositions en matière de gouvernance d'entreprise, en particulier par une meilleure association des actionnaires à la détermination ou à l'autorisation de ce type de rémunérations, ainsi que des évolutions dans le cadre fixé par le code Afep-MEDEF en la matière, pourraient avoir un rôle plus décisif que la fiscalité pour réguler ce type de décisions.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6 ter (nouveau) (création d'un article 39 decies A dans le code général des impôts) - Amortissement exceptionnel des investissements réalisés pour l'acquisition de poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant

Commentaire : le présent article prévoit l'instauration d'un dispositif de suramortissement fiscal temporaire au profit de l'acquisition de poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 142 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 137 ( * ) , dite loi « Macron », a introduit un dispositif temporaire d'amortissement supplémentaire au profit de certains types d'investissements réalisés entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2016, codifié à l'article 39 decies du code général des impôts (CGI) .

Cette disposition répond à l'un des engagements pris par le Premier ministre au cours de sa conférence de presse du 8 avril 2015 consacrée à la relance de l'investissement .

L'objectif poursuivi par cet avantage fiscal exceptionnel dit de « suramortissement » est de favoriser l'investissement productif industriel .

Concrètement, il s'agit d'une déduction du résultat fiscal d'un montant égal à 40 % de l'investissement réalisé , réservée aux investissements éligibles à l'actuel dispositif d'amortissement dégressif et qui relèvent de l'un des cinq catégories suivantes de biens d'équipement :

- matériels et outillages utilisés pour des opérations industrielles de fabrication ou de transformation ;

- matériels de manutention ;

- installations destinées à l'épuration des eaux et à l'assainissement de l'atmosphère ;

- installations productrices de vapeur, de chaleur ou d'énergie, à l'exception des installations utilisées dans le cadre d'une activité de production d'énergie électrique bénéficiant de l'application d'un tarif réglementé d'achat de la production ;

- matériels et outillages utilisés à des opérations de recherche scientifique ou techniques.

Ce dispositif de suramortissement constitue une mesure de relance conjoncturelle destinée à accompagner la reprise de la croissance et à rattraper le retard de la France en matière d'investissement privé.

Le coût du « suramortissement Macron » est estimé à 2,5 milliards d'euros sur 5 ans , soit 500 millions d'euros en année pleine .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés de plusieurs groupes 138 ( * ) , avec l'avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement 139 ( * ) .

Il vise à créer un dispositif de suramortissement temporaire , sur le modèle de celui instauré par l'article 142 de la loi « Macron », au profit des poids lourds fonctionnant exclusivement au moyen de l'énergie gaz naturel (GNV) et biométhane carburant (bioGNV), pour une durée de deux ans, entre le 1 er janvier 2016 et le 31 décembre 2017.

Pour les auteurs de l'amendement, ce dispositif vise à « stimuler l'investissement des petites et moyennes entreprises (PME) de transport routier en les incitant à l'acquisition de poids lourds fonctionnant au GNV  et au bioGNV, contribuant ainsi à la transition énergétique et à l'amélioration de la compétitivité des entreprises françaises mais aussi au développement de la méthanisation agricole » 140 ( * ) .

En effet, « bien que ces poids lourds au GNV/bioGNV soient plus compétitifs à l'utilisation, il existe cependant un surcoût à l'achat qui constitue un frein pour les entreprises du transport routier de marchandises souhaitant investir dans cette solution et qui sont à 90 % des PME » 141 ( * ) .

Enfin, le coût de cette mesure serait de l'ordre de 5 millions d'euros 142 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif de suramortissement temporaire , qui vise en premier lieu l'investissement productif industriel, n'apparaît pas comme l'outil le plus efficace pour répondre à des objectifs environnementaux .

Par ailleurs, votre rapporteur général relève que le dispositif instauré par la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques intègre déjà dans son champ les engins agricoles à caractère productif tels que les tracteurs, les moissonneuses-batteuses ou les cuves à lisier, qui peuvent par exemple fonctionner au gaz naturel .

De surcroît, le gaz naturel bénéficie d'un taux réduit sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) , bien inférieur à celui qui est appliqué sur le gazole et l'essence.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 7 (Art. 60 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 ; art.1387 A du code général des impôts) - Exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de contribution foncière des entreprises (CFE) pour les activités pionnières de méthanisation agricole

Commentaire : à compter de 2016, le présent article vise à exonérer de plein droit de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) les installations et bâtiments affectés à la méthanisation agricole et achevés avant le 1 er janvier 2015. Il prévoit également, pour les impositions dues au titre de 2015, un dégrèvement de plein droit de TFPB et de CFE et, le cas échéant, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) afférentes aux installations et activités de méthanisation agricole antérieures au 1 er janvier 2015.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'EXONÉRATION FACULTATIVE INTRODUITE PAR LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2013

Après un déclin dans les années 1980 et 1990, la méthanisation 143 ( * ) est redevenue une priorité des politiques publiques environnementales , comme en témoigne le Grenelle de l'environnement et les deux lois qui l'ont suivi en 2009 et 2010 : la loi Grenelle I puis la loi Grenelle II 144 ( * ) .

Plus récemment, la ministre de l'écologie, de l'énergie et du développement durable et le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ont lancé, le 29 mars 2013, le plan « énergie méthanisation autonomie azote » , dans le cadre du débat national sur la transition énergétique. Ce plan vise à développer un modèle français de méthanisation agricole , privilégiant des installations collectives, des circuits d'approvisionnement courts et des technologies et savoir-faire français. Il s'agit, en particulier, d' encourager les exploitants agricoles à valoriser leurs effluents d'élevage par la méthanisation , au plus près de leur lieu de production. Le développement de la « méthanisation à la ferme » présente plusieurs avantages : outre la production d'énergie renouvelable , il favorise la réduction du coût des intrants et la dynamique des territoires ruraux , qui sont autant de moyens pour répondre aux enjeux environnementaux et énergétiques. L'objectif poursuivi par le plan est notamment la mise en place de 1 000 installations de méthanisation agricoles d'ici 2020 .

Dans ce contexte, suite à un amendement du Gouvernement, a été adopté l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2013 145 ( * ) , codifiée à l'article 1387 A du code général des impôts. Cet article a instauré la possibilité, pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, d'exonérer de TFPB , pour une durée de cinq ans, les installations et bâtiments affectés à la production de biogaz, d'électricité et de chaleur par la méthanisation.

Cette exonération, temporaire et limitée à la seule TFPB, étant facultative, c'est-à-dire décidée par délibération des collectivités territoriales, il n'a pas été prévu que l'État compense aux collectivités territoriales qui choisiraient de l'appliquer les pertes de recettes engendrées . S'agissant des agriculteurs, cette nouvelle exonération venait compléter l'exonération d'impôt foncier applicable à tous les bâtiments ruraux affectés à un usage agricole 146 ( * ) , sachant que la doctrine fiscale avait choisi d' exclure de son champ d'application les installations et bâtiments dédiés à la méthanisation agricole .

Du point de vue fiscal, l'activité de méthanisation est donc considérée comme une activité industrielle et les installations et bâtiments de méthanisation agricole sont assimilés à des établissements industriels, ce qui conduit à des montants de TFPB et de CFE élevés ; en effet, la valeur locative des établissements industriels est accrue parce qu'elle fait l'objet d'un calcul selon la « méthode comptable » , prévue à l'article 1499 du code général des impôts 147 ( * ) . Ces surcoûts freinent la méthanisation agricole, qui nécessite des investissements conséquents pour les agriculteurs 148 ( * ) .

B.  L'EXONÉRATION DE PLEIN DROIT PRÉVUE PAR LA LOI DE FINANCES POUR 2015

L'ambition de développement de la méthanisation agricole a été réaffirmée lors de la communication relative à la transition énergétique pour la croissance verte, présentée en conseil des ministres le 30 juillet 2014 par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Afin de mettre en place une fiscalité incitative, stable et adaptée à ce type d'activité, l' article 60 de la loi de finances pour 2015 149 ( * ) a conduit à exonérer de plein droit de TFPB et de CFE les installations et bâtiments affectés à la méthanisation agricole , pendant les sept premières années qui suivent leur achèvement 150 ( * ) . À la différence du dispositif introduit par la loi de finances rectificative pour 2013, l'exonération de plein droit est ciblée sur la méthanisation agricole. Outre la condition relative au statut d'exploitant agricole, le bénéfice de l'exonération de TFPB et de CFE est conditionné par la nature des intrants utilisés : ces derniers doivent, aux termes de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, auquel l'article renvoie, provenir « pour au moins 50 % de matières provenant d'exploitations agricoles ».

Le bénéfice de ces exonérations est subordonné au respect de la législation européenne en matière d'aides d'État et, plus concrètement, aux plafonds en vigueur des aides de minimis 151 ( * ) .

Pour les installations et les bâtiments achevés avant le 1 er janvier 2015 , dits « pionniers » et qui seraient au nombre de 160, l'exonération de plein droit de TFPB et de CFE ne s'applique pas mais le bénéfice de l'exonération facultative de TFPB est devenu possible grâce au A du I de l'article 60 de la loi de finances pour 2015, sous réserve d'une délibération des collectivités territoriales instituant une telle exonération prise avant le 31 décembre 2014.

Lors de l'annonce du plan de soutien à l'élevage le 22 juillet dernier, qui vise à répondre aux difficultés conjoncturelles du secteur, le Gouvernement a annoncé une extension du bénéfice de l'exonération de plein droit de TFPB et de CFE aux installations et activités de méthanisation agricole actuellement non bénéficiaires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Dans ce contexte, le présent article étend, à compter des impositions dues au titre de 2016, aux installations et activités de méthanisation agricole antérieures au 1er janvier 2015 le bénéfice des exonérations de plein droit de TFPB et de CFE accordées, pour une durée de sept ans, aux installations et activités de méthanisation agricole postérieures au 1 er janvier 2015.

Pour les impositions dues au titre de 2015 , il prévoit un dégrèvement de plein droit de TFPB de CFE et, le cas échéant, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Par coordination, le III du présent article supprime l'exonération facultative de TFPB et de CFE dont peuvent bénéficier les installations et activités de méthanisation antérieures au 1 er janvier 2015.

En vue d'offrir un délai supplémentaire aux agriculteurs concernés, la date limite de dépôt de la déclaration pour bénéficier des exonérations est repoussée du 1 er janvier 2016 au 1 er mars 2016 . Ce report ne vaudrait que pour la seule année 2016 et se justifie par l'adoption tardive en 2015 du présent projet de loi de finances pour 2016.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue rapporteure générale, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel au présent article.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général comprend les motivations du Gouvernement qui vise à permettre aux agriculteurs de développer d'autres sources de revenus. Il observe que le dispositif prévu au présent article n'a pas pour objectif le développement de la filière de méthanisation comme les dispositions prises précédemment mais de mettre un terme à une inégalité de traitement entre les agriculteurs ayant développé des activités de méthanisation avant le 1 er janvier 2015 et ceux ayant bénéficié du régime fiscal plus favorable prévu par la loi de finances pour 2015.

Il relève également que le présent article ne prévoit aucune compensation de ces exonérations.

Du côté des agriculteurs , il s'agirait d'un gain annuel moyen estimé à 24 000 euros sur la durée de l'exonération, alors que du côté des collectivités territoriales , le coût serait nul en 2015 - en raison de la prise en charge de la mesure de dégrèvement par l'État - puis de l'ordre de 3,8 millions d'euros en 2016 , avant de se réduire progressivement 152 ( * ) : 3,7 millions d'euros en 2017, 3,5 millions d'euros en 2018, 3,3 millions d'euros en 2019, 2,3 millions d'euros en 2020 et, enfin, 1,4 million d'euros en 2021. Sur la totalité de la période de sept ans couverte, soit 2015-2021, et pour les seules collectivités territoriales concernées, le coût global des nouvelles exonérations proposées par le présent article devrait représenter 18 millions d'euros .

Même si elle doit être regrettée sur le plan des principes, l' absence de compensation de cette nouvelle exonération de plein droit, qui a pour but d'alléger les charges fiscales pesant sur les activités pionnières de méthanisation, est acceptable à la lumière des montants en jeu et au regard du fait que le dispositif en vigueur ne prévoyait pas non plus de compensation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7 bis (nouveau) (Art. 39 decies du code général des impôts) - Éligibilité des associés des coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA) à la déduction exceptionnelle en faveur de l'investissement

Commentaire : le présent article prévoit l'éligibilité des associés des coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA) à la déduction exceptionnelle en faveur de l'investissement prévue par l'article 142 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques du 6 août 2015.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 142 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (loi dite « Macron ») a mis en place un mécanisme de suramortissement pour l'investissement productif industriel .

Compte-tenu de la faiblesse de l'investissement productif, qui pose un problème de compétitivité, il s'agit de permettre aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu selon le régime réel d'imposition de déduire de leur résultat imposable une somme égale à 40 % de la valeur d'origine de biens limitativement énumérés , acquis ou fabriqués à compter du 15 avril 2015 et jusqu'au 14 avril 2016 .

Contrairement à l'amortissement accéléré, qui est la solution classiquement adoptée, le dispositif de suramortissement ne constitue pas une mesure de trésorerie mais une subvention à l'investissement, au travers d'une baisse du taux d'imposition.

Le champ de ce dispositif est précisé par une instruction fiscale du 2 septembre 2015 153 ( * ) . Le dispositif est assez limitatif puisqu'il concerne le matériel utilisé pour des opérations industrielles de fabrication, de transformation et de manutention ; installations d'épuration des eaux, d'assainissement de l'atmosphère et de production d'énergie à l'exception des installations servant à produire une énergie électrique bénéficiant de l'application d'un tarif réglementé d'achat de la production et aux matériels pour des opérations de recherche. Il exclut les biens de nature immobilière et les matériels de magasinage et de stockage .

Le dispositif concerne d'ores et déjà les agriculteurs au titre de divers biens agricoles : tracteurs, moissonneuses batteuses, ensileuses, machines à vendanger, chargeurs télescopiques, épandeurs, semoirs, pulvérisateurs, matériels pour travail du sol, installations d'irrigation et de drainage (hors immobilier), cuves de vinification, robots de traite et, enfin, certaines installations d'épuration des eaux, cuves et poches destinées au recueil des effluents d'élevage.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté le présent article qui vise à permettre aux associés des coopératives d'utilisation de matériel agricole 154 ( * ) (CUMA) de bénéficier de la déduction exceptionnelle en faveur de l'investissement prévue par l'article 142 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Exonérées d'impôt sur les sociétés, les CUMA ne peuvent pas aujourd'hui bénéficier de la déduction pour les investissements collectifs qu'elles réalisent : l'acquisition de matériels affectés à une même activité agricole peut en effet ouvrir droit à la déduction si elle est effectuée directement par une entreprise agricole mais pas lorsqu'une CUMA se porte acquéreur. Comme l'a indiqué le Gouvernement, « cette distinction selon le mode de détention juridique des matériels n'a pas de sens du point de vue économique. Elle est en outre contradictoire avec l'effort de rationalisation de la dépense que font les exploitants en choisissant d'être associés coopérateurs ».

Il est donc proposé de transférer aux associés coopérateurs des CUMA, à proportion de l'utilisation des biens éligibles par lesdits associés, la déduction exceptionnelle qui ne peut pas être pratiquée par les CUMA elles-mêmes compte tenu de leur exonération d'impôt sur les sociétés.

Le dispositif concernerait, en outre, les biens acquis ou fabriqués à compter du 15 octobre 2015 et jusqu'au 14 avril 2016 .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est favorable au dispositif proposé qui permettra d'inciter les CUMA à investir dans des matériels plus performants , ce qui aura pour effet d' accroître la compétitivité de nos exploitations agricoles qui en ont le plus grand besoin.

Il attend du Gouvernement la mise en oeuvre rapide de la mesure, qui devra, de plus, être rendue visible aux yeux des acteurs concernés. En effet, aux termes du présent article, le dispositif ne concernera que les biens acquis ou fabriqués à compter du 15 octobre 2015 au 14 avril 2016 , soit une période plus restreinte que celle applicable pour les investissements réalisés en direct, le dispositif issu de la loi dite « Macron » étant applicable depuis le 15 avril 2015.

D'après le Gouvernement, l'estimation du coût de la mesure est de 2 millions d'euros par an en 2016, 2017 et 2018. Il devrait décliner ensuite et atteindre au total environ 20 millions d'euros sur 10 ans.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8 (Art. 266 sexies, 266 septies, 266 nonies, 266 terdecies du code des douanes, art. 1600-0 P, 1600-0 Q et 1647 du code général des impôts, art. L. 5121-18 du code de la santé publique, et art. L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques) - Suppression de taxes à faible rendement

Commentaire : le présent article prévoit de supprimer trois taxes à faible rendement à compter de 2016, à savoir la taxe générale sur les activités polluantes pour l'autorisation et l'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, la taxe sur les premières ventes de produits cosmétiques et la taxe administrative sur les opérateurs de communication électronique.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES COMPOSANTES DE LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES SUR LES INSTALLATIONS CLASSÉES POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

Codifiée aux articles 266 sexies , septies , nonies et terdecies du code des douanes, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) doit être acquittée par les exploitants d'une installation classée dans deux cas :

- lors de la délivrance de l'autorisation d'exploitation par arrêté préfectoral, qu'il s'agisse d'une autorisation initiale, d'une autorisation d'extension, d'une autorisation de changement d'exploitation ou du renouvellement d'une autorisation ;

- lors de l'exploitation au cours d'une année civile d'une installation présentant, par sa nature ou son volume, des risques particuliers pour l'environnement. La liste activités concernées est définie dans l'annexe B de l'article R. 511-9 du code de l'environnement.

Les services chargés de l'inspection des installations classées dressent la liste des installations classées redevables, fixent le montant de la taxe due ainsi que, le cas échéant, des pénalités en cas de retard de paiement, et procèdent au recouvrement de la taxe.

Le montant de la taxe due est déterminé à partir des taux prévus par l'article 266 nonies du code des douanes . Pour les installations soumises à la part « exploitation » de la TGAP sur les ICPE, ce montant varie également selon un coefficient multiplicateur compris entre un et dix en fonction de la nature et du volume de leurs activités. Depuis le 1 er janvier 2013, ces taux évoluent chaque année en fonction de l'indice des prix à la consommation hors tabac de l'avant-dernière année.

Montants de la TGAP sur les ICPE

(en euros)

Opérations imposables

Quotité

Délivrance d'autorisation

Artisan n'employant pas plus de deux salariés

501,61

Autres entreprises inscrites au répertoire des métiers

1 210,78

Autres entreprises

2 525,35

Exploitation au cours d'une année civile (1)

Installations enregistrées dans le cadre du système communautaire de management environnemental et d'audit (EMAS) 155 ( * ) ou certifiées ISO 14001

339,37

Autres installations

380,44

(1) Les montants présentés sont des tarifs de base, qui sont multipliés par un coefficient multiplicateur compris entre un et dix fixé par décret en Conseil d'État, en fonction de la nature et du volume des activités menées.

Source : article 266 nonies du code des douanes

La TGAP sur les ICPE représente un montant d'environ 25 millions d'euros 156 ( * ) , qui est affecté à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) dans la limite du plafond de taxe affecté déterminé chaque année en loi de finances 157 ( * ) .

B. LA TAXE SUR LES PREMIÈRES VENTES DE PRODUITS COSMÉTIQUES

L'article 1600-0 P du code général des impôts, créé, à l'initiative de notre collègue Alain Milon, par l'article 26 de la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, prévoit une taxe sur la première vente de produits cosmétiques .

Cette taxe est due par les personnes assujetties à la TVA qui effectuent la première vente en France de produits cosmétiques, soit en tant que fabricants, soit en tant qu'importateurs. Elle est assise, au taux de 0,1 %, sur le montant hors taxe des ventes de produits cosmétiques réalisées au cours de l'année civile précédente .

Cette taxe a été conçue, dans un souci d'équité fiscale, comme le « miroir » de la taxe sur les premières ventes de médicaments ayant bénéficié d'une autorisation de mise sur le marché et de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux, qui finançaient toutes deux, jusqu'en 2012, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), dès lors que cette dernière a également pour mission de contrôler les produits cosmétiques. Depuis 2012, la taxe est cependant affectée à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

Cette taxe a rapporté 6 millions d'euros en 2014 , d'après l'évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016.

C. LA TAXE ADMINISTRATIVE SUR LES OPÉRATEURS DE COMMUNICATION ÉLECTRONIQUE

Aux termes de l'article 45 de loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987, dans sa rédaction issue de l'article 132 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les entreprises qui exercent les activités de communications électroniques mentionnées à l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques sont assujetties à une taxe administrative . Cette taxe avait historiquement pour objet, comme le précise le m du I de l'article 33-1 précité, de « couvrir les coûts administratifs » liés à la gestion des autorisations administratives auxquelles sont soumises ces communications.

L'assiette de la taxe dépend de plusieurs critères, en particulier la taille de l'entreprise :

- les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 million d'euros, ainsi que celles qui exercent cette activité à titre expérimental sur trois ans maximum, sont exonérées ;

- les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 1 et 2 millions d'euros sont redevables d'un montant qui dépend de leur chiffre d'affaires (CA) hors taxes lié aux activités de communications électroniques (CA/50-20 000) ;

- les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 2 et 800 millions d'euros sont redevables d'un montant forfaitaire de 20 000 euros ;

- les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 800 millions d'euros et qui figurent sur une liste définie par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), sont redevables d'un montant de 80 000 euros.

En outre, le montant est dû est « divisé par deux lorsque les activités visées au premier alinéa sont limitées aux départements d'outre-mer ou couvrent au plus un département métropolitain ».

Cette taxe rapporte, d'après l'évaluation préalable annexée au présent article, entre 4 et 5 millions d'euros par an , pour 1 576 redevables.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article a pour objet de supprimer les trois taxes précédemment mentionnées.

Le I supprime les dispositions des articles 266 sexies , 266 septies , 266 nonies et 266 terdecies du code des douanes relatives à la TGAP sur les ICPE. L'évaluation préalable accompagnant le projet de loi de finances invoque deux raisons principales pour justifier cette suppression. D'une part, cette taxe n'aurait pas de caractère incitatif en termes d'émission de polluants puisque son montant est forfaitaire et « ne tient pas compte du niveau des rejets ni des mesures de diminution des rejets mises en oeuvre par l'exploitant ». D'autre part, cette taxe serait complexe à calculer et à recouvrir ; en conséquence, « la mesure proposée permettrait également aux services déconcentrés du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie de concentrer leurs travaux sur leurs missions à fort enjeu » .

Le II abroge les articles 1600-0 P et 1600-0 Q du code général des impôts relatifs à la taxe sur la première vente de produits cosmétiques. Le présent article procède par ailleurs à des mesures de coordination au sein de l'article L. 1647 du même code et de l'article L. 5121-18 du code de la santé publique.

Le III supprime la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 5121-18 du code de la santé publique aux termes de laquelle les redevables de la taxe sur les premières ventes de produits cosmétiques devaient adresser chaque année, au plus tard le 31 mars, une déclaration à l'ANSM, fournissant des informations relatives aux ventes réalisées au cours de l'année civile précédente et soumises à la taxe.

Enfin, le IV prévoit l'abrogation de l'article 45 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987 relatif à la taxe sur les opérateurs de communication électronique ainsi que, par coordination, les dispositions concernées de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques. En effet, l'assiette de la taxe, relativement complexe, est peu lisible pour les petits opérateurs , ce qui est source d'importantes difficultés de recouvrement (taxation d'office, réclamations, relances, etc.) pour l'ARCEP et la direction générale des finances publiques. Ainsi, d'après l'évaluation préalable annexée au présent article, « le taux de recouvrement des sommes facturées est inférieur à 80 % (à comparer à un taux de 98 % pour l'ensemble des taxes et redevances pour lesquelles l'ARCEP est ordonnateur) ».

Cette dernière abrogation s'appliquerait, en application du V du présent article, à la taxe établie au titre de l'année 2015, qui est due au 1 er mai 2016.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Deux amendements identiques, adoptés à l'initiative de notre collègue députée Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, et du groupe écologiste, avec un avis défavorable du Gouvernement , ont supprimé les dispositions du présent article visant à supprimer la TGAP sur les ICPE .

Tout en reconnaissant qu' « il ne serait pas absurde, d'un point de vue écologique, de privilégier une fiscalité fondée sur les résultats écologiques obtenus, ce qui permettrait alors de supprimer cette taxation forfaitaire des ICPE, dont la relative complexité et le caractère peu incitatif sont soulignés », la rapporteure générale a proposé de rétablir la TGAP sur les ICPE en raison de son intérêt budgétaire et du fait qu'elle porte sur des installations dangereuses.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA TIMIDE POURSUITE D'UN PREMIER MOUVEMENT CRÉÉ EN LOI DE FINANCES POUR 2015

Dans le cadre des assises de la fiscalité des entreprises, Pierre Moscovici, alors ministre de l'économie et des finances et Bernard Cazeneuve, alors ministre délégué au budget, avaient missionné l'inspection générale des finances (IGF) pour évaluer les taxes à faibles rendement . Ce rapport mettait en évidence que le système fiscal français comportait 179 taxes d'un rendement inférieur à 100 millions d'euros, pour un rendement cumulé de 5,3 milliards d'euros , contre seulement trois taxes inférieures à ce seuil en Allemagne et aucune au Royaume-Uni. Ce rapport proposait ensuite trois scénarii de réduction des taxes à faible rendement :

- un scenario bas : 67 taxes supprimées, 35 taxes regroupées, 17 taxes transformées en cotisations volontaires, pour un coût de 800 millions d'euros ;

- un scenario haut : 89 taxes supprimées, 22 taxes regroupées, 17 taxes transformées en cotisations volontaires, pour un coût de 2 milliards d'euros ;

- un scenario dit « de rupture » : 159 taxes supprimées, 23 taxes transformées en redevances, donc seulement 33 taxes conservées, pour un coût de 3 milliards d'euros.

Sur la base de ce rapport, remis début 2014, le Gouvernement a proposé, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, la suppression de sept taxes. Compte tenu de la taxe dont la suppression n'a pas été retenue - la TGAP sur les ICPE -, et de celle, les droits d'enregistrement des meubles corporels, dont la suppression a été ajoutée, l'article 20 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 a, en définitive, supprimé sept taxes, pour un montant total d'environ 4 millions d'euros . Ce montant doit être mis en regard de celui d'un milliard d'euros de taxes à faible rendement dont la suppression avait été annoncée par le ministre du budget Christian Eckert en 2014. Votre rapporteur général avait ainsi au l'occasion, dans son rapport général sur le projet de loi de finances pour 2015, de souligner que « le projet du Gouvernement et, plus encore, la version adoptée par l'Assemblée nationale relève davantage d'une simplification, sinon d'un toilettage, que d'une véritable entreprise de suppression de taxes ».

À cet égard, l'évaluation préalable annexée au présent article est révélatrice de cette ambition limitée , insistant essentiellement sur la « simplification » apportée par la suppression de ces taxes, à la fois pour les redevables, mais aussi pour les administrations, compte tenu des coûts de gestion, de recouvrement et de contrôle (pour la direction générale des finances publiques, pour l'ARCEP ou pour les directions régionales de l'environnement).

Ainsi, le présent article, en proposant à nouveau la suppression de la TGAP sur les ICPE et en proposant la suppression de deux nouvelles taxes, poursuit, avec la même timidité, l'effort engagé dans le cadre de la loi de finances pour 2015 .

La perte de recettes induite par le présent article tel que proposé par le Gouvernement est estimée, par l'évaluation préalable, à 36,7 millions d'euros, dont 30 millions d'euros pour l'État et 6,7 millions d'euros pour la CNAMTS , au titre de la suppression de la taxe sur la première vente de produits cosmétiques. Après sa modification et son adoption par l'Assemblée nationale, la perte de recettes pour l'État est réduite à 5 millions d'euros, la TGAP sur les ICPE étant maintenue .

B. RÉTABLIR LA SUPPRESSION DE LA TGAP SUR LES ICPE

La TGAP sur les ICPE ne poursuit pas à proprement parler de finalité écologique . Si elle s'applique à des installations qui sont classées car elles sont susceptibles de provoquer des pollutions ou des nuisances environnementales, elle n'est pas calculée en fonction du niveau des pollutions émises mais est appliquée de manière forfaitaire.

Par ailleurs, cette taxe n'a pas d'effets tangibles sur la décision d'implanter ou non une nouvelle installation classée, le montant moyen dû par site étant relativement faible (environ 2 300 euros par an). La réglementation applicable aux installations polluantes soumises à autorisation permet par ailleurs aux préfets d'autoriser ou de refuser l'installation d'un site classé pour des motifs de prévention des risques.

En outre, la TGAP sur les ICPE concerne un nombre peu important d'installations . La composante « autorisation » de la taxe concerne 1 200 installations par an . D'après les informations transmises à votre rapporteur général, ce nombre est en décroissance du fait du remplacement progressif du régime d'autorisation des installations par le régime d'enregistrement 158 ( * ) , qui n'est pas soumis à cette taxe, dans le cadre des mesures de simplification administrative. La composante « exploitation » concerne environ 10 600 sites , sur un total de 44 000 établissements soumis à autorisation ou à enregistrement en 2014. 159 ( * )

La TGAP sur les ICPE est également complexe à calculer , en particulier s'agissant de sa part « exploitation » qui varie selon un coefficient multiplicateur, et à recouvrer. Ce sont les services d'inspection des installations classées au sein des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) qui sont chargés de son recouvrement, et non les services des douanes.

La suppression de la TGAP sur les ICPE permettrait donc d'aller dans le sens d'une simplification de la fiscalité des entreprises . Elle permettrait également de recentrer l'action des services d'inspection sur leur mission d'instruction des dossiers et de contrôle des établissements. Une telle suppression ne constituerait pas un risque pour l'environnement , les installations classées étant par ailleurs soumises au paiement des autres composantes de la TGAP à proportion de leurs émissions polluantes. Elle n'aurait pas non plus d'effet sur le budget de l'ADEME , puisque le montant total de la TGAP dépasse nettement le montant plafonné alloué à l'Agence ; le montant des reversements au budget général prévus en 2016 s'élève ainsi à près de 50 millions d'euros 160 ( * ) .

Il convient de noter que le Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT) a donné à l'unanimité un avis favorable à la suppression de la TGAP sur les ICPE.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre rapporteur général propose de rétablir la suppression de cette taxe .

C. UNE SUPPRESSION DE TAXES À TRÈS FAIBLE RENDEMENT OU OBSOLÈTES À POURSUIVRE

Outre la TGAP sur les ICPE, la suppression des deux autres taxes prévue par le présent article correspond surtout à un objectif de simplification, s'agissant de taxes dont le rendement est très faible et dont l'assiette est complexe et peu lisible pour les redevables concernés.

Votre rapporteur général vous propose d'aller plus loin dans cette logique de simplification , en supprimant un certain nombre de taxes qui sont soit obsolètes, soit inefficaces ou inutiles au regard de l'existence d'autres dispositifs réglementaires poursuivant les mêmes objectifs. Dans ce contexte, les critères suivants ont été pris en compte : seules les taxes présentant un rendement inférieur à 1 million d'euros et affectées au budget général de l'État seraient supprimées, à l'exclusion, notamment, des taxes affectées aux collectivités territoriales, dont les ressources doivent être sanctuarisées.

Il vous propose ainsi d'abroger la taxe sur les contrats d'échange sur défaut d'un État (CDS) à nu , prévue par l'article 235 ter ZD ter du CGI. En effet, cette taxe, dont le rendement est insignifiant (4 800 euros en 2014) est inutile depuis que les opérations taxées ont été interdites par le règlement européen n° 236/2012 du 14 mars 2012.

Il vous propose également la suppression de la taxe sur les ordres annulés dans le cadre du négoce (ou « trading ») à haute fréquence , prévue par l'article 235 ter ZD bis du CGI. La suppression de cette taxe a vocation non pas à remettre en cause les efforts de régulation d'un trading effectivement problématique, mais à souligner l'inefficacité de la taxe. En effet, celle-ci est aujourd'hui aisément contournée par les opérateurs qui mettent en place des dispositifs qui évitent les annulations des ordres en-deçà du plancher de temps (une demie seconde) ou au-delà du plafond d'annulation (80 %) fixés par la taxe. Elle est également contournée par l'installation de l'essentiel de ces opérateurs, qui traitent également sur des titres français, sur des plateformes d'échange situées hors de France, notamment à Londres et à New York. Cela explique le rendement très faible de cette taxe, inférieur à 1 million d'euros en 2014. En outre, il semble que les dispositifs réglementaires soient plus efficaces qu'une taxe pour réduire ou interdire les opérations de trading à haute fréquence les plus dangereuses pour la stabilité et le bon fonctionnement du marché. Le dernier rapport sur la cartographie des risques financiers de l'Autorité des marchés financiers propose ainsi plutôt une évolution des règles des structures de marché, en particulier l'introduction d'un pas de cotation (écart entre deux prix dans le carnet d'ordres) harmonisé au niveau européen, ainsi que des obligations d'enregistrement et de transparence pour les sociétés de trading à haute fréquence 161 ( * ) . Des mesures de cette nature sont prévues par la directive « MIF II » adoptée en 2014 162 ( * ) et dont les mesures d'application sont en préparation aux niveaux européen et national.

Il vous propose, dans le même esprit, de supprimer la taxe sur les loyers élevés des logements de petite surface , prévue par l'article 234 du CGI. Cette suppression n'a pas pour objet de revenir sur l'objectif d'encadrement des loyers excessifs pratiqués par certains bailleurs, mais d'interroger le Gouvernement sur l'efficience d'une taxe dont les modalités en garantissent l'inefficacité. En effet, cette taxe se caractérise par sa complexité, qu'il s'agisse de son assiette ou de ses taux différents en fonction d'un certain nombre de seuils. Surtout, elle repose sur les seules déclarations des bailleurs, les services fiscaux n'ayant pas les moyens de contrôler efficacement son application. En conséquence, cette taxe n'a rapporté qu'environ 542 000 euros en 2014, dont 540 800 euros pour 431 redevables particuliers et 1 354 euros pour une seule entreprise redevable soumise à l'impôt sur les sociétés. Votre rapporteur général rappelle que la suppression de cette taxe avait fait l'objet de débats dans le cadre du groupe de travail sur le logement constitué par votre commission des finances en 2015.

Enfin, il vous propose de supprimer la redevance sanitaire liée à la certification des végétaux à l'exportation , prévue par l'article L. 251-17-1 du code rural et de la pêche maritime. En effet, cette redevance, dont l'assiette est très réduite, se caractérise par une certaine complexité de gestion, en raison notamment de son recouvrement par l'émission d'un formulaire spécifique émis par les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF). Elle a rapporté seulement 366 euros en 2014. Enfin, le projet de règlement européen qui devait rendre obligatoire la mise en place par les États membres de redevances de ce type, ne semble pas aboutir au niveau européen, la proposition de la Commission européenne présentée en mai 2013 n'ayant fait l'objet d'aucune adoption ni par le Conseil ni par le Parlement européen.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 8 bis (nouveau) (Art. 265 du code des douanes) - Modification des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

Commentaire : le présent article prévoit de diminuer le tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable à l'essence de un centime d'euro par litre et d'augmenter celui applicable au gazole du même montant.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA TAXE INTÉRIEURE DE CONSOMMATION SUR LES PRODUITS ÉNERGÉTIQUES (TICPE) SUR L'ESSENCE ET LE GAZOLE

1. Une taxe assise sur le volume des produits énergétiques mis à la consommation

Les produits pétroliers et assimilés utilisés ou destinés à être utilisés comme carburant ou combustible de chauffage sont soumis à une taxe intérieure de consommation prévue à l' article 265 du code des douanes : la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) .

La TICPE constitue un droit d'accise . Elle est à ce titre soumise au respect des dispositions prévues par la directive 2008/118/CE du Conseil relative au régime général d'accise 163 ( * ) . Cette taxe est exigible lorsque les produits concernés sont mis à la consommation , une notion définie à l'article 7 de la directive qui couvre les cas suivants :

- la production, y compris irrégulière, de produits soumis à accise , en dehors d'un régime de suspension de droits ;

- l'importation, y compris irrégulière, de produits soumis à accise , sauf si ceux-ci sont placés immédiatement après leur importation sous un régime de suspension de droits 164 ( * ) .

- la détention de produits soumis à accise , en dehors d'un régime de suspension de droits, pour lesquels le droit d'accise n'a pas été encore prélevé ;

- la sortie , y compris irrégulière, de produits soumis à accise, d'un régime de suspension de droits ;

Le régime de la détention et de la circulation de produits en suspension des droits s'applique aux opérateurs détenant, expédiant ou recevant des produits énergétiques qui ont obtenu le statut d'entrepositaire agréé (EA) 165 ( * ) . Il permet à ces entreprises de ne pas avoir à faire une avance de trésorerie importante en attendant de récupérer les droits au moment de la vente du produit au consommateur final. S'agissant des produits déjà mis à la consommation dans un autre État membre de l'Union européenne, la taxe est exigible lors de leur réception en France, hors régime suspensif.

La liste des produits pétroliers soumis à la TICPE et les tarifs applicables sont précisés par le tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes. Le tableau C dresse la liste des produits qui sont exemptés de TICPE, sauf lorsqu'ils sont destinés à être utilisés comme carburant ou combustible. Les tarifs de TICPE sont appliqués à la masse ou aux volumes mis à la consommation 166 ( * ) .

Tarifs de TICPE applicables aux supercarburants et au gazole

(en centimes d'euro)

Unité de perception

2014

2015

2016

Supercarburant

Litre

60,69

62,41

64,12

Supercarburant contenant un additif spécifique

Litre

63,96

65,68

67,39

Supercarburant E10 167 ( * )

Litre

60,69

62,41

64,12

Gazole

Litre

42,84

46,82

48,81

Note : ces tarifs incluent la composante carbone intégrée à la TICPE, dite contribution climat-énergie (CCE).

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'article 265 du code des douanes

En plus des tarifs nationaux de TICPE fixés à l'article 265 du code des douanes, les conseils régionaux et l'assemblée de Corse peuvent décider d'une fraction de TICPE à appliquer aux carburants vendus sur leur territoire , dans la limite de 1,77 centime d'euro par litre pour les supercarburants et de 1,15 euro centime d'euro par litre pour le gazole 168 ( * ) . Ils peuvent également, depuis 2011 169 ( * ) , majorer d'une deuxième tranche la TICPE applicable dans leurs territoires, dans la limite de 0,73 centime d'euro par litre pour les supercarburants, et de 1,35 centime d'euro par litre pour le gazole. Les recettes fiscales issues de cette majoration sont exclusivement affectées au financement de grands projets d'infrastructures de transport durable, ferroviaire ou fluvial, 170 ( * ) ou à l'amélioration du réseau de transports urbains en Ile-de-France.

Au total, les deux tranches de TICPE ne peuvent dépasser 2,5 centimes d'euro par litre pour les carburants concernés. En 2015, toutes les régions avaient voté le taux maximum de la fraction régionale de la TICPE, sauf la région Poitou-Charentes et la collectivité territoriale de Corse.

Les recettes de TICPE ont représenté en 2014 un montant total de 24,5 milliards d'euros . Ce produit est partagé entre l'État, les régions, les départements, et l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

S'agissant de la part des recettes de TICPE versée au budget général, d'après l'annexe Voies et Moyens au projet de loi de finances pour 2016, elle devrait représenter un montant de 13,9 milliards d'euros en 2015 et de 15,6 milliards d'euros en 2016 . Cette augmentation du produit attendu en 2016 s'explique par la montée en charge de la composante carbone qui accroît les recettes de TICPE (cf. infra ), et par la baisse du montant de TICPE affecté à l'AFITF, pour un montant de 424 millions d'euros en 2016 171 ( * ) .

2. Des écarts importants de taxation entre l'essence et le diesel, qui se sont réduits récemment avec la mise en place de la « taxe carbone »

Le gazole bénéficie historiquement d'une fiscalité préférentielle, qui se traduit par un taux réduit de TICPE . En 2015, l'écart de taxation entre l'essence et le gazole s'élève à 15,59 centimes d'euro par litre (hors modulation régionale de la TICPE).

Ce différentiel s'explique principalement par le choix opéré par la France de privilégier une politique fiscale en faveur d'une diésélisation du parc automobile à la suite des deux chocs pétroliers, afin de soutenir les constructeurs français bien positionnés sur ce type de motorisation. Les moteurs diesel présentent également l'avantage d'une consommation de carburant au kilomètre inférieure à celle des moteurs essence 172 ( * ) .

Un tel écart n'est pas propre à la France. La quasi-totalité des pays de l'OCDE ont une fiscalité sur l'essence supérieure à celle sur le gazole , comme le montre le graphique ci-dessous, à l'exception des États-Unis et de la Suisse où la fiscalité pesant sur le gazole est plus importante. L'Australie et le Royaume-Uni ont pour leur part un niveau équivalent de taxation de ces deux carburants 173 ( * ) .

L'avantage fiscal dont bénéficie le diesel représente un coût important pour les finances publiques. D'après la Cour des comptes, le taux réduit de TICPE du diesel par rapport à l'essence a représenté en 2011 une perte de recettes de 6,9 milliards d'euros 174 ( * ) . Cet avantage s'ajoute aux nombreuses autres exonérations ou taux réduits de fiscalité sur le gazole, qui ont généralement une finalité sectorielle, et qui ont représenté un montant d'environ 400 millions d'euros en 2014 175 ( * ) .

Taxation de l'essence et du diesel

Source : OCDE, 2015

Toutefois, l'écart de taxation entre le gazole et l'essence, qui était encore de 17,85 centimes d'euro en 2013, s'est réduit depuis 2014 sous l'effet de deux mesures .

D'une part, la loi de finances pour 2014 176 ( * ) a renchéri les taux de TICPE à travers l'introduction d'une composante carbone dans leur calcul, dite contribution climat-énergie (CCE). Cette dernière est proportionnée au contenu en CO 2 des différents produits énergétiques. La loi a fixé une trajectoire de hausse des tarifs de TICPE pour les années 2014, 2015 et 2016, selon l'évolution de la valeur d'une tonne de CO 2 suivante : 7 euros par tonne en 2014, 14,5 euros par tonne en 2015 et 22 euros par tonne en 2016 177 ( * ) . Ainsi, il est prévu que les tarifs de taxe intérieure de consommation (TIC) du gazole augmentent de 3,97 centimes d'euros entre 2014 et 2016, et ceux de l'essence de 3,42 centimes d'euro. Ceci a pour conséquence une augmentation des recettes de TICPE estimée à 1,2 milliard d'euros en 2015 et en 2016 .

D'autre part, la loi de finances pour 2015 178 ( * ) a relevé de 2 centimes d'euro le tarif de la TICPE applicable au gazole à partir de 2015 , et a affecté le produit de cette hausse à l'AFITF, pour un montant évalué à 800 millions d'euros en 2015 .

Ces deux mesures cumulées font qu'entre 2014 et 2016, les tarifs de TICPE sur le gazole doivent augmenter de 5,97 centimes d'euro et ceux sur l'essence de 3,43 centimes d'euro , réduisant l'écart de taxation entre les deux carburants de 2,54 centimes d'euro (pour atteindre 15,31 centimes d'euro). Le rendement fiscal de ces deux mesures est de 3,2 milliards d'euros .

B. UN ÉCART DE TAXATION QUI A ENCOURAGÉ LA DIÉSÉLISATION DU PARC AUTOMOBILE FRANÇAIS

Cette taxation avantageuse pour le gazole s'accompagne de la possibilité, pour les entreprises qui utilisent des véhicules routiers destinés au transport de marchandises et les exploitants de transport public routier en commun de voyageurs, de bénéficier d'un remboursement partiel de TICPE sur la base de leurs consommations totales de gazole 179 ( * ) . Les taux de remboursement sont égaux à la différence entre le tarif de TICPE en vigueur dans la région d'achat du carburant pour la période considérée et un taux plancher de taxe sur le gazole de 43,19 centimes d'euro par litre pour les transporteurs routiers de marchandises 180 ( * ) et de 39,19 centimes d'euro par litre pour les exploitants du transport public routier.

Ces dépenses fiscales devraient représenter un montant total de 536 millions d'euros en 2016, en augmentation de 35 % par rapport à 2014, en raison de l'augmentation des taux de TIC sur le gazole, qui accroît mécaniquement le montant des remboursements pouvant être exigés.

Montant des dépenses fiscales associées aux remboursements partiels de taxe intérieure de consommation (TIC) sur le gazole

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

Remboursement d'une fraction de TIC sur le gazole utilisé par les véhicules routiers destinés au transport de marchandises

357

375

450

Remboursement d'une fraction de TIC sur le gazole utilisé par les exploitants de transport public routier

39

60

86

Total

396

435

536

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances de la mission  « Écologie, développement et mobilité durables » annexé au projet de loi de finances pour 2016

Cette fiscalité favorable au gazole explique la place prédominante de celui-ci dans le parc automobile français . Ainsi, au 1 er janvier 2015, sur un total de 38 408 000 véhicules particuliers et de véhicules utilitaires en circulation, la part des motorisations diesels était de 68 % 181 ( * ) (contre 77,3 % en 2008).

La part des véhicules diesels dans les immatriculations de voitures particulières neuves était de 57,8 % lors des six premiers mois de 2015, contre 37,5 % pour l'essence. Cette part a toutefois diminué depuis 2012, où elle atteignait 72,9 % (contre 27,1 % pour les véhicules essence). Il y a donc un ralentissement de l'achat de véhicules diesel au profit de véhicules essence . La prévision de TICPE inscrite dans le projet de loi de finances pour 2016 anticipe d'ailleurs une augmentation de la consommation de supercarburants de 2,3 % par rapport à 2015, tandis que la consommation de gazole diminuerait de 0,2 %.

Cette tendance devrait s'accentuer dans les années à venir , en raison des surcoûts associés à l'application de la norme Euro 6 depuis septembre 2014, qui rend obligatoire l'installation de filtres à particules sur les véhicules diesels neufs, mais également de la réduction des kilométrages moyens unitaires parcourus qui réduit l'attrait du diesel par rapport à l'essence 182 ( * ) .

La part du diesel dans les nouvelles immatriculations en 2014


Source : OCDE, 2015

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement et du groupe écologiste , avec l'avis favorable de la rapporteure générale à titre personnel , les deux amendements identiques n'ayant pas pu être examinés par la commission des finances en raison de leur dépôt tardif.

Le I modifie le tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes, afin de majorer de un centime d'euro par litre le tarif de TICPE sur le gazole et de diminuer à due concurrence celui sur les supercarburants .

Tarifs de TICPE applicables aux supercarburants et au gazole

(en centimes d'euro)

Unité de perception

2016

(initial, CCE inclue)

2016

(PLF, après amendement)

Supercarburant

Litre

64,12

63,12

Supercarburant contenant un additif spécifique

Litre

67,39

66,39

Supercarburant E10

Litre

64,12

63,12

Gazole

Litre

48,81

49,81

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'article 265 du code des douanes et de l'article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016

Une telle modulation aurait pour conséquence de réduire l'écart de taxation entre le diesel et l'essence de deux centimes d'euro (cet écart serait alors de 13,31 centimes d'euro).

Le II précise que cette modulation des tarifs de TICPE entrera en vigueur pour les opérations dont le fait générateur interviendra à compter du 1 er janvier 2016.

À la suite de ces modifications, les recettes de TICPE seraient majorées de 259 millions d'euros 183 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances propose la suppression de l'article 8 bis pour des raisons de cohérence , et non de fond.

En effet, cet article a été adopté de manière isolée et précipitée dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances, sans avoir fait l'objet d'une étude d'impact pour évaluer ses effets économiques, alors que plusieurs mesures d'ampleur relatives à la fiscalité énergétique et écologique , notamment la réforme de la contribution au service public de l'électricité (CSPE), seront discutées dans le cadre du collectif budgétaire de fin d'année .

Cela dénote un manque de stratégie globale de la part du Gouvernement . Il importe par cohérence que le Parlement puisse se prononcer sur toutes ces mesures dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances rectificative, en disposant d'une vision d'ensemble, et non en légiférant de manière isolée, au coup par coup, sur tel ou tel aspect.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 8 ter (nouveau) (Art. 266 quindecies du code des douanes) - Report au 1er janvier 2019 de l'application dans les DOM du prélèvement supplémentaire de la TGAP sur les carburants

Commentaire : le présent article vise à reporter au 1 er janvier 2019 l'application dans les départements d'outre-mer (DOM) du prélèvement supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les carburants.

I. LE DROIT EXISTANT

Afin de favoriser le développement des biocarburants en France , l'article 32  de la loi de finances pour 2005 184 ( * ) a instauré un prélèvement supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), codifié à l'article 266 quindecies du code des douanes .

Le taux de ce prélèvement, qui s'applique aux distributeurs de carburants, est ainsi réduit à proportion des volumes de biocarburants incorporés dans les carburants .

L'application du prélèvement supplémentaire de TGAP dans les départements d'outre-mer (DOM) devait être effective au 1 er janvier 2010 185 ( * ) . Mais, en raison de l'absence d'unités de production de biocarburants dans ces territoires , sa mise en oeuvre a été reportée au 1 er janvier 2013, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010 186 ( * ) , afin de ne pas renchérir le prix des carburants outre-mer.

Il en a été de même dans le cadre de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2012 187 ( * ) . Son article 59 a de nouveau repoussé l'application de cette disposition, du 1 er janvier 2013 au 1 er janvier 2016 .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de nos collègues députés Victorin Lurel et Jean-Claude Fruteau, l'Assemblée nationale a adopté un amendement portant article additionnel, avec l'avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement , visant à reporter une nouvelle fois l'application du prélèvement supplémentaire de TGAP sur les carburants dans les DOM, du 1 er janvier 2016 au 1 er janvier 2019 .

Le présent article modifie donc en conséquence l'article 266 quindecies du code des douanes, en substituant à l'année « 2016 » l'année « 2019 ».

Les auteurs de l'amendement ont notamment fait valoir que, « à ce jour, il n'existe toujours pas d'unités de production de biocarburants dans les DOM . La taille des marchés locaux, tous inférieurs à un million d'habitants, est, en effet, actuellement insuffisante pour assurer la viabilité économique de la production de biocarburants. [...] L'application automatique de la TGAP au 1 er janvier 2016 aurait pour conséquence de renchérir davantage le prix des carburants en outre-mer (de 5 à 7 centimes par litre), ce qui serait difficilement soutenable par les populations de ces territoires » 188 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Au regard de la situation actuelle, caractérisée par l'absence d'unités de productions de biocarburants dans les DOM , dix ans après l'adoption de la TGAP visant à favoriser l'incorporation de biocarburants dans les carburants mis à la consommation sur le territoire national, il semble peu probable que le report de trois ans proposé par le présent article sera suffisant pour permettre le développement de telles infrastructures .

Il appartient donc au Gouvernement de préciser quelles mesures il entend prendre pour permettre la mise en oeuvre effective de cette disposition dans les DOM.

Afin d'obtenir des explications claires sur ce sujet, il est proposé de supprimer l'application du prélèvement supplémentaire de la TGAP sur les carburants dans les départements d'outre-mer .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 8 quater (nouveau) (Art. 235 ter ZD du code général des impôts) - Élargissement de la taxe sur les transactions financières aux opérations intrajournalières

Commentaire : le présent article vise à inclure les opérations intrajournalières dans le champ de la taxe sur les transactions financières.

I. LE DROIT EXISTANT

À l'initiative de votre commission des finances, l'article 11 de la loi n° 2007-1822 de finances pour 2008 a supprimé l'impôt sur les opérations de bourse 189 ( * ) , dans un contexte marqué par l'entrée en vigueur de la directive sur les marchés d'instruments financiers 190 ( * ) .

À la suite de la crise financière de 2008, l'article 5 de la loi n° 2012-354 de finances rectificative pour 2012 a toutefois instauré une taxe sur les transactions financières rénovée , qui comporte désormais trois dimensions 191 ( * ) .

A. UNE TAXE SUR LES ACQUISITIONS DE TITRES DE CAPITAL OU TITRES ASSIMILÉS

1. Un champ d'application limité aux actions de grandes sociétés françaises, sous réserve que l'acquisition donne lieu à transfert de propriété

Le champ d'application de la taxe sur les acquisitions de titres de capital ou titres assimilés est défini au premier alinéa du I de l'article 235 ter ZD.

La taxe s'applique lorsque les cinq conditions suivantes sont réunies :

- le titre est admis aux négociations sur un marché réglementé français, européen ou étranger ;

- il s'agit d'un titre de capital ou d'un titre de capital assimilé (par exemple, une acquisition réalisée par le biais d'une option) : cette condition exclut du champ de la taxe les transactions sur les produits dérivés , à l'exception de celles qui entraînent le transfert de propriété du titre sous-jacent ;

- ce titre est émis par une société dont le siège social est situé en France ;

- ce titre est émis par une société dont la capitalisation boursière dépasse un milliard d'euros ;

- son acquisition donne lieu à un transfert de propriété : cette condition exclut du champ de la taxe les opérations intrajournalières .

2. Une taxe de 0,2 % sur la position nette acheteuse

En principe, le redevable de la taxe est le prestataire de services d'investissement (PSI) qui a exécuté l'ordre d'achat du titre ou négocié pour son compte propre, quel que soit son lieu d'établissement . Si l'acquisition a lieu sans intervention d'un PSI, le redevable est l'établissement assurant la fonction de tenue de compte-conservation.

Le taux de la taxe, initialement fixé à 0,1 %, est désormais de 0,2 % de la valeur d'acquisition du titre 192 ( * ) .

Concrètement, la base taxable est constituée de la position nette acheteuse, calculée sur une différence de nombre de titres 193 ( * ) . Par exemple, si les quantités achetées et vendues sont identiques pour un titre donné sur une même journée boursière, la position nette est nulle même si les montants d'achat et de vente diffèrent.

Plusieurs opérations sont toutefois exonérées au titre du II de l'article 235 ter ZD afin de préserver certaines activités essentielles au bon fonctionnement des marchés financiers. Il s'agit :

- des émissions d'actions (marché primaire) ;

- des opérations réalisées par une chambre de compensation ou un dépositaire central ;

- de l'activité de tenue de marché ;

- des opérations intragroupe ou de restructuration ;

- des acquisitions réalisées dans le cadre de contrats de liquidité ;

- des cessions temporaires de titres ;

- des transactions réalisées dans le cadre de l'épargne salariale ;

- des obligations échangeables ou convertibles en actions.

3. Des modalités de recouvrement qui reposent essentiellement sur le dépositaire central

En principe, la déclaration, la centralisation et la collecte de la taxe repose sur le dépositaire central teneur du compte d'émission du titre . Pour la France, il s'agit d' Euroclear France 194 ( * ) .

Les infrastructures du post-marché

Schématiquement, l'exécution d'un ordre de bourse transmis par un investisseur comporte quatre étapes .

Lors de la phase de négociation , l'ordre de l'investisseur est transmis par un collecteur à un négociateur, chargé de trouver une contrepartie.

Lorsqu'une contrepartie est trouvée, commence alors la deuxième étape, dite de compensation . La chambre de compensation assume le risque de contrepartie en s'interposant entre l'acheteur et le vendeur. Elle calcule également en fin de séance la position nette des acteurs afin de réduire les opérations de règlement-livraison au strict minimum. Les ordres nets sont alors transmis au dépositaire central.

La troisième étape, dite de règlement-livraison , est ainsi assurée par le dépositaire central. Concrètement, ce dernier s'assure que le versement a bien été effectué par l'acheteur et permute dans ses livres de compte l'inscription des titres au profit du vendeur.

Enfin, la quatrième étape, dite de conservation , implique les teneurs de compte-conservateur, qui tiennent à jour le portefeuille de titres de leurs clients. Ces titres sont répertoriés dans le compte ouvert par le teneur auprès du dépositaire central. Ce dernier peut ainsi vérifier à tout moment que le nombre de titres comptabilisés au sein du compte dit « d'émission » des sociétés enregistrées auprès de lui correspond à la somme des titres comptabilisés au sein des comptes des teneurs.

Par exception, le quatrième alinéa du VII de l'article 235 ter ZD prévoit que, lorsque l'acquisition du titre a lieu auprès d'un dépositaire central établi hors de France, les opérations de recouvrement de la taxe se font sur une base déclarative auprès de la direction des grandes entreprises (DGE). C'est par exemple le cas lorsqu'une société française a émis des actions sur un marché réglementé étranger.

4. Une affectation partielle à l'Agence française de développement

Une fraction de 25 % du produit de cette taxe est affectée au fonds de solidarité pour le développement géré par l'Agence française de développement (AFD) 195 ( * ) , dans la limite de 140 millions d'euros.

B. EN COMPLÉMENT, DEUX TAXES VISANT SPÉCIFIQUEMENT LES OPÉRATIONS DESTABILISATRICES

1. Une taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence

Aux termes de l'article 235 ter ZD bis, les entreprises « exploitées en France » sont assujetties à une taxe sur les opérations à haute fréquence portant sur des titres de capital et « réalisées pour compte propre par l'intermédiaire de dispositifs de traitement automatisé ». Aussi, comme le précise le Bulletin officiel des finances publiques, « le lieu du siège de l'entreprise émettrice des titres et le volume de sa capitalisation boursière sont indifférents » 196 ( * ) .

Les opérations à haute fréquence sont définies au II comme «  le fait d'adresser à titre habituel des ordres en ayant recours à un dispositif de traitement automatisé de ces ordres caractérisé par l'envoi, la modification ou l'annulation d'ordres successifs sur un titre donné séparés d'un délai inférieur à un seuil fixé par décret ». Ce seuil est actuellement fixé à une demi-seconde 197 ( * ) .

Par ailleurs, le IV. dispose que la taxe est due uniquement lorsque « le taux d'annulation ou de modification des ordres relatifs à des opérations à haute fréquence (...) excède un seuil , défini par décret, sur une journée de bourse ».

Le taux de la taxe est fixé à 0,01 % du montant des ordres annulés ou modifiés excédant ce seuil, actuellement fixé à 80 % 198 ( * ) .

La déclaration et le paiement de la taxe reposent sur l'entreprise 199 ( * ) .

2. Une taxe sur les acquisitions de contrats d'échange sur défaut d'un État européen qui ne viendraient pas couvrir une exposition corrélée

Aux termes de l'article 235 ter ZD ter , l'achat de contrats d'échange sur défaut d'un État européen - aussi appelés « credit default swaps » (CDS) - par une personne physique domiciliée en France ou une entreprise exploitée en France fait l'objet d'une taxe de 0,01 %.

Le deuxième alinéa précise toutefois que la taxe n'est pas due « lorsque le bénéficiaire du contrat soit détient une position longue correspondante sur la dette de cet État, soit détient des actifs ou contracte des engagements dont la valeur est corrélée à la valeur de la dette de cet État ». La taxe s'applique donc uniquement à l'achat de CDS souverains « à nu ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Introduit à l'Assemblée nationale par nos collègues députés Valérie Rabault, Jean-Marie Tetart, Éric Alauzet, Pascal Cherki et Chantal Guittet 200 ( * ) , avec un avis de sagesse du Gouvernement, le présent article vise à élargir le champ de la taxe sur les acquisitions de titres de capital ou assimilés aux opérations intrajournalières en supprimant au premier alinéa du I de l'article 235 ter ZD la condition selon laquelle l'acquisition doit donner lieu à un transfert de propriété pour que la taxe soit applicable.

D'après l'exposé sommaire des six amendements identiques adoptés en séance publique, cet aménagement poursuit deux objectifs :

- « dégager des recettes fiscales supplémentaires , notamment en vue d'augmenter les financements pour la solidarité internationale et la lutte contre le changement climatique » ;

- limiter les « transactions déstabilisatrices , qui accentuent la volatilité du marché, en en réduisant l'intérêt financier ».

Lors des débats en séance publique, la date d'entrée en vigueur, initialement fixée au 1 er janvier 2016, a été reportée au 31 décembre 2016 afin de tenir compte des négociations européennes en cours.

Cet aménagement n'a fait l'objet d'aucun chiffrage. Compte tenu de son entrée en vigueur le dernier jour de l'année 2016, la taxe ne produirait réellement ses effets qu'en 2017 et aurait mieux trouvé sa place en deuxième partie du projet de loi de finances.

Le long cheminement de la taxe européenne sur les transactions financières

Dans un contexte marqué par la crise financière et la mise en place de mesures divergentes au niveau national, la Commission a présenté en 2011 une proposition de directive établissant un système commun de taxe sur les transactions financières 201 ( * ) .

La proposition prévoyait l'institution d'une taxe de 0,1 % sur les transactions portant sur les actions et obligations et de 0,01 % pour celles portant sur les produits dérivés, lorsqu'au moins une partie présente dans l'Union européenne est impliquée dans la transaction.

L'unanimité au sein du Conseil ne pouvant être atteinte, onze États membres 202 ( * ) ont demandé à la Commission de solliciter la mise en oeuvre d'une coopération renforcée . Après accord du Parlement européen, une décision autorisant onze États membres à établir un système commun de taxe sur les transactions financières a finalement été adoptée par le Conseil le 22 janvier 2013.

Dans ce cadre, la Commission européenne a adopté en février 2013 une nouvelle proposition de directive, qui reprend les principales caractéristiques de sa proposition initiale, tout en renforçant les clauses anti-abus et anti-délocalisation 203 ( * ) . Le principe de résidence est notamment complété par des éléments du principe du lieu d'émission.

Si les négociations sur les caractéristiques de la taxe se poursuivent, l'objectif annoncé par le Gouvernement est d'aboutir à un accord avant la fin de l'année 2015. Les recettes attendues de la mise en oeuvre de cette taxe sont estimées entre 30 et 35 milliards d'euros.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LES FAIBLESSES DE LA TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES FRANÇAISE TRADUISENT LA NÉCESSITÉ D'UNE MISE EN oeUVRE AU NIVEAU EUROPÉEN

1. L'efficacité relative de la taxe sur les acquisitions de titre de capital

a) Un rendement substantiel mais plus faible qu'escompté

Un premier objectif des taxes sur les transactions financières est de lever des recettes afin, par exemple, de financer la solidarité internationale et la lutte contre le changement climatique - ou plus simplement d'abonder le budget de l'État.

Dans de nombreux pays, les taxes sur les transactions financières constituent une source de revenus significative. Les recettes tirées de ce type de taxe atteignent ainsi 3 milliards d'euros au Royaume-Uni et représentent 2,1 % du PIB à Hong-Kong 204 ( * ) .

Cet objectif peut toutefois être mis à mal en cas de délocalisation des activités taxées. La taxe suédoise, fondée sur un critère de résidence, a ainsi abouti à ce que 50 % des transactions soient exécutées depuis Londres, avant d'être finalement supprimée en 1991 205 ( * ) .

Dans le cas français, le risque de délocalisation, bien que minimisé par les caractéristiques de la taxe, est double . Les investisseurs peuvent se reporter sur les titres de sociétés établies au sein de pays ne pratiquant pas une telle taxe. Par ailleurs, des sociétés peuvent décider de déplacer leur siège social, dans le but que leurs titres échappent à la taxe.

Cet objectif de rendement peut également être fragilisé par les modalités de recouvrement des taxes sur les transactions financières, qui reposent en partie sur un mécanisme déclaratif et à portée extraterritoriale . Même au Royaume-Uni, où les modalités de collecte de la taxe sont considérées comme particulièrement robustes, la perte de recettes était ainsi estimée à 200 millions d'euros en 2013 206 ( * ) .

Dans le cas français, la taxe repose sur un mécanisme entièrement déclaratif pour les transactions sur les actions françaises enregistrées chez un dépositaire central étranger.

Enfin, les effets de contraction du volume de transactions causés par les taxes sur les transactions financières sont difficiles à anticiper, alors même qu'ils peuvent affecter fortement son rendement. En effet, si la littérature économique est très divisée s'agissant de l'opportunité d'instaurer une taxe sur les transactions financières, les études empiriques disponibles s'accordent néanmoins pour considérer que leur mise en oeuvre se traduit par une baisse des volumes de transactions 207 ( * ) .

Au total, les recettes collectées par la taxe française sont significatives mais largement inférieures aux prévisions. En 2014, le rendement de la taxe sur les acquisitions de titre de capital s'élève ainsi à 870 millions d'euros 208 ( * ) , soit près de la moitié du niveau initialement escompté lors de son adoption en 2012 .

Comparaison entre la prévision de rendement de la taxe sur les transactions financières et son rendement effectif

(en milliards d'euros)

Rendement prévisionnel en année pleine

Rendement effectif en 2014

TTF à 0,1 %

1,1

-

TTF à 0,2 %

1,6

0,87

Source : commission des finances (d'après l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances rectificative pour 2012 et l'annexe « Développement des recettes du budget général et des dépenses fiscales » du projet de loi de règlement 2014)

Cet écart pourrait toutefois en partie être expliqué par la difficulté à réaliser des prévisions ex ante, compte tenu des caractéristiques de la taxe française . En effet, la taxe sur les acquisitions de titres de capital est applicable aux transactions de gré à gré, pour lesquelles les données sont peu fiables. Par ailleurs, elle comporte un nombre élevé d'exemptions, dont l'impact sur le rendement de la taxe pouvait difficilement être anticipé avec précision.

b) L'absence d'impact sur la volatilité

Un deuxième objectif des taxes sur les transactions financières est de réduire la volatilité sur les marchés financiers en pénalisant les porteurs de titre de court terme qui procèdent régulièrement à des échanges de titres et sont, à ce titre, mis à contribution dans des proportions plus importantes que les autres intervenants.

Ses opposants soulignent néanmoins qu'elles pourraient avoir l'effet inverse de celui recherché. Du fait de leur effet négatif sur les volumes moyens de transactions, les taxes sur les transactions financières sont susceptibles de réduire la liquidité des marchés financiers et, par voie de conséquence, d'augmenter leur volatilité.

Plusieurs études empiriques ont été menées sur ce point à la suite de la mise en oeuvre de la taxe en France. Parce que la taxe française s'applique uniquement aux titres émis par des sociétés françaises dont la capitalisation boursière dépasse un milliard d'euros, il est en effet possible de créer des groupes de contrôle (composés par exemple des actions françaises plus petites et des actions européennes comparables) permettant d'isoler son effet sur les marchés.

Dans leur ensemble, ces études empiriques s'accordent sur l'absence d'effet de la taxe française sur la volatilité (ni positif, ni négatif) dans son format actuel, malgré une baisse de l'ordre de 10 % des volumes de transactions 209 ( * ) .

2. L'inefficacité de la taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence

En 2014, la taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence a seulement rapporté 676 438 euros 210 ( * ) .

Pourtant, d'après l'Autorité des marchés financiers (AMF), le trading haute fréquence représente désormais 40 % du volume de transactions sur le CAC 40 , contre 31 % en 2013 211 ( * ) .

L'échec de cette taxe s'explique tant par son assiette que par ses modalités de recouvrement :

- seules les entreprises installées en France sont taxées, incitant ainsi fortement à la délocalisation ;

- un taux d'annulation ou de modification des ordres de 79 % permet d'échapper à la taxe ;

- la déclaration et le paiement de la taxe sont décentralisés au niveau de l'entreprise , ce qui favorise la fraude.

Aussi, votre rapporteur général vous propose d'abroger cette taxe dans le cadre de l'article 8 du présent projet de loi de finances , qui a pour objet de supprimer certaines taxes à faible rendement.

3. L'inutilité de la taxe sur les acquisitions de contrats d'échange sur défaut d'un État européen

En 2014, la taxe sur les acquisitions de CDS souverains a seulement rapporté 4 803 euros 212 ( * ) .

Ce très faible rendement s'explique par l'interdiction, au niveau européen,  de la détention de CDS souverains « à nu », entrée en vigueur au 1 er novembre 2012 213 ( * ) .

Aussi, votre rapporteur général vous propose d'abroger cette taxe dans le cadre de l'article 8 du présent projet de loi de finances , qui a pour objet de supprimer certaines taxes à faible rendement.

B. L'EXTENSION DE LA TAXE FRANÇAISE AUX TRANSACTIONS INTRAJOURNALIÈRES EST TECHNIQUEMENT RÉALISABLE MAIS DANGEREUSE POUR LA PLACE DE PARIS

1. Une extension techniquement réalisable, sous réserve de disposer de délais suffisants

Le présent article ne précise pas les modalités selon lesquelles le recouvrement de la taxe due au titre des transactions intrajournalières pourrait être effectué par le dépositaire central.

L'aménagement proposé présente pourtant une difficulté technique majeure. En effet, dans la majorité des situations, Euroclear dispose uniquement de l'information sur la position nette de fin de journée et non des données brutes sur l'ensemble des achats et des ventes.

Cette difficulté a d'ailleurs été longuement abordée par le cabinet Ernst and Young dans un rapport remis à la Commission européenne, dont la proposition de taxe sur les transactions financières visait également les transactions intrajournalières 214 ( * ) .

Toutefois, cet obstacle technique ne doit pas être surestimé.

Il existe déjà des cas où le dépositaire central français est chargé de collecter la taxe « à l'aveugle », alors même que l'opération est neutre de son point de vue (il ne livre pas le titre) car la position nette de son adhérent est nulle.

Deux situations peuvent être distinguées :

- lorsque la livraison du titre est réalisée dans les livres de l'un des adhérents du dépositaire central (par exemple, quand deux clients d'une même banque effectuent deux opérations en sens inverse), il revient à l'adhérent (en général, le teneur de compte-conservateur) de fournir les informations nécessaires au dépositaire central ;

- lorsque la livraison du titre est réalisée dans les livres de l'un des clients d'un adhérent du dépositaire central (par exemple, quand deux clients d'une même banque étrangère effectuent deux opérations en sens inverse), il revient aux clients de fournir les informations nécessaires à l'adhérent, qui les retransmet par la suite au dépositaire central.

Confronté aux mêmes difficultés, le Royaume-Uni a récemment mis en place avec succès un dispositif visant à organiser la transmission systématique des données brutes au dépositaire central. Annoncé en novembre 2013, le changement est entré en vigueur en juin 2014 215 ( * ) . Désormais, les données brutes concernant les achats et les ventes des institutions financières qui recourent à une contrepartie centrale pour effectuer une compensation préalable au règlement sont transmises au dépositaire central.

Aussi, l'obstacle technique au présent article, s'il existe bel et bien, ne saurait à lui seul justifier une opposition de votre commission des finances, d'autant que la date d'entrée en vigueur de l'aménagement proposé a été reportée d'une année.

2. Une extension au niveau national dangereuse pour la place de Paris

Sur le plan économique, l'inclusion des opérations intrajournalières dans le champ de la taxe française sur les transactions financières représente néanmoins un risque majeur pour la place de Paris .

Si les activités de tenue de marché resteraient exonérées, il convient de rappeler que les apporteurs de liquidité sont loin d'être uniquement des teneurs de marché. Une étude récente a par exemple montré que sur un marché liquide, les apporteurs de liquidité ne sont des teneurs de marché que dans 43 % des cas. Même sur un marché peu liquide et fragmenté, les autres participants contribuent pour un tiers à l'apport de liquidité 216 ( * ) .

Par ailleurs, tous les arbitragistes seraient concernés par cette extension . Or, la fragmentation du marché organisée par les directives sur les marchés d'instruments financiers (MIF et MIF II) renforce l'importance de cette activité, qui permet de lisser les incohérences de prix entre les actifs et les plateformes.

Aussi, une mise en oeuvre de cet aménagement au niveau national se traduirait vraisemblablement par une diminution de la liquidité relative des titres cotés sur le marché français.

Cet aspect est décisif pour les investisseurs dans la mesure où un marché liquide permet de réaliser à tout moment des transactions sur un nombre important de titres sans variation défavorable du prix. De ce fait, si un titre devient moins liquide, les investisseurs exigent un surplus de rentabilité - la « prime de liquidité » augmente - qui pénalise l'entreprise en augmentant son coût de financement.

Dès lors, le risque pour la place de Paris serait triple :

- les investisseurs pourraient se détourner en partie des titres français, menaçant ainsi le financement en fonds propres de nos grandes entreprises ;

- des sociétés pourraient décider de déplacer leur siège social ou de ne pas l'établir en France pour que leur titre échappe à la taxe ;

- des sociétés pourraient décider d'émettre sur un marché réglementé étranger afin de ne pas dépendre du dépositaire central français (dans ce cas, le système de collecte est alors purement déclaratif).

À l'inverse, si la taxe sur les transactions financières était effectivement mise en place au niveau européen dans le cadre de la coopération renforcée, le présent article deviendrait alors superflu. En effet, cette taxe pourrait, d'après les informations les plus récentes, être applicable aux transactions intrajournalières.

Aussi, l'élargissement de la taxe française aux opérations intrajournalières étant au mieux inutile (en cas d'accord européen), au pire dangereux (en cas de mise en oeuvre dans le seul cadre national), votre rapporteur général vous propose de supprimer le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 9 (Art. 235 ter ZE bis du code général des impôts) - Financement de l'augmentation de la capacité de soutien aux collectivités territoriales et aux établissements publics de santé ayant contracté des « emprunts toxiques »

Commentaire : le présent article prévoit un relèvement du taux de la taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales et l'affectation d'une fraction de cette taxe à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN FONDS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AYANT SOUSCRIT DES EMPRUNTS TOXIQUES FINANCÉ EN PARTIE PAR UNE CONTRIBUTION SPÉCIFIQUE DU SECTEUR BANCAIRE

1. La création d'un fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des emprunts « toxiques »

Un fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des emprunts structurés a été mis en place par l'article 92 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014. Les modalités d'application de cet article ont été précisées par décret en Conseil d'État 217 ( * ) .

Le fonds de soutien peut bénéficier à l'ensemble des collectivités territoriales - Nouvelle-Calédonie et outre-mer compris - leurs groupements, les établissements publics locaux (EPL) et les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ayant souscrit certains emprunts structurés et instruments financiers.

Ce fonds devait initialement être doté de 100 millions d'euros par an pendant 15 ans, soit un total de 1,5 milliard d'euros.

Ce montant correspond à 45 % des indemnités de remboursement anticipé des emprunts structurés les plus sensibles , estimées mi-2013 à 3,4 milliards d'euros par le Gouvernement 218 ( * ) .

Le périmètre des emprunts « très sensibles » correspond aux emprunts classés 3E, 4E et 5E sur la charte Gissler et dont la formule de taux est active, auxquels s'ajoutent les emprunts les plus risqués, qui sont classés « hors charte » 219 ( * ) . Le capital restant dû au titre des emprunts « très sensibles » figurant au bilan de la Société de financement local (SFIL) mi-2013 s'élevait à 4 milliards d'euros, pour 394 collectivités territoriales.

2. Un financement refondé à la suite de l'extinction progressive de la taxe de risque systémique (TRS)

a) L'extinction progressive de la taxe de risque systémique

Afin de faire participer les banques à la résolution d'un problème qu'elles ont en partie créé, ce fonds était initialement financé à 60 % par le secteur bancaire à travers deux mécanismes , le reliquat étant financé par des crédits budgétaires.

D'une part, Dexia et la Société de financement local (SFIL), qui détiennent la majeure partie du stock d'emprunts toxiques, versent à l'État des « contributions volontaires » , à hauteur de 11,5 millions d'euros par an, pendant quinze ans.

D'autre part, l'article 35 de la loi de finances pour 2014 précitée a relevé le taux de la taxe de risque systémique - mise en place pour faire participer les banques ex ante aux coûts d'une éventuelle crise bancaire - afin d'alimenter le fonds de soutien à hauteur de 50 millions d'euros par an.

Toutefois, l'article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 prévoit l'extinction progressive de la taxe de risque systémique, afin de tenir compte de la mise en place d'un Fonds de résolution unique (FRU) au niveau européen 220 ( * ) .

b) La création d'une taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales

Afin de remédier à la disparition de la taxe de risque systémique, une taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales a été mise en place par l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 2014 précitée.

Prévue à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts (CGI), cette taxe reprend les principales caractéristiques de la taxe de risque systémique.

Sont redevables de cette taxe :

- les établissements de crédit ;

- les entreprises d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille ;

- les entreprises de marché ;

- les adhérents aux chambres de compensation ;

- les personnes habilitées à exercer les activités de conservation ou d'administration d'instruments financiers ;

- les établissements de paiement ;

- les compagnies financières holding et les compagnies financières holding mixtes.

Son assiette est identique à celle de la contribution pour frais de contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et repose sur les exigences minimales en fonds propres requises pour respecter les ratios prudentiels de Bâle . Toutefois, les établissements pour lesquels les exigences minimales en fonds propres sont inférieures à 500 millions d'euros sont exclus du champ d'application de la taxe.

Le taux de la taxe est fixé à 0,026 % afin d'assurer un rendement de 40 millions d'euros en 2015 et 2016 et 50 millions d'euros par an à partir de 2017.

Aux termes du E du II de l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 2014 précitée, cette taxe sera abrogée à compter du 1 er janvier 2029 , date qui correspond à l'extinction du fonds de soutien aux collectivités territoriales.

B. UN DISPOSITIF D'ACCOMPAGNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ DONT LE FINANCEMENT REPOSE ESSENTIELLEMENT SUR DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

1. La création d'un dispositif d'accompagnement des établissements publics de santé les plus exposés aux emprunts « toxiques »

Comme les collectivités territoriales, certains établissements publics de santé ont souscrit des emprunts structurés de nature spéculative. D'après le rapport de la Cour des comptes sur la dette des établissements publics de santé publié en avril 2014, les encours « à risque élevé » atteignaient ainsi la somme de 2,5 milliards d'euros à la fin de l'année 2012 221 ( * ) .

À partir des données de la Cour des comptes, il est possible d'évaluer le montant des encours structurés les plus sensibles en retenant le même périmètre que celui utilisé pour les collectivités territoriales lors de la mise en place du fonds de soutien 222 ( * ) .

Selon ces modalités de calcul, les encours hospitaliers les plus sensibles s'élevaient en 2012 à 1,79 milliard d'euros.

Compte tenu de l'exposition importante des établissements publics de santé aux emprunts « toxiques » , un dispositif d'accompagnement, décidé en Conseil des ministres le 23 avril 2014, a été mis en place par instruction interministérielle le 22 décembre 2014 223 ( * ) .

Ce dispositif a été initialement doté d'une enveloppe unique de 100 millions d'euros .

Son périmètre est restrictif : il est réservé aux établissements publics de santé dont le total des produits 224 ( * ) est inférieur à 100 millions d'euros et seuls les contrats classés hors charte Gissler sont pris en compte dans l'instruction des demandes d'aide 225 ( * ) .

D'après la Cour des comptes, le montant des emprunts classés hors charte Gissler s'élevait à 1 milliard d'euros en 2012. 82 établissements étaient concernés sur l'échantillon de 712 établissements couverts par l'enquête 226 ( * ) .

Par ailleurs, du fait du périmètre retenu, seuls 40 établissements étaient éligibles au dispositif d'accompagnement.

Comme pour les collectivités territoriales, l'aide ne peut excéder 45 % de l'indemnité de remboursement anticipé totale due par l'établissement mais son montant est également plafonné à 5 millions d'euros .

2. Un mode de financement qui repose essentiellement sur des crédits budgétaires

Le financement du dispositif repose en grande majorité sur des crédits budgétaires .

Les aides sont versées aux établissements via les Agences régionales de santé (ARS) par arrêtés modificatifs des dotations régionales du Fonds d'intervention régionale (FIR) et des Missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) .

Les banques ne contribuent pas au dispositif par le biais d'une taxe spécifique.

Seule la SFIL a versé une « contribution volontaire » pour aider au financement du dispositif, pour un montant total de 18 millions d'euros 227 ( * ) .

C. UN RENFORCEMENT DU FONDS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DU DISPOSITIF D'ACCOMPAGNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ À FINANCER

1. L'évolution défavorable de la parité entre l'euro et le franc suisse a fragilisé les finances d'une partie des collectivités territoriales et des établissements de santé

Compte tenu de l'appréciation continue 228 ( * ) du franc suisse depuis le début de la crise de 2008 du fait de son statut de « valeur refuge »
- mouvement qui s'est brutalement accéléré avec le développement de la crise de la zone euro - la Banque nationale suisse (BNS) a annoncé en septembre 2011 sa volonté de défendre un taux plancher de 1,20 franc suisse pour un euro.

En janvier 2015, la BNS a toutefois annoncé l'abandon de ce taux plancher, dont la défense imposait l'accumulation massive de réserves de change. Entre 2009 et 2014, les réserves de change de la BNS ont ainsi été multipliées par dix 229 ( * ) .

À la suite de cette annonce, le franc suisse s'est apprécié brutalement de plus de 15 % par rapport à l'euro.

Or les collectivités territoriales et les établissements de santé sont fortement exposés à l'évolution de la parité entre l'euro et le franc suisse. Au 31 août 2015, les prêts hors charte Gissler indexés sur la parité entre l'euro et le franc suisse représentaient ainsi 1,3 milliard d'euros au bilan de la SFIL, pour 222 emprunteurs.

Dans leur majorité, ces produits sont fondés sur une parité « pivot » de 1,44 franc suisse pour un euro - seuil « psychologique » qui n'avait jamais été franchi sur les marchés entre 2000 et 2010. Le taux d'intérêt de ces emprunts varie alors en fonction de la différence entre ce cours « pivot » et la parité réelle, multipliée par un coefficient variable selon les emprunts et majorée du taux d'intérêt initial.

Le montant de l'indemnité de remboursement anticipé (IRA) se déduit du montant que la banque doit payer à ses contreparties pour rompre les contrats de couverture liés à ces emprunts, qui dépend fortement du niveau de la parité.

Pour les établissements publics de santé et les collectivités territoriales, l'appréciation du franc suisse s'est donc traduite par une forte hausse du coût de sortie des emprunts structurés indexés sur la parité entre l'euro et le franc suisse .

Cet impact est d'autant plus important que les IRA étaient déjà en moyenne plus élevées pour les emprunts structurés indexés sur la parité entre l'euro et le franc suisse. D'après le rapport de la Cour des comptes précité, « les encours indexés sur la parité Euro/FCH étaient assortis d'une indemnité de remboursement anticipé moyenne de l'ordre de 130 % du capital restant dû à la fin 2012 contre 110 % pour ceux contenant une indexation sur la parité USD/FCH et 60 % pour les emprunts indexés sur la parité USD/Yen » 230 ( * ) .

Évolution de l'indemnité de remboursement anticipé des contrats classés 6F souscrits par les établissements publics de santé

(en millions d'euros)

Type d'emprunt

Classification Gissler

Montant de l'encours

Coût de sortie en décembre 2014

Coût de sortie en février 2015

Évolution

Indexé sur EUR/CHF

6F

355

589

895

+ 52 %

Hors EUR/CHF

6F

533

568

606

+ 7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données de la direction générale de l'offre de soins)

2. En conséquence, un renforcement du fonds de soutien aux collectivités territoriales et du dispositif d'accompagnement des établissements de santé a été annoncé

Afin de remédier à ces difficultés, le Gouvernement a décidé le 24 février 2015 de renforcer le fonds de soutien aux collectivités territoriales et le dispositif d'accompagnement des établissements de santé.

S'agissant du fonds de soutien, le Gouvernement a annoncé un doublement de ses ressources, soit 1,5 milliard d'euros supplémentaires. Le décret du 4 juin 2015 a précisé les modalités de ce renforcement 231 ( * ) . Par ailleurs, la prise en charge maximale du remboursement de l'IRA est portée de 45 % à 75 % par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) 232 ( * ) .

Dès l'annonce du renforcement du fonds de soutien aux collectivités territoriales, le Gouvernement a indiqué que les ressources supplémentaires seraient apportées pour moitié par l'État et pour moitié par les établissements financiers 233 ( * ) .

S'agissant du dispositif d'accompagnement des établissements de santé, le Gouvernement a annoncé un quadruplement de ses ressources, soit 300 millions d'euros supplémentaires au total sur 10 ans. La prise en charge maximale du remboursement de l'IRA est également portée de 45 % à 75 %. La période maximale de versement des aides est désormais de dix ans, contre trois auparavant. L'éligibilité du dispositif est étendue aux établissements dont le total des produits est compris entre 100 et 200 millions d'euros mais uniquement pour les emprunts indexés sur la parité entre l'euro et le franc suisse. Le périmètre des emprunts éligibles n'a donc pas été aligné sur celui des collectivités territoriales. Une nouvelle instruction interministérielle a mis en oeuvre ce renforcement 234 ( * ) .

D'après les informations transmises à votre rapporteur général, ce renforcement du dispositif d'accompagnement des établissements de santé permettra d'augmenter le taux de prise en charge des IRA à 55 % en moyenne sur l'ensemble des encours éligibles, pour un reste à charge de 322 millions d'euros sur la base des IRA calculées fin février 2015. Au total, le dispositif pourra aider à sécuriser les encours les plus risqués de 50 établissements sur les 72 encore exposés à des emprunts classés hors charte Gissler.

S'agissant du financement, le Gouvernement a indiqué que les ressources supplémentaires - 30 millions d'euros par an pendant dix ans - seraient intégralement apportées par les établissements financiers 235 ( * ) .

Compte tenu de ces annonces, les établissements financiers devaient ainsi être mobilisés au minimum à hauteur de 80 millions d'euros par an de 2016 à 2025 , puis 50 millions d'euros par an entre 2026 et 2028 pour financer le renforcement des deux dispositifs.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LE DOUBLEMENT DU MONTANT DU FONDS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le I du présent article vise à doubler le montant du fonds de soutien aux collectivités territoriales , qui serait désormais de 200 millions d'euros par an, contre 100 millions d'euros actuellement.

B. UNE AUGMENTATION DU TAUX DE LA TAXE POUR LE FINANCEMENT DU FONDS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Afin que les banques contribuent à ce renforcement, le II propose d'augmenter le taux de la taxe pour le financement du fonds du soutien de 0,026 % à 0,0642 % pour les années 2016 à 2025 puis de le ramener à 0,0505 % pour les années 2026 à 2028 afin de tenir compte de l'extinction du dispositif de soutien aux établissements publics de santé.

C. L'AFFECTATION D'UNE FRACTION DE CETTE TAXE À LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)

Afin de faire participer les banques au financement du renforcement du dispositif de soutien aux établissements publics de santé, le III du présent article propose d'affecter une fraction de cette taxe - 28 millions d'euros - à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de Marc Goua et de plusieurs de ses collègues, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à modifier les modalités de refinancement des emprunts toxiques.

Le Gouvernement a donné un avis favorable à l'adoption de cet amendement, Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du Budget, précisant néanmoins que le Gouvernement « se réserve le droit de modifier un certain nombre de points rédactionnels de détail pendant la navette : à la relecture, il reste en effet de petites précisions à apporter 236 ( * ) ».

A. L'INTERDICTION, POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, DE RECOURIR À UN EMPRUNT À RISQUE LORS DU REFINANCEMENT

La loi de séparation et de régulation des activités bancaires 237 ( * ) a encadré les conditions d'emprunts des collectivités territoriales et de leurs groupements.

Ainsi, l'article L. 1611-3-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit désormais qu'un emprunt doit être libellé en euros ou en devises étrangères ; les emprunts libellés en devises doivent être assortis d'une couverture du risque de change et, dans le cas d'emprunts à taux variable, « la formule d'indexation des taux variables doit répondre à des critères de simplicité ou de prévisibilité ».

L'application stricte de cette disposition aurait toutefois empêché une collectivité de réduire le risque auquel elle était exposée en remplaçant l'emprunt toxique détenu par un autre emprunt, également non conforme, mais moins risqué.

C'est pourquoi une dérogation à ces conditions a été prévue à l'article L. 1611-3-1 précité « lorsque la souscription d'un emprunt ou d'un contrat financier, par la voie d'un avenant ou d'un nouveau contrat, a pour effet de réduire le risque associé à un emprunt ou un contrat financier non conforme ». Cette dérogation s'applique donc dans le seul cas d'une renégociation, afin de diminuer le risque porté par la collectivité locale.

Le refinancement d'un emprunt

Une collectivité territoriale souhaitant « déboucler » un emprunt toxique doit payer une indemnité de remboursement anticipée (IRA) et rembourser le capital restant dû. Pour cela, elle doit généralement souscrire un nouvel emprunt.

L'amendement adopté à l'Assemblée nationale prévoit que cette dérogation « n'est pas applicable aux nouveaux emprunts consentis ». En droit, le dispositif adopté par l'Assemblée nationale revient donc à neutraliser la dérogation prévue à l'article L. 1611-3-1 précité. Selon l'exposé sommaire de l'amendement, il s'agit en effet de « ne pas autoriser le refinancement d'un emprunt à risque par autre chose qu'un emprunt à taux fixe ou à taux variable simple ».

En fait, il semble que l'intention des auteurs de l'amendement soit d'interdire cette possibilité dans le seul cas où les collectivités bénéficient de l'aide du fonds de soutien (cf. infra ).

B. LA POSSIBILITÉ, POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, DE SE REFINANCER DANS LES LIMITES DU TAUX DE L'USURE APPLICABLE LORS DE LA SIGNATURE DE L'EMPRUNT TOXIQUE

L'article 9 tel qu'issu du vote de l'Assemblée nationale, prévoit que « par exception », « le taux d'usure applicable aux nouveaux emprunts consentis est celui qui était applicable à la date à laquelle le prêt ou le contrat financier faisant l'objet de la renégociation a été initialement consenti ».

L'objectif , pour les auteurs de l'amendement, serait d'autoriser les établissements bancaires à prêter aux collectivités concernées à un taux plus élevé que le taux d'usure actuel (de l'ordre de 3,7 % selon les auteurs de l'amendement) afin que ces dernières puissent limiter leur endettement .

Ainsi, il s'agirait de substituer au taux d'usure actuel, particulièrement bas, le taux d'usure de la date à laquelle le prêt toxique a été consenti, qui pourrait être de l'ordre de 5 ou 6 %.

Exemple de l'évolution du seuil de l'usure
des prêts à taux variable de plus de 2 ans aux administrations publiques et institutions sans but lucratif au service des ménages

(en %)

Source : Banque de France

Cette proposition ne modifierait pas la somme totale due par l'emprunteur (capital et intérêts), mais présente deux intérêts pour la collectivité territoriale ; elle lui permettrait en effet :

- d' alléger le montant de l'emprunt en augmentant celui des « intérêts » payés chaque année (les charges annuelles dues au titre des taux d'intérêt n'étant pas prises en compte au titre de sa dette) ;

- ou d' allonger la durée du prêt .

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN AMÉNAGEMENT QUI PERMET DE FINANCER LE RENFORCEMENT DU FONDS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DU DISPOSITIF D'ACCOMPAGNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

Le relèvement du taux de la taxe pour le financement du fonds du soutien devrait permettre d'assurer une contribution du secteur bancaire conforme aux annonces du Gouvernement :

Recettes attendues du relèvement de la taxe

(en millions d'euros)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

Collectivités

territoriales

50

52

54

56

58

60

62

65

67

69

64

66

67

Établissements

publics de santé

28

28

28

28

28

28

28

28

28

28

0

0

0

Rendement total

78

80

82

84

86

88

90

93

95

97

64

66

67

Note de lecture : L'estimation est réalisée à partir de l'assiette 2015, à laquelle est appliqué un dynamisme de 2,5 % par an.

Source : commission des finances du Sénat (d'après l'évaluation préalable de l'article du projet de loi)

Si seulement 28 millions d'euros sont affectés aux établissements publics de santé, le différentiel de 2 millions d'euros par rapport aux 30 millions d'euros initialement annoncés doit être apporté par la SFIL sous la forme d'une « contribution volontaire », pour un total de 20 millions d'euros sur 10 ans.

Entre 2016 et 2025, la contribution totale des banques au renforcement du dispositif de soutien aux établissements de santé s'élèverait donc à 300 millions d'euros.

En revanche, la SFIL ne versera pas de contribution supplémentaire au titre du fonds de soutien aux collectivités territoriales.

Entre 2016 et 2028, la contribution des banques au renforcement du fonds de soutien aux collectivités territoriales s'élèverait ainsi à 790 millions d'euros.

Ce renforcement ne saurait toutefois mettre fin aux risques liés à la sortie des emprunts structurés indexés sur la parité entre l'euro et le franc suisse.

B. UN RENFORCEMENT QUI NE SAURAIT MASQUER LES RISQUES LIÉS À L'ÉVOLUTION FUTURE DE LA PARITÉ ENTRE L'EURO ET LE FRANC SUISSE

1. L'évolution de la parité entre l'euro et le franc suisse reste incertaine

Depuis janvier 2015, la hausse de la parité entre l'euro et le franc suisse a permis d'effacer la moitié de la baisse enregistrée en janvier 2015 à la suite de l'annonce par la BNS de l'abandon du taux plancher de 1,20 franc suisse pour un euro.

Évolution de la parité euro / franc suisse entre janvier et septembre 2015

Source : Bloomberg

Certains analystes estiment qu'un retour à une parité de 1,20 franc suisse pour un euro est désormais envisageable 238 ( * ) , en raison des signes de reprise au sein de la zone euro, du maintien de taux d'intérêt négatifs par la BNS et des interventions limitées de la BNS sur les marchés des changes depuis janvier 2015.

De fait, de nombreux indicateurs suggèrent que le franc suisse reste surévalué. À titre d'illustration, le FMI estime 239 ( * ) que le taux de change effectif réel du franc suisse était surévalué de 0 à 10 % en 2014 par rapport aux fondamentaux, surévaluation qui s'est aggravée avec l'appréciation enregistrée depuis janvier 2015 240 ( * ) .

L'incertitude concernant l'évolution future de la parité - qui semble aujourd'hui stabilisée autour de 1,10 - reste toutefois importante.

À court-terme, plusieurs évènements pourraient ainsi conduire à une nouvelle appréciation du franc suisse par rapport à l'euro :

- la Banque centrale européenne (BCE) pourrait décider lors d'un prochain Conseil des gouverneurs d'augmenter son programme d'achat ou de l'étendre au-delà de septembre 2016, ce qui conduirait vraisemblablement à une dépréciation de l'euro ;

- la Réserve fédérale américaine (FED) pourrait décider lors d'un prochain Comité de politique monétaire de remonter ses taux directeurs, décision dont l'impact négatif sur les pays émergents pourrait conduire à une appréciation du franc suisse par rapport à l'euro, compte tenu de son statut de « valeur refuge » ;

- pour la même raison, une éventuelle dégradation de la situation en Grèce ou dans un autre pays de la zone euro vulnérable conduirait vraisemblablement à une appréciation du franc suisse 241 ( * ) .

2. Cette incertitude doit inviter à la prudence

Compte tenu du montant parfois très élevé des IRA, certaines collectivités territoriales pourraient être tentées d'attendre une amélioration des conditions de marché pour « sortir » de leurs emprunts toxiques à moindre coût.

En effet, contrairement aux établissements publics de santé, les collectivités territoriales peuvent, pour une durée limitée à trois ans renouvelable, utiliser l'aide du fonds de soutien pour alléger leur charge d'intérêt sans avoir à procéder immédiatement au remboursement anticipé des contrats 242 ( * ) .

Toutefois, les collectivités territoriales qui choisiraient de différer le débouclage de leurs emprunts s'exposeraient fortement à l'évolution de la parité car le montant annuel de l'aide ne pourra être supérieur à ce qu'il aurait été si le demandeur avait procédé au remboursement anticipé du prêt 243 ( * ) .

Ainsi, la collectivité territoriale qui ferait ce choix porterait seule le risque d'évolution défavorable des conditions de marché, alors même que le mode de calcul du taux d'intérêt est souvent très sensible à l'évolution de la parité sur ce type d'emprunt.

Impact de l'évolution de la parité euro / franc suisse sur le taux d'intérêt annuel
d'un emprunt structuré « classique »

(en %)

15-déc 2014

15-janv 2015

15-sept 2015

Parité euro / franc suisse

1,20

0,98

1,10

Taux d'intérêt annuel

16,5 %

27,5 %

21,5 %

Note de lecture : Pour réaliser cette simulation, on prend le cas d'un emprunt toxique dont la parité « pivot » est fixée à 1,44. En-dessous de ce cours « pivot », le taux d'intérêt devient variable. La variation correspond alors à la moitié de la différence entre le cours « pivot » et la parité réelle, majorée du taux d'intérêt fixe initial (4,5 % ici).

Source : commission des finances du Sénat

Si votre rapporteur général ne souhaite pas revenir sur la possibilité laissée aux collectivités territoriales de bénéficier temporairement des aides sans déboucler les emprunts, la libre administration des collectivités territoriales devant être préservée, il n'en demeure pas moins qu'il serait particulièrement risqué pour les collectivités territoriales de « parier » sur une évolution favorable de la parité.

C. UNE NOUVELLE CONTRIBUTION DU SECTEUR BANCAIRE DE NATURE À PORTER ATTEINTE À SA CAPACITÉ DE PRÊT

Évolution des contributions du secteur bancaire

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

Taxe de risque systémique (TRS) avant réforme

1 100

1 100

1 100

1 200

1 200

TRS modifiée (LFR 2014)

700

600

500

300

0

Contribution au fonds de résolution unique (FRU)

1 100

1 500

1 600

1 700

1 700

Non-déductibilité de la TRS et des contributions

au FRU (LFR 2014)

650

830

830

670

570

Taxe pour le financement du fonds de soutien

40

40

50

50

50

Taxe pour le financement du fonds de soutien

modifiée (PLF 2016)

-

118

130

132

134

Augmentation des contributions du secteur bancaire

depuis la LFR 2014

1 390

1 908

1 910

1 552

1 154

Note de lecture : l'évolution des contributions correspond à L2-L1+L3+L4+L5 en 2015 et L2-L1+L3+L4-L5+L6 de 2016 à 2019

Source : commission des finances (d'après les documents budgétaires)

D. DES PRÉCISIONS SUR LE FONCTIONNEMENT DU FONDS DE SOUTIEN POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Une restriction bienvenue du type de prêt qu'une collectivité peut souscrire pour sortir des emprunts toxiques et bénéficier de l'aide du fonds

En ce qui concerne l'amendement adopté par l'Assemblée nationale sur l'interdiction de refinancer un prêt structuré par un autre prêt également structuré mais moins risqué, il semble que l'intention de ses auteurs soit de conditionner le versement de l'aide du fonds de soutien à la non-conclusion d'un nouvel emprunt « à risque » pour le refinancement de l'emprunt toxique.

A contrario , les collectivités n'ayant pas présenté un dossier d'aide au fonds de soutien pourraient refinancer un prêt structuré par un autre prêt structuré moins risqué : elles continueraient donc bien à bénéficier de la dérogation prévue par l'article L. 1611-3-1 du CGCT.

Votre commission des finances vous propose un amendement précisant que l'interdiction s'applique uniquement aux emprunts permettant de refinancer l'IRA au titre de laquelle l'aide du fonds est versée ainsi que, le cas échéant, le capital restant dû. Elle considère en effet que le bénéfice du fonds de soutien doit être réservé aux collectivités territoriales qui « sortent » définitivement des emprunts structurés : le fonds de soutien ne saurait contribuer à financer de nouveaux prêts structurés, même s'ils sont moins risqués que les emprunts initiaux.

Cette disposition figurait d'ailleurs initialement dans le décret d'application de l'article 92 de la loi de finances pour 2014 précité ; le Conseil d'État a toutefois jugé qu'il s'agissait d'une disposition législative.

2. Recourir à des taux d'intérêt élevés pour réduire le taux d'endettement : un artifice discutable

L'objectif de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale est également de permettre aux collectivités territoriales qui doivent réemprunter pour acquitter une IRA importante de souscrire de nouveaux emprunts au capital faible mais assorti d'un taux d'intérêt plus élevé, afin que la désensibilisation conduise à une hausse plus faible de leur endettement .

En effet, pour payer l'IRA, la collectivité territoriale doit recourir à un nouvel emprunt, qui peut être important, vu le montant des IRA en jeu (cf. supra ). La « sortie » d'un emprunt toxique peut donc avoir pour conséquence une forte augmentation de l'endettement de la collectivité concernée. Aussi, certaines collectivités territoriales envisageraient de renoncer à recourir au fonds de soutien et à désensibiliser leurs emprunts toxiques pour éviter de voir leur endettement augmenter de façon trop importante.

Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale permettrait aux collectivités territoriales qui le souhaitent (et avec l'accord de l'établissement de crédit) de répartir différemment la somme due à l'établissement bancaire entre capital restant dû et taux d'intérêt - en diminuant la part du capital à rembourser et en augmentant la charge d'intérêt ce qui permet d'afficher un ratio d'endettement plus faible.

Par exemple, si une collectivité territoriale doit acquitter une IRA de 100, pour un emprunt dont le capital restant dû est de 40, elle peut, pour sortir de son emprunt toxique, refinancer 40 par un prêt à taux fixe (1,5 %) et emprunter sur 18 ans pour payer l'IRA de 100.

Selon le taux d'intérêt maximal accordé par la banque, l'endettement de la collectivité résultant du refinancement de l'IRA sera compris entre 66,8 et 84,3.

Exemple d'une collectivité devant rembourser une IRA de 100

Cas A

Cas B

Cas C

Taux

3,30 %

4,95 %

6,00 %

Endettement supplémentaire

84,3

72,9

66,8

(taux d'intérêt) (emprunt)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données fournies par le fonds de soutien

Ce dispositif aurait pour conséquence de pouvoir limiter, en affichage, le taux d'endettement de la collectivité résultant de la renégociation de son emprunt toxique. Il pourrait en résulter une moindre transparence sur la réalité de l'endettement de certaines collectivités territoriales.

Votre rapporteur général vous propose par conséquent d'adopter un amendement supprimant cette possibilité .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 9 bis (nouveau) (Art. 150 U du code général des impôts) - Prorogation d'une année des dispositifs d'exonération applicables en matière d'imposition de plus-values des particuliers en cas de cessions de biens immobiliers au profit direct ou indirect d'organismes chargés du logement social

Commentaire : le présent article prévoit de proroger d'une année les dispositifs d'exonération d'imposition de plus-values immobilières des particuliers en cas de cessions de biens immobiliers au profit direct ou indirect d'organismes chargés du logement social, sauf dans les quartiers entrant dans le champ du NPNRU.

I. LE DROIT EXISTANT

Une plus-value réalisée par une personne physique correspond à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition d'un bien immobilier.

Les plus-values sont soumises à l'impôt sur le revenu . Elles ne sont toutefois plus soumises au barème progressif, depuis la loi de finances pour 2004 244 ( * ) , mais à un taux forfaitaire, actuellement fixé à 19 %. Le paiement de l'impôt est majoré des prélèvements sociaux, soit 15,5 %.

Toutefois, un dispositif d'abattement pour durée de détention permet de réduire le montant de l'imposition en fonction du nombre d'années de détention du bien cédé.

En outre, sous certaines conditions, différents cas d'exonération sont prévus par la loi. Ainsi en est-il par exemple des résidences principales.

Certaines exonérations sont également temporaires , à l'instar de celle instaurée par l'article 34 de la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale 245 ( * ) concernant les plus-values immobilières réalisées lors de la cession par des particuliers de biens immobiliers au profit d'organismes chargés du logement social avant le 31 décembre 2007.

Ce dispositif, codifié au 7° du II de l'article 150 U du code général des impôts (CGI), prévoit que sont exonérées les cessions d'immeubles, de parties d'immeubles ou de droits relatifs à ces biens, réalisées par des particuliers au profit des bailleurs sociaux suivants :

- les organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) ;

- les sociétés d'économie mixte gérant des logements sociaux ;

- l'association Foncière logement mentionnée à l'article L. 313-34 du code de la construction et de l'habitation et les sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts pour les logements visés au 4° de l'article L. 351-2 du même code ;

- les organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu par l'article L. 365-2 du code de la construction et de l'habitation.

Dans la même optique, le 8° du II de l'article 150 U dispose que sont également exonérées les cessions d'immeubles, de parties d'immeubles ou de droits relatifs à ces biens, réalisées par des particuliers au profit des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale ou des établissements publics fonciers en vue de leur cession à l'un des organismes mentionnés au 7°.

Ce dispositif temporaire a été reconduit à deux reprises :

- jusqu'au 31 décembre 2009 par l'article 34 de la loi de finances pour 2008 246 ( * ) ;

- jusqu'au 31 décembre 2011 en vertu du II de l'article 38 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2009 247 ( * ) ;

Afin d'atteindre l'objectif de construction de 150 000 logements sociaux par an, l'article 27 de la loi de finances pour 2014 248 ( * ) a rétabli cette exonération pour les plus-values réalisées du 1 er janvier 2014 au 31 décembre 2015 .

Selon le tome II du Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2015, la dépense fiscale associée à cette exonération s'est élevée à 10 millions d'euros en 2014 et en 2015.

Ce dispositif d'exonération d'imposition de plus-values immobilières a fait l'objet de plusieurs ajustements portés par l'article 9 de la loi de finances pour 2015 249 ( * ) . Cet article avait été introduit par l'Assemblée nationale et prévoyait d'étendre le bénéfice de l'exonération d'imposition des plus-values immobilières aux cas où tout cessionnaire s'engage à réaliser des logements sociaux, quelle que soit la nature juridique de l'acquéreur. Cette exonération était toutefois appliquée « à proportion de la part de logements sociaux réalisés dans le programme ».

Votre rapporteur général avait présenté un amendement à cet article afin de mieux encadrer les dispositions votées par l'Assemblée nationale. Adopté par la commission des finances du Sénat, cet amendement prévoyait que :

- le cessionnaire devait prendre l'engagement de construire des logements sociaux dans un délai de quatre ans;

- l'exonération ne portait qu'à proportion de la surface du bien sur laquelle il s'engageait à réaliser des logements sociaux, et non à proportion de la part de logements sociaux réalisés dans le programme ;

- le cessionnaire se verrait appliquer une amende de 25 % du prix de cession, en cas de manquement à ses obligations dans le délai de quatre ans ;

- en cas de fusion de sociétés, l'engagement souscrit ne serait pas rompu.

En séance publique, l'amendement de votre rapporteur général a été adopté avec un sous-amendement de notre collègue Philippe Dallier prévoyant que :

- l'engagement du cessionnaire de construire des logements sociaux dans un délai de quatre ans devait respecter une condition formelle en figurant dans l'acte de cession 250 ( * ) . L'amende en cas de manquement à ses obligations dans un délai de quatre ans était limitée à 10 %, et non plus 25 %, du prix de cession ;

- si le cessionnaire n'avait pas obtenu, dans un délai de dix-huit mois à compter de l'acquisition du bien, l'agrément de construction, il serait redevable d'une amende d'un montant égal à 10 % du prix de cession mentionné dans l'acte. Il s'agissait de raccourcir le délai au terme duquel le respect de l'engagement serait vérifié en prévoyant une étape intermédiaire afin de s'assurer que les agréments de construction de logements sociaux avaient bien été demandés et accordés.

L'ensemble de ces dispositions figuraient dans la version définitive de l'article 9 de la loi de finances pour 2015.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article 9 bis est issu de deux amendements adoptés par l'Assemblée nationale et qui tendent à modifier les 7° et 8° du II de l'article 150 U du code général des impôts.

A. LA RECONDUCTION DES DISPOSITIFS D'EXONÉRATION DES PLUS-VALUES IMMOBILIÈRES PRÉVUS AUX 7 ° ET 8° DU II DE L'ARTICLE 150 U DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS

Le premier de ces deux amendements, déposé par le Gouvernement et adopté avec un avis favorable de la commission des finances, vise tout d'abord à reconduire jusqu'au 31 décembre 2016 l'exonération totale des plus-values immobilières réalisées par des particuliers dans les conditions déterminées par les 7° et 8° du II de l'article 150 U du code général des impôts, ce qui devrait représenter, en 2016 comme en 2015, une dépense fiscale de 10 millions d'euros.

Par ailleurs, alors que l'article 9 de la loi de finances pour 2015 avait étendu le bénéfice de cette exonération aux cas de plus-values immobilières réalisées lors de ventes « à tout cessionnaire qui s'engage, par une mention portée dans l'acte authentique d'acquisition, à réaliser et à achever des logements sociaux » (cf. supra ), le présent article vise à préciser ces dispositions, afin de favoriser leur bonne application.

Il propose ainsi une définition restrictive des logements sociaux en faisant référence précisément aux logements mentionnés aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation.

Il s'agit :

- des logements à usage locatif construits, acquis ou améliorés à compter du 5 janvier 1977 au moyen de formes spécifiques d'aides de l'État ou de prêts dont les caractéristiques et les conditions d'octroi sont déterminées par décrets ainsi que des logements à usage locatif construits à compter du 1 er octobre 1996 ayant bénéficié d'une décision favorable, l'octroi de ces aides ou de la décision favorable étant subordonné à l'engagement pris par les bailleurs de respecter certaines obligations définies par décrets et précisées par des conventions ;

- des logements-foyers de jeunes travailleurs et des logements-foyers assimilés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État aux logements à usages locatifs mentionnés ci-dessus.

Alors que l'article 9 précité prévoyait que l'exonération d'imposition de plus-value immobilière lors d'une cession pour réalisation de logements sociaux serait calculée à proportion de la surface du bien sur laquelle le cessionnaire s'engagerait à les réaliser, l'amendement déposé par le Gouvernement précise que « l'exonération est calculée au prorata de la surface habitable des logements sociaux construits par rapport à la surface totale des constructions mentionnées sur le permis de construire du programme immobilier ».

Il supprime également l'amende d'un montant égal à 10 % du prix de cession mentionné dans l'acte de vente dont devait s'acquitter le cessionnaire s'il n'avait pas obtenu l'agrément de construction dans un délai de dix-huit mois à compter de l'acquisition du bien.

Le Gouvernement estime en effet inutile de prévoir deux amendes différentes alors que le 7° du II de l'article 150 U prévoyait déjà qu'en cas de manquement à l'engagement d'achèvement des locaux au terme du délai de quatre ans, le cessionnaire est redevable d'une amende d'un montant égal à 10 % du prix de cession mentionné dans l'acte.

Cet amendement prévoit enfin que les dispositions du 7° et du 8° du II de l'article 150 U s'appliquent également aux cessions d'immeubles, de parties d'immeubles ou de droits relatifs à ces biens précédées d'une promesse unilatérale de vente ou d'une promesse synallagmatique de vente ayant acquis date certaine au plus tard le 31 décembre 2016 et réalisées au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle au cours de laquelle la promesse unilatérale de vente ou la promesse synallagmatique de vente a acquis une date certaine.

Cela signifie que la réalisation de la vente pourra être réalisée au plus tard deux ans après la promesse unilatérale ou synallagmatique de vente, sous réserve que celle-ci ait acquis date certaine avant le 31 décembre 2016.

B. L'EXCLUSION DU BÉNÉFICE DE L'EXONÉRATION DES QUARTIERS CONCERNÉS PAR LE NOUVEAU PROGRAMME NATIONAL DE RENOUVELLEMENT URBAIN

Le second amendement adopté par l'Assemblée nationale dont est issu le présent article 9 bis a été déposé par notre collègue député François Pupponi au nom de la commission des affaires économiques. Il a reçu un avis défavorable de la commission des finances et un avis de sagesse du Gouvernement.

Cet amendement prévoit que les dispositions des 7° et 8° du II de l'article 150 U du code général des impôts exonérant les plus-values immobilières réalisées par des particuliers dans le but de soutenir la construction de logements sociaux ne doivent pas s'appliquer dans les quartiers visés par le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) , c'est-à-dire faisant l'objet d'une convention prévue à l'article 10-3 de la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine 251 ( * ) .

Les auteurs de ce second amendement souhaitent en effet que les logements sociaux démolis dans le cadre du NPNRU soient reconstitués en priorité en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville afin de lutter contre les concentrations de pauvreté et de favoriser la mixité sociale, ainsi que le préconisent les conclusions du Comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015 252 ( * ) .

En effet, deux mesures avaient été avancées par ce CIEC afin de « mieux répartir le parc social sur les territoires » :

- d'une part, construire des logements sociaux dans les communes défaillantes et, inversement, donner des instructions aux préfets « pour limiter la construction de logements sociaux dans les 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville dès lors que le taux de logement y dépassera 50 % » ;

- d'autre part, dans le cadre du NPNRU, prévoir que « l'offre de logements sociaux démolis sera reconstituée en priorité en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le logement intermédiaire et l'accession à la propriété seront favorisés dans ces quartiers . »

Il convient d'ailleurs de noter qu'afin de tenir compte des mesures prises dans le cadre de ce CIEC, le règlement général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) relatif au NPNRU 253 ( * ) du 8 août 2015 prévoit déjà que la reconstitution de l'offre de logements à bas loyer sera, pour favoriser la mixité sociale, « située en dehors des quartiers prioritaires de la ville (QPV) et des quartiers hors QPV ayant fait l'objet du programme national de rénovation urbaine (PNRU), ainsi que des communes dont la part de logements locatifs sociaux (LLS) dans le parc de logement est supérieure à 50%, sauf contexte spécifique argumenté. » À titre exceptionnel, les constructions pourront être réalisées à l'intérieur des quartiers.

Pour mémoire, le NPNRU a été lancé pour la période 2014-2024 par la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la rénovation urbaine 254 ( * ) .

Doté de 5 milliards d'euros de financement de l'ANRU avec le concours de l'Action logement, il doit bénéficier à 216 quartiers d'intérêt national présentant les « dysfonctionnements urbains les plus importants » parmi les quartiers prioritaires de la politique de la ville. La liste de ces quartiers, où vivent plus de 2 millions de personnes, a été fixée par un arrêté du 29 avril 2015 255 ( * ) (ils recevront 4 milliards d'euros de financements). 250 quartiers d'intérêt régional identifiés dans le cadre des contrats de plan État-région s'y ajouteront également (ces quartiers recevront 850 millions d'euros de financement).

Le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) selon l'article 9-1 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine

Art. 9-1.-I. Dans le cadre fixé par les contrats de ville, le nouveau programme national de renouvellement urbain concourt à la réalisation des objectifs de la politique de la ville par des interventions en faveur de la requalification des quartiers prioritaires de la politique de la ville définis à l'article 5 de cette même loi. Ce programme, qui couvre la période 2014-2024, vise en priorité les quartiers présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants.

« Si la requalification des quartiers prioritaires le nécessite, ces interventions peuvent être conduites à proximité de ceux-ci. La production de logements locatifs sociaux financée dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain s'effectue dans les unités urbaines auxquelles appartiennent les quartiers concernés par ce programme. Ce programme doit garantir une reconstitution de l'offre de logements locatifs sociaux démolis compatible avec les besoins structurels en logements locatifs sociaux fixés par les programmes locaux de l'habitat.

« Ce programme comprend les opérations d'aménagement urbain dont la création et la réhabilitation des espaces publics, la réhabilitation, la résidentialisation, la démolition et la production de logements, la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs, la création et la réorganisation d'espaces d'activité économique et commerciale ou tout autre investissement contribuant au renouvellement urbain. Il s'articule avec les actions menées par d'autres acteurs visant à prévenir la dégradation des copropriétés. Il participe avec ces acteurs au traitement des copropriétés dégradées et au traitement de l'habitat indigne. »

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Il ne semble pas exister d'évaluation sur l'efficacité des exonérations d'imposition en matière de plus-values immobilières des particuliers prévues par les 7° et 8° du II de l'article 150 U du code général des impôts jusqu'au 31 décembre 2015, ni même de données sur le nombre d'opérations concernées .

Dès lors, votre rapporteur général considère qu'il n'est pas opportun de proroger à l'aveugle , une fois de plus, une exonération dont la perte annuelle de recettes est estimée à 10 millions d'euros pour le budget de l'État .

Plus largement, et conformément aux conclusions de la mission du groupe de travail sur le logement, il lui paraît nécessaire de cesser de reconduire de façon quasi-automatique les multiples dépenses fiscales , même de faible ampleur, qui viennent grever les recettes de l'État sans que la démonstration de leur caractère véritablement incitatif n'ait été apportée .

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

II. - RESSOURCES AFFECTÉES
A. - Dispositions relatives aux collectivités territoriales
ARTICLE 10 (Art. L. 1613-1, L. 2335-3 et L. 334-17 du code général des collectivités territoriales, art. 1384 B et 1586 B du code général des impôts, art. 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 de finances pour 1992, art. 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, art. 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, art. 7 et art. 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, art. 42 de la loi n° 2000-1352 du 30 décembre 2000 de finances pour 2001, art. 49 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, art. 6 de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, art. 137 et art. 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, art. 6 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987, art. 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement des territoires, art. 95 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998, art. 2 et art. 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, art. 51 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, art. 154 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales) - Fixation pour 2016 de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des allocations compensatrices d'exonérations d'impôts directs locaux (IDL)

Commentaire : le présent article fixe le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour l'année 2016 ainsi que le taux de minoration des variables d'ajustement.

I. LE DROIT EXISTANT

Les modalités de calcul du montant de dotation globale de fonctionnement (DGF) versé aux collectivités territoriales ont évolué dans le temps.

En 1996, un premier dispositif d'indexation est mis en place en vertu duquel le montant de DGF est soumis à une indexation triennale sur l'inflation. À partir de 1999, la DGF évolue chaque année en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'inflation de l'année de versement et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut (PIB) de l'année en cours.

Dans un contexte d'accroissement de la contrainte budgétaire, la loi de finances pour 2009 256 ( * ) prévoyait une indexation sur la seule évolution des prix. Enfin, depuis la loi de finances pour 2010 257 ( * ) , l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que le montant de la DGF est fixé chaque année par la loi de finances .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

La loi de programmation des finances publiques 2014-2019 258 ( * ) a fixé la perspective d'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales pour les années 2014 à 2019. Elle prévoit une réduction de 10,7 milliards d'euros de ces concours sur la période 2015-2017 . Conformément à cette trajectoire, le présent article prévoit de réduire de 3,67 milliards en 2016 le montant des concours financiers versés.

Trajectoire 2015-2017 des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales

(en milliards d'euros)

2015

2016

2017

Concours financiers

53,45

49,79

46,12

Variation par rapport à l'année antérieure

- 3,42

- 3,66

- 3,67

Source : loi de programmation des finances publiques 2014-2019

Comme en 2015, la baisse des dotations sera répartie entre les différentes catégories de collectivités en fonction de leurs recettes totales - c'est-à-dire les recettes de fonctionnement et d'investissement - figurant dans les comptes de gestion 2013. Le montant de l'effort demandé est ainsi de 2,071 milliards d'euros pour les communes et les intercommunalités, 1,148 milliard d'euros pour les départements et de 451 millions d'euros pour les régions .

Le Gouvernement a conservé la même clé de répartition de la contribution au redressement des finances publiques que celle de l'année précédente , sans l'actualiser en fonction des données des comptes de gestion de 2014. Or, les différentes catégories de collectivités ont connu une évolution contrastée de leurs recettes totales entre 2013 et 2014, marquée par une hausse de 1,1 % pour les régions et de 1,9 % pour les départements, contre une baisse de 1,4 % pour les communes 259 ( * ) . La part respective dans les recettes totales des collectivités a ainsi évolué en 2014 : le bloc communal a perçu 55,7 % des recettes totales (contre 56,4 % en 2013), les départements 31,7 % (contre 31,2 % en 2013) et les régions 12,5 % (contre 12,3 % en 2013).

Recettes totales des différentes catégories de collectivités territoriales
en 2013 et 2014

Recettes totales

(en milliards d'euros)

Part dans les recettes totales des collectivités

(en pourcentage)

Bloc communal

2013

130,1

56,4 %

2014

128,7

55,7 %

Départements

2013

71,9

31,2 %

2014

73,2

31,7 %

Régions

2013

28,4

12,3 %

2014

28,8

12,5 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir du rapport 2015 de l'Observatoire des finances locales

La baisse des concours financiers de l'État en 2016 ne sera donc pas strictement répartie au prorata des recettes des collectivités dans les recettes totales . Ce choix de ne pas modifier le critère de répartition de la contribution au redressement des finances publiques par catégorie de collectivité est justifié par le Gouvernement par la volonté d'offrir de la lisibilité aux collectivités dans un contexte de réforme de la DGF, réforme pourtant reportée au 1 er janvier 2017.

La baisse des concours financiers de l'État se traduit par une réduction du niveau de la dotation globale de fonctionnement (DGF) attribuée aux collectivités territoriales de 3,67 milliards d'euros. Mais, par ailleurs, le montant de la DGF progresse ; la réduction effective de la DGF perçue par les collectivités sera donc de 3,5 milliards d'euros . Afin de porter la contribution au redressement des finances publiques des collectivités à 3,67 milliards d'euros, une partie des allocations compensatrices d'exonérations d'impôts directs locaux, qui constituent les « variables d'ajustement », font l'objet d'une minoration.

A. LA POURSUITE DE LA BAISSE DE LA DOTATION GÉNÉRALE DE FONCTIONNEMENT

Le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) versé aux collectivités territoriales en 2016 est fixé par le I du présent article à 33,1 milliards d'euros , ce qui représente une réduction effective de 3,5 milliards d'euros par rapport à 2015.

Évolution du montant de DGF versé aux collectivités territoriales

(en milliards d'euros) (en pourcentage)

Note de lecture : Le montant de DGF versé est déterminé par l'échelle de gauche. Le pourcentage d'évolution annuelle du montant de DGF versé est déterminé par l'échelle de droite.

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'article L. 1613-1 du CGCT

La réduction de 3,67 milliards d'euros appliquée au montant de DGF versé est en effet « compensée » par l'évolution haussière du montant de DGF en 2016 par rapport à 2015 , qui s'explique par :

- une augmentation de 158,5 millions d'euros pour financer la progression des dotations de péréquation verticale 260 ( * ) ;

- une augmentation de 11,4 millions d'euros de la DGF effectivement répartie en 2015 par rapport à la loi de finances initiale, du fait des cas de « DGF négatives » qui ont minoré la contribution au redressement des finances publiques que devaient verser les collectivités territoriales ;

- une augmentation de 2,5 millions d'euros liée à l'achèvement des missions de préfiguration confiée aux métropoles du Grand Paris et d'Aix-Marseille Provence ;

- une diminution de 0,9 million d'euros liée à la recentralisation de la politique de vaccination dans le département de la Martinique.

De la DGF 2015 à la DGF 2016

(en millions d'euros)

DGF effectivement répartie en 2015

36 607,053

Progression de la péréquation

+ 158,5

Majoration de la DGF 2015 du fait des cas de « DGF négatives »

+ 11,4

Fin de la préfiguration des métropoles du Grand Paris et d'Aix-Marseille Provence

+ 2,5

Recentralisation de la politique vaccinale publique en Martinique

- 0,9

Contribution au redressement des finances publiques 2016

- 3 670

DGF 2016

33 108,514

Source : commission des finances du Sénat, à partir du projet de loi de finances pour 2016

L'article 58 du présent projet de loi de finances prévoit une hausse de la péréquation, à périmètre constant, de 317 millions d'euros : 180 millions d'euros pour la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU-CS), 117 millions d'euros pour la dotation de solidarité rurale (DSR) et 20 millions d'euros pour les dotations de péréquation des départements). Par ailleurs, la suppression de la dotation nationale de péréquation (DNP), permet d'abonder la DSU-CS et la DSR d'un montant de 794 millions d'euros , à proportion des attributions revenant aux communes de plus de 10 000 habitants (cette part abondant la DSU-CS) et de moins de 10 000 habitants (cette part abondant la DSR). Au total, ces deux dotations connaissent les augmentations suivantes :

- la DSU-CS augmente de 520,7 millions d'euros , dont 340,7 millions d'euros sont dus à la suppression de la DNP ;

- la DSR augmente de 570,4 millions d'euros , dont 453,4 millions d'euros sont dus à la suppression de la DNP.

La hausse de la péréquation hors réforme la DGF est financée pour moitié en interne à la DGF, par des mécanismes d'écrêtement, et pour moitié par une minoration des variables d'ajustement.

B. LA MINORATION DES VARIABLES D'AJUSTEMENT

Outre la DGF, d'autres concours financiers de l'État aux collectivités territoriales connaissent une évolution à la hausse en 2016 . Afin de neutraliser ces évolutions et de garantir une diminution effective de 3,67 milliards d'euros de l'enveloppe des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, le présent article prévoit de minorer certaines allocations compensatrices d'exonération de fiscalité directe locale constituant les « variables d'ajustement » .

Les concours financiers faisant l'objet d'évolutions haussières sont les suivants :

- le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) augmente de 5,7 millions d'euros - hors élargissement du FCTVA prévu par l'article 11 du présent projet de loi de finances - ;

- la dotation de compensation des pertes de base de la contribution économique territoriale (CET) et de redevance des mines augmente de 50,7 millions d'euros ;

- les crédits de la mission « Relation avec les collectivités territoriales » connaissent une hausse de 30,7 millions d'euros ;

En revanche, il existe des évolutions à la baisse qui concernent :

- les allocations compensatrices, pour un montant de 192 millions d'euros, principalement du fait de la fin de la mesure temporaire d'exonération de la taxe d'habitation pour certains redevables 261 ( * ) ;

- le montant total des prélèvements sur recettes (PSR) diminue de 5 millions d'euros, en raison de la suppression du PSR alimentant le fonds en faveur des collectivités territoriales visant à contribuer à la réparation des dégâts causés à leurs biens par des événements climatiques ou géologiques graves, dit fonds « CatNat » (article L. 1613-6 CGCT). Ce fonds est fusionné avec les subventions exceptionnelles pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques au sein d'une nouvelle dotation de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités locales touchés par des événements climatiques ou géologiques inscrite dans le programme 122 de la mission « Relation avec les collectivités territoriales ».

Le II prévoit la liste des allocations faisant l'objet d'une minoration. Par rapport à l'année précédente, le périmètre des variables d'ajustement est modifié en 2016 , suite au remplacement des zones urbaines sensibles (ZUS) et des quartiers en contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) par les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV) depuis le 1 er janvier 2015 262 ( * ) .

Ainsi, l'abattement de 30 % sur la base d'imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les logements à usage locatif situés dans les QPPV 263 ( * ) n'est pas inclus dans les variables d'ajustements soumises à minoration, contrairement à l'abattement similaire qui concernait les bases de logement faisant l'objet d'une convention d'utilité sociale (CUS). Sont en revanche inclues dans ces variables d'ajustement les exonérations de TFPB pour une durée de cinq ans s'agissant des immeubles situés dans les QPPV 264 ( * ) ainsi que l'exonération de cotisation économique territoriale (CET) pour les créations et extensions d'établissements situés dans les QPPV 265 ( * ) .

Par ailleurs, l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) de cinq ans en faveur de certains terrains situés dans les zones humides a été supprimée par l'article 26 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 ; elle n'est donc plus inclue dans les variables d'ajustement.

Variables d'ajustement retenues pour la minoration en 2015 et en 2016

2015

2016

Taxe foncière sur les propriétés bâties
(TFPB)

Personnes de conditions modestes

Personnes de conditions modestes

Logements faisant l'objet de baux à réhabilitation

Logements faisant l'objet de baux à réhabilitation

Exonérations : zones franches urbaines (ZFU)

Exonérations : zones franches urbaines (ZFU)

Exonérations : logements à caractère social

Exonérations : logements à caractère social

Abattement de 30 % (convention d'utilité sociale)

Exonérations de 5 ans pour les immeubles situés dans les QPPV

Taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB)

Terrains plantés en bois

Terrains plantés en bois

Terrains situés dans certaines zones humides

Natura 2000

Natura 2000

Contribution économique territoriale (CET)

Exonérations dites de zone (ZRR - ZRU - ZFU)

Exonérations dites de zone (ZRR - ZRU - ZFU)

Réduction pour création d'établissements (RCE)

Réduction pour création d'établissements (RCE)

Exonérations pour les créations ou extensions d'établissements dans les QPPV

Autres dotations de compensation

Dotation unifiée des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCS-TP)

Dotation unifiée des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCS-TP)

Partie ajustée des dotations pour transfert de compensations d'exonération de FDL des départements et régions (DTCE-FDL)

Partie ajustée des dotations pour transfert de compensations d'exonération de FDL des départements et régions (DTCE-FDL)

Source : annexe au PLF 2016 et au PLF 2015 « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales »

Le III fixe à 524,3 millions d'euros le montant total de ces variables d'ajustement en 2016 . Il s'agit d'un taux moyen de minoration de 5,4 % par rapport au montant de la loi de finances initiale pour 2015. Le taux de minoration est appliqué de façon uniforme sur l'ensemble des variables d'ajustement.

Détail de l'évolution des variables d'ajustement entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015

2016

Écart

(retraité)

(PLF)

2015-2016

TFBP

Personnes de condition modeste

87

79

- 8

Logements faisant l'objet de baux à réhabilitation

53

49

- 4

Exonérations : zones franches urbaines (ZFU)

2

2

0

Exonérations : logements à caractère social

34

31

- 3

Exonérations de 5 ans pour les immeubles situés dans les QPPV

-

4

-

TFPNB

Terrains plantés en bois

3

3

0

Natura 2000

1

1

0

CET

Exonérations dites de zone (ZRR - ZRU - ZFU)

13

12

- 1

Exonérations pour les créations ou extensions d'établissements dans les QPPV

-

14

-

Réduction pour création d'établissements (RCE)

7

7

0

Autres dotations de compensation

Dotation unifiée des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCS-TP)

193

171

- 22

Partie ajustée des dotations pour transfert de compensations d'exonération de FDL des départements et régions (DTCE-FDL)

172

153

- 19

TOTAL

565

526

-57

Source : commission des finances du Sénat à partir de l'annexe au PLF pour 2015 « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales »

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté huit amendements rédactionnels ou ayant pour objectif de corriger des erreurs de référence .

En seconde délibération, le Gouvernement a présenté un amendement visant à tirer les conséquences de l'adoption de son amendement I-795 relatif au dispositif de perte de base de contribution économique territoriale (CET) 266 ( * ) . Cet amendement décale d'un an le versement aux collectivités territoriales des compensations complémentaires prévues en cas de perte de base de cotisation foncière des entreprises ou de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. En conséquence, le prélèvement sur recettes (PSR) qui permet de financer cette contribution complémentaire est réduit de deux millions d'euros. Il en résulte une diminution de la minoration des variables d'ajustement, à due concurrence. Ainsi, le montant total des variables d'ajustement en 2016 est fixé à 526,3 millions d'euros , au lieu des 524,3 millions d'euros prévus initialement.

Par ailleurs, en raison du report de l'entrée en vigueur de la réforme de la DGF au 1 er janvier 2017, l'architecture actuelle des dotations de péréquation verticale sera conservée en 2016 . La dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU-CS) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) ne bénéficieront donc pas d'un abondement issu de la suppression de la dotation nationale de péréquation (DNP). En revanche, la hausse prévue de la péréquation verticale est maintenue à hauteur de 317 millions d'euros .

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE BAISSE DES DOTATIONS QUI NE CORRESPOND PAS À LA PART RÉELLE DES DÉPENSES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LA DÉPENSE PUBLIQUE TOTALE

La répartition du programme d'économies de 50 milliards d'euros prévu par la loi de programmation des finances publiques 2014-2019 pour la période 2015-2017 est la suivante :

- 18 milliards d'euros d'économies pour l'État et ses opérateurs (soit 36 %) ;

- 21 milliards d'euros d'économies pour les administrations de sécurité sociale (soit 42 %) ;

- 11 milliards d'euros d'économies pour les collectivités territoriales (soit 22 %).

La contribution au redressement des finances publiques devait être répartie en fonction du poids de chacun des sous-secteurs d'administration publique dans la dépense publique totale. Or, d'après les données de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), la part des administrations publiques locales dans la dépense publique totale était de 19 % en 2014 , contre 37,47 % pour les administrations publiques centrales et 43,5 % pour les administrations publiques de sécurité sociale.

Part des sous-secteurs d'administration dans la dépense publique totale

(en milliards d'euros)

Administrations publiques centrales

Administrations publiques locales

Administrations publiques de sécurité sociale

Dépenses

Part dans la dépense publique totale

Dépenses

Part dans la dépense publique totale

Dépenses

Part dans la dépense publique totale

2012

486,4

38,0 %

244

19,1 %

550,2

43 %

2013

488,1

37,5 %

252,2

19,4 %

562,3

43,2 %

2014

494,8

37,4 %

251,5

19 %

575,3

43,5 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données de l'Insee (Comptes de la Nation)

Ainsi, l'effort demandé aux collectivités territoriales afin de contribuer au redressement des comptes publics est proportionnellement supérieur au poids de celles-ci dans la dépense publique . En appliquant une clé de répartition strictement proportionnelle du plan d'économies, les collectivités territoriales seraient appelées à contribuer à la baisse de la dépense publique à hauteur de 9,5 milliards d'euros et non de 11 milliards d'euros. Après la baisse de dotations déjà réalisée de 3,5 milliards d'euros en 2015, l'effort restant des collectivités serait donc de 6 milliards d'euros en 2016 et 2017, soit 3 milliards d'euros par an au lieu de 3,67 milliards d'euros .

Par ailleurs, la part des administrations publiques locales dans le déficit public et dans la dette publique totale est faible et s'est réduite entre 2012 et 2014 lorsque celle des administrations publiques centrales (APUC) progressait.

En 2014, la dette publique des APUL représentait 9,2 % de la dette publique totale, contre 80,1 % pour les APUC et 10,6 % pour les ASSO.

Part des sous-secteurs d'administration dans la dette publique totale

(en milliards d'euros)

Administrations publiques centrales

Administrations publiques locales

Administrations publiques de sécurité sociale

Dette

Part dans la dette publique totale

Dette

Part dans la dette publique totale

Dette

Part dans la dette publique totale

2012

1481,3

79,3 %

176,8

9,5 %

211

11,3 %

2013

1558,4

79,8 %

183,3

9,4 %

211,7

10,8 %

2014

1632,8

80,1 %

188,2

9,2 %

216,8

10,6 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données de l'Insee (Comptes de la Nation)

De même s'agissant du déficit public, les APUL n'ont contribué qu'à hauteur de 5,4 % au déficit public total en 2014. Comme le note la Cour des comptes dans son rapport sur les finances publiques locales d'octobre 2015 267 ( * ) , le solde public national s'est amélioré en 2014 de 0,2 point grâce à la réduction du déficit des APUL, lorsque le déficit de l'État s'est aggravé de 0,1 point.

Part des sous-secteurs d'administration dans le déficit public total

(en milliards d'euros)

Administrations publiques centrales

Administrations publiques locales

Administrations publiques de sécurité sociale

Déficit

Part dans le déficit public total

Déficit

Part dans le déficit public total

Déficit

Part dans le déficit public total

2012

- 84,2

83,9 %

- 3,5

3,5 %

- 12,7

12,6 %

2013

- 68,7

79,6 %

- 8,5

9,8 %

- 9,1

10,5 %

2014

- 71,8

85,4 %

- 4,5

5,4 %

- 7,8

9,3 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données de l'Insee (Comptes de la Nation)

Ainsi, la part des collectivités territoriales dans le taux d'endettement (95,6 % du produit intérieur brut en 2014) et dans le déficit public (- 3,9 % en 2014) des administrations publiques est limitée. Les collectivités territoriales sont donc contraintes de réaliser un effort financier disproportionné eu égard à leur responsabilité dans la situation budgétaire actuelle .

B. LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ONT FAIT PREUVE D'UNE GESTION RESPONSABLE EN 2014, MARQUÉE PAR UNE MAÎTRISE DES DÉPENSES ET UNE FAIBLE AUGMENTATION DES IMPÔTS LOCAUX

En 2014, les collectivités territoriales ont poursuivi leurs efforts de maîtrise de leurs dépenses. Selon le rapport 2015 de l'Observatoire des finances locales 268 ( * ) , les dépenses totales des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre ont diminué de 0,4 % pour s'établir à 233,4 milliards d'euros (contre 234,3 milliards d'euros en 2013) en raison de la chute importante des dépenses d'investissement hors remboursement de la dette (- 7,8 %), lorsque les dépenses de fonctionnement ont faiblement augmenté.

Les dépenses de fonctionnement se sont élevées en 2014 à 166,5 milliards d'euros, en hausse de 2,3 % par rapport à 2013. Ceci représente une hausse moins marquée que les années précédentes (+ 2,8 % en 2011, + 3,1 % en 2012 et +3 % en 2013), qui est principalement imputable au dynamisme des dépenses de personnel (+ 4,1 % en 2014). D'après l'OFL, plus du tiers de l'augmentation des dépenses de personnel sont liées à la hausse des cotisations patronales à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) et à la revalorisation des carrières des agents des catégories C et B, soit deux mesures décidées au niveau national.

Par ailleurs, les dépenses d'intervention des collectivités ont augmenté de 2,5 % en 2014, avec une évolution contrastée selon les catégories de collectivités : cette hausse est mesurée (+ 1,5 %) voire faible (+ 0,2 %) s'agissant du bloc communal et des régions, mais importante (+ 3,6 %) s'agissant des départements, principalement en raison de l'augmentation des dépenses d'aide sociale. En effet, les trois principales prestations versées par les départements (le revenu de solidarité active - RSA -, l'allocation personnalisée d'autonomie - APA - et la prestation de compensation du handicap - PCH -) ont augmenté de 6,4 % en 2014 pour atteindre un montant total de 16,9 milliards d'euros. Or il s'agit de dépenses de guichet sur lesquelles les départements ne disposent pas de leviers d'action.

Évolution des dépenses des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre entre 2010 et 2014

(en milliards d'euros)

Note de lecture : Les dépenses des différentes catégories de collectivité représentent les dépenses totales (dépenses de fonctionnement et d'investissement). Les dépenses de fonctionnement et d'investissement retracées regroupent l'ensemble des dépenses des collectivités territoriales ; leurs montants sont déterminés par l'échelle de droite.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données du rapport 2015 de l'OFL

Ainsi, les collectivités territoriales ont fortement ralenti le rythme de croissance de leurs dépenses . En 2014, elles ont respecté l'objectif d'évolution de la dépense locale (Odedel) prévu par la loi de programmation 2014-2019, qui fixe un référentiel d'évolution des dépenses des collectivités territoriales dans une perspective pluriannuelle. En effet, l'Odedel prévoyait une augmentation de la dépense locale de + 1,2 % en 2014, or celle-ci a diminué de près de 0,4 % en raison d'une dépense de fonctionnement moins dynamique que prévu (+ 2,3 % au lieu de + 2,8 %) et du recul des dépenses d'investissement (- 7,8 %). En 2015, la dépense publique locale devrait à nouveau baisser de 0,6 % en raison de la poursuite de la baisse des dépenses d'investissement.

Objectif d'évolution de la dépense publique locale (Odedel) des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre

(en pourcentage)

2014

2015

2016

2017

Odedel

Dont évolution des dépenses de fonctionnement

+ 1,2

+ 2,8

+ 0,5

+ 2,0

+ 1,9

+ 2,2

+ 2,0

+ 1,9

Dépense publique locale constatée

Dont évolution des dépenses de fonctionnement

- 0,4

+ 2,3

- 0,6*

-

-

* Il s'agit d'un chiffre provisoire, présenté dans le rapport économique, social et financier de 2016.

Source : commission des finances du Sénat, à partir de la loi de programmation des finances publiques 2014-2019 et des données de l'Observatoire des finances locales

En outre, la baisse des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros en 2014 et de 3,5 milliards d'euros en 2015 et l'augmentation des charges imposées (cf. infra) a contraint les collectivités territoriales à augmenter les taux des impôts locaux . Les recettes de fiscalité directe et indirecte des collectivités ont augmenté de 2,6 % en 2014. Le produit des trois taxes sur les ménages a progressé de 2,2 %, celui des autres impôts et taxes, comme les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), de 6,3 % tandis que celui des impôts économiques a connu une baisse de 1,3 %, principalement liée à la baisse du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

C. LE COÛT DES NORMES SUPPLÉMENTAIRES IMPOSÉES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES EN 2015 RESTE ÉLEVÉ

Comme en 2014, les dépenses contraintes imposées par l'État en aux collectivités territoriales par des normes législatives ou réglementaires ont représenté en 2015 un montant significatif . Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) 269 ( * ) a évalué le coût supplémentaire résultant de ces normes à 1,4 milliard d'euros en année pleine . Ce coût est principalement imputable aux normes relatives à l'accessibilité des personnes handicapées (466 millions d'euros), à la revalorisation du montant forfaitaire du revenu de solidarité active (420 millions d'euros) ou encore à l'instauration de dispositions relatives à l'instauration d'une indemnité dite de garantie individuelle du pouvoir d'achat (75,8 millions d'euros).

Par ailleurs, les collectivités ont pu réaliser des économies à hauteur de 633 millions d'euros grâce à des mesures de simplification, et bénéficier de recettes supplémentaires évaluées à 204,6 millions d'euros, résultant du fonds d'aide aux communes pour la mise en place de la réforme des rythmes scolaires (187,2 millions d'euros) et de l'arrêté relatif au taux kilométrique de la taxe nationale sur les véhicules de transport de marchandises pour 2015 (12 millions d'euros).

Au total, le coût net pour les collectivités des dépenses imposées par l'État peut être estimé à 573 millions d'euros en 2015. Ce coût s'ajoute aux nombreuses dépenses contraintes qui ont été créées pour les collectivités les années antérieures. En particulier, l'année 2014 a été marquée par la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires, qui a représenté un coût pour les collectivités estimé par le CNEN à 600 millions d'euros. Ce coût est loin d'avoir été compensé par la mise en place du fonds d'amorçage de cette réforme, qui s'est élevé cette année-là à 175 millions d'euros. Dans son rapport sur les finances publiques locales, la Cour des comptes confirme ce constat : « lors de leurs examens de la gestion de communes en 2013 et 2014, les chambres régionales des comptes ont effectivement constaté un impact de cette réforme sur les comptes des collectivités » 270 ( * ) .

Coût des dépenses contraintes imposées par l'État aux collectivités

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Coût brut en année pleine

580,4

577

727,9

1 580

1 853

1 410,8

Économies en année pleine

22,2

133,6

304,3

249,7

181,8

633,1

Recettes nouvelles en année pleine

28,2

60

171,1

139,1

469,3

204,6

Coût net en année pleine

530

383,4

252,5

1 191,2

1 201,9

573,1

Source : commission des finances, à partir des données du CNEN

Le coût net cumulé des normes imposées peut être évalué à 4 milliards d'euros depuis 2010 et 1,775 milliard d'euros depuis 2014 .

Coût net cumulé des normes imposées aux collectivités territoriales depuis 2009

(en millions d'euros)

Note de lecture : Le montant du coût net en année pleine est déterminé par l'échelle de gauche. Le montant du coût net cumulé est déterminé par l'échelle de droite.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données du CNEN

D. L'EFFET CUMULATIF DES BAISSES DES DOTATIONS IMPACTE NÉGATIVEMENT LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT ET L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

Les deux évolutions détaillées précédemment que sont l'augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales, pour partie due au coût des charges nouvelles imposées ainsi que la baisse des dotations, forment un effet ciseau ayant un impact direct sur les dépenses d'investissement des administrations publiques locales, qui ont reculé de 9,6 % en 2014 .

Parmi les dépenses d'investissement, ce sont les dépenses d'équipement qui connaissent la baisse la plus importante en 2014 (- 9,9 %), essentiellement due au recul de ces dépenses dans le secteur communal (- 12,9 %). Seules les régions voient leurs dépenses d'équipement augmenter de 5,9 %, essentiellement pour investir dans le domaine ferroviaire.

L'argument selon lequel la chute des dépenses d'investissement serait uniquement imputable au « cycle électoral » 271 ( * ) ne tient pas. L'ampleur de la baisse constatée actuellement est supérieure à celle observée lors des périodes électorales précédentes . Ainsi, en 2008, année de tenue des élections municipales et cantonales, les dépenses d'investissement des collectivités territoriales avaient baissé d'environ 3,2 % 272 ( * ) , soit une baisse sans commune mesure avec celle rencontrée actuellement. De même, l'Insee a, dans une étude de 2002, mesuré la contribution du cycle électoral à la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques locales. Cette étude montre qu'au cours de l'année d'élection, le cycle électoral contribue en moyenne à hauteur de - 1,9 point à l'évolution de la FBCF 273 ( * ) .

La situation, déjà préoccupante, pourrait empirer dans les années à venir en raison de l'effet cumulatif des baisses de dotations qui dégradent la situation financière des collectivités. L'épargne brute des collectivités a chuté de 8,4 % en 2014, une baisse qui touche tous les niveaux de collectivités et qui devrait se poursuivre en 2015.

D'après le rapport économique, social et financier pour 2016, le recul des dépenses d'investissement en 2015 devrait s'établir à 8,5 %. Une étude réalisée par l'Institut français d'opinion publique (Ifop) à la demande de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation 274 ( * ) a ainsi montré que 62 % des communes interrogées ont prévu une diminution de leurs dépenses d'investissement dans le cadre de l'adoption de leurs budgets pour 2015, afin de compenser la baisse des dotations.

Dans son rapport sur les finances publiques locales précité, la Cour des comptes constate : « différents facteurs laissent prévoir une baisse durable des investissements publics locaux. En particulier, l'examen des comptes rendus des débats d'orientation budgétaire et des rapports de présentation des budgets primitifs des villes de plus de 100 000 habitants confirme ce diagnostic : au moins 20 d'entre elles ont prévu en 2015 de réduire leurs dépenses d'investissement, en moyenne de 15 % par rapport à l'année précédente ». La Cour des comptes indique également que la baisse de la DGF de 10,75 milliards d'euros de 2015 à 2017 « induira un ajustement budgétaire qui, à court terme, est susceptible de porter prioritairement sur les dépenses d'investissement ».

Cette évolution est inquiétante alors que l'on sait que l'investissement public est un des leviers essentiels de la croissance, et que les collectivités territoriales représentent 70 % de l'investissement public civil . Comme l'a rappelé Xavier Ragot, président de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), lors de son audition devant la commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public des baisses des dotations de l'État aux communes et aux EPCI créée à l'Assemblée nationale 275 ( * ) , « ce qui est extrêmement préjudiciable, c'est que, quelle que soit l'évolution du redressement des finances publiques, l'effort porte exclusivement sur l'investissement public, qui constitue pourtant un moteur essentiel de la croissance pour l'État et les collectivités locales, en temps ordinaire mais encore davantage en période de crise ».

La baisse des investissements des administrations publiques locales a par exemple des conséquences directes sur le secteur des travaux publics , qui dépend à 70 % de la dépense publique, qui a connu un repli de son chiffre d'affaires de 8 % en 2015 occasionnant la perte de 15 000 emplois 276 ( * ) .

L'OFCE estime plus globalement que la baisse des dotations de 11 milliards d'euros se traduira par une baisse de 11 milliards d'euros de l'activité économique, soit 0,55 % du produit intérieur brut (PIB) , qui entraînera à son tour une baisse des recettes fiscales de 0,26 point de PIB. Ainsi, selon Xavier Ragot « l'effet attendu net à trois ans de l'impact sur la consolidation du budget de l'État ne serait que de 5,5 milliards d'euros, soit la moitié des 11 milliards d'euros attendus, du fait de la baisse de l'activité économique » 277 ( * ) .

E. SUPPRIMER LA HAUSSE DE LA PÉRÉQUATION VERTICALE ET MINORER DE 1,595 MILLIARD D'EUROS LA BAISSE DES DOTATIONS DE L'ETAT AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'ensemble des éléments présentés ci-dessus invite à corriger l'ampleur des efforts de maîtrise des dépenses publiques demandés aux collectivités territoriales.

Si les administrations publiques locales doivent participer au redressement des comptes publics, il convient que l'effort réalisé soit juste et proportionné . Il doit pour cela être tenu compte du coût net des normes supplémentaires qui ont été imposées aux collectivités en 2014 et 2015, et dont le montant peut être évalué à 1,775 milliard d'euros. Ces dépenses contraintes, non compensées par l'État, pèsent sur les comptes des collectivités et réduisent leurs marges de manoeuvre budgétaires. Votre rapporteur général propose donc de minorer la baisse des concours financiers de l'État du montant de ces dépenses contraintes.

Il convient également de tenir compte des mesures proposées dans le présent projet de loi de finances qui permettront aux collectivités de bénéficier de recettes supplémentaires en 2016. Il s'agit d'abord de l'article 59, qui prévoit de créer une dotation de soutien à l'investissement au bénéfice des collectivités, dotée de 120 millions d'euros de crédits de paiement (CP) en 2016.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à élargir le bénéfice du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie , pour un montant estimé à 15 millions d'euros en 2016.

Enfin, votre commission de finances propose d'élargir le FCTVA aux dépenses d'investissement réalisées sous maîtrise d'ouvrage publique dans le cadre du plan France très haut débit , pour un montant estimé à 45 millions d'euros en 2016.

Au total, en prenant en compte les coûts nets imposés aux collectivités et les recettes supplémentaires générées par la dotation à l'investissement et les élargissements proposés du FCTVA, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement prévoyant de minorer la baisse des dotations de 1,595 milliard d'euros .

Votre rapporteur général propose également de supprimer la hausse de la péréquation verticale de 317 millions d'euros prévue par le présent projet de loi.  Cette hausse est financée pour moitié au sein même de la DGF, et pour une autre moitié par une minoration des variables d'ajustement. Elle est donc prise en charge par les collectivités territoriales elles-mêmes.

La réduction des concours financiers de l'État, les incertitudes quant au devenir de la réforme de la DGF du bloc communal et à l'évolution du périmètre des intercommunalités invitent en effet à privilégier la meilleure visibilité possible quant à l'évolution des ressources des communes .

La suppression de la hausse de la péréquation a pour conséquence de majorer le montant des variables d'ajustement de 158,5 millions d'euros et de diminuer le montant de la DGF prévue du même montant.

Au total, en prenant en compte la minoration proposée de 1,595 milliard d'euros et la suppression de la péréquation verticale, la DGF pour l'année 2016 s'établirait à 34,545 milliards d'euros, et baisserait de 2,063 milliards d'euros par rapport à 2015 - au lieu d'une baisse initialement prévue de 3,5 milliards d'euros.

Minoration de la baisse de la DGF en 2016 proposée par la commission

(en millions d'euros)

DGF du PLF 2016

33 108,514

Dépenses contraintes supplémentaires en 2014

1 201,9

Dépenses contraintes supplémentaires en 2015

573,1

Suppression de l'augmentation de la péréquation verticale

-158,5

Dotation de soutien à l'investissement

-120

Élargissement du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie

-15

Élargissement du FCTVA aux dépenses relatives aux infrastructures haut débit

-45

DGF 2016 proposée par la commission des finances du Sénat

34 545,014

Source : commission des finances du Sénat

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 11 (Art. L 1615-1 du code général des collectivités territoriales) - Élargissement du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) aux dépenses d'entretien des bâtiments publics

Commentaire : le présent article prévoit que les collectivités territoriales pourront bénéficier d'une attribution au titre du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pour leurs dépenses d'entretien des bâtiments publics.

I. LE DROIT EXISTANT

Le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) est un prélèvement sur les recettes de l'État (PSR) qui vise à permettre « le remboursement intégral de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d'investissement 278 ( * ) ».

Il s'agit de favoriser l'investissement public local : les dépenses inscrites en section de fonctionnement ne peuvent donc donner droit au remboursement forfaitaire au titre du FCTVA.

Les attributions sont en effet calculées en appliquant aux dépenses d'investissement éligibles un taux de compensation forfaitaire , qui correspond au taux normal de TVA, diminué, depuis 1997, d'une réfaction correspondant à la contribution de la France au budget de l'Union européenne assise sur la TVA.

Ce taux, fixé à l'article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales (CGCT) s'élève à 16,404 % pour les dépenses éligibles réalisées à compter du 1 er janvier 2015 279 ( * ) .

Le montant du FCTVA évolue donc en fonction de l'investissement réalisé par les collectivités territoriales et leurs groupements. Il existe toutefois un décalage dans le temps, en raison des règles de versement (cf. infra ).

En 2014, l'État a reversé aux collectivités territoriales 5,9 milliards d'euros au titre du FCTVA .

Évolution des dépenses de FCTVA dans les comptes de l'État

(en millions d'euros)

Source : ministère du Budget, annexe « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales » au PLF 2016

Les règles de versement anticipé du FCTVA

« Pour le calcul du droit à FCTVA, les dépenses réelles d`investissement prises en considération sont en principe celles afférentes à la pénultième année. Mais ce principe tend désormais à devenir l'exception :

- les communautés de communes (CC) et d'agglomération (CA) ainsi que les communes nouvelles (issues de la fusion de deux entités communales) perçoivent le FCTVA l'année même de réalisation de la dépense, c'est-à-dire en N ;

- les collectivités (autres que les CC et CA) qui se sont engagées en 2009 et 2010 à accroître leurs dépenses d'investissement dans le cadre du dispositif de versement accéléré du FCTVA au titre du plan de relance pour l'économie, et qui ont respecté leur engagement, perçoivent le FCTVA l'année suivant celle de la réalisation de la dépense, c'est-à-dire en N+1 (les dépenses d'investissement de ces collectivités représentent plus des deux tiers de l'ensemble des dépenses éligibles au FCTVA) ;

- les communes membres d'EPCI qui appliquent le régime prévu à l'article L. 5211-28-2 du CGCT (mise en commun de la dotation globale de fonctionnement) perçoivent le FCTVA l'année suivant celle de la réalisation de la dépense (art. L. 1615-6 du CGCT dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010), c'est-à-dire également en N+1.

Dès lors, les collectivités ne pouvant prétendre à l'une de ces exceptions perçoivent le FCTVA selon les principes du droit commun, deux années après la réalisation de la dépense, c'est-à-dire en N+2. »

Source : annexe « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales »

Les articles L. 1615-2 à L.1615-13 du CGCT fixent les conditions cumulatives à respecter pour bénéficier du reversement anticipé et diverses dérogations.

Ainsi, la dépense doit avoir été réalisée par un bénéficiaire du FCTVA, elle doit concerner un bien intégré ou destiné à l'être de manière durable dans le patrimoine de la collectivité, avoir été grevée de TVA, le bénéficiaire doit être compétent pour agir dans le domaine concerné et le bien ne doit pas être cédé à un tiers non bénéficiaire du FCTVA .

Cette dernière condition a été assortie de dérogations, et en particulier, l'article L. 1615-7 du CGCT prévoit que sont éligibles les dépenses d'investissement des collectivités et de leurs groupements, « réalisées sur la période 2003-2014, sous maîtrise d'ouvrage publique, en matière d'infrastructures passives intégrant leur patrimoine dans le cadre du plan d'action relatif à l'extension de la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile et d'accès à internet ».

Ce dispositif, introduit initialement en 2003 280 ( * ) pour une durée de deux ans (pour les dépenses réalisées sur la période 2003-2005) et régulièrement prolongé depuis, visait notamment à rendre éligibles au FCTVA les dépenses des collectivités pour construire des pylônes mis à disposition d'opérateurs téléphoniques 281 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article élargit le champ d'application du FCTVA aux « dépenses d'entretien des bâtiments publics payées à compter du 1 er janvier 2016 ».

À ce jour, les dépenses d'entretien des bâtiments publics sont considérées comme des dépenses de fonctionnement, et ne peuvent par conséquent donner droit à une attribution au titre du FCTVA.

Selon les évaluations préalables annexées au présent projet de loi de finances, dès 2016 , les collectivités et leurs groupements qui bénéficient de l'attribution l'année même de réalisation de la dépense, percevraient 12 millions d'euros à ce titre.

En 2017 , le coût de la mesure pour l'État serait de 109 millions d'euros puis, à partir de 2018 (correspondant à une année pleine), de 143 millions d'euros .

Cette évaluation repose sur le montant des dépenses d'entretien des bâtiments publics inscrites dans les comptes de gestion de 2013.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de la commission des finances, l'Assemblée nationale a, avec l'avis défavorable du Gouvernement, élargi le bénéfice du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie .

Travaux de voirie : investissement ou fonctionnement ?

L'annexe 2 de la circulaire du 26 février 2006 relative aux règles d'imputation des dépenses du secteur public local précise que « les dépenses d'entretien ou de réparation, destinées respectivement à conserver la voirie dans de bonnes conditions d'utilisation ou à la remettre en bon état d'utilisation, sont considérées comme donnant lieu à des dépenses de fonctionnement ».

Cette annexe précise également que peuvent être comptabilisés en section d'investissement les travaux qui entrainent une « amélioration de la résistance mécanique de la voirie » par « augmentation d'épaisseur » ou par « le changement de la qualité des diverses couches », alors que la réfection de la seule couche de roulement est considérée comme une dépense de fonctionnement.

Source : circulaire n° INTBO200059C du 26 février 2002

Le coût de cet élargissement serait de 15 millions d'euros dès 2016 282 ( * ) , puis de l'ordre de 300 millions d'euros, en année pleine. En conséquence de l'adoption de cette disposition, le Gouvernement a dégradé le solde présenté à l'article d'équilibre de 15 millions d'euros.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN SOUTIEN NÉCESSAIRE À L'INVESTISSEMENT PUBLIC

La note de conjoncture de La Banque postale de novembre 2015 revient sur la baisse des investissements des collectivités territoriales depuis 2014, première année de baisse des dotations de l'État : « la forte baisse de 2014 (- 8,8 %) se prolongerait en 2015 (- 6,6 %) ».

La Banque postale souligne que « certes, ce recul n'est pas inhabituel en début de mandat municipal mais son ampleur (- 8 milliards d'euros en deux ans) ferait date. Face à la confrontation entre les besoins d'infrastructures ou d'entretien et les contraintes financières, certains projets seraient redimensionnés, reportés voire annulés ».

En effet, face à l'ampleur de la baisse des dotations et alors que les décisions de l'État continuent d'entraîner des dépenses pour les collectivités territoriales (par exemple s'agissant de l'accessibilité des établissements recevant du public ou de l'instauration d'une indemnité de garantie individuelle du pouvoir d'achat) 283 ( * ) , les marges de manoeuvre qu'elles peuvent rapidement mobiliser concernent les investissements.

Si toute mesure de soutien à l'investissement des collectivités territoriales est la bienvenue, celles proposées par le Gouvernement ne sont pas à la hauteur des enjeux : le fonds d'aide à l'investissement local de « un milliard d'euros », doté seulement 150 millions d'euros de crédits de paiement (CP) en 2016 284 ( * ) et l'enveloppe de 13 millions d'euros prévue par le présent article doivent être mis en regard avec la diminution de 3,4 milliards d'euros des dépenses d'investissement entre 2014 et 2015.

B. L'ÉLIGIBILITÉ DE DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT AU FCTVA

Le présent article élargit le bénéfice du FCTVA à des dépenses de fonctionnement, alors que jusqu'alors seules les dépenses d'investissement étaient prises en compte.

Selon un récent référé de la Cour des comptes, transmis le 31 août 2015 à votre commission des finances, « l'instruction des demandes d'attribution de FCTVA, souvent confiée aux sous-préfectures, est très déconcentrée. Aucun système d'information national n'encadrant ni n'enregistrant les procédures, elles ne peuvent être suivies. Les règles applicables étant essentiellement jurisprudentielles, les motifs de rejet, par les préfets, des demandes d'attribution du FCTVA présentées par les collectivités locales sont variables entre départements, voire entre arrondissements d'un même département : des dépenses de mêmes natures et objet peuvent simultanément donner droit à FCTVA ou non selon le territoire concerné ».

Ainsi, « le taux de rejet des dépenses sont très différents selon les départements : en 2013, ils s'échelonnaient entre 0,2 % et 14 %, autour d'une moyenne de 3,5 % sur le territoire métropolitain ».

L'élargissement du FCTVA à des dépenses de fonctionnement (qu'il s'agisse de l'entretien des bâtiments publics ou de la voirie) rend plus urgente encore la nécessité d'assurer d'une application identique de la loi sur l'ensemble du territoire national .

Il paraît donc souhaitable , s'agissant des attributions au titre du FCTVA, d'assimiler l'ensemble des dépenses d'entretien de la voirie à des dépenses d'investissement , afin d'éviter des interprétations complexes et des différences de traitement en fonction des services instructeurs.

C. POURSUIVRE LES INVESTISSEMENTS EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT NUMÉRIQUE DU TERRITOIRE

Afin de continuer à soutenir les projets des départements en matière d'aménagement numérique du territoire, permettant en particulier d'offrir une offre haut débit dans les zones rurales et dans le prolongement du dispositif existant jusqu'en 2014 285 ( * ) , votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement rendant éligibles au FCTVA les dépenses d'investissement réalisées sous maitrise d'ouvrage publique dans le cadre du plan France très haut débit .

Le plan France très haut débit

Le plan France très haut débit, initié en avril 2013 286 ( * ) par le Gouvernement, vise à couvrir l'ensemble du territoire en très haut débit d'ici 2022. Il représente un investissement de 20 milliards d'euros , pris en charge par :

- les opérateurs privés dans les grandes agglomérations (6 à 7 milliards d'euros) ;

- les collectivités territoriales en dehors de ces agglomérations. Le coût de cet investissement est estimé entre 13 et 14 milliards d'euros, financé par les recettes d'exploitation et le cofinancement des fournisseurs d'accès à Internet (FAI) (pour 50 %) et par des subventions publiques : 6,5 milliards d'euros dont 3 milliards d'euros de subvention de l'État dans le cadre du programme d'investissement d'avenir (PIA).

Source : www.francethd.fr

Si l'on considère l'ensemble des 3,5 milliards d'euros de dépenses des collectivités territoriales au titre du plan France très haut débit, le coût maximum de la mesure serait de l'ordre de 575 millions d'euros sur dix ans, soit moins de 60 millions d'euros par an.

Dans la mesure où 75 % des collectivités territoriales bénéficient de l'attribution au titre FCTVA en année N ou N+1, le coût serait d'environ 45 millions d'euros en 2016 .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 11 bis (nouveau) (Art. L. 6264-6 du code général des collectivités territoriales et 104 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007) - Diminution du montant de la dotation globale de compensation (DGC) négative due par la collectivité de Saint-Barthélemy en contrepartie de la suppression de son éligibilité au bénéfice du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Commentaire : le présent article vise à fixer un montant de dotation globale de compensation (DGC) négative inférieur à celui actuellement inscrit à l'article 104 de la loi du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007. En contrepartie, la collectivité de Saint-Barthélemy ne pourra plus bénéficier du remboursement de la TVA au titre du fonds de compensation (FCTVA).

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'ACCESSION DE SAINT-BARTHÉLEMY AU STATUT DE COLLECTIVITÉ D'OUTRE-MER À COMPTER DU 1 ER JANVIER 2008 S'EST ACCOMPAGNÉE D'UN TRANSFERT DE COMPÉTENCES

Conformément aux dispositions de l'article 72-1 de la Constitution introduit par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, un référendum a été organisé le 7 décembre 2003 sur le changement de statut de Saint-Barthélemy, qui a été approuvé à 95,51 % par les électeurs de l'île .

De commune du département et de la région de la Guadeloupe, Saint-Barthélemy est devenue, à compter du 15 juillet 2007, une collectivité d'outre-mer (COM) régie par l'article 74 de la Constitution .

Aux termes de la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer 287 ( * ) , la collectivité d'outre-mer (COM) de Saint-Barthélemy s'est vue transférer les compétences exercées par le département et la région de la Guadeloupe ainsi que certaines compétences de l'État à compter du 1 er janvier 2008 .

La collectivité est désormais compétente pour fixer les règles applicables dans les domaines des impôts, des droits et taxes, de l'urbanisme, de la circulation routière, de l'immatriculation des navires, de la voirie, de l'environnement, de l'accès au travail des étrangers, du tourisme, de l'organisation et de la création des services et des établissements publics de la collectivité .

B. UN TRANSFERT DE RESSOURCES DONT LE MONTANT S'EST AVÉRÉ SUPÉRIEUR À CELUI DES CHARGES TRANSFÉRÉES

Introduits par la loi organique du 21 février 2007, les articles L.O. 6271-1 et suivants du code général des collectivités territoriales prévoient que les charges transférées à la collectivité de Saint-Barthélemy résultant des transferts de compétences doivent être compensées par le transfert d'impôts, la dotation globale de fonctionnement, la dotation globale de construction et d'équipement scolaire et, pour le solde, par l'attribution d'une dotation globale de compensation inscrite au budget de l'État .

L'article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 288 ( * ) a fixé les modalités de calcul de cette dotation.

Or il est apparu que le montant des ressources transférées à la collectivité était supérieur aux charges résultant des transferts de compétences .

Conformément à l'article L.O. 6271-6 du code général des collectivités territoriales, le montant de la dotation globale de compensation a été arrêté par une commission consultative d'évaluation des charges, présidée par un magistrat de la chambre territoriale des comptes et composée de représentants de l'État, de la région et du département de la Guadeloupe et de la collectivité de Saint-Barthélemy 289 ( * ) .

En 2008, la commission a évalué le « trop-perçu » à 5,6 millions d'euros chaque année, dont 2,7 millions d'euros au titre des transferts de ressources effectués par l'État et 2,9 millions d'euros au titre de ceux effectués par le département de la Guadeloupe .

L'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2008 290 ( * ) a complété l'article 104 précité en prévoyant que le montant de la DGC négative fera l'objet « d'un titre de perception émis chaque année par le préfet de la région de Guadeloupe ».

Pourtant, les autorités de l'État ont tardé à émettre les titres de perception . Ainsi, ce n'est que le 20 décembre 2012 que les premiers titres de perception pour les années 2008 et 2009 ont été émis ; ils ont été notifiés le 16 janvier 2013.

Par ailleurs, la collectivité de Saint-Barthélemy a formé plusieurs recours devant le tribunal administratif puis le Conseil d'État, ce dernier ayant saisi, le 27 janvier 2014, le Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la collectivité . Dans une décision n° 2014-386 QPC du 28 mars 2014, le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions contestées par Saint-Barthélemy n'avaient pas « pour effet de réduire les ressources propres de cette collectivité dans des proportions telles que serait méconnue son autonomie financière » et les a donc déclarées conformes à la Constitution .

L'article 28 de la loi de finances pour 2015 291 ( * ) a fixé le montant annuel de la DGC due par la collectivité de Saint-Barthélemy à 5 773 499 euros . Ce montant correspond à celui de 2008 auquel il a été appliqué le taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.

Pour la seule année 2015, compte-tenu d'un trop-perçu résultant de la compensation du transfert du revenu de solidarité active (RSA) aux collectivités d'outre-mer prévu par l'ordonnance n° 2010-686 du 24 juin 2010 pour les années 2011 à 2013, ce montant a été fixé à 5 788 203 euros.

C. L'ÉLIGIBILITÉ DE LA COLLECTIVITÉ DE SAINT-BARTHÉLEMY AU BÉNÉFICE DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE

En application du décret n° 48-540 du 30 mars 1948 qui prévoit un maintien de l'exonération de droits indirects à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, la TVA n'est pas acquittée dans ces deux collectivités, à l'exception de la TVA immobilière instituée postérieurement par l'article 27 de la loi n° 63-254 du 15 mars 1963 portant réforme de l'enregistrement, du timbre et de la fiscalité immobilière.

Par ailleurs, en application de l'article L. 6264-6 du code général des collectivités territoriales, la collectivité de Saint-Barthélemy est éligible au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. UNE DIMINUTION DU MONTANT DE LA DOTATION GLOBALE DE COMPENSATION ET DE LA DETTE DE SAINT-BARTHÉLEMY

À l'occasion de son déplacement dans les Caraïbes en mai 2015, le président de la République s'est engagé à proposer un « compromis » sur la question de la dotation globale de compensation dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a donc adopté, avec l'avis favorable de la commission des finances, un article 11 bis prévoyant la modification de l'article 104 de la loi du 25 décembre 2007 précité (2° du II du présent article) et fixant le montant de la DGC négative due annuellement par la collectivité de Saint-Barthélemy à 2 882 572 euros, contre 5 773 499 euros actuellement .

Le III du présent article prévoit en outre une diminution de moitié de la dette cumulée au titre de la non perception de la DGC par l'État depuis 2008 . Selon les informations communiquées par le ministère des outre-mer à votre rapporteur général, celle-ci devrait atteindre 45 186 009 euros au 31 décembre 2015 . Le montant de dette restant dû devrait être versé au Trésor par la collectivité avant la fin de l'année 2015 .

Par ailleurs, le 1° du II du présent article corrige une erreur de référence.

B. LA SUPPRESSION DE L'ÉLIGIBILITÉ DE LA COLLECTIVITÉ AU BÉNÉFICE DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE (FCTVA)

En contrepartie de la diminution de moitié de la DGC négative et de la dette dues par la collectivité de Saint-Barthélemy, le I du présent article prévoit l'abrogation de l'article L. 6264-6 du code général des collectivités territoriales qui permettait à la collectivité de bénéficier du FCTVA .

En 2014, le montant perçu par la collectivité au titre de ce dispositif s'élevait à 2 890 927 euros .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article vise à mettre en oeuvre un accord intervenu entre l'État et la collectivité de Saint-Barthélemy et solde un contentieux datant de 2008.

Le dispositif prévu par le présent article avait déjà été proposé dans des termes quasi identiques par un amendement déposé par notre collègue Michel Magras à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2015. Cet amendement avait été adopté par le Sénat .

Aussi, sous réserve d'un amendement de cohérence, votre rapporteur général vous propose d'adopter le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 11 ter (Art. 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010) - Compensation accordée par l'État aux collectivités territoriales qui enregistrent, d'une année sur l'autre, une perte importante de produit de contribution économique territoriale (CET)

Commentaire : le présent article précise l'année à partir de laquelle l'État verse aux collectivités territoriales la compensation de perte de produit de contribution économique territoriale (CET).

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA COMPENSATION POUR PERTE DE BASE DE CFE ET DE PRODUIT DE CET

L'article 2 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 292 ( * ) a supprimé la taxe professionnelle, à laquelle s'est substituée une nouvelle imposition, la contribution économique territoriale (CET), elle-même composée de deux nouvelles impositions :

- la cotisation foncière des entreprises (CFE), assise sur les valeurs locatives foncières des locaux des entreprises ;

- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), assise sur leur valeur ajoutée.

L'article 78 de cette même loi institue à partir de 2012 un prélèvement sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales qui font face à une perte importante, d'une année sur l'autre, de produit de contribution économique territoriale (CET).

La compensation est versée s'il est constaté, d'une année sur l'autre, une perte importante :

- de base de cotisation foncière des entreprises (CFE) ;

- et, au regard de leurs recettes fiscales, de produit de contribution économique territoriale (CET) afférent aux entreprises à l'origine de la perte de base de CFE.

La compensation versée aux communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dotés d'une fiscalité propre est assise sur le montant de la perte de produit de CET - déduction faite, le cas échéant, de la perte de produit résultant de la prise en charge, par la commune ou l'EPCI, de tout ou partie de la fraction de la cotisation minimum de CFE.

B. LE MONTANT FINAL DE LA COMPENSATION

Pour l'ensemble des collectivités territoriales, le montant de la compensation s'élève :

- la première année, à 90 % de la perte de produit ;

- la deuxième année, à 75 % de la compensation reçue l'année précédente ;

- la troisième année, à 50 % de la compensation perçue la première année.

Dans les communes ou EPCI à fiscalité propre situés dans des cantons où l'État anime une politique de conversion industrielle, la durée de compensation est portée à cinq ans.

Pour les communes et les EPCI à fiscalité propre, les compensations versées les deuxième et troisième années 293 ( * ) peuvent être majorées d'un montant tenant compte de la perte de produit de CVAE afférent aux entreprises à l'origine de la perte de base de CFE .

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Présenté par le Gouvernement et ayant recueilli un avis favorable de la commission des finances de l'Assemblée nationale, le présent article additionnel clarifie le droit existant en précisant que la compensation est versée aux collectivités territoriales à compter de l'année suivant celle pour laquelle une perte importante de produit de CET est constatée - et non l'année même de la perte.

Selon les informations fournies par la direction générale des collectivités locales (DGCL) à votre rapporteur général, il s'agit de « mettre en cohérence le calendrier légal avec le calendrier effectif de versement de la compensation ».

D'après Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du Budget, cet article « améliore ainsi la prévisibilité des versements tant pour le budget de l'État que pour les collectivités locales. Seule la compensation complémentaire 294 ( * ) qui, en 2016, ne représente que 2 millions d'euros, verra son versement décalé d'un an par rapport au droit existant, puisqu'elle interviendra l'année suivant le premier versement » 295 ( * ) .

Comparaison du calendrier effectif et du calendrier proposé
(premier versement uniquement)

Calendrier effectif

Calendrier proposé

N

Perte de base

N+1

Premier versement (de 90 %) de la compensation et de la majoration

Premier versement (de 90 %) de la compensation

N+2

Premier versement de la majoration

Source : commission des finances du Sénat

C'est pour cette raison qu'a été également adopté un amendement diminuant de 2 millions d'euros le prélèvement sur les recettes de l'État intitulé « dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Même s'il est étonnant de devoir mettre en cohérence la loi avec la pratique, la clarification proposée par le Gouvernement paraît utile et permettra de sécuriser les montants dus aux collectivités territoriales concernées.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12 (Art. 52 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, art. 40 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, art. 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, art. 40 et 41 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, art. 29 et 123 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 et art. L. 6241-2 du code du travail) - Compensation des transferts de compétences aux régions et aux départements par attribution d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA)

Commentaire : le présent article prévoit d'actualiser certains montants et modalités de compensations financières dues par l'État aux collectivités territoriales au titre des transferts de compétences, en tenant compte de la modification de la carte des régions et des compétences nouvellement transférées.

La compensation des transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales est précisément encadrée. La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République 296 ( * ) a fixé les règles de compensation financière des transferts de compétences. L'article 72-2 de la Constitution dispose ainsi désormais que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ».

En outre, en application des dispositions de l'article L. 1614-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) « toute charge nouvelle incombant aux collectivités territoriales du fait de la modification par l'État, par voie réglementaire, des règles relatives à l'exercice des compétences transférées est compensée ».

I. L'ACTUALISATION DES COMPENSATIONS DE TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AU PROFIT DES RÉGIONS

L'article 52 de la loi de finances pour 2005 297 ( * ) , complété par l'article 40 de la loi de finances pour 2006 298 ( * ) , précise les modalités de la compensation des transferts de compétences en général : une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) portant sur le gazole et le supercarburant sans plomb est attribuée aux régions et à la collectivité territoriale de Corse. En application de ces dispositions, la fraction de la TICPE attribuée à chaque région pour compenser financièrement les transferts de compétences est actualisée chaque année.

A. LA COMPENSATION DE TRANSFERTS DE COMPÉTENCES PRÉVUS RÉCEMMENT

1. Le droit existant

Le II de l'article 91 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (dite « loi MAPTAM ») 299 ( * ) prévoit la compensation financière du transfert aux régions des services chargés de la gestion des fonds européens .

Par ailleurs, le II de l'article 133 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite « loi NOTRe ») 300 ( * ) prévoit la compensation du transfert aux régions de compétences à titre définitif : les dépenses d'investissement des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) sont mises à la charge des régions à partir du 1 er janvier 2016.

2. Le dispositif proposé

Le I du présent article prévoit de compenser ces transferts de compétences par l'attribution aux régions d'une part du produit de la TICPE.

a) Montant de la compensation pour l'ensemble des régions

La fraction de TICPE transférée aux régions est calculée à partir des quantités de carburants vendues sur le territoire national au titre de l'année s'achevant le 31 décembre précédant le transfert, de manière à obtenir in fine un produit égal au droit à compensation de l'ensemble des régions.

Ce produit est défini, d'une part, par l'article 91 de la loi MAPTAM comme la moyenne des dépenses actualisées constatées sur une période maximale de trois ans précédant le transfert de compétences et, d'autre part, par l'article 133 de la loi NOTRe comme la moyenne des dépenses actualisées, hors taxes et hors fonds de concours, constatées sur une période d'au moins cinq ans précédant le transfert de compétences.

Pour 2016, le présent article propose de fixer ces fractions de tarif à :

- 0,015 euro par hectolitre, s'agissant des carburants sans plomb ;

- 0,011 euro par hectolitre, s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 degrés Celsius.

b) Répartition de la compensation entre les régions

La répartition du produit de la taxe entre les régions s'effectue ensuite en appliquant à ces fractions de tarif un pourcentage : il correspond, pour chaque région, à son droit à compensation rapporté à celui de l'ensemble des régions.

À partir de l'année 2016, les pourcentages, déterminés par le présent article, sont les suivants :

Répartition entre les régions du produit de la TICPE
transféré aux régions au titre des lois MAPTAM et NOTRe

(en %)

Régions

Pourcentage

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

7,38

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

15,18

Auvergne et Rhône-Alpes

6,1

Bourgogne et Franche-Comté

10,93

Bretagne

2,11

Centre - Val de Loire

5,32

Corse

0,88

Île-de-France

1,54

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

8,85

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

11,26

Normandie

8,7

Pays de la Loire

4,66

Provence-Alpes-Côte d'Azur

5,19

Guadeloupe

4,16

Guyane

4,83

Martinique

2,9

La Réunion

0

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016

Si le produit affecté à l'ensemble des régions se révèle inférieur à la dépense consentie par l'État au 31 décembre de l'année précédant le transfert, celui-ci assure la compensation en attribuant aux régions la différence (par un transfert complémentaire de TICPE).

3. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement rédactionnel présenté par Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements du Gouvernement : l'un corrige une erreur de renvoi du code des sports dans la loi NOTRe ( XI ) ; l'autre actualise le montant total de la compensation des dépenses d'investissement liées au transfert des CREPS.

En effet, le projet de décret soumis en octobre 2015 à la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC) qui précise les modalités de répartition de ce produit entre les régions prévoit, selon l'objet de l'amendement du Gouvernement :

- que « le droit à compensation des dépenses d'investissement est calculé sur la base d'une moyenne de 10 ans » ;

- « qu'il est réparti selon les modalités suivantes :

o « 85 % répartis en considération des m 2 , en affectant 90 % de cette enveloppe au prorata de la superficie en m 2 des immeubles bâtis constatée au 30 juin 2015 dans chaque CREPS et 10 % au prorata de la superficie en m 2 des aires d'évolution sportives non couvertes constatée au 30 juin 2015 ;

o « 15 % répartis pour moitié au prorata du nombre de sportifs inscrits dans chaque CREPS constaté au 1 er juin 2015 et pour l'autre moitié au prorata du nombre d'heures stagiaires de formation dispensées par chaque CREPS sur l'année civile 2014 ».

Aussi, le montant total du droit à compensation sera de 9,1 millions d'euros pour l'ensemble du territoire .

Par conséquent, l'amendement augmente les fractions de tarif de TICPE servant de base au calcul de cette compensation, et d'autre part, modifie les pourcentages de répartition entre les régions.

Ces fractions sont désormais fixées à :

- 0,039 euro par hectolitre, s'agissant des supercarburants sans plomb (au lieu de 0,015 euro par hectolitre initialement prévus) ;

- 0,028 euro par hectolitre, s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 degrés Celsius (contre 0,011 euro initialement prévu).

Répartition entre les régions du produit de la TICPE
transféré aux régions au titre des lois MAPTAM et NOTRe

(en %)

Régions

Pourcentage

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

16,15

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

16,05

Auvergne et Rhône-Alpes

7,18

Bourgogne et Franche-Comté

8,07

Bretagne

0,84

Centre - Val de Loire

2,33

Corse

0,35

Île-de-France

4,57

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

7,61

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

14,17

Normandie

3,44

Pays de la Loire

2,87

Provence-Alpes-Côte d'Azur

10,08

Guadeloupe

1,59

Guyane

1,8

Martinique

1,13

La Réunion

1,78

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016, tel que modifié par l'Assemblée nationale

B. LA PRISE EN COMPTE DE LA NOUVELLE CARTE DES RÉGIONS

1. Le droit existant

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales 301 ( * ) a prévu le transfert d'un nombre important de compétences de l'État aux collectivités territoriales. Les régions se sont notamment vues confier la responsabilité du développement économique, du tourisme et de la formation professionnelle ainsi que la gestion des fonds structurels européens. Désormais achevés, ces transferts de compétences sont compensés par l'affectation aux régions d'une part de la TICPE, conformément aux obligations constitutionnelles.

Néanmoins, la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions 302 ( * ) prévoit le regroupement de certaines régions à partir du 1 er janvier 2016. La compensation financière des transferts de compétences décrits ci-dessus se trouvait alors incertaine au regard des nouvelles délimitations de certaines régions issues de cette loi. Or le Conseil constitutionnel, examinant une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) 303 ( * ) , a rappelé que le droit à compensation des transferts de compétences aux collectivités territoriales devait être garanti sans discontinuité temporelle . Dès lors, le présent article vise à préciser les modalités et montants de la compensation des compétences assurées désormais par les nouvelles régions.

2. Le dispositif proposé

Le II du présent article prévoit ainsi qu'à partir du 1 er janvier 2016, la fraction de la TICPE qui revient aux nouvelles régions au titre des transferts de compétences prévus par la loi relative aux libertés et responsabilités locales, est égale à la « somme des droits à compensation des régions auxquelles elle succède » .

Dès lors, les fractions de tarifs de la TICPE affectées aux nouvelles régions sont fixées pour chaque région, à partir de l'année 2016, comme suit ( III du présent article).

Fraction de tarifs de la TICPE affectée aux régions issues de la loi du 16 janvier 2015, par type de carburant (en euros par hectolitre)

Régions

Gazole

Supercarburant sans plomb

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

6,13

8,68

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

5,22

7,39

Auvergne et Rhône-Alpes

4,83

6,85

Bourgogne et Franche-Comté

4,96

7

Bretagne

5,09

7,21

Centre - Val de Loire

4,56

6,46

Corse

9,87

13,96

Île-de-France

12,55

17,75

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

4,9

6,94

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

6,7

9,46

Normandie

5,44

7,69

Pays de la Loire

4,24

5,99

Provence-Alpes-Côte d'Azur

4,14

5,86

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016

Ces nouvelles fractions prennent également en compte les charges nouvelles résultant de la réforme du diplôme d'État de pédicure-podologue (pour les régions Aquitaine-Poitou-Charentes-Limousin, Pays de la Loire et Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées).

3. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Valérie Rabault, rapporteure générale, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels.

C. LES COMPENSATIONS FINANCIÈRES DE LA PRISE EN CHARGE DE L'APPRENTISSAGE PAR LES RÉGIONS

1. Le droit existant

L'article L. 6241-2 du code du travail prévoit que 51 % du produit de la taxe d'apprentissage créée en 2013 304 ( * ) revient aux régions, à la collectivité territoriale de Corse et au département de Mayotte, complété par une part du produit de la TICPE 305 ( * ) afin que le montant total de la ressource régionale pour l'apprentissage s'élève à 1 544 093 400 euros.

Par ailleurs, en 2013, des ressources fiscales ont été affectées aux régions en substitution de la dotation globale de décentralisation de la formation professionnelle continue et d'apprentissage. Ainsi, les régions, la collectivité territoriale de Corse et le département de Mayotte bénéficient de ressources constituées de frais de gestion perçus sur certains impôts locaux ainsi que d'une fraction des produits de la TICPE 306 ( * ) ; ces ressources ne peuvent être inférieures à 901 065 529 euros.

La prise en charge de la prime versée par la région à l'employeur pour les contrats d'apprentissage conclus dans les entreprises de moins de onze salariés 307 ( * ) fait l'objet d'une compensation de la part de l'État, sous la forme de crédits budgétaires et de l'affectation d'une part du produit de la TICPE .

Enfin, suite à la création d'une aide au recrutement des apprentis 308 ( * ) - d'un montant qui ne peut pas être inférieur à 1 000 euros - pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage dans une entreprise de moins de deux cent cinquante salariés, les régions bénéficient d'une compensation budgétaire de la part de l'État.

2. Le dispositif proposé

Il convient de tenir compte de la nouvelle carte des régions en modifiant la répartition des frais de gestion et des parts de TICPE correspondant aux nouvelles ressources fiscales transférées aux régions ( IX ) d'une part ; du produit de la taxe d'apprentissage ( VI ) d'autre part. Dans les deux cas, la nouvelle région perçoit la somme des parts précédemment perçues par l'ensemble des régions qu'elle regroupe désormais.

Répartition des frais de gestion et des parts de TICPE accordées aux régions pour leur action en matière de la formation professionnelle continue et de l'apprentissage

Régions

Pourcentage

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

7,81123

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

8,77901

Auvergne et Rhône-Alpes

9,67082

Bourgogne et Franche-Comté

4,29545

Bretagne

3,64684

Centre - Val de Loire

3,70772

Corse

0,4884

Île-de-France

12,96859

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

8,82202

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

13,03375

Normandie

7,55947

Pays de la Loire

4,64587

Provence-Alpes-Côte d'Azur

8,31591

Guadeloupe

0,96614

Guyane

0,33795

Martinique

1,34848

La Réunion

2,96575

Mayotte

0,63616

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016

Répartition du produit de la taxe d'apprentissage entre les régions

Régions

Pourcentage

Montant (en euros)

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

9,20617

142 151 837

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

9,44007

145 763 488

Auvergne et Rhône-Alpes

11,134

171 919 332

Bourgogne et Franche-Comté

4,42505

68 326 924

Bretagne

4,43524

68 484 265

Centre - Val de Loire

4,16195

64 264 468

Corse

0,47427

7 323 133

Île-de-France

15,3553

237 100 230

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

7,44523

114 961 330

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

8,65772

133 683 302

Normandie

5,46579

84 396 951

Pays de la Loire

6,37739

98 472 922

Provence-Alpes-Côte d'Azur

6,79127

104 863 542

Guadeloupe

1,65956

25 625 173

Guyane

0,43923

6 782 107

Martinique

1,83502

28 334 467

La Réunion

2,67429

41 293 546

Mayotte

0,02243

346 383

TOTAL

100

1 544 093 400

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016

Afin que la part fixe de la ressource régionale pour l'apprentissage soit bien égale à 1 544 093 400 euros, il convient d'augmenter, pour 2016, la part de TICPE versée aux régions à ce titre : le 1° du VII du présent article prévoit que, pour 2016, cette part s'élève à 148,318 millions d'euros. Par conséquent, la fraction de tarif de la TICPE servant au calcul de la part du produit affecté est égale, à compter de 2016, à :

- 0,39 euro par hectolitre, s'agissant des supercarburants sans plomb ;

- 0,28 euro par hectolitre, s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 degrés Celsius.

La répartition entre les régions est celle présentée dans le tableau relatif à la taxe d'apprentissage (cf. supra ).

S'agissant de la prime d'apprentissage pour les entreprises de moins de 11 salariés, le VIII procède à une nouvelle répartition tenant compte de la nouvelle carte des régions (d du 2°). En outre, il modifie le financement de cette compensation aux régions, en remplaçant la dotation budgétaire par une fraction de tarif TICPE (1°).

Par conséquent, le 2° du VIII du présent article prévoit que cette fraction est égale à :

- 0,61 euro par hectolitre, s'agissant des supercarburants sans plomb ;

- 0,43 euro par hectolitre, s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 degrés Celsius.

Répartition entre les régions de la prime d'apprentissage destinée aux entreprises
de moins de onze salariés

Régions

Pourcentage

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

9,94578

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

8,88182

Auvergne et Rhône-Alpes

13,17107

Bourgogne et Franche-Comté

4,79501

Bretagne

4,42792

Centre - Val de Loire

4,7007

Corse

0,61831

Île-de-France

14,60741

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

7,71003

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

7,6223

Normandie

5,73429

Pays de la Loire

6,93747

Provence-Alpes-Côte d'Azur

8,54648

Guadeloupe

0,15772

Guyane

0,06487

Martinique

0,73939

La Réunion

1,22513

Mayotte

0,08425

Source : article 12 du projet de loi de finances pour 2016

Par ailleurs, le X du présent article prévoit qu'à compter de 2016, l'État assure la compensation financière aux régions de l'aide au recrutement des apprentis par le versement d'une part des produits de la TICPE.

À titre provisionnel, le montant de cette part est fixé à 60 millions d'euros, étant entendu que son montant définitif sera arrêté dans une loi de finances rectificative en fonction des aides versées par les régions entre le 1 er juillet de l'année précédente et le 30 juin de l'année en cours.

Aussi, pour 2016, la fraction de tarif de TICPE servant à calculer cette part est égale à :

- 0,15 euro par hectolitre, s'agissant des supercarburants sans plomb ;

- 0,11 euro par hectolitre, s'agissant du gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 degrés Celsius.

3. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances prend acte de cette disposition, qui actualise les fractions de tarifs de TICPE à verser aux régions en conséquence de divers transferts de compétences et permet aux nouvelles régions de disposer de la somme des compensations de transferts de compétences perçues par les régions qu'elles regroupent.

II. LES AJUSTEMENTS DES COMPENSATIONS DE TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AU PROFIT DES DÉPARTEMENTS CONCERNANT LE REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE

A. LE DROIT EXISTANT

L'article 3 de la loi du 18 décembre 2003 portant décentralisation du revenu minimum d'insertion 309 ( * ) (RMI) prévoit de transférer aux départements la gestion du RMI. La loi du 1 er décembre 2008 310 ( * ) institue le revenu de solidarité active (RSA) qui se substitue au RMI (article 1) et dispose que la compétence des départements est maintenue pour sa gestion 311 ( * ) (article 7).

Ce transfert de compétences est généralisé aux départements et régions d'outre-mer, ainsi qu'à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon par l'ordonnance du 24 juin 2010 312 ( * ) . Les modalités de compensation destinées à financer ces transferts sont définies à l'article 51 de loi de finances pour 2009 313 ( * ) : une fraction du produit de la TICPE est attribuée à ces collectivités.

À ce titre, les lois de finances peuvent prévoir des mesures pour actualiser, de manière ponctuelle, la compensation du transfert de compétences à ces collectivités en matière de RSA. Ces mesures non pérennes prennent la forme soit de versements qui s'imputent sur le produit non transféré de la TICPE si la compensation de la part de l'État s'est révélée insuffisante, soit de reprises uniques sur le produit transféré aux collectivités concernées si elle s'est révélée supérieure aux surcoûts engendrés par le transfert de compétence.

De la même manière pour Mayotte, l'article 39 de la loi de finances pour 2012 314 ( * ) a prévu le transfert d'une part du produit de la TICPE destiné à compenser les charges de la mise en oeuvre du RSA-socle dans ce territoire à compter du 1 er janvier 2012.

Les lois de finances pour 2013 315 ( * ) et pour 2014 316 ( * ) ont étendu ce dispositif à l'ensemble des charges nouvelles résultant pour le département de Mayotte du processus de départementalisation : gestion et financement du fonds de solidarité pour le logement, financement des formations sociales initiales et des aides aux étudiants inscrits dans ces formations, aide sociale à destination des personnages âgées et handicapées et financement de la formation des assistants maternels.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le IV du présent article vise à prélever, en 2016, 11 888 euros à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon et 1 657 198 euros au département du Loiret au titre de l'ajustement de cette compensation, pour les années 2012 et 2013 s'agissant de la première 317 ( * ) , 2010, 2011 et 2012 s'agissant du second 318 ( * ) .

Ces diminutions sont imputées sur le produit de la TICPE attribué en 2016 à ces collectivités (en application du I de l'article 51 de la loi du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 319 ( * ) ).

Le V du présent article prévoit que la fraction de tarif de la TICPE transférée au département de Mayotte au titre de la compensation du transfert de l'ensemble des compétences précitées s'élève en 2016 à :

- 0,043 euro par hectolitre s'agissant des supercarburants sans plomb ;

- 0,031 euro par hectolitre s'agissant du gazole présentant un point éclair inférieur à 120 degrés Celsius.

C. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Outre un amendement rédactionnel présenté par Valérie Rabault, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement qui prévoit la compensation du transfert au département de Mayotte de la protection juridique des majeurs 320 ( * ) .

Ainsi, la fraction de tarif de TICPE transférée au département de Mayotte prend en compte ce nouveau transfert .

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les modalités de compensation prévues ayant reçu un avis favorable de la commission consultative d'évaluation des charges, votre commission des finances prend acte de cette modification, qui porte le droit à compensation du département de Mayotte à 16,6 millions d'euros.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12 bis (nouveau) (Art. L. 1614-4, L. 1614-8, L. 1614-8-1 et L. 4332-3 du code général des collectivités territoriales) - Garantie du montant des dotations de compensation versées aux nouvelles régions

Commentaire : le présent article prévoit que les nouvelles régions créées au 1 er janvier 2016 bénéficient d'un montant de dotation générale de décentralisation (DGD), de concours particuliers et de dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) égal à la somme des montants versés aux régions auxquelles elles succèdent.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION (DGD) DES RÉGIONS

Afin d'assurer la compensation des charges qui résultent des transferts de compétences entre l'État et les collectivités territoriales et qui ne sont pas compensées par des transferts de fiscalité 321 ( * ) , la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État a créé une dotation générale de décentralisation (DGD) .

Codifiée à l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales, cette dotation, versée aux communes, aux départements et aux régions, est ainsi conçue comme le solde entre les charges transférées, appréciées à leur niveau au moment du transfert, et la fiscalité transférée.

Dans le cadre de la réforme d'ensemble des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales prévue par la loi de finances pour 2004 322 ( * ) , la DGD a fait l'objet d'un transfert financier partiel vers la dotation globale de fonctionnement (DGF) 323 ( * ) , selon les modalités suivantes :

- 95 % des crédits de la DGD revenant à chaque collectivité territoriale en 2003 ont été intégrés dans la DGF pour 2004 de ces collectivités ;

- les 5 % des crédits restants permettent de procéder aux ajustements que peut connaître annuellement la DGD et de compenser les nouveaux transferts.

Ainsi, chaque collectivité perçoit, chaque année, une DGD égale à 5 % de la DGD de 2003, majorée le cas échéant au titre des nouveaux transferts de compétence non compensés par de la fiscalité transférée . À titre d'exemple, la loi de finances pour 2015 324 ( * ) a prévu une augmentation de la DGD des régions de 1,9 million d'euros afin de compenser les charges résultant de la redevance quai et de la redevance gares respectivement créées au profit de Réseau ferré de France (RFF) et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) par le décret du 20 janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et autres infrastructures de services du réseau ferroviaire.

L'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales prévoyait initialement que la DGD évolue chaque année comme la DGF, c'est-à-dire en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'inflation de l'année de versement et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut (PIB) de l'année en cours. La loi de finances pour 2009 325 ( * ) a prévu de geler le montant de la DGD en 2009 de manière dérogatoire ; ce gel a par la suite été prolongé par les lois de finances suivantes, avant d'être pérennisé par la loi de finances pour 2012 326 ( * ) . Les montants de DGD versés aux collectivités sont donc identiques d'une année sur l'autre depuis 2008, hors mesure nouvelle de transfert.

Le montant de la DGD est fixé chaque année par la loi de finances , et prend la forme de crédits budgétaires inscrits sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Ces crédits sont libres d'emploi par les collectivités , ils ne sont donc pas affectés à un type de dépenses particulier.

En 2014, la DGD versée aux collectivités territoriales a représenté un montant total de 1,38 milliard d'euros, dont 983,5 millions d'euros pour les régions. Le projet de loi de finances pour 2016 fixe la DGD des régions à 992,5 millions d'euros .

B. LES CONCOURS PARTICULIERS COMPENSANT LES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AUX RÉGIONS DE CERTAINS PORTS MARITIMES ET DE L'ORGANISATION DES SERVICES FERROVIAIRES RÉGIONAUX DE VOYAGEURS

Les articles L. 1614-8 et L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales prévoient la compensation financière par l'État de deux compétences transférées en tout ou partie aux régions :

- le transfert de la propriété, de l'aménagement, de l'entretien et de la gestion de certains ports maritimes non autonomes de l'État ;

- le transfert de l'organisation des services ferroviaires régionaux de voyageurs.

Les ports maritimes de commerce et de pêche, à l'exception des ports autonomes, des ports d'intérêt national et des ports maritimes contigus aux ports militaires ont été transférés aux départements par la loi du 22 juillet 1983 327 ( * ) . Par la suite, la loi du 13 août 2004 328 ( * ) a permis le transfert des ports nationaux , à l'exception des ports autonomes, aux collectivités ou groupements de collectivités se portant candidats, ainsi que le transfert des ports maritimes départementaux aux régions ou à la collectivité territoriale de Corse , sur demande du département et après accord du conseil régional concerné ou de l'assemblée de Corse.

Les régions qui gèrent un port maritime bénéficient d'un concours financier particulier : la dotation générale de décentralisation « concours particuliers en faveur des ports » , dont les montants sont inscrits à l'action 06 du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » 329 ( * ) . Ce concours fait l'objet, chaque année, d'un versement unique.

L'organisation des transports ferroviaires régionaux de voyageurs est transférée aux régions depuis le 1 er janvier 2002 330 ( * ) . Au terme de l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, les charges pour les régions issues de ce transfert donnent lieu à compensation financière par l'État. Cette compensation est intégrée à la dotation générale de décentralisation (DGD) versée aux régions . En 2014, un montant de 61,2 millions d'euros a été versé aux régions au cours du premier semestre 2014, puis cette compensation a été ajustée en loi de finances rectificative pour 2014 afin de prendre en compte les dernières évaluations financières de Réseau ferré de France (RFF). Le présent projet de loi de finances prévoit un montant de compensation de 62,64 millions d'euros en 2016 , au sein des 992,5 millions de la DGD des régions.

C. LA DOTATION RÉGIONALE D'ÉQUIPEMENT SCOLAIRE

La dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) a été créée par l'article 17 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, afin de financer les dépenses d'équipement et d'investissement relatives aux lycées transférés aux régions .

L'article L. 4332-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que cette dotation « est inscrite au budget de chaque région, qui l'affecte à la reconstruction, aux grosses réparations, à l'équipement et, si ces opérations figurent sur la liste établie en application de l'article L. 211-2 du code de l'éducation, à l'extension et à la construction des lycées, des établissements d'éducation spéciale, des écoles de formation maritime et aquacole et des établissements d'enseignement agricole ».

Auparavant versée sous la forme de crédits budgétaires inscrits dans le budget de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », la DRES prend désormais la forme d'un prélèvement sur recettes (PSR) de l'État 331 ( * ) . Elle est versée aux régions en une seule fois au cours du troisième trimestre de l'année en cours.

Alors que la DRES était auparavant indexée sur le taux de formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques, son montant est gelé depuis 2009 332 ( * ) . Ainsi, le montant de la DRES versé chaque année aux régions est égal à celui de 2008, soit 661,8 millions d'euros .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté à l'initiative du Gouvernement, avec un avis favorable de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Il vise à tirer les conséquence du regroupement de certaines régions à compter du 1 er janvier 2016 prévu par la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral 333 ( * ) .

Cet article précise que les nouvelles régions percevront, à compter du 1 er janvier 2016, des dotations de compensation dont le montant correspond à la somme des montants versés aux régions auxquelles elles succèdent , dans les conditions applicables avant regroupement.

Le I du présent article insère cette précision à l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales relatif à la dotation générale de décentralisation (DGD) des collectivités ; le II insère cette précision à l'article L. 1614-8 du même code s'agissant des concours particuliers compensant les transferts de compétence relatifs aux ports maritimes ;  le III insère cette précision à l'article L. 1614-8-1 du même code s'agissant des concours particuliers compensant les transferts de compétence relatifs aux services ferroviaires régionaux de voyageurs ; le IV insère cette précision à l'article L. 4332-3 du même code s'agissant de la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article permet d'assurer la transition entre anciennes et nouvelles régions en matière de dotation générale de décentralisation, de concours particuliers compensant les transferts de compétences des ports maritimes et d'organisation des services ferroviaires régionaux de voyageurs et de dotation régionale d'équipement scolaire versés aux nouvelles régions.

Ces montants correspondront à la somme des compensations perçues en 2015 par les régions fusionnées. Comme l'a indiqué le Secrétaire d'État au Budget Christian Eckert à l'Assemblée nationale : « il s'agit tout simplement de l'addition des montants historiques calculés au moment des transferts de compétences ».

Le présent article assure donc la stabilité de la compensation et de sa perception par les nouvelles régions .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 13 - Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

Commentaire : le présent article procède à l'évaluation, pour 2016, des prélèvements opérés sur les recettes de l'État au bénéfice des collectivités territoriales.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'évaluation des prélèvements sur recettes (PSR) de l'État au profit des collectivités territoriales résulte des dispositions de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), dont l'article 6 précise qu'ils « sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ».

Au total, les prélèvements sur recettes de l'État au profit des collectivités territoriales sont évalués à 47 milliards d'euros , soit, par rapport à 2015, une baisse de 3,698 milliards d'euros , à périmètre constant. Cette évolution s'explique notamment :

- par la baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 3,5 milliards d'euros 334 ( * ) (contribution au redressement des finances publiques de 3,67 milliards d'euros et hausse de la péréquation verticale de 317 millions d'euros, dont 158,5 millions d'euros financés au sein de la DGF, et des mesures diverses majorant de 13,9 millions d'euros son montant, hors recentralisation de la politique de vaccination en Martinique) ;

- par la hausse du montant prévisionnel du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) de 17,7 millions d'euros , dont 12 millions d'euros au titre de l'élargissement du bénéfice du fonds aux dépenses d'entretien des bâtiments publics ;

- par la hausse de 50,7 millions d'euros de la dotation de compensation des pertes de base de la taxe professionnelle et de la redevance des mines des communes et de leurs groupements (DCPBTP), qui s'explique notamment par la crise économique ;

- enfin, par la minoration de 259,4 millions d'euros des PSR « tout ou partie variables d'ajustement ».

Évolution des PSR au profit des collectivités territoriales

(en millions d'euros)

LFI 2015

PLF 2016 à périmètre constant

Évolution PLF 2016 constant / LFI 2015

Écart PLF 2015 constant / LFI 2014

PLF 2016 à périmètre courant

Dotation globale de fonctionnement

36 607,0

33 107,0

-9,6%

- 3 500,0

33 109,0

Dotation spéciale pour le logement des instituteurs

18,7

17,2

-7,8%

- 1,5

17,2

Dotation de compensation des pertes de base de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

25

75,7

202,8%

+ 50,7

75,7

Dotation élu local

65,0

65,0

65,0

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse

41,0

41,0

41,0

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI)

500,0

500,0

500,0

Dotation départementale d'équipement des collèges

326,3

326,3

326,3

Dotation régionale d'équipement scolaire

661,2

661,2

661,2

Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

5,0

0,0

-100,0%

- 5,0

0,0

Dotation globale de construction et d'équipement scolaire

2,7

2,7

2,7

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

1 826,2

1 608,7

-11,9%

- 217,5

1 608,7

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (*)

192,7

170,7

-11,4%

- 22,0

170,7

Dotation pour transferts de compensations d'exonérations de fiscalité directe locale (*)

655,1

635,3

-3,0%

- 19,9

635,3

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants (TLV) pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale percevant la taxe d'habitation sur les logements vacants

4,0

4,0

4,0

Dotation de compensation liée au processus de départementalisation de Mayotte

83,0

83,0

83,0

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP)

3 324,4

3 324,4

3 324,4

Dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle

423,3

423,3

423,0

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

6,8

6,8

6,8

PSR de compensation du versement transport

78,8

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

5 961,1

5 978,8

0,3%

+ 17,7

5 978,8

Total

50 728,6

47 031,0

-7,3%

- 3 697,6

47 111,4

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la direction du budget

* PSR tout ou partie variables d'ajustement (en grisé)

Le détail de la minoration des PSR « tout ou partie variables d'ajustement » de 259,4 millions d'euros est présenté dans le tableau ci-dessous.

Modifications des prélèvements sur recettes au profit des collectivités
par rapport à 2015

(en millions d'euros)

Variations des dotations

Conséquences sur les PSR tout ou partie variables d'ajustement

Conséquence sur le total des PSR

Contribution au redressement des finances publiques

- 3 670,0

-

- 3 670,0

Hausse de la péréquation verticale (+ 317 millions d'euros), dont 158,5 millions d'euros financés au sein de la DGF

+ 158,5

- 158,5

-

Mesures diverses au sein de la DGF (hors recentralisation de la politique de vaccination en Martinique)

+ 13,9

- 13,9

-

Hausse tendancielle du FCTVA

+ 5,7

-

+ 5,7

Élargissement du FCTVA aux dépenses d'entretien des bâtiments publics

+ 12,0

- 12,0

-

DCPBTP

+ 50,7

- 50,7

-

Fonds « CatNat »

- 5,0

+ 5,0

-

Compensation de la "hausse tendancielle" des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »

-

- 30,7

- 30,7

Logement des instituteurs

- 1,5

+ 1,5

-

Compensation du relèvement du seuil d'application du versement transport

+ 78,8

-

+ 78,8

Total

- 3 356,9

- 259,4

- 3 616,2

Source : commission des finances du Sénat

L'évolution « tendancielle » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT), pour un montant de 30,7 millions d'euros, correspond pour l'essentiel à un rythme de décaissement plus rapide que prévu des crédits de paiement (CP) de la majoration de 200 millions d'euros de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) adoptée en loi de finances pour 2015.

Il faut également noter la mise en place d'un prélèvement sur recettes destiné à compenser le relèvement de dix à onze salariés du seuil d'application du versement transport 335 ( * ) .

Globalement, si l'on fait abstraction de ces deux points, le premier correspondant à une hausse à due concurrence des CP de la mission RCT et le second compensant une modification de la fiscalité locale, l'évolution des concours de l'État aux collectivités territoriales est donc de - 3,66 milliards d'euros. Cette baisse se réduit à 3,54 milliards d'euros si l'on prend en compte les 120 millions d'euros de CP du fonds de soutien d'un milliard d'euros , en excluant les 30 millions d'euros de CP correspondants à la reconduction de la majoration de 200 millions d'euros de la DETR.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, le présent article a été modifié par un amendement du Gouvernement tirant les conséquences des modifications introduites par nos collègues députés sur les autres articles relatifs aux PSR au profit des collectivités.

À l'initiative de la rapporteure générale de la commission des finances, l'Assemblée nationale a étendu le bénéfice du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie , ce qui représente une augmentation de 15 millions d'euros en 2016 336 ( * ) . Il s'agit d'une hausse nette, puisqu'elle n'a pas été compensée par une diminution à due concurrence des variables d'ajustement.

À l'initiative du Gouvernement, nos collègues députés ont introduit un article 11 ter décalant d'un an le versement du régime de perte de base complémentaire 337 ( * ) , ce qui réduit de 2 millions d'euros le PSR « Dotation de compensation des pertes de base de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements ». En conséquence, les variables d'ajustement sont majorées de 2 millions d'euros.

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, le montant des PSR est donc en hausse de 15 millions d'euros .

Conséquences sur les prélèvements sur recettes
des mesures votées par l'Assemblée nationale en première lecture

(en millions d'euros)

Variations des dotations

Conséquences sur les PSR tout ou partie variables d'ajustement

Conséquence sur le total des PSR

Extension du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie

+ 15,0

-

+ 15,0

Décalage d'un an du versement du régime de perte de base complémentaire

- 2,0

+2, 0

-

TOTAL

+ 13,0

+ 2,0

+ 15,0

Source : commission des finances du Sénat

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances prend acte de cet article récapitulant le montant de chaque prélèvement sur les recettes de l'État bénéficiant aux collectivités territoriales.

Elle note en particulier que l'extension du bénéfice du FCTVA aux dépenses d'entretien des bâtiments publics, destinée à soutenir l'investissement local, est en fait compensée au sein des variables d'ajustement . Ce qui a été présenté comme un « geste » du Gouvernement est en fait un « geste » des collectivités territoriales.

Votre commission des finances vous propose de tirer les conséquences sur le présent article des amendements qu'elle vous propose aux articles 10 et 11 :

- prise en compte sur la DGF des dépenses contraintes imposées aux collectivités territoriales par l'État (+ 1,6 milliard d'euros) ;

- gel de la péréquation verticale (- 158,5 millions d'euros sur la DGF et + 158,5 millions d'euros sur les variables d'ajustement) ;

- prolongation du bénéfice du FCTVA en matière de haut débit (+ 45 millions d'euros).

Conséquences sur les prélèvements sur recettes
des amendements adoptés par votre commission des finances

(en millions d'euros)

Variations des dotations

Conséquences sur les PSR tout ou partie variables d'ajustement

Conséquence sur le total des PSR

Prise en compte des dépenses imposées aux collectivités territoriales

+ 1 595,0

-

+ 1 595,0

Gel de la péréquation verticale

- 158,5

+ 158,5

-

Sous-total DGF

+ 1 436,5

+ 158,5

+ 1595,0

Prolongation du bénéfice du FCTVA en matière de haut débit

+ 45,0

-

+ 45,0

TOTAL

+ 1 481,5

+ 158,5

+ 1 640,0

Source : commission des finances du Sénat

En définitive, les amendements adoptés par votre commission des finances permettent d'augmenter de 1,64 milliard d'euros les concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

B. - Impositions et autres ressources affectées à des tiers
ARTICLE 14 - Contributions des organismes chargés de service public au redressement des finances publiques

Commentaire : le présent article prévoit l'ajustement des plafonds des taxes affectées, du taux de certaines de ces taxes et il élargit le champ du dispositif de plafonnement pour environ 2,5 milliards d'euros. Il procède également à la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive (RAP), pour 118 millions d'euros, ainsi qu'à un prélèvement sur le fonds de roulement de l'Ademe et sur celui de la CGLLS pour un montant total de 190 millions d'euros. Enfin, une nouvelle affectation au profit de l'Agence nationale de fréquences (ANFR) est créée pour 27,3 millions d'euros.

I. LE DROIT EXISTANT

A. 38,4 MILLIARDS D'EUROS DE RECETTES FISCALES AFFECTÉES À DES TIERS (HORS SECTEURS LOCAL ET SOCIAL)

En dehors de ressources propres (financements européens, privés, produits de vente, redevance...) ou d'éventuelles dotations en fonds propres 338 ( * ) (1 % du financement public), les opérateurs de l'État sont principalement financés par des crédits budgétaires (82 % du montant total des ressources publiques qui leur sont attribuées). Ils peuvent également bénéficier de taxes dites « affectées » (17 %) dont tout ou partie du produit leur revient.

Il n'existe pas de doctrine fixant précisément la répartition du financement des organismes entre crédit budgétaire et affectation fiscale .

La loi n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) dispose seulement que « les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui 339 ( * ) » et que l'affectation à une autre personne morale d'une ressource établie au profit de l'État doit être autorisée dans la loi de finances 340 ( * ) .

Elle prévoit également une annexe explicative jointe au projet de loi de finances de l'année « comportant la liste et l'évaluation, par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État 341 ( * ) ».

D'après l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2016, les taxes affectées à des tiers devraient atteindre 260 milliards d'euros en 2016 - un montant stable par rapport à 2015 . Les taxes affectées à des organismes n'appartenant ni au secteur local ni au secteur social devraient quant à elles s'élever à 38,5 milliards d'euros en 2016.

Évolution des ressources fiscales affectées à des personnes morales
autres que l'État

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après le tome I de l'annexe « Voies et moyens » jointe au projet de loi de finances pour 2016

B. UN PLAFONNEMENT DES TAXES AFFECTÉES DE PLUS EN PLUS ÉTENDU MAIS TOUJOURS INCOMPLET

1. Le principe du plafonnement : un triple objectif

Le principe du plafonnement des taxes affectées a été posé par l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 342 ( * ) . Des plafonds de ressources ont été fixés ; en cas de dépassement de ces plafonds, il est procédé à un reversement de l'excédent du produit de la taxe au budget général de l'État. Ainsi, le dynamisme d'une taxe plafonnée ne bénéficie plus aux affectataires, au-delà du plafond défini initialement, mais permet de réduire le besoin de financement de l'État.

Comme le souligne le Gouvernement dans la présentation des taxes affectées qui figure au tome I de l'annexe « Voies et moyens » 343 ( * ) , l'objectif est triple : renforcer le suivi et le contrôle du niveau d'ensemble des taxes affectées, ajuster chaque année les ressources des opérateurs à leurs besoins réels et faire contribuer les opérateurs à la maîtrise de la dépense publique, puisque le fait de limiter leurs ressources contraint leurs dépenses.

Les nouveaux plafonnements sont le plus souvent intégrés au tableau de l'article 46 de la loi de finances pour 2012, et l'ajustement à la hausse ou à la baisse de ces plafonds se fait par modification de ce même article.

2. L'extension du plafonnement et son intégration à la norme de dépenses

Le plafonnement des taxes affectées a connu un mouvement d'extension quasi-continu depuis 2012 : le volume total des taxes affectées a évolué de 3 milliards d'euros à près de 8,7 milliards d'euros en 2016 344 ( * ) , soit une hausse proche d'un triplement.

En outre, à partir de la loi de programmation pour les années 2012 à 2017, a été pris en compte dans la norme de dépenses le stock (et non plus seulement le flux) des contributions et taxes affectées à des tiers et faisant l'objet d'un plafonnement limitatif à l'article 46 de la loi de finances pour 2012, pour un montant de 4,5 milliards d'euros en 2013. En d'autres termes, c'est, à partir de 2013, l'ensemble des taxes affectées plafonnées qui est intégré à la norme de dépenses - dans la situation antérieure, seules les taxes nouvellement plafonnées l'étaient.

C. LE DURCISSEMENT DES RÈGLES RELATIVES À L'AFFECTATION DE RESSOURCES FISCALES PAR LA LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES 2014-2019

1. Une baisse du plafonnement, à périmètre constant, d'au moins 135 millions d'euros en 2016

La loi de programmation des finances publiques prévoit également, à son article 15 , un montant minimal de baisse du plafond des taxes affectées incluses dans l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012.

Cette baisse devait être égale ou supérieure à 283 millions d'euros en 2015, à 135 millions d'euros en 2016 et 86 millions d'euros en 2017 . Elle s'apprécie à périmètre constant, c'est-à-dire en neutralisant les éventuelles entrées ou sorties du périmètre du plafonnement.

2. Des critères de création et de maintien relatifs à la nature de la taxe ou à l'objet qu'elle finance

L'article 16 de la loi de programmation des finances publiques 345 ( * ) a restreint le recours à une affectation de recettes fiscales à trois cas alternatifs, que le rapport annexé à la loi de programmation précise et explicite.

La ressource devrait :

- soit pouvoir s'assimiler à une quasi-redevance , c'est-à-dire être « en relation avec le service rendu par l'affectataire à un usager » et d'un montant qui « doit pouvoir s'apprécier sur des bases objectives », comme par exemple le droit de timbre sur les passeports sécurisés dont l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) est la bénéficiaire , ou encore le droit sur les produits bénéficiant d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique protégée (INAO) dont bénéficie l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) ;

- soit revêtir le caractère d'un prélèvement sectoriel et financer des actions d'intérêt commun au sein d'un secteur d'activité ou d'une profession, comme la taxe sur les spectacles, qui est versée à l'association pour le soutien du théâtre privé ou la cotisation versée par les organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) et les sociétés d'économie mixte (SEM) qui finance la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) ;

- soit se rapprocher d'une contribution assurantielle , en alimentant des fonds qui nécessitent la constitution régulière de réserves financières, comme les différentes taxes sur les contrats d'assurance qui sont versées au Fonds national de garantie des risques agricoles , au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages ou au Fonds de garantie des victimes d'actes terroristes et autres infractions.

Sur un champ de 214 taxes d'un rendement de 28 milliards d'euros bénéficiant aux agences de l'État, aux organismes consulaires, aux organismes professionnels et aux dispositifs de solidarité, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a établi à partir des mêmes critères, dans son rapport de 2013 relatif à la fiscalité affectée 346 ( * ) , que :

- 75 taxes, d'un rendement de 16,1 milliards d'euros, avaient vocation à être remplacées par des dotations budgétaires ;

- 5 taxes d'un montant de 6,2 milliards d'euros devaient être affectées à un compte spécial .

3. L'obligation de plafonnement et de gage pour toute nouvelle affectation de taxe

En vertu de l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques, toute nouvelle affectation de taxe devrait d'une part être plafonnée , d'autre part s'accompagner de la suppression d'une ou plusieurs impositions affectées d'un rendement équivalent à celui de la taxe dont l'affectation est prévue .

Cette règle de gage s'appliquerait au sein du champ ministériel de l'imposition nouvellement affectée .

4. Une alternative entre plafonnement et budgétisation à horizon 2017

La loi de programmation dispose enfin que les taxes affectées devraient toutes être plafonnées à compter du 1 er janvier 2016 . Celles qui ne le seraient pas au 1 er janvier 2017 se verraient alors budgétisées.

Des dérogations à ce principe sont toutefois d'ores et déjà envisagées. Elles devront faire l'objet d'une justification dans une annexe du projet de loi de finances de l'année .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE BAISSE DES PLAFONDS DE TAXES AFFECTÉES À HAUTEUR DE 189 MILLIONS D'EUROS À PÉRIMÈTRE CONSTANT, METTANT FORTEMENT À CONTRIBUTION LES CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE

27 ressources fiscales affectées à 24 opérateurs voient leur plafonnement modifié entre 2015 et 2016 : 21 dans le sens d'une diminution et 7 dans celui d'une hausse.

Les chambres de commerce et d'industrie sont fortement mises à contribution dans la mesure où la baisse prévue à leur égard par le projet de loi de finances déposé par le Gouvernement, à hauteur de 150 millions d'euros, représentait près de la moitié du total de la baisse des plafonds. Cet effort s'ajoute à celui leur ayant déjà été demandé l'année dernière : le plafond de la taxe qui leur est affectée avait alors connu une diminution de 213 millions d'euros entre 2014 et 2015 . Cette diminution du plafond s'accompagne cette année de la création d'un fonds de péréquation, prévu à l'article 52, doté de 20 millions d'euros .

À l'inverse, le 39° du présent article prévoit d'augmenter le montant de la taxe sur les transactions financières (TTF) affecté au fonds de solidarité pour le développement , en le portant de 140 millions d'euros à 160 millions d'euros. Cette majoration du plafond était attendue ; d'après les engagements qui avaient été pris par le Gouvernement en 2012, lors de la décision d'affecter une part de la TTF au développement, elle aurait même dû intervenir dès 2015 .

Il est à noter que le montant total de 316 millions d'euros, avancé par le Gouvernement, prend en compte une baisse de 68 millions d'euros sur le Fonds national de gestion des risques en agriculture 347 ( * ) : le Gouvernement estime en effet que le nouveau plafonnement de la taxe, à hauteur de 60 millions d'euros, constitue une baisse du plafond de 67,5 millions d'euros par rapport au rendement attendu de la taxe (à 127,5 millions d'euros en 2016). Le Gouvernement présente donc le plafonnement de la taxe affectée au FNGRA à la fois comme une diminution du plafond et comme une extension du champ du plafonnement.

Cependant, votre rapporteur général souligne que la baisse des plafonds d'une année sur l'autre doit être calculée à périmètre constant , c'est-à-dire sur le seul ensemble des taxes déjà plafonnées l'année précédente (et en neutralisant les « baisses » du plafond liées à la sortie de taxes du dispositif de plafonnement). En procédant de cette façon, la baisse réelle des plafonds prévue par le présent projet de loi de finances s'élève à 189 millions d'euros .

Les ressources affectées plafonnées en 2015 qui voient leur plafond évoluer en 2016

(en millions d'euros)

Taxe

Affectataire

Plafond 2015

Plafond 2016 constant

Écart

Taxe pour la gestion des certificats d'immatriculation des véhicules

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

39

36

-3

Taxe affectée au Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes

CTIFL - Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes

5

-5

Taxe sur les céréales

FranceAgriMer

22

18

-4

Indemnité de défrichement

Fonds stratégique de la forêt et du bois

18

10

-8

Contributions additionnelles aux primes

Fonds national de gestion des risques en agriculture

0

-68

-68

Taxe sur les transactions financières - fraction affectée de la ressource État

Fonds de solidarité pour le développement (FSD)

140

160

20

Droit dû par les entreprises ferroviaires pour l'autorité de régulation des activités ferroviaires

Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER)

11

10

-1

Taxe d'aménagement

Collectivités territoriales

561

566

5

Taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques

Voies navigables de France (VNF)

140

133

-7

Taxe sur les nuisances sonores aériennes

Personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes

48

47

-1

Taxe additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base - Recherche

Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA)

100

85

-15

Redevances cynégétiques

Office national de la chasse et de la faune sauvage

68

66

-1

Taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux perçue dans la région Ile-de-France

Société du Grand Paris (SGP)

375

350

-25

Imposition forfaitaire sur le matériel roulant circulant sur le réseau de transport ferroviaire et guidé géré par la RATP - IFER-STIF RATP

60

65

5

Fraction ANFR de la taxe additionnelle à l'imposition forfaitaire des entreprises de réseaux des Stations Radio (TA-IFER Stations Radio)

Agence nationale des fréquences

6

3

-3

Taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour frais de chambres de commerce et d'industrie de région

Chambres de commerce et d'industrie

506

356

-150

Fraction CRMA de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambre régionale de métiers et d'artisanat

Chambres de métiers et de l'artisanat

244

243

-1

Taxe pour le développement des industries des matériaux de construction

Centre d'étude et de recherche de l'industrie du béton (CERIB) ; Centre technique de matériaux naturels de construction (CTMNC)

15

14

-1

Taxe pour le développement des industries de l'ameublement ainsi que des industries du bois

Comité professionnel de développement des industries françaises de l'ameublement et du bois (CODIFAB) ; Institut technologique filière cellulose, bois, ameublement (FCBA)

14

13

-1

Contributions pour frais de contrôle

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

195

190

-5

Droits et contributions pour frais de contrôle

Autorité des marchés financiers (AMF)

74

94

20

Taxe affectée au financement d'un Centre Technique Industriel de la plasturgie et des composites

Centre technique industriel de la plasturgie et des composites

3

3

Taxe annuelle sur les logements vacants

Agence nationale de l'habitat (ANAH)

61

21

-40

Taxe spéciale d'équipement

Divers établissements publics fonciers

511

486

-25

Prélèvement sur les jeux exploités par la FdJ hors paris sportifs

Centre national pour le développement du sport (CNDS)

171

163

-7

Prélèvement complémentaire temporaire 2011-2015 "UEFA Euro 2016" sur les jeux exploités par la FdJ hors paris sportifs

24

28

4

Prélèvement sur les paris sportifs en ligne de la FdJ et des nouveaux opérateurs agréés

35

32

-2

Total baisses de plafonds

-316

Source : commission des finances, d'après les réponses du Gouvernement au questionnaire du rapporteur général

L'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) , qui n'est pas incluse dans le périmètre du plafonnement résultant de l'article 46 de la loi de finances pour 2012, voit diminuer la fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) lui étant affectée : elle passe de 1 139 millions d'euros en 2015 à 715 millions d'euros en 2016 .

B. PLUSIEURS PLAFONNEMENTS NOUVEAUX POUR UN MONTANT D'ENVIRON 2,4 MILLIARDS D'EUROS

Plusieurs opérateurs sont intégrés dans le champ du plafonnement : il s'agit des agences de l'eau, du Fonds national de gestion des risques en agriculture, de plusieurs centres techniques industriels (création de trois nouvelles taxes), des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Martinique et en Guadeloupe et enfin de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Il est à noter que la catégorie d'opérateurs bénéficiant, et de loin, des ressources fiscales les plus importantes , c'est-à-dire les agences de l'eau, est bien intégrée au mécanisme de plafonnement des taxes mais ne figure pas dans le tableau global de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 .

L'ensemble des nouveaux plafonds correspond au niveau du produit attendu des différentes taxes : en d'autres termes, il n'est pas prévu que ces nouveaux plafonds donnent lieu à écrêtement.

Les nouvelles ressources affectées plafonnées, les organismes affectataires et le plafond pour 2016

(en milliers d'euros)

Taxe

Affectataires

2016

Taxe spéciale d'équipement

Agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Guadeloupe

1 700

Taxe spéciale d'équipement

Agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Martinique

1 700

Taxes affectées aux agences de l'eau

Agences de l'eau

2 300 000

Taxe pour le développement des industries de la fonderie

Centre technique des industries de la fonderie

1 159

Taxe pour le développement des industries de l'ameublement ainsi que des industries du bois

Centre technique industriel de la plasturgie et des composites

3 000

Contributions additionnelles aux primes

Fonds national de gestion des risques en agriculture

60 000

Contribution annuelle au profit de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire due par les exploitants des installations nucléaires de base mentionnées à l'article 28 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

62 500

Taxe affectée au financement de l'Institut des corps gras

Institut des corps gras

404

Total général

2 430 463

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

C. LA MODULATION DES TAUX DE CERTAINES TAXES AFFECTÉES EN LIEN AVEC LA BAISSE DU PLAFOND

La diminution du montant de la taxe sur les céréales, affectée à FranceAgriMer, se traduit par une baisse de son taux de 0,08 euro par tonne, soit une baisse du rendement de la taxe d'environ 22 % (de 21,3 millions d'euros à 16,5 millions d'euros).

De même, le taux de la taxe affectée au fonds national de gestion des risques agricoles (FNGRA) connaît une baisse significative puisqu'il est divisé par deux : il passe de 11 % à 5,5 %. D'après le Gouvernement, cette diminution provient de l'ajustement du produit attendu de la taxe aux besoins du FNGRA hors période de crise systémique . En cas de crise systémique, le fonds n'a jamais été suffisant et le recours à une indemnisation étatique s'est avéré chaque fois nécessaire : la diminution du taux de la taxe a donc pour conséquence d'augmenter les besoins qui pèseront sur l'État en cas de crise systémique .

Le Centre national pour le développement du sport (CNDS) connaît en revanche une hausse de la fraction du prélèvement sur les jeux de loterie et les paris sportifs lui étant affectée, afin de financer la candidature de Paris aux Jeux olympiques et paralympiques pour 2024 .

Concernant les chambres d'agriculture , la baisse du plafonnement de la taxe pour frais de chambre et celle de son taux, prévue en loi de finances initiale pour 2015, sont reportées d'un an « dans le contexte de la crise de l'élevage ».

D. PLUSIEURS TAXES ET AFFECTATAIRES SORTENT DU DISPOSITIF DE PLAFONNEMENT

Le projet de loi de finances procède également à la suppression de plusieurs lignes de plafonnement , pour des motifs divers. Le tableau ci-après récapitule les différentes taxes et leurs affectataires qui ne devraient plus faire l'objet d'un plafonnement à partir de 2016.

Les taxes affectées qui devraient cesser d'être plafonnées en 2016

(en milliers d'euros)

Imposition ou ressource affectée

Personne affectataire

Base juridique plafonnement

Plafond fixé en LFI 2015

Taxe affectée au Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes

CTIFL - Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes

Loi de finances initiale 2013 et LFR III 2012

4 500

Taxe spéciale d'équipement

Établissement public foncier des Hauts-de-Seine

Loi de finances initiale 2015

27 100

Taxe spéciale d'équipement

Établissement public foncier des Yvelines

Loi de finances initiale 2015

23 700

Taxe spéciale d'équipement

Établissement public foncier du Val-d'Oise

Loi de finances initiale 2015

19 600

Redevance d'archéologie préventive

INRAP

Loi de finances initiale 2013 et LFR III 2012

118 000

Total

-188 400

1. La re-budgétisation de la redevance d'archéologie préventive

La redevance d'archéologie préventive (RAP) affectée à l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) devrait être rebudgétisée à partir de 2016 . 118 millions d'euros sont donc inscrits au budget général 348 ( * ) de l'État tandis que les articles instituant la redevance sont supprimés.

2. Plusieurs plafonnements supprimés pour d'autres raisons

La taxe spéciale d'équipement affectée aux établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, des Yvelines et Val-d'Oise, de même que la taxe dont bénéficiait le Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTFIL), sont sorties du dispositif de plafonnement.

En ce qui concerne le CTIFL, la suppression du plafonnement correspond à celle de la taxe pesant sur les professionnels de la filière fruits et légumes , suite à la loi de finances pour 2015, qui prévoyait le passage, en 2016, à une contribution volontaire obligatoire pour financer cet organisme .

Les trois établissements publics fonciers précités sont ôtés du dispositif du plafonnement car ils ont été dissous par décret 349 ( * ) en mai 2015 et intégrés à l'établissement public foncier d'Île-de-France (qui reste, quant à lui, plafonné).

E. DES PRÉLÈVEMENTS SUR LE FONDS DE ROULEMENT DE LA CGLLS ET DE L'ADEME POUR UN TOTAL DE 190 MILLIONS D'EUROS

Enfin, le présent article procède à un prélèvement sur les fonds de roulement de deux organismes , à hauteur de 100 millions d'euros pour la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et de 90 millions d'euros pour l'Agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie (Ademe).

F. UNE NOUVELLE AFFECTATION DE 27,3 MILLIONS D'EUROS EN DIRECTION DE L'AGENCE NATIONALE DES FRÉQUENCES

Le présent article procède à une nouvelle affectation à hauteur de 27,3 millions d'euros par an, en 2016, 2017 et 2018 au bénéfice de l'Agence nationale des fréquences dans le cadre du plan d'aide aux téléspectateurs et aux propriétaires d'équipements de transmission radio à usage professionnel. L'arrêt de la norme de diffusion MPEG-2, remplacée par la norme MPEG-4 dans la nuit du 4 au 5 avril 2016, ainsi que des réaménagements de fréquences , nécessitent selon le Gouvernement une campagne d'information et des aides à l'équipement et à la réception .

Cette affectation, si elle est bornée dans le temps et que son montant est fixé par la loi, n'est pas plafonnée stricto sensu . Elle n'est donc pas intégrée à la norme de dépenses de l'État .

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Plusieurs plafonds ont été relevés à la suite des votes de l'Assemblée nationale, pour un montant total de 123 millions d'euros .

Le fonds de solidarité pour le développement (FSD) a vu son plafond relevé de 100 millions d'euros : à l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement portant le plafond de 160 millions d'euros à 260 millions d'euros . Ce montant correspond à 24 % environ du produit attendu de la TTF en 2016 (1 093 millions d'euros). Parallèlement, l'amendement adopté modifie l'article 22 de la loi de finances rectificative pour 2005 : la mention de l'affectation de 25 % du produit de la TTF est supprimée ; l'article prévoirait uniquement que « une part » de son produit soit affectée au FSD. Dès lors, seul le plafond en termes de montant déterminerait désormais la part revenant au fonds.

Le plafond du droit dû par les entreprises ferroviaires à l'ARAFER a été abaissé par amendement gouvernemental de 10,457 millions d'euros à 8,3 millions d'euros, mais cette diminution s'est accompagnée de l'affectation de nouvelles taxes créées par la loi dite « Macron ». Au total, l'Assemblée nationale a relevé le plafond des taxes affectées à l'ARAFER , qui passe de 10,457 millions d'euros à 12 millions d'euros.

La diminution du plafond de la CVAE affectée aux chambres de commerce et d'industrie (CCI) a été légèrement atténuée, de 20 millions d'euros et atteint 130 millions d'euros .

Enfin, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL) a également vu son plafond relevé de 1,5 million d'euros (pour atteindre 38,5 millions d'euros) .

Évolution des plafonds à l'issue des votes de l'Assemblée nationale

(en milliers d'euros)

Nom de la taxe

Base juridique de l'imposition

Affectataire

Plafonds prévus PLF

Plafonds modifiés AN

Différence PLF/vote AN

Droit dû par les entreprises ferroviaires

Article L. 2132-13 du code des transports

Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER)

10 457

8 300

-2 157

Contribution pour frais de contrôle payée par les entreprises de transport public routier de personnes

Article L. 2132-14 du code des transports

1100

+ 1 100

Contribution pour frais de contrôle payée par les concession-naires d'autoroutes

Article L. 2132-15 du code des transports

2600

+ 2 600

Taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour frais de CCI de région

2 du III de l'article 1600 du code général des impôts

Chambres de commerce et d'industrie (CCI)

356 117

376 117

+ 20 000

Droit de francisation et de navigation hors Corse

Article 224 du code des douanes

Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL)

37 000

38 500

+ 1 500

Taxe sur les transactions financières - fraction affectée de la ressource État

I de l'article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005

Fonds de solidarité pour le développement (FSD)

160 000

260 000

+ 100 000

Total

+ 123 043

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général se félicite de la baisse des plafonds des taxes affectées à des tiers qui, dans la mesure où elle permet d'ajuster les ressources des opérateurs à leurs besoins réels, contribue à la maîtrise des dépenses publiques .

En premier lieu, votre rapporteur général souligne que l'extension du champ du plafonnement doit être nuancée : en réalité, les agences de l'eau de même que les agences de mise en valeur de la zone dite des cinquante pas connaissaient déjà un plafonnement, bien qu'incomplet, puisque celui-ci s'inscrivait dans un cadre pluriannuel, n'avait pas pour corollaire direct l'écrêtement en cas de dépassement et n'était pas intégré à la norme de dépenses de l'État.

Par ailleurs, force est de constater que le Gouvernement ne tient pas ses propres engagements et que la loi de programmation des finances publiques n'est pas respectée . En effet, celle-ci prévoyait que l'affectation de nouvelles taxes devait nécessairement s'accompagner de la suppression de taxes affectées d'un rendement équivalent : ce n'est nullement le cas , alors même que trois taxes nouvelles sont créées, au profit de plusieurs centres techniques industriels, et qu'une affectation nouvelle est mise en oeuvre au profit de l'agence nationale des fréquences (ANFR).

La loi de programmation posait également un principe général de re-budgétisation ou de plafonnement au 1 er janvier 2016 : pourtant, un seul opérateur, l'Institut national de recherches d'archéologie préventive (Inrap), voit ses ressources réintégrées au budget général de l'État. Si la re -budgétisation de la redevance d'archéologie préventive (RAP) affectée à l'Inrap est une mesure de bonne gestion budgétaire, il faut noter que le Gouvernement ne re-budgétise pas seulement la part de la redevance destinée à l'établissement public mais supprime aussi l'affectation de cette redevance aux collectivités territoriales dans le cas où ce sont elles qui réalisent le diagnostic d'archéologie préventive. L'affectation de recettes aux collectivités territoriales est remplacée par une subvention dont les modalités de calcul et les conditions de délivrance sont très floues : le texte indique simplement que les collectivités territoriales « peuvent » bénéficier d'une subvention de l'État.

Sur le plan du droit budgétaire, cette modification n'est nullement nécessaire dans la mesure où l'obligation de re-budgétisation prévue par la loi de programmation ne s'applique pas aux taxes affectées aux collectivités territoriales .

Sur le fond, ce dispositif comporte deux risques importants : d'une part, les contraintes budgétaires que connaît l'État pourraient le conduire à privilégier le financement de l'établissement public au détriment du subventionnement des diagnostics par les collectivités territoriales. D'autre part, la règle générale selon laquelle seules les opérations non encore engagées peuvent être subventionnées ralentira la réalisation des diagnostics par les collectivités territoriales. Pourtant, les services territoriaux d'archéologie préventive ont bien souvent été créés pour accélérer la réalisation du diagnostic par rapport à l'Inrap .

C'est pourquoi votre rapporteur général propose de laisser subsister le fléchage d'une partie de la redevance en direction de la collectivité territoriale dont les services réalisent le diagnostic.

Il note également que deux des opérateurs de l'État bénéficiant des plus importantes ressources fiscales affectées ne sont soumis à aucun plafond : il s'agit du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) , dont le produit fiscal affecté devrait s'élever à environ 640 millions en 2015, et de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) , pour plus de 180 millions d'euros.

Votre rapporteur général propose donc, en conformité avec les principes fixés par la loi de programmation des finances publiques, de plafonner les ressources fiscales affectées à l'un comme l'autre de ces opérateurs . Le plafond serait fixé au rendement attendu de la taxe et ne conduirait donc à aucun écrêtement en 2016 mais permettrait de normaliser la situation de ces opérateurs et de les intégrer à la norme de dépenses de l'État. L'objet de ces amendements n'est pas, en effet, de chercher à dégager des recettes pour l'État, mais bien de contribuer à la rationalisation de la fiscalité affectée et au renforcement de l'information et du contrôle du Parlement sur l'emploi des ressources publiques , conformément aux principes budgétaires d'annualité et d'universalité. Ils s'inscrivent dans la continuité des travaux de votre commission des finances sur la fiscalité et reprennent les préconisations du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires remis au Gouvernement en juillet 2013.

Liste des dix opérateurs ou catégories d'opérateurs percevant les montants de ressources fiscales les plus élevés

(en millions d'euros)

Missions

Affectataire

Exécution 2012

Exécution
2013

Exécution 2014

PLF
2015

PLF 2016

Plafon-nement (même partiel)

Écologie, développement et mobilité durables

Agences de l'eau

2 175

2 152

2 147

2 166

2 227

Oui

AFITF - Agence de financement des infrastructures de transport de France

535

538

571

1 818

715

Oui

Travail et emploi

Fonds de solidarité

1 498

1 334

1 353

1 116

1 148

Oui

Médias, livre et industries culturelles

CNC - Centre national du cinéma et de l'image animée

708

697

673

638

639

Non

Écologie, développement et mobilité durables

SGP - Société du grand Paris

345

345

489

552

532

Oui

ADEME - Agence de l'environne-ment et de la maîtrise de l'énergie

491

499

449

449

449

Oui

Sport, jeunesse et vie associative

CNDS - Centre national pour le développement du sport

272

272

272

271

264

Oui

Administration générale et territoriale de l'État

ANTS - Agence nationale des titres sécurisés

179

180

164

194

181

Oui

Économie

INPI - Institut national de la propriété industrielle

176

184

194

185

196

Non

Immigration, asile et intégration

OFII - Office français de l'immigration et de l'intégration

149

145

142

142

141

Oui

Source : commission des finances, d'après le « Jaune Opérateurs » et le tome I du rapport « Voies et Moyens »annexés au projet de loi de finances pour 2016

Votre rapporteur général souhaite également souligner que la baisse des plafonds des taxes affectées doit être ciblée sur les opérateurs pour lesquelles elle est soutenable , afin de ne pas se faire au détriment des missions confiées aux organismes. À cet égard, si les efforts demandés aux chambres de commerce et d'industrie (CCI) demeurent importants, le relèvement du plafond prévu par le Gouvernement à la suite du vote de l'Assemblée nationale, à hauteur de 20 millions d'euros, paraît constituer une solution de compromis satisfaisante tant pour l'État que pour le réseau consulaire, d'autant plus que le plafonnement s'accompagne de la création d'un fonds de péréquation doté de 20 millions d'euros.

Votre rapporteur général note que le relèvement du plafond de la part de la taxe sur les transactions financières (TTF) affectée au développement, prévu à hauteur de 20 millions d'euros dans le projet présenté par le Gouvernement puis de 120 millions d'euros après le vote de l'Assemblée nationale permet au Gouvernement de répondre dans l'urgence aux nombreuses critiques qui ont accueilli la présentation du budget de l'aide publique au développement pour 2016 sans pour autant remédier aux insuffisances de celui-ci . Les engagements pris par la France nécessitent en effet de doter de façon adéquate l'Agence française de développement , et il n'apparaît ni crédible d'un point de vue international, ni à la hauteur des enjeux, d'ajuster à la hâte le plafond de la ressource fiscale affectée au Fonds de solidarité pour le développement. Les mêmes interrogations sur la cohérence de la politique du Gouvernement peuvent être soulevées quant aux prélèvements sur les fonds de roulement de la CGLLS et de l'Ademe , qui peuvent paraître surprenants au regard des priorités affichées par le Gouvernement, au sein desquelles figurent la transition énergétique et le logement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 15 (Art. 1-1 à 1-5 [nouveaux], 4, 27, 29, 64-4 et 64-5 [nouveau] de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, art. 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, art. 1-1 [nouveau] de l'ordonnance n° 92-1147 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle en matière pénale en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna, art. 1001, 302 bis Y, 1018 A du code général des impôts) - Réforme de l'aide juridictionnelle

Commentaire : le présent article prévoit d'augmenter les plafonds de ressources permettant de bénéficier de l'aide juridictionnelle et de revaloriser l'unité de valeur déterminant la rétribution de l'avocat ; cette réforme est financée par une nouvelle augmentation de la fiscalité sur les assurances et les notaires et un prélèvement sur les produits financiers des caisses des règlements pécuniaires des avocats ( CARPA).

I. LE DROIT EXISTANT

A. GARANTIR L'ACCÈS À LA JUSTICE AUX PERSONNES À FAIBLES REVENUS

Créée en par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'aide juridictionnelle (AJ) permet de garantir aux personnes disposant de faibles ressources l'accès à la justice : elle bénéficie aux « personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice 350 ( * ) ».

Les conditions de ressources pour bénéficier de l'aide sont fixées par l'article 4 de la loi précitée : les ressources mensuelles 351 ( * ) du demandeur doivent être inférieures certains plafonds pour une aide juridictionnelle totale ou partielle ; ces plafonds varient en fonction des charges de famille et ils « sont revalorisés, au 1 er janvier de chaque année, comme la tranche la plus basse du barème de l'impôt sur le revenu ».

Initialement fixé à 4 400 francs pour le bénéfice de l'aide totale et à 6 600 francs pour l'aide juridictionnelle partielle, ces plafonds de ressources ont été revalorisés (+3,1 %) en 2001 352 ( * ) . Selon notre ancien collègue Hubert Haenel, alors rapporteur spécial, cette revalorisation était motivée par le fait que « les rejets sont motivés majoritairement par des dépassements de ressources (55 % des motifs en 1999) 353 ( * ) ».

Aujourd'hui, suite aux revalorisations successives de la première tranche de l'impôt sur le revenu, le justiciable doit disposer de ressources inférieures à 941 euros nets mensuels pour une personne seule pour bénéficier de l'aide juridictionnelle totale. De 942 euros à 1 411 euros, il bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle, avec une part contributive dégressive de l'État comme l'expose le tableau suivant.

Contribution de l'État au titre de l'AJ partielle
en fonction des ressources mensuelles (pour une personne seule)

(en euros)

Part contributive de l'État

Ressources

supérieures ou égales à

et

inférieures ou égales à

85%

942

984

70%

985

1 037

55%

1 038

1 112

40%

1 113

1 197

25%

1 198

1 304

15%

1 305

1 411

Source : note du 29 décembre 2014 relative au montant des plafonds de ressources des correctifs pour charges familiales et des tranches de ressources pour l'admission à l'aide juridictionnelle en 2015

Les plafonds sont majorés de 169 euros pour les deux premières personnes à charge et de 107 euros à partir de la troisième.

En outre, l'article 2 de la loi de 1991 prévoit que « l'aide juridictionnelle n'est pas accordée lorsque les frais couverts par cette aide sont pris en charge au titre d'un contrat d'assurance de protection juridique ou d'un système de protection ».

Enfin, l'article 7 de la loi précitée prévoit que « l'aide juridictionnelle est accordée à la personne dont l'action n'apparaît pas, manifestement, irrecevable ou dénuée de fondement ».

C'est le bureau d'aide juridictionnelle (BAJ) qui vérifie que les trois conditions sont remplies et décide de l'admission du dossier présenté par le demandeur.

L'AJ couvre tous les « frais afférents aux instances, procédures ou actes pour lesquels elle a été accordée, à l'exception des droits de plaidoirie 354 ( * ) » : le bénéficiaire de l'AJ est dispensé du paiement (et de l'avance) de ces frais, qui sont versés par l'État aux avocats et aux autres professionnels du droit intervenant en la matière.

B. LA RÉTRIBUTION AU TITRE DE L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Les articles 27 à 39 de la loi de 1991 fixent le cadre de la rétribution des avocats et professionnels de l'aide juridique (auxiliaires de justice, notamment).

S'agissant des avocats, une dotation est versée chaque année par l'État aux barreaux - son montant est ajusté en cours d'année en fonction des missions effectivement assurées.

La rétribution de chaque mission d'AJ correspond à la multiplication de l'unité de valeur (UV) par un coefficient qui dépend du type de procédure engagée. L'unité de valeur est fixée annuellement par la loi de finances ; son montant n'a pratiquement pas varié depuis huit ans, puisqu'il est de 22,84 euros (hors taxe) pour les missions achevées à compter du 1 er janvier 2015 355 ( * ) - contre 22,50 euros en 2007 356 ( * ) .

Le barème de l'aide juridictionnelle est établi depuis un décret de 1991 de la manière suivante.

Barème de l'aide juridictionnelle

Exemples de coefficients appliqués à l'UV en fonction du type de procédures :

- divorce par consentement mutuel : 30 ;

- tribunal de grande instance et tribunal de commerce, instance au fond : 26 ;

- procédure judiciaire de mainlevée et de contrôle des mesures de soins psychiatriques : 4 ;

- instruction criminelle : 50 ;

- instruction correctionnelle avec détention provisoire : 20 ;

- assistance d'un condamné lors du recueil de son consentement pour le placement sous surveillance électronique : 2.

Des majorations sont possibles, par exemple en cas d'expertises, de vérifications personnelles du juge ; elles peuvent être cumulées, dans la limite de 16 UV.

Source : article 90 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique

Par ailleurs, pour les aides juridictionnelles totales, l'unité de valeur de référence est augmentée selon les barreaux en fonction de la proportion de dossiers d'AJ traités par rapport au nombre d'avocats inscrits au barreau.

Ainsi, les barreaux sont classés en dix groupes 357 ( * ) et à chaque groupe est associé une majoration : de 0,34 euro pour le groupe 1 (comprenant les barreaux de Grasse, Nice, Paris et des Hauts-de-Seine) à 3,4 euros pour le groupe 10 (qui regroupe notamment les barreaux d'Argentan, de Béthune ou de Laon).

Montant de la rétribution au titre de l'AJ =

Coefficient selon le type de procédure x (UV + majoration selon le barreau)

La dotation due par l'État à chaque barreau est versée (par le biais de l'Union nationale des CARPA) sur un compte spécial de la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) ; elle est « intégralement affectée au paiement des avocats effectuant des missions d'aide juridictionnelle 358 ( * ) ».

C. LES MULTIPLES SOURCES DE FINANCEMENT D'UNE DÉPENSE DYNAMIQUE

Entre 2008 et 2014, les dépenses effectives d'aide juridictionnelle ont augmenté de 15,5 % , passant de 316 millions d'euros à 365 millions d'euros.

Evolution de la dépense effective d'aide juridictionnelle (2008-2014)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère de la justice au questionnaire budgétaire

Depuis cinq ans, le financement de l'aide juridictionnelle a été fréquemment modifié : créée en 2011 359 ( * ) , la contribution pour l'aide juridique (CPAJ), prenant la forme d'un droit de timbre de 35 euros, a été supprimée en 2014 360 ( * ) . En 2014, il s'agissait de financer la réforme de la garde à vue ; le Gouvernement de l'époque avait initialement envisagé de verser cette contribution directement à l'union nationale des CARPA (UNCA), avant de décider de l'affecter au Conseil national des barreaux - celui-ci devant toutefois conclure une convention de gestion avec l'UNCA, agréée par le Garde des sceaux.

Évolution du financement et des dépenses d'AJ entre 2008 et 2014

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015 (LFI)

Dépense sur crédits budgétaires inscrits

(1)

309,65

344,4

292,91

317,31

328,46

332,36

Rétablissements de crédits

(2)

11,55

6,7

4,42

0,75

0

0

Produit de la CPAJ ou autres recettes affectées

(3)

0

0

54,39

51,08

27,84

43

Évolution de la trésorerie des CARPA entre les fins d'année N et N - 1

(4)

10,8

19,5

-15,46

-1,43

-8,15

Dépense effective

(5) = (1) + (2) + (3) - (4)

310,40

331,6

367,18

370,57

364,47

375,36

Source : réponse du ministère de la justice au questionnaire budgétaire

La loi de finances pour 2015 361 ( * ) a assez profondément modifié le financement de l'AJ, par une augmentation de la fiscalité affectée à l'AJ, « le Gouvernement souhaitant diversifier les modes de financement de l'aide juridictionnelle 362 ( * ) ». Ainsi, depuis 2015, le financement des dépenses d'aide juridictionnelle repose sur :

- des crédits budgétaires (332,4 millions d'euros prévus par la loi de finances initiale pour 2015 363 ( * ) ) versés aux barreaux sous forme d'une dotation ;

- des ressources fiscales supplémentaires affectées au Conseil national des barreaux (CNB) pour un montant total de 43 millions d'euros 364 ( * ) :

o une augmentation de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance (TSCA) de protection juridique 365 ( * ) (passant de 9 % à 11,6 %, soit un produit supplémentaire de 25 millions d'euros par an) ;

o une hausse de la taxe forfaitaire sur les actes des huissiers de justice 366 ( * ) de 22 %, passant de 9,15 euros (depuis 1998), à 11,16 euros, pour un produit supplémentaire estimé à 11 millions d'euros par an ;

o une réévaluation du droit fixe de procédure en matière pénale dû par chaque condamné suite aux décisions rendues par les juridictions répressives (sauf celles qui ne statuent que sur les intérêts civils) 367 ( * ) ; il est désormais compris entre 31 euros (pour les ordonnances pénales en matière contraventionnelle ou correctionnelle) et 527 euros (pour les décisions des cours d'assises) ; le produit supplémentaire est estimé à 7 millions d'euros.

Le montant de chacune de ces ressources fiscales affectées au CNB est plafonné ; il affecte ces recettes au paiement des avocats effectuant des missions d'aide juridictionnelle.

Selon le ministère de la justice, « il est d'ores et déjà acquis que les plafonds des ressources issues de la taxe forfaitaire sur les actes des huissiers de justice et sur le droit fixe de procédure pénale seront chacun atteints. S'agissant de la ressource issue des contrats d'assurance de protection juridique, la souscription de ce type de police est marquée par un effet de saisonnalité qui ne permet pas encore d'évaluer précisément le montant de la recette 368 ( * ) ».

Détail du financement de l'AJ en 2015

(en millions d'euros)

2015

Crédits budgétaires

332,4

Ressources affectées au CNB

43

dont TSCA

25

dont taxe forfaitaire sur les actes d'huissier

11

dont droit fixe de procédure en matière pénale

7

Coût total de l'aide juridictionnelle

375,4

Source : commission des finances du Sénat

D. DES CRITIQUES RÉCURRENTES

Ces dernières années, de nombreux rapports sur la réforme de l'aide juridictionnelle ont été publiés : rapport de notre ancien collègue Roland du Luart en 2007 369 ( * ) , de Maître Jean-Michel Darrois en 2009 370 ( * ) , de Philippe Gosselin et George Pau-Langevin en 2011 371 ( * ) et plus récemment, de nos collègues Sophie Joissains et Jacques Mézard en juillet 2014 372 ( * ) ou encore du député Jean-Yves Le Bouillonnec, en septembre 2014 373 ( * ) .

Ces rapports soulignent notamment l'indispensable revalorisation des plafonds de ressources pour l'accès à l'aide juridictionnelle, la nécessaire augmentation de l'UV assortie d'une nouvelle définition du barème prenant mieux en compte la réalité des contraintes et des coûts des différentes missions confiées aux avocats, tout en soulignant les difficultés de financement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA REVALORISATION DE L'UNITÉ DE VALEUR ET LA CONTRACTUALISATION

Le I du présent article réforme les modalités de rétribution des avocats au titre de l'aide juridictionnelle.

Outre une revalorisation de l'unité de valeur, la modulation géographique serait remplacée par une convention, conclue entre les chefs de juridiction et le bâtonnier, prévoyant les modalités de calcul d'une rétribution complémentaire .

Ainsi, la loi de 1991 préciserait (nouvel article 1-1) que la « rétribution de base » (égale au produit de l'UV par le nombre d'UV associé à la mission accomplie) est complétée par une « rétribution complémentaire destinée à prendre en compte les charges et contraintes spécifiques liées à certaines missions d'aide juridique, la longueur et la complexité des procédures au titre desquelles l'aide est accordée ainsi que les conditions particulières d'exercice de ces missions dans le ressort de la juridiction au sein duquel elles sont réalisées » (nouvel article 1-2).

Les nouveaux articles 1-1 et 1-2 seraient applicables en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis-et-Futuna pour l'aide juridique en matière pénale ( III ).

Par ailleurs, il est proposé qu'un décret en Conseil d'État précise :

- les missions qui pourraient être concernées par la rétribution complémentaire ;

- dans quelles conditions une convention, conclue entre les chefs de juridiction et le bâtonnier, « arrête le montant ou le mode de calcul de la rétribution complémentaire » ;

- les « modalités d'évaluation de la mise en oeuvre de cette convention au sein de chaque barreau ».

À défaut de conclusion d'une telle convention, c'est un arrêté du garde des sceaux qui fixerait le montant ou le mode de calcul de la rétribution complémentaire.

Selon les évaluations préalables, le coût de la rétribution complémentaire et de la contractualisation est évalué à 16 millions d'euros en 2016 et 25 millions d'euros en 2017 .

Le nouvel article 1-4 préciserait que l'affectation à chaque barreau des crédits budgétaires correspondant à l'aide juridique ainsi que les rétributions dues aux avocats dans certains cas particuliers 374 ( * ) ne fait pas obstacle à ce que ces crédits soient « utilisés indifféremment pour toute dépense d'aide juridique ». Cette fongibilité des crédits au sein de chaque barreau doit permettre « d'en faciliter la gestion au niveau déconcentré 375 ( * ) ».

Enfin, l'union nationale des caisses des règles pécuniaires des avocats (UNCA), qui regroupe l'ensemble des CARPA, rend compte de « l'utilisation des ressources affectées au financement de l'aide juridique par le biais de transmissions dématérialisées » (nouvel article 1-5).

Le montant de l'UV (hors taxe sur la valeur ajoutée) serait revalorisé à 24,20 euros (nouvel article 1-3). Le coût de cette mesure est évalué à 5 millions d'euros en 2016 et à 20 millions d'euros en 2017 .

Selon le Gouvernement, « la réforme du barème, la revalorisation de l'unité de valeur, l'instauration par voie réglementaire d'une rétribution complémentaire des avocats et des autres acteurs de l'aide juridique et la contractualisation locale visent à instaurer une rémunération plus équitable des avocats selon les différentes procédures et les spécificités locales ».

Aucune réforme du barème (nombre d'UV associées à chaque acte) n'est prévue par le présent article, toutefois, selon les évaluations préalables, « le nouveau barème qui sera mis en oeuvre par décret (...) permettra de mieux identifier les différentes procédures et d'arrêter les rétributions correspondantes. Des ajustements à la baisse, s'agissant en particulier de la garde à vue, des procédures de divorce ou de certaines procédures prud'homales, comme à la hausse, certaines missions n'étaient pas du tout rétribuées (médiation), sont proposés ».

B. LA REVALORISATION DES PLAFONDS DE RESSOURCES POUR L'ACCÈS À L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Il est proposé de relever les plafonds de ressources qui passeraient, pour une personne seule, de 941 euros à 1 000 euros pour l'AJ totale et de 1 411 euros à 1 500 euros pour l'AJ partielle ( a du 2° du I ).

Ces plafonds ne seront plus indexés sur la première tranche de l'impôt sur le revenu, mais sur l'inflation hors tabac ( b du 2° du I ).

En 2014, 896 786 missions ont été accomplies au titre de l'aide juridictionnelle ; avec ce relèvement des plafonds de ressources, le Gouvernement estime que 100 000 personnes supplémentaires bénéficieraient de l'aide juridictionnelle - ce qui porterait à environ un million le nombre de personnes en bénéficiant chaque année.

Le coût de cette mesure est estimé à 7 millions d'euros en 2016 et 28 millions d'euros en 2017 .

C. L'INCITATION AU RECOURS À LA MÉDIATION

Le présent article propose également d'élargir le bénéfice de l'aide juridictionnelle aux missions de médiation (nouvel article 64-5) - à la fois dans le cas d'une médiation ordonnée par le juge ou lorsque le juge est saisi pour homologuer un accord intervenu suite à une médiation.

Le coût de la prise en charge des actions de médiation au titre de l'AJ, est estimé à 3 millions d'euros en 2016 et 8 millions d'euros en année pleine, à partir de 2017 .

*

L'ensemble de ces dispositions (revalorisation de l'UV et contractualisation, incitation du recours à la médiation, revalorisation des seuils d'éligibilité) sont applicables en Polynésie-Française ( VII ).

D. LE FINANCEMENT DE LA RÉFORME

1. Le coût de la réforme

Le coût de l'ensemble des mesures proposées par le présent article s'élève à 31 millions d'euros en 2016 et 81 millions d'euros en 2017 .

Une partie de ce coût serait compensé par des mesures d'économies, non prévues par le présent projet de loi de finances : en effet, selon les évaluations préalables, « les dispositions relatives à la consultation juridique préalable et à la réforme du barème et de l'aide juridictionnelle partielle ne figurent pas en tant que telles au sein de ce projet d'article mais font partie d'une réforme plus large de l'aide juridictionnelle ».

En ce qui concerne l'aide juridictionnelle partielle, le nombre de tranches serait réduit de six à deux (selon les évaluations préalables).

Compte tenu de ces mesures d'économies hors PLF 2016, le coût de la réforme serait ramené à 20 millions d'euros en 2016 et 50 millions d'euros en 2017.

Détail du coût des mesures

(en millions d'euros)

Coût de la mesure

2016

2017

Augmentation du seuil

7

28

Médiation

3

8

Revalorisation UV

5

20

Rétribution complémentaire et contractualisation

16

25

Sous-total : coûts des mesures inscrites dans le PLF 2016

31

81

Réforme du barème et de l'AJ partielle

-8

-33

Consultation juridique préalable

2

2

TOTAL du coût de la réforme après mesures d'économies non inscrites dans le PLF 2016

25

50

Note de lecture : en italique, les mesures non prévues par le présent projet de loi de finances

Source : commission des finances du Sénat à partir des évaluations préalables

Comme le montre le tableau ci-après, le financement de la réforme de l'aide juridictionnelle (après prise en compte de la réforme de l'AJ partielle et des dispositions relatives à la consultation juridique préalable) reposerait sur :

- une nouvelle 376 ( * ) augmentation de la taxe sur les contrats d'assurance (TSCA) de protection juridique , passant de 11,6 % en 2015 à 12,9 % en 2016 puis 13,4 % en 2017 ( a du 1° du IV ) ;

- une nouvelle 377 ( * ) hausse de la taxe forfaitaire sur les actes d'huissiers (de 11,16 euros en 2015 à 13,04 euros en 2016 et 14,89 euros en 2017 ( 2° du IV ) ;

- un prélèvement de 5 millions d'euros en 2016 et 10 millions d'euros en 2017 sur les produits financiers des CARPA ( V ).

Recettes nouvelles pour financer la réforme

(en millions d'euros)

Financement

2016

2017

Augmentation TSCA protection juridique

10

20

Produits financiers des CARPA

5

10

Augmentation taxe forfaitaire actes d'huissiers

10

20

Total

25

50

Source : commission des finances du Sénat à partir des évaluations préalables

Par conséquent, le coût de la réforme serait nul pour l'État.

Les évaluations préalables précisent que « le fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice, introduit à l'article L. 444-2 du code de commerce par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, et auquel contribueront les avocats, constituera un relais au-delà de 2017 pour le financement de l'aide juridique ».

Toutefois, à ce jour, le Conseil constitutionnel ayant déclaré inconstitutionnelles les modalités de financement de ce fonds 378 ( * ) , celui-ci n'est, à ce jour, pas assuré.

2. La modification des ressources affectées au Conseil national des barreaux

Outre ces nouvelles modalités de financement, le présent article propose de modifier les recettes affectées directement au Conseil national des barreaux.

Le CNB continuerait de percevoir le produit de la taxe sur les contrats d'assurance de protection juridique pour 35 millions d'euros en 2016 et 45 millions d'euros à compter de 2017 - contre un montant limité à 25 millions d'euros par an prévu jusqu'alors ( IV ).

Le prélèvement sur les produits financiers des CARPA serait également affecté au CNB ( V ). Entre les CARPA, cette contribution serait « répartie au prorata du montant des produits financiers générés au titre de l'année précédant l'année au titre de laquelle la contribution est due ».

De même, une part du produit des amendes pénales lui serait affectée ( VI ), à hauteur de 28 millions d'euros en 2016 et de 38 millions d'euros en 2017.

En revanche, le II prévoit qu'à partir de 2016, le CNB ne bénéficierait plus du produit de la taxe forfaitaire sur les actes d'huissier (11 millions d'euros en 2015) ni du droit fixe de procédure en matière pénale dû par chaque condamné (7 millions d'euros en 2015) - leur produit reviendrait au budget de l'État.

Recettes affectées au Conseil national des barreaux

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

TSCA

25

35

45

Taxe forfaitaire actes d'huissiers*

11

0

0

Droit fixe de procédure*

7

0

0

Prélèvement CARPA

0

5

10

Amendes

0

28

38

Total

43

68

93

*Recettes transférées au budget de l'État à compter de 2016

Source : commission des finances du Sénat à partir des évaluations préalables

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté six amendements rédactionnels et de précision.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La nécessité de revaloriser l'unité de valeur et de relever les seuils d'éligibilité pour bénéficier de l'aide juridictionnelle est partagée par l'ensemble des acteurs.

Toutefois, la question de son financement n'est toujours pas résolue.

A. UNE RÉFORME FINANCÉE PAR UNE NOUVELLE HAUSSE DE LA FISCALITÉ

Certes, les crédits budgétaires destinés à financer l'aide juridictionnelle sont en hausse entre 2015 et 2016 ; toutefois, leur part dans le financement de l'AJ tend à diminuer (de 88,5 % en 2015 à 83 % en 2016).

C'est bien une hausse de la fiscalité 379 ( * ) qui finance la majeure partie du coût de la réforme (20 millions d'euros sur 31 millions d'euros en 2016, puis 40 millions d'euros sur 81 millions d'euros en 2017, sans compter les prélèvements sur les produits financiers des CARPA), à rebours des annonces du Gouvernement sur la « pause fiscale ».

Le produit de la hausse de la fiscalité est partagé entre le CNB (10 millions d'euros supplémentaires résultant de la hausse du taux de la TSCA de protection juridique) et l'État (10 millions d'euros au titre de l'augmentation de la taxe forfaitaire sur les actes d'huissiers).

Budget de l'aide juridictionnelle en 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015

PLF 2016

Crédits budgétaires

332,4

336,7

Ressources affectées au CNB

43

68

TOTAL

375,4

404,7

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des réponses du ministère de la justice

En outre, on ne peut que s'inquiéter des errements de l'exécutif concernant l'affectation de ressources au CNB : alors que la loi de finances pour 2015 prévoyait d'affecter de nouvelles ressources fiscales au CNB (pour 43 millions d'euros), un an plus tard, le panier de recettes qui lui sont affectées est modifié. Cette année, comme l'année dernière, il ne s'agit que d'un palliatif et non d'une réforme assurant un financement pérenne de l'AJ, pourtant appelé par tous.

En effet, le présent article ne permet pas un financement pérenne de l'aide juridictionnelle, ce que d'ailleurs la garde des Sceaux, Christiane Taubira, reconnaît elle-même, puisque, dans le protocole d'accord signé entre la Chancellerie et les représentants des avocats (cf. infra ), « la profession et le ministère sont convenus de réfléchir, dans un second temps, à une nouvelle étape comportant une contractualisation complémentaire ainsi qu'un dispositif assurant la pérennité du financement de l'AJ ».

S'agissant de la hausse de la taxe forfaitaire sur les actes d'huissier , son relèvement, en 2015, pouvait se justifier dans la mesure où le montant n'avait pas été réévalué depuis 1998. Toutefois, avec prise en compte de l'inflation entre 1998 et 2014, son montant serait de l'ordre de 11,80 euros ; or les montants proposés par le Gouvernement s'élèvent à 13,04 euros en 2016 et à 14,89 euros en 2017.

Selon les informations transmises à votre rapporteur général par la Chambre nationale des huissiers de justice (CNHJ), en 2012, plus de 5,6 millions d'actes ont été taxés à ce titre, alors que seuls 185 000 actes sont éligibles à l'aide juridictionnelle. La contribution au financement de l'AJ demandée aux huissiers serait par conséquent sans commune mesure avec l'activité qu'ils exercent à ce titre.

B. UNE « PARTICIPATION » INACCEPTABLE DE LA PROFESSION DES AVOCATS AU FINANCEMENT DE L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Les avocats contribuent déjà à garantir l'accès à la justice des plus démunis : outre le fait que les rétributions perçues au titre de l'AJ sont en-deçà des coûts réels qu'ils engagent, ils mènent également des actions sociales et solidaires par le pro bono . Le financement du service public de l'aide juridictionnelle ne peut, de surcroît, reposer sur les seuls avocats.

Il faut rappeler que les produits financiers des CARPA permettent de financer les actions sociales de la profession, la formation et à Paris par exemple, une partie des congés maternité.

Le prélèvement de 5 millions d'euros en 2015 puis 10 millions d'euros en 2016 sur les produits financiers des CARPA est à l'origine de la grève des avocats qui a débuté le 19 octobre dernier et s'est terminée à la fin du mois d'octobre, par la signature d'un protocole d'accord.

C. UN PROTOCOLE D'ACCORD

Suite à grève des avocats, un protocole d'accord a été signé entre la Chancellerie et le président du Conseil national des barreaux, le président de la Conférence des bâtonniers et le bâtonnier de Paris.

Le protocole d'accord

Signé le 28 octobre 2015, il prévoit, dans un premier et dès 2016, une revalorisation de l'unité de valeur (UV), sans modification du barème (contrairement à ce qui était prévu par le Gouvernement 380 ( * ) ). La modulation géographique serait modifiée, puisqu'aux dix groupes se substitueraient trois groupes, permettant d'engager la convergence de l'UV sur l'ensemble du territoire.

Le protocole affirme que la réforme, dont les trois objectifs prioritaires sont « le relèvement du plafond de ressources permettant l'accès du justiciable à l'aide juridictionnelle, l'augmentation de la rétribution des avocats qui n'a pas été relevée depuis 2007 et la pérennisation du financement de l'aide juridictionnelle », ne sera « pas financée par un prélèvement sur les produits financiers des fonds CARPA, non plus que par une taxe spécifique sur la profession ».

Toutefois, les discussions doivent se poursuivre, afin de permettre la convergence des UV et une pérennisation du financement de l'AJ, « prenant notamment en compte les propositions de la profession ».

Source : protocole d'accord du 28 octobre 2015

Par conséquent, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement visant à supprimer le prélèvement sur les produits financiers des CARPA.

La suppression, en 2014, de la contribution pour l'aide juridique, a entrainé un manque à gagner pour l'État de l'ordre de 60 millions d'euros en année pleine. Si, pour des raisons de principe, une totale gratuité d'accès à la justice doit être maintenue, des mesures de financement alternatives devraient rapidement être prises.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 15 bis (nouveau) - Affectation d'une part de la taxe sur les transactions financières à l'Agence française de développement

Commentaire : le présent article prévoit d'affecter 25 % du produit de la taxe sur les transactions financières à l'Agence française de développement.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'AFFECTATION D'UNE PART DE LA TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES AU DÉVELOPPEMENT

L'article 235 ter ZD du code général des impôts prévoit une taxe sur les transactions financières (TTF), dont une part est affectée à la politique française d'aide publique au développement et plus précisément au fonds de solidarité pour le développement (FSD) 381 ( * ) . Le FSD a pour objet de contribuer « au financement des pays en développement et de tendre à réaliser les objectifs du millénaire pour le développement ». Ses ressources permettent de financer notamment la lutte contre le Sida, la vaccination et la lutte contre le changement climatique. Il est géré par l'Agence française de développement (AFD), dans le cadre d'une convention passée avec l'État.

La part de la TTF affectée au développement est égale à 25 % de son produit, dans la limite de 140 millions d'euros . Le produit de la taxe étant, en 2015, de 1 050 millions d'euros, la part réellement affectée à cette politique s'élève donc à 13,3 %.

B. L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT

L'Agence française de développement (AFD) est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial. Elle a pour mission, en application de l'article R. 516-3 du code monétaire et financier, « de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger et de contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ».

L'agence est le « bras armé » de l'aide publique au développement bilatérale de la France, à travers notamment ses 72 agences à l'étranger, et intervient dans 110 pays. Elle représente ainsi environ les deux tiers de l'aide bilatérale accordée par la France.

Elle intervient en utilisant des instruments financiers très divers : prêts plus ou moins concessionnels, lignes de crédit, subventions, garanties, assistance technique, etc. Elle finance des États, des personnes morales publiques ou privées et, à travers sa filiale Proparco (Promotion et participation pour la coopération économique), le secteur privé.

Évolution des engagements financiers du groupe AFD

(en millions d'euros)

Source : questionnaire budgétaire

Répartition par outil des engagements financiers de l'AFD en 2014

Source : document de politique transversale « Politique de la France en faveur du développement »

Pour financer son action, l'AFD bénéficie notamment de ressources budgétaires de l'État , qui se sont élevées à un milliard d'euros en 2015. Il s'agit notamment de 176 millions d'euros destinés à diminuer le taux d'intérêt des prêts qu'elle accorde aux pays en développement (bonifications d'intérêt du programme 110), de 390 millions d'euros prêtés par l'État dans des conditions très concessionnelles qui lui permettent d'accorder des prêts concessionnels (« ressource à condition spéciale » du programme 853) et enfin de 263 millions d'euros destinés à financer des dons (à partir du programme 209).

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de plusieurs députés du groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC), dont Pascal Cherki, Philippe Baumel et Pouria Amirshahi, l'Assemblée nationale a adopté trois amendements identiques insérant le présent article, contre l'avis du Gouvernement et de la commission des finances de l'Assemblée nationale .

Le I du présent article prévoit d' affecter 25 % du produit de la TTF au budget de l'Agence française de développement, soit 273 millions d'euros environ en 2016, le produit de la taxe étant estimé à 1 093 millions d'euros. À compter de 2017, ce montant pourrait augmenter, au-delà du dynamisme de la base, du fait de l'élargissement de la TTF aux opérations intrajournalières 382 ( * ) . Les auteurs de l'amendement précisent dans leur objet que le montant ainsi affecté à l'AFD vise à « développer sa politique de dons projets » .

Ce montant vient s'additionner à la part du produit de la TTF affectée au fonds de solidarité pour le développement, dont l'article 14 du présent projet de loi de finances relève le montant à 260 millions d'euros 383 ( * ) . Au total, 49 % du produit de la TTF, soit plus de 533 millions d'euros, seraient affectés à la politique d'aide publique au développement . L'augmentation totale, par rapport à 2015, du montant de la TTF affecté au développement serait de 393 millions d'euros.

Le II précise que l'article entre en vigueur au 1 er janvier 2016.

Le III prévoit de compenser la perte de recettes pour l'État par une majoration, à due concurrence, des droits tabac. Il constitue le « gage » de l'article, destiné à permettre sa recevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution . On pourra d'ailleurs noter qu' un tel amendement aurait été déclaré irrecevable s'il avait été déposé au Sénat , dans la mesure où la jurisprudence de notre commission des finances considère que l'augmentation d'une recette affectée à un organisme particulier a pour but de renforcer sa capacité de dépense 384 ( * ) . Il s'agit alors du gage irrégulier d'une aggravation de charge publique, interdite par l'article 40 de la Constitution.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article illustre le désarroi des députés de la majorité face au budget de l'aide publique au développement pour 2016 présenté par le Gouvernement qu'ils soutiennent.

Le 28 septembre, le Président de la République annonce à la tribune des Nations unies que « la France, qui veut toujours montrer l'exemple, [...] a décidé d'augmenter le niveau de l'aide publique au développement pour dégager 4 milliards d'euros de plus à partir de 2020 ». Deux jours plus tard, la « France qui veut toujours montrer l'exemple » présente un budget de l'aide publique au développement en diminution de plus de 6 %, soit la plus forte baisse du budget 2016 , en excluant les mesures de périmètre, alors même que la France n'est plus que le douzième pays donateur en proportion du revenu national brut (RNB). Son aide, au sens de l'OCDE, ne représente que 0,36 % de son RNB contre 0,71 % pour le Royaume-Uni.

Ce décalage entre les annonces généreuses et la réalité d'une politique sacrifiée a alimenté un flot de critiques, qui ont conduit le ministre des finances et des comptes publics, dans le souci de sauver les apparences , à annoncer, le 10 octobre dernier à Lima, que le Gouvernement majorerait de 150 millions d'euros les financements en faveur de la politique de développement 385 ( * ) par rapport à leur montant du projet de loi de finances, afin de retrouver le niveau des crédits de l'an dernier, qui était déjà très bas.

Considérant que la stabilisation du budget consacré au développement était loin d'être suffisante et souhaitant, comme l'expliquait notre collègue député Olivier Faure (SRC, Seine-et-Marne), que « les actes succèdent aux discours » 386 ( * ) , 17 députés de la majorité ont voulu aller plus loin et cosigné les trois amendements précités.

Votre commission des finances prend acte de ce désaveu du Gouvernement par sa propre majorité et considère que l'évolution des crédits consacrés à la politique d'aide publique au développement en 2016 n'est à la hauteur ni des enjeux, ni des déclarations du Président de la République .

Le présent article, combiné aux mesures adoptées à l'article 14, aurait permis de corriger en partie cette évolution, si le Gouvernement n'avait décidé de le remettre en cause , ou, pour reprendre les termes du Gouvernement, de « revenir partiellement sur les amendements votés en première partie » par les députés. L'article en lui-même n'est pas modifié par le Gouvernement ; cependant, à son initiative, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, lors de la seconde délibération de la seconde partie du projet de loi de finances, minorant de 162 millions d'euros les crédits du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », afin de compenser en partie la hausse des ressources de l'AFD permise par le présent article .

Sur la forme, on peut regretter que se poursuive la « débudgétisation » de la politique d'aide publique au développement . Depuis plusieurs années, la baisse des crédits pour le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme est ainsi compensée par l'affectation de ressources fiscales. Le présent article aggrave cette tendance et contrevient à l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques 387 ( * ) pour les années 2014-2019, qui limite les cas de nouvelles affectations de taxes (sauf quand il s'agit des collectivités territoriales ou des organismes de sécurité sociale).

Cependant, compte tenu de la nécessité de préserver les ressources dédiées à l'aide au développement, votre commission des finances vous proposera de ne pas revenir sur ce dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

C. - Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux
ARTICLE 16 - Dispositions relatives aux affectations : reconduction des budgets annexes et comptes spéciaux existants

Commentaire : le présent article vise à la reconduction des budgets annexes et comptes spéciaux existants.

Cet article vise à confirmer pour l'année 2016, sous réserve des dispositions de la présente loi de finances, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts antérieurement.

L'article 16 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) prévoit la possibilité d'affecter certaines recettes sous forme de budgets annexes ou de comptes spéciaux. Par ailleurs, aux termes de l'article 1 er de la LOLF, la loi de finances de l'année détermine la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État, ainsi que l'équilibre financier qui en résulte.

Par conséquent, les dispositions relatives aux affectations de ressources doivent être autorisées et reconduites annuellement, sous réserve des dispositions particulières pouvant être prises dans le cadre du projet de loi de finances de l'année.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 17 (Art.49 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 ; Art.62 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ; Art.5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance ; Art. 63 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles) - Décentralisation et affectation des recettes du stationnement payant

Commentaire : le présent article prévoit un report, au 1 er janvier 2018, de l'entrée en vigueur de la réforme du stationnement payant prévue par la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM). Cette réforme consiste à remplacer l'amende résultant de l'infraction pénale existante en redevance pour occupation du domaine public versée au profit des collectivités territoriales.

Le présent article vise également à tirer les conséquences de la dissolution de l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) en modifiant le circuit de financement du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui lui était rattaché 388 ( * ) . Ainsi, il rattache le FIPD au budget de l'État et modifie en conséquence l'architecture du compte d'affectation spéciale (CAS) « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » afin de compenser la perte de recettes issue de cette réforme 389 ( * ) .

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RATTACHEMENT DU FONDS INTERMINISTÉRIEL DE PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE (FIPD) À L'AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION ET L'ÉGALITÉ DES CHANCES (ACSÉ)

Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui vise à favoriser le développement et la mise en oeuvre des politiques de prévention de la délinquance à l'échelon local, a été rattaché à l'Agence nationale pour la cohésion et l'égalité des chances (ACSé) depuis sa création en 2007 390 ( * ) . Son financement était assuré par diverses subventions 391 ( * ) et par l'ACSé, qui lui réservait 45 millions d'euros prélevés sur sa dotation et provenant des recettes des amendes forfaitaires et amendes forfaitaires majorées (hors radars). Aux termes de l'article 14 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014, les activités de l'agence sont transférées à l'État à compter du 1 er janvier 2016 et l'établissement public est dissout. Dès lors, la disparition de l'ACSé impose de revoir les modalités du financement du FIPD .

B. DÉCENTRALISATION ET DÉPÉNALISATION DU STATIONNEMENT : UN NOUVEAU PARADIGME BUDGÉTAIRE

La réforme prévue par l'article 63 de la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) vise à dépénaliser le stationnement payant et à le remplacer par un service public décentralisé où une redevance d'occupation du domaine public versée au profit des collectivités territoriales se substituerait aux amendes pour infraction au stationnement payant.

Cette disposition a donné lieu à plusieurs textes d'application publiés au premier semestre 2015 :

- l'ordonnance n° 2015-45 du 23 janvier 2015 relative à la commission du contentieux du stationnement payant (en application du II de l'article 63 de la loi MAPTAM) ;

- l'ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales (en vertu de la loi d'habilitation n° 2014-1545 du 20 décembre 2014) ;

- le décret n° 2015-557 du 20 mai 2015 relatif à la redevance de stationnement des véhicules sur voirie prévue à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2015-575 du 27 mai 2015 modifiant le décret n° 2011-348 du 29 mars 2011 portant création de l'agence nationale de traitement automatisé des infractions ;

- le décret n° 2015-646 du 10 juin 2015 relatif à la commission du contentieux du stationnement payant.

Interrogé sur ce point par votre rapporteur général, le ministère de l'Intérieur a précisé que « le Conseil d'État examine actuellement un projet de décret pris en application de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales résultant de l'ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 précitée. La publication de ce texte est prévue avant la fin de l'année. Enfin, un projet de décret est en cours d'élaboration au niveau interministériel pour l'application de l'article 64 de la loi MAPTAM relatif au produit des forfaits de post-stationnement perçus dans la région Ile-de-France. Au-delà des textes d'application, le Gouvernement a annoncé, le 31 juillet 2015, l'installation à Limoges de la commission du contentieux du stationnement payant, juridiction administrative spécialisée créée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 (MAPTAM). Le ministère de l'intérieur est chargé d'installer le greffe de cette juridiction. Les travaux, notamment d'études immobilières, sont d'ores et déjà engagés. La mise en oeuvre des différents volets de la décentralisation du stationnement payant est pilotée par une mission interministérielle qui associe à ses travaux les associations de collectivités territoriales et, en tant que de besoin, les professionnels à travers leurs organisations représentatives. C'est notamment dans le cadre de ce partenariat que le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) a mis en ligne, le 7 octobre dernier, un guide de recommandations à l'attention des collectivités territoriales ».

Selon le rapport de notre collègue René Vandierendonck 392 ( * ) , rapporteur du projet de loi MAPTAM au Sénat, l'objectif de cette réforme est double : « il s'agit en premier lieu de mettre fin à un système coûteux, peu efficace et inadapté dans la mesure où la sanction pénale des infractions au stationnement payant impose un niveau d'amende uniforme sur l'ensemble du territoire, dont le taux de recouvrement est faible, malgré un circuit complexe qui le rend onéreux. En second lieu, la dépénalisation a pour but de transférer aux autorités organisatrices de transport la pleine compétence pour la fixation du montant de la redevance de stationnement, qu'elle soit acquittée spontanément ou non, afin de leur donner la maîtrise complète de leur politique de mobilité . »

Un circuit de recouvrement des amendes coûteux et complexe

1. Une infraction actuellement sanctionnée par une amende de 1 ère classe

Jusqu'au 1 er janvier 2016, le non-respect du stationnement payant constitue une infraction pénale, passible d'une amende forfaitaire de 1 ère classe. Le montant de celle-ci est uniforme sur le territoire et fixé à 17 euros depuis le décret n° 2011-876 du 25 juillet 2011. En revanche, la décision de rendre payant le stationnement sur certaines voies relève uniquement du maire (art. L. 2213-6 du CGCT) et le montant de la redevance de stationnement (payée au parcmètre par l'automobiliste) est décidé par le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de transports urbains (art. L. 2333-87 du même code).

L'amende pour non-respect du stationnement n'est donc pas modulée en fonction des tarifs de stationnement fixés par les collectivités territoriales et son montant se révèle peu dissuasif dans certains territoires où les tarifs de stationnement sont élevés ou à l'inverse excessif là où les tarifs sont faibles. Le caractère pénal de la sanction implique, par ailleurs, que l'infraction soit constatée par un agent assermenté par le pouvoir judiciaire (gendarmerie nationale, police nationale ou police municipale). Le nombre des agents assermentés, leurs moyens et surtout le fait qu'ils assument prioritairement d'autres missions, notamment celles relatives à la sécurité publique ne permettent pas une verbalisation suffisante pour être dissuasive.

2. Une répartition du produit des amendes à partir du budget de l'État

Alors que le produit des redevances de stationnement est directement perçu par les collectivités territoriales (art. L. 2331-4 du même code) les amendes de stationnement sont quant à elles versées au compte d'affectation spéciale (CAS) « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

Les recettes de ce CAS sont constituées du produit des amendes perçues suite aux infractions au code de la route (contrôles routiers, radars automatiques, contrôles du stationnement). Le produit des amendes de la police de la circulation (hors celles issues des radars automatiques donc) est réparti entre l'État (47 %) et les collectivités territoriales et le syndicat des transports d'Ile de France (53 %).

La répartition entre collectivités territoriales est prévue par diverses dispositions du code général des collectivités territoriales (art. L. 2334-24 et L. 2334-25, art. R. 2334-10, R. 2334-11 et R. 2334-12). Le comité des finances locales établit un partage entre les collectivités locales de plus de 10 000 habitants et celles de moins de 10 000 habitants le produit des amendes précitées proportionnellement au nombre de contraventions à la police de la circulation dressées sur leur territoire respectif. Ce produit doit financer des opérations destinées à améliorer les transports en commun et la circulation.

Les sommes revenant aux collectivités territoriales de plus de 10 000 habitants leur sont versées directement, alors que celles revenant aux collectivités de moins de 10 000 habitants sont réparties par les conseils généraux qui établissent une liste de bénéficiaires en fonction des travaux à réaliser. Ce système assure une forme de péréquation et évite un effet de « saupoudrage ».

3. Un très faible taux de recouvrement des amendes pour un coût élevé

Le circuit de recouvrement des amendes est long, complexe et coûteux, ainsi que le soulignent de nombreux rapports 393 ( * ) . Le taux de paiement spontané des amendes de stationnement est faible puisqu'il est inférieur à 50 %.

Le coût de recouvrement est très variable selon que ce recouvrement est manuel ou automatique. Ainsi le rapport de la mission d'évaluation des conséquences de la dépénalisation du stationnement (rapport précité) évalue ce coût à 80 euros pour la procédure manuelle et 2,5 euros pour la procédure automatique. L'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) relève une croissance du produit des amendes du fait de la mise en place du procès-verbal électronique.

Source : avis de M. Philippe Dominati sur le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises (n° 41 2014-2015)

Il résulterait de l'entrée en vigueur de cette réforme, une perte de recettes pour l'État et certaines collectivités territoriales, respectivement de 90 millions d'euros et 107 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle l'article 63 de la loi MAPTAM a prévu un principe de compensation de ces pertes, dont les modalités pratiques restent incertaines.

En outre, l'organisation de la constatation et du recouvrement du forfait de post-stationnement nécessite de définir un nouveau cadre juridique et pratique pour les collectivités territoriales. À cet effet, le Gouvernement a désigné le 16 juillet 2014 le préfet Jean-Michel Bérard comme délégué interministériel en charge de la décentralisation et de la dépénalisation du stationnement. La loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives, est venue compléter cette mesure en autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance pour « fixer les règles de recouvrement, de gestion et de contestation devant la juridiction administrative spécialisée de la redevance de stationnement, y compris du forfait de post-stationnement » (art. 36 de la loi précitée).

Enfin, , l'article 77 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite « loi NOTRe ») a repoussé l'entrée en vigueur de la réforme du stationnement payant au 1 er octobre 2016 pour sécuriser sa mise en oeuvre face aux enjeux évoqués ci-dessus.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LE RATTACHEMENT DU FIPD AU PROGRAMME 122 DU BUDGET GÉNÉRAL : UNE CONSÉQUENCE DE LA DISSOLUTION DE L'ACSE

Le présent article prévoit le rattachement du FIPD au programme 122 « Concours spécifiques et administration » au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dont le responsable est le directeur général des collectivités locales. En conséquence, il modifie deux dispositions législatives existantes.

En premier lieu, il supprime dans l'article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance qui avait porté la création du FIPD, la référence à l'ACSé et précise la mission assignée au fonds (alinéas 10 et 12 du présent article).

En second lieu, il opère des coordinations législatives en abrogeant l'article 62 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 et en supprimant la référence à l'ACSé dans les textes budgétaires qui régissent le financement du FIPD. Ainsi, l'article 49 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est modifié, en précisant qu'un montant de 45 millions d'euros est affecté au budget général de l'État. Ce faisant, le présent article maintient le niveau des ressources attribuées au FIPD, puisqu'aux termes du droit précédemment en vigueur, 45 millions d'euros étaient affectés à l'ACSé pour le financement du FIPD 394 ( * ) (alinéas 2 et 9 du présent article).

B. LES INCERTITUDES SUR LES MODALITÉS DE COMPENSATION POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET L'ÉTAT DE LA RÉFORME DU STATIONNEMENT PAYANT

Après un premier report de l'entrée en vigueur de la réforme (art. 77 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République), au 1 er octobre 2016, les alinéas 13 et 15 du présent article prévoient un nouveau report au 1 er janvier 2018 . Ce report est applicable aux communes de Polynésie française.

Il maintiendrait ainsi 202 millions d'euros de recettes de stationnement payant au CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » pour l'année 2016.

Les évaluations préalables du présent article invoquent le temps nécessaire à la validation des procédures de traitement et de recouvrement de la redevance entre les collectivités territoriales et l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) pour justifier cette mesure. La mise en oeuvre de la réforme suppose également la création d'outils informatiques de traitement des forfaits et des recours contentieux, inexistants à ce jour. De nouveaux marchés publics doivent donc être lancés.

En outre, la réforme suppose de modifier l'architecture du CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » pour y inscrire les mécanismes de compensations prévus par la loi. Dans ce contexte, la possibilité pour les collectivités territoriales de passer des conventions avec les services de l'État et de l'ANTAI est également reportée, du 1 er janvier 2016 au 1 er avril 2017.

S'agissant des compensations pour perte de recettes nettes prévues par la loi MAPTAM, le présent article prévoit que l'État percevrait une fraction supplémentaire , dans la limite de 106 millions d'euros, des amendes forfaitaires radars égale au montant qu'il percevait au titre du stationnement payant lors de l'année précédant l'entrée en vigueur de la réforme (alinéa 6 et 7), sans remise en cause des montants octroyés aux départements, à la métropole de Lyon, la collectivité territoriale de Corse et les régions d'Outre-Mer (64 millions d'euros actuellement). Le ministre de l'Intérieur serait l'ordonnateur principal de ces dépenses (alinéa 5). Cette option est privilégiée sur une modification de la répartition des recettes liées aux amendes de circulation (alinéa 4).

En revanche, pour les collectivités territoriales, le présent article ne prévoit aucun mécanisme de péréquation financière . Les évaluations préalables précisent uniquement que cette compensation se ferait au programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières ». À ce jour, cette incertitude ne permet pas à la réforme d'atteindre l'objectif secondaire visé de renforcement du pilotage de la dépense et du suivi de son évolution. Le ministère de l'Intérieur a néanmoins précisé à votre rapporteur que « le gouvernement modifiera ces règles, par décret en Conseil d'État (après consultation du Comité des finances locales), afin de prévoir des mesures de compensation pour les collectivités territoriales qui seraient perdantes avec la mise en place de la décentralisation du stationnement payant, conformément aux dispositions de l'article 63-VI de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ».

Enfin, des réserves demeurent sur l'applicabilité de ce dispositif aux collectivités d'Outre-Mer régies par le principe de spécialité législative (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie et Terres australes et antarctiques françaises). En effet, le V du présent article rend la réforme applicable d'emblée à la Polynésie française alors même que les contraintes techniques à lever paraissent supérieures pour ces collectivités par rapport aux collectivités de la métropole. Dans son avis n° 2015-20 A/APF du 8 septembre 2015, l'Assemblée de Polynésie française s'est d'ailleurs prononcée contre cette mesure en émettant un avis défavorable. Cet avis ne lie cependant pas le gouvernement.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel au présent article.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

S'agissant du rattachement du FIPD au budget général de l'État, votre rapporteur général considère qu'il s'agit d'une mesure appropriée en raison de la dissolution de l'ACSé. En plus de renforcer la transparence de l'action publique en la matière, elle va dans le sens d'un meilleur suivi.

En ce qui concerne le report de l'entrée en vigueur de la réforme du stationnement au 1 er janvier 2018 et du renvoi à la prochaine loi de finances de la définition des modalités de compensation des pertes pour les collectivités territoriales , votre rapporteur général souscrit aux dispositions du présent article, considérant les difficultés pratiques qui persistent quant à son déploiement et les problématiques spécifiques aux collectivités d'Outre-Mer, à l'image de la Polynésie française.

Néanmoins, votre rapporteur général s'interroge sur l'incapacité du Gouvernement à avoir pu anticiper cette réforme prévue depuis deux ans et se demande s'il n'aurait pas été possible d'avancer plus rapidement sur ce dossier et les éventuels problèmes techniques qu'il soulève. Il souhaite, de plus, attirer l'attention sur les effets néfastes d'un nouveau report de l'entrée en vigueur de cette réforme , qui priverait celle-ci de lisibilité auprès des citoyens et différerait la possibilité pour les collectivités territoriales de maîtriser davantage leur politique de mobilité .

L'absence de définition claire des modalités de péréquation financière entre les collectivités territoriales renvoie la question à la prochaine loi de finances, après avoir été déjà repoussée lors de l'examen du projet de loi MAPTAM. Il s'agira alors de vérifier le respect du principe de compensation pour les collectivités territoriales telle qu'il est consacré par la loi MAPTAM.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 18 (Art. 71 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985) - Modification du compte de commerce « Approvisionnement de l'État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires »

Commentaire : le présent article tend à regrouper l'ensemble des recettes et des dépenses liées à l'approvisionnement en essence des administrations dans le compte de commerce « Approvisionnement des armées en produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires » qui prendrait en conséquence l'intitulé « Approvisionnement de l'État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires ».

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 22 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances dispose que « les comptes de commerce retracent des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l'État non dotés de la personnalité morale ».

Le compte de commerce « Approvisionnement des armées en produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires » est prévu et régi par l'article 71 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985.

Ce compte, géré par le ministre chargé de la défense, enregistre :

- en recettes, les cessions de produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires, nécessaires à l'utilisation des matériels des armées et à l'exploitation de leurs infrastructures pétrolières, les revenus de l'exploitation de l'oléoduc Donges-Metz et les recettes relatives aux produits financiers utilisés pour couvrir les variations du prix des approvisionnements en produits pétroliers ;

- en dépenses, les opérations d'achats de produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires, nécessaires à l'utilisation des matériels des armées et à l'exploitation de leurs infrastructures pétrolières, incluant les dépenses d'approvisionnement, de transport et de stockage externalisés et le retraitement de ces produits, le remboursement au budget de la défense des frais engagés à l'occasion des cessions de produits pétroliers à des organismes ou services ne relevant pas du ministère de la défense, les charges d'exploitation de l'oléoduc Donges-Metz et les dépenses relatives aux produits financiers utilisés pour couvrir les variations du prix des approvisionnements en produits pétroliers.

Ainsi, le compte de commerce ne retrace pas l'intégralité des dépenses liées à la fonction pétrolière du ministère de la défense, qui est assurée par le Service des essences des armées (SEA). En effet, les dépenses de fonctionnement et d'investissement sont couvertes par des crédits budgétaires inscrits à la sous-action n° 81 « Fonction pétrolière » du programme 178 « Préparation et emploi des forces » de la mission « Défense ». Ces dépenses se sont élevées en 2014 à 32,8 millions d'euros.

Si l'activité principale du SEA est l'approvisionnement du ministère de la défense en carburant, il assure également la distribution à des clients hors défense admis à bénéficier des prestations fournies par le service.

L'évaluation préalable du présent article indique ainsi qu' « en 2014, 9 % des cessions de produits ont été exécutées au profit d'autres administrations, armées alliées et personnes privées ». La Cour des comptes estime quant à elle, dans la note d'analyse de l'exécution budgétaire 2014 du compte de commerce, que « le SEA réalise 11 % de son activité au profit de ces autres bénéficiaires, notamment des armées étrangères ».

Le SEA applique trois tarifs, théoriquement en fonction de la nature du client : un tarif réservé au ministère de la défense correspondant au « prix coûtant » du carburant, un tarif pour les autres administrations publiques (tarif « défense » augmenté des coûts d'intervention du SEA) et un tarif pour les autres clients, incluant une marge. Le service est ainsi conduit à calculer le coût de ses prestations grâce à une comptabilité analytique d'exploitation (CAE) afin d'établir des tarifs de cessions, de contrôler sa gestion ou de valoriser ses activités.

En réalité, le tarif « défense » est parfois appliqué à des administrations extérieures au ministère de la défense, qui ne prennent donc pas leur part des dépenses budgétaires qu'engage le SEA pour la distribution du carburant.

« Alors que la gendarmerie ne fait plus partie du ministère de la défense, elle a continué à bénéficier du tarif défense. En 2013, d'autres entités du ministère de l'intérieur (police nationale, sécurité civile) ont manifesté leur intérêt pour une telle solution. La sécurité civile a demandé le bénéfice de ce tarif à compter de 2015 mais n'a pas obtenu satisfaction .

« La police nationale a, en revanche, obtenu de bénéficier de ce tarif en 2014. Elle a fait appel au SEA à compter du 1er janvier 2014 dans le cadre d'une nouvelle convention. La demande a représenté 4,9 millions d'euros correspondant à 3 642 m 3 de carburants . »

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le 1° du présent article tend à modifier l'intitulé du compte de commerce, qui serait désormais : « Approvisionnement de l'État et des forces armées en produits pétroliers, biens et service complémentaires ».

Le 2° élargit le champ des recettes retracées sur le compte :

- aux cessions de produits pétroliers et de « biens et services complémentaires , nécessaires à l'utilisation des matériels de l'État », et non plus seulement des seules armées ;

- au « produit des aliénations et cessions de biens affectés à l'exploitation pétrolière, hors patrimoine immobilier », c'est-à-dire la vente de matériels utilisés par le SEA.

Symétriquement, le 3° élargit le champ des dépenses retracées aux :

- opérations d'achats de produits pétroliers, « biens et services complémentaires , nécessaires à l'utilisation des matériels de l'État » ;

- « opérations d'achat de biens affectés à la réalisation du soutien pétrolier assurée par le service en charge de l'approvisionnement en produits pétroliers ainsi que les autres dépenses inhérentes à son activité », afin d'inclure les dépenses de fonctionnement (hors masse salariale) et d'investissement du SEA.

Les mesures de périmètre qui découlent de ces dispositions sont prévues par le présent projet de loi de finances.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le renforcement de la dimension interministérielle de l'activité du SEA, que tend à accompagner et formaliser le présent article, est plutôt bienvenu, car il est porteur d'économies d'échelle. Comme le relève la Cour des comptes dans la note d'analyse budgétaire précitée, « le fait que le compte de commerce approvisionne en produits pétroliers d'autres administrations que le ministère de la défense lui permet, par un effet volume, de disposer de prix potentiellement plus intéressants à l'achat ».

Selon les indications données par le rapport d'activité 2014 du SEA, « la comparaison des coûts complets du SEA avec ceux des opérateurs pétroliers civils témoigne de l'efficience des prestations du SEA au profit des armées : le SEA est compétitif de 20 cts/L sur la prestation de mise-bord aéronef par rapport aux plateformes aéronefs civiles de même type que celles du SEA ».

Les tarifs du SEA devraient donc rester attractifs pour les administrations hors défense qui ne contribuent pas actuellement au coût complet de la fonction pétrolière supporté par le ministère de la défense et se verront désormais appliquer deux surcoûts correspondant au fonctionnement du SEA et au soutien apporté au SEA par les autres services du ministère de la défense.

Ces clients resteront dans une situation plus favorable que les armées étrangères et les clients privés qui se verront également appliquer un troisième surcoût correspondant à une quote-part des dépenses de personnel du SEA (130 millions d'euros en 2014).

L'étude préalable estime que l'augmentation tarifaire que supporteront le ministère de la défense, la police et la gendarmerie, sera de l'ordre de 4 % (soit un million d'euro pour la police et gendarmerie), sur la base des consommations 2014.

Il faut souligner que la Cour des comptes estime que la situation actuelle, qui « aboutit à faire financer par la mission Défense une partie du coût en carburant des autres administrations de l'État (police nationale et gendarmerie) », « n'est pas conforme aux principes budgétaires » et qu'« il convient d'y mettre un terme et de facturer à ces administrations le tarif public correspondant au coût matière augmenté des coûts d'intervention du SEA ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 19 (Art. 54 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009) - Clôture du compte d'affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'État »

Commentaire : le présent article vise à clôturer le compte d'affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'État ».

I. LE DROIT EXISTANT

Le compte d'affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'État », dit CAS « Fréquences », a été créé par l'article 54 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

Il est composé de trois programmes :

- le programme 761 « Désendettement de l'État », qui n'a jamais porté de crédits ;

- le programme 762 « Optimisation de l'usage du spectre hertzien et interception et traitement des émissions électromagnétiques (ministère de la défense) » ;

- le programme 763 « Optimisation du spectre hertzien et des infrastructures du réseau physique de télécommunications du ministère de l'intérieur ».

Ce compte retrace :

« 1° En recettes :

« a) Le produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences libérées par les ministères affectataires, à compter du 1 er janvier 2009 ;

« a bis) Le produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences comprises entre 694 MHz et 790 MHz ;

« b) Le produit de la cession de l'usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellites de l'État intervenant dans les conditions fixées au II de l'article 61 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;

« c) Le produit de la cession de l'usufruit de tout ou partie des systèmes de communication radioélectrique des services de l'État, dans les conditions fixées au II de l'article 48 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 ;

« d) Le produit des redevances d'occupation domaniale résultant d'autorisations d'utilisation de points hauts des réseaux de télécommunication et de transmission des services de l'État, dans les conditions fixées au même II ;

« e) Les versements du budget général ;

« f) Les fonds de concours ;

« 2° En dépenses :

« a) Les dépenses d'investissement et de fonctionnement liées aux services de télécommunications utilisant le spectre hertzien ou visant à en améliorer l'utilisation, y compris le transfert de services vers des supports non hertziens ;

« b) Les dépenses d'investissement et de fonctionnement liées à l'interception ou au traitement des émissions électromagnétiques, à des fins de surveillance ou de renseignement ;

« c) Les dépenses d'investissement et de fonctionnement destinées à l'acquisition et à la maintenance d'infrastructures, de réseaux, d'applications, de matériels et d'équipements d'information et de communication radioélectriques liées à l'exploitation du réseau ;

« d) Les versements au profit du budget général pour un montant qui ne peut être inférieur à 15 % du produit visé au a du 1°. Ces versements ne s'appliquent pas au produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences libérées par le ministère de la défense jusqu'au 31 décembre 2019 et par le ministère de l'intérieur jusqu'au 31 décembre 2018. »

Le a bis de cet article, qui vise le produit de la mise aux enchères des fréquences comprises entre 694 MHz et 790 MHz (dite « bande des 700 MHz ») débutant le 16 novembre 2015, a été introduit par la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le I du présent article procède à la clôture, au 31 décembre 2015, du CAS « Fréquences ». À cette fin, il prévoit que solde des opérations antérieurement enregistrées sur ce compte est reversé au budget général de l'État, qui recevra également les recettes dues « au titre des années antérieures à 2016 et restant à percevoir ».

Le II abroge, en conséquence, l'article 54 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable de sa commission des finances, un amendement visant à retirer de la liste des recettes qui reviendraient désormais directement au budget général « le produit de la cession de l'usufruit de tout ou partie des systèmes de communication radioélectrique des services de l'État » ainsi que « le produit des redevances d'occupation domaniale résultant d'autorisations d'utilisation de points hauts des réseaux de télécommunications et de transmission des services de l'État ». Selon l'exposé sommaire de cet amendement, cette modification correspondrait à « une mesure de coordination induite par l'abandon par le Gouvernement » des procédures en cause.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 avait adossé une part importante des ressources du ministère de la défense à des recettes exceptionnelles, en particulier, s'agissant de l'exercice 2015, le produit de la cession de la bande des 700 MHz libérée par les évolutions de format de la télévision terrestre numérique (TNT).

Votre commission des finances avait alors formulé des réserves quant à la crédibilité du calendrier de cette cession, qui devait permettre au ministère de la défense de disposer de 1,57 milliard d'euros de crédits en 2015, au travers du CAS « Fréquences ».

La loi de finances initiale pour 2015 avait relevé cette prévision de 600 millions d'euros, portant les crédits inscrits sur le CAS « Fréquences » à 2,14 milliards d'euros quand, dans le même temps, les crédits de paiement de la mission « Défense » étaient réduits de 600 millions d'euros par rapport à la loi de programmation militaire.

Considérant que cette recette ne pourrait être réalisée en 2015 et qu'en conséquence le budget présenté par le Gouvernement était insincère, le Sénat avait, sur la proposition de votre commission des finances, rejeté les crédits de la mission « Défense ».

Tout en maintenant sa prévision, le Gouvernement a souhaité prévoir une solution de rechange consistant en une opération de cession bail de matériel militaire impliquant des « sociétés de projet », destinée à pallier un éventuel retard dans la perception des recettes exceptionnelles. Le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances, déposé par le Gouvernement le 11 décembre 2014, s'est ainsi vu ajouter par l'Assemblée nationale, en première lecture, un article visant à lever les obstacles juridiques à la mise en oeuvre de cette solution.

Votre commission spéciale chargée d'examiner ce projet de loi avait supprimé cet article en estimant que les sociétés de projet « n'étaient pas s ans risque sur le plan financier et pourraient contribuer [...] à une précarisation supplémentaire des moyens du ministère de la défense, au travers d'une débudgétisation et d'une externalisation croissante » 395 ( * ) . Le Gouvernement a alors déposé un amendement en vue de la séance publique visant à rétablir cet article.

Cependant, à l'issue du Conseil de défense du 29 avril dernier, le Président de la République a annoncé que les recettes exceptionnelles prévues pour la programmation 2014-2019 seraient remplacées pour l'essentiel par des crédits budgétaires.

En conséquence, le Gouvernement a retiré son amendement de rétablissement et la suppression des dispositions relatives aux sociétés de projet a été maintenue dans le texte adopté par le Parlement.

Par la suite, la loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 a effectivement substitué, en programmation, des crédits budgétaires aux ressources exceptionnelles à hauteur de 2,17 milliards d'euros pour l'année 2015.

Le présent projet de loi de finances est conforme à cette programmation actualisée.

Il est dès lors logique que le produit de la cession de la bande de fréquences des 700 MHz revienne au budget général. Le choix de clôturer le CAS « Fréquences » remplit cet office. On notera qu'il prive également le ministère de la défense de la recette régulière que constituent les « redevances 4G » acquittées chaque année par les opérateurs téléphoniques, soit 39 millions d'euros enregistrés sur le CAS en 2015, mais celles-ci ne sont plus prises en compte dans la programmation actualisée. Quant au ministère de l'intérieur, il n'est pas prévu qu'il cède des fréquences dans un avenir prochain. La suppression du CAS ne lui cause donc pas de préjudice.

Le présent article porte ainsi une mesure de conséquence de la rebudgétisation des ressources du ministère de la défense que votre commission des finances a régulièrement appelée de ses voeux et que le Sénat a approuvée en adoptant la loi du 28 juillet 2015 précitée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 20 (Art. 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, art. 302 bis KH et 1647 du code général des impôts) - Garantie des ressources de l'audiovisuel public

Commentaire : le présent article vise à reconduire et à actualiser le mécanisme de garantie de ressources des organismes de l'audiovisuel public, ainsi qu'à augmenter le taux de la taxe sur les opérateurs de télécommunications électroniques, en affectant le produit supplémentaire qui en résulte à France Télévisions.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA TAXE SUR LES SERVICES FOURNIS PAR LES OPÉRATEURS DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

La taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (TOCE) est définie à l'article 302 bis KH du code général des impôts.

Elle est due par les opérateurs de communications électroniques qui fournissent un service en France et qui ont fait l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP).

Elle est assise sur le montant des abonnements et autres sommes 396 ( * ) acquittés par les usagers à ces opérateurs en rémunération des services de communications électroniques qu'ils fournissent.

Sont exclues de l'assiette les sommes acquittées par les opérateurs au titre des prestations d'interconnexion , ainsi que celles acquittées au titre des prestations de diffusion ou de transport des services de communications audiovisuelles et les sommes acquittées au titre de l'utilisation de services universels de renseignement téléphoniques.

En outre, lorsque les services de communications électroniques sont compris dans une offre composite comprenant des services de télévision , les sommes versées au titre de cette taxe font l'objet d'un abattement de 50  %.

Enfin, la taxe est calculée en appliquant un taux de 0,9 % à la fraction du montant des encaissements annuels taxables , hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui excède 5 millions d'euros.

Son produit est affecté au budget général de l'Etat.

La TOCE a été instaurée par l'article 33 de la loi du 5 mars 2009 sur la communication audiovisuelle 397 ( * ) , concomitamment avec la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision définie à l'article 302 bis KG du code général des impôts.

Il s'agissait de créer des ressources supplémentaires pour compenser le manque à gagner publicitaire résultant, pour France Télévisions, de la suppression de la publicité après 20  heures prévue par cette loi. Le montant de cette perte était évalué à 450 millions d'euros par an , et devait être compensé par l'instauration de ces taxes et l'octroi, dans le même temps, de crédits budgétaires imputés sur la mission « Médias » 398 ( * ) .

Pour mémoire, la Commission européenne avait présenté un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne car elle estimait que la TOCE était incompatible avec le droit européen dans le domaine des télécommunications. Mais la juridiction européenne a validé la taxe, estimant qu'elle « ne constitue pas une taxe administrative au sens de la directive et ne relève donc pas du champ d'application de celle-ci » 399 ( * ) .

Dans les faits, ni le rendement des deux taxes créées par les articles 302 bis KG et 302 bis KH du code général des impôts, ni le montant de la dotation budgétaire accordée à France Télévisions à compter de 2009 n'ont atteint le montant de 450 millions d'euros .

On constate même une décrue régulière et de plus en plus marquée du montant de la dotation budgétaire , à l'exception de l'année 2012.

En outre, à partir de 2013, le montant de la dotation budgétaire s'est avéré inférieur au rendement des deux taxes.

Évolution du montant recouvré au titre des taxes définies par les articles 302 bis KG et 302 bis KH du code général des impôts depuis 2009

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015*

Taxe sur la publicité

27,7

18

13

13

14

15

15,3

TOCE

185,9

251

258

180

254

213

212,7

Total

213,6

269

271

193

268

228

228

*Prévisions

Source : direction de la législation fiscale

Évolution de la dotation budgétaire attribuée à France Télévisions depuis 2010

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015*

Dotation programme 313

415

423,3

361,9

435,9

248,8

103,6

160,4

*Budget

Source : réponses de la direction générale des médias et des industries culturelles au questionnaire budgétaire du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public »

Évolution comparée du montant de la taxe sur la publicité, de la TOCE et de la dotation budgétaire attribuée à France Télévisions entre 2009 et 2015

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires précités

Le Gouvernement a enfin annoncé, dans le cadre du débat d'orientation des finances publiques de juillet 2014, la disparition, à l'horizon 2017, de l'ensemble des dotations budgétaires des sociétés de l'audiovisuel public, qui devraient être à cette date intégralement financées par la contribution à l'audiovisuel public 400 ( * ) , afin de renforcer leur indépendance financière.

Pour autant, il n'a pas engagé la réforme de la redevance, alors que son assiette actuelle devient obsolète au regard de l'évolution des usages , ce qui devrait se traduire par un rendement moins dynamique à moyen terme ( cf.  infra ).

De surcroît, les recettes publicitaires de France Télévisions n'ont cessé de diminuer depuis 2010.

Évolution des ressources propres de France Télévisions issues de la publicité et du parrainage depuis 2010

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015*

Ressources de publicité et de parrainage

441,3

423,7

372,2

333,1

317,8

340,1

*Budget 2015

Source : réponses de la DGMIC

Cette situation a contribué à déséquilibrer durablement le modèle de financement de la société publique .

B. LA CONTRIBUTION À L'AUDIOVISUEL PUBLIC (CAP)

1. L'assiette et les redevables de la contribution à l'audiovisuel public

Aux termes du 1 ° du II de l'article 1605 du code général des impôts (CGI), la contribution à l'audiovisuel public - anciennement dénommée « redevance audiovisuelle » - est due par toutes les personnes physiques détenant un « appareil récepteur de télévision ou un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision pour l'usage privatif du foyer » , quel que soit le mode d'acquisition, au 1 er janvier de l'année au cours de laquelle la contribution est due.

Tel qu'il est formulé, l'article 1605 offrirait la possibilité de taxer les ordinateurs . Toutefois, la pratique découlant de l'instruction fiscale prise en application de la loi s'est avérée restrictive dans son acception de la notion de « dispositif assimilé ». Les matériels retenus sont présentés dans l'encadré ci-après.

Matériels entrant dans le champ d'application de la contribution à l'audiovisuel public

Les matériels concernés sont :

- les appareils clairement identifiables comme des téléviseurs ;

- les matériels ou dispositifs associant plusieurs matériels connectés entre eux ou sans fil et permettant la réception de signaux, d'images ou de sons, par voie électromagnétique (dispositifs assimilés).

Sont notamment considérés comme dispositifs assimilés, lorsqu'ils sont associés à un écran (écran souple accroché au mur par exemple), les magnétoscopes, les lecteurs ou lecteurs-enregistreurs de DVD ainsi que les vidéoprojecteurs équipés d'un tuner.

En revanche, les micro-ordinateurs munis d'une carte télévision permettant la réception de la télévision ne sont pas taxables.

Source : Bulletin officiel des finances publiques (BOI-PAT-CAP-10-20140226)

De surcroît, les personnes détenant un « appareil récepteur de télévision » doivent être imposables à la taxe d'habitation (TH), au titre d'un local meublé affecté à l'habitation. En effet, l'article 41 de la loi de finances pour 2005 401 ( * ) a réformé le régime de la redevance audiovisuelle afin, notamment, d'adosser son recouvrement à celui de la taxe d'habitation .

De plus, toutes les personnes physiques autres que celles précédemment mentionnées ainsi que les personnes morales qui détiennent un appareil récepteur dans un local situé en France sont assujetties 402 ( * ) .

Une seule contribution est due , quel que soit le nombre de téléviseurs, le nombre d'occupants de la résidence ou le nombre de résidences - principales et secondaires - équipées d'un téléviseur.

En revanche, on distingue quatre catégories de personnes dégrevées ou exonérées de cette contribution :

- les personnes exonérées de la taxe d'habitation ;

- les bénéficiaires du régime dit des « droits acquis » , qui concerne les personnes âgées de condition modeste et les personnes de condition modeste invalides ou infirmes ;

- les personnes dont le montant du revenu fiscal de référence est nul , tels que les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ne percevant aucun autre revenu ;

- enfin, les dégrevés pour motifs contentieux .

2. Une évolution dynamique du montant de la contribution à l'audiovisuel public, qui devrait se tarir à moyen terme

Le tableau ci-après présente l'évolution du tarif unitaire de la contribution à l'audiovisuel public depuis 2009.

Évolution du tarif unitaire de la contribution à l'audiovisuel public
depuis 2009

(en euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Métropole

118

121

123

125

131

133

136

Outre-mer

75

78

79

80

84

85

86

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution comparée du tarif unitaire de la CAP en métropole et en outre-mer
depuis 2009

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Entre 2009 et 2015 , le tarif unitaire de la CAP a augmenté de 18  euros en métropole et de 11 euros en outre-mer, soit des hausses respectives de 15,3 % et 16,2 % .

Pour autant, le tarif de la contribution à l'audiovisuel public demeure inférieur à la plupart de ceux qui existent chez nos voisins européens : le tarif annuel de la redevance audiovisuelle s'établit ainsi à 380  euros en Suisse, à 238 euros en Suède, à 216 euros en Allemagne, et à 145,50 livres au Royaume-Uni, soit environ 176 euros.

Le montant global de la CAP augmente quant à lui chaque année de façon significative. Il est ainsi passé de 2,96 milliards d'euros en 2013 à 3,14 milliards d'euros en 2015 , avec une prévision de 3,21 milliards d'euros en 2016.

Évolution des encaissements nets de contribution à l'audiovisuel public depuis 2013

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016

Encaissements nets de CAP

2 957,5

3 043,3

3 144,7

3 214,5

Évolution entre n et n-1 (en %)

/

+ 2,90 %

+ 3,33 %

+ 2,22 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette évolution dynamique tient à trois facteurs principaux :

- l' indexation automatique du tarif de la CAP sur l'inflation en vertu de l'article 1605 du code général des impôts 403 ( * ) ;

- les revalorisations ponctuelles du tarif de la CAP au-delà de l'inflation en 2010, 2013 et 2014 et 2015 ;

- la progression du nombre de foyers assujettis liée à l'évolution naturelle de l'assiette.

En outre, comme l'ont analysé nos collègues André Gattolin et Jean-Pierre Leleux 404 ( * ) , un risque d'érosion pèse sur l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public à moyen terme , en lien avec l'évolution des pratiques et le développement des nouveaux usages.

Un risque d'érosion de l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public à moyen terme

« Le développement des nouveaux usages numériques devrait conduire à court terme à une moindre progression du nombre d'assujettis à la CAP et à long terme à une réduction de son assiette .

(...) Un faisceau concordant de données statistiques témoigne d'un essoufflement déjà perceptible du taux d'équipement en téléviseurs . Selon les chiffres de l'Insee, le taux d'équipement des téléviseurs , après avoir atteint un point haut en 2010 , est en régression constante : 97,1 % des ménages étaient équipés d'un téléviseur couleur en 2012, contre 97,4 % en 2011 et 97,8 % en 2010. En parallèle, le recours aux nouveaux moyens d'accès au service audiovisuel s'accroît . Ainsi, le nombre de vidéos visionnées en télévision de rattrapage a augmenté de 30 % en 2014. Ces évolutions annoncent une tendance lourde : les jeunes générations qui s'équipent moins en téléviseurs sont appelées à remplacer progressivement leurs aînés. Il est ainsi fort probable que les premiers signes du recul de la télévision se confirment et qu'à terme, un véritable basculement s'opère vers les nouveaux écrans .

Or, cette diminution très probable du nombre de foyers assujettis à la redevance aurait un impact financier significatif . Ainsi, la baisse de 0,10 point du nombre de foyers assujettis à la CAP - qui augmentait en moyenne de 0,85 % par an au cours des dernières années - se traduirait par un manque à gagner de 28 millions d'euros .

De surcroît, cette érosion de l'assiette pourrait difficilement être compensée par l'inflation . En effet, au titre de l'exercice 2016, la révision de la prévision d'inflation à 1 %, en baisse par rapport à l'hypothèse retenue dans la loi de programmation des finances publiques (1,2 %), se traduit par une réduction de l'ordre de 25 millions d'euros de la prévision du produit de la CAP ».

Source : « Pour un nouveau modèle de financement de l'audiovisuel public : trois étapes pour aboutir à la création de « France Médias » en 2020, rapport d'André Gattolin et Jean-Pierre Leleux au nom de la commission des finances et de la commission de la culture du Sénat, n° 709, (2014-2015)

C. UN FINANCEMENT DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC QUI PASSE PRINCIPALEMENT PAR UN COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS

1. La création d'un compte de concours financiers dédié aux avances à l'audiovisuel public

La contribution à l'audiovisuel public finance les organismes de l'audiovisuel public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi de 1986 relative à la liberté de communication 405 ( * ) , via le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », créé par le VI de l'article 46 406 ( * ) de la loi de finances pour 2006 407 ( * ) .

Les sociétés concernées sont France Télévisions, Radio France, Arte  France, l'Institut national de l'audiovisuel (INA), France Médias Monde et TV5 Monde.

Le compte retrace, en dépenses, le montant des avances accordées aux organismes précités , tandis que ses ressources proviennent, d'une part, des remboursements d'avances correspondant au produit de la CAP , déduction faite des frais d'assiette et de recouvrement et du montant des intérêts sur les avances et, d'autre part, du montant des dégrèvements de contribution pris en charge par le budget général 408 ( * ) .

Comme le relève la Cour des comptes, « ces remboursements ne sont en aucune manière des remboursements réels par les organismes audiovisuels publics, mais un simple jeu d'écritures conduisant à alimenter le compte par deux flux : le produit de la CAP et la contrevaleur du montant des dégrèvements » 409 ( * ) .

En tout état de cause, aux termes du décret n° 2007-958 du 15 mai 2007 relatif aux relations financières entre l'Etat et les organismes du secteur public de la communication audiovisuelle, « le montant des ressources qu'il est proposé d'allouer chaque année , dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de finances, aux organismes [de l'audiovisuel public] en compensation des obligations de service public mises à leur charge n'excède pas le coût d'exécution desdites obligations , en tenant compte des recettes directes ou indirectes tirées par chaque organisme de ses activités de service public ».

Évolution des recettes du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » attribuées aux organismes de l'audiovisuel public depuis 2013

(en millions d'euros)

Ressources

2013

2014

2015*

2016*

Encaissements bruts de CAP

2 986,2

3 072,2

3 173,4

3 243,7

Frais d'assiette et de recouvrement

28,2

28,4

28,2

28,2

Coûts de trésorerie

0,5

0,5

0,5

1

Encaissements nets de redevance

2 957,5

3 043,3

3 144,7

3 214,5

Compensation pour dégrèvements

490,2

507,8

522,1

513,8

Dotations aux organismes publics 410 ( * )

3 447,7

3 551,1

3 666,8

3 728,3

* Prévisions

Source : direction générale des médias et des industries culturelles

2. Un mécanisme de garantie des ressources destiné à préserver les ressources affectées aux organismes de l'audiovisuel public

Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, un mécanisme dit de « garantie de ressources » accordées aux organismes de l'audiovisuel public a été instauré par le Parlement à l'initiative de notre collègue député Patrice Martin-Lalande, alors rapporteur spécial de la mission « Médias ».

Concrètement, ce mécanisme a pour objet d'éviter à ces organismes de subir les aléas propres au recouvrement d'une imposition - en l'occurrence, la contribution à l'audiovisuel public - dont le produit recouvré peut s'avérer différent du produit prévisionnel . Le risque associé à cet aléa est donc supporté par l'État .

Formellement, l'État garantit un montant minimum d'encaissements nets de contribution à l'audiovisuel public (CAP) et protège ses propres intérêts financiers en fixant un montant maximal de dégrèvements de CAP qu'il prendrait en charge . Ces deux montants sont actualisés chaque année par un article de la loi de finances initiale, qui modifie en conséquence le VI de l'article 46 de la loi de finances pour 2006.

Dans les faits, si les encaissements de la contribution s'avèrent inférieurs aux prévisions de la loi de finances initiale, l'Etat est conduit à majorer le remboursement des dégrèvements à due concurrence, afin que les organismes de l'audiovisuel public bénéficient du montant effectif des ressources tel que voté par le Parlement.

Depuis 2010, ce mécanisme a rendu nécessaire une hausse de la compensation des dégrèvements en 2010 (+2  millions d'euros). Les autres années, les dépenses liées aux dégrèvements se sont avérées systématiquement inférieures aux montants inscrits en loi de finances initiale.

D. UNE DÉGRADATION MARQUÉE DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE FRANCE TÉLÉVISIONS

Même si d'autres facteurs sont en cause, notamment la difficulté pour l'entreprise à réduire ses charges, la suppression de la publicité après 20 heures à compter de 2009 a contribué à déséquilibrer le modèle de financement de France Télévisions .

Confrontée à des dépenses en hausse et à des ressources publicitaires fréquemment inférieures aux prévisions, l'entreprise publique a ainsi connu une dégradation de sa situation financière de plus en plus marquée au fil des années. Cette situation a nécessité, en 2012, la signature d'un avenant au contrat d'objectifs et de moyens en cours d'exécution, qui prévoyait le retour à l'équilibre d'ici fin 2015.

Évolution du résultat net de France Télévisions depuis 2010

(en millions d'euros)

*Budget

**Prévision

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de la DGMIC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Or, d'après les éléments contenus dans un message adressé par la présidente de France Télévisions aux membres du conseil d'administration de l'entreprise le 14 septembre 2015, et largement relayés par la presse, « à cette heure, compte tenu des hypothèses budgétaires communiquées par notre actionnaire, les ressources publiques pour France Télévisions seraient au mieux stables en 2016 par rapport à 2015. Au regard par ailleurs de l'évolution du marché publicitaire, on peut considérer, si ce schéma était confirmé, que les ressources globales de l'entreprise diminueraient en 2016. La confirmation de ces montants (...) conduirait à un déficit prévisionnel pour 2016 de l'ordre de - 50 millions d'euros , malgré la prise en compte d'hypothèses d'économies par rapport à 2015 ».

A ce stade, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une hausse de la ressource publique 411 ( * ) attribuée à France Télévisions de 4,4 millions d'euros par rapport à 2015 (+ 0,18 %).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article contient deux mesures principales :

- d'une part, la hausse du taux de la TOCE de 0,9 % à 1,2 % , et l'affectation directe du produit supplémentaire qui en résulte, estimé à 75 millions d'euros, à la société France Télévisions , par le biais du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » ;

- d'une part, la reconduction du dispositif de garantie de ressources des organismes de l'audiovisuel public et l'actualisation, au regard des prévisions de recouvrement de la CAP pour 2016, des données relatives au compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

A. LA HAUSSE DU TAUX DE LA TOCE ET L'AFFECTATION DU PRODUIT SUPPLÉMENTAIRE À FRANCE TÉLÉVISIONS

1. La hausse du taux de la TOCE de 0,9 % à 1,2 %

La hausse du taux de la TOCE est prévue par le I du présent article. A cet effet, le 1° du I modifie le IV de l'article 302 bis KH du code général des impôts, pour substituer au montant « 0,9 » le montant « 1,2 ».

Aux termes du A du V du présent article, la hausse du taux de la TOCE sera applicable aux abonnements et autres sommes acquittés par les usagers à compter du 1 er janvier 2016.

2. L'affectation du surplus de recettes à France Télévisions

Le IV du présent article dispose qu'une part du produit de la TOCE, d'un montant de 75 millions d'euros par an, sera affecté à France Télévisions.

L'affectation de la recette supplémentaire passera par le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », dans « un souci de transparence et d'unification du circuit de financement des sociétés audiovisuelles publiques », ce qui « permettra au Parlement d'apprécier dans son ensemble les ressources du secteur de l'audiovisuel public issues d'affectation de recettes fiscales lors de l'examen des crédits de ce compte de concours financiers » 412 ( * ) .

Le a) du 1° et le 2 ° du II procèdent en ce sens à des coordinations avec l'article 46 de la loi de finances pour 2006 .

Le B du V prévoit que cette affectation entrera en vigueur à une date fixée par décret, qui ne peut dépasser six mois à compter de la date de réception, par le Gouvernement, de la réponse de la Commission européenne.

L'affectation de la TOCE à France Télévisions doit en effet être notifiée à celle-ci, afin qu'elle examine sa conformité au droit communautaire en matière d'aides d'Etat et autorise ladite disposition 413 ( * ) . Il est prévu à cet égard que l'affectation s'appliquera pour la première fois à l'intégralité des encaissements perçus au cours de l'exercice 2016.

En outre, le 2 ° du I du présent article prévoit un prélèvement de 1 % sur le montant de la part de recettes de TOCE affectée à France Télévisions pour frais d'assiette et de recouvrement . Il insère pour cela un XVIII à l'article 1647 du code général des impôts. Le taux de 1 % reprend celui qui existe déjà en matière de contribution à l'audiovisuel public.

De surcroît, aux termes de l'article 1693 sexies du code général des impôts, les redevables de la TOCE acquittent cette taxe par acomptes mensuels ou trimestriels au moins égaux, respectivement, au douzième ou au quart du montant de la taxe due au titre de l'année civile précédente. Le complément de taxe exigible au vu de la déclaration de TVA est versé lors du dépôt de celle-ci.

Afin de compenser le décalage temporel dans l'encaissement du produit supplémentaire de la TOCE, le III du présent article prévoit que les acomptes sont majorés d'un tiers à compter de l'année 2016 .

B. LA RECONDUCTION ET L'ACTUALISATION DU MÉCANISME DE GARANTIE DES RESSOURCES

Le b) du 1° du II modifie le 2° du 1 du VI de l'article 46 de la loi de finances pour 2006 de façon à actualiser le montant maximal des dégrèvements de la contribution à l'audiovisuel public pris en charge par le budget général de l'État .

Ce montant est porté à 513,8 millions d'euros en 2016, contre 517 millions d'euros en 2015. La réduction de ce plafond tient notamment à l'érosion progressive des remboursements au titre des « droits acquis » .

Le 3 ° du II du présent article a pour objet de reconduire le mécanisme de garantie des ressources et d'actualiser en conséquence pour 2016 le montant garanti aux organismes de l'audiovisuel public.

Ainsi, si les encaissements nets de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) s'avèrent inférieurs à 3 214,5 millions d'euros - contre 3 149,8  millions d'euros en 2015 -, la limite prise en charge par le budget général de l'État prévue au b) du 1° sera majorée à hauteur de la perte constatée. Le montant garanti progresse de 2,05 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015 .

D'après l'évaluation préalable jointe au présent article, la prévision des encaissements nets de la contribution à l'audiovisuel public se fonde sur :

- la progression de 0,51 % 414 ( * ) du nombre de foyers assujettis et de 0,6 % du nombre des redevables professionnels ;

- l'indexation du montant de la contribution sur la prévision d'inflation retenue dans le projet de loi de finances pour 2016 (1 %) 415 ( * ) ;

- l'estimation du montant total des dégrèvements ;

- un taux de recouvrement effectif de 99,5 % sur deux années, dont 90,73 % la première année.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a modifié de façon substantielle l'article 20 . Elle a en effet adopté un amendement du Gouvernement, avec l'avis favorable de la rapporteure générale à titre personnel 416 ( * ) , qui vise à supprimer dès 2016 la dotation budgétaire de France Télévisions , afin de « renforcer l'indépendance financière de [l'entreprise publique] en anticipant d'un an l'extinction de sa dotation budgétaire, initialement prévue en 2017 » 417 ( * ) . Le montant de cette dotation est de 40,5 millions d'euros en projet de loi de finances pour 2016, contre 160,4 millions d'euros en 2015.

Pour cela :

- la TOCE augmenterait au total de 0,4 point (0,3 + 0,1), la nouvelle hausse de 0,1 point procurant un rendement supplémentaire estimé à 25 millions d'euros ;

- la part de TOCE qui serait affectée en 2016 à l'entreprise publique passerait de 75 millions d'euros à 140,5 millions d'euros , soit une hausse de 65,5 millions d'euros par rapport au montant initialement prévu.

Cette augmentation correspond à la somme du montant de la dotation budgétaire inscrite sur l'action 01 « France Télévisions » du programme 313 « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique » au titre de l'année 2016 (40,5 millions d'euros), et des 25 millions d'euros résultant de la nouvelle hausse du taux de la TOCE de 0,1 point.

Deux amendements de coordination visant à supprimer la dotation budgétaire de France Télévisions imputée sur le programme 313 précité et à actualiser le montant du compte de concours financiers ont été adoptés en seconde partie, dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

Par le biais de l'amendement adopté en première lecture, les ressources publiques totales attribuées à l'entreprise audiovisuelle augmenteraient de 25 millions d'euros par rapport à la dotation initialement prévue pour 2016, résultant des opérations suivantes :

1) la suppression de la dotation budgétaire de 40,5 millions, qui serait remplacée par une part du produit de la TOCE de 40,5 millions d'euros reversée sur le compte de concours financiers ;

2) la hausse supplémentaire de 0,1 point du taux de la TOCE, pour un montant de 25 millions d'euros.

La hausse des ressources publiques attribuées à France Télévisions a été justifiée par la ministre de la culture et de la communication ainsi que par nos collègues députés Jean-Marie Beffara et Patrick Bloche par la dégradation financière de l'entreprise , à charge pour celle-ci de réaliser parallèlement des économies sur ses dépenses afin de rétablir son équilibre financier.

Évolution des ressources publiques attribuées à France Télévisions entre la loi de finances initiale pour 2015, le PLF 2016 initial et le PLF 2016 amendé

(en euros)

LFI 2015

PLF 2016

PLF 2016 après amendement

Programme 313 - mission « Médias, livre et industries culturelles »

160 417 710

40 533 358

0

Programme 841 - compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public »

2 369 360 683

2 494 733 089

2 560 233 089

Total

2 529 778 393

2 535 266 447

2 560 233 089

Augmentation par rapport à la LFI 2015

/

+ 0,2 %

+ 1,2 %

Source : projets annuels de performances de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » annexés au projet de loi de finances pour 2016, et amendement n° I-822 déposé par le Gouvernement à l'article 20

Après amendement, le montant des ressources attribuées en 2016 à France Télévisions via le compte de concours financiers serait égal à 2 560 233 089 euros, ce qui est la somme de la dotation du programme 841 prévue en projet de loi de finances pour 2016 et des 65,5 millions d'euros de produit de la TOCE (40,5 + 25) reversés à l'entreprise publique.

Enfin, afin de tenir compte de l'amendement adopté par nos collègues députés à l'article 2 du projet de loi de finances pour 2016 418 ( * ) , l'amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'article 20 actualise le montant des dégrèvements pour motifs sociaux pris en charge par l'État, qui passe de 513,8 millions d'euros à 528,4 millions d'euros .

Aux termes de ces évolutions, le montant garanti aux organismes de l'audiovisuel public est en conséquence porté à 3 199,9 millions d'euros au lieu de 3 214,5 millions d'euros 419 ( * ) .

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Si votre rapporteur général est favorable à la reconduction et à l'actualisation du mécanisme de garantie des ressources afin de donner une visibilité à l'audiovisuel public sur le montant de ses dotations publiques, il ne peut approuver les dispositions qui augmentent la taxe sur les opérateurs de communications électroniques afin d'attribuer un supplément de recettes à France Télévisions.

En effet, l'augmentation du taux de la TOCE de 0,9 % à 1,3 % constitue une hausse de la fiscalité pesant sur les entreprises , qui risque de se répercuter sur les ménages à travers leur facture de téléphone, en contradiction avec les annonces du Gouvernement.

Du point de vue des principes, cette mesure est de surcroît difficilement acceptable. En effet, elle a été décidée sans aucune concertation préalable avec le secteur alors que, comme l'a rappelé la Fédération française des télécommunications (FFT), le Président de la République avait déclaré en février 2013 qu'il n'y aurait aucun prélèvement supplémentaire sur les opérateurs qui ne soit affecté aux investissements dans le secteur des télécommunications.

Du point de vue économique, la hausse de 0,4 point du taux de la taxe représente un prélèvement supplémentaire de l'ordre de 100 millions d'euros par an sur les entreprises du secteur , qui aura un impact certain sur leur capacité d'investissement , alors qu'elles doivent faire face à de lourdes obligations pour le déploiement du très haut débit et pour la couverture des « zones blanches » 420 ( * ) . Le coût de cette dernière est estimé à 40  millions d'euros par an sur cinq ans.

D'après la FFT, la hausse de 30 % du taux de la TOCE initialement prévue équivaut au financement de 150 000 prises de fibre optique ou de 700  antennes mobiles. Il ne s'agit donc pas d'une hausse « à la marge » comme l'a affirmé la ministre de la culture et de la communication, d'autant plus que ces opérateurs évoluent dans un contexte hautement concurrentiel .

Enfin, l'augmentation du taux de la TOCE paraît d'autant plus malvenue que l'État attend des opérateurs télécoms qu'ils versent 3 milliards d'euros pour l'achat des fréquences d'ici la fin de l'année 2015 .

Plus généralement, il convient aussi de rappeler que le montant global de la fiscalité qui pèse sur le secteur est de l'ordre du milliard d'euros 421 ( * ) .

En ce qui concerne le financement de l'audiovisuel public, le présent article appelle par ailleurs plusieurs remarques.

Tout d'abord, pour la quatrième année consécutive 422 ( * ) , le Gouvernement repousse la réforme de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) , ce qui paraît d'autant moins compréhensible que le Président de la république avait annoncé le 2 octobre 2014 devant le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) son intention de voir engagée une réflexion sur la modernisation de la CAP.

Plutôt que de réformer l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public, qui devient archaïque , en tenant compte de l'évolution des nouveaux usages et des pratiques européennes, ce qui apparaît urgent, il a de nouveau fait le choix court-termiste d'une hausse erratique de la fiscalité 423 ( * ) , à travers l'augmentation du taux de la TOCE .

Cela traduit un manque de vision stratégique , au demeurant assumé par le Gouvernement. Ainsi, la ministre de la culture et de la communication a indiqué à l'Assemblée nationale : « une réflexion sur la modernisation de l'audiovisuel public est en cours. Cette année, il était difficile de mettre en oeuvre des réformes tenant à l'assiette ou à la modernisation de cette contribution à l'audiovisuel public parce qu'il y a un engagement fort du Gouvernement et du Président de la République de ne pas alourdir la charge fiscale qui pèse sur les citoyens français . Cette réflexion est pourtant toujours en cours. Elle est conforme à l'évolution des usages que nous constatons aujourd'hui dans les accès à la culture de manière générale. Nous continuons donc à y travailler » 424 ( * ) .

Plus généralement, avant d'envisager une nouvelle hausse des ressources de l'audiovisuel public, comme le fait le présent article, mieux vaudrait commencer par réduire les dépenses des sociétés de l'audiovisuel public . Les marges de manoeuvre existent, aussi bien en matière de relations avec les producteurs qu'en matière de masse salariale et de périmètre de l'offre notamment. On ne peut qu'espérer que le Gouvernement comme les différentes sociétés prendront leurs responsabilités en ce domaine dans le cadre de la négociation en cours des futurs contrats d'objectifs et de moyens (COM).

Comme l'a dit notre collègue député Gilles Carrez au cours du débat à l'Assemblée nationale, « on ne peut pas mener une politique de maîtrise de la dépense, comme le fait courageusement le secrétaire d'Etat, et en exonérer tous les organismes au motif qu'ils appartiennent à la sphère culturelle » 425 ( * ) .

S'il est vrai que la situation financière de France Télévisions est aujourd'hui préoccupante, sans doute pourrait-on commencer par reverser à l'entreprise, à travers une dotation budgétaire, l'équivalent du produit des deux taxes créées en 2009 pour compenser la suppression de la publicité après 20h00. Ces taxes représentent un montant global estimé à 228 millions d'euros en 2015.

Enfin, alors que la ministre de la culture et de la communication a affirmé à l'Assemblée nationale vouloir « assurer l'indépendance de l'audiovisuel public » en proposant un « financement solide et sécurisé pour les entreprises de ce secteur », on peut s'interroger sur la solidité juridique du dispositif proposé , à savoir l'affectation à France Télévisions, via le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », d'une partie du produit de la TOCE.

En effet, comme l'a souligné notre collègue député Franck Riester, « avec l'affectation directe d'une partie de cette taxe à France Télévisions, le Gouvernement prend le risque juridique de compromettre l'ensemble du dispositif car le Conseil constitutionnel comme les institutions communautaires se sont prononcées sur la conformité d'une imposition destinée au budget de l'État et non sur une taxe partiellement affectée à un opérateur - de surcroît sans lien direct avec l'activité économique taxée » 426 ( * ) .

Dès lors, si la disposition n'était pas autorisée par la Commission européenne ou si elle était contestée devant la Cour de justice de l'Union européenne, elle ferait peser une grande incertitude sur le financement de France Télévisions , au détriment de la prévisibilité de ses ressources, ce qui ne faciliterait certainement pas le retour à son équilibre financier.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteur général propose la suppression de l'ensemble des dispositions relatives à la hausse du taux de la TOCE et à l'affectation du produit supplémentaire qui en résulte à France Télévisions.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 20 bis (nouveau) (Art. 302 bis K du code général des impôts) - Compensation financière du trafic opéré à partir d'un aéroport situé en territoire français sur la base de droits de trafic accordés par un État limitrophe

Commentaire : le présent article prévoit la mise en place d'une compensation financière pour les missions d'intérêt général assurées par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) à l'occasion de l'utilisation d'un aéroport situé en territoire français sur la base de droits de trafic accordés par un État limitrophe. Cette disposition a vocation à s'appliquer au cas spécifique de l'aéroport de Bâle-Mulhouse au sein duquel la Suisse dispose d'une zone douanière.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RÉGIME DE LA TAXE DE L'AVIATION CIVILE

L'article 302 bis K du code général des impôts fixe le régime de la taxe de l'aviation civile (TAC).

Il prévoit notamment qu' « une taxe de l'aviation civile au profit du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et du budget général de l'État est due par les entreprises de transport aérien public . La taxe est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués en France 427 ( * ) , quelles que soient les conditions tarifaires accordées par le transporteur, à l'exception :

« a) Des personnels dont la présence à bord est directement liée au vol considéré [...]

« b) Des enfants de moins de deux ans ;

« c) Des passagers en transit direct, du fret ou du courrier effectuant un arrêt momentané sur l'aéroport et repartant par le même aéronef avec un numéro de vol au départ identique au numéro de vol de l'aéronef à bord duquel ils sont arrivés ;

« d) Des passagers, du fret du courrier reprenant leur vol après un atterrissage forcé en raison d'incidents techniques, de conditions atmosphériques défavorables ou de tout autre cas de force majeure .

« La taxe est exigible pour chaque vol commercial ».

Le produit de la taxe de l'aviation civile (TAC) pour 2015 était évalué en loi de finances initiale à 434,9 millions d'euros, dont 373,7 millions d'euros pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) et 61,2 millions d'euros pour le budget général.

Suite aux préconisations du rapport « La compétitivité du transport aérien français » de notre collègue député Bruno Le Roux, le régime de la TAC a été modifié par l'article 92 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, dans le but d'améliorer l'attractivité des plateformes aéroportuaires parisiennes .

En vertu de cet article, les compagnies aériennes ont été exonérées du paiement de la TAC à 50 % pour les passagers en correspondance depuis le 1 er avril 2015 et cette exonération sera portée à 100 % à compter du 1 er janvier 2016 . Elle concernera en 2016 12,6 millions de passagers et entraînera une diminution de recettes de 63,5 millions d'euros .

Afin de compenser la perte de recettes subie par le BACEA en raison de cette mesure, la quotité de TAC qui lui est affectée est passée de 80,91 % à 85,92 % au 1 er avril 2015 puis à 93,67 % au 1 er janvier 2016 .

Pour 2016, le produit de la TAC est estimé à 420,7 millions d'euros , dont 393,9 millions d'euros pour le BACEA (soit une hausse de 5,4 % par rapport à 2015) et 26,8 millions d'euros pour le budget général.

B. LE CAS PARTICULIER DE L'AÉROPORT DE BÂLE-MULHOUSE

L'aéroport de Bâle-Mulhouse (EuroAirport) est situé sur le territoire français, à l'extrême sud de l'Alsace, sur les communes de Blotzheim, Hézingue, Bourgfelden et Saint-Louis, à quelques kilomètres de la frontière suisse.

Inauguré le 8 mai 1946, cet aéroport binational, qui dispose du statut d'établissement public, est régi par les stipulations de la convention franco-suisse relative à la construction et à l'exploitation de l'aéroport de Bâle-Mulhouse, conclue à Berne le 4 juillet 1949 et entrée en vigueur le 25 novembre 1952.

En vertu de l'article 2 de cette convention, les installations et les bâtiments de l'aéroport sont divisés en trois secteurs :

- un secteur affecté aux services français chargés du contrôle des voyageurs et marchandises en provenance ou à destination de la France ;

- un secteur affecté aux services suisses chargés du contrôle des voyageurs et marchandises en provenance ou à destination de la Suisse ;

- un secteur, englobant les pistes, affecté aux services généraux de l'aéroport et au trafic des voyageurs et marchandises.

La Suisse dispose ainsi dans l'aéroport de Bâle-Mulhouse, intégralement situé sur le territoire français, d'une zone douanière et de la compétence souveraine d'accorder des droits de trafic de la même façon que pour les aérodromes situés sur son propre territoire.

La direction générale de l'aviation civile (DGAC) réalise de nombreuses missions d'intérêt général pour le secteur suisse de l'aéroport de Bâle-Mulhouse.

Elle est notamment chargée de :

- vérifier, par sa participation à la tutelle de l'établissement public, l'application des réglementations relatives à l'ouverture et à la gestion des aérodromes, aux transporteurs aériens, à la sûreté des passagers et du fret, à la circulation aérienne, à la sécurité et à la protection de l'environnement des installations aéroportuaires et des aéronefs et à la lutte contre les nuisances sonores aériennes ;

- d'exercer des missions de surveillance relatives au service de sauvetage et de lutte contre l'incendie ainsi qu'au péril animalier dans l'enceinte de l'aéroport ;

- d'assurer le contrôle du respect par les aéronefs étrangers des standards établis par la convention de Chicago en matière d'aviation civile internationale dans le cadre du programme établi par l'agence européenne de sécurité aérienne (AESA).

En outre, l'ensemble des activités réalisées par les services centraux et déconcentrés de la DGAC génèrent des coûts en termes de fonctions support (gestion des ressources humaines, maintenance informatique, fonctionnement) qui sont imputés selon une clé de répartition à l'aéroport de Bâle-Mulhouse et en particulier au secteur suisse.

Le montant des coûts engendrés par ces missions d'intérêt général effectuées par la DGAC au profit du secteur suisse de l'aéroport de Bâle-Mulhouse a été estimé pour l'année 2013 à partir de l'exploitation de la comptabilité analytique de l'établissement public.

Ces coûts s'élèvent à 6 008 436 d'euros, qui se décomposent comme suit :

- 3 022 236 euros consacrés à la régulation technique et économique (soit 50,3 % des coûts exposés) ;

- 2 551 948 euros consacrés aux contrôles et à la certification (soit 42,5 % des coûts exposés) ;

- 434 252 euros au titre des activités support (soit 7,2 % des coûts exposés).

Or, la DGAC ne perçoit aucune compensation de la Suisse pour les services qu'elle déploie en faveur du secteur helvétique de l'aéroport.

En particulier, la taxe de l'aviation civile, qui s'applique dans l'ensemble des aéroports français (voir supra ), n'est pas appliquée aux transporteurs aériens publics qui embarquent des passagers, du fret ou du courrier à partir du secteur suisse.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement avec un avis favorable de la commission des finances.

Il a pour objet d'introduire à l'article 302 bis K du code général des impôts une dérogation explicite au champ d'application de la taxe de l'aviation civile (TAC), dès lors que l'embarquement des passagers, du fret ou du courrier, bien que localisé sur le territoire français, est effectué par des transporteurs aériens publics qui bénéficient de droits de trafic accordés par un État tiers limitrophe, conformément aux stipulations d'un accord international entre cet État et la France.

En contrepartie, l'article 20 bis soumet les transporteurs aériens concernés au paiement d'une contribution financière, destinée à couvrir les coûts des missions d'intérêt général assurées par la DGAC à l'occasion de l'utilisation de cet aéroport (voir supra ).

Cette contribution sera assise sur le nombre de passagers embarqués sur chaque vol commercial. Son tarif sera égal au rapport entre le montant des coûts des missions d'intérêt général assurées par la DGAC et le nombre total de passagers embarqués par ces transporteurs aériens à partir de cet aéroport au cours d'une année civile.

Un arrêté des ministres chargés du budget et de l'aviation civile, pris après concertation avec les autorités compétentes de l'autre État partie à l'accord international, fixera la liste des coûts pris en considération pour le calcul du tarif de la contribution ainsi que les règles de leur actualisation.

En pratique, cette contribution financière trouvera à s'appliquer au cas spécifique de l'aéroport de Bâle-Mulhouse.

Si la France avait estimé que l'application de la taxe de l'aviation civile à l'ensemble des vols au départ de cet aéroport aurait pu constituer une solution acceptable, la Suisse a estimé qu'une telle option aurait été contraire aux stipulations de la convention de 1949 et que les compagnies desservant le secteur suisse devaient se voir appliquer un régime spécifique.

La compensation financière prévue par le présent article a été agréée dans le cadre des discussions entre la France et la Suisse relatives au régime applicable dans le cadre de la convention de 1949, qui ont débouché sur une déclaration commune des deux ministres des affaires étrangères le 14 avril 2015.

L'objectif de ce dispositif est de garantir de façon pérenne la couverture des 6 millions d'euros (chiffres de 2013, comme rappelé supra ) exposés par la DGAC pour les services qu'elle déploie en faveur du secteur helvétique de l'aéroport.

2 658 600 passagers ayant embarqué dans ledit secteur en 2013, le tarif de la compensation financière devrait être fixé à 2,26 euros par passager et revalorisé chaque année selon une clé à définir entre les administrations concernées.

Ainsi que le prévoit le présent article, ce tarif sera fixé par un arrêté pris par les ministres chargés du budget et de l'aviation civile après avis de l'organe délibérant compétent de l'établissement public gérant l'aéroport de Bâle-Mulhouse. Il ne pourra excéder celui de la taxe de l'aviation civile applicable pour les passagers à destination de la France, d'un autre État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse.

Un décret interviendra afin de préciser la date d'entrée en vigueur de l'ensemble du dispositif, au plus tard six mois après que le Gouvernement aura reçu la réponse de la Commission européenne le déclarant conforme au droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État.

Enfin, le présent article précise que « le produit de la contribution est recouvrée par le comptable publique territorialement compétent qui le reverse aux comptables publics du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » . La contribution est établie, recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif prévu par le présent article prend en compte les spécificités des vols desservant le secteur douanier suisse de l'aéroport Bâle-Mulhouse tout en permettant à la France de recevoir une compensation couvrant les dépenses engagées pour l'exercice des missions d'intérêt général qu'elle accomplit au profit dudit secteur suisse.

Il était en effet nécessaire de préserver les intérêts du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) en assujettissant les compagnies aériennes concernées à une juste contribution.

En outre, si les entreprises du transport aérien desservant le secteur suisse devront désormais s'acquitter de cette contribution nouvelle, elles bénéficieront en contrepartie d'une plus grande sécurité juridique en voyant leur situation fiscale clarifiée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 20 ter (nouveau) - Acquisition à l'État des avoirs disponibles dans les comptes joueurs des opérateurs de jeu en ligne

Commentaire : le présent article prévoit les conditions dans lesquelles les avoirs disponibles dans les comptes provisoires inactifs des joueurs de jeu en ligne sont, à l'issue d'un délai de six ans, acquis à l'État.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES AVOIRS DÉTENUS SUR LES COMPTES PROVISOIRES DES JEUX EN LIGNE OUVERTS À LA CONCURRENCE

L'article 17 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne a prévu que les opérateurs de jeux en ligne agréés, s'agissant des jeux en ligne ouverts à la concurrence et régulés par l'Autorité de régulation des jeux en ligne (paris sportifs et hippiques en ligne, poker en ligne), doivent, pour procéder à l'ouverture du compte d'un joueur, effectuer un certain nombre de vérifications, en particulier de son identité, de son âge, de son adresse, de son compte de paiement , ainsi que du fait qu'il s'agit bien d'une personne physique (afin d'éviter l'inscription « virtuelle » de robots informatiques). Ces vérifications prennent la forme d'envois de documents et ne permettent donc pas la création immédiate d'un compte joueur.

Cependant, afin d'assurer aux opérateurs la possibilité de répondre à une demande de jeu en temps réel, ce même article a permis aux opérateurs de « proposer au joueur, de manière provisoire, une activité de jeu d'argent ou de pari en ligne avant vérification des éléments mentionnés au premier alinéa [identité, âge, etc.] ».

Il n'existe pas de plafond, en termes de sommes d'argent, pour l'utilisation d'un tel compte provisoire. En revanche, l'article 17 précise que la vérification de l'identité et de la majorité du joueur « conditionnent (...) la validation du compte joueur et la restitution de son éventuel solde créditeur » . En d'autres termes, faute de l'envoi des pièces justificatives nécessaires, les avoirs détenus sur un compte provisoire ne peuvent être reversés sur le compte bancaire du joueur ; en outre, au terme d'un mois, l'opérateur est tenu de désactiver le compte provisoire et, après un nouveau délai d'un mois, de le clôturer.

Dans ce cas, l'article 8 du décret n° 2010-518 prévoit que les opérateurs doivent mettre en réserve, pour une durée de six ans, les sommes correspondant aux comptes provisoires clôturés dans ces conditions .

B. LES AVOIRS DÉTENUS SUR LES COMPTES CLÔTURÉS DES JEUX DE LOTERIE EN LIGNE DE LA FRANÇAISE DES JEUX

La loi du 12 mai 2010 précitée, si elle a ouvert à la concurrence les paris sportifs et hippiques en ligne ainsi que le poker en ligne, a en revanche maintenu sous monopole de la Française des jeux les jeux de loterie en ligne, qui sont des jeux de pur hasard (tirage et grattage en ligne) et présentent à ce titre un risque d'addiction plus important.

Pour cette catégorie de jeux, la même procédure d'ouverture de compte s'applique (compte provisoire en l'attente des pièces justificatives, puis compte permanent) .

Dans le cas où le compte permanent a été mis en place, celui-ci peut être clôturé à la demande du joueur ou par décision de la Française des jeux , notamment dans deux cas : soit lorsque la personne s'inscrit sur le fichier des personnes interdites de jeux , conformément à l'article 66 de la loi du 12 mai 2010, soit lorsque le compte est inactif pendant au moins 12 mois , conformément au sous-article 10.1 du règlement général des jeux de La Française des Jeux.

En cas de clôture, la Française des jeux est tenue , en application de l'article 19 du décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978, de reverser le solde créditeur du compte clôturé sur le compte bancaire du joueur . Cependant, il arrive que la Française des jeux ne soit pas en mesure de procéder à ce reversement, en particulier lorsque le joueur a changé de domiciliation bancaire et qu'il ne peut être contacté à l'adresse qu'il avait indiquée lors de la création de son compte joueur.

Le même article 19 du décret du 9 novembre 1978 prévoit que, dans ce cas, la Française des jeux « met en réserve, sans délai, la somme correspondante pour une durée de six ans à compter de cette clôture » . Le décret, pas plus que la loi, ne précise le sort de ces avoirs au terme de la période de six ans de mise en réserve.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de la commission des finances, a pour objet, d'une part d'inscrire au niveau législatif la procédure de mise en réserve des sommes détenues sur les comptes joueurs déjà prévue par le décret du 9 novembre 1978 et, d'autre part, de préciser l'affectation à l'État de ces sommes, considérées comme des « biens sans maître » au terme d'un délai de six ans .

S'agissant des comptes provisoires des opérateurs de jeux en ligne , le présent article modifie l'article 17 de la loi du 12 mai 2010 précitée, afin de prévoir que, faute d'obtenir les informations requises, l'opérateur clôture le compte provisoire. Dans ce cas, l'opérateur devra mettre en réserve les sommes inscrites pendant un délai de six ans. Pendant cette période, le joueur peut en obtenir le remboursement en fournissant les justificatifs demandés. En l'absence de manifestation du joueur et, partant, de remboursement à ce dernier, la somme est acquise à l'État. L'opérateur doit, cependant, trois mois avant l'expiration de ce délai, « [utiliser] tout moyen à sa disposition pour informer le joueur » de la possibilité de reversement et, à défaut, de l'acquisition à l'État.

S'agissant des comptes clôturés par la Française des jeux dans le cadre de son activité sous droits exclusifs (jeux de loterie en ligne) , le présent article prévoit de compléter l'article 66 de la loi du 12 mai 2010, afin de préciser que, lorsque la Française des jeux clôture un compte et qu'elle n'est pas en mesure de procéder au reversement sur le compte de paiement du joueur, elle met en réserve la somme pendant six ans. Pendant cette période, le joueur peut en obtenir le remboursement en fournissant les références du compte de paiement nécessaires. Au terme de ces six ans et en l'absence de manifestation du joueur, le présent article prévoit que la somme est acquise à l'État. La Française des jeux doit également, trois mois avant l'expiration de ce délai, « [utiliser] tout moyen à sa disposition pour informer le joueur » de la possibilité de reversement et, à défaut, de l'acquisition à l'État.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale à la faveur d'une double actualité.

D'une part, alors que le décret prévoit une mise en réserve pendant six ans des sommes des comptes provisoires clôturés, le présent article a pour objet de prévoir l'avenir des sommes en question d'ici à juin 2016, les premiers comptes provisoires ayant été « ouverts, et pour certains clôturés, en juin 2010 » , comme l'indique l'exposé des motifs de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale. À cet égard, l'exposé des motifs de l'amendement précise que la recette pour l'État estimée pour 2016 au titre de la mise en oeuvre de ce dispositif s'établit à 5 millions d'euros ; d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, ces recettes se répartissent entre 0,5 million d'euros pour la Française des jeux et 4,5 millions d'euros pour les autres opérateurs de jeu en ligne.

D'autre part, les dispositions relatives aux avoirs en déshérence ont récemment fait l'objet de modifications profondes dans le cadre de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence, dite « loi Eckert » , du nom de Christian Eckert, alors rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui avait déposé la proposition de loi.

Principales dispositions de la loi « Eckert » du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence

L'article premier de la loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance sur la vie en déshérence crée un régime spécifique des comptes bancaires inactifs, soit en cas d'absence d'opération ou de manifestation, soit en cas de décès du titulaire. Il impose aux établissements de procéder annuellement à une recherche des titulaires éventuellement décédés par la consultation du répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP). Il organise le dépôt obligatoire de ces avoirs à la Caisse des dépôts et consignations au terme d'un délai de respectivement dix ans et deux ans, ainsi que leur transfert à l'État au terme de la prescription trentenaire.

Par ailleurs, l'article premier prévoit également le régime des coffres forts inactifs, qui peuvent être ouverts et dont les biens peuvent être liquidés à l'expiration d'un délai de 20 ans à compter du premier impayé de location du coffre.

Les articles 3 et 4 de la loi adoptée par l'Assemblée nationale, l'un pour les organismes d'assurance relevant du code des assurances, l'autre pour les mutuelles et unions relevant du code de la mutualité, ont notamment prévu le versement auprès de la Caisse des dépôts et consignations des sommes dues par un assureur mais non réclamées dans un délai de dix ans, puis leur acquisition à l'État au terme d'un délai de vingt ans.

L'article 6 de la loi garantit la neutralité fiscale des dispositions des articles 1 er , 3 et 4.

L'article 8 oblige le notaire chargé de la succession à consulter systématiquement le fichier des comptes bancaires (FICOBA) afin d'identifier l'ensemble des comptes détenus par le défunt. Il lui permet par ailleurs d'interroger le fichier des contrats d'assurance sur la vie (FICOVIE), sur mandat d'un bénéficiaire éventuel ou pour identifier les contrats de capitalisation souscrits par le défunt.

L'article 13 de la loi prévoit le régime transitoire applicable, afin notamment de permettre un traitement du stock d'avoirs bancaires inactifs et non réclamés et de contrats d'assurance vie ou de capitalisation en déshérence.

L'article 16 fixe l'entrée en vigueur de l'ensemble du dispositif au 1 er janvier 2016.

Source : Commission des finances

Cette loi a prévu, pour les comptes bancaires et les contrats d'assurance en vie en déshérence, une procédure qui se distingue de la procédure mise en place par le présent article de deux manières :

- d'une part, cette procédure fait intervenir la Caisse des dépôts et consignations , qui, aux termes de la loi, conservera les sommes en déshérence après dix ans d'inactivité du compte 428 ( * ) ou de non réclamation des contrats d'assurance, et jusqu'à l'expiration d'un délai supplémentaire de vingt ans, au terme duquel les avoirs en question seront acquis à l'Etat ;

- d'autre part, la procédure prévoit une obligation, pour les assureurs et les banques, de rechercher les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie et les titulaires des comptes inactifs au moment de la constatation de l'inactivité.

À cet égard, votre rapporteur général regrette que le dispositif proposé par le présent article ne prévoie pas d'obligation d'information des titulaires des comptes clôturés au moment de la clôture par l'opérateur , lorsqu'il s'agit de comptes provisoires. Il propose en conséquence un amendement afin que les opérateurs soient tenus d'informer par tout moyen, dès la clôture, les titulaires des comptes de la clôture du compte, de la possibilité de solliciter le reversement et des conséquences qui s'attachent, à terme, à la mise en réserve des sommes.

Par ailleurs, le présent article traite deux cas : les comptes provisoires du secteur concurrentiel d'une part, et l'ensemble des comptes (provisoires et permanents) du secteur monopolistique. Or, les comptes permanents du secteur concurrentiel peuvent également, et pour les mêmes raisons 429 ( * ) , faire l'objet d'une clôture décidée par les opérateurs. Aussi, par cohérence, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement visant à appliquer la même procédure d'information, de mise en réserve et, au terme d'un délai de six ans, d'acquisition à l'État, des sommes détenues sur des comptes permanents du secteur concurrentiel .

Enfin, votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement rédactionnel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 20 quater (nouveau) - Clôture du compte de commerce « Liquidation d'établissements publics de l'État et liquidations diverses »

Commentaire : le présent article prévoit de clore le compte de commerce « Liquidation d'établissements publics de l'État et liquidations diverses » le 31 décembre 2015.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES COMPTES DE COMMERCE : UN SUPPORT D'AFFECTATION DE RECETTES POUR DES OPÉRATIONS DE CARACTÈRE INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

1. Les deux composantes du principe d'universalité budgétaire : non-contraction des recettes et des dépenses et non-affectation des recettes à certaines dépenses

Le principe d'universalité budgétaire, avec celui d'annualité (le budget doit être voté chaque année), de spécialité (les dépenses doivent avoir une destination précise, autorisée par le Parlement), d'unité (l'ensemble du budget doit être retracé dans un document unique) fait partie des grands principes de droit budgétaire 430 ( * ) reconnus par la jurisprudence constitutionnelle : selon le Conseil constitutionnel, « les principes de l'annualité, de l'universalité et de l'unité du budget répondent au double impératif d'assurer la clarté des comptes de l'État et de permettre un contrôle efficace par le Parlement » 431 ( * ) .

L'universalité du budget correspond à deux exigences distinctes mais complémentaires : d'une part, les recettes perçues par l'État et les dépenses auxquelles il procède ne peuvent être contractées - c'est le principe de non-contraction. D'autre part, les recettes ne doivent pas financer certaines dépenses identifiées mais contribuer, de façon indistincte, au budget général.

2. Les comptes de commerce : une catégorie de comptes spéciaux, destinés à retracer des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l'État non dotés de la personnalité morale

Plusieurs dérogations au principe de non-affectation sont prévues par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), dont l'article 16 dispose que « certaines recettes peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux ou de procédures comptables particulières au sein du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial » . Les budgets annexes et les comptes spéciaux ne peuvent être ouverts que par une loi de finances .

Les comptes de commerce constituent une catégorie de compte spécial 432 ( * ) . L'article 22 de la LOLF dispose qu'ils ont pour objet de retracer « des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l'État non dotés de la personnalité morale ».

Dix comptes de commerce sont prévus par le présent projet de loi de finances, dont les trois plus importants sont les comptes « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » (19,2 milliards d'euros), « Couverture des risques financiers de l'État » (528 millions d'euros) et « Approvisionnement de l'État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires » (125 millions d'euros).

B. LE COMPTE DE COMMERCE « LIQUIDATION D'ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE L'ÉTAT ET LIQUIDATIONS DIVERSES » : DES RECETTES ET DES DÉPENSES DE TRÈS FAIBLE AMPLEUR

1. Un compte retraçant essentiellement les opérations liées à la mise en jeu de la responsabilité des comptables du Trésor dans le cadre d'une activité aujourd'hui abandonnée

Ce compte de commerce retrace les opérations de recettes et de dépenses auxquelles donne lieu la liquidation de certains établissements publics de l'État et des organismes para-administratifs ou professionnels dissous et les liquidations résultant d'activités exercées par des services de l'État . Il s'agit essentiellement d'opérations liées à la mise en jeu de la responsabilité des comptables du Trésor dans le cadre de leur ancienne activité de collecte de l'épargne .

En effet, par une survivance issue d'un arrêté du 7 novembre 1814, les Trésoriers payeurs généraux (TPG) étaient habilités à exercer une activité de collecte et de gestion de l'épargne auprès des particuliers, à titre privé et sous leur propre responsabilité . L'activité de gestion de ces fonds particuliers concernait une majorité de personnes physiques , mais aussi des sociétés commerciales, des associations , des personnes protégées par la loi ou encore des fondations.

La couverture financière de la responsabilité particulière des Trésoriers payeurs généraux reposait alors sur trois éléments : outre la souscription d'une assurance spécifique pour couvrir d'éventuels sinistres, les TPG devaient contribuer à un fonds de garantie créé pour assumer la couverture complémentaire des risques. Enfin, la mise en jeu de la responsabilité particulière des comptables supérieurs du Trésor a pu conduire à la prise en charge, sur leurs deniers propres , d'une partie de la régularisation des sinistres déterminée par le fonds de garantie.

A l'occasion de la réforme de l'activité d'épargne du Trésor public, il a été décidé de désengager le Trésor public de la gestion des fonds particuliers, puisqu'il s'agissait là d'une activité entrant totalement dans le champ concurrentiel . L'arrêté du 2 février 2001 relatif à l'activité de service de dépôt de fonds particuliers exercée par les Trésoriers payeurs généraux, a ainsi mis fin, le 31 décembre 2001, à cette activité.

L'article premier de la loi de finances n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 rectificative pour 2002 a procédé à la liquidation de la responsabilité particulière des comptables supérieurs du Trésor dans le cadre de la gestion des fonds particuliers. Les droits et obligations en ont été transférés à l'État, sans préjudice de la mise en jeu préalable des assurances déjà souscrites. Concrètement, les recettes et dépenses correspondant à la liquidation de ces opérations ont été dès lors imputées au compte de commerce « Liquidation d'établissements publics de l'État et liquidation diverses » .

2. Des recettes qui ont pu être importantes, mais qui sont aujourd'hui d'une ampleur très limitée

En 2002, le compte a enregistré une recette supplémentaire de 12 millions d'euros correspondant aux montants dont disposait le fonds de garantie précité .

Treize ans plus tard, les remboursements des dépôts de garantie sont en extinction et, d'après le Gouvernement, la prévision de dépenses pour 2015 s'élève à un peu moins de 4 600 euros .

D'après la note d'analyse budgétaire de la Cour des comptes relative à l'exécution budgétaire du compte de commerce pour l'année 2014, ce compte bénéficiait alors d'un solde créditeur à hauteur de 17,47 millions d'euros. La Cour des comptes en recommandait la suppression.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'article additionnel 20 quater adopté par l'Assemblée nationale suite à un amendement gouvernemental 433 ( * ) prévoit la clôture du compte de commerce « Liquidation d'établissements publics de l'État et liquidations diverses » au 31 décembre 2015 .

Le solde serait donc affecté au budget général de l'État . Les dépenses financées par ce compte de commerce seraient, à l'avenir, prises en charge par le budget général, de même que les recettes qui étaient auparavant affectées au compte spécial seraient réintégrées au sein du budget de l'État.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La LOLF prévoit des modalités spécifiques d'affectation des recettes afin de garantir la transparence du budget de l'État . Cependant, dans le cas présent et au vu des montants en jeu, votre rapporteur général considère que l'existence d'un compte de commerce autonome constitue davantage un facteur de complexité que de lisibilité budgétaire .

En outre, comme la Cour des comptes l'a souligné à plusieurs reprises dans ses notes d'exécution budgétaires, l'objet même de ce compte de commerce n'apparaît pas conforme à l'article 22 de la LOLF dans la mesure où le compte ne retrace pas d'activité industrielle commerciale .

Votre rapporteur général est donc favorable à sa clôture .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 20 quinquies (nouveau) (Art. L. 122-4 et L. 153-1 du code de la voirie routière) - Fusion du contrat de concession d'autoroutes et du contrat de concession du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines de la société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône

Commentaire : le présent article prévoit de fusionner le contrat de concession autoroutière et le contrat de concession du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines dont bénéficie la société Autoroute Paris-Rhin-Rhône en contrepartie d'une diminution du tarif des péages du tunnel et d'une prise en charge par ladite société de la contribution publique initialement prévue pour financer les travaux de mise aux normes du tunnel.

I. LE DROIT EXISTANT

La société Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR) est titulaire de deux contrats distincts de concession de service public conclus avec l'État :

- un contrat de concession d'autoroutes, régi par les dispositions de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière et approuvé par un décret en Conseil d'État le 19 août 1986 434 ( * ) , portant sur un réseau autoroutier situé dans l'est de la France ;

- un contrat de concession d'ouvrage d'art, régi par les dispositions de l'article L. 153-1 du code de la voirie routière et approuvé par un décret du 10 avril 1981 435 ( * ) , portant sur le tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines.

Achevé en 1937, ce tunnel d'une longueur de 6 950 mètres (auxquels il convient d'ajouter 4 kilomètres d'accès), également dénommé « tunnel Maurice Lemaire », était initialement destiné au trafic ferroviaire.

Devenu depuis 1976 un tunnel routier (route nationale 159), il permet de relier Sélestat en Alsace à Saint-Dié en Lorraine par le massif vosgien en évitant les cols de Sainte-Marie-aux-Mines, du Bonhomme, du Bussang et de Saales.

Exploité dans un premier temps par une société d'économie mixte créée à cet effet, il a été concédé en 1981, comme rappelé ci-dessus, à la société Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR), alors société d'économie mixte, dont le capital a été ouvert en 2004, et qui appartient très majoritairement depuis 2006 à un consortium mené par le groupe Eiffage.

À la suite de l'incendie du tunnel du Mont-Blanc survenu du 24 au 26 mars 1999, le tunnel a été fermé aux poids lourds le 1 er mars 2000.

Il a été totalement fermé au trafic à partir du 19 avril 2004 pour permettre la réalisation, pour un montant de 180 millions d'euros, d'importants travaux de rénovation et de mise en sécurité, visant à assurer sa conformité avec les dispositions de la directive 24/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant les exigences de sécurité minimales applicables aux tunnels du réseau routier transeuropéen.

Montant des travaux de mise aux normes
du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines

180 millions d'euros hors taxe répartis comme suit :

- 18 millions d'euros pour les reconnaissances géologiques, les audits, les études, les acquisitions foncières;

- 9 millions d'euros pour les déviations, les travaux d'aménagement

- 57 millions d'euros pour le génie civil et la galerie de sécurité parallèle ;

- 51 millions d'euros pour le génie civil du tunnel et la réalisation des connexions ;

- 45 millions d'euros pour les équipements d'exploitation et de sécurité.

Source : Structurae, base de données internationale du génie civil

La répartition du financement de ces travaux a fait l'objet en mai 2009 d'un avenant au contrat de concession de service public liant l'État à la société Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR). Cet avenant, validé par la Commission européenne au titre des aides d'État et approuvé par un décret du 11 juin 2009 436 ( * ) , prévoyait que :

- l'État et les collectivités territoriales directement concernées par le tunnel (les régions Alsace et Lorraine et les départements du Haut-Rhin et des Vosges) apporteraient une contribution publique forfaitaire de 35 millions d'euros;

- les tarifs des péages du tunnel feraient l'objet d'une augmentation;

- la durée de la concession du tunnel au profit de la société APRR serait allongée de 2022 jusqu'en 2042 par un décret du 11 juin 2009 puis jusqu'en 2068 par une loi du 8 décembre 2009 437 ( * ) .

La réouverture du tunnel a eu lieu le 1 er octobre 2008.

La très forte augmentation des tarifs des péages destinée à financer une partie des travaux réalisés a conduit les usagers, en particulier les poids lourds, à éviter le passage dans le tunnel et à emprunter les cols vosgiens.

C'est ainsi que le trafic des poids lourds dans le tunnel a diminué de 75 % par rapport à la situation qui prévalait avant le 1 er mars 2000 (soit moins de 300 camions par jour) tandis que le trafic des véhicules légers baissait pour sa part de 26 %.

Cette préférence des poids lourds pour les cols vosgiens au détriment du tunnel Maurice Lemaire pose de nombreux problèmes en termes :

- d'environnement, car les poids lourds sont des véhicules bruyants et polluants, ce qui suscite la colère des riverains;

- de saturation du réseau routier, en particulier dans les bas de vallées;

- de sécurité, car ils sont amenés à traverser des agglomérations aux voiries étroites, inadaptées à la circulation de ce type de véhicules;

- financiers, car la désaffection dont souffre le tunnel induit des pertes d'exploitation pour la société Autoroutes Paris-Rhin-Rhône.

Cette situation a conduit les élus locaux, conscients de ces difficultés et de la colère des populations, à saisir le ministère des transports au début de l'année 2011, afin que puisse être envisagée une gestion plus satisfaisante de la circulation des poids lourds dans le massif vosgien.

Chargé d'une mission en ce sens, le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a proposé un plan global s'articulant autour des points suivants :

- une interdiction de circulation des poids lourds dans les cols vosgiens, seul le trafic local étant autorisé ;

- une baisse significative du péage du tunnel au profit des poids lourds ;

- le versement des contributions publiques d'équilibre de la concession qui n'avaient pas encore été versées ;

- la réalisation de la déviation de Châtenois (cf. infra ).

Sur la base des préconisations de ce rapport, les préfets de région et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Alsace et Lorraine ont mené une concertation avec les élus locaux et les usagers des itinéraires concernés puis l'État a entamé, en janvier 2013, des discussions avec APRR visant à étudier les moyens de baisser les tarifs du tunnel en intégrant la concession du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines dans le contrat de concession autoroutier d'APRR.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. UNE FUSION DES DEUX CONTRATS DE CONCESSION EN ÉCHANGE D'UN ABAISSEMENT DES TARIFS DES PÉAGES DU TUNNEL ET DE LA PRISE EN CHARGE PAR APRR DE LA CONTRIBUTION PUBLIQUE AU FINANCEMENT DES TRAVAUX

Le présent article 20 quinquies est issu d'un amendement présenté par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale en séance publique avec l'avis favorable de la rapporteure de la commission des finances.

Il prévoit la fusion des deux contrats de concession de la société APRR, c'est-à-dire du contrat portant sur le tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines (à échéance 2068) et du contrat portant sur le réseau autoroutier (à échéance 2035).

Juridiquement, cette fusion se traduirait par l'intégration du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines dans l'assiette de la concession autoroutière d'APRR et par l'insertion des stipulations contractuelles spécifiques au tunnel dans le contrat de concession autoroutier. De ce fait, l'échéance du contrat fusionné serait l'année 2035.

Selon l'exposé des motifs de l'amendement déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale, « les modalités techniques, financières et contractuelles de cette intégration feront l'objet d'un avenant, approuvé par décret en Conseil d'État, au contrat de concession autoroutière d'APRR. Cet avenant mettra notamment à jour la date d'échéance du contrat ainsi fusionné » .

Selon les documents transmis à votre rapporteur général par la direction générale des infrastructures des transports et de la mer (DGITM), l'objectif de cette fusion est d'allonger de 10 mois au bénéfice d'APRR la durée de la concession du contrat fusionné (par rapport à la durée prévue pour le contrat de concession autoroutier) en échange d'une diminution des tarifs des péages du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines, afin notamment que les poids lourds l'empruntent à nouveau et cessent de passer par les cols en engendrant de nombreuses nuisances.

Les tarifs des péages du tunnel pourraient ainsi diminuer de 57 % pour les poids lourds, en passant de 64,7 euros actuellement à 28 euros.

Péages actuels du tunnel et péages envisagés
en cas de fusion des contrats de concession

Tarifs en € TTC au 1 er février 2015

Tarifs € TTC en cas de fusion des contrats de concession

Évolution

Classe 1

8

6

-25%

Classe 2

17,2

9,4

-45%

Classe 3

38,6

16,7

-57%

Classe 4

64,7

28

-57%

Classe 5

5,6

3,6

-36%

Source : direction générale des infrastructures des transports et de la mer (DGITM)

La hausse annuelle des tarifs des péages du tunnel serait limitée à 70 % du taux d'inflation, contre une hausse actuellement égale à l'inflation pour les véhicules légers et égale à l'inflation + 1 % pour les poids lourds.

En échange de la fusion des contrats de concession, la société APRR accepterait également de prendre entièrement à sa charge les 35 millions d'euros 438 ( * ) que les collectivités publiques s'étaient engagées à verser au titre du financement des travaux de mise aux normes du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines 439 ( * ) , ce qui conduirait à :

- annuler la part de la subvention publique non versée à ce jour par certaines collectivités territoriales (5,1 millions d'euros 440 ( * ) non versés par la région Lorraine, le département des Vosges et le département du Haut-Rhin, soit un total de 15,3 millions d'euros valeur 2009) ;

- rembourser la part de la subvention publique déjà versée par des personnes publiques (5,1 millions d'euros à la région Alsace et 20,4 millions d'euros à l'État.

Répartition entre l'État et les collectivités territoriales de la subvention publique de 35 millions d'euros prévue dans l'avenant au contrat de concession de mai 2009

Subvention prévue

Valeur juillet 2000

Subvention prévue

Valeur 2009

Subvention effectivement versée

Valeur 2009

État français

17,5 M€

20,4 M€

20,4 M€

Région Alsace

4,375 M€

5,1 M€

5,1 M€

Département du Haut-Rhin

4,375 M€

5,1 M€

0 M€

Région Lorraine

4,375 M€

5,1 M€

0 M€

Département des Vosges

4,375 M€

5,1 M€

0 M€

Source : direction générale des infrastructures des transports et de la mer (DGITM)

Dans le même temps, la société APRR s'engagerait également à participer au financement :

- des travaux d'aménagement de la route nationale 159, qui constitue la voie d'accès au tunnel Maurice-Lemaire, par la construction de la déviation de Châtenois, pour un montant de 30 millions d'euros ;

- de la signalisation pour l'accès au tunnel Maurice-Lemaire et pour les interdictions de circulation des poids-lourds dans les cols vosgiens, pour un montant de 500 000 euros.

Participation d'APRR au financement des travaux d'aménagement de la route nationale 159 et de la signalisation pour l'accès au tunnel et les interdictions de circulation des poids-lourds

L'État réalisera, sous maîtrise d'ouvrage publique, des travaux d'aménagement de la route nationale 159 au droit de Châtenois. La société APRR participera au financement de ces travaux à hauteur de 30 millions d'euros, soit de l'ordre de 50 % du coût des travaux, par la voie d'un fonds de concours. Il s'agit en effet de travaux en dehors du périmètre de la concession d'APRR mais qui présentent un lien fonctionnel très étroit avec la concession dans la mesure où la route nationale 159 constitue la voie d'accès au tunnel Maurice-Lemaire du côté alsacien. La déviation de Châtenois constitue à cet égard un goulet d'étranglement de l'itinéraire sur lequel se situe le tunnel. La portion de la route nationale 159 faisant l'objet des travaux d'aménagement financés par fonds de concours ne sera pas intégrée à la concession d'APRR après fusion des deux conventions.

Compte tenu du montant total des travaux envisagés (environ 60 millions d'euros), leur réalisation a vocation à faire l'objet d'une mise en concurrence. La dévolution des travaux par les autorités publiques compétentes respecteront les procédures de mise en concurrence prévues par le droit communautaire, notamment la directive CE/2004/18, et le droit français.

Par ailleurs, la signalisation pour l'accès au tunnel Maurice-Lemaire et les interdictions de circulation des poids lourds dans les cols vosgiens sera principalement à la charge de l'État et des collectivités territoriales intéressées, en leur qualité de gestionnaire de la voirie et d'autorités de police. La société APRR participera au financement de cette signalisation à hauteur de 500 000 euros par la voie d'un fonds de concours. Il s'agit également de charges financières en dehors du périmètre de la concession d'APRR mais qui présentent également un lien fonctionnel très étroit avec la concession.

Source : DGITM

Le projet de fusion des deux contrats de concession a été soumis en juillet 2015 pour avis à la Commission européenne au titre du régime sur les aides d'État, car il emporte des modifications sur le contrat principal d'APRR, en particulier sur sa durée qui court actuellement jusqu'au 31 janvier 2035. Le dossier de notification déposé par les autorités françaises est toujours en cours d'examen par la Commission européenne.

B. UNE MESURE QUI DÉROGE AU DROIT COMMUN DU CODE DE LA VOIRIE ROUTIÈRE

Le code de la voirie routière distingue :

- les concessions d'ouvrages d'art, dont relève le tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines. Elles sont régies par les dispositions de l'article L. 153-1 du code de la voirie routière, qui impose que les péages perçus pour l'usage des ouvrages d'art soient affectés à leur financement ;

- les concessions d'autoroutes, dont relève la concession autoroutière d'APRR. Elles sont régies par l'article L. 122-4 du code de la voirie routière, qui impose l'affectation des péages autoroutiers au financement de la construction, de l'exploitation et de l'entretien des autoroutes concédées.

L'article 20 quinquies prévoit l'intégration du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines à l'assiette de la concession autoroutière d'APRR. De ce fait, il n'y aura plus de distinction entre les péages relevant du tunnel et ceux relevant des autoroutes concédées à APRR, ce qui contredit mes dispositions des articles L. 153-1 et L. 122-4 du code de la voirie routière.

Une mesure législative spécifique, portée par le présent article, est donc nécessaire pour déroger aux dispositions desdits articles.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Ainsi que le prévoit la rédaction actuelle de l'article 20 quinquies , « l'allongement de la durée de cette concession [la concession autoroutière de la société APRR à laquelle serait intégrée le tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines] est destinée à assurer la couverture totale ou partielle des dépenses de toute nature liées à la construction, à l'exploitation et à l'entretien du tunnel et de ses voies d'accès ou de dégagement ainsi que la rémunération et l'amortissement des capitaux investis par le délégataire ».

Dans le même temps, Valérie Rabault, rapporteur générale de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a estimé, lors de l'examen en séance publique de l'amendement dont est issu le présent article, qu'il était nécessaire, au-delà de la prise en charge de certains investissements, de « s'assurer que le montant perçu par la société concessionnaire [via l'allongement de dix mois de la durée du contrat de concession résultant de la fusion du contrat de concession du tunnel et du contrat de concession autoroutier ] est bien celui résultant de la baisse des tarifs, autrement dit que la disposition proposée ne provoque pas son enrichissement ».

Votre rapporteur général a pu prendre connaissance d'une étude de la direction générale des infrastructures des transports et de la mer (DGITM) qui expose avec précision l'équilibre financier résultant de la fusion des deux contrats de concession d'APRR.

Selon la DGITM, « la méthodologie retenue [pour calculer l'allongement de la concession fusionnée] repose sur un principe de strict équilibre entre les pertes de recettes nettes et les charges financières supplémentaires imposées à la société APRR d'une part et la durée d'allongement de la concession fusionnée accordée à la société APRR d'autre part ».

En vertu de cette fusion, la société APRR devra consentir des pertes de recettes nettes en raison de la baisse des tarifs des péages du tunnel et du raccourcissement de la durée d'exploitation du tunnel, qui prendrait fin en 2035 et non plus en 2068.

Elle devra en outre supporter les charges suivantes :

- l'annulation de la part non versée de la contribution publique aux travaux de rénovation du tunnel et le remboursement de la part de la contribution publique qui avait été payée ;

- la participation au financement des travaux d'aménagement de la route nationale 159 par la construction de la déviation de Châtenois, pour un montant de 30 millions d'euros,

- la participation aux frais de signalisation pour l'accès au tunnel Maurice-Lemaire et pour les interdictions de circulation des poids-lourds dans les cols vosgiens, pour un montant de 500 000 euros

Ainsi que l'a expliqué la DGITM à votre rapporteur général, « la détermination du poids des charges nouvelles (pertes de recettes nettes et charges financières supplémentaires) et la valorisation des plans d'affaires de concessions reposent sur la comparaison des flux de trésorerie prévisibles en situation initiale et ceux issus de la situation résultant de la fusion des contrats de concession. Cette méthode, dite des « discounted cash flows » ou DCF, fait consensus et est usuellement utilisée par les analystes financiers » .

En se fondant sur des hypothèses chiffrées (évolutions du trafic, élasticité du trafic au niveau des péages, etc.) que votre rapporteur général n'entend pas remettre en cause, la DGITM est parvenue à la conclusion qu'un allongement de la concession fusionnée de 10 mois, avec une fin au 30 novembre 2035 au lieu du 1 er janvier 2035, permettrait de compenser l'intégralité des charges nouvelles supportées par APRR sans pour autant conduire à son enrichissement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

D. - Autres dispositions
ARTICLE 21 (Art. L. 241-2, L. 241-6, L. 542-3 du code de la sécurité sociale, art. L. 351-6 et L. 351-8 du code de la construction et de l'habitation, art. L. 314-1, L. 361-1, L. 471-5 et L. 472-3 du code de l'action sociale et des familles, art. 9 de l'ordonnance n° 2012-785 du 31 mai 2012 portant extension et adaptation du code de l'action sociale et des familles au Département de Mayotte, art. 53 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013) - Relations financières entre l'État et la sécurité sociale

Commentaire : le présent article a pour objet de compenser à la sécurité sociale les pertes de recettes résultant de la poursuite de la mise en oeuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité et de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, en procédant au transfert vers l'État du financement de certaines prestations, dont les allocations de logement familiales et le dispositif de protection juridique des majeurs. Ces compensations représentent un coût total de 5,3 milliards d'euros pour le budget de l'État en 2016.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LA SÉCURITÉ SOCIALE

1. Des flux multiples, à la fois en recettes et en dépenses

Les relations financières entre l'État et la protection sociale 441 ( * ) recouvrent de multiples objets , qui entraînent, selon les cas, des flux de nature fiscale ou budgétaire, en particulier concernant la sécurité sociale :

- versement par l'État en tant qu'employeur de « cotisations » pour ses personnels ;

- participation au financement de prestations ou de politiques publiques gérées par la sécurité sociale ;

- compensation d'allègements de cotisations sociales ;

- affectations d'impôts ou de taxes venant compléter les recettes « naturelles » de la sécurité sociale que sont les cotisations.

Au total, les crédits du budget général de l'État à destination de la protection sociale atteignent près de 92,6 milliards d'euros en 2016 , soit 24 % de ses dépenses totales. À ceux-ci s'ajoutent 165 milliards d'euros de recettes fiscales affectées aux organismes de protection sociale. Ces flux sont recensés dans l'annexe au projet de loi de finances relative au « Bilan des relations financières entre l'État et la sécurité sociale ».

2. Le principe de compensation par l'État de toute mesure affectant les recettes ou les charges de la sécurité sociale

En vertu de l' article L. 131-7 du code de la sécurité sociale , l'État est dans l'obligation de compenser intégralement aux régimes de sécurité sociale concernés :

- toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisation sociale , « pendant toute la durée de leur application ». Cette règle concerne également toute mesure de réduction ou d'abattement d'assiette ;

- tout transfert de charges opéré entre l'État et les régimes et organismes de sécurité sociale.

Conformément au IV de l' article LO. 111-3 du même code, seules les lois de financement de la sécurité sociale peuvent déroger au principe général de compensation. Depuis 2005, dix-neuf mesures non compensées ont été introduites - par exemple les allègements relatifs aux emplois d'avenir - qui représentent une perte de recettes totale estimée à 3,8 milliards d'euros en 2015.

En outre, l'article L. 131-7 précité liste un certain nombre d' exceptions au principe général de compensation intégrale « à l'euro l'euro » , parmi lesquelles les allègements généraux de cotisations patronales de sécurité sociale mais aussi les principales mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité (en particulier la réduction de 1,8 point de cotisation d'allocations familiales existante et telle qu'étendue par l'article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et l'abattement d'assiette de contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S)) 442 ( * ) .

Ces mesures font pourtant bien l'objet d'une compensation par l'État mais celle-ci n'est pas effectuée « à l'euro l'euro » - en d'autres termes, aucune dette de l'État n'est constatée si la perte de recettes est supérieure à la prévision initiale - ce qui correspond à une dérogation au principe de compensation « de droit commun ».

3. Les différentes modalités de compensation utilisées

Les compensations de l'État aux organismes de sécurité sociale prennent généralement l'une des trois formes suivantes :

- l'affectation d'un « panier » de recettes fiscales . Il s'agit de la modalité la plus largement utilisée par le passé, notamment pour les allègements généraux de cotisations sociales en faveur des bas salaires qui représentent environ 21 milliards d'euros en 2015. Les recettes fiscales affectées sont réparties entre branches selon des clefs définies par arrêté. Toutefois, les dynamiques propres à chacune des taxes peuvent induire des évolutions différentes des recettes affectées et ne reflètent donc pas nécessairement la dynamique des exonérations ;

- l'affectation de fractions de TVA nette . Afin de limiter le nombre de recettes « partagées » entre l'État et la sécurité sociale, depuis plusieurs années l'affectation de fractions de TVA nette est privilégiée à celle de « paniers » de différentes recettes. En 2015, une fraction de 7,10 % de TVA nette a été affectée par l'État à la sécurité sociale, soit environ 11,1 milliards d'euros ;

- le versement de dotations budgétaires . Par exemple, la loi de finances initiale pour 2015 a prévu de compenser les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires dans les très petites entreprises par des crédits budgétaires, inscrits sur la mission « Travail et emploi » (515,6 millions d'euros) et non plus par l'affectation d'une fraction de TVA nette. La compensation par dotations budgétaires à l'euro près tend à devenir le mode de compensation « de droit commun » pour les dispositifs d'exonération ciblés sur certains publics, secteurs économiques ou géographiques.

Enfin, l' article L. 139-2 du code de la sécurité sociale énonce un principe de neutralité des flux financiers entre l'État et la sécurité sociale. Afin de ne pas avoir d'impact négatif sur la trésorerie des régimes obligatoires de base, les conventions entre l'État et ces derniers ne peuvent prévoir une périodicité supérieure à dix jours pour le versement des sommes dues par l'État.

Fin 2014, l'État présentait néanmoins une dette nette de 368 millions d'euros vis-à-vis de la sécurité sociale (contre 249 millions d'euros fin 2013).

B. LA COMPENSATION DE LA PREMIÈRE PHASE DE MISE EN oeUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ EN 2015

La loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) pour 2014 a mis en oeuvre plusieurs mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité , entraînant des pertes de recettes significatives pour la sécurité sociale en 2015, dont :

- le renforcement des allègements généraux de cotisations patronales de sécurité sociale à travers la mise en place d'un dispositif « zéro charges au niveau du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) » et d'un taux réduit de cotisation d'allocations familiales (3,45 % au lieu de 5,25 %) pour les rémunérations comprises entre 1 fois et 1,6 fois le SMIC. Le coût de ces deux mesures est estimé à 4,3 milliards d'euros en 2015 et 4,55 milliards d'euros en 2016 ;

- la baisse du taux de cotisation d'allocations familiales de 1,8 point pour les travailleurs indépendants dont le revenu d'activité annuel est inférieur à l'équivalent de 3,8 fois le SMIC. Cette baisse représente une perte de recettes de 1 milliard d'euros en 2015 et en 2016 ;

- la création d'un abattement d'assiette de contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés ( C3S ), qui conduit à une perte de recette de 1 milliard d'euros en 2015 et en 2016.

Au total - compte tenu de la censure par le Conseil constitutionnel de la réduction dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale 443 ( * ) - les mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité entraînent une perte de recettes de 6,3 milliards d'euros en 2015 pour les organismes de sécurité sociale.

Compensation de la première phase de mise en oeuvre
du Pacte de responsabilité et de solidarité en 2015

(en milliards d'euros)

Mesures entraînant des pertes de recettes pour la sécurité sociale

Mesures de compensation

Allègements de cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC

- 4,30

Budgétisation des APL

+ 4,75

Baisse du taux de la cotisation d'allocations familiales pour les travailleurs indépendants

- 1,00

Affectation des recettes des caisses de congés

+ 1,52

Abattement d'assiette de C3S

- 1,00

Majoration de 0,02 % de la fraction de TVA

+ 0,03

TOTAL

- 6,30

TOTAL

+ 6,30

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances pour 2015 et de l'étude d'impact annexée au projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014)

Ces pertes de recettes ont été compensées par les lois de finances et de financement de la sécurité sociale initiales pour 2015 grâce aux trois mesures suivantes :

- le transfert vers l'État de la part de l'aide personnalisée au logement (APL) financée par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) 444 ( * ) , soit une moindre dépense de 4,75 milliards d'euros pour la branche famille de la sécurité sociale ;

- la retenue à la source des cotisations et contributions sociales sur les indemnités versées par les caisses de congés payés 445 ( * ) . Conduisant à un versement anticipé de cotisations et contributions, cette mesure a un impact positif sur la trésorerie du régime général de sécurité sociale estimé à 1,52 milliard d'euros en 2015 et à 500 millions d'euros en 2016 ;

- et enfin, la majoration de 0,02 % de la fraction de TVA affectée au régime général (30 millions d'euros).

C. L'INTRODUCTION DE NOUVELLES EXONÉRATIONS PAR LA LOI POUR LA CROISSANCE ET L'ACTIVITÉ

Au-delà des allègements de prélèvements obligatoires en faveur des entreprises prévus par le Pacte de responsabilité et de solidarité, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a introduit deux mesures ayant un impact négatif de 193 millions d'euros sur les recettes de la sécurité sociale en 2016.

En premier lieu, l' article 135 de la loi précitée a assoupli les conditions d'attribution des actions gratuites et à mis en place un régime fiscal et social plus favorable. La contribution patronale spécifique a ainsi été abaissée de 30 % à 20 % tandis que la contribution salariale de 10 % a été supprimée.

En second lieu, l' article 149 de la même loi a diminué de 20 % à 16 % le taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) orienté vers le financement de l'économie.

Conformément aux articles L. 131-7 et LO. 111-3 du code de la sécurité sociale ces mesures, en ce qu'elles entraînent une perte de recettes pour la sécurité sociale, doivent être obligatoirement compensées par l'État.

D. LE FINANCEMENT ÉCLATÉ DU DISPOSITIF DE PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS

En vertu de l' article 425 du code civil , lorsque les facultés d'une personne majeure sont altérées par une maladie, un handicap ou à la suite d'un accident, le juge peut décider d'une mesure de protection juridique afin de l'aider à protéger et défendre des intérêts. Il existe trois types de mesures de protection juridique : la sauvegarde de justice, qui permet à un majeur d'être représenté pour accomplir certains actes pendant une période de courte durée, la curatelle, qui est prononcée lorsque la mesure de sauvegarde de justice est insuffisante pour certains majeurs ayant besoin d'être assistés dans certains actes de la vie civile et la tutelle, lorsque l'incapacité du majeur est totale.

En principe, une mesure de protection juridique est gratuite lorsqu'elle est assurée par un membre de l'entourage de la personne protégée. Toutefois, lorsque cette mesure est confiée à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (52 % des cas), la personne protégée doit participer au financement de la rémunération du mandataire en fonction de ses revenus (article L. 471-5 du code de l'action sociale et des familles). Le niveau de cette participation est fixé par le juge, en fonction d'un barème progressif par tranche de revenu. Compte tenu du faible niveau de ressources de la grande majorité des majeurs protégés 446 ( * ) , il est souvent fait appel à une administration publique pour prendre en charge tout ou partie des mesures de protection .

Selon la mesure prononcée et la perception ou non par la personne protégée d'une prestation sociale, l'État, le département ou certains organismes de sécurité sociale peuvent intervenir. Le financement de la mesure de protection revient en principe à l'organisme public qui verse à la personne la prestation au montant le plus élevé. Ce financement est par conséquent éclaté et peu lisible : un même mandataire judiciaire exerçant plusieurs mesures de protection peut être rémunéré par huit types de financeurs publics différents.

Au total, les crédits publics relatifs à la prise en charge des mesures de protection juridique des majeurs représentaient 589 millions d'euros en 2013 447 ( * ) , dont 225 millions d'euros provenant du programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du budget de l'État , au titre du financement des services mandataires et des mandataires individuels  et 344 millions d'euros par les organismes de sécurité sociale (en grande majorité par les caisses d'allocations familiales (CAF)). En 2015, la participation de l'État s'élève à 241 millions d'euros. La participation des départements tend quant à elle à diminuer : elle est passée de près de 3 millions d'euros à 1,7 million d'euros en 2014.

Dans l'ensemble, les dépenses liées à la protection juridique des majeurs sont dynamiques : elles ont progressé de 14 % entre 2009 et 2013 448 ( * )

Répartition du financement des mesures de protection des majeurs

Financeur

Nature de la mesure et revenus perçus par la personne protégée

État

1- Personnes sous tutelle, curatelle, mandat spécial ne percevant aucune prestation sociale ou une prestation sociale non listée.

2- Personnes sous tutelle, curatelle, mandat spécial percevant une prestation sociale relevant du conseil départemental : APA*, PCH*, RSA*.

Départements

Personnes sous mesure d'accompagnement judiciaire percevant l'APA (perçue directement par la personne), la PCH ou le RSA.

Caisses d'allocations familiales (CAF)

Quelle que soit la durée, personnes percevant directement l'AAH*, l'ALS* ou l'APL*.

Caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT)

Quelle que soit la mesure, personnes percevant l'ASPA ou le minimum vieillesse et personnes ayant plus de 60 ans et percevant l'ASI.

Caisses primaire d'assurance maladie (CPAM)

Quelle que soit la mesure, personnes ayant moins de 60 ans et percevant l'ASI.

Mutualité sociale agricole (MSA)

Quelle que soit la mesure, personnes affiliées au régime agricole et percevant une des prestations sociales listées.

Services de l'ASPA*

Quelle que soit la mesure, personnes percevant l'ASPA ou le minimum vieillesse.

Régimes spéciaux

Quelle que soit la mesure, personnes percevant l'ASPA ou l'ASI et relevant de régimes spéciaux.

* APA : aide personnalisée d'autonomie ; PCH : prestation de compensation du handicap ; RSA : revenu de solidarité active ; AAH : allocation adulte handicapé ; ALS : allocation de logement social ; APL : aide personnalisée au logement ; ASPA : allocation de solidarité aux personnes âgées ; ASI : allocation supplémentaire d'invalidité.

Source : évaluation préalable annexée au projet de loi de finances pour 2016

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article prévoit, à titre principal, le transfert de la sécurité sociale vers l'État du financement d'un ensemble de prestations et aides sociales afin de compenser les pertes de recettes résultant des mesures suivantes :

- la deuxième phase de mise en oeuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité , soit un coût total de près de 4,1 milliards d'euros . L'article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 prévoit en effet l'extension jusqu'à 3,5 SMIC de la réduction de 1,8 point de cotisation d'allocations familiales à compter du 1 er avril 2016 (perte de recettes estimée à 3,1 milliards d'euros), tandis que l'article 7 procède à une nouvelle hausse de l'abattement d'assiette de C3S (de 3,25 millions d'euros à 19 millions d'euros) ce qui représente une perte de recettes de 1 milliard d'euros ;

- la baisse du « rendement » de la mesure de prélèvement à la source des cotisations des caisses de congés payés . Comme indiqué ci-avant, l'effet positif sur la trésorerie du régime général ne devrait être que de 500 millions d'euros en 2016, alors même qu'il représentait à 1,5 milliard d'euros en 2015 ;

- les diminutions de taux de contribution sur les actions gratuites et de forfait social prévues par la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (cf. supra ).

A. LE TRANSFERT DU FINANCEMENT DE L'ALLOCATION DE LOGEMENT FAMILIALE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE VERS L'ETAT

La principale modalité de compensation des pertes de recettes entraînées par la deuxième phase du Pacte de responsabilité et de solidarité consiste en un transfert de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) vers l'État de la totalité du financement de l'allocation de logement familiale (ALF), soit un montant de 4,7 milliards d'euros (frais de gestion inclus). Pour mémoire, l'ALF constitue l'un des trois types d'aides personnelles au logement et concerne les ménages ayant des enfants ou des personnes à charge qui n'entrent pas dans le champ d'application de l'aide personnalisée au logement (APL). Après le transfert du financement de la part des APL auparavant financée par la branche famille en 2015, cette deuxième « étape » de budgétisation des aides personnelles au logement conduit à exclure désormais la CNAF du financement de ces aides même si elle en reste gestionnaire.

Le financement des aides personnelles au logement

(en milliards d'euros)

Prestation

2012

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Allocation logement familiale (ALF)

4,2

4,4

4,4

4,5

4,6

Aide personnalisée au logement (APL)

7,4

7,8

8,0

8,3

8,6

Allocation logement sociale (ALS)

5,1

5,3

5,3

5,3

5,4

TOTAL

16,8

17,4

17,7

18,1

18,5

Dont aides financées par la CNAF

8,5

8,8

9,0

4,5

0

Dont aides financées par l'État

8,3

8,6

8,7

13,6

18,5

Source : rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2015 et évaluation préalable annexée au projet de loi de finances pour 2016

Tout d'abord, le du I du présent article modifie l' article L. 241-6 du code de la sécurité sociale afin de supprimer le principe du financement de l'ALF par des cotisations et contributions centralisées par la CNAF. La nouvelle rédaction de l'article L. 542-3 du même code ( du I du présent article) énonce que le fonds national d'aide au logement (FNAL), dont la subvention d'équilibre est versée par l'État, finance désormais l'ensemble des « allocations de logement » et des primes de déménagement auparavant prises en charge par la branche famille de chaque régime.

Ensuite, il est procédé à des modifications du code de la construction et de l'habitation ( II ) afin de prévoir le financement de l'ALF par le FNAL :

- l' article L. 351-6 du code précité liste les dépenses financées par le FNAL, parmi lesquelles l'APL, l'ALF, l'allocation de logement social (ALS) - y compris leurs frais de gestion par les caisses d'allocations familiales (CAF) - et les dépenses du conseil national de l'habitat ;

- l' article L. 351-8 du même code prévoit la liquidation et le paiement des différentes aides personnelles au logement par la CNAF et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, pour le compte du FNAL . Alors même que le financeur change, les modalités de gestion et de versement de l'ALF demeurent identiques.

Le principe selon lequel « l'État assure l'équilibre des recettes et des dépenses du fonds national d'aide au logement », fixé par l'article L. 351-7 du code précité n'est pas modifié.

Par conséquent, les crédits du programme 109 « Aide à l'accès au logement » de la mission « Égalité des territoires et logement » sont majorés de 4,7 milliards d'euros pour l'année 2016, ce qui correspond à la somme du coût de l'ALF en 2016 (4,6 milliards d'euros) et des frais de gestion afférents (2 % de la somme des prestations, soit 92 millions d'euros).

B. LA RÉFORME DES MODALITÉS DE FINANCEMENT DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS

Le III du présent article modifie le code de l'action sociale et des familles afin de prévoir la prise en charge par l'État de l'intégralité du financement des mandataires judiciaires à la protection des majeurs , à l'exception d'une quote-part de 0,3 % demeurant financée par les départements.

Le I de l' article L. 361-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié (2°-III) en vue de supprimer la liste des différents financeurs et de fixer le principe selon lequel les mesures de protection juridique des majeurs sont financées par une dotation globale « à la charge du département du lieu d'implantation du siège de l'organisme gestionnaire du service pour 0,3 % de son montant et de l'État pour le solde ». Les compétences du département en matière de protection juridique des majeurs demeurent inchangées, tout comme le niveau de leur participation.

Par ailleurs, le du III , modifiant l'article L. 471-5 du code précité, autorise un transfert d'informations des organismes de sécurité sociale vers les services de l'État chargés de l'instruction des demandes de financement des mesures de protection juridique des majeurs 449 ( * ) afin de permettre à ces services de vérifier les conditions de ressources relatives à la participation des majeurs protégés.

Enfin, le IV du présent article prévoit la mise en oeuvre de la réforme proposée à Mayotte.

Cette mesure entraîne un transfert de charge de 390 millions d'euros de la sécurité sociale vers le programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du budget de l'État . Par ailleurs, la quote-part de 0,3 % de la dotation globale correspond à la contribution des départements observée en 2014, soit 1,66 million d'euros.

C. LES AUTRES TRANSFERTS FINANCIERS PRÉVUS

1. Le financement par l'État de l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens travailleurs migrants (ARFS)

L'article L. 117-3 du code de l'action sociale et des familles, introduit par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, prévoit la création d'une aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants (ARFS) dans leur pays d'origine.

Cette aide - destinée en particulier aux « Chibanis » arrivés en France dans les années 1970 - est ouverte aux étrangers en situation régulière âgés de plus de 65 ans, disposant de faibles ressources et vivant seuls en résidence sociale ou foyer de travailleurs migrants afin de leur permettre d'effectuer des séjours de longue durée dans leur pays d'origine et de réaliser ainsi un rapprochement familial sans perdre le droit à toute prestation. Le décret mettant en oeuvre cette aide a été publié le 8 octobre 2015 450 ( * ) .

Le financement de cette nouvelle prestation par l'État - à hauteur de 60 millions d'euros en 2016 - est comptabilisé parmi les mesures de compensation au profit de la sécurité sociale. L'évaluation préalable du présent article indique que « la prise en compte de l'impact du projet de décret relatif à l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens travailleurs migrants (...) permet d'assurer la neutralité de la création de cette prestation pour les finances publiques ». En effet, l'ARFS viendra remplacer l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) actuellement versée à ces personnes par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), en dépit du fait qu'ils ne remplissent pas de façon continue le critère de résidence.

L'ARFS sera financée à partir du programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » .

2. La reprise par l'État du financement des emplois de la fonction publique hospitalière mis à disposition de la direction générale de l'offre de soins (DGOS)

Afin de compléter les mesures de compensation au profit de la sécurité sociale, il est également prévu de transférer vers le programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du budget de l'État, le financement des emplois de titulaires de la fonction publique hospitalière et des contrats à durée indéterminée actuellement mis à la disposition de la DGOS et financés par l'assurance maladie.

Ce transfert représente 5 millions d'euros pour l'année 2016.

3. La compensation par des crédits budgétaires de la déduction forfaitaire en faveur des particuliers employeurs

Afin d'unifier les modalités de compensation au profit de la sécurité sociale des exonérations ciblées de cotisations sociales, le V du présent article abroge le III de l'article 53 de la loi de finances initiale pour 2013 451 ( * ) qui prévoyait de compenser les pertes de recettes résultant de la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs par l'affectation d'une fraction de TVA nette à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

Cette compensation sera désormais assurée par des crédits budgétaires du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » de la mission « Travail et emploi », pour un montant de 224 millions d'euros en 2016 .

4. L'ajustement de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale

Le du I du présent article augmente la fraction de TVA nette affectée par l'État à la sécurité sociale de 7,10 % à 7,19 % par l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale.

Cet ajustement correspond à un montant de 142 millions d'euros supplémentaires transférés vers la sécurité sociale et permet de compléter l'ensemble des mesures de compensation par budgétisation prévues par le présent article.

*

Tableau récapitulatif des mesures de compensation prévues en 2016

(en milliards d'euros)

Mesures entraînant des pertes de recettes pour la sécurité sociale

Mesures de compensation

Allègements de cotisations d'allocations familiales jusqu'à 3,5 SMIC (PLFSS 2016)

- 3,075

Budgétisation de l'ALF

+ 4,691

Nouvel abattement d'assiette de C3S (PLFSS 2016)

- 1,020

Budgétisation de la protection juridique des majeurs

+ 0,390

Mesures de la loi pour la croissance et l'activité (forfait social et attribution d'actions gratuites)

- 0,193

Budgétisation de l'ARFS

+ 0,060

Baisse du rendement de la retenue à la source des cotisations des caisses de congés payés (LFSS 2015)

- 1,000

Budgétisation des emplois mis à la disposition de la DGOS

+ 0,005

Majoration de la fraction de TVA nette

+ 0,142

TOTAL

- 5,288

TOTAL

+ 5,288

Source : évaluation préalable du présent article annexée au projet de loi de finances pour 2016

Au total, l'ensemble des mesures de compensation prévues en 2016 se traduit par un impact négatif de 5,3 milliards d'euros sur le solde du budget de l'État , dont 5,15 milliards d'euros de nouvelles dépenses et 142 millions d'euros de pertes de recettes .

Elles entraînent ainsi des modifications de périmètre des missions « Égalité des territoires et logement », « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Travail et emploi » du budget de l'État.

Schéma des nouveaux transferts entre l'État et la sécurité sociale en 2016

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'évaluation préalable du présent article annexée au projet de loi de finances pour 2016)

*

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. L'UNIFICATION BIENVENUE DU FINANCEMENT DES AIDES AU LOGEMENT

La compensation des deux premières phases de mise en oeuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité par la budgétisation de la part des APL auparavant financée par la CNAF et de l'ALF présente l'avantage d'unifier le financement de l'ensemble des aides au logement, soit 18,5 milliards d'euros prévus en 2016.

Cette unification apparaît bénéfique du point de vue du pilotage budgétaire de la mission « Egalite des territoires et logement », les prévisions de dépenses du FNAL étant jusqu'ici très difficiles compte tenu de la dualité des financeurs.

De plus, le regroupement proposé au sein du budget de l'État devrait faciliter la mise en oeuvre et le suivi d'éventuelles réformes , telle que celle proposée par l'article 55 du présent projet de loi.

B. UNE COMPENSATION INTÉGRALE EN 2016 MAIS INCERTAINE À MOYEN TERME

Selon les prévisions des présents projets de lois de finances et de financement, la compensation des pertes de recettes pour la sécurité sociale serait garantie pour l'année 2016 . Le transfert de dépenses relativement dynamiques telles que l'APL et l'ALF (+ 2,9 % pour la première et + 1,6 % pour la seconde en 2014) au budget de l'État semble a priori plus satisfaisant pour la sécurité sociale que l'affectation de recettes fiscales qui progressent généralement moins rapidement que les cotisations sociales.

Toutefois, si la masse salariale retrouve son niveau d'évolution d'avant la crise (+ 3,1 % prévu en 2017 et + 3,7 % en 2018), conduisant ainsi à augmenter le « coût » des exonérations de cotisations sociales, un  manque à gagner pour la sécurité sociale pourrait apparaître.

Surtout, les mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité et des allègements décidés dans le cadre de la loi pour la croissance et l'activité dérogent au principe de compensation « à l'euro l'euro » , prévu par l'article L 131-7 du code de la sécurité sociale 452 ( * ) . La compensation est ainsi effectuée par un transfert pérenne de charges et de recettes, qui ne devra pas être réexaminé au vu des pertes de recettes effectivement constatées, contrairement aux exonérations ciblées de cotisations sociales compensées par crédits budgétaires.

Enfin, se pose la question de la juste compensation pour chacune des branches de la sécurité sociale . Selon le rapport présenté à la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2015, les réaffectations internes de recettes effectuées en 2015 à la suite des transferts entre l'État et la sécurité sociale 453 ( * ) se sont traduites par un bilan net négatif pour la CNAMTS (- 370 millions d'euros) et un résultat positif pour la CNAF (+ 230 millions d'euros) et le fonds de solidarité vieillesse (FSV ; + 1,15 milliard d'euros). Pour l'année 2016, les réaffectations internes entre branches de la sécurité sociale prévues par l 'article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale devraient permettre de neutraliser l'impact des différents transferts sur le solde de chaque régime et organisme concerné. Compte tenu de la complexité de cette opération, il apparaît néanmoins extrêmement difficile de vérifier cette affirmation.

C. 5 MILLIARDS D'EUROS DE NOUVELLES COMPENSATIONS À PRÉVOIR EN 2017

D'après les engagements du Gouvernement, la mise en oeuvre de la troisième phase du Pacte de responsabilité et de solidarité devrait se traduire par la suppression totale de la C3S en 2017 . Celui-ci entraînerait une perte de recettes de près de 3,5 milliards d'euros pour la sécurité sociale en 2017, que le Gouvernement s'est engagé à compenser.

De plus, l'extinction des effets positifs de la retenue à la source des cotisations des caisses de congés payés sur la trésorerie du régime général 454 ( * ) , d'une part, et l'effet en année pleine de la baisse du taux de cotisation d'allocations familiales jusqu'à 3,5 SMIC d'autre part, nécessiteraient pour l'État de compenser 1,5 milliard d'euros supplémentaires .

Sous réserve que le Gouvernement respecte son engagement de supprimer en totalité la C3S, c'est au total 5 milliards d'euros de nouvelles compensations qui devront en principe être trouvés en 2017 .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21 bis (nouveau) (Art. L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques) - Extension de la décote applicable aux cessions immobilières de l'État en faveur du logement social

Commentaire : le présent article vise à étendre la possibilité d'une décote sur les cessions immobilières de l'État à l'ensemble des programmes de logement, et non plus aux seules opérations de construction.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 95 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a autorisé l'État à céder des terrains de son domaine privé à un prix inférieur à leur valeur vénale, lorsque ces terrains sont essentiellement destinés à la construction de logements, dont une partie au moins de logements sociaux . Le principe de la « décote » figure aujourd'hui à l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P).

Ces dispositions ont été modifiées par l'article 3 de la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement, dite « loi Duflot » , afin de préciser :

- que la décote peut s'appliquer aux terrains nus ou bâtis ;

- que « pour la part du programme destinée aux logements sociaux, la décote ainsi consentie, qui peut atteindre 100 % de la valeur vénale du terrain , est fixée en fonction de la catégorie à laquelle ces logements appartiennent. Elle prend notamment en considération les circonstances locales tenant à la situation du marché foncier et immobilier, à la situation financière de l'acquéreur du terrain, à la proportion et à la typologie des logements sociaux existant sur le territoire de la collectivité considérée et aux conditions financières et techniques de l'opération. » En d'autres termes, la cession peut aller jusqu'à la gratuité s'il s'agit de construire des logements sociaux. La décote ne peut excéder 50 % pour les logements financés en prêts locatifs sociaux et pour les logements en accession à la propriété.

Le même article introduit le principe d'une décote de droit lorsque les terrains sont cédés à une collectivité territoriale ; un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ; un établissement public foncier et d'aménagement de l'État ; un établissement public foncier local ; un organisme agréé exerçant des activités de maîtrise d'ouvrage d'opérations d'acquisition, de construction ou de réhabilitation de logements ou de structures d'hébergement en tant que propriétaire ou preneur de bail à construction, emphytéotique ou de bail à réhabilitation ; un organisme d'habitation à loyer modéré (HLM) ; une société d'économie mixte (SEM) ; un opérateur lié à une collectivité ou à un EPCI à fiscalité propre par une concession d'aménagement dont l'objet prévoit notamment la réalisation de logements sociaux.

Il faut cependant, pour bénéficier de la décote de droit, que les terrains figurent sur une liste de parcelles établie par le préfet de région , après avis, dans un délai de deux mois, du comité régional de l'habitat, du maire de la commune et du président de l'EPCI compétent. Cette liste, qui est mise à jour annuellement, peut être complétée, à la demande d'une des personnes morales mentionnées précédemment, sur présentation d'un projet s'inscrivant dans une stratégie de mobilisation du foncier destinée à satisfaire des besoins locaux en matière de logement.

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques précise enfin que « le bénéfice de la décote en faveur de la construction de logements sociaux s'applique également à la part du programme consacrée à la construction d'équipements publics destinés en tout ou partie aux occupants de ces logements ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté à l'initiative du Gouvernement avec l'avis favorable de la commission des finances, vise à étendre le principe de la décote à l'ensemble des programmes de logements , quelle que soit la nature des travaux à accomplir.

Concrètement, cet amendement aurait pour conséquence de permettre à des programmes de réhabilitation ou de rénovation , et non plus seulement de construction ou de restructuration lourde, de bénéficier de la décote prévue par L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

Pour mémoire, l'article 21 ter du présent projet de loi de finances vise quant à lui à supprimer le plafonnement à 30 % de la décote applicable aux cessions du ministère de la défense.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

À ce jour, les cessions « Duflot » présentent un bilan en demi-teinte : sur les quelques 250 biens cessibles identifiés par les préfets de régions, seulement 26 biens avaient été effectivement cédés au 8 octobre 2015 , pour une valeur vénale totale de 122 millions d'euros et un prix de cession de 47 millions d'euros, soit une décote de 61 % (75 millions d'euros). Ces opérations représentent la création de 3 779 logements, dont 2 889 logements sociaux 455 ( * ) .

Le présent article propose donc d'étendre le champ des opérations éligibles, au-delà des seules opérations de construction. D'après le secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, l'amendement vise à « étendre la décote (...) aux opérations de réhabilitation destinées à la création de logements sociaux ».

Pourtant, le décret n° 2013-315 du 15 avril 2013 456 ( * ) pris en application de la loi « Duflot » retient déjà une définition assez large de la notion de construction , puisqu'il précise que « les terrains bâtis mentionnés à l'alinéa précédent s'entendent de ceux dont les constructions existantes sont destinées à être démolies ou restructurées en vue de permettre la réalisation des programmes de construction ». De fait, plusieurs opérations déjà réalisées au titre des cessions « Duflot » correspondent à des opérations de restructuration plutôt que de construction stricto sensu . C'est par exemple le cas de deux opérations emblématiques : l'hôtel de police Castéja à Bordeaux (cédé 12 millions d'euros, avec 33 % de décote) ou encore la caserne Mellinet à Nantes (cédée 6 millions d'euros, soit 67 % de décote) 457 ( * ) .

À la demande de votre rapporteur général, le service France Domaine a d'ailleurs estimé que « les opérations citées (...) sont des opérations de réhabilitation lourde qui ont conduit à la création nette de logements . Elles entraient dans le champ de la loi telle qu'elle était applicable au moment où les décisions ont été prises. En conséquence, l'amendement relatif aux réhabilitations ne constitue pas une régularisation d'opérations réalisées, mais bien un élargissement du dispositif ».

Ainsi, le dispositif proposé consiste en une extension du champ de la décote, qui prenait déjà en compte les opérations de restructuration et non les seules opérations de construction neuve.

L'extension du champ des cessions « Duflot » à l'ensemble des programmes de logement devrait avoir un impact négatif sur les recettes du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » , même si l'effet prix (moindres produits du fait de l'élargissement de la décote) pourrait être en partie compensé par un effet volume (davantage de cessions).

À cet égard, et sans préjuger du bien-fondé de celle-ci, votre rapporteur général souligne que la politique de cessions décotées en faveur du logement social est étrangère à la vocation du compte d'affectation spéciale , qui est de moderniser le parc immobilier de l'État et de contribuer à son désendettement grâce aux recettes de cessions. Il conviendrait donc d'avoir recours à un mécanisme budgétaire permettant de distinguer ces deux finalités différentes, et le cas échéant contradictoires . Notre collègue Michel Bouvard, rapporteur spécial du compte d'affectation spéciale, avait par exemple, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, déposé un amendement visant à faire assumer par le budget général la charge budgétaire de la politique des cessions décotées en faveur du logement social . Concrètement, l'amendement proposait de minorer, d'un montant égal à la décote consentie, les dépenses immobilières affectées au ministère qui aura cédé les biens décotés.

En conclusion, votre rapporteur général ne s'oppose pas à l'extension du champ de la décote proposée par le présent article, pourvu que cette aide à la construction de logements sociaux soit bien identifiée comme telle, et qu'elle apparaisse notamment dans les crédits du budget général.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21 ter (nouveau) (Art. L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques) - Déplafonnement de la décote applicable aux cessions de terrains affectés au ministère de la défense

Commentaire : le présent article tend à supprimer le plafonnement de la décote applicable aux cessions, par le ministère de la défense, de terrains destinés à la réalisation de programmes de construction de logements sociaux.

I. LE DROIT EXISTANT

Le régime de la décote applicable en cas de vente par l'État de terrains destinés à la construction de logements sociaux , prévue à l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), est présenté dans le commentaire de l'article 21 bis du présent projet de loi.

Il est rappelé que la loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense est venue plafonner la décote à 30 % de la valeur vénale des terrains cédés lorsque ceux-ci sont « occupés par le ministère de la défense » .

Cette disposition est applicable jusqu'au 31 décembre 2019, soit le terme de la période de programmation militaire en cours.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de sa commission des finances et de sa commission des affaires économiques et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a introduit le présent article afin de supprimer le plafonnement de la décote prévue par L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques pour les terrains cédés par le ministère de la défense .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article revient sur une disposition de la loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 adoptée dans les mêmes termes par les deux assemblées .

En effet, alors qu'en première lecture le Sénat avait souhaité, à l'initiative de votre commission des finances et de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, exclure totalement les immeubles mis à la disposition du ministère de la défense du champ de la décote « Duflot », un accord avait été trouvé en commission mixte paritaire sur une solution de compromis, proposée par notre collègue Daniel Reiner, consistant en un plafonnement de la dite décote à 30 % de la valeur vénale des terrains cédés.

Ce plafonnement répond à la volonté de sécuriser les ressources du ministère de la défense, dont une part substantielle reste extrabudgétaire .

La programmation militaire actualisée prévoit ainsi la perception de de recettes exceptionnelles assurées pour 662,5 millions d'euros, selon les dernières estimations communiquées par le ministère de la défense à votre commission des finances, par la cession de biens immobiliers affectés au ministère de la défense.

Prévisions de cessions d'emprises immobilières du ministère de la défense
pour les années 2015 à 2019

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

TOTAL
2015-2019

PARIS

118,5

129

200

0

0

447,5

PROVINCE

50

48

49

48

20

215

TOTAL

168,5

177

249

48

20

662,5

Source : ministère de la défense

Comme le montre le tableau ci-dessus, 68 % des recettes attendues dépendent de la cession d'emprises parisiennes , en particulier l'îlot Saint-Germain situé dans le 7 e arrondissement qui a été libéré grâce au déménagement des services du ministère de la défense dans le nouveau site de Balard. L'enjeu est donc bien de s'assurer que ces emprises ne seront pas vendues dans des conditions qui remettraient en cause l'équilibre trouvé par la loi de programmation militaire actualisée.

Le plafonnement de la décote « Duflot » est dès lors une mesure de cohérence qui conditionne la sincérité de la programmation militaire.

Il faut également signaler que des dispositifs similaires prévoient déjà un tel plafonnement au profit d'établissements publics dont la situation financière rend peu opportune l'application de la décote .

Pour Réseau ferré de France (RFF), le taux de décote est ainsi plafonné par le décret n° 2013-936 du 18 octobre 2013 à 30 % de la valeur vénale des terrains cédés jusqu'au 31 décembre 2016.

De manière générale, le même décret soumet à l'avis conforme de l'établissement public concerné l'inscription d'un terrain sur la liste des parcelles auxquelles la décote de droit est applicable.

Des précautions similaires ont été prises pour ce qui concerne les établissements publics de santé que le décret n° 2014-1743 du 30 décembre 2014 a fait entrer dans le champ de la décote.

Ainsi, le taux de la décote est plafonné à 30 % de la valeur vénale du terrain cédé 458 ( * ) lorsque la situation financière de l'établissement public de santé présente un endettement répondant à l'un au moins des trois critères fixés par l'article D. 6145-70 du code de la santé publique. En outre, la décote n'est rendue applicable qu'après avis du directeur général de l'Agence régionale de santé et l'inscription d'un terrain appartenant au domaine privé d'un établissement public de santé sur les listes régionales de mobilisation du foncier public est subordonnée aux avis conformes de l'organe compétent de l'établissement public et du directeur général de l'Agence régionale de santé.

Par ailleurs, les terrains cédés par les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ne sont toujours pas entrés dans le champ de la décote.

Le souci légitime qu'a ainsi manifesté le Gouvernement de tenir compte des spécificités budgétaires de l'entité publique qui cède un terrain doit s'appliquer au ministère de la défense, en raison des conditions particulières de son financement par rapport aux autres ministères .

Il convient enfin de préciser que le ministère de la défense est, par ailleurs, déjà astreint à un devoir de solidarité spécifique envers les collectivités les plus touchées par les restructurations militaires . Celles-ci bénéficient en effet d'un dispositif de cession à l'euro symbolique des immeubles libérés par le ministère de la défense. Les modalités d'application de ce dispositif, qui a été reconduit jusqu'au 31 décembre 2019 par l'article 39 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, ne sont en rien modifiées par le plafonnement de la décote « Duflot ».

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 22 - Évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget de l'Union européenne

Commentaire : le présent article procède à l'évaluation pour 2016 de la contribution française au budget de l'Union européenne, estimée à 21,51 milliards d'euros.

Le présent article évalue, en 2016, la participation française au budget communautaire à 21,51 milliards d'euros , soit une augmentation assez marquée par rapport à celui voté pour 2015 (hausse de 767 millions d'euros, soit 3,7 %).

Cette participation prend, chaque année, la forme d'un prélèvement sur les recettes de l'État au profit du budget de l'Union européenne PSR-UE »), évalué en loi de finances initiale.

L'analyse détaillée de la contribution de la France ainsi que des enjeux du projet de budget de l'Union européenne pour 2016 et du cadre financier pluriannuel (CFP) 2014-2020 fait l'objet du fascicule 2 du tome II du présent rapport général établi par notre collègue François Marc 459 ( * ) . Pour approfondir les différents sujets évoqués ci-après, votre rapporteur général renvoie à ce rapport.

I. L'ÉVOLUTION DU PRÉLÈVEMENT OPÉRÉ SUR LES RECETTES DE L'ÉTAT AU TITRE DE LA PARTICIPATION DE LA FRANCE AU BUDGET DE L'UNION EUROPÉENNE

La contribution française au budget communautaire a connu des évolutions significatives affectant son montant et sa structure :

- entre 1982 et 2016, le montant en valeur de notre contribution a été multiplié par 5,5 puisque celle-ci est passée de 4,1 à 21,51 milliards d'euros ;

- l'importance respective des différentes ressources au sein du PSR-UE a fortement évolué, reflétant la part prépondérante prise par la ressource assise sur le revenu national brut des États parmi les différentes ressources du budget communautaire (ressource RNB). Alors que la ressource TVA constituait la principale composante du PSR-UE en 1995 (7,2 milliards d'euros et 60 % du total), c'est la contribution RNB qui en constitue l'essentiel en 2016, avec 17,2 milliards d'euros et 74 % du total, contre 13 % du total pour la ressource TVA.

Composition du PSR-UE de 1995 à 2016

(en pourcentage et en milliards d'euros)

N.B : les ressources propres traditionnelles (RPT) sont composées des droits de douane, des prélèvements agricoles et des cotisations sur le sucre.

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

II. LA FRANCE PRÉSENTE UN STATUT DE CONTRIBUTEUR NET QUI NE S'AMÉLIORE QU'EN APPARENCE

Deuxième contributeur au budget communautaire (16,3 % du total) et deuxième bénéficiaire des dépenses européennes , la France maintient son statut sur le dernier exercice disponible, soit 2014 (ces données reposent sur le rapport financier de la Commission pour 2014, ce rapport étant rendu public à la fin de l'année qui suit l'année d'exécution considérée. Il présente l'intérêt de récapituler la répartition des dépenses dans les États membres et de mesurer les soldes nets).

En 2014, il s'agit de 10,5 % de dépenses du budget de l'UE effectuées sur notre sol , soit 13,5 milliards d'euros . En 2011, ces données étaient respectivement de 11,2 % et 13,16 milliards d'euros ; en 2012 10,2 % et 12,89 milliards d'euros ; et en 2013 10,6 % et 14,24 milliards d'euros.

Ce statut de deuxième bénéficiaire tient essentiellement à l'importance des dépenses de la politique agricole commune en France, qui représentent cependant seulement 63 % du total des dépenses réparties sur notre territoire en 2014 (contre 68 % en 2013 et environ 75 % les années précédentes).

En 2014, la part de la France dans le total des dépenses agricoles de l'UE s'établit à 15,5 % , ce qui en fait le premier bénéficiaire en volume , maintenant une tendance établie depuis 2003. Cette part est cependant en baisse puisqu'elle représentait 16,6 % en 2013 et 19 % en 2009.

La même année, la France n'était que le vingtième bénéficiaire des dépenses de l'UE (dépenses administratives incluses) si l'on prend en compte les retours par habitant (205 euros par habitant), loin derrière le Luxembourg (3 118 euros par habitant). Votre rapporteur spécial souligne que notre pays était le quinzième bénéficiaire par habitant en 2008, ce qui témoigne du rythme de la dégradation des retours pour la France. De même, notre pays n'était, en 2014, que le onzième bénéficiaire de la PAC par habitant (130 euros par habitant, et elle était encore cinquième bénéficiaire en 2009), loin derrière l'Irlande, premier bénéficiaire (269 euros par habitant).

La différence positive entre notre contribution au budget communautaire et les dépenses de ce budget sur notre sol classe la France parmi les États membres « contributeurs nets ».

Ce statut s'était accentué jusqu'en 2013, années pendant lesquelles le solde net de la France s'était nettement dégradé . Alors qu'il représentait moins de 400 millions d'euros en 1999 , il avait été multiplié par plus de 20 .

Selon le dernier exercice disponible, notre situation ne se détériore plus au regard de notre solde net. Alors qu'il s'élevait à - 7,2 milliards d'euros en 2011, à - 9,1 milliards d'euros en 2012 et à - 9,4 milliards d'euros en 2013 , le solde net de notre pays représentait ainsi 7,9 milliards d'euros en 2014 .

Évolution du solde net français depuis 1998
(méthode « rabais britannique »)

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

Toutefois, cette amélioration de notre solde net n'est qu'apparente et ne révèle aucune tendance de fond. En effet, deux facteurs purement conjoncturels expliquent cette inflexion :

- les contributions des États membres ne prennent pas en compte, en 2014, les rabais et corrections , à l'exception du chèque britannique. En effet, ces corrections prévues par la DRP du 7 juin 2007 ne s'appliquent plus à compter de 2014 dans l'attente de l'entrée en vigueur de la nouvelle DRP, qui devrait intervenir en 2016 avec effet rétroactif au 1 er janvier 2014 comme indiqué précédemment. Les corrections et rabais instaurés par cette DRP et dus au titre de 2014 et 2015 n'auront un impact que sur les contributions nationales 2016 ;

- le budget 2014 est inférieur à celui de 2013 et la France bénéficiant d'un solde net négatif, toute diminution du niveau de dépenses améliore son solde net .

En 2014, la France était le deuxième contributeur net au budget communautaire en volume (derrière l'Allemagne) et le sixième contributeur net en pourcentage du RNB . Les autres contributeurs nets sont l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie, les Pays-Bas, la Suède, l'Autriche, le Danemark et la Finlande. Les tableaux de la page suivante font le point sur cette situation.

Les soldes nets des 28 en 2014 (méthode « rabais britannique »)

(en milliards d'euros et en pourcentage du RNB)

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2016

En dépit de ces éléments, votre rapporteur général juge nécessaire pour la France de tenir ses engagements européen s et il se déclare donc favorable à l'adoption du présent article .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES A L'ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
ARTICLE 23 - Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d'autorisation des emplois

Commentaire : le présent article fixe l'équilibre général du budget, détermine les ressources et les charges de trésorerie concourant à la réalisation de l'équilibre financier, autorise l'emprunt, arrête le plafond des emplois rémunérés par l'État et affecte les éventuels surplus de recettes à la résorption du déficit budgétaire.

L'article d'équilibre comprend, en application de l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001, quatre composantes principales , analysées en détail dans le tome I du présent rapport :

1) il « arrête les données générales de l'équilibre budgétaire, présentées dans un tableau d'équilibre » ;

2) il « comporte les autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l'État » et « évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à l'équilibre financier, présentées dans un tableau de financement » ;

3) il fixe « le plafond d'autorisation des emplois rémunérés par l'État » ;

4) il arrête enfin « les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l'année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'État » . Le IV dispose ainsi que ces surplus « sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire » . Cette disposition a une portée davantage politique que contraignante, et n'interdit nullement le recours à d'éventuelles lois de finances rectificatives.

Suite aux votes intervenus en première délibération à l'Assemblée nationale sur la première partie du projet de loi de finances, le solde de l'État a été amélioré de 166 millions d'euros par rapport au projet de loi initial déposé par le Gouvernement, portant le déficit du solde général à 71,827 milliards d'euros . En réalité, les mesures prises en première partie ont conduit à minorer les recettes de 240 millions d'euros et cette « amélioration » apparente du solde budgétaire est permise par la réduction par anticipation du plafond de dépenses du budget général , à hauteur de 406 millions d'euros.

Cette réduction correspond à l'impact sur la norme de dépenses de l'ensemble des amendements adoptés en 1 ère partie : ceux-ci la dégradent de 406 millions d'euros en raison de la hausse du plafonnement de plusieurs taxes affectées (+ 138 millions d'euros) et de la compensation en dépenses de l'affectation de la fraction de 25 % de la taxe sur les transactions financières (TTF) à l'Agence française de développement (AFD), soit 268 M€.

Évolution du solde budgétaire général de l'État à la suite des votes de première partie sur le projet de loi de finances

(en millions d'euros)

A

Recettes nettes

-197

B

Solde des comptes spéciaux

-28

C

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

-15

D = A+B+C

Impact total sur les recettes des mesures prises en première partie

-240

E

Dégradation de la norme de dépenses liée au relèvement du plafonnement de plusieurs taxes affectées

+138

F

Dégradation de la norme de dépenses liée à la compensation en dépenses de l'affectation de la fraction de 25 % de la TTF à l'AFD

+238

G = E+F

Impact total sur la norme de dépenses des mesures prises en première partie - Baisse par anticipation du plafond de dépenses du budget général

406

D+G

Amélioration affichée du solde budgétaire

166

Source : commission des finances, d'après l'amendement n° I-823 du Gouvernement au présent projet de loi de finances

L'amélioration du déficit budgétaire présentée par le Gouvernement n'est donc que la traduction de la compensation (par anticipation sur les votes du Parlement) des amendements ayant conduit à dégrader la norme de dépenses de l'État .

Votre rapporteur général propose de prendre acte des modifications apportées à l'article d'équilibre en conséquence des votes intervenus à l'Assemblée nationale.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article et l'état A annexé compte tenu des modifications qu'elle a apportées aux articles de la première partie du projet de loi de finances.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 12 novembre 2015 sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2016 - Tome II du rapport général de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Certains de mes 45 amendements sont d'ordre technique ou rédactionnel, mais d'autres ont des incidences beaucoup plus importantes.

M. André Gattolin . - Serait-il possible de transmettre ces amendements aux membres de la commission la veille de la réunion, plutôt que sur table ? Nous ne sommes pas des ordinateurs.

Mme Michèle André , présidente . - Mieux que cela : nous sommes des êtres humains !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous rencontrons des difficultés techniques. Les demandes que nous adressons à la direction de la législation fiscale restent sans réponse : l'administration fiscale me fait savoir qu'elle est très occupée ! J'ai dû me déplacer à Bercy mardi dernier, pour obtenir un document qui aurait pu nous être adressé par mail. Quant au questionnaire fiscal que nous avons envoyé en juillet dernier, plus de la moitié des réponses nous ont été transmises seulement fin octobre, c'est-à-dire avec trois semaines de retard ! Nous peinons à obtenir des réponses à nos interrogations et nous attendons d'ailleurs toujours les évaluations pour certains projets d'amendements.

Article 2

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le produit de l'impôt sur le revenu a augmenté de plus de 40 % en cinq ans, passant de 51 milliards d'euros en 2011 à 72 milliards d'euros en 2015. Dans le même temps, l'hyperconcentration de l'impôt sur les classes moyennes et moyennes supérieures a été encore aggravée. En 2014, la réforme de la décote et la suppression de la tranche à 5,5 % ont fait sortir des contribuables de l'impôt sur le revenu, dont l'universalité chère à Joseph Caillaux se trouve ainsi remise en cause.

L'amendement n° 3 revient sur la décote qui aggrave la complexité de l'impôt. Entre la décote simple, la décote conjugale etc., les contribuables ne savent plus dans quelle tranche ils se situent. Je propose par conséquent la suppression de l'alinéa 14 de l'article 2.

L'amendement n° 1 abaisse à 28 % le taux marginal d'imposition de la tranche à 30 %, celle des classes moyennes, dans laquelle se trouvent 5 millions de ménages. Le gain serait de 400 euros par foyer fiscal. La mesure est compensée, en particulier par l'amendement n° 3.

Enfin, l'amendement n° 2 relève le plafond du quotient familial. La baisse décidée en 2013 et 2014 a touché les familles. Pour la première fois depuis vingt-cinq ans, le taux de natalité a baissé en France. Il faudra s'interroger sur les raisons de ce phénomène. Je propose, comme en 2014, de porter le plafond à 1 750 euros.

M. Roger Karoutchi . - Un signal !

M. Michel Bouvard . - Quel en serait le coût ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Environ 500 millions d'euros ; le coût global des trois amendements serait d'environ 850 millions.

M. Maurice Vincent . - Qu'en est-il de l'amendement n° 3 ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il représente un gain de 2 milliards d'euros.

M. Roger Karoutchi . - Je soutiens l'amendement n° 2. La politique familiale menée depuis 1945 a aidé la société et l'économie françaises à résister. Or en 2014, la natalité a baissé. Cela entraînera, à terme, un déséquilibre dans le rapport entre le nombre d'actifs et de retraités, alors que le Gouvernement envisage un retour à l'équilibre dans quinze ans. Cet amendement est un signal fort en direction des familles.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je ne prétends pas que les mesures fiscales ou la réduction des allocations soient la cause de la baisse de la natalité, mais celle-ci doit nous inciter à mener une politique de soutien.

M. Vincent Delahaye . - L'amendement n° 1 contribue à réduire la pression fiscale. Nous avons dénoncé la concentration de l'impôt sur le revenu, qui se traduit par des taux accrus pour un nombre de contribuables en diminution ; nous nous opposons aussi à la sortie de certains contribuables de l'assiette - 500 000 si la réforme de la décote est adoptée. C'est pourquoi nous soutenons la baisse du taux marginal de la tranche de 30 à 28 %, qui concerne les revenus médians, ainsi que la hausse du plafond du quotient familial.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les amendements proposés vont dans le sens d'une plus grande universalité de l'impôt sur le revenu, sans supprimer totalement la décote bien évidemment, et réduisent la concentration de l'assiette.

M. Richard Yung . - La baisse de la natalité est un phénomène général, plus accentué en Italie ou en Allemagne qu'en France ; elle s'explique principalement, chez nous, par une augmentation de l'âge moyen des parents à la naissance des enfants. Il est faux de dire que la natalité baisse.

M. Roger Karoutchi . - C'est statistique !

M. Richard Yung . - Nous en sommes déjà, avec ces amendements, à 850 millions d'euros de déficit.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous assumons la baisse de l'impôt sur le revenu, qui réduira la pression fiscale tout en étant gagée par des économies.

Mme Marie-France Beaufils . - Nous ne pouvons voter une baisse du taux marginal de l'impôt sur une tranche aussi large - entre 26 791 et 71 826 euros de revenus. Je ne suis pas favorable à la décote : il est préférable de réorganiser la progressivité de l'impôt à travers le barème, pour mieux répondre à la situation des ménages. Enfin, la natalité dépend davantage des perspectives d'avenir, et notamment d'emploi, que de la fiscalité.

Mme Michèle André , présidente . - Je propose que la commission tienne des auditions sur le thème de la natalité et de la démographie après l'examen du projet de loi de finances.

M. Philippe Adnot . - Je ne voterai que l'amendement n° 3 : ce n'est pas le moment de baisser la garde sur le déficit.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous ne baissons pas la garde, puisque certains des amendements que nous proposerons en deuxième partie du projet de loi de finances dégageront des économies de plusieurs milliards d'euros. Avec l'un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés du monde et une hausse de 40 % du produit de l'impôt sur le revenu ces dernières années, nous avons un problème de pression fiscale.

M. Didier Guillaume . - Nous avons besoin de connaître la vision globale du rapporteur général et de la majorité sénatoriale sur l'imposition et le déficit. Nous pourrions alors avoir une confrontation démocratique. Pour la deuxième fois consécutive, le Gouvernement réduit l'imposition des Français ; 9,5 millions de contribuables voient leurs impôts baisser. Une confrontation objective entre les orientations de ce Gouvernement et celles du précédent est nécessaire.

Nous avons jusqu'à présent été préservés de la baisse de la natalité qui affecte le reste de l'Europe. Je ne crois pas que les couples lisent le projet de loi de finances avant de se décider à faire des enfants. Ils ont certainement tort...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le taux de prélèvements obligatoires en France devrait baisser de 0,1 % entre 2015 et 2016. Le Gouvernement affiche la sortie d'un certain nombre de contribuables de l'assiette, mais on nous annonce une hausse des recettes de taxe intérieure sur les produits pétroliers à hauteur de 259 millions d'euros, un élargissement de la contribution au service public de l'électricité (CSPE), des nouvelles mesures en matière de fiscalité environnementale, des hausses d'impôts locaux. Globalement, notre taux de prélèvements obligatoires reste l'un des plus élevés au monde ; et ce qui a été pris aux Français ne leur est pas restitué.

M. Vincent Capo-Canellas . - Nous sommes tous favorables à la réduction des impôts...

Mme Marie-France Beaufils . - Non !

M. Vincent Capo-Canellas . - Le paradoxe est que le Gouvernement affiche une légère réduction, qui est plutôt une correction des erreurs passées, tout en décourageant ceux qui consomment. Le rapporteur général propose de ne pas les pénaliser encore davantage, alors que le Gouvernement continue à cibler les mêmes catégories.

M. Michel Bouvard . - Nous avons deux curseurs à respecter : la baisse des prélèvements obligatoires et les engagements pris devant la Commission européenne. Les efforts au niveau fiscal pour restituer aux ménages une partie de leur pouvoir d'achat et relancer la croissance doivent être gagés par des économies sur d'autres postes. Or le projet de loi de finances prévoit beaucoup d'augmentations fiscales et peu d'économies, à part le coup de varlope sur la dotation de l'État aux collectivités locales.

Les amendements n os FINC.1, FINC.2 et FINC.3 sont adoptés.

Article 2 ter

L'amendement de coordination n° FINC.4 est adopté.

Articles additionnels après l'article 2 quinquies

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - De nombreux chefs d'entreprise s'expatrient, principalement en Belgique, afin d'échapper à la taxation des plus-values de cession. L' exit tax n'a pas suffi à contrecarrer ce phénomène : le dernier rapport annuel sur l'exil fiscal a mis en évidence une augmentation du nombre de départs et surtout du montant de base imposable ainsi perdu par l'État.

L'amendement n° 5 se veut radical : il exonère les plus-values dégagées par la vente d'une entreprise, à condition que celle-ci soit un bien professionnel ; sont ainsi exclus les participations et les portefeuilles d'actions. Nous nous alignons sur le régime fiscal de la Belgique. La perte de recettes serait faible, d'autant que les assujettis peuvent échapper à la taxation en s'expatriant au plus tôt, mais le gain important, à plus forte raison si l'entrepreneur est jeune : lorsqu'une personne s'expatrie pour devenir résident fiscal belge, l'État perd définitivement un contribuable.

M. Philippe Adnot . - J'aurais souhaité que l'exonération s'applique à condition que la plus-value soit réinvestie dans l'outil professionnel.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Rien ne vous empêche de proposer un sous-amendement.

M. Maurice Vincent . - Quel est le champ d'application de la mesure ? L'objet de l'amendement fait référence aux jeunes entrepreneurs.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Aux termes de l'article 885 O bis du code général des impôts, une entreprise est considérée comme un bien professionnel si son propriétaire est le dirigeant, s'il en tire plus de la moitié de ses revenus professionnels et s'il détient au moins 25 % des droits de votes et 50 % de la valeur brute du bien imposable. Les jeunes entrepreneurs ne sont pas les seuls concernés.

M. Bernard Lalande . - Je suis surpris par la radicalité de votre amendement. Ceux qui veulent échapper à la taxation trouveront toujours une parade fiscale. Votre raisonnement pourrait tout aussi bien s'appliquer à l'impôt sur les sociétés, qui est beaucoup plus bas en Irlande. Il faudrait plutôt une fiscalité propre à ce type de plus-values.

M. Richard Yung . - Votre mesure vient-elle s'ajouter à l' exit tax ou la remplace-t-elle ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L' exit tax ne sera pas supprimée, mais il est possible de la contourner en s'exilant assez tôt. Les destinations privilégiées sont la Belgique, la Suisse et le Luxembourg, où les plus-values sur cession d'outil professionnel ne sont pas taxées. Pour les salariés, un tel exil n'aurait aucun intérêt puisque l'impôt sur le revenu est plus élevé en Belgique. Les entrepreneurs ne s'exilent pas par attrait pour la Belgique mais nous perdons définitivement ces contribuables. Un contrôle sur place et sur pièces à Bercy au mois de juillet m'a appris que le nombre de contribuables concernés augmentait fortement. C'est d'autant plus préoccupant que ce sont des contribuables à valeur ajoutée élevée puisque fortement imposés.

M. Claude Raynal . - Considérant cet amendement, radical et imparfait selon vos propres dires, comme un amendement d'appel, nous ne le voterons pas.

L'amendement n° FINC.5 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 6 a pour objet de faire respecter par l'administration fiscale l'intention du législateur qui n'a pas souhaité appliquer aux moins-values l'abattement pour durée de détention des valeurs mobilières.

L'amendement n° FINC.6 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 7 étend le dispositif des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise aux sociétés (BSPCE) non cotées ou de petite capitalisation boursière de plus de quinze ans. Il aiderait les PME à attirer les jeunes talents.

L'amendement n° FINC.7 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 8 est similaire à un amendement adopté par le Sénat, à l'initiative de notre collègue Dominique de Legge, lors de l'examen de la loi Macron. Il supprime une condition d'application du dispositif Dutreil restrictive et qui était source de contentieux.

L'amendement n° FINC.8 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Reprenant également une disposition votée dans la loi Macron, l'amendement n° 9 prévoit, toujours dans le cadre du dispositif Dutreil, l'application de l'engagement collectif réputé acquis à des situations où les titres transmis sont détenus par des sociétés interposées. Cet amendement d'ordre technique mettrait fin à une différence de traitement injustifiée entre détention directe et indirecte, qui empêche l'application du dispositif Dutreil à certaines transmissions d'entreprises.

L'amendement n° FINC.9 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 10 assouplit le dispositif Dutreil, pour faciliter la transmission d'entreprises familiales.

M. Michel Bouvard . - Quel est le coût total des amendements qui concernent les entreprises ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Moins de vingt millions d'euros.

L'amendement n° FINC.10 est adopté.

Article additionnel après l'article 2 sexies

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Reprenant les recommandations de notre groupe de travail sur l'économie numérique et collaborative, l'amendement n° 11 instaure un seuil de 5 000 euros pour l'imposition des revenus bruts tirés d'activités sur les plateformes collaboratives. L'économie numérique tient une place croissante dans notre société. La secrétaire d'État chargée du numérique a reconnu l'importance du sujet. Il est difficile d'imposer une taxation au premier euro. La franchise de 5 000 euros est un moyen d'amener dans le système déclaratif des activités qui, jusqu'à présent, lui échappaient.

M. André Gattolin . - Quel est le coût de cette mesure ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est un gain, puisque les activités concernées ne sont pas déclarées. Vous pouvez voir dans Paris des affiches publicitaires pour la plateforme Airbnb ; un chercheur américain a établi que des particuliers mettaient jusqu'à dix, voire vingt appartements en location par ce moyen. Bercy reconnaît que ce phénomène n'est pas contrôlé. Dans ces conditions, il est préférable de mettre en place une franchise, pour ne pas pénaliser l'économie participative d'entraide.

M. Michel Bouvard . - En plus de remédier à la quasi-absence de déclaration des revenus de l'économie collaborative, cet amendement liquide des contentieux potentiels. En effet, avec une taxation au premier euro, les revenus attendus ne couvrent pas le coût de mise à disposition du véhicule ou de l'appartement. Le dispositif proposé a tous les avantages : il ne coupe pas les ailes des sociétés françaises du secteur, rend possible une meilleure collaboration avec les plateformes et les acteurs de cette économie pour le recueil des données et prévient tout risque de contentieux sur les activités à rentabilité moyenne.

M. Jacques Chiron . - Je suis d'accord sur le principe, mais nous demandons du temps pour étudier l'amendement. Axelle Lemaire n'y est pas opposée. Abstention.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Votez, parce qu'un amendement adopté par la commission aurait davantage de poids que des amendements en ordre dispersé ; je vous invite, si vous le souhaitez, à déposer un amendement proche, que nous pourrions ensuite fusionner. C'est un travail collectif et une rédaction commune a une portée symbolique.

M. Philippe Dallier . - Le Sénat, grâce au groupe de travail, a pris la main sur la question. Il serait dommage d'arriver en séance avec des différences d'opinion. À Paris, 40 000 appartements sont loués via Airbnb. J'entendais ce matin à la radio une personne qui tire de son deux-pièces... 5 000 euros !

Mme Marie-France Beaufils . - Nous voterons l'amendement, qui représente une ouverture ; mais des amendements complémentaires seront nécessaires. Je suis cependant préoccupée par ces activités, qui deviennent un levier de déréglementation de l'ensemble de l'économie. Certains secteurs en ont fait un outil de rendement financier, dont le résultat échappe à notre périmètre fiscal.

M. Jean-Claude Requier . - Je voterai moi aussi l'amendement. Pouvez-vous néanmoins préciser la différence entre économie collaborative et économie numérique ?

M. Bernard Lalande . - L'économie collaborative est une partie de l'économie numérique ; elle se définit comme un système d'échange de biens sur une plateforme en ligne. Le rapport du groupe de travail montre que le seuil de 5 000 euros peut aussi régler les problèmes comme le micro-foncier ou le micro-BIC. Il peut s'appliquer à tous ceux qui mettent en location leur logement, que ce soit sur Airbnb ou non. Je suis favorable à une délibération sur un amendement commun, parce qu'il couronnerait un travail collectif et s'inscrirait dans le débat sur la fiscalité et l'économie numérique.

M. Bernard Delcros . - Nous ne pouvons demeurer inactifs alors que l'économie collaborative se développe. Trouvons un accord au sein de notre commission. Le seuil de 5 000 euros me semble adapté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je suis ouvert aux propositions de modification pour parvenir à une rédaction commune.

L'amendement n° FINC.11 est adopté.

Article 3

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'article 3 abaisse à 35 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes le seuil d'application de la taxation à la TVA en France pour les ventes à distance. Il reprend une proposition de notre commission : il arrive que le Sénat soit entendu... L'amendement n° 12 supprime une précision surabondante dans la rédaction de l'article.

L'amendement n° FINC.12 est adopté.

Article additionnel après l'article 3

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 13 unifie le taux de TVA applicable aux travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien dans les habitations, en supprimant le taux réduit à 5,5 % pour les travaux d'amélioration de la qualité énergétique. Dans la pratique, la coexistence de différents taux -10 % pour des travaux de peinture et 5,5 % pour un changement de chaudière - peut causer des difficultés. De plus, le taux réduit suscite des effets d'aubaine : le taux de TVA n'a pas d'influence sur la décision d'un particulier de remplacer sa chaudière. Il convient de mettre en place un taux unifié, plus lisible.

M. André Gattolin . - Le suramortissement à 140 % sur un an décidé l'année dernière, voilà un effet d'aubaine. Au contraire, la TVA réduite s'inscrit dans un dispositif de long terme, le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), avec des effets d'entraînement structurel. Quant aux taux différenciés, il appartient aux syndics de les gérer. L'entretien du bâti est fondamental : de nombreux équipements installés dans les années cinquante ou soixante ne sont plus aux normes.

M. Philippe Adnot . - Je voterai contre l'amendement. Est-ce le bon signal à donner dans le contexte de la préparation de la COP21, alors que nous cherchons à développer l'activité de nos artisans ?

M. Jean-Claude Boulard . - C'est plutôt inopportun.

M. Marc Laménie . - Nous sommes dans un dilemme entre le nécessaire soutien aux entreprises artisanales du bâtiment et la complexité de la TVA. Je voterai néanmoins l'amendement.

M. Didier Guillaume . - Le rapporteur général a raison de souligner que le choix de remplacer une chaudière ne dépend pas du taux de TVA appliqué. Mais la portée symbolique est importante : supprimer le taux réduit, c'est porter un coup d'arrêt et décourager ceux qui veulent réaliser des travaux supplémentaires. La baisse du taux répondait à une demande forte des entreprises. De plus, une telle mesure augmente la pression fiscale, avec des conséquences sur les entreprises. C'est un amendement à contre-emploi, sans utilité. Conservons ce dispositif, signal fort adressé à l'investissement local, dans le contexte de la COP21.

M. Philippe Dominati . -  Pourquoi pas une unification vers le bas ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - En pratique, l'avantage fiscal n'est pas un facteur déclencheur dans la décision de changer une chaudière. Je retire mon amendement. Cependant, la dépense fiscale concernant les deux taux réduits de TVA précités représente 4,4 milliards d'euros en coût global. On était ici sur la réduction d'une niche. Je suis néanmoins attaché au taux réduit dans le bâtiment, qui évite le travail au noir.

L'amendement n° FINC.13 est retiré.

Article 3 bis

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 14 réécrit le texte sur les conditions d'éligibilité au taux réduit de TVA dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, en précisant que ce taux réduit s'applique à l'année 2015.

M. Philippe Dallier . - Je ne suis pas certain que cet amendement soit de grande portée. On ne peut que regretter la réduction au fil du temps des avantages de l'accession sociale à la propriété qui conditionnent un prix de sortie efficace. Il faudrait élargir le champ d'application d'un taux réduit de TVA aux opérations d'accession sociale à la propriété. Je voterai néanmoins l'amendement n° 14.

M. Daniel Raoul . - Cet assouplissement sur la date me paraît tout à fait favorable dans le cadre de la signature des contrats de ville pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

M. Jean-Claude Boulard . - Il faut soutenir cet amendement, et réfléchir à la prolongation de cet outil essentiel pour la mixité sociale dans les quartiers.

M. Francis Delattre . - Que se passe-t-il pour un chantier amorcé en 2015 et qui se poursuit en 2016?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il s'agit ici de la signature du contrat de ville qui doit intervenir avant le 31 décembre 2015. Nous ne posons aucune limite pour les travaux.

L'amendement n° FINC.14 est adopté.

Article 4

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'article 4 étend la neutralisation temporaire des seuils d'effectifs à la cotisation foncière des entreprises. L'extension de cet assouplissement que propose l'amendement n° 15 pour les micro-entreprises installées dans une zone de restructuration de la défense est sans incidence sur le solde de 2016. La perte de recettes pour 2017 serait inférieure à 0,5 million d'euros.

M. Philippe Adnot . - Pourquoi réserver cette possibilité à la défense ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il s'agit, ici, de réparer un oubli concernant les zones de restructuration de la défense.

L'amendement n° FINC.15 est adopté.

Les amendements rédactionnels n os FINC.16 et FINC.17 sont adoptés.

Article 6

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 18 propose de donner davantage de visibilité aux PME en étendant jusqu'au 31 décembre 2017 le bénéfice de l'amortissement accéléré des robots industriels. On évitera ainsi des effets d'aubaine.

L'amendement n° FINC.18 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 19, qui a le même objet que les entreprises de taille intermédiaire (ETI), avait déjà été présenté par François Marc lorsqu'il était rapporteur général, et adopté par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2014.

L'amendement n° FINC.19 est adopté.

Article 6 ter

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 20 revient sur une niche en proposant de supprimer le dispositif de suramortissement temporaire, sur le modèle de celui qui a été instauré par la loi Macron, au profit des poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant. Pourquoi distinguer ces deux catégories comme seules bénéficiaires ?

M. Maurice Vincent . - Cette disposition indique que l'on prend en compte les enjeux du développement durable. C'est important dans le contexte actuel.

M. Michel Bouvard . - Il y aurait surtout un problème de stabilité fiscale : la mesure vient d'entrer en vigueur.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il s'agit d'un article additionnel adopté à l'initiative de l'Assemblée nationale qui étend le champ d'application de la loi Macron. La mesure proposée ici n'est pas entrée en vigueur.

M. Vincent Capo-Canellas . - La logique du suramortissement fiscal de la loi Macron est de favoriser l'investissement productif. La question est de savoir si pour les transporteurs, le matériel visé concourt à l'investissement productif. Élargir la mesure à l'ensemble des véhicules roulants augmenterait le coût.

Mme Fabienne Keller . - On entre dans le débat sur les effets des incitations fiscales en matière d'environnement. Des articles récents ont fait état de la perversité des différents régimes fiscaux appliqués aux flottes des véhicules d'entreprise. Peut-être faudrait-il renvoyer cet amendement au débat plus général sur l'énergie, en nous concentrant sur le traitement fiscal des différents carburants. La mesure, sans doute motivée par le coût de ces véhicules, gagnerait à s'inscrire dans une cohérence d'ensemble.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous aurons un débat au moment de l'examen du projet de loi de finances rectificative, à l'occasion de la réforme de la CSPE. Mieux vaut supprimer l'article pour pouvoir le rétablir alors.

M. Jean-Claude Requier . - Qu'appelle-t-on un « engin » ? Est-ce un poids lourd ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est un véhicule de plus de 3,5 tonnes : poids lourds, tractopelles...

L'amendement n° FINC.20 est adopté.

Article 8

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Une fois n'est pas coutume, je soutiens doublement le Gouvernement. Christian Eckert a annoncé solennellement qu'il s'engageait à supprimer un milliard d'euros de produit de petites taxes. Le budget en crée cependant trois. Le Gouvernement a bien tenté de supprimer la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ; l'Assemblée nationale s'y est opposée, comme elle l'avait fait l'an dernier. Ces taxes à faible rendement peuvent être extrêmement coûteuses pour les entreprises. Je conseille l'article 53 du projet de loi de finances aux insomniaques, tant il est compliqué. Par conséquent, je propose cinq amendements pour supprimer des taxes qui vont au budget général - et pas à celui des collectivités ou d'organismes professionnels, bien évidemment. L'amendement n° 21 rétablit la suppression de la TGAP relative aux ICPE ; l'amendement n° 22 supprime la taxe sur les loyers élevés des logements de petite surface qui n'a rapporté que 542 000 euros en 2014 ; l'amendement n° 23 abroge la taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence qui a rapporté moins d'un million d'euros en 2014 ; l'amendement n° 24 supprime la taxe sur les contrats d'échange sur défaut d'un État, dont le rendement est évalué à 4 800 euros en 2014 ; enfin, l'amendement n° 25 abroge la redevance sanitaire liée à la certification des végétaux à l'exportation, qui a rapporté 366 euros.

M. Jean-Claude Boulard . - Je vous remercie d'avoir indiqué qu'il ne fallait surtout pas appliquer la théorie des petites taxes nationales aux collectivités locales...

M. Didier Guillaume . - Il a raison !

M. Jean-Claude Boulard . - Nos amis du Budget profiteraient volontiers d'une brèche.

M. Albéric de Montgolfier . - Le Sénat a rappelé de manière unanime son attachement à la liberté des élus locaux, en refusant la suppression de la taxe de balayage et de la taxe pour la gestion des eaux pluviales urbaines, dont l'une ne concernait que quelques collectivités locales en France. Nous ne parlons que des taxes au profit du budget de l'État dont le taux de recouvrement excède largement le produit.

M. Michel Bouvard . - Autant il est patent que la taxe sur le trading haute fréquence est inefficace et contournée, autant son retrait aurait valeur de symbole. Cette taxe avait été instituée dans l'idée de convaincre un certain nombre de nos partenaires internationaux de suivre notre exemple. Si le dispositif a vocation à se généraliser, ce n'est pas le moment de le supprimer.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ce n'est absolument pas le cas. Nous restons les seuls à avoir institué cette taxe dont le rendement est ridicule. L'Autorité des marchés financiers recommande des leviers non fiscaux. La taxe ne porte que sur les ordres annulés, pas sur l'ensemble du trading haute fréquence.

M. Michel Bouvard . - Ce n'est pas ce qui ressort de l'objet de l'amendement.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le nom de la taxe est trompeur. Il s'agit d'une taxe de 0,01 % du montant des ordres annulés ou modifiés excédant le seuil actuellement fixé à 80 %. C'est pour cela qu'il n'y a pas de rendement, car les entreprises ne font pas qu'annuler des ordres.

M. Philippe Dallier . - Je suis heureux d'apprendre que Bercy a retrouvé de l'argent. Le chiffrage qui nous avait été donné sur la taxe Apparu était de quelques milliers d'euros ; on en est à 542 000 euros. Lors de l'examen de la mission « Égalité des territoires et logement », je vais proposer au Gouvernement de travailler sur un rapprochement entre les fichiers des impôts et ceux de la CAF, ce qui devrait rendre plus efficace l'application de cette taxe. Dans la mesure où le Gouvernement prévoit de réduire le montant des aides au logement en fonction d'un niveau de loyer excessif, il ne serait pas très cohérent de supprimer une taxe qui pèse sur les propriétaires. Nous savons tous qu'à Paris, les chambres de bonne se louent ou se vendent parfois à des prix exorbitants.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La loi de règlement n'indique qu'un seul redevable pour 1 354 euros. Ce contribuable unique est en fait une SCI. S'y ajoutent quelques centaines de particuliers pour un rendement de 542 000 euros, que la loi de règlement ne prend pas en compte pour une raison très obscure. L'amendement n° 22 vise à obtenir du Gouvernement des explications. La taxe, purement déclarative et sans contrôle, est assez inefficace.

M. Philippe Adnot . - Je croyais que la taxe sur le trading haute fréquence serait étendue cette année aux liquidités des entreprises qui viennent sur Euronext faire quelques opérations par jour et non pas toutes les secondes. L'amendement n° 23 couvre-t-il cette extension ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La taxe que nous proposons de supprimer s'applique aux entreprises qui font plus de 80 % d'ordres annulés sur le trading haute fréquence, il ne s'agit pas de la disposition nouvelle prévue à l'article 8 bis du projet de loi de finances sur laquelle nous reviendrons.

M. Maurice Vincent . - Nous ne suivrons pas le rapporteur général sur les amendements n os 22 et 23. En revanche, nous voterons les amendements n os 21, 24 et 25 qui suppriment de très petites taxes.

Mme Fabienne Keller . - Je remercie le rapporteur général pour son engagement à travailler sur le sujet des loyers élevés des logements de petite surface. Quant à la taxe sur le trading à haute fréquence, ce serait donner un très mauvais signe que de la supprimer, même si la recette est limitée. La mesure du trading à haute fréquence est extrêmement imparfaite. Je ne comprends pas bien la distinction avec les annulations d'ordres qui ont les mêmes effets.

M. Daniel Raoul . - Si l'on suit le raisonnement de Fabienne Keller, il faut que nous nous donnions les moyens d'appliquer la taxe sur les petits appartements, Les adresses fictives pour contourner la carte scolaire ou les boxes de vélo loués à prix d'or comme habitation ? Nous devons rendre la taxe efficace ! Quant au trading haute fréquence, il s'agit de manipulations à la nanoseconde qui jouent sur les cours. Il faut absolument les taxer.

Mme Fabienne Keller . - Si je propose de ne pas adopter l'amendement n° 22, c'est dans l'idée d'améliorer notre approche de la base fiscale.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les amendements n os 22 et 23 sont des amendements d'appel. Leur faible rendement montre que ces taxes n'atteignent pas leur objectif. Une taxe sur le trading haute fréquence devrait rapporter beaucoup d'argent. Dans la mesure où celle en place est calibrée à 80 % d'ordres annulés, elle n'a pas de rendement. De même, une taxe purement déclarative sur les petits logements n'a rien d'efficace car les marchands de sommeil sont nombreux. Ce n'est pas pour autant qu'il faut éteindre le débat sur ces questions. Le trading haute fréquence représente 40 % des transactions du CAC 40. La taxe devrait avoir un tout autre rendement. L'AMF considère elle-même que cette taxe est inefficace.

M. Éric Bocquet . - Tout en partageant le constat du rapporteur général, je considère que la suppression de la taxe prévue dans l'amendement n° 23 n'est pas la solution. L'assiette est gigantesque : 40 % en Europe, 70 % aux États-Unis. Si le taux est très faible à 0,01 %, il faut retravailler le dispositif. On ne peut pas laisser de côté cette activité qui n'apporte rien à l'économie réelle et qui constitue un danger nouveau pour l'économie mondiale. Ne supprimons pas la taxe, mais retravaillons-la.

M. Philippe Dallier . - Avant d'évoquer l'amendement n° 23, je précise, conformément à nos règles déontologiques, que je suis un informaticien de la Société générale en suspension de contrat de travail pour exercice d'un mandat parlementaire. Je me demande si la taxe visée par l'amendement n° 23 ne tire pas une balle dans le pied de la place de Paris. Je suis favorable à une taxe sur ce type de transaction, à condition qu'elle s'applique à tout le monde. Quand tout sera traité à Londres, on n'aura plus qu'à pleurer sur le déclin de la place de Paris. À force d'en rajouter, on regrettera les milliers d'emplois perdus aussi bien dans le domaine bancaire que dans l'informatique.

L'amendement n° FINC.21est adopté, ainsi que les amendements n os FINC.22, FINC.23, FINC.24 et FINC.25.

Article 8 bis

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 26 supprime la modification des tarifs de TICPE proposée par l'article 8 bis , pour des raisons de cohérence. L'élargissement de la CSPE doit être discuté dans le projet de loi de finances rectificative. Rattachons-y notre débat sur la fiscalité des carburants.

L'amendement n° FINC.26 est adopté.

Article 8 ter

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 27 vise à interroger le Gouvernement sur ses intentions quant à l'application du prélèvement supplémentaire de la TGAP sur les carburants dans les départements d'outre-mer. On reporte la mesure à chaque loi de finances.

L'amendement n° FINC.27 est adopté.

Article 8 quater

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'article introduit à l'Assemblée nationale avec un avis de sagesse du Gouvernement élargit le champ de la taxe sur les acquisitions de titres de capital ou assimilés aux opérations intra journalières. Les actions sont cotées dans tous les pays européens. La mise en place de cette taxe élargie entraînerait le départ des activités de la place de Paris. Euronext et l'AMF s'accordent là-dessus : ce genre de taxe ne peut se mettre en place qu'au niveau européen. D'où la nécessité de supprimer l'article 8 quater .

L'amendement n° FINC.28 est adopté.

Article 9

L'amendement rédactionnel n° FINC.29 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 30 supprime la disposition introduite à l'Assemblée nationale selon laquelle les collectivités territoriales peuvent, pour refinancer leur indemnité de remboursement anticipé (IRA), bénéficier d'emprunts à un taux d'intérêt particulièrement élevé, parfois au-delà du taux d'usure, afin de réduire leur taux d'endettement. Je m'interroge sur ce dispositif artificiel.

M. Michel Bouvard . - Voilà qui plaide pour une certification des comptes des collectivités...

M. Claude Raynal . - Comme président du Comité national d'orientation et de suivi (CNOS) du fonds de soutien aux emprunts à risque, je ne peux que m'inscrire en faux contre le raisonnement du rapporteur général. Un tel dispositif est une solution qui passe par un arbitrage des collectivités. Pour refinancer l'IRA, il faut soit rehausser le taux, soit prévoir un emprunt supplémentaire, qui gonfle la masse d'emprunt. La plupart des emprunts toxiques ont été contractés à une époque où le taux de base était de l'ordre de 4 ou 4,5 %, supérieur au taux d'usure actuel, qui est très bas (3,7 %). L'idée est que la collectivité puisse revenir au taux normal qui aurait été appliqué si le taux de leur emprunt n'avait pas fortement augmenté Cela ne me semble pas poser problème. Cet amendement pourrait être retiré.

M. Michel Bouvard . - Effacer ainsi une partie du taux d'endettement effectif de la collectivité pose un problème de transparence des comptes publics.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Dans le passé, les banques ont malheureusement déployé beaucoup d'imagination pour créer des produits complexes. Selon que l'on rembourse l'IRA avec un emprunt dont le taux varie de 3,30 %, à 4,95 %, ou à 6 %, le taux d'endettement supplémentaire de la collectivité variera de 84,3 % à 66,8 %.

Il y a là une forme d'artifice comptable. Qu'est-ce qui empêcherait une banque de proposer un taux à 30 % pour que la collectivité puisse afficher un endettement très faible ? On peut faire bouger le curseur sans limites. Il faut des garde-fous.

M. Claude Raynal . - Il faut raison garder. Aucune banque ni aucune collectivité ne validerait un taux à 30 %. Il s'agit de créer un équilibre entre le remboursement du capital et les intérêts. Alourdir les intérêts n'est pas bon pour la collectivité, à long terme, car elle doit préserver sa capacité à investir. On pourrait encadrer le dispositif afin de donner des garanties. Un sous-amendement en ce sens vous donnerait des garanties. Laissons de la souplesse à la collectivité.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Le curseur fait tout de suite bouger le taux d'endettement.

M. Maurice Vincent . - À ma connaissance, le coût global de sortie de l'emprunt toxique reste le même. C'est un choix presque plus rigoureux pour les collectivités, puisqu'il consiste à augmenter la masse des intérêts qui pèseront sur leur budget de fonctionnement tout en diminuant la part de remboursement du capital qui porte sur l'investissement. Le taux global d'endettement baisse, mais la masse globale des paiements reste la même. Il n'y a pas lieu de changer de système.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je retirerai cet amendement d'appel si l'on obtient des garanties.

M. Philippe Adnot . - Il faut soutenir le rapporteur général. La dépense restera globalement la même, et pèsera sur le budget de la collectivité d'une manière identique, qu'elle soit prise sur les intérêts ou sur le remboursement du capital. En revanche, en termes d'affichage, un taux d'endettement diminué facilitera de nouveaux emprunts. C'est très dangereux.

L'amendement n° FINC.30 est adopté.

Article 9 bis

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 31 supprime la prorogation jusqu'au 31 décembre 2016 des dispositifs d'exonération d'imposition de plus-values immobilières des particuliers en cas de cessions de biens immobiliers au profit direct ou indirect d'organismes chargés du logement social. Dans la pratique, le particulier découvre après coup qu'il est exonéré de plus-value. Il s'agit davantage d'un effet d'aubaine.

M. Daniel Raoul . - Je suis favorable à cet amendement de suppression, car l'on n'a pas démontré l'efficacité de cette mesure jusque-là. Vous connaissez par ailleurs ma position sur le principe des abattements qui vont à l'encontre de la mise sur le marché, puisqu'ils favorisent la détention : plus l'on détient un bien depuis longtemps, plus les abattements sont importants.

M. Philippe Dallier . - Tous ces chocs d'offre qui visent à déclencher des cessions de terrain ne fonctionnent pas. Les notaires nous l'ont répété, c'est purement de l'effet d'aubaine.

L'amendement n° FINC.31 est adopté.

Article 10

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Un beau sujet, la DGF, évidemment en baisse comme l'année dernière ! L'amendement n° 32 minore cette réduction pour tenir compte des dépenses imposées par l'État aux collectivités locales : sinon, ce surcoût de normes supplémentaires non compensées s'élèverait à 1,202 milliard d'euros en 2014 selon les chiffres incontestables du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), et 573,1 millions en 2015, soit un total de 1,775 milliard d'euros en 2014-2015. Soyons honnêtes en défalquant les mesures positives comme l'élargissement du FCTVA aux dépenses d'entretien de la voirie et la dotation de soutien à l'investissement ; nous proposons aussi à l'amendement n° 34 d'élargir le bénéfice du FCTVA aux dépenses d'investissement en haut débit, qui s'arrêtaient aux dépenses 2014, comme l'avait fait remarquer Philippe Adnot. La prolongation de la mesure avait été oubliée.

Nous acceptons l'effort de redressement à condition qu'on n'impose pas aux collectivités locales des dépenses en permanence. Le groupe socialiste avait voté l'an passé l'étalement de l'effort sur quatre ans. Il pourrait donc voter notre amendement, cela revient au même ! L'on a beau parler de réduire les normes, en pratique il ne se passe jamais rien...

M. Didier Guillaume . - Il se passe des choses !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Pour que l'État cesse de créer de nouvelles normes, il faut qu'elles aient un coût pour lui : notre amendement aura un effet vraiment vertueux.

M. Philippe Adnot . - Je soutiens le rapporteur général sur l'amendement n° 34. On oblige des territoires, notamment ruraux, à investir dans le haut débit sans même se rendre compte qu'ils ne peuvent pas récupérer la TVA. Il faut rétablir dans le projet de loi de finances rectificative ce remboursement depuis le début de l'année.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 34 concerne la période 2015-2022. Comme le FCTVA intervient l'année suivante, il pourrait prendre en compte les investissements 2015, sans y revenir en collectif budgétaire.

Mme Marie-France Beaufils . - L'amendement n° 32 peut paraître intéressant, parce qu'il étale la baisse de la DGF. Nous nous abstiendrons, parce que nous ne pouvons accepter de demander aux collectivités un effort contreproductif et un amendement qui réduirait les recettes du budget de l'État. Même si j'en comprends le principe, l'atténuation ne va pas dans le bon sens ; la suppression de cette ponction est souhaitable et nécessaire. La commission des finances de l'Assemblée nationale a étudié l'impact de cette mesure, en termes d'épargne brute ou de réduction du dynamisme économique des communes.

M. Claude Raynal . - Même amendement, même réponse : nous ne pouvons remettre en cause la participation nécessaire des collectivités au redressement des comptes de la Nation. On sait le poids du financement des collectivités au sein du budget de l'État. Si nous partageons globalement l'idée d'un étalement pour atténuer la brutalité de l'effet, ne nous cachons pas derrière les normes. Les collectivités, tout comme les citoyens, sont soumises aux changements de normes. Rembourse-t-on aux citoyens l'alarme anti-incendie qu'ils ont dû installer ? Pourquoi le ferait-on pour les collectivités ? L'État s'est saisi du dossier, vos chiffrent datent. En 2015, ils seront proches de zéro, malgré l'effet de quelques normes. Soyons clairs : depuis un an, l'État a pratiquementt réussi à ne pas créer de nouvelles charges pour les collectivités.

Il y aura 50 milliards d'euros d'économies. Avec vos amis, vous parlez de 100 à 150 milliards d'euros, avec des conséquences deux ou trois fois plus fortes. Comment cela n'aurait-il aucun effet sur les finances publiques ?

M. Vincent Capo-Canellas . - Nous partageons tous l'idée d'un étalement de l'effort des collectivités, dont l'ampleur a des conséquences dramatiques pour certaines d'entre elles. De même pour la fiscalité : les plus gros s'en sortent, les plus petits sont protégés par la DSU cible, tandis que les collectivités moyennes - notamment les villes moyennes avec des contraintes de ville-centre sans les recettes correspondantes - sont dans un étau, avec la suppression de la dotation nationale de péréquation, l'augmentation du FPIC... Le Gouvernement joue aux apprentis sorciers en déplaçant tous les curseurs. Par exemple, la réduction de dotation d'une ville moyenne, prévue à hauteur de 8 %, s'est finalement montée à 17 % ! L'évaluation du CNEN est un fait. On nous demande de réduire nos budgets et d'augmenter nos dépenses. Comment fait-on ? On va dans le fossé.

M. Bernard Delcros . - Si l'on s'accorde sur un effort partagé, où met-on le curseur ? Je m'oppose au gel de la péréquation que vous proposez : 317 millions d'euros nous manqueront. La péréquation est d'autant plus indispensable que la réduction de la DGF finit d'asphyxier des territoires ayant des difficultés démographiques et manquant de ressources propres.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les normes nouvelles coûteront plus de 500 millions d'euros. Selon l'Insee, les collectivités territoriales, représentaient 19 % des dépenses publiques et elles participeront à hauteur de 22 % aux 50 milliards d'économies. La péréquation a souvent des effets pervers : des communes sans recettes fiscales sont ainsi ponctionnées à un niveau insupportable. Prenons le temps d'examiner le dispositif et de trouver des solutions plus raisonnables.

Mme Michèle André , présidente . - Nous en débattrons cet après-midi.

M. Charles Guené . - Je regrette que les deux aspects ne soient pas dissociés. Je m'abstiendrai.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il n'est pas possible de le faire, il s'agit du montant de la DGF.

L'amendement n° FINC.32 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 33 corrige une erreur de référence.

L'amendement n° FINC.33 est adopté.

Article 11

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 34 corrige un oubli relatif au FCTVA sur les investissements dans le haut-débit.

L'amendement n° FINC.34 est adopté.

Article 11 bis

L'amendement de cohérence n° FINC.35 est adopté.

Article 13

L'amendement de conséquence n° FINC.36 est adopté.

Article 14

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'Institut national de la propriété industrielle (INPI) et le Centre national de la cinématographie et de l'image animée (CNC) échappaient au plafonnement des taxes. Avec les amendements n os 37 et 38, nous nous conformons au rapport du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO).

M. Maurice Vincent . - En l'attente d'informations complémentaires, je m'abstiendrai.

L'amendement n° FINC.37 est adopté, ainsi que l'amendement n° FINC.38.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Une rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive est prévue cette année ; les collectivités locales ayant des services d'archéologie préventive ne pourront plus la percevoir. Sécurisons les services locaux en laissant subsister ce fléchage par l'amendement n° 39, sur lequel nous sommes tous d'accord.

M. Michel Bouvard . - Est-il exact que, contrairement à la taxe d'aménagement, la redevance d'archéologie préventive soit due même en cas de recours sur le permis de construire ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous le vérifierons.

L'amendement n° FINC.39 est adopté.

Article 15

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 40 tire les conséquences de l'accord entre le ministère de la justice et les avocats et met en oeuvre les engagements de la ministre : il supprime le prélèvement sur les produits financiers des caisses de règlements pécuniaires des avocats (Carpa).

M. Antoine Lefèvre . - En tant que rapporteur spécial de la mission justice, je ne peux qu'approuver ! Tant le Conseil national des barreaux que le Barreau de Paris, qui parfois divergent, ont accepté cette mesure.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Selon la ministre de la justice, c'est au Sénat de trancher !

M. Maurice Vincent . - Laissons le Gouvernement en tirer les conséquences au lieu d'anticiper !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je ne fais que citer les propos de la ministre.

M. Maurice Vincent . - Soyons prudents, attention aux interprétations !

L'amendement n° FINC.40 est adopté.

Article 20

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 41, conforme à l'engagement du président de la République de ne pas créer de taxes nouvelles, supprime la hausse du taux de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) de 0,9 % à 1,3 %, qui les pénaliserait. Cette hausse équivaut au financement de plus de 150 000 prises de fibre optique ou de 700 antennes mobiles. Mieux vaut laisser l'intégralité du produit de la TOCE à France Télévisions que commettre un hold-up au profit du budget général, néfaste au déploiement du très haut débit.

M. André Gattolin . - Effectivement, cette augmentation donnerait un surgain de 75 millions d'euros, dont 25 millions d'euros seraient fléchés sur France Télévisions. Comme mon co-rapporteur Jean-Pierre Leleux, je ne suis pas un fanatique de ce type de taxes. Mais compte tenu de la situation de France Télévisions dans les deux à trois prochaines années -avant la réforme de la contribution à l'audiovisuel public - nous avions proposé une augmentation de deux euros de la redevance, ce qui déplaisait au groupe des Républicains, et notamment à Bruno Retailleau. Soyons cohérents : comment financera-t-on France Télévisions ? Je ne comprends pas la vision du groupe majoritaire.

M. Didier Guillaume . - Je partage la position modérée d'André Gattolin. Le rapporteur général soutient le président de la République et veut supprimer les taxes, mais il existe taxe et taxe ! Il en va de l'équilibre financier de France Télévisions. Ce n'est pas le moment de priver cette société de cette taxe !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le produit de la taxe au taux actuel de 0,9 % s'élève à 212,7 millions d'euros, or France Télévisions n'en percevrait en 2016 que 140 millions. Il suffirait de lui reverser la totalité du produit existant au lieu d'augmenter le taux.

M. Jean-François Husson . - C'est le service public !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La taxe a été créée pour cela, reversons-en le produit en totalité.

L'amendement n° FINC.41 est adopté.

Article 20 ter

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 42 ne porte pas sur de gros enjeux : il est rédactionnel et porte sur un article donnant la possibilité à l'État de récupérer les avoirs non réclamés des comptes inactifs de joueurs en ligne.

L'amendement n° FINC.42 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 43 précise les informations à transmettre aux joueurs lors de la clôture de leur compte.

L'amendement n° FINC.43 est adopté.

L'amendement rédactionnel n° FINC.44 est adopté.

Article 21 ter

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - En accord avec Dominique de Legge, je vous propose de supprimer l'article 21 ter qui revient sur le plafonnement à 30 % de la « décote Duflot » pour les cessions d'immeubles affectés au ministère de la défense. Par exception, celui-ci recevait des produits de cessions immobilières, mais la « décote Duflot » le privait de recettes exceptionnelles. Cela correspond aux engagements de la loi de programmation militaire.

M. Maurice Vincent . - Nous avions approuvé le dispositif à l'unanimité, nous le voterons de nouveau.

Quel bilan financier faites-vous de tous les amendements adoptés ? Malgré les deux milliards d'euros de décote, vous aurez moins de recettes ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous n'avons pas encore examiné les dépenses !

M. Michel Bouvard . - Je voterai cet amendement mais remettons à plat l'ensemble du dispositif pour éviter ces exceptions d'exceptions. Des décotes sont maintenues dans d'autres ministères. Ces sommes doivent être imputées lisiblement sur les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement ». Comme l'an dernier, je déposerai des amendements.

L'amendement n° FINC.45 est adopté.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter la première partie du projet de loi de finances pour 2016, telle que modifiée par les amendements qu'elle a adoptés.


* 1 Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

* 2 Avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2015-03 du 25 septembre 2015 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2016.

* 3 Cf. rapport n° 417 (2014-2015) sur le projet de programme de stabilité de la France 2015-2018 fait par Albéric de Montgolfier au nom de la commission des finances du Sénat.

* 4 Avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2015-01 du 13 avril 2015 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2015 à 2018.

* 5 Ainsi, une note figurant à la page 80 du programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 précise que « la croissance potentielle a été revue de +0,2 pt par an à partir de 2016, afin de refléter les effets des réformes structurelles (CICE et Pacte de responsabilité et de solidarité) ».

* 6 François Hollande, « Le changement, c'est maintenant. Mes 60 engagements pour la France », avril 2012.

* 7 Article 2 de la loi n° 2012-1059 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 8 Article 9 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 9 C'est-à-dire ceux dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 50 000 euros environ.

* 10 Loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

* 11 Article 3 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. L'exonération de cotisations salariales de sécurité sociale dont bénéficiaient ces rémunérations a également été abrogée par cette même loi.

* 12 Complétant le quotient conjugal, le quotient familial vise à tenir compte des charges supplémentaires liées à la présence d'enfant(s), en divisant le revenu net global par le nombre de parts attribuées en fonction du nombre d'enfant(s), avant d'y appliquer le taux marginal du barème correspondant. L'avantage fiscal résultant de l'application du quotient familial est plafonné.

* 13 Article 4 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 14 Article 3 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 15 Article 4 de la loi précitée de finances pour 2014.

* 16 Article 5 de la loi précitée de finances pour 2014.

* 17 Article 2 de la loi précitée de finances pour 2014.

* 18 Le Gouvernement avait indiqué l'année passée à votre rapporteur général que tous les foyers dont le revenu imposable par part de quotient familial était compris dans les tranches à 5,5 % et à 14 % au titre de l'imposition des revenus 2013 devaient être considérés comme des foyers à revenus modestes ou moyens.

* 19 Revalorisation exceptionnelle de 9 % du plafond de la décote prévue par l'article 2 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013, pour un coût estimé à 295 millions d'euros en 2013.

* 20 Revalorisation exceptionnelle de 5,8 % du plafond de la décote prévue par l'article 2 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, pour un coût estimé à 196 millions d'euros en 2014.

* 21 Loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 22 Selon l'évaluation préalable annexée au premier projet de loi de finances rectificative pour 2014, 3,7 millions de foyers devaient bénéficier de la mesure, pour un coût estimé à 1,16 milliard d'euros.

* 23 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 24 Évaluation préalable annexée au projet de loi de finances initiale pour 2015.

* 25 Cf. supra.

* 26 La réduction du nombre de bénéficiaires de la décote s'explique par l'effet de la suppression de la tranche à 5,5 % du barème.

* 27 Les autres bénéficiaires, environ 1,6 million, ont vu le montant de leur restitution au titre de l'impôt sur le revenu augmenter.

* 28 L'augmentation de l'indice des prix à la consommation hors tabac est fixée à + 0,1 % pour 2015 par rapport à 2014.

* 29 Le revenu fiscal de référence utilisé pour déterminer le bénéfice de l'exonération ou du taux réduit de CSG sur les revenus de remplacement étant le revenu fiscal de référence N-2.

* 30 Assemblée nationale, compte rendu intégral de la deuxième séance du 14 octobre 2015, p. 8135.

* 31 Article 2 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 32 Article 2 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 33 Communiqués de presse des 3 et 4 novembre 2015 du ministère des finances et des comptes publics.

* 34 Le montant est révisé par rapport à la loi de finances initiale pour 2015, avec 700 millions d'euros supplémentaires, compte tenu des recettes supplémentaires issues des dividendes et des plus-values mobilières ainsi que de la lutte contre la fraude en 2014, et malgré la baisse enregistrée dans le domaine des plus-values immobilières.

* 35 Le rendement de la seule tranche à 45 % est quant à lui estimé à 436 millions d'euros en 2015.

* 36 Loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000.

* 37 En l'absence de révocation formelle, le dirigeant doit apporter la preuve de la cessation forcée de ses fonctions.

* 38 Cf. commentaire de l'article 6 bis du présent projet de loi de finances.

* 39 L'article 229 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques inscrit dans la loi des règles d'encadrement des régimes de retraites à prestations définies, dites « retraites chapeau », versées aux mandataires sociaux et dirigeants des sociétés cotées, en liant leur progression aux performances de ces dirigeants et en limitant les droits acquis chaque année à 3 % du montant de leur rémunération annuelle.

* 40 Paragraphe 24.3 du code Afep-Medef de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées de juin 2013.

* 41 Autorité des marchés financiers, rapport 2015 sur le gouvernement d'entreprise et la rémunération des dirigeants.

* 42 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires, et la directive 2013/34/UE en ce qui concerne certains éléments de la déclaration sur la gouvernance d'entreprise, actuellement en cours d'examen par le Parlement européen.

* 43 Cela concerne également les nouveaux titulaires au titre des opérations extérieures (OPEX). Pour mémoire, à compter du 1 er octobre 2015, une durée de 4 mois en OPEX permettra d'obtenir une carte du combattant (150 000 bénéficiaires potentiels à ce jour selon les estimations du ministère de la défense).

* 44 Cf. 6 de l'article 195 du code général des impôts.

* 45 À comparer au plafonnement des effets du quotient familial qui est de 1 508 euros par demi-part additionnelle.

* 46 Article 12 de la loi n° 81-1160 du 31 décembre 1981 de finances pour 1982.

* 47 Environ 23 000 euros aujourd'hui.

* 48 Dernier chiffrage communiqué.

* 49 Cf. Rapport de Philippe Marini n ° 653 (2013-2014), page 26.

* 50 Il a toutefois levé le gage.

* 51 Article 84 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 52 Décret n° 2011-520 du 13 mai 2011 pris pour l'application de l'article 105 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 et décret n° 2012-547 du 23 avril 2012 pris pour l'application de l'article 83 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 53 Article 73 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 54 L'ancien dispositif « Malraux », qui perdure pour les rénovations entamées avant le 1 er janvier 2009 (et dont la mise en extinction est prévu à l'article 47 du présent projet de loi de finances) est à l'origine d'une dépense fiscale de 3 millions d'euros qui touche 3 000 foyers fiscaux.

* 55 Article 70 de la loi de décentralisation du 7 janvier 1983.

* 56 Loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

* 57 Décret n° 2009-1780 du 31 décembre 2009 fixant la liste des quartiers bénéficiaires du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés.

* 58 Défini à l'article 25 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

* 59 Article 26 du même texte.

* 60 Disponibles en ligne à l'adresse : http://www.territoires.gouv.fr/le-programme-national-de-requalification-des-quartiers-anciens-degrades-pnrqad

* 61 Amendement n° 744 présenté par Mme Boyer, M. Straumann, M. Remiller, M. Decool, M. Diard, M. Luca, M. Beaudouin, Mme Gruny, Mme Pons et M. Christian Ménard.

* 62 Cf. le commentaire de l'article 5 du projet de loi de finances initiale pour 2015 dans le rapport général n° 108 (2014-2015), tome II, p. 72.

* 63 L'arrêté du 1 er août 2014, pris en application de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l'habitation a modifié le zonage A, B et C applicable aux dispositifs d'aide à l'accession à la propriété et d'incitation à l'investissement locatif. 1 180 communes ont ainsi été reclassées dans des zones plus tendues qu'auparavant (contre 670 communes reclassées dans des zones moins tendues, à l'exception de la zone C).

* 64 Avant l'article 5 de la loi de finances initiale pour 2015, le dispositif « Duflot » prévoyait une seule durée d'engagement locatif de neuf ans.

* 65 Auparavant, le dispositif « Duflot » prévoyait déjà un taux de 18 % pour un engagement de neuf ans.

* 66 Rapport d'information n° 495 (2014-2015) de Claude Bérit-Débat, Président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études, sur le bilan annuel de l'application des lois au 31 mars 2015.

* 67 Cf . notamment la réponse écrite publiée le 11 mars 2014 à la question n° 48330 de notre collègue député Dominique Dord.

* 68 Commission élargie du 28 octobre 2015 à l'Assemblée nationale, relative à la mission « Égalité des territoires et logement ».

* 69 Les récents chiffres du Commissariat général au développement durable restent contrastés puisqu'à fin août 2015, même si le nombre de constructions autorisées augmentait toutefois de 8,7 % de juin à août 2015 par rapport au trimestre précédent, leur nombre sur les douze derniers mois régressaient encore de 6 % par rapport aux douze mois précédents, pour atteindre 361 900 logements, tandis que le nombre de logements mis en chantier diminuait également de 4 % sur la même période.

* 70 Sauf pour les cessions qui bénéficiaient d'une exonération entre le 1 er janvier 2013 et 31 décembre 2013, qui ne sont imposées qu'à partir du 1 er janvier 2014.

* 71 « Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci diminué, le cas échéant, des réductions d'impôt effectivement obtenues dans les conditions prévues à l'article 199 terdecies-0 A, ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation ».

* 72 Rapport n° 1428, 2013-2014.

* 73 La plus-value n'ouvre droit à aucun abattement du fait de la faible durée de détention alors que la moins-value subit un abattement de 65 %. Le gain net selon l'administration fiscale est donc de 8000 euros - 10000*(1-65%), soit 4 500 euros.

* 74 Il s'agit des fonctions soit de gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit d'associé en nom d'une société de personnes, soit de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions.

* 75 BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 §320.

* 76 « 30 M€ d'annulations de dettes fiscales, 35 M€ d'annulations de dettes sociales (caisses d'allocations familiales - remboursements de trop perçus d'allocations -, fond de solidarité logement, Pôle emploi, caisses de retraite) et 63 M€ d'annulations d'autres créances publiques (par exemple, impayés de loyer auprès de bailleurs sociaux) », Cour des comptes, rapport public annuel 2013, p. 225.

* 77 Aux termes de l'article L. 121-1 du code de commerce, « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ». Aux termes de l'article L. 110-1 du code de commerce, sont notamment constitutifs d'un acte de commerce « tout achat de biens meubles pour les revendre » ainsi que « toute entreprise de location de meubles ». Ainsi, dès lors que ces activités sont exercées à titre habituel par un particulier, elles sont considérées comme des activités commerciales, et imposables à ce titre. La notion d'activité exercée « à titre habituel » n'implique pas forcément une répétition fréquente des actes de vente, et peut couvrir des actes peu nombreux mais périodiques. Cette notion, dont la preuve peut être apportée au cas par cas par tout moyen, a donné lieu à la production d'une jurisprudence abondante ; peuvent notamment être considérés la régularité de l'activité, son caractère lucratif, le fait d'acheter dans le but de revendre, l'existence d'un système organisé de vente à distance ou encore la réalisation d'une présentation et d'une promotion des biens et services mis en vente etc. D'une manière générale, l'intention du vendeur semble être le critère déterminant.

* 78 De façon marginale, les revenus sont également susceptibles de relever de la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC). Définis par l'article 92 du code général des impôts, sont considérés comme des BNC « toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus », ce qui inclut notamment les professions libérales, ou de la catégorie des revenus fonciers, définis par l'article 14 du code général des impôts, qui ne concernent que la location de locaux non meublés.

* 79 Ces seuils sont définis à l'article 293 B du code général des impôts et sont aussi ceux de la « franchise en base » de TVA.

* 80 Article 151-0 du code général des impôts et articles L. 133-6-8 à L. 133-6-8-4 du code de la sécurité sociale. L'option pour le versement libératoire est toutefois soumise à des seuils inférieurs, qui tiennent compte de la composition du foyer fiscal : 26 631 euros pour une part (personne seule), 53 262 euros pour deux parts (couple), 79 893 euros pour trois parts (couple avec deux enfants). Seuils 2015 basés sur le revenu fiscal de référence (RFR) de l'année 2013.

* 81 Rapport n° 690 (2014-2015), « L'économie collaborative : propositions pour une fiscalité simple, juste et efficace », 17 septembre 2015, de Michel Bouvard, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Philippe Dallier, Jacques Genest, Bernard Lalande et Albéric de Montgolfier, rapporteur général. Voir également le rapport n° 691 (2014-2015) des mêmes auteurs, « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source ».

* 82 Par exemple, le coût moyen d'une petite voiture citadine est estimé à 6 150 euros par an pour 15 000 km parcourus, somme qui inclut l'amortissement de la voiture, le carburant, l'assurance, les péages et le stationnement, le contrôle technique etc. Source : Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), 2011.

* 83 L'abattement de 71 % est supérieur à 5 000 euros dès lors que le revenu brut est supérieur à 7 042 euros : l'application du droit commun, qui est automatique, est dès lors plus intéressante pour le contribuable.

* 84 De même, l'abattement de 50 % est supérieur à 5 000 euros dès lors que le revenu brut est supérieur à 10 000 euros.

* 85 Cet avantage peut donc être comparé avec la dispense de majoration de 25 % du bénéfice imposables pour les adhérents à un centre de gestion agréé (CGA), qui garantit la fiabilité de leurs déclarations fiscales.

* 86 Le régime des ventes à distance correspond principalement au e-commerce, mais aussi, de façon résiduelle, à la vente par correspondance traditionnelle. Les entreprises concernées sont celles des secteurs d'activité 4791A (vente à distance sur catalogue général) et 4791B (vente à distance sur catalogue spécialisé) de la nomenclature de l'Insee.

* 87 Directive n° 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.

* 88 Sont également concernés les personnes bénéficiant d'un régime dérogatoire (PBRD), c'est-à-dire, pour leurs acquisitions inférieures au seuil de 10 000 euros, les personnes morales non assujetties en raison de leur activité (collectivités locales, établissements publics etc.), les assujettis bénéficiant du régime de franchis en base (notamment les auto-entrepreneurs) et les exploitants agricoles placés sous le régime du remboursement forfaitaire agricole.

* 89 Source : Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD), juillet 2015.

* 90 Rapport n° 691 (2014-2015), « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source », 17 septembre 2015, de MM. Michel Bouvard, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Philippe Dallier, Jacques Genest, Bernard Lalande et Albéric de Montgolfier, rapporteur général. Voir également le rapport n° 690 (2014-2015) des mêmes auteurs, « L'économie collaborative : propositions pour une fiscalité simple, juste et efficace ».

* 91 Sont principalement concernées les entreprises étrangères établies dans l'UE qui réalisent en France des opérations soumises à la TVA. Accessoirement, les entreprises étrangères établies dans un pays tiers qui réalisent des opérations soumises à la TVA intracommunautaire, ce qui est rare, doivent également s'enregistrer auprès de la DRESG ou désigner un mandataire agissant sous leur responsabilité, à condition que le pays tiers ait conclu avec la France une convention d'assistance au recouvrement des créances fiscales (onze pays sont concernés).

* 92 Source : Ecommerce Europe 2015.

* 93 Prévu aux articles L. 82 A à L. 102 du livre des procédures fiscales (LPF), le droit de communication permet à l'administration fiscale d'obtenir auprès des contribuables ou des tiers (entreprises, établissements financiers, administrations publiques, organismes de sécurité sociale etc.) des renseignements servant à l'établissement de l'assiette et au contrôle de l'impôt. L'article 21 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 a élargi le droit de communication aux demandes portant sur des personnes non nommément désignées (pseudonyme, adresse électronique, compte sur un site d'annonces etc.). Il s'agit là d'une avancée importante, mais qui ne résout pas le principal problème du droit de communication : dès lors que le contribuable ou le tiers interrogé est situé à l'étranger, il n'est pas tenu de répondre - et en pratique il ne répond pas.

* 94 Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 95 L'exonération de CFE se limite au « montant de base nette imposable fixé, pour 2015, à 77 089 euros et actualisé chaque année ». À l'issue de l'exonération de cinq ans, l'entreprise commerciale bénéficie d'un abattement pendant trois ans (60 % la première année, 40 % la deuxième et 20 % la troisième).

* 96 Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 97 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 98 Cette distance a été réduite de 500 mètres à 300 mètres par l'article 29 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 99 Selon le bulletin officiel des finances publiques, le « contrat unique de construction » correspond à trois types de contrats :

- le contrat de promotion immobilière (article L. 221-1 du code de la construction et de l'habitation) ;

- le contrat de construction d'une maison individuelle avec fourniture de plan (article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation) ;

- le contrat de construction d'une maison individuelle sans fourniture de plan (article L. 232-1 du code de la construction et de l'habitation).

* 100 Ces plafonds de ressources correspondent à ceux applicables pour l'attribution de logements locatifs conventionnés dans les conditions définies à l'article L. 351-2 du code de la construction (article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation).

* 101 Il a toutefois le gage.

* 102 Pour mémoire, d'après ce rapport, « le dispositif vise à rendre attractif l'investissement en accession sociale dans certaines zones jugées prioritaires en termes de mixité sociale en créant un biais financier favorable en diminuant le coût du logement pour l'accédant. Le mécanisme de TVA réduite permet d'accroître le niveau de solvabilité des ménages ciblés qui, en général, n'auraient pas pu accéder à la propriété sans aide publique. Toutefois, non ciblée, une partie de cette aide pourrait être captée dans les prix dans les zones de pénurie d'offre ».

* 103 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 104 Il a toutefois levé le gage.

* 105 Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 106 Arrêté du 29 avril 2015 relatif à la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants et visés en priorité par le nouveau programme national de renouvellement urbain.

* 107 Règlement général de l'ANRU relatif au NPNRU du 8 août 2015.

* 108 Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.

* 109 Article 44 quindecies du Code général des impôts.

* 110 L'évaluation préalable mentionne un coût de 7 millions d'euros qui, d'après les données transmises à votre rapporteur général, ne doit pas être pris en considération.

* 111 Il s'agit des « communes caractérisées par une perte d'au moins cinquante emplois directs du fait de la réorganisation des unités militaires et établissements du ministère de la défense sur le territoire national et dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de site de défense » aux termes du 2° du 3 ter de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

* 112 I de l'article 1647 C septies du code général des impôts (CGI).

* 113 Ce plafond est fixé à 77 089 euros pour 2015.

* 114 Dont 344 millions d'euros pour les entreprises dont les effectifs sont compris entre 10 et 20 salariés et 4 011 millions d'euros pour les entreprises dont les effectifs sont supérieurs à 20 salariés.

* 115 Sont éligibles les sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d'instruments financiers, dont le capital et les droits de vote sont détenus à hauteur de 50 % au moins par une ou des personnes physiques et à hauteur de 34 % au moins par une ou plusieurs personnes ayant, au sein desdites sociétés, la qualité de président, directeur général, président du conseil de surveillance, membre du directoire ou gérant, ainsi que par les membres de leur foyer fiscal.

* 116 Décret n°2015-608 du 3 juin 2015. Depuis le 11 avril 1997, ce montant est relevé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.

* 117 Article L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

* 118 Article L. 2333-64 du général des collectivités territoriales.

* 119 Note du CAE n° 25 : « Faire prospérer les PME », octobre 2015.

* 120 Etude de Nila Cécile-Renaud et Paul-Antoine Chevallier, « L'impact des seuils de 10, 20 et 50 salariés sur la taille des entreprises françaises », Economie et statistiques, n° 437.

* 121 Etude de l'IFO, Délégation sénatoriale aux entreprises, juin 2015 : http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/delegation/entreprise/Effet-emploi-seuils_sociaux_Ifo_Francais-V2.pdf

* 122 Dans la mesure où une entreprise ne peut bénéficier de ce crédit d'impôt que trois exercices, il est en effet inutile de prévoir une neutralisation pour les deux exercices suivants.

* 123 Article L. 1253-8 du code du travail.

* 124 Source : tome II du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2016, dépense fiscale n° 320122.

* 125 Rapport n° 84 (2013-2014) de M. Marc Daunis, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 16 octobre 2013.

* 126 Ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés.

* 127 Définis, par le 1 quinquies de l'article 207 du code général des impôts, comme « les personnes physiques ou morales qui n'ont pas vocation à recourir aux services de la coopérative ou dont celle-ci n'utilise pas le travail, mais qui entendent contribuer par l'apport de capitaux à la réalisation des objectifs de celle-ci ».

* 128 Dans ce cas, la société dispose d'un délai de sept ans pour respecter l'engagement d'être détenu à 50 % au moins par le  ; faute de respect, la provision est réintégrée au bénéfice imposable, avec majoration de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI.

* 129 Source : tome II du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2016, dépense fiscale n° 230203.

* 130 Source : JO Sénat, 20 mai 2010, page 1282, réponse du secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation à la question écrite n° 12234 de Caroline Dumas.

* 131 Source : tome II du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2016, dépense fiscale n° 230203.

* 132 Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides de minimis.

* 133 En 2013, la France comptait 32 000 unités robotiques, contre 167 000 en Allemagne et 59 000 en Italie.

* 134 Rapport n° 156 (2013-2014) de M. François Marc, rapporteur général, sur le projet de loi de finances pour 2014.

* 135 Cf. commentaire de l'article 2 bis .

* 136 Compte-rendu de la deuxième séance de l'Assemblée nationale du 23 octobre 2008.

* 137 Loi n° 2015-990 du 6 août 2015.

* 138 Cinq amendements identiques ont été déposés, avec, comme premiers signataires, MM. Giraud, Faure, Alauzet, Courson et Mme Dalloz.

* 139 Le Gouvernement a toutefois levé le gage.

* 140 Source : J.O de l'Assemblée nationale, première séance du jeudi 15 octobre 2015, examen des amendements I-349, I-388, I-408, I-512 et I-695 portant article additionnel après l'article 6 et exposé des motifs des amendements portant article additionnel après l'article 6 précités.

* 141 Exposé des motifs des amendements portant article additionnel après l'article 6 précités.

* 142 L'exposé des motifs indique que pour 1 000 poids lourds acquis sur deux ans (scénario filière), le coût est estimé à 5,2 millions d'euros.

* 143 La méthanisation se définit comme un processus de dégradation de la matière organique, dans un milieu pauvre en oxygène, due à l'action de multiples bactéries. Elle peut avoir lieu naturellement dans certains milieux, tels que les marais, ou peut être mise en oeuvre volontairement dans des unités dédiées grâce à un équipement industriel. Cette dégradation conduit à la production d'un gaz appelé « biogaz », composé principalement de méthane, qui peut être transformé directement en électricité, en chaleur, en biocarburant, ou être injecté dans le réseau de gaz naturel. La méthanisation présente donc plusieurs avantages : elle permet de réduire les volumes de déchets organiques et les émissions de méthane, puissant gaz à effet de serre, dans l'atmosphère. En outre, elle contribue à la production d'énergie renouvelable, sous forme de biogaz. Cette technologie est donc à la fois une filière alternative de traitement des déchets organiques et une filière de production d'énergie renouvelable.

* 144 La loi dite « Grenelle I » est la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement tandis que la loi « Grenelle II » est la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

* 145 Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013: cf . le commentaire de l'article 24 quater (nouveau) dans le tome I du rapport de notre collègue François Marc, alors rapporteur général (rapport n° 217, 2013-2014).

* 146 Est considéré bâtiment rural toute construction affectée de façon permanente et exclusive à un usage agricole ainsi que le sol et les dépendances indispensables et immédiates de cette construction, telles que notamment les cours, passages, aires de battage, etc. Pour bénéficier de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, qui s'applique même s'il y a location et quel que soit le lieu de situation de l'immeuble, les bâtiments ruraux doivent faire l'objet d'une affectation permanente et exclusive à un usage agricole. Ainsi les locaux affectés à l'habitation et leurs dépendances demeurent imposables.

* 147 Pour calculer la valeur locative sur laquelle sont assises la TFPB et la CFE, il est appliqué un taux de 12 % à un prix de revient comptable, qui inclut le coût de la construction ou de l'acquisition et de pose des canalisations faisant corps avec la construction.

* 148 Il existe cependant d'autres soutiens publics tels que des aides européennes, des primes à la méthanisation des effluents, des aides de l'ADEME et des collectivités territoriales, ou, encore, un tarif de rachat par EDF de l'électricité issue de la méthanisation, plus élevé que ceux en vigueur pour l'électricité issue d'autres activité.

* 149 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 150 La durée de l'exonération se décompte à partir du 1 er janvier de l'année suivant celle où est intervenu l'achèvement des travaux, conformément au principe de l'annualité en matière de taxes foncières.

* 151 Il s'agit des aides de minimis telles que définies par le règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Ce règlement fixe pour chaque entreprise un plafond global d'aides publiques (dont les exonérations d'impôts) dont elle peut bénéficier, soit 200 000 euros sur trois ans.

* 152 Le montant décroît dans la mesure où le nombre de bénéficiaires diminuent chaque année, à mesure de l'atteinte de leur septième année d'existence.

* 153 http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/10079-PGP.html

* 154 Les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA), au nombre d'environ 12 500 en France, sont des sociétés coopératives agricoles, régies par le code rural et de la pêche maritime, dont l'objet est de mettre à la disposition de ses adhérents du matériel agricole et des salariés. Elles permettent de faciliter l'accès des petites exploitations à des matériels mécaniques performants, pour lesquels le niveau d'investissements exigés pourrait constituer une barrière pour une seule exploitation a fortiori de petite dimension. Leur succès est réel puisqu'elles représenteraient environ 240 000 adhérents.

* 155 Le système communautaire de management environnemental et d'audit (EMAS) est défini par le règlement (CE) n° 761 / 2001 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2001.

* 156 Évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016, tome I.

* 157 Le plafond de l'ensemble des composantes de la TGAP affectées à l'ADEME prévu par le présent projet de loi de finances pour 2016 est de 447,8 millions d'euros.

* 158 La procédure d'enregistrement constitue une autorisation simplifiée appliquée aux installations pour lesquelles les mesures techniques permettant de prévenir les aléas environnementaux sont connues et standardisées. La procédure d'autorisation par arrêté préfectoral concerne les installations présentant les risques de pollution les plus importants.

* 159 Inspection des installations classées, bilan d'activité 2014.

* 160 Évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2016, tome I.

* 161 Cartographie des risques et tendances des marchés financiers et sur l'épargne, n° 16, juillet 2015.

* 162 Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE.

* 163 Directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d'accise et abrogeant la directive 92/12/CEE.

* 164 Ainsi, les produits qui ont déjà été mis à la consommation dans un autre État membre de l'Union européenne sont soumis à la TICPE lors de leur réception en France.

* 165 Article 158 octies du code des douanes.

* 166 S'agissant du gazole et de l'essence, la taxe est assise sur les volumes mis à la consommation, mesurés à l'état liquide, à la température de 15° C et exprimés en litre.

* 167 Le supercarburant 95-E10 est un carburant pouvant contenir jusqu'à 10 % en volume d'éthanol.

* 168 Cette régionalisation partielle de la TICPE a été prévue par l'article 52 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 afin de compenser le transfert aux régions de certaines dépenses jusqu'alors assurées par l'État, suite à la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

* 169 Article 34 de la loi n°2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

* 170 Ces projets sont mentionnés aux articles 11 et 12 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 171 Le plafond de TICPE affecté à l'AFITF est en effet abaissé de 1 139 millions d'euros à 715 millions d'euros. Ceci est dû à la réduction en 2016 des décaissements liés à la résiliation du contrat liant l'État à Ecomouv' en 2015.

* 172 Cet écart s'est toutefois réduit. D'après l'Agence de l'Environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), les véhicules diesel neufs consomment aujourd'hui en moyenne 5 litres de carburant aux 100  kilomètres contre 6 litres aux 100 kilomètres pour les véhicules essence.

* 173 Le Royaume-Uni a supprimé l'écart de fiscalité existant depuis le 1 er janvier 2013.

* 174 Cour des comptes, « Les dépenses fiscales rattachées à la mission « Écologie, aménagement et développement durables » et relatives à l'énergie », référé n° 65 241 du 17 décembre 2012.

* 175 Projet annuel de performances de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » annexé au projet de loi de finances pour 2016.

* 176 Article 32 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 177 Il est à noter qu'à l'initiative du Sénat, la loi n° 2015- 992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit un objectif d'évolution de la composante carbone intégrée à la TICPE afin d'atteindre une valeur de la tonne carbone de 56 euros en 2020 et de 100 euros en 2030.

* 178 Article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 179 Articles 265 septies et 265 octies du code des douanes.

* 180 Ce taux plancher, auparavant de 39,19 centimes d'euro, a été augmenté de 4 centimes d'euro par l'article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 181 Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA), Tableau de bord automobile n° 43, 2 e trimestre 2015.

* 182 En effet, la consommation de carburant au kilomètre est inférieure pour le gazole, comparé à l'essence, du fait de la meilleure performance énergétique de la motorisation des véhicules diesel.

* 183 Les recettes brutes d'impôt sur les sociétés seraient quant à elles minorées de 30 millions d'euros, et les recettes de TVA majorées de 16 millions d'euros.

* 184 Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 185 Article 19 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 186 Article 7 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

* 187 Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 188 Source : exposé des motifs de l'amendement n°I-714 portant article additionnel après l'article 8.

* 189 Ce droit de timbre ne concernait en pratique que les intermédiaires financiers établis en France, favorisant ainsi les délocalisations. Cf. rapport général n° 91 (2007-2008) de M. Philippe MARINI, fait au nom de la commission des finances et déposé le 22 novembre 2007, p. 61.

* 190 Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers.

* 191 Cf. rapport n° 390, tome I (2011-2012) de Mme Nicole BRICQ, fait au nom de la commission des finances et déposé le 21 février 2012, p. 231.

* 192 Article 7 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 193 Cf. Fiche questions / réponses de la Direction générale des finances publiques portant sur la taxe sur les transactions financières.

* 194 Euroclear France appartient au groupe Euroclear , qui rassemble les dépositaires centraux britannique, belge, hollandais, finlandais et suédois, ainsi que le dépositaire central international Euroclear Bank .

* 195 I de l'article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.

* 196 BOI-TCA-FIN-20-20150204.

* 197 Décret n° 2012-957 du 6 août 2012 relatif à la taxe sur les opérations à haute fréquence sur titre de capital.

* 198 Décret n° 2012-957 du 6 août 2012 précité.

* 199 CERFA n°10960 et CERFA n°11417.

* 200 Amendements n° 121 (M. Giraud), 230 (Mme Rabault), 242 (M. Tetart), 307 (M. Alauzet), 422 (M. Cherki) et 704 (Mme Guittet).

* 201 Proposition de directive du Conseil du 28 septembre 2011 établissant un système commun de taxe sur les transactions financières et modifiant la directive 2008/7/CE.

* 202 La Belgique, l'Allemagne, l'Estonie, la Grèce, l'Espagne, la France, l'Italie, l'Autriche, le Portugal, la Slovénie et la Slovaquie.

* 203 Proposition de directive du Conseil du 14 février 2013 mettant en oeuvre une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financières.

* 204 Thornton Matheson, « Taxing Financial Transactions : Issues and Evidence », FMI, 2011.

* 205 Dorothea Schafer, "Financial transaction tax contributes to more sustainability in financial markets", Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung, 2012, p. 10.

* 206 Commission européenne, « FTT - Collection methods and data requirements », Final Report, octobre 2014, p. 101.

* 207 Cf. pour un bilan des études empiriques disponibles : Gunther Capelle-Blancard et Olena Havrylchyk, « Taxer les transactions financières n'a aucun effet sur la volatilité des marché », La Lettre du CEPII, n° 331, 26 mars 2013, p.6.

* 208 Annexe « Développement des recettes du budget général et des dépenses fiscales » au projet de loi de règlement 2014, p. 25.

* 209 Gunther Capelle-Blancard et Olena Havrylchyk, « Taxer les transactions financières n'a aucun effet sur la volatilité des marché », La Lettre du CEPII, n° 331, 26 mars 2013 ; Leonardo Becchetti, Massimo Ferrari et Ugo Trenta, « The impact of the French Tobin tax », CEIS Tor Vergata, Research paper series, volume 11, issue 4, n° 266, march 2013 ; Commission européenne, « Did the new French tax on financial transactions influence trading volumes, price levels and / or volatility on the taxed market segment? - A trend analysis ». Jean-Édouard Colliard et Peter Hoffmann, « Taxe sur les transactions financières : Théories, expériences et implémentation », Institut Louis Bachelier, Opinions & Débats, n° 9, février 2015.

* 210 Annexe « Développement des recettes du budget général et des dépenses fiscales » au projet de loi de règlement 2014, p. 25.

* 211 AMF, Risques et tendances n° 16, Cartographie 2015 des risques et tendances sur les marchés financiers et pour l'épargne, p. 39.

* 212 Annexe « Développement des recettes du budget général et des dépenses fiscales » au projet de loi de règlement 2014, p. 25.

* 213 Règlement (UE) n° 236/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 sur la vente à découvert et certains aspects des contrats d'échange sur risque de crédit.

* 214 Commission européenne, « FTT - Collection methods and data requirements », Final Report, octobre 2014.

* 215 Cf. compte-rendu du «Shares Working Together Steering Group», 28 juillet 2014 :
https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/417159/SWTSG_Minutes_28_July_2014.pdf

* 216 Charles-Albert Lehalle, "Le rôle du market making face à la modernisation des marchés électroniques", Institut Louis Bachelier, 2014.

* 217 Décret n° 2014-444 du 29 avril 2014 relatif au fonds de soutien aux collectivités territoriales et à certains établissements publics ayant souscrit des contrats de prêt ou des contrats financiers structurés à risque.

* 218 Cf. Évaluation préalable au projet de loi de finances pour 2014.

* 219 La charte Gissler permet de classer les emprunts structurés en leur attribuant un chiffre et une lettre correspondant à leur degré de toxicité. Le chiffre (de 1 à 5) traduit la complexité du sous-jacent. La lettre (de A à E) traduit la complexité de la formule de calcul. À titre d'illustration, la lettre « E » correspond aux formules de calcul dont le multiplicateur peut aller jusqu'à 5, tandis que les chiffres 3, 4 et 5 correspondent aux emprunts indexés sur un écart d'indice zone euro, hors zone euro ou mixte.

* 220 Voir sur ce point le rapport n° 307 (2014-2015) de M. Albéric de Montgolfier sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord concernant le transfert et la mutualisation des contributions au Fonds de résolution unique, fait au nom de la commission des finances et déposé le 4 mars 2015.

* 221 Cour des comptes, « La dette des établissements publics de santé », communication à la commission des affaires sociales et à la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l'Assemblée nationale, avril 2014, p.95.

* 222 Il s'agit des emprunts hors charte Gissler ou classés 3E, 4E et 5E.

* 223 Instruction ministérielle DGOS/PF1/DGFiP/CL1C/CL2A n° 2014-363 du 22 décembre 2014 relative au dispositif d'accompagnement des établissements publics de santé dans la sécurisation de leurs prêts structurés.

* 224 Le total des produits est défini par l'instruction ministérielle comme la « somme des soldes créditeurs - la somme des soldes débiteurs des comptes de la classe 7 des comptes de résultat principal et annexes ». Il correspond à la surface financière de l'établissement de santé, l'objectif du dispositif étant de viser les établissements les plus fragiles (du fait de leur petite taille) et de ne pas dégrader le taux de prise en charge.

* 225 Pour les collectivités territoriales, les emprunts classés 3E, 4E et 5E sont également pris en compte, sous certaines conditions.

* 226 Cour des comptes, « La dette des établissements publics de santé », précité, p. 105.

* 227 Cf. Maurice Vincent, « Les défis de la SFIL : financement des collectivités et résolution du problème des « emprunts toxiques », rapport d'information n° 58 (2015-2016) du 14 octobre 2015.

* 228 D'après le Fonds monétaire international (FMI), le taux de change effectif réel du franc suisse s'est apprécié de 26 % entre 2007 et 2011.

* 229 Natixis, Flash Marchés, « Honnêtement, la politique de la Banque nationale suisse est difficile à comprendre », 16 janvier 2015, n° 35.

* 230 Cour des comptes, La dette des établissements publics de santé, communication à la commission des affaires sociales et à la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l'Assemblée nationale, avril 2014, p. 103.

* 231 Décret n° 2015-619 du 4 juin 2015 modifiant le décret n° 2014-444 du 29 avril 2014 relatif au fonds de soutien aux collectivités territoriales et à certains établissements publics ayant souscrit des contrats de prêt ou des contrats financiers structurés à risque.

* 232 I de l'article 111 de la loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a ainsi modifié le deuxième alinéa du 1 du I de l'article 92 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 233 Cf. Communiqué de presse, n° 206/70, "Emprunts structurés : le Gouvernement porte à 3 milliards d'euros le fonds de soutien des collectivités territoriales en mobilisant 1,5 milliard d'euros supplémentaires", 24 février 2015.

* 234 Instruction interministérielle DGOS/PF1/DGFIP/CL1C/CL2A n° 2015-251 du 28 juillet 2015 relative à la révision du dispositif d'accompagnement des établissements publics de santé dans la sécurisation de leurs prêts structurés.

* 235 Cf. Communiqué de presse, « Emprunts structurés : 300 millions d'euros d'aides supplémentaires sur 10 ans pour les hôpitaux », 24 février 2015.

* 236 Deuxième séance publique du vendredi 16 octobre 2015.

* 237 Article 32 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

* 238 Andréas Ruhlmann, « L'EUR/CHF - 1.20 n'est plus si loin », Bilan, 14 Septembre 2015.

* 239 FMI, Rapport pilote sur la stabilité extérieure pour l'année 2015, juin 2015, p. 54.

* 240 En se basant sur les évaluations du FMI, on peut estimer que le franc suisse serait actuellement surévalué de 10 à 20 %, une fois prise en compte l'appréciation de l'ordre de 9 % observée en 2015.

* 241 À titre d'exemple, la BNS avait confirmé être intervenue le 29 juin 2015 pour limiter l'appréciation de sa monnaie du fait des incertitudes importantes en Grèce.

* 242 Article 6 du décret n° 2014-444 précité.

* 243 I de l'article 6 du décret n° 2014-444 précité.

* 244 Loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.

* 245 Loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

* 246 Loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.

* 247 Loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008.

* 248 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 249 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 250 Il s'agissait également d'harmoniser ce dispositif avec celui proposé à l'article 4 du projet de loi de finances pour 2015 concernant les abattements applicables aux cessions de terrains à bâtir.

* 251 Loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 252 « Egalite et citoyenneté : la République en actes », réunion interministérielle du 6 mars 2015.

* 253 Règlement général de l'ANRU relatif au NPNRU du 8 août 2015.

* 254 Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 255 Arrêté du 29 avril 2015 relatif à la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants et visés en priorité par le nouveau programme national de renouvellement urbain.

* 256 Article 42 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 257 Article 40 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

* 258 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 259 Selon les données du rapport 2015 de l'Observatoire des finances locales.

* 260 Ceci représente la moitié de la hausse de la péréquation en 2016 (cf. infra).

* 261 Article 28 de la loi du 8 août 2014 de finances rectificatives pour 2014.

* 262 Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 263 Article 1388 bis du code général des impôts.

* 264 Article 1383 C ter du code général des impôts.

* 265 Article 1466 A du code général des impôts.

* 266 Cf. commentaire de l'article 11 ter du présent rapport général.

* 267 Cour des comptes, rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, octobre 2015.

* 268 Observatoire des finances locales, Les finances des collectivités territoriales en 2015, 16 juillet 2015.

* 269 Conseil national d'évaluation des normes, Rapport public d'activité 2014.

* 270 La Cour cite plusieurs cas de collectivités concernées. À titre d'exemple, le coût brut de la réforme pour la commune de Honfleur s'est élevé à 354 000 euros, avec un reste à charge estimé après compensation à hauteur de 136 000 euros dans l'hypothèse la plus favorable.

* 271 Les dépenses d'investissement du bloc communal sont en partie liées au cycle électoral : elles augmentent progressivement au cours du mandat et diminuent au début du mandat suivant.

* 272 Rapport de l'Observatoire des finances locales 2009.

* 273 D. Besson, « L'investissement des administrations publiques locales. Influence de la décentralisation et du cycle des élections municipales », Insee Première, n° 867, 2002.

* 274 Rapport d'information n° 616 relatif à l'évolution des finances locales à l'horizon 2017 (tome II) : « Comment les collectivités territoriales s'adaptent-elles à la baisse des dotations de l'État ? ».

* 275 Audition du 15 septembre 2015 par la commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux EPCI.

* 276 Fédération nationale des travaux publics, conférence de presse du 5 novembre 2015.

* 277 Ibid.

* 278 Article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

* 279 En effet, la loi de finances pour 2015 a augmenté le taux de compensation forfaitaire, afin de prendre en compte la diminution de la part de la contribution française au budget de l'Union européenne assise sur la ressource TVA.

* 280 Article 46 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative.

* 281 Cf. objet de l'amendement n° 24 rect. bis présenté au Sénat par MM. Sido, G. Larcher, Mercier, Hérisson, de Broissia, Guené et Gaillard, au projet de loi de finances rectificative pour 2003, 15 décembre 2003.

* 282 Selon l'estimation du Gouvernement conduisant à une augmentation du montant du PSR prévu à l'article 13 du présent projet de loi de finances.

* 283 À ce titre, voir le rapport public d'activité 2014 du Conseil national d'évaluation des normes, présidé par Alain Lambert, juillet 2015.

* 284 Prévu par l'article 59 du présent projet de loi de finances.

* 285 Article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales.

* 286 Arrêté du 29 avril 2013 relatif à l'approbation du cahier des charges de l'appel à projets « France très haut débit - Réseaux d'initiative publique ».

* 287 Loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

* 288 Loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007.

* 289 La proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy adopté à l'unanimité le 21 octobre dernier en seconde lecture prévoit le retrait des représentants du département et de la région de la Guadeloupe dans la mesure où il n'existe plus de lien budgétaire entre les trois collectivités.

* 290 Loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008.

* 291 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 292 Loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

* 293 Deuxième à cinquième année pour les communes et EPCI situés dans les cantons où l'État anime une politique de conversion industrielle.

* 294 Due à la perte de produit de CVAE afférent aux entreprises à l'origine de la perte de base de CFE.

* 295 Propos tenus à l'Assemblée nationale le 9 octobre 2015.

* 296 Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.

* 297 Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 298 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 299 Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

* 300 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 301 Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

* 302 Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

* 303 Décisions QPC n°2011-142/145 du 30 juin 2011, départements de la Seine-Saint-Denis et autres.

* 304 Article 60 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

* 305 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 306 Article 41 de la loi n° 2013-278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 307 Article 40 de la loi n° 2013-278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 308 Article 123 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 309 Loi n°2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

* 310 Loi n°2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 311 Le RSA dit « socle » demeure financé par les départements ; le RSA dit « activité » est financé par l'État.

* 312 Ordonnance n° 2010-686 du 24 juin 2010 portant extension et adaptation dans les départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 313 Loi n° 2008-1425 de finances pour 2009.

* 314 Loi n°2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 315 Loi n°2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 316 Loi n°2013-1278 du 30 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 317 Cet ajustement est mentionné au b du 2 du II de l'article 44 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 318 Cet ajustement est mentionné au 3 du II de l'article 44 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 319 Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 320 Prévu par l'article 9 de l'ordonnance n° 2012-785 du 31 mai 2012 portant extension et adaptation du code de l'action sociale et des familles au département de Mayotte.

* 321 L'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales pose le principe de la compensation aux collectivités territoriales des charges transférées par l'État : « tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre l'État et les collectivités territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'État aux collectivités territoriales ou à leurs groupements des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences ».

* 322 Loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.

* 323 La DGF des régions a été créée à l'occasion de cette réforme.

* 324 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 325 Article 43 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 326 Article 30 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 327 Article 6 de la loi n°83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État.

* 328 Article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

* 329 Le montant total de cette dotation, versée aux différentes catégories de collectivités assurant la gestion d'un port maritime non autonome, s'élève à 51,9 millions d'euros pour l'année 2016 d'après le présent projet de loi de finances.

* 330 Ce transfert a été prévu par l'article 124 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

* 331 Cette modification a été introduite par l'article 41 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.

* 332 Article 30 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 333 L'article 1 er de cette loi crée sept nouvelles régions en substitution de seize régions : Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Normandie, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes, Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes.

* 334 Voir le commentaire de l'article 10.

* 335 Voir le commentaire de l'article 4.

* 336 Voir le commentaire de l'article 11.

* 337 Voir le commentaire de l'article 11 ter.

* 338 L'État alloue des fonds non consomptibles aux opérateurs qui, en contrepartie du dépôt de ces fonds au Trésor, bénéficient d'un financement censé correspondre à la rémunération des fonds.

* 339 Article 2 de la loi n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

* 340 I de l'article 34 de la LOLF.

* 341 Article 51 de la LOLF. Cette annexe est intégrée au tome I des évaluations des voies et moyens, qui récapitule les évaluations de recettes.

* 342 Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

* 343 Annexe « Voies et moyens » jointe au PLF 2016, p. 137.

* 344 Annexe « Voies et moyens » jointe au PLF 2015, p. 144.

* 345 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 346 Conseil des prélèvements obligatoires, « La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes », juillet 2013.

* 347 De façon plus marginale, sont également inclus dans ce montant l'indemnité de défrichement affectée au Fonds stratégique de la forêt et du bois (- 8 millions d'euros) et la taxe d'aménagement affectée aux collectivités territoriales (+ 5 millions d'euros), qui ne font pourtant pas partie du périmètre de l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012.

* 348 Sur l'action 09 « Patrimoine archéologique » du programme « Patrimoines » de la mission « Culture ».

* 349 Décret n° 2015-525 du 12 mai 2015 portant dissolution au 31 décembre 2015 des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines et modifiant le décret n° 2006-1140 du 13 septembre 2006 portant création de l'Établissement public foncier d'Ile-de-France.

* 350 Article 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

* 351 Il s'agit de la moyenne mensuelle des ressources de la dernière année civile, dont sont exclues les prestations familiales, les prestations sociales à objet spécialisé (prime à la naissance, allocation de rentrée scolaire, etc.), l'aide personnalisée au logement (APL) et le revenu de solidarité active (RSA).

* 352 Article 128 de la loi n° 2000-1352 du 30 décembre 2000 de finances pour 2001.

* 353 Analyse synthétique des crédits et principales observations des rapporteurs spéciaux, dans le rapport général n° 92 (2000-2001) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2000.

* 354 Article 40 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

* 355 Article 128 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 356 Article 115 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 357 Article 1 de l'arrêté du 28 décembre 2006 fixant la majoration des unités de valeur pour les missions d'aide juridictionnelle totale.

* 358 Article 28 de la loi n° 91-647 précitée.

* 359 Article 54 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

* 360 Article 128 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 361 Article 35 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 362 Selon l'évaluation préalable de l'article 19 du projet de loi de finances pour 2015.

* 363 Mission « Justice », annexe à la loi de finances initiale pour 2015.

* 364 En contrepartie de la suppression de la contribution pour l'aide juridique.

* 365 Il s'agit des assurances de protection juridique « autres que celles ayant pour objet exclusif ou principal de prendre en charge la défense pénale et le recours de droit commun en vue d'obtenir la réparation d'un préjudice personnel de l'assuré, suite à un accident » (article 1001 du CGI).

* 366 Prévue par l'article 302 bis Y du CGI.

* 367 Prévu par l'article 1018 A du CGI.

* 368 Réponse du ministère de la justice au questionnaire budgétaire.

* 369 Rapport d'information n° 23 (2007-2008) de M. Roland du Luart, fait au nom de la commission des finances, « L'aide juridictionnelle : réformer un système à bout de souffle », 9 octobre 2007.

* 370 Rapport sur les professions du droit, mission confiée par le Président de la République à Maitre Jean-Michel Darrois, mars 2009.

* 371 Rapport d'information n° 3319 de M. Philippe Gosselin et Mme George Pau-Langevin, en vue d'améliorer l'accès au droit et à la justice, 6 avril 2011.

* 372 Rapport d'information n° 680 (2013-2014) de Mme Sophie Joissains et M. Jacques Mézard, fait au nom de la commission des lois, « Aide juridictionnelle : le temps de la décision », 2 juillet 2014.

* 373 « Financement et gouvernance de l'aide juridictionnelle : à la croisée des fondamentaux - Analyse et propositions d'aboutissement », Jean-Yves Le Bouillonnec, octobre 2014.

* 374 Avocats assistant une personne déférée devant le procureur de la République qui envisage de la poursuivre (au titre des articles 394 et 395 du code de procédure pénale) ou assistant une personne détenue faisant l'objet d'une procédure disciplinaire en relation avec la détention.

* 375 Selon les évaluations préalables.

* 376 Après la hausse de 2,6 point (de 9 % jusqu'en 2015 à 11,6 %) prévue par l'article 35 de la loi de finances pour 2015 précitée.

* 377 Après le relèvement de 1,66 euro (de 9,5 euros à 11,16 euros) prévu par l'article 35 de la loi de finances pour 2015 précitée. En trois ans (entre 2014 et 2017), la hausse aura donc été de plus de 50 %.

* 378 Décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 censurant le III de l'article 50 de la loi n° 2015-990 qui « institue une contribution à l'accès au droit et à la justice destinée à financer le fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice (...) due par les personnes physiques ou morales titulaires d'un office de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d'huissier de justice ou de notaire ou exerçant à titre libéral l'activité d'administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire, d'avocat pour les droits et émoluments perçus en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires (...) ». Le Conseil constitutionnel, considérant que « la contribution est assise sur la valeur hors taxes de tout bien ou sur le montant hors taxes de tout droit, pour lequel le tarif est fixé proportionnellement à ceux-ci, et qui est supérieur à un seuil de 300 000 euros ; qu'il résulte toutefois des dispositions des articles L. 444-2 et 444-3 du code du commerce, d'une part, que les prestations faisant l'objet d'un tarif proportionnel sont déterminées par le pouvoir réglementaire et, d'autre part, que le seuil de 300 000 euros peut être modifié par arrêté ; que, par suite, en habilitant le pouvoir réglementaire à fixer les règles concernant l'assiette de la taxe contestée, le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ».

* 379 Voir tableau « Recettes nouvelles pour financer la réforme ».

* 380 Cf. mesures d'économies.

* 381 Pour plus de détails sur le fonds de solidarité pour le développement, voir le commentaire de l'article 14.

* 382 Voir le commentaire de l'article 8 quater.

* 383 Voir le commentaire de l'article 14.

* 384 Voir Philippe Marini, La recevabilité financière des amendements et des propositions de loi au Sénat , rapport d'information n° 263 (2013-2014).

* 385 Voir le commentaire de l'article 14.

* 386 Assemblée nationale, première séance du lundi 19 octobre 2015.

* 387 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 388 Le produit des amendes du stationnement routier et de la circulation était réparti entre le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », créé par la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) et l'ACSé jusqu'à sa dissolution le 1 er janvier 2015.

* 389 Cette modification s'effectue conformément à l'article 19 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances qui dispose que « l'affectation d'une recette à un compte spécial ne peut résulter que d'une disposition de loi de finances ».

* 390 Loi n°2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance - Article 5.

* 391 Le financement du FIPD se décompose de la façon suivante : les amendes forfaitaires et amendes forfaitaires majorées (45 millions d'euros), des subventions provenant des ministères de la justice, de l'éducation nationale, des affaires sociales et de l'intérieur (7,9 millions d'euros) et une subvention exceptionnelle de 20 millions d'euros en 2015 au titre du plan de lutte anti-terrorisme 2015-2017.

* 392 Rapport n° 859 enregistré à la Présidence du Sénat le 19 septembre 2013.

* 393 « Rapport de synthèse sur l'évolution du stationnement payant » de Mme Bolliet et MM. Andrieu, Mazard, Hossard, Gagneron, Desportes, Clavreul, Fedou (juin 2005), « Rapport sur la dépénalisation et la décentralisation du stationnement » du Sénateur Louis Nègre (novembre 2011), « La gestion du produit des amendes de circulation routière » dans le Rapport public annuel 2010 de la Cour des comptes (février 2010).

* 394 II de l'article 62 de la loi n°2010-1657 du 20 décembre 2010 de finances pour 2011, modifiée par la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 395 Rapport n° 370 (2014-2015) de Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et François Pillet, fait au nom de la commission spéciale.

* 396 Sommes relatives aux services fixes (téléphonie fixe et Internet) et aux services mobiles, y compris les services de télécommunications fournis sous forme de cartes prépayées ; sommes relatives aux services de capacité (liaisons louées et transport de données).

* 397 Loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

* 398 Le programme 01 « Contribution au financement de l'audiovisuel public » de la mission « Médias » a été créé dans la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 399 Source : Cour de justice de l'Union européenne, arrêt du 27 juin 2013 dans l'affaire C-485/11, Commission/France.

* 400 Ex-redevance audiovisuelle.

* 401 Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 402 Cette disposition vise les professionnels, pour qui la CAP est perçue selon les mêmes modalités que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Pour mémoire, la redevance des professionnels est due au titre de chaque appareil détenu, avec un tarif dégressif en fonction du nombre d'appareils. En outre, un abattement supplémentaire est applicable aux hôtels saisonniers dont la durée d'exploitation n'excède pas neuf mois. Enfin, le tarif est multiplié par quatre si l'établissement est un débit de boisson.

* 403 Aux termes du III de l'article 1605 du code général des impôts, « ce montant est indexé chaque année sur l'indice des prix à la consommation hors tabac, tel qu'il est prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée. Il est arrondi à l'euro le plus proche ; la fraction d'euro gale à 0,50 est comptée pour 1 ».

* 404 « Pour un nouveau modèle de financement de l'audiovisuel public : trois étapes pour aboutir à la création de « France Médias » en 2020 », rapport d'André Gattolin et Jean-Pierre Leleux au nom de la commission des finances et de la commission de la culture du Sénat, n° 709, (2014-2015).

* 405 Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

* 406 Pour mémoire, ce compte de concours financier s'est substitué au compte d'avance n° 903-60  « Avances aux organismes de l'audiovisuel public ».

* 407 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 408 Ceux-ci sont imputés en dépenses sur le programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

* 409 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2014 du compte de concours financiers (CCF) « Avances à l'audiovisuel public », mai 2015.

* 410 Montant toutes taxes comprises (TTC).

* 411 Compte de concours financiers + dotation budgétaire.

* 412 Source : évaluation préalable jointe au présent article.

* 413 Article 106-II du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

* 414 Soit une hausse de  219 793 foyers par rapport à 2015.

* 415 Celle-ci aboutit à une hausse de 1 euro du montant de contribution à l'audiovisuel public, pour un total de 137 euros en métropole, et de 87 euros dans les départements d'outre-mer en 2016.

* 416 L'amendement du Gouvernement ayant été déposé trop tardivement, la commission des finances n'a pas pu l'examiner.

* 417 Source : exposé des motifs de l'amendement n° I-822 à l'article 20 déposé par le Gouvernement.

* 418 L'amendement I-678, qui revalorise les montants des seuils et des abattements conditionnant le bénéfice des exonérations de la taxe d'habitation en fonction du revenu à hauteur de 2 %, a pour conséquence le relèvement des seuils qui conditionnent le bénéfice des exonérations de contribution à l'audiovisuel public. Le montant des remboursements et dégrèvements de CAP est à ce titre majoré de 14,6 millions d'euros.

* 419 Voir le tableau présentant l'évolution des recettes du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » attribuées aux organismes de l'audiovisuel public depuis 2013.

* 420 Pour mémoire, les opérateurs se sont engagés en mai 2015 à fournir d'ici mi-2017 la 3 G aux 2 200  communes qui ne sont actuellement pas couvertes, et à couvrir en 2 G d'ici la fin de l'année 2016 les bourgs ne disposant d'aucun service de téléphonie mobile, dans le cadre de l'application de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. L'ARCEP dispose d'un pouvoir de sanction en cas de non-respect de ces objectifs.

* 421 Source : rapport Greenwich de 2011.

* 422 Soit depuis le projet de loi de finances pour 2013.

* 423 Pour mémoire, en 2015, il avait fait le choix d'augmenter de deux euros le montant de la CAP au-delà de l'inflation.

* 424 Source : J.O de l'Assemblée nationale, première séance du lundi 19 octobre 2015, examen de l'article 20 du projet de loi de finances pour 2016.

* 425 Source : J.O de l'Assemblée nationale, première séance du lundi 19 octobre 2015, examen de l'article 20 du projet de loi de finances pour 2016.

* 426 Source : exposé des motifs de l'amendement n°I-656 à l'article 20 déposé par Franck Riester.

* 427 France métropolitaine, départements d'outre-mer et collectivités d'outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy.

* 428 Deux ans en cas de décès du titulaire du compte.

* 429 En particulier en cas d'inscription du joueur sur le fichier des personnes interdites de jeux ou en cas d'inactivité du compte pendant une période de douze mois, conformément à l'article 7 du décret n° 2010-518 du 19 mai 2010 relatif à la mise à disposition de l'offre de jeux et de paris par les opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne.

* 430 Auxquels est parfois adjoint le principe de sincérité, découlant de l'article 32 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances qui prévoit que « les lois de finances présentent de façon sincère l'ensemble des ressources et des charges de l'État. Leur sincérité s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler ».

* 431 Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001.

* 432 Qui en comprennent quatre : outre les comptes de commerce précités, existent également les comptes d'affectation spéciale, les comptes d'opérations monétaires et les comptes de concours financiers.

* 433 Amendement n° I-821.

* 434 Décret du 19 août 1986 approuvant la convention passée entre l'État et la société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (SAPRR) pour la concession de la construction, de l'entretien et de l'exploitation d'autoroutes.

* 435 Décret du 10 avril 1981 portant approbation de la convention de concession du 5 mars 1981 (et le cahier des charges) de la société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône relative à la concession du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines.

* 436 Décret n° 2009-670 du 11 juin 2009 approuvant un avenant à la convention passée entre l'État et la Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône pour la concession d'entretien et d'exploitation du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines et au cahier des charges annexé à cette convention.

* 437 Article 32 de la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaire et portant diverses dispositions relatives aux transports.

* 438 En valeur 2000.

* 439 Le montant des subventions à rembourser par APRR sera actualisé suivant l'évolution de l'indice des prix à la consommation, hors tabac, ensemble des ménages, entre juillet 2000 et juillet 2015.

* 440 En valeur 2009.

* 441 La protection sociale recouvre un champ plus large que la sécurité sociale, correspondant à l'ensemble des administrations de sécurité sociale (Unédic et régimes de retraite complémentaires compris).

* 442 Cf. Article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

* 443 Décision n° 2014-698 DC du 06 août 2014.

* 444 Article 45 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 445 Article 23 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015. Si l'indemnisation des congés payés relève en principe de la compétence des employeurs, des caisses de congés payés ont été mises en place dans certaines branches d'activité (bâtiments et travaux publics, spectacles, transports et manutention portuaire) afin d'assurer la gestion des indemnités à la place des employeurs. Ces caisses versent également, pour le compte des entreprises, les cotisations de sécurité sociale et d'assurance chômage aux organismes de recouvrement au moment du versement de l'indemnité.

* 446 En 2013, la participation des majeurs protégés au financement des mesures de protection s'élevait à 144 millions d'euros.

* 447 Direction générale de la cohésion sociale, Le financement des mandataires judiciaires à la protection des majeurs, janvier 2015.

* 448 Ibid .

* 449 Actuellement les directions départementales de la cohésion sociale.

* 450 Décret n° 2015-1239 du 6 octobre 2015 relatif à l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine et à la création d'un fonds de gestion.

* 451 Loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 452 Cf. modification de l'article L 131-7 précité tel que modifié par l'article 15 du PLFSS pour 2016.

* 453 Bilan net de 970 millions d'euros en faveur de la sécurité sociale.

* 454 Après un effet positif de 1,5 milliard d'euros en 2015 puis de 500 millions d'euros en 2016, cette mesure de trésorerie ne produirait plus d'effet en 2017.

* 455 Source : rapport spécial de Michel Bouvard et Thierry Carcenac, rapporteurs spéciaux du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », annexé au rapport général sur le projet de loi de finances pour 2016.

* 456 Décret n° 2013-315 du 15 avril 2013 relatif aux conditions d'aliénation des terrains du domaine privé de l'Etat en vue de la réalisation de programmes de construction de logements sociaux et fixant la composition et le fonctionnement de la Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier instituée à l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 457 Source : rapport spécial de Michel Bouvard et Thierry Carcenac, rapporteurs spéciaux du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », annexé au rapport général sur le projet de loi de finances pour 2016.

* 458 Décret n° 2014-1741 du 30 décembre 2014 relatif aux conditions d'aliénation des terrains du domaine privé des établissements publics de l'État, ou dont la gestion leur a été confiée par la loi, prévues à l'article L. 3211-13-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 459 Cf. le rapport « Affaires européennes », fascicule 2 du tome II du présent rapport général sur le projet de loi de finances pour 2016.

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