C. LE PROGRAMME 206 « SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L'ALIMENTATION »

Le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » a intégré, en 2009, la mission « APAFAR », suite à la suppression de la mission « Sécurité sanitaire ». Ainsi que l'avait relevé 46 ( * ) notre collègue Nicole Bricq, la mission « Sécurité sanitaire » présentait un caractère artificiel et son élaboration ne faisait pas l'objet d'une « réelle concertation entre responsables de programme, ni d'arbitrages budgétaires entre les deux programmes qui la composent ».

1. Un demi milliard d'euros de crédits dont la moitié sont des dépenses de personnel
a) La baisse optique des crédits

En 2011, le programme représente 505,5 millions d'euros d'AE et 510 millions d'euros de CP, soit une contraction notable par rapport à la LFI 2010 : - 6,5 % en AE et - 9 % en CP . Cette baisse n'est cependant qu'apparente.

A la différence des autres programmes de la mission APAFAR, le programme 206 intègre en son sein les crédits de personnel qui permettent de concourir à sa mise en oeuvre. 270,3 millions d'euros de crédits de titre 2 , soit plus de la moitié des 505,5 millions d'euros d'AE du programme, sont ainsi concentrés sur l'action 6 « Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation ». Ils correspondent principalement aux moyens des directions départementales des services vétérinaires (DDSV). La réduction des crédits par rapport à 2010 est de 6 % , puisque les dépenses de titre 2 s'élevait dans la précédente LFI à 286,6 millions d'euros. Elle est notamment le résultat de mesures de périmètre (qui représentent 2 points parmi les 6 % de baisse indiqués) et des efforts de rationalisation entrepris par le ministère 47 ( * ) . A cet égard, votre rapporteur spécial relève que l'économie de 5 % sur les dépenses de fonctionnement des ministères est effectivement appliquée au programme 206 en 2011 .

Hors personnel , les crédits du programme 206 s'établissent en 2011 à 235,2 millions d'euros en AE et 240 millions d'euros en CP , soit une baisse de 7,4 % en AE et de 12,7 % en CP par rapport à la LFI pour 2010. La baisse marquée des CP résulte essentiellement, d'une part, du transfert du financement et de la gestion de l'équarrissage aux filières professionnelles , contrepartie du recentrage du service public de l'équarrissage (SPE) et, d'autre part, de la fin du déstockage des farines animales , ce qui réduit considérablement les besoins de crédits consacrés à l'élimination de ces farines. A eux seuls, ces deux facteurs permettent d'économiser 18,8 millions d'euros en AE et 27,2 millions d'euros en CP.

En-dehors de ces deux dispositifs et des mesures de transfert 48 ( * ) , le budget hors personnel augmente en réalité de 12,1 millions d'euros en AE et de 4,4 millions d'euros en CP par rapport à la LFI 2010 . Comme le précise le PAP, cet effort témoigne notamment de la priorité donnée à la sécurité alimentaire au sein des politiques publiques portées par le ministère.

Répartition par action et par titre des AE du programme 206

(en euros et en pourcentage)

Action

Titre 2 Personnel

Titre 3 Fonctionnement

Titre 5 Investissement

Titre 6 Intervention

Total

%

01 - Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

-

7 532 304

-

13 274 109

20 806 413

4,15 %

02 - Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

-

90 285 649

-

21 604 967

111 890 616

22,15 %

03 - Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

-

10 803 010

-

6 643 778

17 446 788

3,45 %

04 - Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires

-

71 158 443

-

2 332 828

73 491 271

14,55 %

05 - Élimination des farines et des coproduits animaux

-

-

-

4 000 000

4 000 000

0,8 %

06 - Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation

270 223 505

2 170 381

100 000

-

272 493 886

53,85 %

08 - Qualité de l'alimentation et offre alimentaire

-

1 260 000

-

4 044 615

5 304 615

1,05 %

Total

270 223 505

183 205 787

100 000

51 900 297

505 433 589

100,00%

%

53,47%

36,25%

0,01%

10,27%

100,00%

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

b) L'évolution par action

Les moyens alloués dans le domaine de la protection et de la santé des végétaux nécessitent des engagements nouveaux en 2011. L'action 1 « Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale » voit donc sa dotation augmenter en un an de 5 % en AE (et baisser de 3 % en CP). Il s'agit notamment de développer le contrôle de la production des végétaux et le suivi des risques phytosanitaires par les fédérations régionales de défense contre les organismes nuisibles (FREDON). Un effort particulier est ainsi destiné à la lutte contre les ennemis des cultures (chrysomèle du maïs, sharka, ralstonia, mouche du brou etc.).

Les crédits dédiés à la gestion des maladies animales et de la protection des animaux sont stables par rapport à 2010 (+ 2 % en AE et - 1 % en CP). L'action 2 regroupe les moyens dévolus à la lutte contre les encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST) telles que l'ESB ou la tremblante, à la surveillance de maladies contagieuses (tuberculose et brucellose bovines, fièvre catarrhale ovine, brucellose ovine et caprine, maladie d'Aujeszky des porcins, herpès virose de la carpe, pathologies apiaires etc.) ainsi qu'aux mesures contre les épizooties (influenza aviaire et fièvre aphteuse en particulier). Cependant la répartition des ressources évolue au sein de l'action 2 . Elle vise à tirer les conclusions des états généraux du sanitaire tenus au printemps 2010, comme le montre le développement d'un nouveau cadre de coordination des réseaux d'épidémiosurveillance .

La dotation inscrite pour l'action 3 « Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux aliments » est en baisse par rapport à 2010 (- 11 % en AE et - 13 % en CP). Cette évolution s'explique principalement par une contraction des crédits consacrés à la lutte contre les salmonelles en élevage compte tenu d'une situation sanitaire plus favorable que prévu au sein des cheptels de volailles.

Pour l' action 5 « Élimination des farines et des coproduits animaux » , comme on l'a vu plus haut, la diminution constatée en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2010 (- 82 % en AE et - 67 % en CP) correspond principalement au transfert de la majeure partie du financement du service public de l'équarrissage (SPE) aux filières professionnelles et à l' extinction de la dotation consacrée à l'élimination des farines animales, en raison de la destruction en 2010 des derniers stocks (- 7,4 millions d'euros en AE et - 41,6 millions d'euros en CP).

L'action 6 « Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation » qui regroupe la totalité des crédits de titre 2 du programme , a déjà été commentée précédemment dans le cadre de l'analyse générale du programme.

Enfin, la dernière action « Qualité de l'alimentation et offre alimentaire » (action 8), créée en 2009 au sein du programme 206, bénéficie d'une augmentation marquée de ses crédits en 2011 (+ 80 % en AE et + 35 % en CP). Cette évolution traduit la nouvelle priorité donnée à l'alimentation par le MAAP, comme le montre la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, dont l'article 1 er dispose que la politique publique de l'alimentation s'appuie sur un programme national pour l'alimentation (PNA) . Ce dernier se décompose en quatre axes :

- faciliter l'accès de tous à une alimentation de qualité , notamment par un accès à l'aide alimentaire en faveur des plus démunis et par la diffusion de bonnes habitudes alimentaires dans le cadre scolaire ou périscolaire en accompagnant par exemple la distribution de fruits dans les écoles (opération « un fruit pour la récré ») ;

- améliorer l'offre alimentaire en encourageant l'innovation et la qualité nutritionnelle des produits, l'accès des consommateurs aux produits de base, notamment aux fruits et légumes et, enfin, en réduisant le gaspillage dans la chaîne alimentaire ;

- développer l'information sur l'alimentation en formant les jeunes et en éduquant les consommateurs ;

- préserver et promouvoir le patrimoine alimentaire et culinaire national notamment en valorisant les produits et les savoir-faire par la consolidation d'un inventaire national des produits et recettes régionales (« registre national du patrimoine alimentaire ») et la promotion des métiers de l'artisanat alimentaire.

2. Principales observations sur la justification au premier euro
a) La réforme de l'opérateur unique du programme

Aux termes de l'ordonnance n° 2010-18 du 7 janvier 2010 et du décret n° 2010-719 du 28 juin 2010, la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET) a donné naissance le 1 er juillet 2010 à l' Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS) .

Elle reprend les missions et le personnel de chacune des deux agences, ainsi que leurs compétences scientifiques dans l'évaluation des risques, pour les « mettre au service d'une lecture plus globale et transversale des questions sanitaires », comme l'affirme le PAP pour 2011.

Sa dimension interministérielle doit être remarquée. L'ANSés concourt ainsi principalement à la mise en oeuvre de l'action 4 « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires » du programme 206 et recevra à ce titre, en 2011, une subvention de 68 millions d'euros en AE (contre 55,5 millions d'euros en 2010 pour l'AFSSA, soit une hausse de 22,5 % 49 ( * ) ). Mais elle bénéficiera également des crédits des programmes 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail », 181 « Prévention des risques » et 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables », pour un montant total de 31,5 millions d'euros, ce qui portera l' ensemble de ses concours publics pour 2011 à 99,5 millions d'euros en AE . Dans ce contexte, l'ANSés est placée sous la tutelle des ministres chargés de l'agriculture, de la consommation, de l'environnement, de la santé et du travail.

b) L'aboutissement du processus de modernisation du service public de l'équarrissage

Depuis l'entrée en vigueur de la libéralisation du service public de l'équarrissage (SPE), le 18 juillet 2009, les filières doivent assurer elles-mêmes la gestion et le financement de l'équarrissage. L'Etat ne reste payeur que du seul service public résiduel (animaux trouvés morts dans les DOM, cadavres relevant de l'intérêt général et de mesures d'urgence liées à la salubrité ou à la santé publique), soit 4 millions d'euros en AE et 13,5 millions d'euros en CP en 2011 .

Si le coût annuel du SPE résiduel pour l'Etat s'établit effectivement à 4 millions d'euros , au lieu de 44 millions d'euros dans l'ancien périmètre, il n'en demeure pas moins que les crédits de la mission APAFAR doivent également permettre d'apurer la dette du SPE , qui s'établissait à 54,7 millions d'euros avant la libéralisation. Un premier versement effectué en 2009 a permis de réduire de 17,7 millions d'euros le niveau de la dette. Après la poursuite des paiements en 2010, un solde de 9,5 millions d'euros reste à apurer d'ici la fin de l'année 2011 .

À partir de 2012, la réforme du service public de l'équarrissage doit donc s'accompagner d'une réduction substantielle et durable des crédits qui lui sont consacrés .

Dans le contexte de la libéralisation du SPE, chaque filière doit mettre en place une structure spécifique de gestion collective , financée par des cotisations professionnelles volontaires (CV), parfois obligatoires (CVO). La part du financement incombant directement aux éleveurs serait relativement proche d'une filière à l'autre.

Il convient d'observer à nouveau que seule la filière ruminants n'est toujours pas, à ce jour, parvenue à s'organiser . D'après les informations transmises par le Gouvernement, ce devrait être le cas d'ici la fin de l'année 2010 . D'ici là, les éleveurs de cette filière continueront de s'acquitter de la taxe d'abattage, comme sous le régime précédant la libéralisation du SPE. Ce dispositif n'est pas optimal, mais il permet au SPE de fonctionner alors qu'il n'y a pas d'accord au sein de ces filières.

Les principales observations de votre
rapporteur spécial sur le programme 206

1. La réduction des crédits du programme n'est qu'apparente : la plupart des actions bénéficient en effet de moyens renforcés en 2011 . Ce phénomène de baisse optique résulte principalement de mesures de transfert , de la résorption du stock des farines animales à détruire et du transfert du financement de l'équarrissage aux filières professionnelles, contrepartie du recentrage du service public de l'équarrissage.

2. La nouvelle priorité donnée à l'alimentation par le MAAP s'est traduite en 2010 par la hausse de 33 % par rapport à la LFI pour 2009 de l'action 8 « Qualité de l'alimentation et offre alimentaire » du programme 206. En 2011 dans le contexte de l'entrée en vigueur de la LMAP qui définit la cadre de la politique publique de l'alimentation, cette évolution se poursuit avec un niveau de crédits sur l'action en hausse de 80 % en AE et de 35 % en CP.

3. La réforme du service public de l'équarrissage arrive enfin à son terme . Elle s'accompagne d'une réduction substantielle des dépenses qui lui sont consacrées . L'apurement de la dette des éleveurs sera ainsi finalisé en 2011. Enfin, la mise en place d'une structure de gestion collective de l'équarrissage pour la filière ruminants n'est toujours pas intervenue. Le Gouvernement doit veiller à ce qu'il soit remédié à cette situation au plus vite .


* 46 Voir notamment l'annexe 30 au tome III du rapport général n° 91 (2007-2008) sur le projet de loi de finances pour 2008. Nicole Bricq était alors rapporteure spéciale de la mission sécurité sanitaire.

* 47 Le plafond d'emplois du programme passe de 5 336 ETPT en 2010 à 4 742 ETPT en 2011. Cette évolution s'explique surtout par des corrections techniques et des mesures de transfert (- 477 ETPT), puisque seules 117 suppressions d'emplois sont constatées.

* 48 Le transfert des dépenses de sélection végétale au compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » permet ainsi une économie de 3 millions d'euros en AE et d'un million d'euros en CP en 2011. Le montant total des mesures de transfert et de périmètre sur le programme 206 est évalué par le PAP à 11,8 millions d'euros en AE et 11,6 millions d'euros en CP.

* 49 Avant transferts, l'augmentation par rapport aux crédits votés en LFI 2010 s'élève à 6,7 %. La différence résulte du transfert à l'agence des crédits du laboratoire national de protection des végétaux (LNPV).

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