2. Deux programmes légitimement dépourvus d'objectifs

a) Le programme 168 « Majoration de rentes »

Comme il a déjà été signalé plus haut, le programme 168 retrace les opérations d'un dispositif celui de la majoration légale des rentes viagères fermé et désormais en cours d'extinction progressive . Dans ces conditions, le choix de ne pas associer à ce programme d'objectifs de performance apparaît pertinent à votre rapporteur spécial.

b) Le programme 229 « Versement à la CNAF »

La non définition d'objectifs de performance se trouve a fortiori justifiée en ce qui concerne le programme 229 . Celui-ci, en effet, comme on l'a indiqué déjà ci-dessus, compte tenu de la réforme intervenue en 2005 quant au mode de versement des prestations familiales dues aux agents de l'Etat résidant en métropole, n'a été maintenu pour l'exercice 2006 que pour des motifs d'ordre comptable, et a vocation à disparaître définitivement en 2007 .

3. Le caractère insatisfaisant des objectifs et indicateurs des deux autres programmes de la mission

a) Le programme 114 « Appels en garantie d'Etat »

Trois objectifs sont associés au programme 114 « Appels en garantie de l'Etat », assortis d'un indicateur (pour les objectifs 1 et 2) ou deux (pour l'objectif 3) :

1.- « assurer l'équilibre à moyen terme des procédures publiques d'assurance-crédit, notamment en maintenant une dispersion suffisante des catégories de risques garantis » ;

2.- « satisfaire la demande des entreprises en couverture de risque de change, sous la contrainte de la gestion à l'équilibre de la procédure » ;

3.- « encourager les PME à prospecter les marchés extérieurs ».

(1) Une définition délicate des objectifs et indicateurs

La définition des objectifs et indicateurs du programme 114 a du tenir compte de contraintes réelles . En premier lieu, le périmètre d'intervention du responsable de programme est limité :

- d'une part, certaines garanties sont consenties par le législateur (ainsi, par exemple, des plans de sauvetage d'Alstom ou de France Télécom, ou des emprunts UNEDIC) ; de nombreux engagements de garantie sont engendrés par des opérateurs spécialisés, précités (ERAP, CFDI, CEPME, Coface...) ; et certaines garanties résultent d'engagements internationaux (cf. les garanties accordées pour des prêts de la BEI) ;

- d'autre part, le gestionnaire ne décide que de l'octroi de la garantie, éventuellement assortie de conditions particulières ; dès lors que la garantie est accordée, elle constitue pour son bénéficiaire, en principe, un droit irrévocablement acquis, et la dépense budgétaire est automatique sitôt que la garantie est appelée.

En second lieu, la garantie de l'Etat représente un instrument d'incitation destiné à contribuer à des politiques sectorielles. La mesure de l'efficacité de ces politiques ne recoupe pas la durée de vie des garanties, alors même que le risque encouru par l'Etat dépense budgétaire potentielle court pendant toute cette durée de vie. De la sorte, c'est la qualité globale des engagements contractés au nom de l'État qui importe, appréciée à la fois au travers des effets incitatifs de ces engagements et du risque qu'ils créent pour les finances publiques .

(2) L'insuffisante prise en compte des observations du Parlement

Votre commission des finances et la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans leurs travaux respectifs déjà cités sur les objectifs et indicateurs de performance 57 ( * ) , ont signalé les faiblesses du programme 114 à cet égard. Ces observations ont été suivies pour deux objectifs, supprimés du présent projet de loi de finances, dont la faible pertinence avait été relevée par la commission des finances de l'Assemblée nationale.

En revanche, en ce qui concerne les indicateurs associés aux trois objectifs subsistant, les remarques du Parlement sont restées lettre morte .

Ainsi, votre commission a relevé que l'indicateur unique de l'objectif n° 2 , précité, consistant dans la « position nette réévaluée » (afin de s'assurer que la gestion de la garantie, mesurée par la valeur au coût du marché du portefeuille, se fait à l'équilibre), ne mesure pas l'objectif retenu de satisfaction de la demande des entreprises en couverture de risque de change , mais seulement l'une des contraintes dans l'atteinte de cet objectif . Malgré cette observation, l'indicateur a été maintenu à l'identique dans le présent projet de loi.

De la même manière, la commission des finances de l'Assemblée nationale a fait valoir que plusieurs indicateurs du programme présentent la caractéristique commune d'illustrer médiocrement les objectifs auxquels ils se rapportent. Pour s'en tenir aux objectifs maintenus dans le présent projet de loi, « en quoi l'« indice moyen pondéré du portefeuille des risques de l'assurance-crédit » est-il représentatif d'un pilotage des procédures à l'équilibre, à moyen terme (objectif 1) ? En quoi la « position nette réévaluée » du portefeuille des garanties de change éclaire-t-elle sur la façon dont l'administration a su ou non répondre à la demande des entreprises en couverture du risque de change (première dimension de l'objectif 2) ? » Cette dernière remarque rejoint celle, précitée, qu'a formulée votre commission ; elle n'a pas davantage été prise en compte.

b) Le programme 145 « Epargne »

Trois objectifs sont associés au programme 145 « Epargne », assortis de deux indicateurs (pour les objectifs 1 et 3) ou quatre (pour l'objectif 2) :

1.- « favoriser l'accès des organismes de logement social à une ressource financière attractive » ;

2.- « optimiser les conditions de financement de l'accession à la propriété » ;

3.- « veiller à l'équilibre financier des dispositifs d'épargne réglementée ».

(1) Des indicateurs informatifs plus que de performance

Les deux indicateurs de l'objectif n° 1 du programme 145, qui consistent respectivement dans le « pourcentage des ressources des fonds d'épargne employé au financement du logement social (flux de l'année) » et dans la « marge moyenne des établissements de crédit sur les prêts locatifs sociaux (PLS) », de même que le premier indicateur de l'objectif n° 2, visant la « marge moyenne des établissements de crédit sur le financement des prêts sociaux de location-accession (PSLA) accordés sur les ressources des fonds d'épargne », représentent moins des indicateurs de performance du programme que des indicateurs relatifs au comportement des établissements de crédit . Or, le gestionnaire du programme ne dispose pas des moyens de dicter leur conduite à ces derniers, bien davantage déterminée par le contexte économique et financier (le coût des opérations, le niveau des taux d'intérêt).

De manière semblable, on voit mal de quels leviers d'action dispose le gestionnaire s'agissant des autres indicateurs de l'objectif n° 2 (« taux de sinistralité sur prêts « accession sociale » bénéficiant de la garantie de l'Etat », « taux de régularisation des multi-détentions de PEL dans les établissements contrôlés », « taux de transformation des dépôts d'épargne logement en prêts ») et des indicateurs de l'objectif n° 3 (« résultat net des fonds d'épargne », « liquidité globale »). Pour ne s'arrêter qu'à ces deux derniers, on rappelle que :

- d'une part, les taux réglementés sont désormais fixés de manière automatique : le « résultat net des fonds d'épargne » s'ensuit ;

- d'autre part, les fonds d'épargne sont gérés par la Caisse des dépôts et consignations : c'est d'elle que dépend la « liquidité globale » de ces fonds.

(2) Les observations du Parlement n'ont été que très partiellement suivies d'effet

Dans leur rapport déjà cité, nos collègues députés Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard 58 ( * ) analysaient le premier indicateur de l'objectif n° 1 du programme 145 le « pourcentage des ressources des fonds d'épargne employé au financement du logement social », mesuré en flux de l'année comme « centré sur la vision développée par le gestionnaire des fonds d'épargne » et dépendant « avant tout de l'arbitrage que celui-ci consent entre l'emploi des fonds d'épargne à des prêts logement (en principe consentis sans marge) et leur emploi à l'acquisition d'actifs financiers, qui procureront l'essentiel de sa rémunération effective ». Ils signalaient la dépendance de cet indicateur, dans ces conditions, à l'égard du contexte économique et financier aussi bien que « des autres déterminants de l'équilibre prudentiel des fonds d'épargne , par exemple les coûts de collecte auprès des établissements financiers, les coûts de gestion par la Caisse des dépôts ou la politique de prélèvement de l'État au titre de sa garantie ». Votre rapporteur spécial a rejoint ces observations dans ses développements ci-dessus, et regrette qu' aucun correctif en conséquence n'ait été apporté dans le présent projet de loi de finances.

Les auteurs du même rapport indiquaient qu'« un indicateur construit autour d'une évaluation de la part des ressources « fonds d'épargne » dans le total des ressources des organismes de logement social  illustrant la vision des bénéficiaires du dispositif aurait mérité d'être étudié, car il pourrait illustrer mieux que le précédent le caractère plus ou moins attractif pour l'emprunteur de la ressource publique ». Ils remarquaient par ailleurs « qu'il n'a pas été jugé utile de construire un indicateur (le cas échéant, dans le cadre d'un objectif transverse aux deux premiers) qui aurait permis d'apprécier l'efficacité comparée (en termes socio-économiques) des différents dispositifs employant les fonds d'épargne, afin d'éclairer le caractère adéquat ou perfectible de l'offre globale des financements adossés aux fonds d'épargne. De même, alors que la réforme du prêt à taux zéro a été présentée comme une mesure importante du PLF 2005 pour le financement de l'accession sociale à la propriété, il n'a pas été jugé utile de construire un indicateur relatif à ce dispositif ou l'incluant ».

A défaut que ces suggestions soient satisfaites, votre rapporteur spécial relève tout de même l' introduction , dans le présent projet de loi, de indicateur n° 4 de l'objectif n° 2, qui mesure le « taux de transformation des dépôts d'épargne logement en prêts », renseignement insuffisant mais utile .

* 57 Cf. les rapports d'information précités, n° 220 (2004-2005) et n° 2161 (XII e législature).

* 58 Rapport d'information n° 2161 (XII e législature).

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