TITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES AU SUIVI-SOCIOJUDICIAIRE

Articles 13 AA (nouveau), 13 A et 13 B (nouveau)
(art. 221-9-1, 222-48-1, 224-10 nouveau, 227-31, 322-5 et 322-18 nouveau du code pénal)
Extension du champ d'application du suivi socio-judiciaire

Cet article introduit par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, à l'initiative de M. Philippe Houillon et avec l'avis favorable du Gouvernement, tend à étendre le champ d'application du suivi socio-judiciaire d'une part au meurtre et à l'assassinat, d'autre part, à l'enlèvement et à la séquestration.

En matière criminelle , le suivi socio-judiciaire peut être décidé dans trois hypothèses :

1° en vertu de l'article 221-9-1 du code pénal :

- en cas de meurtre ou d'assassinat précédé ou accompagné d'un viol ;

- en cas de meurtre ou d'assassinat précédé ou accompagné de tortures ou d'actes de barbarie.

2° en vertu de l'article 222-48-1 du code pénal :

- en cas de viol simple ou aggravé.

Le Sénat a proposé en première lecture d'ajouter à ces infractions les crimes de torture et de barbarie.

Tout en confirmant cette initiative, les députés ont adopté un nouvel article 13 AA à l'initiative de M. Philippe Houillon avec l'avis favorable du Gouvernement, proposent pour y adjoindre également les meurtres et assassinats (articles 221-1 à 221-5-3 du code pénal) ainsi que les crimes d'enlèvement et de séquestration (articles 224-1 à 224-5-2 du code pénal).

Compte tenu de la gravité des faits considérés, il n'apparaît pas injustifié d'appliquer à leur auteur les obligations ou interdictions du suivi socio-judiciaire. Par ailleurs, selon le dispositif proposé par l'Assemblée nationale, l'intégration de ces crimes au champ d'application du suivi socio-judiciaire confèrerait également au juge la faculté de placer leurs auteurs sous surveillance électrique mobile.

L' article 13 A adopté par les députés à l'initiative de M. Gérard Léonard permet de procéder à certaines coordinations liées à la possibilité de décider le placement sous surveillance électronique mobile dans le cadre du suivi socio-judiciaire.

L' article 13 B introduit par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, à l'initiative du Gouvernement, tend à étendre l'application du suivi socio-judiciaire aux auteurs des infractions prévues à l'article 322-6 du code pénal.

Cet article vise « la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui par l'effort d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes ».

Cette disposition répond, plus particulièrement, à la volonté d'assurer un traitement pénal plus efficace des auteurs des incendies de forêt. Les intéressés peuvent souffrir, en effet, de troubles de comportement caractéristiques de la pyromanie et à ce titre relever de l'injonction de soin qu'autorise le suivi socio-judiciaire.

Celui-ci pourrait permettre également l'application de mesures utiles pour prévenir la récidive telle que l'interdiction de paraître dans certains lieux ou, sous réserve de l'adoption des dispositions des articles 7 et 8 de la proposition de loi, le placement sous surveillance électronique mobile.

Le présent article permet également de corriger une incohérence au cinquième alinéa de l'article 322-5 du code pénal introduit par la loi du 9 mars 2004. Cette disposition prévoit en effet l'aggravation des peines pour les incendies ayant provoqué une incapacité totale de travail « pendant huit jours au plus » alors que cette aggravation est justifiée pour les incapacités de travail supérieures à cette durée.

Votre commission vous propose d'adopter les articles 13 AA, 13 A et 13 B sans modification .

Articles 13 et 13 bis
(art. L 3711-4-1 et L . 3711-3 nouveau du code de la santé publique)
Prescription de certains médicaments par le médecin traitant

A l'initiative de votre rapporteur, cet article introduit par le Sénat a, en première lecture, ouvert la faculté pour le médecin traitant de prescrire, avec le consentement de l'intéressé, des médicaments entraînant une diminution de la libido.

Les députés ont approuvé cette disposition. Cependant, ils l'ont opportunément complétée sur deux points :

- cette capacité de prescription serait réservée aux seuls médecins et non au « psychologue traitant » qui, aux termes de l'article 13 bis de la proposition de loi, pourrait soit être associé au médecin traitant, soit lui être substitué ;

- le consentement écrit du condamné devrait être renouvelé au moins une fois par an .

Votre commission vous propose d'adopter les articles 13 et 13 bis sans modification .

Article 14
(art. 706-47 et 706-53-7 du code de procédure pénale - art. 216 de la loi n° 2004-204 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité)
Extension de la procédure applicable aux infractions de nature sexuelle à d'autres types d'infractions

Le présent article, supprimé par le Sénat en première lecture, a été rétabli par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, dans une version entièrement nouvelle.

En effet, le texte de la proposition de loi avait initialement prévu d'inscrire dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS) les irresponsables pénaux quelle que soit la nature des infractions commises. Le Sénat avait manifesté ses réserves quant au risque possible d'assimilation entre délinquants sexuels et irresponsables pénaux tout en relevant que ces derniers se verraient appliquer du fait de la rédaction choisie par l'Assemblée nationale un dispositif plus rigoureux. En effet ils auraient été systématiquement enregistrés dans le fichier y compris pour des infractions punissables d'une peine égale ou inférieure à cinq ans qui, actuellement, ne peuvent l'être, s'agissant des auteurs d'infractions sexuelles, que par décision expresse du procureur de la République. Le Sénat avait marqué sa préférence pour un dispositif spécifique aux irresponsables pénaux comme l'avait d'ailleurs initialement suggéré la mission d'information de l'Assemblée nationale relative à la prévention de la récidive, et supprimé l'article 14.

Dans la nouvelle rédaction issue de l'amendement du Gouvernement, le présent article tend, dans son paragraphe I, à étendre la procédure applicable aux infractions sexuelles telle qu'elle est définie actuellement par le titre XIX du livre quatrième du code de procédure pénale à trois nouvelles catégories de crimes : le meurtre ou l'assassinat commis avec tortures ou actes de barbarie, les tortures ou actes de barbarie et les meurtres ou assassinats commis en état de récidive légale.

La procédure du titre XIX comporte, d'une part, l' obligation d'une expertise médicale avant tout jugement sur le fond (article 706-47-1 du code de procédure pénale) et, d'autre part, l'inscription des auteurs de ces actes dans le FIJAIS.

Ce fichier a été institué par la loi du 9 mars 2004. Inséré dans ce texte par le Sénat, à l'initiative de votre rapporteur, il a pour objet de prévenir le renouvellement des crimes ou délits mentionnés à l'article 706-47 du code de procédure pénale (meurtre ou assassinat de mineur précédé de viol ou de torture, viol, agression sexuelle, certaines atteintes sexuelles) et de faciliter l'identification des auteurs de ces infractions.

A cette fin, il prévoit l'enregistrement des informations relatives à l'identité et à l'adresse (ou aux adresses successives) des délinquants sexuels. Les décisions concernant des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée égale ou inférieure à cinq ans ne sont pas mentionnées dans le fichier -sauf si cette inscription est ordonnée par décision expresse de la juridiction.

Par ailleurs, ces informations sont conservées dans le fichier pendant un délai de trente ans s'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement ou un délai de vingt ans dans les autres cas. Ce délai court à compter du jour où l'ensemble des décisions enregistrées ont cessé de produire leurs effets.

Les personnes définitivement condamnées pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement sont tenues de signaler semestriellement leur adresse en se présentant auprès d'un service de police ou de gendarmerie pendant une durée de trente ans (article 706-53-5 du code de procédure pénale).

En outre, le présent article, dans son paragraphe II, entend réparer une lacune du dispositif relatif au FIJAIS en permettant aux préfets ou aux administrations de l'Etat d'accéder aux informations contenues dans le fichier non seulement pour l'examen des demandes d'agrément concernant les activités impliquant un contact avec les mineurs comme tel est le cas aujourd'hui, mais aussi pour le contrôle de ces activités.

Ainsi serait assuré le contrôle effectif des activités qui, aux termes de la réglementation, ne requièrent pas d'agrément mais une simple déclaration préalable.

Ensuite, à l'initiative de M. Jean-Paul Garraud, avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté trois autres séries d'amélioration au FIJAIS :

- les personnes devant justifier leur adresse pourrait se présenter au commissariat de police ou à l'unité de gendarmerie les plus proches et non aux seuls services départementaux, comme le prévoit actuellement l'article 706-53-5 du code de procédure pénale ;

- les officiers de police judiciaire pourraient également, sur instruction du procureur de la République ou du juge d'instruction, consulter le FIJAIS lorsqu'une personne est placée en garde à vue dans le cadre d'une enquête de flagrance ou d'une enquête préliminaire même si cette procédure ne concerne pas l'une des infractions visées par le fichier. Cette consultation permettrait de vérifier, dans l'hypothèse où la personne gardée à vue figurerait dans le fichier, que les obligations liées à son inscription au FIJAIS lui ont bien été notifiées (cas des personnes condamnées avant la loi du 9 mars 2004) et, le cas échéant, qu'elles sont respectées ;

- les officiers de police judiciaire disposeraient des moyens, prévus à l'article 78 du code de procédure pénale, de contraindre, avec l'autorisation du procureur de la République, les personnes condamnées avant l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004 à déférer à la convocation aux fins de notification des obligations.

L'ensemble de ces dispositions devrait contribuer à renforcer l'efficacité du FIJAIS et mérite à ce titre d'être approuvé. La désignation de ce fichier n'apparaît plus toutefois adaptée compte tenu de l'extension des catégories de personnes susceptibles d'y figurer. Aussi votre commission vous propose-t-elle, par un amendement , une nouvelle dénomination , « fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes », plus conforme à la vocation de cet instrument.

Par ailleurs, votre commission vous soumet également un amendement complétant le dispositif proposé afin de permettre que les personnes déjà condamnées pour les nouvelles infractions devant donner lieu à une inscription dans le fichier y soient effectivement enregistrées et soumises aux obligations qui en résultent.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 14 ainsi modifié .

Article 15 bis A (nouveau)
(art. 712-7 et 712-13 du code de procédure pénale)
Possibilités pour l'avocat de la partie civile de faire valoir ses observations devant la juridiction de l'application des peines

Cet article tend à compléter les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions de l'application des peines en permettant à l'avocat de la partie civile, à sa demande, de participer à l'audience du tribunal de l'application des peines (article 712-7 du code de procédure pénale) ou, en appel, de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel (article 712-13 du code de procédure pénale) et d'y faire valoir ses observations avant les réquisitions du ministère public.

Le tribunal de l'application des peines composé de trois juges de l'application des peines (un président et deux assesseurs) se prononce sur la réduction de la période de sûreté , sur la libération conditionnelle des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement de plus de dix ans dont le reliquat est supérieur à trois ans, sur les suspensions de peine pour raisons médicales lorsque la peine est supérieure à dix ans ou lorsque la peine restant à subir est supérieure à trois ans.

Les décisions prises par le tribunal de l'application des peines sont susceptibles d'appel devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel composée de trois magistrats professionnels assistés d'un représentant d'une association d'aide aux victimes et d'un représentant d'une association de réinsertion des condamnés.

La loi du 9 mars 2004 a renforcé les droits des victimes dans la phase post-sententielle. Ainsi les juridictions de l'application des peines peuvent avant toute décision sur un éventuel aménagement de peine, informer les victimes qu'elles peuvent présenter leurs observations par écrit (article 712-16 du code de procédure pénale) ; de même s'il existe, en matière de libération conditionnelle, un risque que le condamné puisse se trouver en présence de la victime ou de la partie civile et qu'une telle rencontre paraît devoir être évitée, la juridiction interdit au condamné toute relation avec elle de quelque façon que ce soit -à cet effet, la juridiction adresse à la victime un avis l'informant de cette mesure et de la révocation de la libération conditionnelle encourue par le condamné s'il ne la respecte pas (article 720 du code de procédure pénale). En outre, il convient de rappeler que la chambre de l'application des peines de la cour d'appel comporte un responsable d'une association d'aide aux victimes.

Néanmoins, la victime n'est pas représentée spécifiquement lors des débats contradictoires tant en première instance qu'en appel. Actuellement, en effet, le jugement est rendu après l'avis du représentant de l'administration pénitentiaire à l'issue d'un débat contradictoire au cours duquel seuls sont entendus le ministère public, les observations du condamné ou, en appel, de son avocat. Or, l'issue de ce débat intéresse directement la victime. Il n'est pas injustifié que son avocat puisse y faire valoir ses observations.

Il s'agit néanmoins d'une simple faculté laissée à l'initiative la partie civile 24 ( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 bis A sans modification .

Article 15 bis B (nouveau)
(art. 11 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945
relative à l'enfance délinquante)
Placement du mineur en centre éducatif fermé

Cet article, adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale avec l'avis de sagesse du Gouvernement à la suite d'un amendement de M. Thierry Mariani, sous-amendé par le rapporteur de la commission des Lois, permet à la chambre de l'instruction « à titre exceptionnel », lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne « causerait pour la sécurité des personnes un risque d'une exceptionnelle gravité » d'ordonner le placement du mineur en centre éducatif fermé pour une durée de quatre mois renouvelable une fois.

Aux termes de l'article 33 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, les mineurs peuvent être placés dans des centres éducatifs fermés (institués par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002) en application d'un contrôle judiciaire, d'un sursis avec mise à l'épreuve ou à la suite d'une libération conditionnelle.

Actuellement, les durées de la détention provisoire varient selon l'âge du mineur et la gravité de l'infraction. Elle peut atteindre deux ans en matière criminelle pour les mineurs âgés d'au moins 16 ans. L'instruction s'achève en général avant l'expiration des délais actuels prévus pour la détention provisoire des mineurs.

Selon votre commission, les retards dans l'instruction ne doivent pas conduire à allonger encore la durée de la détention provisoire mais à donner, comme le garde des Sceaux l'a d'ailleurs souligné lors des débats sur cette question à l'Assemblée nationale, les moyens humains et matériels pour les éviter.

Votre commission vous propose donc de supprimer l'article 15 bis B.

Article 15 bis C (nouveau)
(art. 21-1 nouveau de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure)
Détermination du cadre juridique des fichiers de police judiciaire concernant les crimes en série

Cet article, adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, tend à compléter la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure afin de donner un cadre légal à la mise en oeuvre des fichiers de police judiciaire concernant les crimes en série.

Deux fichiers ont, aujourd'hui, plus particulièrement cette vocation : ANACRIM , programme d'analyse criminelle développé par la gendarmerie nationale afin de permettre la mise en relation méthodique de données criminelles et SALVAC , système d'analyse des liens de la violence associés aux crimes, mis en place conjointement par la police et la gendarmerie. Ce dernier fichier comprend les informations relatives aux crimes de violence et devrait également intégrer les disparitions de personnes dont l'origine criminelle est supposée ainsi que les découvertes de cadavres non identifiés. Il pourrait aider les enquêteurs à élucider des crimes sériels pouvant être éloignés dans l'espace et dans le temps.

Aux termes de l'article 21 de la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, les services de police et de gendarmerie sont autorisés à mettre en oeuvre des applications automatisées d'information nominatives recueillies au cours des enquêtes préliminaires ou de flagrance ou des investigations exécutées sur commission rogatoire afin de « faciliter la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs ».

Les informations ainsi recueillies peuvent concerner deux catégories de personnes :

- les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves et concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer comme auteurs ou complices à l'infraction ;

- les victimes de ces infractions -celles-ci pouvant toutefois s'opposer à ce que les informations nominatives les concernant soient conservées dès lors que l'auteur des faits a été définitivement condamné.

Concernant ces dispositions, le présent article élargirait le champ des informations susceptibles de faire l'objet d'un traitement automatisé, tant au regard de la nature des informations concernées que des catégories de personnes susceptibles d'être visées.

S'agissant de la nature des informations , le fichier pourrait déroger au principe prévu par l'article 8-1 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, et contenir des données à caractère personnel faisant apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci.

Par ailleurs, outre les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves et concordants rendant vraisemblables qu'elles ont pu participer à l'infraction (l'article précisant que l'enregistrement des données les concernant peut intervenir après leur condamnation) et les victimes , les fichiers pourraient viser également les catégories de personnes suivantes :

- les personnes à l'encontre desquelles il existe « une ou plusieurs raisons plausibles » de soupçonner qu'elles ont commis une infraction ;

- les personnes à l'encontre desquelles il n'existe « aucune raison plausible » de soupçonner qu'elles ont commis des infractions mais « qui sont susceptibles d'apporter des éléments utiles à l'enquête et dont le nom est cité en procédure » ;

- les personnes faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction pour recherche des causes de la mort (article 74 du code de procédure pénale) ou d'une enquête ou d'une instruction pour recherche des causes d'une disparition inquiétante et suspecte (articles 74-1 et 80-4 du code de procédure pénale).

En contrepartie, le texte proposé pour cet article fixe certaines garanties :

- les services de police ou de gendarmerie concernés devront être chargés d'une mission de police judiciaire et mettre en oeuvre les traitements automatisés « sous le contrôle des autorités judiciaires » ;

- le champ du traitement est encadré : il couvre, d'une part, les informations relatives aux crimes ou délits portant atteinte aux personnes et punis de plus de cinq ans d'emprisonnement ou portant atteinte aux biens et punis de plus de sept ans d'emprisonnement ; d'autre part, les données collectées au cours des procédures de recherche de cause de la mort ou des causes de disparition inquiétante ;

- la finalité de ces fichiers est de  « faciliter la constatation de crimes présentant un caractère sériel, de rassembler les preuves de ces crimes et d'en identifier les auteurs, grâce à l'établissement de liens entre les individus, les évènements ou les infractions pouvant mettre en évidence le caractère sériel de ces crimes ».

Par ailleurs, contrairement aux dispositions de l'article 17-1 de la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation pour la sécurité -dont l'application est explicitement écartée par le présent article -ces informations ne pourraient pas être consultées en vue des enquêtes administratives pour le recrutement dans certains emplois ou pour l'instruction des demandes d'acquisition de la nationalité ou d'obtention de titres de séjour ;

- l' accès à ces informations est plus restrictif que celui autorisé pour l'article 21 de la loi du 18 mars 2003 : il est en effet réservé aux personnels spécialement habilités et individuellement désignés des services de police judiciaire et de la gendarmerie nationale ainsi qu'aux magistrats du parquet et aux magistrats instructeurs pour les recherches relatives aux infractions dont ils sont saisis. En revanche, les autres personnels investis par la loi d'attributions de police judiciaire, comme les agents des douanes, ne pourraient obtenir ces données.

Les données à caractère personnel pourraient être conservées quarante ans sous réserve de leur effacement dans des conditions qui diffèrent selon les catégories de personnes concernées :

- les informations relatives aux personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves et concordants rendant vraisemblables qu'elles ont participé à l'infraction peuvent être effacées, dans les conditions prévues par le III de l'article 21 de la loi du 18 mars 2003, à la demande du procureur de la République (qui peut aussi demander leur rectification pour requalification judiciaire). Elles doivent être effacées en cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive sauf si le procureur en prescrit le maintien pour des raisons liées à la finalité du fichier ;

- les informations concernant les autres catégories de personnes mentionnées dans le fichier peuvent être effacées à leur demande dès lors que l'auteur des faits a été définitivement condamné et sauf si le procureur de la République en prescrit le maintien pour des raisons liées à la finalité du traitement .

Les conditions de mise en oeuvre de ces fichiers devraient être fixées par un décret en Conseil d'Etat après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés, afin de préciser en particulier les modalités d'habilitation des personnels des services de police judiciaire ainsi que les conditions d'exercice du droit d'accès indirect des personnes intéressées.

Malgré les garanties proposées, ce texte soulève plusieurs incertitudes. M. Alex Türk, président de la CNIL, a ainsi attiré l'attention de votre commission sur le caractère extensif de la référence aux personnes à l'encontre desquelles il n'existe aucune raison plausible de soupçonner qu'elles ont commis des infractions mais qui sont susceptibles d'apporter des éléments utiles à l'enquête et dont le nom est cité en procédure. Cette disposition pourrait-elle avoir pour conséquence l'enregistrement de données relatives aux témoins, aux experts ou encore aux avocats ? Un tel élargissement du champ d'application du fichier serait d'autant plus préoccupant que les données pourraient être conservées jusqu'à quarante ans à la demande du procureur de la République.

Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant à supprimer la possibilité d'enregistrer des données relatives aux personnes à l'encontre desquelles il n'existe aucune raison plausible de soupçonner qu'elles ont commis ou tenté de commettre une des infractions visées par le fichier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 ainsi modifié .

* 24 Certaines associations d'aide aux victimes sont hostiles à leur propre participation à la décision d'accorder la libération conditionnelle. Ainsi, M. Alain Boulay, président de l'association Aide aux parents d'enfants victimes déclarait dans un récent entretien au journal « Le Monde » : « Les victimes n'ont pas à prendre les responsabilités d'une décision de remise en liberté. Cela doit exclusivement dépendre des magistrats. Les victimes ne peuvent être juge et partie (...). Nous demandons simplement qu'elles soient tenues informées dans les cas de libération conditionnelle, et seulement dans ces cas, qu'elles soient respectées » (Le Monde, jeudi 29 septembre 2005).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page