B. UNE AUGMENTATION DES RECETTES FISCALES DE 2,6 % EN 2005 ?

1. La croissance spontanée des recettes fiscales

Les prévisions de recettes fiscales pour 2005 reposent sur l'hypothèse d'une élasticité des recettes fiscales au PIB de 1,4.

a) Rappels méthodologiques

Comme le gouvernement le rappelle chaque année dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances, la prévision des recettes fiscales est un exercice complexe , qui implique la prise en compte d'un grand nombre de facteurs : bénéfice fiscal des entreprises, « indicateur d'emplois taxables » calculé à partir de la consommation des ménages, salaires, pensions, revenus mobiliers ou immobiliers.

Il s'agit en effet de prévoir l'augmentation des recettes de chaque impôt, et d'en déduire le taux d'augmentation globale des recettes fiscales.

En pratique cependant, la croissance globale des recettes fiscales peut être évaluée avec une assez bonne précision grâce à l'élasticité des recettes fiscales au PIB nominal de l'année considérée, cette élasticité variant quant à elle en fonction du PIB réel de l'année considérée.

Schématiquement, l'élasticité des recettes fiscales au PIB nominal est à peu près égale à la croissance du PIB réel multipliée par 0,4 , comme l'indique le graphique ci-après 9 ( * ) .

Croissance du PIB réel et élasticité des recettes fiscales au PIB

Sources : Insee ; ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Le fait que l'élasticité augmente avec la croissance s'explique en particulier par le caractère progressif de l'impôt sur le revenu, dont l'élasticité marginale est supérieure à l'unité.

Les années récentes, de 1997 à 2001, se sont traduites par un écart non négligeable (de l'ordre de 1 point) par rapport à cette tendance, tantôt dans un sens (1998), tantôt dans l'autre (1997, 1999, 2001).

Cependant cela ne remet pas en cause la pertinence de l'analyse. Le RESF annexé au projet de loi de finances pour 2002 suggère que ces anomalies s'expliqueraient par la récession de 1993, la faible élasticité alors observable ayant été suivie d'une phase de « rattrapage » 10 ( * ) . Elles seraient donc temporaires.

De fait, l'élasticité des recettes fiscales au PIB réel semble avoir renoué avec ses déterminants habituels depuis 2002.

b) Une prévision d'élasticité pour 2005 optimiste ?

L'élasticité des recettes fiscales au PIB prévue par le gouvernement, de 1,4, correspondrait à une forte augmentation par rapport à l'élasticité constatée en 2002 et 2003, et même par rapport aux prévisions relatives aux années 2002 et 2003, comme l'indique le graphique ci-après.

L'élasticité des recettes fiscales au PIB nominal : prévision et exécution

Source : rapports économiques, sociaux et financiers

Une élasticité de 1,4 serait historiquement élevée. Une telle élasticité n'a été atteinte qu'en 1987, en 1997 et sur la période 1999-2001, comme l'indique le graphique ci-après.

Elasticité des recettes fiscales au PIB nominal et croissance du PIB réel

(croissance du PIB réel
en moyenne annuelle, en %)

Sources : Insee ; ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Par ailleurs, la relation entre croissance du PIB réel et élasticité des recettes fiscales au PIB nominal indiquée ci-avant suggère une élasticité de l'ordre de l'unité.

Compte tenu des incertitudes qui affectent le taux de croissance du PIB, votre rapporteur général regrette que le gouvernement ait choisi un coefficient optimiste, et aurait préféré que l'on s'en tienne à 1,2 au maximum.

Bien que globalement analogue à celle de l'année 2004, l'évolution spontanée des recettes fiscales de l'année 2005 serait de nature différente. En effet, en 2005 les trois « grands impôts » contribueraient à la quasi-totalité de cette croissance, alors que les recettes de l'impôt sur les sociétés augmenteraient fortement, comme l'indique le graphique ci-après.

Contributions des principaux impôts à l'évolution spontanée des recettes fiscales

(en points de croissance
par rapport à
l'année précédente)

Source : rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances

2. Les mesures nouvelles

Les mesures nouvelles pour 2005 devraient s'élever à 3,84 milliards d'euros d'allégement fiscal net, comme l'indique le graphique ci-après.

Les incidences fiscales nouvelles en 2005

(en millions d'euros)

Source : présent projet de loi de finances pour 2005

Sur ces 3,84 milliards d'euros de dépenses fiscales supplémentaires, seulement 1,46 milliard, soit moins de la moitié, proviendrait du présent projet de loi de finances.

En effet, la loi de finances initiale pour 2004 entraînera davantage d'incidences fiscales nouvelles en 2005 (- 1,65 milliard d'euros) que le présent projet de loi de finances. Concrètement, les principales incidences fiscales nouvelles en 2005 provenant de la loi de finances initiale pour 2004 sont :

- la réforme du régime fiscal de distribution (IS et précompte), pour 900 millions d'euros ;

- la réforme des plus-values immobilières des particuliers, pour 450 millions d'euros ;

- le crédit d'impôt recherche, pour 235 millions d'euros.

Par ailleurs, la loi pour le soutien à la consommation et à l'investissement, votée en 2004, et le projet de loi relatif à la cohésion sociale, actuellement en cours de discussion, réduiraient les recettes fiscales en 2005 de respectivement 230 millions d'euros et 500 millions d'euros.

Le graphique ci-après détaille l'impact en 2005 des différentes mesures fiscales prévues par le présent projet de loi de finances.

Les incidences fiscales nouvelles en 2005 prévues par le présent projet de loi de finances

(en millions d'euros)

Mesure fiscale

Incidence fiscale

Modification du régime de provisions exceptionnelles pour hausse des prix

250

Exonération d'IR des indemnités versées aux victimes de l'amiante

-10

Crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale

-10

Réduction d'impôt pour télédéclaration

-15

Pôles de compétitivité (crédit d'IS)

-30

Indexation de la PPE au-delà de 1,7 %

-230

Mesures « anti-délocalisation » sur la taxe professionnelle

-330

Suppression en deux ans de la majoration de 3 % sur l'IS

-450

Abattement sur les droits de succession

-630

Total

-1.455

Source : projet de loi de finances pour 2005

Au total, les recettes fiscales nettes totales seraient de 261,5 milliards d'euros en 2004 (estimation révisée) et de 272,1 milliards d'euros en 2005, ce qui représente une augmentation de 2,6 %.

La « pause d'un an » dans la baisse de l'impôt sur le revenu

Le président de la République a annoncé, le 14 juillet 2004, que compte tenu des « moyens » budgétaires actuels, qui n'étaient « pas très grands », il était nécessaire de faire « une pause d'un an dans la baisse de l'impôt sur le revenu ». Il a précisé que « le principe de la baisse et la poursuite de la baisse à partir de l'année prochaine » n'étaient « pas en cause ».

L'évolution du barème de l'impôt sur le revenu

(en %)

Source : lois de finances ; projet de loi de finances pour 2005

* 9 La prise en compte de la croissance de l'année précédente, pondérée en fonction de la part dans le PIB des impôts directs, ne permet pas d'améliorer significativement la prévision de l'élasticité, avec une corrélation (R²) de 0,6 (au lieu de 0,5).

* 10 Le niveau historiquement élevé constaté en 1999 et 2000 « s'analyse sans doute comme un rattrapage à la suite d'une période au cours de laquelle la progression des recettes fiscales s'est révélée très atone. Globalement, la récession de 1993 et les années de croissance faible (1993-1997) qui l'ont suivie ont durablement pesé sur les recettes fiscales : modération salariale, atonie de l'emploi et incidence sur les recettes d'impôt sur les sociétés des déficits apparus sur la période sont quelques facteurs que l'on peut citer parmi d'autres ».

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