II. UNE LOI DU 6 JANVIER 1978 MAINTENUE, MAIS PROFONDÉMENT REMANIÉE

A. UNE TRANSPOSITION S'OPÉRANT DANS LE CADRE DE LA LOI DU 6 JANVIER 1978

1. Une transposition longtemps attendue

L'article 189 du traité instituant la Communauté européenne prévoit que « la directive lie tout Etat membre quant aux résultats à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ».

Un texte national de transposition est donc nécessaire.

L'article 32 de la directive indique que « les Etats membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard à l'issue d'une période de trois ans à compter de son adoption », soit le 24 octobre 1998.

Force est de constater que plus de quatre ans après l'expiration de ce délai, sa transposition n'est toujours pas assurée, ce qui expose la France à des recours en manquement de la part de la Commission européenne.

De plus, cette situation est source d'insécurité juridique, puisque des personnes physiques ou morales sont fondées à se prévaloir de l'effet direct des directives à l'encontre de l'Etat après l'expiration du délai de transposition.

Le cas de cette directive ne constitue malheureusement pas une exception, puisque la France figure depuis le printemps 2002 au dernier rang des Etats de l'Union européenne avec 56 directives relatives au marché intérieure non transposées, ce qui correspond à 3,8 % du nombre total des directives. Lors du Conseil des ministres du 6 novembre 2002 , le Gouvernement a donc décidé de diviser par trois le nombre de directives en retard et d'assurer la transposition de toutes les directives en retard de plus de deux ans . Le Premier ministre a de plus indiqué que les projets de loi transposant des directives devraient être examinés en priorité par le Parlement.

Le travail préparatoire à la transposition de la directive 95/46 CE avait pourtant débuté dès la fin de l'année 1995.

Un premier rapport demandé par le Gouvernement de M. Juppé à deux membres du Conseil d'Etat, et remis le 17 octobre 1996, prévoyait des mesures favorables à l'interconnexion la plus large possible des fichiers administratifs et sociaux. Ayant fait l'objet de vives critiques sur Internet et dans certains journaux, le Gouvernement a suspendu le processus engagé, la dissolution de l'Assemblée nationale en 1997 entraînant ensuite l'abandon du projet.

M. Lionel Jospin a ensuite confié le 25 août 1997 à Hourtin à M. Guy Braibant, président de section honoraire au Conseil d'Etat, une mission de réflexion et de propositions préalable à l'élaboration d'un avant-projet de loi de transposition.

Après la remise de ce rapport le 3 mars 1998 10 ( * ) , il s'est encore écoulé près de quatre ans avant que l'Assemblée nationale n'examine le texte en première lecture le 30 janvier 2002.

2. Le choix symbolique du maintien de la loi du 6 janvier 1978

Dans son rapport remis au Premier ministre, M. Guy Braibant proposait de modifier la loi du 6 janvier 1978, en raison de son caractère historique et symbolique, plutôt que d'élaborer une loi entièrement nouvelle.

Il préconisait également de conserver avec les adaptations nécessaires la trentaine de lois spéciales relatives à la protection des données à caractère personnel et d'appliquer les dispositions de transposition de la directive aux territoires d'outre-mer. En effet, si ces territoires ne sont liés que par un régime d'association à l'Union européenne et ne sont donc pas soumis aux règles relatives à la libre-circulation des marchandises, il est indispensable d'étendre une loi relative à la protection des libertés. On observera d'ailleurs que la loi du 6 janvier 1978 est expressément applicable à ces territoires.

Ces recommandations ont donc été suivies.

L'article premier de la loi proclamant que l'informatique « ne doit porter atteinte ni à l'identité humaine ni aux droits de l'homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques » n'est donc pas modifié.

Néanmoins, cette position entraîne une certaine complexité dans la présentation du présent projet de loi .

Le projet de loi choisit en effet de suivre l'ordre de la directive (traitant dans un premier temps de la licéité des traitements, puis des données sensibles, des obligations des responsables de traitement puis des différentes formalités préalables, avant de prévoir les pouvoirs de contrôle de la CNIL et les voies de recours, pour terminer par les flux transfrontières de données à caractère personnel).

Il substitue donc aux chapitres existants de la loi du 6 janvier 1978 de nouvelles dispositions, ce qui explique des déplacements de dispositions figurant déjà, par ailleurs, dans la loi en vigueur.

Il compte trois titres : le premier modifie la loi du 6 janvier 1978 (articles 1 er à 13), le deuxième modifie d'autres textes législatifs (articles 14 et 15), tandis que le dernier regroupe les dispositions transitoires (articles 16 et 17).

* 10 Données personnelles et société de l'information, rapport au Premier ministre de M. Guy Braibant, la documentation française, 2 ème trimestre 1998.

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