Rapport n° 358 (2001-2002) de M. Lucien LANIER , fait au nom de la commission des lois, déposé le 17 juillet 2002

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N° 358

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 juillet 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant amnistie ,

Par M. Lucien LANIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. René Garrec, président ; M. Patrice Gélard, Mme Michèle André, MM. Pierre Fauchon, José Balarello, Robert Bret, Georges Othily, vice-présidents ; MM. Jean-Pierre Schosteck, Laurent Béteille, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; MM. Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Mme Nicole Borvo, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Christian Cointat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Marcel Debarge, Michel Dreyfus-Schmidt, Gaston Flosse, Jean-Claude Frécon, Bernard Frimat, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Jacques Larché, Jean-René Lecerf, Gérard Longuet, Mme Josiane Mathon, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Josselin de Rohan, Bernard Saugey, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich, Jean-Paul Virapoullé, François Zocchetto.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 19, 23 et T.A. 1

Sénat : 355 (2001-2002)

Amnistie.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 17 juillet 2002 sous la présidence de M. René Garrec, président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Lucien Lanier le projet de loi portant amnistie adopté par l'Assemblée nationale en première lecture après déclaration d'urgence.

Après un bref rappel historique et une présentation du régime juridique de l'amnistie, M. Lucien Lanier, rapporteur, a souligné que le dispositif proposé était le plus restrictif de ceux adoptés depuis le début de la cinquième République et permettait de concilier l'oubli du passé et la nécessaire efficacité du droit pénal.

Il a ainsi indiqué que le projet de loi maintenait le quantum à 3 mois pour les peines d'emprisonnement ferme ou accompagnées d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, comme dans la loi de 1995, mais réduisait de 9 à 6 mois le quantum relatif aux peines d'emprisonnement avec application du sursis simple et que l'amnistie des condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général était désormais subordonnée à l'exécution effective dudit travail d'intérêt général.

Le rapporteur a observé que le projet de loi se distinguait surtout des lois précédentes par le nombre considérable des cas d'exclusion du bénéfice de l'amnistie : 41 dans le projet de loi initial contre 28 dans la loi de 1995, porté à 49 par l'Assemblée nationale qui avait en particulier ajouté à la liste les délits de faux, les délits d'abus de biens sociaux et assimilés, certaines contraventions de stationnement, les atteintes à l'exercice du droit syndical et à la législation sur les conditions de travail ou encore les délits de blanchiment ou les atteintes aux droits des personnes résultant de la constitution ou de l'utilisation de fichiers informatisés.

Il a enfin précisé que, de manière novatrice, l'amnistie n'empêcherait plus le maintien dans un fichier de police judiciaire des mentions relatives à des infractions amnistiées.

Sur proposition du rapporteur, la commission a ensuite adopté dix-huit amendements parmi lesquels treize de nature formelle, les cinq autres ayant pour objet :

- d'ajouter à la liste des exclusions du bénéfice de l'amnistie la peine d'interdiction de détenir ou de porter une arme pendant une durée de cinq ans au plus, les atteintes à l'intégrité physique ou psychique des personnes particulièrement vulnérables et l'administration de substances nuisibles à ces personnes et aux mineurs de quinze ans ainsi que la détention et le commerce de chiens dangereux ;

- et d'éviter que l'amnistie de certaines condamnations n'empêche la mise en oeuvre de la procédure de dissolution civile des mouvements sectaires.

La commission a adopté le projet de loi portant amnistie ainsi modifié.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

L'amnistie est une institution très ancienne puisque la première loi d'amnistie fut adoptée en l'an 403 avant notre ère par les athéniens, à l'initiative de Thrasybule, afin d'oublier les querelles nées de l'expulsion décidée contre les Trente.

En France, l'amnistie est connue depuis l'ancien droit. Elle a, selon les régimes, été à la disposition tantôt du roi tantôt du Parlement. Si l'on excepte le régime de Vichy, l'amnistie est devenue définitivement une matière législative depuis l'adoption de la Constitution de 1875.

Depuis le début de la cinquième République, chaque élection présidentielle est suivie du vote, par le Parlement, d'une loi d'amnistie.

Par ailleurs, le législateur a adopté des lois d'amnistie liées à des événements exceptionnels tels que la guerre d'Algérie ou les troubles en Nouvelle-Calédonie.

La Cour de cassation a défini en 1839 l'amnistie comme ayant pour objet « de couvrir du voile de l'oubli et d'effacer le souvenir et l'effet des condamnations et des poursuites ».

Dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, le Gouvernement souligne qu' « elle a pour but, dans un esprit de réconciliation, d'accorder à ses bénéficiaires l'oubli des fautes du passé pour mieux se tourner vers l'avenir dans le respect de la loi républicaine ».

L'amnistie est aujourd'hui critiquée, notamment parce que son caractère prévisible suscite des comportements inacceptables de la part de certains de nos concitoyens en matière de conduite automobile.

La réduction de sept à cinq ans de la durée du mandat présidentiel suscite par ailleurs des interrogations sur l'opportunité pour le législateur de continuer à adopter des lois d'amnistie après chaque élection présidentielle.

Le présent projet de loi apporte des réponses à ces interrogations. Alors que la loi du 3 août 1995 avait déjà marqué une sensible réduction du champ de l'amnistie, le projet de loi étend encore la liste des infractions insusceptibles d'être amnistiées.

Comme le précise l'exposé des motifs, « L'oubli consenti par le législateur ne peut être cependant sans limite. Certains actes, par leur nature ou par leur gravité, ne peuvent échapper à la mémoire de la justice et à la réprobation de la société ».

Après avoir présenté le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, votre rapporteur exposera la position de votre commission des Lois.

I. LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE AMNISTIE MOINS ÉTENDUE QUE DANS LE PASSÉ

Si l'article 34 de la Constitution précise que « la loi fixe les règles concernant (...) l'amnistie », il n'existe que fort peu de règles générales relatives au régime juridique de l'amnistie. Trois articles du code pénal sont consacrés à l'amnistie. L'article 133-9 dispose que l'amnistie efface les condamnations prononcées et qu'elle entraîne, sans qu'elle puisse donner lieu à restitution, la remise de toutes les peines. L'article 133-10 précise que l'amnistie ne préjudicie pas aux tiers. Enfin, l'article 133-11 interdit à toute personne ayant connaissance de condamnations amnistiées d'en rappeler l'existence.

En pratique, chaque loi d'amnistie comporte des caractéristiques propres, qui parfois dérogent aux règles posées par le code pénal.

Le projet de loi soumis au Sénat diffère des précédents par une présentation nouvelle, destinée à faciliter l'accès à la loi des justiciables. Il comporte six chapitres respectivement consacrés à :

- l'amnistie de droit ;

- l'amnistie par mesure individuelle ;

- l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles ;

- les exclusions de l'amnistie ;

- les effets de l'amnistie ;

- les dispositions relatives à l'outre-mer.

Le présent projet de loi d'amnistie est le plus restrictif de tous ceux qui ont été adoptés depuis le début de la cinquième République. Ses conséquences sur les condamnations prononcées resteront substantielles.

A. UN CHAMP D'APPLICATION RESTREINT

Traditionnellement, les lois d'amnistie suivant une élection présidentielle distinguent trois formes d'amnistie :

- l'amnistie réelle , qui consiste à amnistier des infractions en raison de leur nature ou des circonstances de leur commission ;

- l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine qui a été ou sera prononcée ;

- l'amnistie par mesure individuelle , souvent dénommée « grâce amnistiante ».

1. L'amnistie réelle

Comme les précédentes lois d'amnistie, le projet de loi prévoit dans son article 2 l'amnistie de certaines infractions en raison de leur nature.

Il s'agit :

- des contraventions de police et de grande voirie ;

- des délits punis uniquement d'une peine d'amende ;

- des délits de presse ;

- de certaines infractions au code de justice militaire et au code du service national, sous réserve de la régularisation de la situation des intéressés lorsqu'il s'agit de militaires engagés.

Par ailleurs, certains délits seraient amnistiés en raison des circonstances de leur commission, à condition qu'ils soient punis d'une peine inférieure à dix ans d'emprisonnement ( article 3 ).

Il s'agit :

- des délits commis à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés, d'agents publics ou de membres de professions libérales ;

- des délits commis à l'occasion de conflits relatifs aux problèmes de l'enseignement ou des délits relatifs à la reproduction d'oeuvres ou à l'usage de logiciels à des fins pédagogiques et sans but lucratif ;

- des délits en relation avec des conflits de caractère industriel, agricole, rural, artisanal ou commercial ;

- des délits commis en relation avec des élections de toute nature, à l'exception de ceux en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques ;

- des délits en relation avec la défense des droits et intérêts des Français d'outre-mer.

Cette liste d'infractions amnistiées par leur nature ou les circonstances de leur commission est la même que celle qui avait été retenue par la loi du 3 août 1995, à cette réserve près que l'amnistie des délits commis à l'occasion d'activités revendicatives ou de conflits du travail s'appliquerait aux membres des professions libérales comme aux salariés et agents publics.

2. L'amnistie en raison de la peine

Comme les précédentes lois d'amnistie, le présent projet de loi prévoit l'amnistie de certaines infractions en raison de la nature ou du quantum de la peine prononcée.

Il prévoit ainsi l'amnistie des infractions ayant donné lieu, à titre principal, à une peine d'amende ou de jour-amende ( article 4 ).

Le projet de loi prévoit également, dans son article 5 , l'amnistie de certaines peines d'emprisonnement, mais est plus restrictif à cet égard que les lois d'amnistie précédentes comme le montre le tableau suivant.


L'amnistie des peines d'emprisonnement

1981

1988

1995

Projet
de loi

Peines d'emprisonnement
sans sursis ou accompagnées d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis
assorti de l'obligation d'accomplir
un travail d'intérêt général

6 mois

4 mois

3 mois

3 mois

Peines d'emprisonnement
avec application du sursis simple

15 mois

12 mois

9 mois

6 mois

Comme en 1995, le texte prévoit que certaines infractions ne pourront être amnistiées que pour autant que la peine aura été exécutée. Les amendes d'un montant supérieur à 750 euros devraient ainsi être payées pour que l'amnistie intervienne.

Le projet de loi prévoit également que les condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général sont amnistiées si elles sont inférieures à six mois lorsque le travail a été effectué . Ce régime est plus sévère que celui institué par la loi du 3 août 1995, qui prévoyait une amnistie sans condition d'exécution pour les condamnations à une peine inférieure ou égale à trois mois d'emprisonnement.

Le présent projet de loi marque donc une évolution de l'amnistie, l'oubli de certaines peines étant subordonné à leur exécution.

A cet égard, le projet de loi déroge à l'article 133-9 du code pénal, qui prévoit que l'amnistie entraîne la remise de toutes les peines.

Il s'agit d'une évolution positive, qui ne peut que contribuer à assurer la conciliation entre l'amnistie et la nécessaire efficacité du droit pénal.

D'autres peines donneraient également lieu à amnistie :

- peines de travail d'intérêt général, à condition que le travail ait été accompli en totalité ;

- peines alternatives telles que la suppression du permis de conduire, la confiscation de véhicules, l'interdiction d'émettre des chèques...

- peines complémentaires prononcées à titre de peines principales, telles que des injonctions de soins ou obligations de faire, l'immobilisation ou la confiscation d'un objet ;

- infractions ayant donné lieu à une dispense de peine ;

- infractions ayant donné lieu à une mesure d'admonestation ou de remise à parents en application de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

3. L'amnistie par mesure individuelle

L'amnistie par mesure individuelle consiste à confier au Président de la République le soin d'octroyer le pardon de la société à certaines personnes répondant à des critères fixés par la loi.

Comme les précédentes lois d'amnistie, le présent projet de loi prévoit, dans son article 9 , la possibilité d'appliquer cette mesure :

- aux personnes âgées de moins de vingt-et-un ans au moment des faits ;

- aux personnes qui ont fait l'objet d'une citation individuelle, ou sont titulaires d'une pension militaire d'invalidité ou ont été victimes de blessures de guerre au cours des guerres 1914-1918, 1939-1945 ou d'Algérie, ou des combats en Tunisie ou au Maroc, sur les théâtres d'opérations extérieures, au cours d'opérations de maintien de l'ordre hors de la métropole ou par l'effet d'actes de terrorisme ;

- aux déportés résistants ou politiques et internés résistants ou politiques ;

- aux résistants dont l'un des ascendants est mort pour la France ;

- aux engagés volontaires 1914-1918 ou 1939-1945 ;

- aux personnes qui se sont distinguées d'une manière exceptionnelle dans les domaines humanitaire, culturel, sportif, scientifique ou économique.

La seule novation par rapport à la précédente loi d'amnistie est la mention des personnes qui se sont distinguées dans le domaine sportif.

4. Un nombre considérable d'infractions exclues du champ de la loi d'amnistie

Dès lors que la loi d'amnistie comporte des dispositions d'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine, le législateur est conduit à prévoir des exclusions de l'amnistie, afin de rappeler l'importance particulière attachée par la société à certaines valeurs. Les lois d'amnistie contribuent ainsi à la fonction expressive du droit pénal, qui exprime les valeurs essentielles de la société.

Le présent projet de loi se distingue fortement des lois précédentes par le nombre considérable d'exclusions de l'amnistie qu'il prévoit dans son article 13 . Rappelons qu'aucune exclusion n'était prévue en 1959 et que le nombre d'infractions exclues de l'amnistie a été de 4 en 1966, 3 en 1969, 8 en 1974, 14 en 1981, 17 en 1988 et 28 en 1995 .

Le projet de loi initial mentionnait quarante et une catégories d'infractions exclues de l'amnistie. A l'issue de l'examen du texte par l'Assemblée nationale, quarante-neuf catégories d'infractions sont exclues du bénéfice de l'amnistie.

a) Le projet de loi initial

Il reprenait tout d'abord l'ensemble des infractions exclues du bénéfice de l'amnistie par la loi d'amnistie du 3 août 1995.

Cela concerne en particulier les infractions terroristes, les infractions en matière de trafic de stupéfiants, les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'un mineur de quinze ans, les délits d'abandon de famille, de discriminations, les infractions d'atteintes involontaires à la vie ou l'intégrité de la personne et de risque causé à autrui commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule...

Le projet de loi initial prévoyait cependant l'exclusion de l'amnistie d'un grand nombre de nouvelles infractions parmi lesquelles les délits d'association de malfaiteurs, de proxénétisme, les infractions de nature sexuelle, les délits de violences sur personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, la plupart des contraventions au code de la route à l'exception de certaines contraventions de stationnement...

b) Les ajouts de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a complété la liste des catégories d'infractions exclues du bénéfice de l'amnistie en mentionnant :

les délits de faux et usage de faux ;

les délits d'abus de biens sociaux, de banqueroute par détournement d'actifs, d'abus de confiance ;

l'ensemble des contraventions relatives au stationnement gênant ou dangereux à l'exception du stationnement sur un emplacement interdisant l'accès ou le dégagement d'un autre véhicule, devant les entrées carrossables des immeubles riverains, devant les bornes de distribution d'énergie électrique et sur les emplacements de livraison ;

les infractions d'atteintes à l'exercice du droit syndical ; les infractions d'atteintes à la législation et à la réglementation en matière d'institutions représentatives du personnel dans les entreprises ; les infractions d'atteintes à la législation et à la réglementation en matière de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;

les délits d'usurpation de titres ;

les délits constitués par une atteinte aux droits des personnes résultant de la constitution de fichiers ou de l'utilisation de traitements informatiques ;

les délits de blanchiment ;

les délits de soustraction d'enfants ;

les sévices graves ou actes de cruauté envers un animal.

B. LES EFFETS DE L'AMNISTIE

Comme c'est habituellement le cas, le présent projet de loi prévoit dans son article 14 que l'amnistie efface les condamnations prononcées ou éteint l'action publique. Il précise que toute référence à une mention ou à une condamnation amnistiée est punie de 5.000 € d'amende.

L'article 15 du projet dispose cependant que l'amnistie n'entraîne pas la restitution ou le rétablissement des autorisations administratives annulées ou retirées par la condamnation. Il prévoit également que l'amnistie n'entraîne pas la remise de certaines peines, notamment l'interdiction du territoire français, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale...

De manière novatrice, le projet de loi prévoit dans son article 16 que l'amnistie n'empêche pas le maintien dans un fichier de police judiciaire des mentions relatives à des infractions amnistiées.

L' article 17 précise que l'amnistie n'entraîne de droit la réintégration ni dans les offices publics ou ministériels ni dans les fonctions, emplois, grades ou professions, publics ou privés.

Enfin, l' article 18 prévoit, conformément à l'article 133-10 du code pénal, que l'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers.

C. LES CONSÉQUENCES DU PROJET DE LOI

Pour mesurer l'impact du projet de loi d'amnistie, le ministère de la justice a tenté de dégager l'effet du texte sur les condamnations prononcées en 2000.

504.900 des 575.837 peines prononcées en 2000 en matière correctionnelle et de contraventions de cinquième classe entrent dans le champ de la loi d'amnistie au titre du quantum de peine fixé par le projet de loi avant prise en compte des exclusions.

Le total des exclusions prévu par l'article 13, dans sa rédaction initiale, représente 387.000 des peines entrant dans le champ de l'amnistie. 217.900 peines prononcées en 2000 bénéficieraient ainsi de l'amnistie .

Une estimation fiable des conséquences de la loi d'amnistie est pratiquement impossible à réaliser, notamment parce que les condamnations amnistiées en raison des circonstances de la commission des faits ne peuvent être comptabilisés à partir du casier judiciaire puisque ces circonstances relèvent d'appréciation de faits et non de catégories juridiques.

En ce qui concerne l'impact budgétaire du projet de loi, le ministère de la justice observe que la loi d'amnistie a un effet budgétaire positif, non quantifiable, en ce qu'elle allège les coûts de prise en charge des personnes détenues ou suivies par les services pénitentiaires d'insertion et de probation.

En revanche, la loi d'amnistie a un effet négatif sur les finances publiques puisque le produit du recouvrement des amendes est diminué des amendes amnistiées.

Ainsi, après le vote de la loi d'amnistie du 3 août 1995, le produit du recouvrement des amendes est passé de 475 millions d'euros pour l'année 1994 à 267 millions d'euros pour l'année 1995 et à 416 millions d'euros pour l'année 1996.

Les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estiment que l'effet budgétaire négatif du présent projet de loi devrait être de l'ordre de 300 millions d'euros.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : APPROUVER UN PROJET DE LOI QUI CONCILIE L'OUBLI DU PASSÉ ET LA NÉCESSAIRE EFFICACITÉ DU DROIT PÉNAL

A. UN PROJET DE LOI ÉQUILIBRÉ

Votre commission approuve les orientations du présent projet de loi, qui tend à mieux concilier que par le passé l'oubli de certaines fautes et la nécessaire efficacité du droit pénal .

La diminution des quanta de peine permettant de bénéficier de l'amnistie, l'extension de la liste des infractions exclues du bénéfice de l'amnistie, le développement de l'amnistie sous condition d'exécution de la peine constituent des évolutions positives au regard de la lutte contre l'insécurité.

En ce qui concerne les infractions au code de la route, le présent projet de loi, tel qu'il a été modifié par l'Assemblée nationale, marque une volonté sans précédent de limiter l'amnistie au strict minimum.

En pratique, la plupart des infractions au code de la route seront exclues du bénéfice de l'amnistie. Votre rapporteur, qui n'a cessé de défendre la nécessité de responsabiliser les automobilistes, notamment en tant que rapporteur pour le Sénat de la loi n° 99-505 portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs, ne peut que se réjouir d'une telle évolution .

B. QUELQUES COMPLÉMENTS

Votre commission propose d'apporter quelques compléments au projet de loi afin d'en renforcer la cohérence :

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, la nécessité d'une grande vigilance à l'égard des mouvements sectaires a été évoquée par de nombreux orateurs. Or, un grand nombre d'infractions qui donneront lieu à amnistie entrent dans le champ de l'article premier de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, qui permet de dissoudre certaines personnes morales lorsqu'elles ont subi plusieurs condamnations pour certaines infractions limitativement énumérées.

L'amnistie pourrait donc empêcher la mise en oeuvre de la procédure de dissolution en faisant disparaître certaines condamnations subies par les sectes.

Pour éviter une telle situation, votre commission vous propose, par un article additionnel, de préciser que la loi d'amnistie est sans effet sur la mise en oeuvre de l'article premier de la loi du 12 juin 2001 relative aux mouvements sectaires .

Par ailleurs, le projet de loi tend à exclure de l'amnistie les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'un mineur de quinze ans. Votre commission des Lois estime nécessaire que cette exclusion soit également prévue lorsque ces infractions sont commises sur une personne dont la particulière vulnérabilité , due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ; elle propose également que l'exclusion de l'amnistie concerne non seulement les atteintes physiques ou psychiques sur les mineurs de quinze ans et les personnes vulnérables, mais aussi l'administration de substances nuisibles à ces mêmes personnes.

Votre commission propose d'exclure du champ de l'amnistie les délits prévus par le code rural concernant la détention et le commerce de chiens dangereux , ainsi que le délit de dressage au mordant de chiens en dehors du cadre prévu par la loi. Les chiens dangereux ont causé trop d'accidents graves pour que le législateur puisse accepter que les propriétaires, qui n'ont pas respecté les règles posées par la loi, voient leurs peines effacées.

L'Assemblée nationale a très heureusement exclu du champ de l'amnistie les peines de confiscation d'armes dont le condamné est propriétaire. Toutefois, cette exclusion est de faible portée, dès lors que l'amnistie n'entraîne aucun droit à restitution. En revanche, votre commission des Lois estime nécessaire d'exclure également du bénéfice de l'amnistie la peine d'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de cinq ans au plus, une arme soumise à autorisation .

*

* *

Au bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE PREMIER
AMNISTIE DE DROIT

Article 1er
Champ d'application de l'amnistie de droit

A la différence des précédentes lois d'amnistie et avec la volonté louable d'une présentation plus rationnelle, l'article 1 er du projet de loi fixe, pour l'ensemble des infractions concernées, la date butoir définissant la période couverte par l'amnistie de droit.

Ce procédé évite les répétitions qui alourdissaient inutilement les lois antérieures : la période couverte par l'amnistie est la même quelle que soit la façon dont sont visées les infractions (nature de l'infraction, quantum...) et la mise en facteur commun de la date considérée est tout à fait opportune.

Conformément à la tradition observée sous la Vème République, la date à compter de laquelle l'amnistie cesse de s'appliquer correspond à la date d'entrée en fonction du Président de la République nouvellement élu. Le projet de loi prévoit donc que les infractions amnistiées sont celles commises avant le 17 mai 2002 : les infractions intervenues postérieurement ne sont pas couvertes par l'amnistie.

Le second alinéa de l'article 1 er précise que l'amnistie bénéficie tant aux personnes physiques qu'aux personnes morales. Pour la première fois, une loi d'amnistie prévoit expressément l'amnistie des personnes morales. Rappelons que la responsabilité pénale des personnes morales a été instituée par le nouveau code pénal entré en vigueur le 1 er mars 1994 : aussi le législateur de 1995 n'a-t-il pas éprouvé la nécessité d'inscrire une mention visant les personnes morales. Les cas de responsabilité pénale de personnes morales prévus par la loi se sont depuis lors multipliés et il apparaît aujourd'hui pertinent que la loi prévoie expressément leur amnistie.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 1 er sans modification .

SECTION 1
Amnistie en raison de la nature de l'infraction
ou des circonstances de sa commission
Article 2
Amnistie de droit des contraventions de police
et de certains délits en raison de leur nature

Les articles 2 et 3 circonscrivent le champ de l'amnistie réelle : celle-ci est définie par la nature des infractions concernées.

L'article 2 vise ainsi très traditionnellement :

1°) Les contraventions de police et les contraventions de grande voirie.

L'amnistie, en bloc, des contraventions de police est cependant relativisée par la liste des exclusions figurant à l'article 13. Sont ainsi exclues du champ de l'amnistie par le 9° de l'article 13 l'ensemble des contraventions de troisième, quatrième et cinquième classes définies par le code de la route ainsi que certaines des contraventions de la deuxième classe prévues par ce code relatives à la conduite ou à l'équipement des véhicules et au stationnement sur les emplacements réservés aux véhicules de transport public de voyageurs, aux taxis, aux véhicules affectés à un service public ou encore aux véhicules arborant un macaron Grand Invalide de Guerre (GIG) ou Grand Invalide Civil (GIC) (article R. 417-10, 2° et 8° du code de la route).

Le projet de loi en matière d'amnistie des contraventions est donc beaucoup plus strict qu'en 1995.

Comme en 1988 et 1995, l'amnistie des contraventions de grande voirie est prévue. Cette mention a été rendue nécessaire par l'évolution de la jurisprudence du Conseil d'Etat puis du Conseil constitutionnel en 1987 opérant une distinction entre contraventions de police et contraventions de grande voirie.

2°) Les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue, à l'exception de toute autre peine ou mesure.

L'amnistie des délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue est prévue par toutes les lois d'amnistie présidentielle depuis 1966. La précision selon laquelle le délit ne doit être assorti d'aucune autre peine ou mesure que l'amende a été introduite en 1995, consacrant une jurisprudence constante de la Cour de cassation.

3°) Les délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

La loi d'amnistie s'est enrichie de cette rubrique en 1981. Observons cependant qu'en 1995 (5° de l'article 2 de la loi du 3 août), le champ de l'amnistie se restreignait aux délits résultant de la loi de 1881 passibles de moins de dix ans d'emprisonnement.

La portée de cette rubrique est cependant restreinte par les 16° et 25° de l'article 13 qui excluent du bénéfice de l'amnistie d'une part, l'apologie et la négation des crimes contre l'humanité et la diffamation ou l'injure envers des personnes à raison de leur appartenance à une race ou à une religion, d'autre part la diffamation ou l'injure à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.

4°) Cette rubrique vise une série d'infractions au code du service national et au code de justice militaire.

Les mêmes infractions figuraient dans le champ de l'amnistie en 1988 et 1995. Elles sont recensées dans les tableaux ci-après :

Infractions au code de justice militaire dont l'amnistie est prévue

Articles

Infraction

Peine maximale

d'emprisonnement

encourue

397

Insoumission

1 an
10 ans en temps de guerre

398 à 406

Désertion à l'intérieur et à l'étranger

3 ans, 5 ans ou 10 ans
selon les cas

414

Provocation à la désertion

3 ou 10 ans

415

Recel de déserteur

2 ans

418

Mutilation volontaire

5 ou 10 ans

429 alinéa 1 er

Destruction

3 ou 5 ans

438

Usurpation d'uniformes

et décorations

2 ans

441

Incitation aux actes contraires

au devoir ou à la discipline

2 ans

447

Refus d'obéissance

2 ou 5 ans

451

Voies de fait

3 ou 5 ans

453

Outrage à un supérieur

2 ou 5 ans

456 alinéa 3

Violences à sentinelle

3 ans

457

Insulte à sentinelle

6 mois

460

Violences sur un subordonné

5 ans

461

Outrage à subordonné

1 an

465

Infractions aux consignes

2 ou 5 ans

468 et 469
alinéa 1

Abandon de poste

6 mois,
1 an, 5 ans ou 10 ans

Infractions au code du service national dont l'amnistie est prévue

Articles

Infraction

Peine maximale

d'emprisonnement

encourue

L. 118

Fait pour un appelé de s'être rendu impropre au service

5 ou 10 ans

L. 124

Insoumission d'un appelé

1 ou 10 ans

L. 128

Recel d'un appelé recherché

3 ans

L. 129

Provocation à l'insoumission

5 ans

L. 131

Tentative de recel d'un appelé recherché ou

de provocation à l'insoumission

3 et 5 ans

L. 134

Incitation au renvoi ou à la destruction de pièces telles que la carte du service national

5 ans

L. 149-7

Désertion en cas de service accompli

dans la police nationale

3 ans, 5 ans ou 10 ans

L. 149-8

Abandon de poste d'un policier auxiliaire

6 mois ou 5 ans

L. 149-9

Refus d'obéir d'un policier auxiliaire

2 ans, 5 ans ou perpétuité

L. 156

Désertion des services de l'aide technique ou de la coopération

3 ou 10 ans

L. 159

Non exécution de mission

2 ou 5 ans

Comme dans les deux lois d'amnistie précédentes, le projet de loi précise que l'amnistie des délits de désertion (articles 398 à 406 du code de justice militaire) est subordonnée à ce que le point de départ de computation des délais prévus pour qualifier le fait de désertion soit antérieur à la date butoir du 17 mai 2002 et à la présentation volontaire du déserteur devant l'autorité militaire compétente avant le 31 décembre 2002.

Outre les infractions visées dans les deux tableaux qui précèdent, le 4° de l'article 2 se réfère également aux articles L. 146 à L. 149 du code du service national. Ces articles ont été abrogés postérieurement à la dernière loi d'amnistie par l'article 54 de la loi n° 59-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense. Il convient donc d'y faire référence pour couvrir les infractions commises avant 1999.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 sans modification .

Article 3
Amnistie de certains délits passibles
de moins de dix ans d'emprisonnement
en raison des circonstances de leur commission

Cet article énumère un certain nombre de catégories de délits compris dans le champ de l'amnistie dès lors que la peine maximale applicable est inférieure à dix ans d'emprisonnement. Notons que les cinq catégories visées figuraient déjà à l'article 2 de la loi d'amnistie du 3 août 1995. Il s'agit :

1°) des délits commis à l'occasion de conflits du travail , toujours amnistiés depuis 1959, et des délits commis à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés et d'agents publics , y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics, amnistiés depuis 1988. Est ajoutée par rapport aux lois précédentes la référence aux délits commis à l'occasion d'activités revendicatives par des membres de professions libérales ;

2°) des délits commis à l'occasion de conflits relatifs aux problèmes de l'enseignement , amnistiés depuis 1969, et des délits relatifs à la reproduction d'oeuvres ou à l'usage de logiciels à des fins pédagogiques et sans but lucratif comme en 1995 ;

3°) des délits en relation avec des conflits à caractère industriel, agricole, rural, artisanal ou commercial , y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans les lieux publics, selon une formule identique à celle figurant dans la loi de 1995, elle-même inspirée de la loi d'amnistie de 1988 ;

4°) des délits en relation avec des élections de toute nature , à l'exception de ceux en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques, selon la formule consacrée en 1995. Les lois de 1981 et 1988 visaient déjà ces délits mais prévoyaient des exceptions différentes (délits concernant le vote par procuration et par correspondance notamment). La loi de 1988 prévoyait l'amnistie des délits en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques ;

5°) des délits en relation avec la défense des droits et intérêts des Français rapatriés d'outre-mer , visés par chaque loi d'amnistie depuis 1981.

La liste des délits inclus dans le périmètre de l'amnistie reste donc tout à fait habituelle, les circonstances particulières de leur commission justifiant cette mesure d'apaisement afin de conforter la cohésion nationale.

Outre cette liste contribuant à la définition du champ de l'amnistie, l'article 3 du projet de loi est complété par deux alinéas pour préciser la procédure de constat de l'amnistie pour les condamnations prononcées de façon définitive et pour fixer le régime de l'amnistie en cas de condamnation relative à des infractions multiples.

Reprenant une disposition traditionnelle des lois d'amnistie, le présent projet de loi précise que le constat de l'amnistie incombe au ministère public près la juridiction ayant prononcé la condamnation, soit de sa propre initiative, soit sur requête du condamné ou de ses ayants-droit. Il s'agit de permettre le retrait effectif du casier judiciaire de la fiche relative à la condamnation.

Le dernier alinéa reproduit un dispositif également habituel dans les lois d'amnistie et qui figurait à l'article 19 de la loi de 1995 : en cas de condamnation pour infractions multiples, l'amnistie ne s'applique que si le délit amnistié comme se rattachant à l'une des catégories de délits visées par l'article 3 est puni d'une peine plus forte ou égale à celles dont sont passibles les autres infractions poursuivies. Toutefois, cette règle ne s'appliquera pas si l'une desdites infractions est exclue du bénéfice de l'amnistie : le condamné ne sera alors pas amnistié.

Cette disposition a été insérée dans l'article 3, mais peut également trouver à s'appliquer à l'article 2, qui prévoit l'amnistie d'infractions à raison de leur nature. Votre commission vous soumet, en conséquence, un amendement tendant à disjoindre du présent article son dernier alinéa pour en faire un article autonome.

Elle vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 3
Application à l'ensemble des infractions visées par la section 1
du régime applicable en matière d'infractions multiples

Votre commission vous propose d'insérer par un amendement dans un article autonome les dispositions du dernier alinéa de l'article 3, relatif aux cas de condamnations multiples, afin qu'elles s'appliquent à l'ensemble de la présente section et non seulement aux infractions mentionnées à l'article 3.

SECTION 2
Amnistie en raison du quantum
ou de la nature de la peine
Article 4
Amnistie des délits punis d'une peine d'amende

Cet article prévoit l'amnistie des délits qui ont été ou seront punis de peines d'amende ou de jour-amende.

Rappelons qu'aux termes de l'article 131-5 du code pénal, lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut prononcer une peine de jours-amende consistant pour le condamné à verser au Trésor une somme dont le montant global résulte de la fixation par le juge d'une contribution quotidienne pendant un certain nombre de jours.

En ce qui concerne les amendes, le présent article prévoit, comme les précédentes lois d'amnistie, que, si l'amende est supérieure à 750 €, l'amnistie ne sera acquise qu'après le paiement de cette amende ou après qu'a été subie l'incarcération prévue par l'article 131-25 du code pénal.

L'article 131-25 du code pénal dispose en effet que le défaut de paiement correspondant à une peine de jour-amende entraîne l'incarcération du condamné pour une durée qui correspond à la moitié du nombre de jours-amende impayés.

Enfin, le présent article prévoit que, pour les amendes d'un montant supérieur à 750  €, l'amnistie sera également acquise après exécution de la contrainte par corps, celle-ci ne faisant pas obstacle au recouvrement ultérieur de l'amende.

Dans un souci de clarté, votre commission vous propose par un amendement , de préciser que le présent article concerne les délits punis de peines d'amende ou de jour-amende, à l'exclusion de l'une des peines mentionnées à l'article 5.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié .

Article 5
Amnistie des délits punis de certaines peines

Le présent article prévoit, comme le précédent, l'amnistie de délits en raison de la peine prononcée.

Il prévoit tout d'abord l'amnistie de délits qui ont été ou seront punis de peines d'emprisonnement . Une distinction, traditionnelle, est opérée entre, d'une part, les peines d'emprisonnement ferme ou accompagné d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général et, d'autre part, les peines d'emprisonnement assorties du sursis simple.

Dans le premier cas, seront amnistiées les infractions punies de peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois au plus . Dans le second cas, l'amnistie s'appliquera aux infractions punies de peines d'emprisonnement inférieures ou égales à six mois au plus .

Ainsi, le présent projet de loi marque une nouvelle diminution des quanta retenus pour bénéficier d'une amnistie.

1959 à
1974

1981

1988

1995

Projet
de loi

Peines d'emprisonnement sans sursis ou accompagnées d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général

3 mois

6 mois

4 mois

3 mois

3 mois

Peines d'emprisonnement avec application du sursis simple

12 mois

15 mois

12 mois

9 mois

6 mois

Le texte prévoit que les condamnations à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve supérieure à trois mois mais inférieure ou égale à six mois sont également amnistiées, à la condition que la condamnation ait été déclarée non avenue ou que le délai d'épreuve se soit achevé sans révocation .

En ce qui concerne les condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général, la loi d'amnistie de 1995 prévoyait une amnistie sans condition d'exécution pour les condamnations à une peine inférieure ou égale à trois mois d'emprisonnement. Elle prévoyait également l'amnistie des condamnations à des peines inférieures à neuf mois à la condition que le condamné ait exécuté le travail d'intérêt général sans avoir fait l'objet d'une décision ordonnant l'exécution de la peine ou la révocation du sursis.

Le présent article instaure un régime plus restrictif puisqu'il prévoit que les condamnations à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'effectuer un travail d'intérêt général sont amnistiées lorsque le travail a été effectué et que le sursis n'a pas été révoqué, si elles sont inférieures ou égales à six mois d'emprisonnement.

Les peines mixtes (emprisonnement en partie ferme et en partie assortie d'un sursis simple ou avec mise à l'épreuve) sont amnistiées lorsque le quantum de la partie ferme est inférieur ou égal à trois mois et que la totalité de la peine est inférieure ou égale à six mois, sous condition d'exécution de la période de mise à l'épreuve sans révocation.

Le présent article prévoit l'amnistie des peines de substitution à l'emprisonnement. Cela concerne :

- les peines de travail d'intérêt général , prononcées à l'encontre des majeurs (article 131-8 du code pénal) et des mineurs âgés de seize à dix-huit ans (article 20-5 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante). Comme en 1995, l'amnistie n'est acquise qu'après l'accomplissement par le condamné de l'intégralité du travail d'intérêt général ;

- les peines alternatives mentionnées aux 1° à 6° et 8° à 10° de l'article 131-6 du code pénal : il s'agit des peines de suspension du permis de conduire, d'interdiction de conduire certains véhicules, de l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant cinq ans au plus, de la confiscation d'un véhicule, de l'immobilisation d'un véhicule, de l'interdiction de port d'armes, du retrait du permis de chasser, de l'interdiction d'émettre des chèques et de la confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction ou qui en est le produit.

Le projet de loi initial prévoyait également l'amnistie de la peine de confiscation d'une arme, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, M. Michel Hunault, a exclu cette peine de l'amnistie. Votre commission est favorable à cette modification. Par cohérence, elle vous propose, par un amendement , d'exclure du bénéfice de l'amnistie la peine d'interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation.

Il convient de noter que le présent projet de loi ne mentionne pas parmi les peines amnistiées la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale, qui figurait pourtant dans la précédente loi d'amnistie ;

- les peines complémentaires prononcées à titre de peines principales en application des dispositions de l'article 131-11 du code pénal. L'article 131-11 du code pénal prévoit que lorsqu'un délit est puni d'une ou de plusieurs peines complémentaires mentionnées à l'article 131-10, la juridiction peut ne prononcer que la peine complémentaire ou l'une ou plusieurs des peines complémentaires encourues à titre de peine principale.

Les peines complémentaires mentionnées à l'article 131-10 peuvent emporter interdiction, déchéance, incapacité ou retrait d'un droit, injonction de soins ou obligation de faire, immobilisation ou confiscation d'un objet, fermeture d'un établissement ou affichage de la décision prononcée ou diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.

Toutefois, le projet de loi exclut de l'amnistie les peines mentionnées à l'article 15, à savoir la faillite personnelle, l'interdiction de territoire, l'interdiction de séjour, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale, les mesures de démolition, la dissolution de la personne morale, l'exclusion des marchés publics ainsi que les mesures prévues par l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante 1 ( * ) .

Enfin, le présent article dispose que lorsque les peines mentionnées ont été prononcées en même temps qu'une peine d'amende ou de jour amende, l'amnistie n'est acquise qu'après le paiement de l'amende lorsque celle-ci est supérieure à 750 €.

Sur cet article, outre un amendement rédactionnel, votre commission des Lois vous soumet un amendement ayant pour objet de combler une lacune du dispositif en prévoyant que les peines fermes résultant de la révocation d'une peine avec sursis assortie d'un travail d'intérêt général ne sont pas amnistiées.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié .

Article 6
Amnistie des infractions
ayant donné lieu à une dispense de peine
et des mesures d'admonestation et de remise à parents
prononcées à l'encontre d'un mineur délinquant

Comme les précédentes lois d'amnistie, le présent article prévoit l'amnistie des infractions ayant donné lieu à une dispense de peine. L'article 132-58 du code pénal prévoit qu'en matière correctionnelle ou contraventionnelle, la juridiction peut, après avoir déclaré le prévenu coupable et statué, s'il y a lieu, sur la confiscation des objets dangereux ou nuisibles, dispenser le prévenu de toute autre peine.

La dispense de peine peut être accordée, conformément à l'article 132-59 du code pénal, lorsque le reclassement du coupable est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé.

Le présent article prévoit également l'amnistie de certaines mesures prononcées au titre de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante : les admonestations, les remises à parents, enfin la dispense de toute mesure.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 6 sans modification .

Article 7
Conditions du bénéfice de l'amnistie en raison
du quantum ou de la nature de la peine

Cet article précise les conditions dans lesquelles un condamné bénéficiera de l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine.

En vertu du présent article, l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine ne serait acquise qu'après condamnation devenue définitive. De fait, il est indispensable d'attendre que toutes les voies de recours aient été épuisées pour connaître la peine prononcée et savoir si celle-ci entre bien dans le champ d'application des articles 4 à 6 du projet de loi.

Une exception est toutefois prévue, comme pour les lois d'amnistie précédentes, pour les condamnations prononcées en l'absence du prévenu, c'est-à-dire lorsque la condamnation est prononcée par défaut, itératif défaut (absence du prévenu après opposition à un jugement par défaut) ou réputée rendue contradictoirement malgré l'absence du prévenu en application des articles 410 et 411 du code de procédure pénale. Dans ces hypothèses, l'amnistie est acquise dès le prononcé du jugement, si deux conditions sont remplies : l'absence de partie civile d'une part, le défaut d'appel ou de pourvoi en cassation d'autre part.

Les articles 498 et 499 du code de procédure pénale disposent que le délai d'appel en cas de jugement rendu en l'absence du prévenu ne court qu'à compter de la signification du jugement. En prévoyant que, dans ce cas, l'amnistie peut être acquise sans qu'il y ait lieu à signification, le projet de loi permet d'éviter l'accomplissement de cette formalité. Il permettra par ailleurs d'effacer du casier judiciaire les condamnations prononcées avant l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie et non encore signifiées à cette date.

Par rapport aux précédentes lois d'amnistie, le présent projet introduit cependant une novation puisqu'il précise que l'amnistie n'est acquise dès la décision, en l'absence du condamné, que si elle n'est pas soumise à l'exécution de la peine. L'amnistie de certaines peines est en effet subordonnée à leur exécution.

Le présent article préserve les droits du condamné amnistié en précisant qu'il conserve la possibilité de former opposition, d'interjeter appel ou de se pourvoir en cassation s'il fait ultérieurement l'objet d'une assignation sur intérêts civils. Le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation sera alors calculé à compter du jour où le condamné a eu connaissance de cette assignation.

Enfin, le présent article précise que lorsqu'un prévenu a formé un appel, une opposition ou un pourvoi en cassation avant l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie contre une condamnation amnistiée, il peut, par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision ou de l'établissement pénitentiaire dans lequel il est détenu, se désister de la voie de recours exercée. Ce désistement rendrait caducs tous les recours incidents, sauf ceux de la partie civile et des autres prévenus, et rendrait définitive la condamnation sur l'action publique, ce qui permettrait l'application de l'amnistie.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 7 sans modification .

SECTION 3
Contestations relatives à l'amnistie
Article 8
Règles applicables aux contestations
de l'amnistie de droit

Dans des termes similaires aux deux précédentes lois d'amnistie, le présent article définit les règles applicables aux contestations de l'amnistie de droit ; il renvoie à cet égard aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 778 du code de procédure pénale qui fixe la procédure de rectification en cas de condamnation d'une personne sous une fausse identité. La demande devra ainsi être adressée au président du tribunal ou de la cour qui a rendu la décision ou encore, si la décision a été rendue par une cour d'assises, à la chambre de l'instruction.

Le principe étant posé, plusieurs situations particulières sont ensuite envisagées :

- lorsque la décision émane d'une juridiction militaire siégeant en France, la requête sera soumise à la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle est établi le siège de cette juridiction ;

- lorsque la décision a été rendue par un tribunal aux armées siégeant à l'étranger, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris est désignée pour recevoir la requête en contestation ;

- en matière de contravention de grande voirie, la juridiction compétente pour recevoir la requête est celle qui a prononcé la condamnation.

Enfin, l'article 8 précise qu'en l'absence de condamnation définitive, les contestations doivent être soumises à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 8 sans modification .

CHAPITRE II
AMNISTIE PAR MESURE INDIVIDUELLE

Article 9
Amnistie individuelle
par décret du Président de la République

A l'exception d'une restriction nouvelle et de deux ajouts, l'article 9 du projet de loi initial reprend fidèlement le dispositif de l'article 13 de la loi d'amnistie du 3 août 1995 relatif à la définition du champ de l'amnistie par mesure individuelle.

Contrairement à l'amnistie de droit, accordée à raison de la nature de l'infraction, des circonstances de sa commission ou à raison de la peine prononcée, l'amnistie par mesure individuelle prend en considération la qualité du contrevenant. En cela, elle est comparable à la grâce, également exercée par le Président de la République. Par différence avec la grâce présidentielle, l'amnistie individuelle implique, au-delà de la remise des peines prononcées, l'effacement de la condamnation.

Aux termes du projet de loi initial, sont susceptibles de bénéficier de l'amnistie individuelle par décret du Président de la République les personnes poursuivies ou condamnées pour toute infraction commise avant le 17 mai 2002, dès lors qu'elles n'ont pas auparavant été condamnées à l'emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou délit de droit commun et qu'elles entrent dans une des six catégories énumérées par le projet de loi. Contrairement aux précédentes lois d'amnistie, le projet de loi précise que l'infraction considérée ne doit pas faire partie de celles qui sont expressément exclues du bénéfice de l'amnistie.

Les six catégories de personnes visées sont identiques à celles résultant de la loi de 1995 à l'exception de deux ajouts. Il s'agit :

- des personnes âgées de moins de vingt et un ans au moment de l'infraction ;

- des personnes ayant fait l'objet d'une citation individuelle, titulaires d'une pension militaire d'invalidité ou ayant été victimes de blessures au cours de certains conflits, que ce soit lors d'opérations extérieures, au cours d'opérations de maintien de l'ordre hors de métropole ou par l'effet d'actes de terrorisme.

Depuis la loi d'amnistie de 1969, les conflits ici visés sont les guerres de 1914-1918 et de 1939-1945. Le présent projet de loi vient ajouter la référence à la guerre d'Algérie et aux combats livrés en Tunisie et au Maroc ;

- des déportés ou internés pour faits de résistance ou raisons politiques ;

- des résistants dont l'un des ascendants est mort pour la France ;

- des engagés volontaires des guerres de 1914-1918 et 1939-1945 ;

- des personnes qui se sont distinguées de manière exceptionnelle dans les domaines humanitaire, culturel, sportif, scientifique ou économique. Les personnes qui se sont distinguées dans le domaine sportif sont mentionnées pour la première fois parmi celles qui peuvent bénéficier d'une amnistie par mesure individuelle.

L'avant-dernier alinéa de l'article 9 précise le délai imparti aux personnes susvisées pour présenter leur demande d'amnistie : soit un an à compter de la promulgation de la loi d'amnistie ou de la condamnation définitive.

Pour les personnes âgées de moins de vingt et un ans au moment de l'infraction, ce délai est prolongé jusqu'à la date d'expiration de leur vingt et unième année.

Le dernier alinéa de l'article 9 étend le champ de l'amnistie individuelle à la période antérieure au 18 mai 1995, date butoir fixée par la précédente loi d'amnistie. Ainsi, est ouverte une faculté de « repêchage » aux personnes qui n'auraient pas présenté de demande d'amnistie sur le fondement de la loi de 1995 ou qui l'auraient présentée tardivement, se heurtant à la forclusion. Est donc susceptible d'être obtenue l'amnistie d'infractions commises depuis le 22 mai 1988.

Sur cet article, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a apporté deux précisions rédactionnelles.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 9 sans modification .

CHAPITRE III
AMNISTIE DES SANCTIONS DISCIPLINAIRES
OU PROFESSIONNELLES

Article 10
Conditions d'amnistie
des sanctions disciplinaires ou professionnelles

Comme chaque loi d'amnistie présidentielle depuis 1966, le projet de loi prévoit l'amnistie des faits constituant des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles, commis avant le 17 mai 2002. Cependant, cette amnistie est subordonnée aux conditions suivantes :

- lorsque les faits considérés ont donné lieu à une condamnation pénale, l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles ne pourra être accordée que si la condamnation pénale elle-même est amnistiée ;

- les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs sont exclus du bénéfice de l'amnistie. La seule dérogation possible à cette interdiction correspond au cas où une mesure individuelle est accordée par décret du Président de la République.

Comme pour l'amnistie par mesure individuelle, il est précisé que la demande d'amnistie peut être présentée par toute personne intéressée dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la loi d'amnistie ou de la condamnation définitive.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 10 sans modification .

Article 11
Amnistie de faits retenus ou susceptibles
d'être retenus comme motifs de sanctions par l'employeur

Comme en 1981, 1988 et 1995, le projet de loi propose l'amnistie des faits retenus ou susceptibles d'être retenus comme motifs de sanctions prononcées par un employeur.

Afin que l'effacement procédant de l'amnistie soit effectif, le projet de loi charge l'inspection du travail de veiller à ce qu'il ne puisse être fait état des faits amnistiés en s'assurant du retrait des mentions relatives aux sanctions amnistiées dans les dossiers de toute nature concernant les travailleurs bénéficiaires de l'amnistie.

L'article 11 précise in fine que les règles de compétence applicables au contentieux de l'amnistie sont celles applicables au contentieux des sanctions.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 11 sans modification .

Article 12
Contestations relatives à l'amnistie des sanctions
disciplinaires ou professionnelles

Comme dans chaque loi d'amnistie consécutive à une élection présidentielle depuis 1966, le présent article définit les règles de compétence en matière de contestations relatives au bénéfice de l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles.

Il prévoit ainsi, s'agissant des sanctions définitives, que les contestations relatives au bénéfice de leur amnistie sont portées devant l'autorité ou la juridiction qui a rendu la décision. L'intéressé lui-même peut saisir cette autorité ou cette juridiction pour faire constater que le bénéfice de l'amnistie lui est effectivement acquis.

Lorsque la décision définitive n'est pas encore intervenue, les contestations relatives au bénéfice de l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles sont portées devant l'autorité ou la juridiction saisie de la poursuite.

Au-delà de ces dispositions traitant des questions de compétence, ont été introduites en 1981, à l'initiative du Sénat, de nouvelles dispositions relatives à la suspension de l'exécution des sanctions disciplinaires ou professionnelles durant l'instruction de la demande tendant à faire constater l'amnistie. Dans le prolongement de ces précédentes lois d'amnistie, l'effet suspensif est donc prévu et il est précisé que le recours contentieux contre la décision de rejet de la demande a également un caractère suspensif.

Toutefois, ce caractère suspensif n'est pas irrévocable : en effet, l'autorité ou la juridiction saisie peut ordonner l'exécution provisoire de la sanction ; elle doit alors procéder par décision spécialement motivée. En outre, lorsque la décision appartient à une juridiction, celle-ci peut, en cas d'urgence, être prise par le président de la juridiction ou un membre délégué par lui à cet effet.

Sur cet article, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par M. Jérôme Bignon, pour imposer à l'autorité ou à la juridiction saisie d'entendre la victime avant de statuer. Cet ajout ne paraît pas opportun dans la mesure où, en matière de sanctions disciplinaires ou professionnelles. Il est rare qu'il y ait une victime. En outre, dans l'hypothèse où il y aurait une victime, la rédaction proposée prévoit son audition automatique alors qu'elle-même pourrait ne pas le souhaiter. Votre commission vous soumet un amendement de suppression de cet ajout.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 12 ainsi modifié .

CHAPITRE IV
EXCLUSIONS DE L'AMNISTIE

Article 13
Infractions exclues du bénéfice de l'amnistie

Cet article a pour objet d'énumérer les infractions exclues du bénéfice de l'amnistie.

Le projet de loi initial comporte ainsi 41 rubriques, confirmant la tendance à restreindre le champ de l'amnistie à chaque loi nouvelle. Le nombre de catégories d'infractions concernées par l'exclusion est en effet passé de 4 et 3 respectivement en 1966 et 1969, à 8 en 1974, 14 en 1981, 17 en 1988 et 28 en 1995.

Lors de son examen par l'Assemblée nationale, l'énumération proposée par l'article 13 s'est encore enrichie de 8 rubriques.

1. Les exclusions prévues par le projet de loi initial

L'article 13 du projet de loi reprend scrupuleusement les catégories d'infractions visées par l'article 25 de la loi d'amnistie du 3 août 1995, en la complétant sur certains points dans le sens d'une amnistie plus restrictive et en lui adjoignant une série de nouvelles catégories d'infractions. Les infractions exclues du champ de l'amnistie sont donc les suivantes :

1°) Les infractions en matière de terrorisme

Il s'agit, aux termes de l'article 706-16 du code de procédure pénale, des actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal et des infractions connexes. La référence à l'article 706-16 vise à la fois le dispositif actuellement en vigueur et la rédaction de cet article antérieure à la loi du 22 juillet 1996 renforçant la lutte contre le terrorisme.

2°) Les délits de discrimination

Sont exclus de l'amnistie les délits de discrimination visés par les articles 225-1 à 225-3 et 432-7 du code pénal.

L'article 225-1 définit la discrimination comme « toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs moeurs, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». La discrimination peut également s'exercer à l'encontre d'une personne morale. Punie de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende, la discrimination peut consister dans le refus de fourniture d'un bien ou d'un service, l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, le refus d'embauche, la sanction ou le licenciement d'une personne ou le fait de subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service ou une offre d'emploi à l'un des critères définis à l'article 225-1 précité.

L'article 432-7 du code pénal punit de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende la discrimination commise par un dépositaire de l'autorité publique dans l'exercice de ses fonctions consistant à refuser le bénéfice d'un droit ou à entraver l'exercice d'une activité économique.

Outre les délits de discrimination figurant dans le code pénal, le 2° de l'article 13 vise les articles du code du travail traitant des discriminations contraires à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L. 123-1) ou fondées sur la prise en considération de l'appartenance syndicale (articles L. 412-2 et L. 413-2).

3°) Les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'un mineur de quinze ans

Sont exclues du bénéfice de l'amnistie, lorsqu'elles sont commises sur un mineur de quinze ans, les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, une mutilation ou une infirmité permanente, une incapacité de travail ou encore les violences dites habituelles (articles 222-8, 222-10, 222-12 à 222-14 du code pénal).

Votre commission des Lois vous propose, par un amendement , de compléter cette rubrique pour exclure également du bénéfice de l'amnistie les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'une personne vulnérable , définie par le code pénal comme celle dont la « particulière vulnérabilité » est « due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse ».

Elle vous soumet également un amendement pour exclure de l'amnistie l'administration de substances nuisibles à un mineur de quinze ans ou à une personne particulièrement vulnérable.

4°) Les délits de concussion (article 432-10 du code pénal), de corruption et de trafic d'influence commis par des personnes exerçant une fonction publique (article 432-11), de prise illégale d'intérêts (article 432-12), de favoritisme (article 432-14).

S'ajoutent à cette liste les délits de corruption active (article 433-1) et de trafic d'influence (article 433-2) commis par des particuliers, les délits de corruption passive ou active de personnes investies d'une mission juridictionnelle (article 434-9) ou d'une personne agissant dans l'exercice de sa profession (article 441-8).

Comme en 1995, figurent également dans l'énumération les menaces et actes d'intimidation commis contre les personnes exerçant une fonction publique (article 433-3). Dans la mesure où le projet de loi comprend une nouvelle rubrique (25°) pour exclure du champ de l'amnistie les infractions commises contre les dépositaires de l'autorité publique, il semble préférable de transférer la référence à l'article 433-3 sous cette rubrique. Votre commission des Lois vous soumettra lors de l'examen du paragraphe 25° un amendement à cet effet.

Observons par ailleurs que, par comparaison avec la loi d'amnistie de 1995, le domaine des exclusions est étendu au délit consistant, pour une personne ayant exercé des fonctions dans l'administration publique l'ayant conduite à assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée ou à conclure des contrats avec une telle entreprise, de prendre ou recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans cette entreprise avant l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la cessation desdites fonctions (article 432-13 du code pénal).

Enfin, prenant en compte la loi n° 2000-595 du 30 juin 2000 modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption, le projet de loi exclut du bénéfice de l'amnistie les délits de corruption passive ou active constituant des atteintes à l'administration publique des Communautés européennes, des Etats membres de l'Union européenne, des autres Etats étrangers et des organisations internationales publiques (articles 435-1 à 435-4).

Adoptant un amendement présenté par MM. Floch, Vallini, Montebourg et les membres du groupe socialiste ayant reçu un double avis favorable de la commission des Lois et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a complété la présente rubrique par la référence aux articles 441-1 à 441-4, 441-9 et 441-12 du code pénal définissant les délits de faux et d'usage de faux. L'article 441-1 définit ces délits, l'article 441-2 vise le faux commis dans un document délivré par une administration publique, tandis que l'article 441-3 vise la détention frauduleuse de faux documents et l'article 441-4 le faux en écriture publique ou authentique. Sont intégrés dans le champ de l'exclusion la tentative de commettre ces délits (article 441-9) et ces délits lorsqu'ils sont commis par une personne morale (article 441-12). Par cohérence avec l'insertion à l'article 1 er d'une mention sur l'amnistie des personnes morales, votre commission des Lois vous soumet un amendement pour supprimer cette référence inutile à l'article 441-12 du code pénal.

5°) Les délits d'abandon de famille consistant soit à ne pas exécuter une décision judiciaire ou une convention homologuée imposant le versement d'une pension, de subsides ou de prestations, soit pour une personne soumise à une telle obligation de versement, à ne pas notifier son changement de domicile au créancier (articles 227-3 et 227-4 du code pénal).

6°) A l'exception des délits relatifs à la reproduction d'oeuvres ou à l'usage de logiciels à des fins pédagogiques et sans but lucratif visés au 2° de l'article 3 du projet de loi, de nombreuses infractions prévues par le code de la propriété intellectuelle telles que : les délits de contrefaçon (articles L. 335-2 et L. 335-3), le délit de copie privée, communication publique ou télédiffusion de phonogrammes ou vidéogrammes sans autorisation de l'artiste-interprète ou du producteur (article L. 335-4), le fait de se prévaloir indûment de la qualité de propriétaire d'un brevet ou d'une demande de brevet (article L. 615-12), la divulgation d'une invention faisant l'objet d'une demande de brevet et son exploitation avant que l'autorisation n'ait été accordée (article L. 615-13), les atteintes aux droits du propriétaire d'un brevet (article L. 615-14) ou du titulaire d'un certificat d'obtention végétale (article L. 623-32), les délits de contrefaçon de marques (article L. 716-9). Les exclusions prévues sont les mêmes qu'en 1995.

7°) Comme en 1995, les infractions au code électoral suivantes : inscription sur une liste électorale sous une fausse identité, dissimulation d'une incapacité ou inscription sur plusieurs listes (article L. 86), inscription sur une liste électorale par des moyens frauduleux (article L. 88), le fait de voter pour une personne déchue du droit de vote (article L. 91), le fait de voter en usurpant l'identité d'un autre électeur inscrit (art. L. 92), le fait de voter plusieurs fois (article L. 93), le fait de soustraire, ajouter ou altérer des bulletins contenant les suffrages des citoyens (article L. 94), le détournement de suffrages (article L. 97), les atteintes à l'exercice du droit électoral et à la liberté du vote (article L. 98 à 101), les outrages ou violences commis par les membres d'un collège électoral (article L. 102), l'enlèvement d'une urne contenant des suffrages non encore dépouillés (article L. 103), la violation du scrutin par les membres du bureau ou les agents préposés à la garde (article L. 104), l'influence du vote par l'octroi ou la promesse de dons ou de libéralités (articles L. 106 et L. 108), les voies de fait, violences ou menaces contre un électeur (article L. 107), les atteintes au secret ou à la sincérité du vote (articles L. 113 et L. 116).

8°) Les infractions d'atteinte involontaire à la vie ou à l'intégrité de la personne et de mise en danger d'autrui, commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule

Comme en 1995, sont visés les homicides involontaires (article 221-6 du code pénal) et les incapacités totales de travail pendant plus de trois mois (article 222-19) causés par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence, ainsi que les incapacités totales de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois (article 220-20) et la mise en danger d'autrui susceptible d'entraîner la mort, une mutilation ou une infirmité permanente (article 223-1) par la violation délibérée d'une obligation de sécurité.

Cette liste est complétée par le projet de loi par la référence aux articles R. 625-2 (incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois causée à autrui par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence) et R. 625-3 (atteinte à l'intégrité d'autrui par manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence) du code pénal.

9°) L'ensemble des délits prévus par le code de la route , comme en 1995, mais au-delà les contraventions des cinquième, quatrième et troisième classes, punies respectivement de, au plus, 1.500, 750 et 450 euros d'amende, prévues par ce même code.

Sont également exclues les contraventions de la deuxième classe, punies au plus de 150 euros d'amende relatives à la conduite ou à l'équipement des véhicules : il s'agit par exemple des contraventions aux mesures de suspension ou de restriction de la circulation tendant à limiter l'ampleur des pointes de pollution (article R. 411-19) ou encore le défaut de port de la ceinture de sécurité (article R. 412-1) ou l'utilisation d'un téléphone portable en conduisant (article R. 412-6 II). Au sein de cette même catégorie de contraventions , sont enfin exclues par le projet de loi initial celles réprimant l'arrêt ou le stationnement gênant sur les emplacements réservés aux personnes handicapées, aux véhicules de transport public de voyageurs, aux taxis ou aux véhicules affectés à un service public (2° et 8° du II de l'article R.417-10). L'article R. 417-10 n'étant en vigueur que depuis le 1 er juin 2001, le dispositif vise pour la période antérieure les textes précédemment applicables et désormais abrogés, soit le 2° de l'article R. 37-1 et les quatrième et sixième alinéas de l'article R. 233-1 du code de la route.

Concernant ces dernières contraventions relatives au stationnement des véhicules, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par M. Mariani qui a reçu l'avis favorable du Gouvernement. Cet amendement modifie le dispositif pour exclure du bénéfice de l'amnistie non seulement le stationnement sur les emplacements réservés mais également le stationnement sur les trottoirs, passages ou accotements dédiés à la circulation des piétons, entre le bord de la chaussée et une ligne continue, à proximité de signaux lumineux ou de panneaux de signalisation de façon à les masquer, sur les ponts et dans les tunnels, au droit de bouches d'incendie et sur les bandes d'arrêt d'urgence ainsi qu'en double file. Ne resteraient en définitive amnistiés, parmi les stationnements gênants, que le stationnement sur un emplacement interdisant l'accès ou le dégagement d'un autre véhicule, devant les entrées carrossables des immeubles riverains, devant les bornes d'énergie pour les véhicules électriques et sur les emplacements de livraison.

10°) Les délits de harcèlement sexuel et de harcèlement moral : il s'agit d'une nouvelle catégorie d'exclusion .

Sont visés les articles 222-33 (harcèlement sexuel) et 222-33-2 (harcèlement moral) du code pénal et les articles correspondants L. 122-46 et L. 122-49 du code du travail. Rappelons que ces délits sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende.

Les articles susvisés du code du travail ne prévoyant pas de sanction pénale, l'Assemblée nationale, estimant les références à ce code inutiles, les a supprimées à l'initiative de sa commission des Lois.

11°) Les infractions en matière de trafic de stupéfiants , visées aux articles 222-34 à 222-40 du code pénal. Il s'agit du fait de diriger ou d'organiser un groupement ayant pour objet la production, la fabrication, le commerce ou le transport illicites de stupéfiants, la production ou la fabrication illicites, l'importation ou l'exportation illicites, le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites, la cession ou l'offre illicites, le blanchiment.

12°) Les infractions à la législation et à la réglementation en matière douanière, fiscale et en matière de relations financières avec l'étranger

13°) Les infractions à la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers définis par les articles 19, 21 et 27 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en particulier l'entrée en France et le séjour en France en méconnaissance des conditions légales, le fait de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, le fait de se soustraire à un refus d'entrée en France, à un arrêté d'expulsion ou à une mesure de reconduite à la frontière.

14°) Les délits relatifs aux trafics de main d'oeuvre définis par les articles L. 125-1 (marchandage), L. 125-3 (prêt de main-d'oeuvre), L. 324-9 (travail dissimulé), L. 364-1 à L. 364-6 (emploi de main d'oeuvre étrangère), L. 631-1 et L. 631-2 (obstacle à l'accomplissement des devoirs d'un inspecteur ou d'un contrôleur du travail ; actes de résistance, outrages et violences contre les inspecteurs et contrôleurs du travail).

15°) Les infractions aux règlements communautaires en matière de transports routiers (réglementation sur les conditions de travail et sur l'appareil de contrôle).

16°) Les délits d'apologie de crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des crimes et délits de collaboration avec l'ennemi, ainsi que la provocation aux actes de terrorisme et leur apologie (article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse), le délit de négationnisme (article 24 bis de cette même loi), la diffamation ou l'injure envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion (articles 32 et 33 de la même loi).

17°) Les délits constitués par des atteintes au respect dû aux morts : atteinte à l'intégrité du cadavre, violation ou profanation des sépultures ou de monuments édifiés à la mémoire des morts (articles 225-17 et 225-18 du code pénal).

18°) Le délit d'usurpation d'identité dans des circonstances où des poursuites pénales peuvent être engagées contre la personne dont l'identité est usurpée (article 434-23 du code pénal).

L'Assemblée nationale a complété cette rubrique en adoptant un amendement présenté par M. Bignon et ayant reçu l'aval du Gouvernement pour exclure du bénéfice de l'amnistie les délits d'usurpation de titres visés par l'article 433-17 du code pénal.

19°) Les infractions d'exercice illégal de certaines professions de santé ou d'usurpation de titre prévus par le code de la santé publique.

Le projet de loi se réfère d'une part aux articles dudit code en vigueur avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000, soit le 22 juin 2000, et d'autre part aux dispositions du nouveau code en vigueur depuis cette date. Comme en 1995, sont ainsi exclus du champ de l'amnistie les délits consistant à se livrer à l'exercice illégal des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, infirmier, masseur-kinésithérapeute, ergothérapeute, psychomotricien et manipulateur d'électroradiologie médicale, ou encore le délit constitué par le fait de se livrer à des opérations réservées aux pharmaciens.

Au-delà de ce qui était déjà exclu du bénéfice de l'amnistie en 1995, s'ajoutent le délit d'usurpation du titre de docteur en médecine ou en chirurgie-dentaire ou du titre de sage-femme, ou encore l'usurpation du titre donnant accès en France à l'exercice de la profession de pharmacien.

Sur la présente rubrique, l'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des Lois, corrigé une erreur de référence au code de la santé publique en vigueur avant le 22 juin 2000 : l'exercice illégal des professions de médecin, de chirurgien-dentiste ou de sage-femme était réprimé par l'article L. 376 et non par les articles L. 372 à L. 374 de l'ancien code.

20°) Les délits en matière de patrimoine prévus par le code de l'urbanisme et la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques. Il s'agit des infractions à la procédure relative aux opérations de conservation, de restauration et de mise en valeur des secteurs sauvegardés ainsi que des délits tels que l'acquisition, l'aliénation ou l'exportation d'un objet mobilier classé.

Sur cette rubrique, l'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des Lois, opéré une clarification en complétant le libellé par les références aux articles du code de l'urbanisme réprimant les délits visés.

21°) Les délits prévus par le code de l'environnement

Le 21° de l'article 25 de la loi d'amnistie de 1995 visait une série de délits en matière d'environnement en se référant à différentes lois. Ces lois ont été codifiées et corrélativement abrogées par l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l'environnement. La formulation très générale retenue par le projet de loi permet d'exclure du champ de l'amnistie l'ensemble des infractions portant atteinte à l'environnement.

22°) Les délits en matière de pratiques anticoncurrentielles et en matière de facturation

Sont visés les délits consistant, pour une personne physique, à prendre frauduleusement une part personnelle et déterminante dans les pratiques anticoncurrentielles exercées par une société pour limiter l'accès au marché d'autres entreprises, favoriser artificiellement la hausse ou la baisse des prix, limiter ou contrôler la production ou les débouchés, ou dans l'exploitation abusive par une entreprise d'une position dominante sur le marché intérieur (article L. 420-6 du code de commerce). Est également exclu du champ de l'amnistie le délit de facturation irrégulière, qu'il soit commis par une personne physique ou une personne morale (articles L. 441-3 à L. 441-5 du code de commerce). Notons que le nouveau code de commerce est entré en vigueur le 21 septembre 2000 et que, pour la période antérieure, ces mêmes délits figuraient aux articles 17 et 31 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1 er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence abrogés par l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000.

Considérant que l'amnistie des personnes morales était déjà prévue, de façon générale, par l'article 1 er du projet de loi, l'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des Lois, supprimé la référence à l'article L. 441-5 du code de commerce prévoyant la responsabilité pénale des personnes morales.

23°) Délits prévus par le code monétaire et financier relatifs aux atteintes à la transparence des marchés

Il s'agit d'exclure du champ de l'amnistie les délits d'initié et le délit constitué par le fait de divulguer des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont cotés (article L. 465-1), le délit d'entrave au fonctionnement régulier d'un marché d'instruments financiers (article L. 465-2), que ces délits soient commis par des personnes physiques ou des personnes morales (article L. 465-3). Précisons que pour la période antérieure au 1 er janvier 2002, date d'entrée en vigueur du code monétaire et financier, les dispositions visées sont les articles 10-1 et 10-3 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une commission des opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse.

Comme pour les infractions constituant des atteintes à l'environnement, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a supprimé la référence à l'article L. 465-3 du code monétaire et financier prévoyant la responsabilité pénale des personnes morales.

24°) Les délits d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse et d'interruption illégale de la grossesse

Ces délits sont prévus par les articles L. 2222-2 (interruption illégale de grossesse), L. 2222-4 (le fait de fournir à une femme les moyens matériels de pratiquer sur elle-même l'interruption de la grossesse) et L. 2223-2 (entrave à l'interruption volontaire de grossesse) du code de la santé publique entrés en vigueur le 7 juillet 2001 et, pour la période antérieure à cette date, les articles L. 162-15 et L. 647 du code de la santé publique abrogés par l'ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000. Le délit d'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est par ailleurs visé par l'article 223-10 du code pénal. Les articles 223-11 et 223-12 du code pénal auxquels il est fait référence dans le projet de loi ont été abrogés par la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001, leur contenu étant respectivement transféré dans les articles L. 2222-2 et L. 2222-4 du code de la santé publique précités.

25°) Les délits constitués par des faits d'agression physique ou verbale à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.

Comme en 1995, sont visés l'outrage et la rébellion (articles 433-5 à 433-8 du code pénal) et l'outrage à magistrat (article 434-24). Le projet de loi étend le champ de cette catégorie d'exclusion aux violences ayant entraîné la mort (4° de l'article 222-8), une mutilation ou une infirmité permanente (4° de l'article 222-10) ou une incapacité de travail (4° des articles 222-12 et 222-13) d'un magistrat. Sont également désormais exclus du bénéfice de l'amnistie les délits de diffamation et d'injure commis à l'encontre des cours, tribunaux, armées de terre, de mer et de l'air, corps constitués et administrations publiques, parlementaires, personne dépositaire de l'autorité publique, ministre du culte, juré ou témoin (articles 30, 31 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse), ainsi que les violences et outrages envers les agents des chemins de fer (articles 25 et 26 de la loi du 15  juillet 1845 sur la police des chemins de fer).

Sur ce paragraphe, votre commission des Lois vous soumet un amendement pour ajouter à la liste des infractions visées les menaces et actes d'intimidation commis contre les personnes dépositaires de l'autorité publique (article 433-3 du code pénal), ces infractions étant visées sous la rubrique 4° qui exclut du champ de l'amnistie les délits de concussion, de corruption, de trafic d'influence et de prise illégale d'intérêts.

26°) Le délit de discrédit porté sur une décision judiciaire visé par l'article 434-25 du code pénal.

Sur cet alinéa, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a adopté un amendement rédactionnel.

27°) Les infractions de nature sexuelle ou commises contre des mineurs mentionnées à l'article 706-47 du code de procédure pénale : meurtre ou assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie, le viol (articles 222-23 à 222-26 du code pénal, les autres agressions sexuelles (articles 222-27 à 222-32), le fait d'organiser des réunions comportant des exhibitions ou des relations sexuelles auxquelles un mineur assiste ou participe (article 227-22), l'enregistrement d'images d'un mineur à caractère pornographique ainsi que leur diffusion (article 227-23), la fabrication ou la diffusion d'un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter atteinte à la dignité humaine (article 227-24), le fait pour un majeur d'exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d'un mineur (articles 227-25 à 227-27).

Cette catégorie d'infractions exclues de l'amnistie ne figurait pas dans les précédentes lois.

28°) Les délits d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse

Il s'agit là encore d'une nouvelle catégorie de délits exclus du champ de l'amnistie . Ces délits sont définis par les articles 223-15-2 à 223-15-4 du code pénal issus de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, qui se substituent à l'ancien article 313-4 du code pénal, abrogé depuis le 13 juin 2001. Afin d'intégrer dans le périmètre des exclusions les abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse commis avant le 13 juin 2001, votre commission des Lois vous soumet un amendement insérant la référence à cet article désormais abrogé.

Notons qu'à l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a supprimé les références, inutiles, aux articles 223-15-3 (peines complémentaires encourues) et 223-15-4 (responsabilité pénale des personnes morales).

29°) Les infractions d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne et de risques causés à autrui commises par un employeur

Sont visées les mêmes dispositions du code pénal qu'au paragraphe 8° qui exclut du bénéfice de l'amnistie les mêmes infractions lorsqu'elles sont commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule. Il est en outre fait spécifiquement référence à l'article L. 263-2 du code du travail.

Toutes les rubriques qui suivent constituent de nouveaux cas d'exclusion du champ de l'amnistie par rapport à l'énumération figurant dans la loi du 3 août 1995.

30°) Les délits de recours à la prostitution d'un mineur

Il s'agit des nouveaux délits créés par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 et figurant aux articles 225-12-1 et 225-12-2 du code pénal : le fait de solliciter, d'accepter ou d'obtenir, en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération, des relations de nature sexuelle de la part d'un mineur qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle.

31°) Les délits de destructions, dégradations ou détériorations aggravées (articles 322-2 et 322-3 du code pénal)

Le projet de loi exclut de l'amnistie les délits de destruction, dégradations ou détériorations lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré est :

1° Destiné à l'utilité ou à la décoration publiques et appartient à une personne publique ou chargée d'une mission de service public ;

2° Un registre, une minute ou un acte original de l'autorité publique ;

3° Un immeuble ou un objet mobilier classé ou inscrit, une découverte archéologique faite au cours de fouilles ou fortuitement, un terrain, contenant des vestiges archéologiques ou un objet conservé ou déposé dans des musées, bibliothèques ou archives appartenant à une personne publique, chargée d'un service public ou reconnue d'utilité publique ;

4° Un objet présenté lors d'une exposition à caractère historique, culturel ou scientifique, organisée par une personne publique, chargée d'un service public ou reconnue d'utilité publique.

De même, serait exclue de l'amnistie l'infraction de destruction, dégradation ou détérioration :

1° Lorsqu'elle est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;

2° Lorsqu'elle est facilitée par l'état d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

3° Lorsqu'elle est commise au préjudice d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un officier public ou ministériel , d'un militaire de la gendarmerie, d'un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, en vue d'influencer son comportement dans l'exercice de ses fonctions ou de sa mission.

A ces délits définis par le code pénal s'ajoutent les atteintes à l'intégrité des voies ferrées, de leurs accessoires et dépendances et à la circulation des convois, visées par l'article 21 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer et par l'article 73 du décret n° 42-730 du 22 mars 1942 portant règlement d'administration publique sur la police, la sûreté et l'exploitation des voies ferrées d'intérêt général et d'intérêt local.

32°) Le délit de défaut habituel de titre de transport

Ce délit, créé par la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne et défini par l'article 24-1 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer, est puni de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende. Rappelons que l'habitude est caractérisée par le fait d'avoir fait l'objet de plus de dix contraventions sur une période inférieure ou égale à douze mois.

33°) Les délits d'association de malfaiteurs

Ces délits sont prévus par les articles 450-1 et 450-2 du code pénal. Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Sur cette rubrique, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a supprimé la référence à l'article 450-2 du code pénal qui ne définit pas d'incrimination, mais prévoit que toute personne ayant participé à l'association de malfaiteurs est exempte de peine si, avant toute poursuite, elle a dénoncé ladite association et permis l'identification des participants.

34°) Les délits de proxénétisme

Ces délits sont prévus par les articles 225-5 à 225-11 du code pénal. Cette catégorie inclut les délits assimilés au proxénétisme tels que le fait de faciliter à un proxénète la justification de ressources fictives ou le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en vivant avec une personne qui se livre habituellement à la prostitution. Entre également dans cette catégorie de délits exclus du bénéfice de l'amnistie le fait de détenir, gérer, exploiter, diriger, faire fonctionner ou financer un établissement de prostitution.

35°) Les infractions en matière de fausse monnaie

Ces infractions sont définies par les articles 442-1 à 442-7 du code pénal. Il s'agit de la contrefaçon ou la falsification de pièces de monnaie ou de billets de banque, du transport ou de la mise en circulation de signes monétaires contrefaits ou falsifiés, ou encore de l'emploi ou de la détention sans autorisation des matières et instruments spécialement destinés à la fabrication des pièces de monnaie et des billets de banque.

Sur cette rubrique, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a adopté un amendement, accepté par le Gouvernement, pour étendre à la tentative le champ de l'exclusion en matière d'infractions relatives à la fausse monnaie.

36°) Les infractions concernant les matériels de guerre, les armes et les munitions

Ces infractions sont prévues par le décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions. Ce décret prévoit en effet de nombreuses autorisations et édicte également de nombreuses interdictions dont le non respect est pénalement sanctionné par les articles 24 à 35.

37°) Les contraventions ayant fait l'objet de la procédure d'opposition au transfert de la carte grise

Cette catégorie vise les contraventions qui, pour leur recouvrement, ont donné lieu à la mise en oeuvre par le comptable du Trésor qui constate que le contrevenant n'habite plus à l'adresse enregistrée au fichier d'immatriculation des véhicules, de la procédure d'opposition au transfert de certificat d'immatriculation. Ainsi, les manoeuvres de certains contrevenants tentant d'échapper au paiement des amendes par une adresse de carte grise erronée sont déjouées et les amendes resteront dues même lorsqu'elles correspondent à des contraventions entrant dans le champ de l'amnistie.

Sur cet alinéa, l'Assemblée nationale a opéré une modification rédactionnelle proposée par sa commission des Lois.

38°) Les infractions portant atteinte à la sécurité des manifestations sportives

Ces infractions sont prévues par les articles 42-4 à 42-11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives. Il s'agit entre autres du fait d'accéder à une enceinte sportive en état d'ivresse lors du déroulement d'une manifestation, de s'y rendre coupable de violences, d'y introduire des boissons alcooliques, du fait d'organiser une manifestation sportive publique dans une enceinte non homologuée ou en violation des prescriptions imposées par l'homologation, ou encore du fait de provoquer des spectateurs à la haine ou à la violence à l'égard de l'arbitre, d'un joueur ou de toute autre personne lors d'une manifestation sportive.

Sur cet alinéa, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois, a supprimé la référence à l'article 42-11 de la loi du 16 juillet 1984 énonçant les peines complémentaires encourues.

39°) Les délits en matière de produits dopants

Ces délits ont été définis par l'article 27 de la loi n° 99-223 du 23 mars 1999 relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage, désormais codifié sous les articles L. 3633-2 à L. 3633-4 du code de la santé publique, entré en vigueur le 22 juin 2000. Il s'agit du fait de s'opposer à l'exercice des fonctions dont sont chargés les agents et médecins habilités en matière de lutte contre le dopage et du fait de prescrire de façon illicite, de céder, d'offrir, d'administrer ou d'appliquer à un sportif une substance ou un procédé visés par la loi, de faciliter son utilisation ou d'inciter à son usage.

40°) Les délits et les contraventions de la cinquième classe commis en état de récidive légale

L'exclusion du bénéfice de l'amnistie pour les récidivistes auteurs d'infractions d'une certaine gravité illustre la volonté du Gouvernement de renforcer l'efficacité de la lutte contre la délinquance. Sont concernés les auteurs récidivistes de délits et de contraventions de la cinquième classe, c'est-à-dire celles qui sont punies de 1.500 euros d'amende.

41°) Les faits donnant lieu à des sanctions disciplinaires ou professionnelles infligées par les autorités administratives financières

Afin de contribuer à renforcer la moralisation des activités économiques et financières, le projet de loi prévoit d'exclure du champ de l'amnistie les sanctions disciplinaires ou professionnelles prononcées par les autorités administratives que sont la Commission bancaire, la Commission des opérations de Bourse, le Conseil des marchés financiers, le Conseil de discipline de la gestion financière, la Commission de contrôle des assurances et la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance.

2. Les exclusions ajoutées par l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a ajouté huit rubriques à la liste des infractions exclues du bénéfice de l'amnistie :

4° bis) Les délits d'abus de biens sociaux et assimilés

Adoptant un amendement présenté par MM. Floch, Vallini, Montebourg et les membres du groupe socialiste ayant reçu un avis de sagesse du Gouvernement, l'Assemblée nationale a ajouté une rubrique à l'énumération de l'article 13 pour exclure du bénéfice de l'amnistie les délits d'abus de biens sociaux et assimilés, définis très largement.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale vise successivement les délits d'abus de biens sociaux prévus par :

- le code de commerce aux articles L. 241-3 pour les sociétés à responsabilité limitée, L. 242-6 pour les sociétés anonymes à conseil d'administration, L. 242-30 pour les sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance, L. 243-1 pour les sociétés en commandite par actions, L. 244-1 pour les sociétés par actions simplifiées. Il est également fait référence à l'article L. 247-8 qui définit l'abus de biens sociaux commis par le liquidateur d'une société ;

- l'article L. 231-11 du code monétaire et financier pour les sociétés civiles de placement immobilier ;

- l'article L. 328-3 du code des assurances pour les entreprises d'assurances ;

- l'article 22 de la loi n° 83-557 du 1 er juillet 1983 portant réforme des caisses d'épargne et de prévoyance. Notons que cet article n'est plus en vigueur depuis le 1 er août 2000 car il a été abrogé par l'article 33 de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière ;

- l'article 26 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération pour les sociétés coopératives ;

- les articles L. 313-32 et L. 241-6 du code de la construction et de l'habitation pour, d'une part, les organismes de collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction et, d'autre part, pour les sociétés de construction.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale exclut également du bénéfice de l'amnistie :

- les délits de banqueroute définis par le code de commerce aux articles L. 626-1 à L. 626-5 ;

- le délit de détournement ou recel d'actifs d'un débiteur soumis à une procédure de redressement judiciaire par son conjoint, ses descendants, ascendants ou collatéraux, visé par l'article L. 626-10 du code de commerce ;

- le détournement d'actifs par un administrateur, représentant des créanciers, liquidateur ou commissaire à l'exécution du plan défini par l'article L. 616-12 du code de commerce ;

- les délits d'abus de confiance, de détournement de gage ou d'objet saisi et d'organisation frauduleuse de son insolvabilité définis par les articles 314-1 à 314-12 du code pénal.

14° bis) L'entrave à l'exercice du droit syndical

Par l'adoption d'un amendement présenté par MM. Brunhes, Gérin, Braouezec et les membres du groupe communiste ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a exclu du bénéfice de l'amnistie le délit d'entrave à l'exercice du droit syndical défini par l'article L. 481-2 du code du travail.

14° ter) Les infractions à la législation relative aux institutions représentatives du personnel

Comme la précédente, cette nouvelle rubrique a été introduite par l'Assemblée nationale avec l'assentiment du Gouvernement, à l'initiative de MM. Brunhes, Gérin, Braouezec et des membres du groupe communiste. Il s'agit d'exclure du bénéfice de l'amnistie les atteintes à la libre désignation des délégués du personnel ou à l'exercice de leurs fonctions (article L. 482-1 du code du travail), les entraves à la constitution d'un comité d'entreprise, d'un comité d'établissement ou d'un comité central d'entreprise, les atteintes à la libre désignation de leurs membres et à leur fonctionnement (article L. 483-1), les entraves à la désignation des membres d'un comité de groupe ou son fonctionnement régulier (article L. 483-1-1), les entraves à la constitution d'un groupe spécial de négociation ou d'un comité d'entreprise européen (article L. 483-1-2) et le fait pour un employeur de ne pas présenter le bilan social de l'entreprise (article L. 483-2).

14° quater) Les infractions à la législation relative à l'hygiène et à la sécurité

A l'initiative des mêmes auteurs que précédemment et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a exclu du champ de l'amnistie les infractions constituées par des atteintes à la législation applicable en matière d'hygiène et de sécurité dans l'entreprise (article L. 263-2 du code du travail).

28° bis) Les délits constitués par des atteintes aux droits des personnes résultant de la constitution de fichiers ou de l'utilisation de traitements informatiques

Cette nouvelle rubrique a été introduite par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Fenech avec un avis favorable de la commission des Lois et du Gouvernement. Il s'agit d'exclure du bénéfice de l'amnistie les délits constitués par un usage prohibé des fichiers informatiques et par la création de tels fichiers, visés par les articles 226-16 à 226-23 du code pénal. Ces infractions sont constituées par le fait de ne pas respecter les formalités légales préalables à la réalisation de traitements automatisés d'informations nominatives (article 226-16), le fait de procéder à un traitement automatisé d'informations nominatives sans préserver la sécurité et l'intégrité des données (article 226-17), le fait de collecter des données par un moyen frauduleux ou de procéder à un traitement d'informations nominatives concernant une personne malgré l'opposition de celle-ci (article 226-18), le fait de conserver en mémoire informatisée des données nominatives sensibles sans l'accord exprès des intéressés (article 226-19), le fait de conserver des informations nominatives au-delà de la durée déclarée (article 226-20), le fait de détourner de leur finalité les données nominatives enregistrées (article 226-21) ou de les divulguer (article 226-22). L'article 226-23, également visé, étend aux fichiers non automatisés les infractions définies aux articles 226-17 à 226-19.

33° bis) Les délits de blanchiment

Elle a prévu, à l'initiative de sa commission des Lois, d'exclure les délits de blanchiment définis par les articles 324-1 à 324-6 du code pénal.

34° bis) Les délits aggravés de soustraction d'enfant

Elle a exclu, à l'initiative de sa commission des Lois, les délits aggravés de soustraction d'enfant visés par l'article 227-9 du code pénal. Il s'agit du cas où l'enfant mineur est retenu plus de cinq jours sans que les personnes en droit de le réclamer soient informées de l'endroit où il se trouve et du cas où l'enfant mineur est retenu indûment hors du territoire de la République.

42°) Les sévices et actes de cruauté envers les animaux

Elle a prévu d'exclure, à l'initiative de M. Mariani et contre l'avis du Gouvernement, les sévices et actes de cruauté envers les animaux, réprimés par l'article 521-1 du code pénal.

3. L'ajout d'une nouvelle catégorie d'exclusion proposé par votre commission des Lois

En 1999, une loi est venue réprimer la détention et le commerce de chiens dangereux, à l'origine d'agressions très graves, en particulier contre les enfants. Ces délits aux conséquences dramatiques, définies par les articles L. 215-1 à L. 215-3 du code rural, méritent d'être exclus du bénéfice de l'amnistie. Votre commission des Lois vous soumet un amendement à cet effet.

Elle vous propose d'adopter l'article 13 ainsi modifié .

CHAPITRE V
EFFETS DE L'AMNISTIE

Article 14
Effet extinctif de l'amnistie

Le présent article énonce l'effet principal de l'amnistie qui participe de sa définition même : l'effacement de la condamnation ou l'extinction de l'action publique. Les faits perdent leur caractère délictueux, l'infraction ne pourra plus donner lieu à des poursuites et, si une condamnation est déjà intervenue, un terme sera immédiatement apporté à son exécution.

Le premier alinéa , énonçant le principe de l'effacement, fait référence aux articles 133-9 à 133-11 du code pénal et aux articles 6 et 769 du code de procédure pénale qui en explicitent les contours, contrairement aux lois d'amnistie antérieures qui précisaient directement les effets de l'amnistie dans le corps du dispositif. En effet, l'applicabilité du nouveau code pénal à Mayotte, aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, résultant de l'ordonnance n° 96-267 du 28 mars 1996 ratifiée par la loi n° 96-1240 du 30 décembre 1996, date de 1996 et il n'était pas possible en 1995 de procéder par simples références.

Le nouveau code pénal consacre sa section III du chapitre III du titre III du livre premier à l'amnistie.

Aux termes de l'article 133-9, « l'amnistie efface les condamnations prononcées. Elle entraîne, sans qu'elle puisse donner lieu à restitution, la remise de toutes les peines. Elle rétablit l'auteur ou le complice de l'infraction dans le bénéfice du sursis qui avait pu lui être accordé lors d'une condamnation antérieure ».

L'article 133-10 précise que « l'amnistie ne préjudicie pas aux tiers ».

Enfin, l'article 133-11 dispose qu' « il est interdit à toute personne qui, dans l'exercice de ses fonctions, a connaissance de condamnations pénales, de sanctions disciplinaires ou professionnelles ou d'interdictions, déchéances et incapacités effacées par l'amnistie, d'en rappeler l'existence sous quelque forme que ce soit ou d'en laisser subsister la mention dans un document quelconque. Toutefois, les minutes des jugements, arrêts et décisions échappent à cette interdiction. En outre, l'amnistie ne met pas obstacle à l'exécution de la publication ordonnée à titre de réparation ».

L'article 6 du code de procédure pénale cite l'amnistie parmi les causes d'extinction de l'action publique et son article 769, dans son deuxième alinéa, prévoit le retrait du casier judiciaire des fiches relatives à des condamnations effacées par une amnistie.

Sa commission des Lois ayant observé que l'article 17 de la loi d'amnistie du 3 août 1995 précisait que l'amnistie entraînait « sans qu'elle puisse donner lieu à restitution, la remise des peines et des mesures de police et de sûreté », l'Assemblée nationale a considéré que la disparition de la référence aux mesures de police et de sûreté dans le projet de loi introduisait une ambiguïté et qu'il était préférable de reprendre le dispositif de 1995.

Le deuxième alinéa de l'article 14 reprend une disposition introduite par l'article 21 de la loi d'amnistie de 1995 pour tirer les conséquences de la suppression par la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale des frais de justice et le maintien du seul droit fixe de procédure. L'amnistie fait donc désormais obstacle au recouvrement du droit fixe de procédure prévu par l'article 1018 A du code général des impôts.

Le troisième et dernier alinéa , en écho à l'article 133-11 du code pénal, punit d'une amende de 5.000 euros le fait de faire référence à une sanction ou à une condamnation effacée par l'amnistie. Cette peine est aggravée par rapport à celle prévue en 1995, l'amende encourue s'élevant alors à 25.000 francs. Il est en outre prévu qu'une personne morale puisse être déclarée pénalement responsable, la peine encourue étant égale au quintuple de celle prévue pour les personnes physiques, soit 25.000 euros.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 14 sans modification .

Article 15
Neutralité de l'amnistie
sur les autorisations administratives

Cet article énumère une série de dérogations au principe général de remise des peines et des mesures de sûreté.

Le premier alinéa , reprenant une disposition figurant en tête de l'article 18 de la loi de 1995, dispose que l'amnistie n'entraîne pas la restitution ou le rétablissement des autorisations administratives annulées ou retirées par la condamnation. Notons que ces autorisations, telles que la fermeture d'un débit de boissons ou le retrait du permis de chasse, étaient auparavant déjà exclues du bénéfice de l'amnistie par la jurisprudence comme des mesures de sécurité publique et de police.

Cette mention est cependant complétée par une précision nouvelle selon laquelle l'amnistie ne fait pas obstacle à la réparation des dommages causés au domaine public.

Comme dans la loi de 1995, figure ensuite aux dix alinéas suivants une énumération des mesures de police et de sûreté faisant exception au principe de la remise. Il s'agit de :

- la faillite personnelle ainsi que les autres sanctions prises à l'encontre des faillis.

Depuis l'abrogation de la loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises par l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce, ces sanctions sont prévues par les articles L. 625-1 et suivants dudit code. Afin de couvrir l'intégralité de la période concernée par l'amnistie, le projet de loi vise conjointement le titre VI de la loi du 25 janvier 1985 précitée et le nouveau code de commerce. Les sanctions applicables en matière de faillite personnelle dont l'amnistie n'entraîne pas la remise sont, outre le fait d'être déclaré failli, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler une entreprise.

- l'interdiction du territoire français prononcée à l'encontre d'un étranger reconnu coupable d'un crime ou d'un délit .

Rappelons qu'aux termes de l'article 131-10 du code pénal ladite peine d'interdiction du territoire peut être prononcée à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus et cette interdiction entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion.

- l'interdiction de séjour prononcée pour crime ou délit .

Prévue par l'article 131-31 du code pénal, cette peine complémentaire ou accessoire emporte défense de paraître dans certains lieux et est assortie de mesures de surveillance et d'assistance qui, indissociables de la mesure d'interdiction, ne sont pas couvertes par l'amnistie.

- l'interdiction des droits civiques, civils et de famille prononcée pour crime ou délit .

Rappelons qu'aux termes de l'article 131-26 du code pénal, l'interdiction porte sur le droit de vote, l'éligibilité, le droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'expertise judiciaire, le droit de représenter ou d'assister une partie devant la justice, le droit de témoigner en justice, le droit d'être tuteur ou curateur. Lorsque l'interdiction du droit de vote ou l'inéligibilité est prononcée, cela emporte interdiction d'exercer une fonction publique.

- l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale prononcée pour crime ou délit .

Cette interdiction, prévue par les articles 131-27 et 131-28 du code pénal, constitue une nouvelle rubrique dans la liste des sanctions dont l'amnistie n'entraîne pas la remise. Il s'agit de faire en sorte que, en dépit de l'amnistie dont elle bénéficierait, une personne condamnée dans le cadre de son activité professionnelle n'ait pas la possibilité, avant l'expiration de la période pour laquelle la sanction a été prononcée, de reprendre l'exercice de cette activité.

- les mesures de démolition, de mise en conformité et de remise en état des lieux .

- la dissolution de la personne morale prévue à l'article 131-39 du code pénal .

La dissolution peut être prononcée lorsque la personne morale a été créée ou détournée de son objet social dans le but de commettre un crime ou un délit dont la commission par une personne physique est punie d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans. Précisons que la sanction de dissolution n'est pas applicable aux personnes morales de droit public, ni aux partis ou groupements politiques, syndicats professionnels ou institutions représentatives du personnel.

- l'exclusion des marchés publics prévue à l'article 131-34 du code pénal .

Cette sanction a une portée très large puisqu'elle emporte « interdiction de participer, directement ou indirectement, à tout marché conclu par l'Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, ainsi que par les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat ou par les collectivités territoriales ou leurs groupements ».

A l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a complété cette énumération par la confiscation d'une ou plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition.

Par coordination avec l'exclusion du bénéfice de l'amnistie des délits sanctionnés de l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de détenir ou de porter une arme, proposée par votre commission des Lois à l'article 5, elle vous soumet au présent article un amendement pour ajouter à la liste des peines dont l'amnistie n'entraîne pas la remise l'interdiction de détenir ou de porter une arme.

Comme en 1995, le projet de loi prévoit enfin à l'avant-dernier alinéa que l'amnistie reste sans effet sur les mesures prononcées sur le fondement d'un certain nombre d'articles de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. Il s'agit en particulier de la remise au service de l'assistance à l'enfance, du placement en établissement ou de la mise sous protection judiciaire. Sur cet avant-dernier alinéa de l'article 15, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de clarification rédactionnelle à l'initiative de sa commission des Lois.

Le dernier alinéa , reprenant une mention traditionnelle, autorise les services du casier judiciaire national à conserver l'enregistrement des décisions par lesquelles une des mesures susvisées dont la remise est exclue a été prononcée.

Cela constitue une dérogation au principe d'effacement du casier judiciaire, dérogation rendue nécessaire par le fait que le casier judiciaire sert de support pour la mise en oeuvre des mesures complémentaires à la peine principale.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 15 ainsi modifié .

Article 16
Autres limites à l'effet extinctif de l'amnistie

Cet article regroupe plusieurs dispositions énonçant des limites à l'effet extinctif de l'amnistie et qui constituent des mentions traditionnelles des lois d'amnistie.

Le premier alinéa prévoit que l'amnistie ne fait pas obstacle à l'exécution des jugements ou arrêts intervenus en matière de diffamation ou de dénonciation calomnieuse ordonnant la publication des délits, jugements ou arrêts. Cette publication constitue en effet une des modalités de réparation du préjudice et le principe de la réserve du droit du tiers figurant à l'article 18 impose qu'elle soit effectivement mise en oeuvre.

Le deuxième alinéa dispose que l'amnistie ne fait obstacle ni à la réhabilitation ni à l'action en révision. Il s'agit en effet d'éviter que, paradoxalement puisque l'amnistie est une mesure de clémence, la personne qui s'estime injustement condamnée, ne soit pénalisée. La réhabilitation peut être préférable pour elle compte tenu de sa portée morale et de reconnaissance sociale et dans la mesure où sont effacées toutes les interdictions, déchéances et mesures de sûreté accessoires de la peine.

Le troisième alinéa prévoit que l'amnistie reste sans effet sur les mesures ou décisions prises en application des articles 378 et 379-1 du code civil, c'est-à-dire le retrait de l'autorité parentale, total ou partiel ou encore limité aux attributs que le jugement prononçant la condamnation pénale spécifiée.

Le dernier alinéa introduit une limite nouvelle au principe de l'effacement matériel, dans les fichiers, de la condamnation amnistiée. Est ainsi prévu le maintien dans les fichiers de police judiciaire des infractions amnistiées, que la condamnation définitive ait été prononcée ou que l'instance soit en cours. Il s'agit d'éviter que l'amnistie dont la fréquence sera accrue par l'instauration du quinquennat si toutefois cette tradition perdure, ne compromette l'efficacité de la lutte contre la délinquance.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 sans modification .

Article additionnel après l'article 16
Absence d'effet de l'amnistie sur la procédure
de dissolution civile de certaines personnes morales

Après l'article 16, votre commission des Lois vous propose, par un amendement , d'insérer un article additionnel afin d'empêcher que l'amnistie ne fasse disparaître certaines condamnations prononcées à l'encontre de mouvements sectaires, faisant obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de dissolution civile. La loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 prévoit en effet la possibilité d'engager une procédure de dissolution civile de certaines personnes morales lorsqu'elles ont été condamnées à plusieurs reprises pour des infractions limitativement énumérées. Le présent amendement garantit donc la neutralité de l'amnistie au regard de cette procédure et évite ainsi d'affaiblir l'action menée contre les mouvements sectaires.

Article 17
Limites à l'effet rétroactif de l'amnistie

Cet article regroupe une série de dispositions figurant traditionnellement dans les lois d'amnistie ; il reprend très exactement les termes de l'article 20 de la loi d'amnistie du 3 août 1995.

En vertu des deux premiers alinéas , l'amnistie n'ouvre aucun droit à la réintégration dans une fonction, dans un emploi, un grade ou une profession. Mesure d'oubli, elle n'efface pas les conséquences de la sanction sur la carrière. Même lorsque la réintégration a lieu, elle n'implique pas la reconstitution de la carrière.

L'absence de droit à réintégration est une des illustrations du principe de non rétroactivité énoncé par le Conseil constitutionnel en 1988 (décision n° 88-244 DC du 20 juillet 1988) : « l'amnistie ne comporte pas normalement la remise en état de la situation de ses bénéficiaires ».

Une autre illustration de ce principe figure au dernier alinéa de l'article 17 : il s'agit de l'absence de droit à réintégration dans l'ordre des décorations officielles. Toute réintégration n'est cependant pas exclue : elle peut en effet être prononcée au cas par cas, par mesure individualisée, à la demande du garde des sceaux et, le cas échéant, du ministre intéressé, par décret du Président de la République pris après avis du grand chancelier compétent.

A l'inverse, le législateur prévoit traditionnellement un droit à réintégration dans les divers droits à pension. Cela s'applique aussi bien à l'amnistie de droit, à compter de la date de publication de la loi d'amnistie, qu'à l'amnistie par mesure individuelle, à compter du jour où l'intéressé est admis à son bénéfice. Il est précisé que la liquidation des droits à pension se fait selon la réglementation prévue par le régime de retraite applicable aux intéressés en vigueur le 17 mai 2002.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 17 sans modification.

Article 18
Réserve du droit des tiers

Reprenant un principe inscrit à l'article 133-10 du code pénal, le premier alinéa dispose que « l'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers ». Les victimes conservent donc le droit de faire reconnaître le préjudice subi et d'en obtenir réparation.

Le deuxième alinéa précise les effets de ce principe de la réserve du droit des tiers sur les instances en cours relatives aux intérêts civils. Il prévoit que le dossier pénal est versé aux débats et mis à la disposition des parties.

Enfin, aux termes du dernier alinéa , lorsque la juridiction de jugement a été saisie de l'action publique avant la publication de la loi d'amnistie, elle reste compétente pour statuer, s'il y a lieu, sur les intérêts civils.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 18 sans modification.

Article 19
Condamnations prononcées
par les juridictions étrangères

Comme en 1981, 1988 et 1995, le projet de loi prévoit l'effacement au casier judiciaire des condamnations prononcées par les juridictions étrangères pour les infractions de même nature que celles visées au chapitre Ier, c'est-à-dire les infractions entrant dans le champ de l'amnistie de droit commises avant le 17 mai 2002.

Le second alinéa précise que les contestations relatives à l'effacement au casier judiciaire des condamnations prononcées par des juridictions étrangères relèvent de la compétence de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris. Rappelons que cette même formation de jugement, en vertu de l'article 8 du projet de loi, aura également à connaître des recours contre les décisions rendues par un tribunal aux armées siégeant à l'étranger.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 19 sans modification .

CHAPITRE VI
DISPOSITIONS DIVERSES

Article 20
Application de la loi à Mayotte

L'article 20 prévoit l'application de la présente loi d'amnistie à la collectivité départementale de Mayotte.

Rappelons qu'en vertu de l'article 3 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, le principe de spécialité législative subordonnant l'applicabilité de la loi métropolitaine à cette collectivité à l'insertion d'une mention d'extension demeure. La collectivité territoriale de Mayotte était déjà régie par ce principe auparavant en vertu de l'article 10 de la loi statutaire du 24 décembre 1976.

Si le principe applicable reste celui de la spécialité législative et non celui dit de « l'assimilation », le champ des matières dans lesquelles les lois nationales sont applicables d'emblée ou, selon l'expression retenue par la loi statutaire « de plein droit », est précisé en tête de l'article 3 précité. Parmi ces matières, figurent le droit pénal et la procédure pénale. Il est prévu que ce domaine législatif d'application directe s'enrichira au fil du temps ; toutefois, les sanctions administratives et le droit du travail continueront à nécessiter une mention expresse pour leur applicabilité à la collectivité départementale de Mayotte. En effet, alors que les matières visées comme étant ou devant devenir d'application directe n'englobent ni les sanctions administratives ni le droit du travail, le IV de l'article 3 de la loi du 11 juillet 2001 précitée dispose que « les autres lois, ordonnances et décrets ne sont applicables à Mayotte que sur mention expresse ». Aussi convient-il de prévoir une mention expresse d'extension des articles 10 à 12 du projet de loi relatifs à l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles : ce que prévoit le II. En revanche, les dispositions de droit pénal ou de procédure pénale étant applicables directement ou « de plein droit », il n'y a pas lieu de prévoir une mention d'applicabilité pour les articles 1 er à 9 et 14 à 19. Le 1 ° du I de l'article 20 a donc une portée purement pédagogique.

Cette mention n'ayant aucune utilité normative et risquant même, en contradiction avec les termes très explicites de la loi statutaire, de constituer un précédent créant une exigence de mention expresse d'extension dans des matières où les lois métropolitaines sont en principe applicables d'emblée, votre commission des Lois vous soumet un amendement de suppression des dispositions concernées.

Le 2° du I propose une grille de lecture de certaines dispositions figurant à l'article 13 du projet de loi, applicables d'emblée à Mayotte mais contenant des références à des textes inapplicables à cette collectivité dans leur rédaction métropolitaine. Ainsi, pour l'application à Mayotte de l'article 13 du projet de loi qui énumère les infractions exclues du bénéfice de l'amnistie, les références au code du travail applicable dans la collectivité départementale de Mayotte se substituent aux références au code du travail et la référence à l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est remplacée par les références au décret du 21 juin 1932 réglementant les conditions d'admission et de séjour des étrangers à Mayotte et à l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte.

A l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a procédé, sur cet article, à une modification rédactionnelle.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 20 ainsi modifié .

Article 21
Application de la loi dans les territoires d'outre-mer
et en Nouvelle-Calédonie

Comme l'article 20 pour la collectivité départementale de Mayotte, le présent article propose une grille de lecture pour l'application de la loi d'amnistie aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, collectivités régies par le principe de spécialité législative.

Le paragraphe I contient la mention expresse d'extension aux trois territoires d'outre-mer que sont la Polynésie française, les Iles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) ainsi qu'à la Nouvelle-Calédonie, collectivité sui generis . Cette extension est comprise sous réserve des compétences propres dévolues à ces collectivités par leurs statuts respectifs en matière de sanctions disciplinaires ou professionnelles. Les autorités délibérantes ou exécutives locales ont en effet la faculté statutaire d'assortir les réglementations qu'elles édictent de sanctions administratives ; en outre, le droit du travail constitue une compétence territoriale, seuls les principes généraux du droit du travail continuant à relever de la compétence de l'Etat pour la Polynésie française.

Le paragraphe II fournit pour la Nouvelle-Calédonie une grille de lecture de l'article 13 du projet de loi énumérant les infractions exclues du champ de l'amnistie : en effet, le droit du travail étant une compétence de la Nouvelle-Calédonie en vertu du 2° de l'article 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, les références au code du travail métropolitain sont inopérantes. Pour l'exclusion des délits de discrimination (2° de l'article 13), des délits de marchandage, de travail dissimulé ou d'entrave à l'inspection du travail (14° de l'article 13) et des infractions d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité physique d'autrui du fait de manquements commis par l'employeur (29° de l'article 13), les références au code du travail sont ainsi remplacées par des références aux dispositions de l'ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 modifiée relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et du tribunal du travail en Nouvelle-Calédonie.

Hormis les références susvisées à des infractions prévues par le code du travail, le 13° de l'article 13 du projet de loi se réfère à l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, inapplicable en Nouvelle-Calédonie. Le paragraphe II de l'article 21 propose donc de lui substituer la référence aux dispositions d'un décret du 13 juillet 1937 portant réglementation de l'admission des étrangers en Nouvelle-Calédonie. Notons cependant que ce décret a récemment été abrogé par l'article 62 de l'ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie qui n'entrera en vigueur que le 1 er janvier 2003.

Le paragraphe III procède aux mêmes adaptations de références pour la Polynésie française : sont substituées aux références au code du travail des références à la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 modifiée relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, et les références à l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée sont remplacées par des références à un décret du 27 avril 1939 relatif à l'admission et au séjour des étrangers en Polynésie française et à l'ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française.

Le paragraphe IV remplace pour le territoire des Iles Wallis-et-Futuna la référence à l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée par la double référence au décret du 13 juillet 1937 susvisé et à l'ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans les Iles Wallis-et-Futuna.

Le paragraphe V de l'article 21 reprend une formule traditionnelle des lois d'amnistie pour tenir compte du fait que la loi du 4 janvier 1993, qui a supprimé les frais de justice pénale, n'est pas applicable aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

Sur cet article, votre commission des Lois vous soumet deux amendements tendant à compléter la grille de lecture pour tenir compte de modifications introduites par l'Assemblée nationale à l'article 13.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 21 ainsi modifié.

Article 22
Prorogation de conventions et autorisations
relatives au transport public routier de personnes
dans les départements de Guadeloupe, Martinique et Guyane

Le présent article a pour objet de combler un vide juridique créé par la caducité de l'ordonnance n° 2002-327 du 7 mars 2002 portant adaptation de la législation relative aux transports intérieurs dans les départements de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique et création d'agences des transports publics de personnes dans ces départements. Cette caducité résulte de l'absence de dépôt d'un projet de loi de ratification dans le délai imparti, soit avant le 30 juin 2002 2 ( * ) , le Gouvernement préférant remettre à l'étude la question de l'organisation des transports publics routiers de personnes dans lesdits départements.

Outre la création d'un établissement public auquel seraient déléguées les compétences de la région, du département et des communes en matière de transport public de personnes, l'ordonnance susvisée, en son article 13, prévoyait une prorogation des autorisations ou concessions d'exploitation des lignes de transport pendant une période maximale de quatre ans à compter du terme du délai fixé par l'article 19 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer, soit à compter du 13 juin 2002. Le vide juridique créé à compter de cette date par la caducité de l'ordonnance précitée nécessitait qu'une disposition législative soit prise en urgence et explique que le support choisi soit la loi d'amnistie en dépit du défaut de lien avec le coeur du projet de loi.

Reprenant le délai de quatre ans prescrit par l'ordonnance pour réorganiser le secteur des transports publics routiers de personnes en Guadeloupe, Martinique et Guyane, l'article 22 du projet de loi modifie l'article 19 de la loi d'orientation pour l'outre-mer susvisée et proroge la validité des autorisations et concessions jusqu'au 1 er juin 2006. Afin de combler complètement le vide juridique créé par la caducité de l'ordonnance, l'article 22 prévoit en outre une prise d'effet rétroactive au 13 juin 2002.

Si cet article 22 peut paraître, en première lecture, étranger à l'objet du projet de loi qui est l'amnistie, il n'est pas dépourvu de tout lien avec lui dans la mesure où la prolongation de la validité des autorisations et concessions vise à prévenir tout risque pénal ou de gestion de fait.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 22 sans modification .

*

* *

Au bénéfice de l'ensemble de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission des Lois vous propose d'adopter le présent projet de loi.

ANNEXE

ÉTUDE D'IMPACT

_____

Projet de loi portant amnistie

Etude d'impact

I. IMPACT JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF

1. Présentation et plan de la loi

Sur la forme, la présentation de la loi est, par rapport à la loi d'amnistie du 3 août 1995, simplifiée et rendue plus cohérente, afin qu'elle soit véritablement accessible aux justiciables : toutes les précédentes lois d'amnistie sont en effet critiquées pour leur extraordinaire technicité.

Le plan général est légèrement modifié, le chapitre sur les exclusions de l'amnistie venant, logiquement, avant celui sur les effets de l'amnistie (les précisions contenues dans ce dernier chapitre étant en effet pour partie la conséquence du domaine de l'amnistie qui a été retenu, et donc des exclusions).

Le chapitre Ier sur l'amnistie de droit est introduit par un article 1 er qui, d'une part, fixe la date d'effet de l'amnistie (ce qui évite de la répéter dans quasiment chacun des articles qui suivent), annonce la distinction entre l'amnistie par nature et l'amnistie au quantum, et rappelle l'existence d'exclusions à l'amnistie en renvoyant à l'article fixant la liste de ces exclusions, ce qui permet une lecture plus aisée. Cet article précise également que l'amnistie bénéficie aux personnes physiques et aux personnes morales.

Les dispositions figurant habituellement dans la section sur l'amnistie par nature ont été regroupées en deux articles, le premier (art. 2) fixant la liste des infractions amnistiées en raison de leur nature même, le second (art. 3) fixe la liste des infractions amnistiées en raison des circonstances de leur commission. Ce second article est logiquement complété par un alinéa indiquant que ces circonstances doivent être constatées par le parquet et par un alinéa relatif à l'amnistie en cas de condamnation unique pour des infractions multiples, dispositions traditionnelles qui ne concernent que les hypothèses de l'amnistie par nature dont elles précisent les conditions d'application, mais qui se trouvaient pourtant, dans les lois d'amnisties précédentes, dans un autre chapitre.

Les dispositions figurant dans la section sur l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine prononcée sont présentées de façon plus concise et plus logique, en distinguant les peines d'amende ou de jour-amende (art. 4), les autres peines et les dispenses de peines (art. 5 et 6).

Les chapitres II et III sur l'amnistie par mesure individuelle et l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles conservent leur structure traditionnelle.

Le chapitre IV sur les exclusions de l'amnistie - qui était auparavant le dernier chapitre de la loi - comporte un unique article (art. 13) fixant la liste des exclusions. D'une manière générale, la dénomination simplifiée des infractions faisant l'objet d'une exclusion est toujours mentionnée (alors que dans de nombreux cas la loi de 1995 se bornait à renvoyer aux articles de répression). Les visas des articles ont parfois été complétés pour tenir compte de la codification ou de la recodification du code de l'environnement et du code de la santé publique.

Enfin, la présentation de certaines infractions de la liste a été modifiée mais décrit le même champ d'infractions que la liste de la loi d'amnistie de 1995. Ainsi, la terminologie employée pour mentionner les délits énoncés à l'article 13-14° a été précisée pour mieux correspondre aux intitulés du code du travail. Les délits en matière de patrimoine visés par l'article 13-20° ne comportent plus les délits prévus par les articles 21 et 22 de la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque qui ont été codifiés aux articles L. 341-1 à L. 341-22 du code de l'environnement et sont à ce titre désormais visés par l'article 13-21° qui exclut de l'amnistie tous les délits du code de l'environnement.

Les dispositions du chapitre V sur les effets de l'amnistie - ex chapitre IV - sont présentées de façon plus concise et plus cohérente. Les dispositions « pérennes » propres à toutes les lois d'amnistie et figurant désormais dans les articles 133-9 à 133-11 du code pénal ne sont pas reproduites, comme le faisait inutilement la loi de 1995, mais il y est simplement renvoyé (art. 14). Il est de même renvoyé aux articles 6 et 769 du code de procédure pénale prévoyant l'extinction de l'action publique du fait de l'amnistie et la suppression du casier judiciaire des condamnations amnistiées, dispositions évidemment essentielles, que, pourtant, ne reprenait ni ne citait la loi de 1995.

2. Champ d'application et effets de la loi

Sur le fond, le projet reprend les dispositions de la loi de 1995, sous les principales réserves suivantes :

Si l'amnistie au quantum en matière de peine d'emprisonnement - ferme ou avec SME (art. 5) est identique à celle de 1995 (seuil de 3 mois), le seuil est de 6 mois pour les peines avec sursis simple, au lieu de 9 mois.

Pour les peines d'amende ou de jour amende, le seuil de 5.000 F à partir duquel l'amnistie est subordonnée au paiement de l'amende devient 750 euros, ce qui correspond à la conversion intervenue en janvier 2002.

L'amnistie de la peine de travail d'intérêt général étant, comme en 1995, subordonnée à l'exécution du travail, cette condition est également prévue, par cohérence, pour toutes les peines de sursis-TIG de moins de 6 mois, et pas uniquement pour celles de plus de 3 mois, comme c'était le cas en 1995.

Les tableaux joints en annexe I et II permettent de comparer, dans les quatre lois d'amnistie les plus récentes, les dispositions prévues en ce qui concerne d'une part les seuils choisis pour l'amnistie au quantum et d'autre part, la nature des infractions et les circonstances de leur commission que ces lois retiennent pour l'amnistie par nature d'infraction.

La liste des exclusions (art. 13) reprend celle de la loi d'amnistie du 3 août 1995 avec de nombreux ajouts qui sont énumérés dans l'annexe III. Un tableau joint en annexe IV récapitule l'évolution de la liste des exclusions dans les quatre dernières lois d'amnistie.

S'agissant du chapitre relatif aux effets de l'amnistie (chapitre V), contrairement à la loi du 3 août 1995, il n'est pas nécessaire de prévoir que l'amnistie est sans effet sur la réduction de points affectant le permis de conduire, puisque toutes les infractions du code de la route susceptible d'entraîner un retrait de points sont exclus de l'amnistie (art. 16).

Il est enfin précisé (art. 17) que l'amnistie n'oblige pas à supprimer les mentions figurant dans les fichiers de police judiciaire, dans la mesure où ces mentions ne portent que sur des faits constatés, et non sur des condamnations, et où l'amnistie efface les condamnations et non les faits eux-mêmes.

3. Impact juridique du projet de loi

L'impact de l'amnistie sur les condamnations prononcées peut être estimé à partir de l'examen de l'impact qu'aurait la loi sur les condamnations prononcées en 2000 inscrites au casier judiciaire.

504.900 des 575.837 peines prononcées en matière délictuelle et de contraventions de cinquième classe (les contraventions des quatre premières classes ne faisant pas l'objet d'une inscription systématique au casier judiciaire, ne peuvent être prises en compte), soit 88 %, entrent dans le champ de la loi d'amnistie au titre du quantum de peine fixé par le projet de loi avant prise en compte des exclusions.

Le total des exclusions prévu par l'article 13 représente 287.000 des peines entrant initialement dans le champ de l'amnistie.

Ce sont donc 217.900 peines qui bénéficieraient de l'amnistie, soit près de 38 % des personnes condamnées en 2000 qui pourront bénéficier de la prochaine loi d'amnistie.

Cette estimation n'est qu'une indication sur les conséquences de la loi. En effet, il est pratiquement impossible de mesurer avec certitude et précision tous les effets de la loi d'amnistie et cela pour plusieurs raisons :

- les condamnations amnistiées en raison des circonstances de la commission des faits ne peuvent être comptabilisées à partir du casier judiciaire puisque ces circonstances relèvent d'appréciation de faits et non de catégories juridiques.

- l'amnistie s'applique aux faits commis antérieurement au 17 mai 2002. Or de nombreuses procédures, mais qu'il est impossible de quantifier, portant sur des faits amnistiés en raison de la nature de l'infraction, des circonstances de sa commission ou des peines encourus sont en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi. Si la juridiction de jugement n'a pas été saisie, ces procédures font l'objet, selon les cas, d'un classement sans suite par le parquet ou d'un non-lieu par le juge d'instruction sans, de ce fait, faire l'objet d'une inscription et d'une comptabilisation au casier judiciaire.

- s'agissant des amnisties au quantum, il est impossible de faire la distinction, essentielle du point de vue de l'action publique, entre les condamnations qui sont amnistiées avant d'avoir commencé à être exécutées et celles qui le sont après qu'une partie ou la totalité de la peine ait reçu exécution (hormis les peines pour lesquelles l'amnistie est subordonnée à l'exécution de la condamnation, comme les peines d'amendes supérieures à 750 euros ou les peines de travail d'intérêt général). En effet, les délais d'exécution de la peine sont variables selon les tribunaux de sorte qu'à la date d'entrée en vigueur de la loi, la proportion des condamnations amnistiées déjà exécutées par rapport aux condamnations en attente d'exécution est également variable.

II. IMPACT SOCIAL, ÉCONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE

1. Impact social et économique

La loi d'amnistie efface, par application de l'amnistie en raison des circonstances de la commission des infractions prévue par l'article 3 du projet de loi, les sanctions judiciaires ou disciplinaires résultant de la plupart des conflits économiques et sociaux. Elle contribue pour cette raison à l'apaisement des relations sociales.

Par ailleurs, l'amnistie a pour effet, en mettant fin ou en empêchant la mise à exécution des peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois, de diminuer le nombre de personnes incarcérées ou susceptibles de l'être, ce qui a une incidence sur les taux d'occupation des maisons d'arrêt dans lesquels s'exécutent les courtes peines.

De la même façon l'amnistie sans condition d'exécution des peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois assortis d'un sursis mise à l'épreuve, allège temporairement, la charge de travail des services pénitentiaires d'insertion et de probation.

2. Impact budgétaire

La loi d'amnistie a un effet budgétaire positif mais non précisément quantifiable en ce qu'elle allège pour partie les coûts de prise en charge de personnes détenues ou suivies par les SPIP.

La loi d'amnistie a un effet négatif du point de vue des finances publiques puisque le produit du recouvrement des amendes est diminué des amendes amnistiées.

Cet effet peut être estimé à la lumière des effets enregistrés lors de l'application de la loi d'amnistie du 3 août 1995.

Ainsi, le produit du recouvrement des amendes, constaté dans l'exécution du budget de l'Etat, est passé de 475 millions d'euros pour l'année 1994 à 267 millions d'euros pour l'année 1995 et à 416 millions d'euros pour l'année 1996. En effet, l'effacement des condamnations a une peine d'amende a un impact non seulement sur le recouvrement des amendes l'année de l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie, mais également l'année suivante en raison de la diminution du stock des amendes en attente de recouvrement.

Au total la diminution de recettes de l'Etat consécutive à l'amnistie des peines d'amende prévue par la loi du 3 août 1995 peut donc être estimée à 267 millions d'euros (208 millions en 1995 et 59 millions en 1996).

Les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estiment que l'effet budgétaire du projet de loi d'amnistie devrait être de l'ordre de 300 millions d'euros. En effet, le nombre des condamnations à des peines d'amendes transmises au service du trésor pour être mises en recouvrement sont en augmentation régulière depuis plusieurs années. Aussi, malgré l'augmentation du nombre des infractions exclues de l'amnistie, cette dernière portera sur un plus grand nombre de condamnations.

TABLEAU COMPARATIF
ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

I.

* 1 L'article 6 du projet de loi prévoit cependant une exception à l'exclusion de l'amnistie des mesures prononcées en application de l'ordonnance de 1945.

* 2 En vertu de l'article 4 de la loi d'habilitation n° 2001-503 du 12 juin 2001, les projets de loi de ratification devaient être déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du douzième mois commençant après la promulgation de cette loi.

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