Art. 50 quinquies A (nouveau)
(art. 222-33-1 nouveau du code pénal)
Sanctions pénales applicables au harcèlement moral

Objet : Cet article prévoit l'introduction d'une nouvelle sanction pénale en cas de harcèlement moral.

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative de la commission des affaires culturelles et avec l'avis favorable du Gouvernement, crée une sanction pénale spécifique au harcèlement moral.

Votre commission observe à ce propos que l'Assemblée nationale est si favorable aux sanctions pénales qu'elle n'a pas hésité à en voter deux, quelque peu contradictoires, sur ce même thème.

La première, au présent article, prévoit un an d'emprisonnement et 100.000 francs d'amende.

La seconde, à l'article 50 duodecies A, prévoit, elle, deux ans d'emprisonnement et 500.000 francs d'amende.

Plus sérieusement -et sur le fond- votre commission ne peut accepter l'introduction, une fois encore, d'une nouvelle sanction pénale. Elle apparaît d'ailleurs bien inutile car le nouveau code pénal prévoit déjà des incriminations qui peuvent être efficacement retenues en cas de harcèlement moral, comme celles relatives à l'intégrité physique ou psychique de la personne, celles qui traitent de la mise en danger d'autrui ou celles qui concernent les atteintes à la dignité de la personne.

Elle regrette que le Gouvernement initialement très réservé sur ce point, ait finalement cédé à la pression de sa majorité plurielle.

Ainsi, le 11 avril dernier, Mme Elisabeth Guigou déclarait devant le Conseil économique et social :

« Nous sommes en France très attachés à l'aspect symbolique de la sanction pénale, qui représente pour les victimes la reconnaissance de leur préjudice. Je ne méconnais pas bien sûr cet aspect des choses. Mais il existe déjà dans le code pénal des incriminations qui peuvent être utilisées dans ces situations. Le nouveau code pénal a, en 1994, introduit la notion d'atteinte à la dignité. Il nous faut cependant vérifier que ces dispositions sont suffisantes. Sur ce point, le débat va se poursuivre au Parlement. »

Le 2 mai, devant le Sénat, lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture, elle réaffirmait une certaine réticence :

« Plusieurs d'entre vous proposent d'instaurer une sanction pénale. Je connais bien ce débat, qui se pose dans beaucoup de domaines. Chaque fois que l'on crée une nouvelle catégorie de droit, on se pose la question de la sanction et, naturellement, de la sanction pénale.

« Nous sommes très attachés, en France, à l'aspect symbolique de la sanction pénale. Je ne méconnais pas, bien sûr, cet aspect des choses. Il est important, mais je ne suis pas a priori convaincue de l'efficacité de la sanction pénale par comparaison avec des sanctions civiles bien imaginées, correctement proportionnées et bien utilisées par les demandeurs, d'autant qu'il existe déjà dans le code pénal des incriminations qui peuvent être utilisées et qui le sont, bien qu'encore rarement, dans ces situations.

« Sur cet important point des sanctions pénales, je souhaite écouter vos arguments et ceux de vos collègues de l'Assemblée nationale avant de prendre une position définitive. »

Et d'ajouter, en réponse à un amendement de Mme Marie-Madeleine Dieulangard et des membres du groupe socialiste :

« Madame Dieulangard, les incriminations pénales sont très nombreuses dans notre droit, puisque nous en comptons plusieurs milliers. Certes, en matière de harcèlement moral, quelques condamnations ont pu déjà être prononcées sur le fondement des textes existants, mais elles sont rares. Cependant, il convient de ne pas pénaliser à l'extrême les relations de travail, « pénaliser » et non pas « judiciariser » car, comme je l'ai dit dans mon propos liminaire tout à l'heure, des actions en dommages et intérêts peuvent être portées devant le juge civil, actions en réparation qui sont évidemment « judiciaires ». »

Votre commission ne peut que faire siennes ces observations.

En conséquence, elle vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

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