EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 28 novembre 1998, la commission des Affaires économiques a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Rodolphe Désiré sur les crédits consacrés à l'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 1999.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, soulignant la difficulté de faire la synthèse entre des situations politiques et économiques très diverses, a estimé qu'on pouvait faire un bilan en demi-teinte de la situation économique des départements d'outre-mer, qui avait été essentiellement " tirée " par la consommation et l'investissement des ménages, eux-mêmes favorisés par les hausses successives du SMIC.

Il a relevé qu'à l'exception du secteur de la distribution, les entreprises avaient observé un attentisme prudent, et que rien n'était venu modifier les causes structurelles de fragilité des différents secteurs économiques, si bien que le taux de chômage avait encore progressé pour s'établir en septembre 1997 à 26,1 % pour la Guadeloupe, 23 % pour la Guyane, 26,1 % pour la Martinique, et 42,8 % à la Réunion, contre 12,5 % en moyenne en France.

En ce qui concerne les territoires d'outre-mer et de Mayotte en 1997, il a fait valoir que les évolutions institutionnelles récentes ou en cours concernant la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française avaient contribué au rétablissement d'un certain climat d'optimisme chez les chefs d'entreprise, même si la situation de l'emploi restait très préoccupante.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a ensuite indiqué que le budget du Secrétariat d'Etat à l'outre-mer s'élevait à 5,6 milliards de francs pour les dépenses ordinaires et les crédits de paiement, en progression de 7 % par rapport à 1998, et que l'effort global de l'Etat en faveur de l'outre-mer s'élevait à 51,1 milliards de francs, soit 2,9 % de plus qu'en 1998.

Présentant les principales orientations du budget, il a indiqué que les aides à l'emploi et au logement social s'élevaient à 3,5 milliards de francs en 1999, soit 15 % de plus qu'en 1998, et représentaient près de 63 % de l'ensemble du budget de l'outre-mer.

S'agissant des aides à l'emploi, qui comportent des dispositifs de droit commun et des dispositifs spécifiques à l'outre-mer tels que le contrat d'accès à l'emploi, le contrat d'insertion par l'activité et les primes à la création d'emplois, la dotation du FEDOM en loi de finances initiale passe de 1,7 à 1,8 milliard de francs, en augmentation de 6,4 %, pour financer 56.500 solutions nouvelles d'insertion -contre 48.500 l'an passé- dont 34.000 contrats emploi solidarité, 15.000 contrats d'insertion par l'activité, 7.000 contrats d'accès à l'emploi, auxquelles s'ajouteraient 3.500 emplois-jeunes.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a déploré que l'augmentation des crédits aille essentiellement aux contrats emploi-solidarité et aux emplois-jeunes, au détriment de dispositifs favorisant l'insertion professionnelle des jeunes dans le secteur privé, tels que les contrats d'accès à l'emploi ainsi que les primes à la création d'emplois .

Il a ensuite indiqué que la créance de proratisation, représentant la participation de l'Etat aux actions d'insertion, représentait pour 1999 815 millions de francs, soit une progression de 3,2 % consécutive à l'évolution des dépenses d'allocation du RMI outre-mer.

Enfin, s'agissant du financement de l'ensemble des aides à la pierre pour le logement social dans les DOM, à Saint-Pierre et Miquelon et à Mayotte tant pour l'accession à la propriété que pour le logement locatif et l'amélioration de l'habitat, il a souligné que pour 1999, les crédits de paiement passaient de 568,5 à 897,4 millions de francs, en augmentation de 57,8 % pour permettre une accélération des programmes de logements aidés à travers le financement de 19.000 opérations supplémentaires, dont 11.800 constructions neuves liées notamment au prêt locatif intermédiaire, et 7.300 réhabilitations au titre de la résorption de l'habitat insalubre.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a jugé que cette très forte augmentation tentait de répondre à l'immensité des besoins recensés dans le logement outre-mer, mais qu'elle ne réglait pas l'existence de certains " goulets d'étranglement " constatés dans le passé, liés en particulier à la difficulté pour les collectivités territoriales d'acquérir des terrains et de les viabiliser.

Il a regretté que les interventions de l'Etat pour soutenir l'investissement s'inscrivent en diminution de 4,4 % pour être fixées à 760 millions de francs, tant en ce qui concerne le fonds d'investissement pour les départements d'outre-mer -section générale- qui finance la participation de l'Etat aux principales opérations inscrites aux contrats de plan Etat-région et à la convention de développement de Mayotte, que les crédits du Fonds d'investissement pour le développement économique et social -section générale- qui financent la part de l'Etat dans le contrat de développement économique et social de la Polynésie française et dans le contrat de plan et le contrat de développement de Wallis et Futuna.

Il a fait valoir l'effet de levier non négligeable joué par les investissements publics en matière d'équipement et de développement local pour les économies domiennes, qui restent très dépendantes de la commande publique, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Enfin, M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a reconnu qu'il était difficile d'évaluer l'impact de la révision de la loi Pons décidée par la loi de finances pour 1998, sur les flux d'investissements privés liés à la défiscalisation, les statistiques disponibles ne portant que sur 1997 ; mais il a craint que les restrictions votées l'an dernier ne se traduisent par une très nette diminution de ces investissements dès 1998.

Il a regretté à ce sujet que, depuis un an, aucune mesure de substitution n'ait été envisagée pour permettre de garantir outre-mer le maintien d'un flux d'investissements privés indispensable au développement économique, favorable à l'emploi et générateur de ressources fiscales pour les collectivités locales. Il a considéré qu'on ne pouvait plus faire l'économie d'une loi d'orientation et de développement économique pour l'outre-mer, projet annoncé par le Gouvernement lors du débat budgétaire, qui devait s'inscrire dans le contexte européen, compte tenu notamment de la mise en place de l'euro et de ses conséquences pour les économies domiennes.

Considérant que pour l'immédiat les crédits inscrits au budget de l'outre-mer répondaient aux besoins recensés, M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'outre-mer.

Dans la discussion générale qui a suivi, M. Jean François-Poncet, président, s'est inquiété de la progression des transferts sociaux vers l'outre-mer.

M. Louis Moinard est intervenu pour s'interroger sur les capacités de l'économie polynésienne à absorber une population jeune et qualifiée.

M. Jean Huchon, président, a regretté que le Gouvernement n'ait pas encore adopté les décrets d'application de la loi sur les 50 pas géométriques.

M. André Ferrand s'est déclaré en faveur du maintien de la présence française outre-mer, notamment dans l'océan Indien, mais a fait part de ses interrogations sur les solutions susceptibles de remédier à la faiblesse des investissements productifs, compte tenu de la faible compétitivité des économies domiennes vis-à-vis de leurs plus proches voisins.

Evoquant les conflits sociaux récents survenus dans le secteur touristique à la Martinique, il s'est inquiété de leurs retombées économiques négatives.

M. Léon Fatous a alors interrogé le rapporteur pour avis sur le nombre de fonctionnaires métropolitains en poste dans les départements d'outre-mer.

Répondant aux différents intervenants, M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a fait valoir que l'avenir des départements d'outre-mer devait s'inscrire dans le contexte des régions ultra-périphériques définies par la communauté européenne, afin de tenir compte des spécificités de leur économie et de leurs handicaps en termes tant d'éloignement que d'étroitesse de leur marché intérieur. Il a rappelé que la politique d'égalité sociale menée par les pouvoirs publics depuis 50 ans, n'était pas sans conséquences sur la compétitivité des économies domiennes,.

Il a jugé qu'on ne pouvait pas envisager un développement économique durable pour l'outre-mer sans définir un environnement fiscal spécifique favorable à l'investissement productif. Rappelant que les économies domiennes avaient été longtemps pénalisées par des taux de crédits bancaires sensiblement plus élevés que ceux pratiqués en métropole, il a souhaité que le prochain débat sur le projet de loi de développement économique de l'outre-mer, annoncé par le Gouvernement, soit l'occasion de définir des instruments fiables et pérennes sur le plan économique et réglementaire, voire institutionnel. S'agissant du nombre de fonctionnaires métropolitains en poste dans les départements d'outre-mer, il a rappelé que les statistiques ne permettaient plus de les comptabiliser de façon distincte, et a souligné la difficulté qu'il y avait à faire évoluer les modalités de rémunération des fonctionnaires dans les départements d'outre-mer.

La commission s'en est alors remise à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits de l'outre-mer pour 1999, les groupes socialiste et communiste, républicain et citoyen se déclarant en faveur de leur adoption.

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