4. Vers un renforcement de la coopération européenne

Si la protection civile relève en premier lieu de la compétence des Etats, conformément au principe de subsidiarité, l'Union européenne a été amenée à prendre des initiatives en la matière, en cohérence avec les besoins de coordination accrue exprimés lors de catastrophes naturelles ou technologiques récentes.

L'article 3 du traité instituant la Communauté européenne prévoit que l'action communautaire comporte des mesures dans le domaine de la protection civile.

a) Une collaboration spécifique en matière de lutte contre les feux de forêts

En matière de lutte contre les feux de forêts, les accords liant la France, à l'Italie et au Portugal, ainsi qu'à l'Espagne et à la Grèce 19 ( * ) (en cours de finalisation), également touchés par ces feux lors de la saison estivale, et des arrangements administratifs prévoient une coopération spécifique qui permet notamment à l'un de ses pays de bénéficier de renforts de bombardiers d'eau, en fonction de leurs disponibilités, en cas d'incendie.

Ce travail peut être facilité par l'expertise du centre commun de recherche, créé par le traité instituant la communauté européenne de l'énergie atomique EURATOM, qui, depuis 1999, a élaboré des cartes des zones brûlées à l'échelle européenne et a institué l'EFFIS, système d'information météorologique et cartographique par satellite qui a pour mission de fournir aux Etats membres des informations quotidiennes sur le risque feux de forêts et d'évaluer la situation après leur extinction.

b) L'instrument financier pour le financement des mesures de préparation et de réaction rapide aux urgences majeures

Un programme d'action communautaire en faveur de la protection civile communautaire a été institué par une décision 1999/847/CE du Conseil le 8 décembre 1999. Fondé sur des budgets spécifiques, il a été utilisé pour assurer un soutien communautaire aux actions menées en matière de préparation des crises et de réaction rapide. Pour faire suite à ce programme, la décision du Conseil CE /2007/162 du 5 mars 2007 a institué un instrument financier permettant d'améliorer la capacité des systèmes nationaux de protection civile et de conforter leur coopération (mesures de sensibilisation, formation et exercices...).

Le montant total des actions et mesures financées par cet instrument est fixé à 189,8 millions d'euros pour la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2013 .

c) Le mécanisme communautaire de protection civile et le projet FIRE

Un mécanisme communautaire tendant à favoriser une coopération renforcée dans le cadre des interventions relevant de la protection civile a été instauré par la décision 2001/792/CE Euratom du Conseil du 23 octobre 2001 afin de faciliter la solidarité communautaire lorsqu'un pays est victime d'une catastrophe industrielle ou technologique.

30 Etats 20 ( * ) participent à ce mécanisme en mettant leurs moyens disponibles à disposition à la demande d'un pays touché par une catastrophe, par l'intermédiaire du centre de suivi et d'information basé à Bruxelles (à la Commission) et en veille permanente , qui dispose d'une base de données contenant les moyens nationaux susceptibles d'être mobilisés et un système de communication commun.

En pratique, les Etats membres sont chargés de sélectionner les personnes pouvant être appelées à participer à une équipe d'évaluation ou de coordination et mobiliser leurs forces et moyens d'intervention dans un délai de douze heures à compter de la demande d'aide.

Le centre de suivi et de coordination reçoit les alertes et gère les demandes d'assistance. De là, en cas de crise :

- il centralise les informations sur les besoins d'un Etat membre demandeur et les moyens disponibles de ceux prêts à lui venir en aide. Plus généralement, sur son site internet (MIC daily) relié à plusieurs services d'alerte, il recense les catastrophes en devenir ou en cours dans le monde ;

- en cas de demande d'aide d'un Etat extérieur à l'Union européenne, la présidence de l'Union européenne coordonne les actions diplomatiques et politiques. Le centre doit informer les Etats membres sur les secours à fournir. Puis, il fait connaître les moyens de secours disponibles au pays demandant de l'aide, lequel choisit alors le type d'assistance dont il a besoin et se met en contact avec les pays qui la proposent ;

- il peut coordonner les moyens de secours en vue d'améliorer leur complémentarité et déployer des équipes d'experts.

Lors d'une intervention à l'étranger, en principe, les équipes de secours des Etats membres de l'Union européenne travaillent sous l'autorité de l'Etat demandeur.

Afin d'améliorer l'efficacité de cette coopération et de s'assurer de la compatibilité des matériels et équipements utilisés, un programme de formation et d'exercices est désormais proposé aux personnels concernés.

Le mécanisme communautaire a été sollicité à plusieurs reprises avec succès (par exemple, à la suite du raz-de-marée en Asie du sud-est début 2005).

M. Michel Barnier , aujourd'hui ministre de l'agriculture et ancien commissaire européen, chargé par la Commission européenne d'émettre des propositions sur la modernisation des mécanismes européens de protection civile ( Europe aid ), avait appelé l'an dernier à la création d'une force européenne de protection civile basée sur les principes suivants : intervention respectueuse des compétences nationales et locales à la demande des Etats membres ; spécialisation de ces derniers dans la gestion d'un ou plusieurs risques ; capacité de réponse reposant sur les moyens nationaux et des moyens additionnels ; création d'un centre opérationnel pour la planification et l'organisation d'exercices et d'un institut de formation commun pour la protection civile et l'action humanitaire.

Le Parlement européen s'est prononcé pour une modernisation du mécanisme communautaire de protection civile améliorant l'information des citoyens (système d'alerte), préconisant l'intégration des enjeux de santé publique, ainsi que la mobilisation des moyens militaires. Simultanément, il a appelé à la constitution d'une force de protection civile européenne le 17 novembre 2006.

Pour constituer une véritable capacité d'action collective en matière de protection civile, la France , a proposé à ses partenaires la création d'une force d'intervention rapide de protection civile (FIRE).

Cette initiative pourrait devenir effective, en cas d'accord, lors de la présidence française de l'Union européenne, qui débutera en juillet 2008.

Afin d'enrichir les capacités d'intervention de l'Union, la France propose que ce mécanisme renforcé de protection civile prenne notamment en charge :

- l'acquisition ou la location d'avions bombardiers d'eau polyvalents à prépositionner dans chacun des cinq pays du sud de l'Europe au profit de tous les Etats membres ;

- l'acquisition et la mise en oeuvre d'un hôpital de campagne projetable permettant de faire face à un afflux massif de blessés liés à une catastrophe naturelle, technologique, ou dans le cas d'un attentat majeur. Cet hôpital serait composé de plusieurs modules de 60 lits, avec équipement chirurgical et pourrait, en cas de nécessité, intervenir de façon autonome par module ou regroupé pour constituer un hôpital de 400 à 600 lits ;

- l'acquisition de pompes de grandes capacités (1.500 à 2.000 m 3 /h) permettant d'intervenir lors d'inondations importantes pour notamment assécher les zones inondées.

Les Etats membres bénéficiaires s'engageraient à assurer la prise en charge des frais d'équipages, de fonctionnement et de maintenance des matériels acquis qu'ils pourraient utiliser dans le cadre de leurs propres besoins opérationnels.

Sur décision de la Commission, ces équipements seraient mis à disposition de l'ensemble des Etats membres en cas de sinistre de grande ampleur ou de difficultés opérationnelles .

Ce dispositif européen de réaction rapide aux catastrophes se traduirait en pratique par la création d'une cellule de crise à Bruxelles , chargée d'analyser la situation et de déclencher l'intervention des secours, la mise en place d'une capacité de planification opérationnelle , ainsi que le renforcement de la coordination opérationnelle sur le terrain (désignation d'une nation pilote pour coordonner les moyens) et des moyens d'intervention de l'Union européenne.

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Votre rapporteur pour avis tient à saluer l'importance de l'entreprise de modernisation de la sécurité civile depuis 2002 et estime nécessaire de la poursuivre, en particulier pour diffuser en France une vraie culture de la sécurité civile, afin que celle-ci devienne effectivement « l'affaire de tous ».

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Ces observations ont conduit votre commission des Lois à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission sécurité civile inscrits au budget du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

* 19 Cet été, entre le 24 août et le 5 septembre, la France a ainsi envoyé 4 Canadair avec leurs équipages et un détachement composé de 27 sapeurs-pompiers territoriaux et de 33 personnels de la sécurité civile pour aider les secours locaux à éteindre les feux de forêts qui ont ravagé 269.000 hectares et tué 65 personnes.

* 20 Les 27 Etats de l'Union européenne, l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège.

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