TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 23 novembre 2005 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Dominique Leclerc sur le projet de loi de finances pour 2006 (mission « Régimes sociaux et de retraite »).

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis , a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent avis) et proposé un amendement visant à aménager le dispositif des majorations de pension outre-mer du régime spécial des fonctionnaires de l'Etat.

En vertu des décrets du 10 septembre 1952 et du 24 décembre 1954, les retraités, titulaires d'une pension civile ou militaire de l'Etat, résidant à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna bénéficient d'une majoration de pension variant entre 35 % et 75 %.

En avril 2003, la Cour des comptes avait procédé à une analyse très critique de ce dispositif et souligné le caractère « quasi impossible » de son contrôle, plaidant ainsi pour sa suppression pure et simple, d'autant que l'avantage moyen s'établit entre 10.000 et 15.000 euros par an, non imposables à la CSG et la CRDS.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis , a indiqué que sa démarche ne va pas jusqu'à cette extrémité, mais s'inscrit dans l'esprit de la réforme des retraites de 2003 et ne traduit aucune animosité vis-à-vis de l'outre-mer.

Cet amendement reprend une initiative similaire de la commission des finances en 2003, puis du président Nicolas About lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, et il fait suite à l'audition de Mme Brigitte Girardin, alors ministre de l'outre-mer, organisée le 6 avril 2005 conjointement avec la commission des finances.

Il propose de modifier les conditions d'attribution, pour les seuls nouveaux bénéficiaires à compter du 1 er janvier 2006, en n'accordant de majoration de retraite qu'aux fonctionnaires ayant passé dans ces territoires les cinq dernières années de leur carrière et en plafonnant cet avantage à 20 % de la pension, conformément aux travaux de l'Insee qui ont estimé ce montant à l'écart du coût de la vie avec la métropole. L'objectif est d'éviter que certains métropolitains ne profitent de l'absence de contrôle en bénéficiant d'une pension majorée sans pour autant résider réellement outre-mer.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis , a souhaité que les économies ainsi réalisées permettent de dégager des moyens nouveaux pour satisfaire les besoins sociaux de l'outre-mer.

Après avoir rappelé que cette question a déjà été abordée à plusieurs reprises au cours des dernières années dans les débats parlementaires, Mme Anne-Marie Payet a indiqué qu'elle n'est pas favorable à cet amendement : une telle réforme ne peut avoir lieu « sur le dos de l'outre-mer ». Si les élus des territoires ultramarins ne sont pas opposés par principe à une remise à plat de ces dispositions, il convient de l'entreprendre en concertation avec tous les acteurs et d'y associer les organisations syndicales, les parlementaires et l'Etat. Il faut également tenir compte de la grande fragilité du tissu économique de ces territoires et analyser au préalable l'impact potentiel d'une telle réforme, ce qui nécessite une évaluation précise du niveau général des prix outre-mer, qui fait encore défaut. On ne dispose en effet que d'indications partielles, comme celles de l'association Union fédérale des consommateurs - Que choisir, faisant état d'un écart de prix de 53 % avec la métropole, et même de 70 % pour des produits courants comme le dentifrice.

Elle a suggéré à la commission, plutôt que d'adopter cet amendement, de se prononcer en faveur de la mise en place d'un observatoire des prix. Elle a également proposé, d'une part, d'étendre aux autres territoires les règles d'assujettissement à la CSG et à la CRDS en vigueur à la Réunion, d'autre part, d'intensifier les contrôles pour éviter que des métropolitains ne bénéficient de la mesure en se prévalant d'une adresse outre-mer, mais sans remplir la condition de résidence effective.

Elle a souhaité qu'une mission parlementaire fasse d'abord le point, en toute objectivité, sur les questions posées par cet amendement plutôt que de se lancer dans une démarche qui est de nature à susciter des débats passionnés.

M. Nicolas About, président , a rappelé qu'il a déposé, sans succès, l'an dernier un amendement similaire à celui proposé par le rapporteur et que son sort aurait peut-être été plus favorable s'il avait choisi de plafonner cet avantage à 35 %, c'est-à-dire le taux applicable notamment à la Réunion.

M. Guy Fischer a indiqué que l'exposé du rapporteur illustre sa volonté d'aborder de front le dossier de l'avenir des régimes spéciaux. Il a vivement contesté que l'on puisse utiliser le mot de « privilèges » pour qualifier les spécificités de ces systèmes de retraite, qui correspondent, pour ces assurés sociaux, à un acquis social qui doit être garanti. Gardant le souvenir de l'audition de Mme Brigitte Girardin, il a retrouvé la même détermination pour ce qui concerne la question des majorations de retraites outre-mer et a considéré que la question des inégalités de traitement au titre de l'assurance vieillesse mérite que soit engagé un débat sérieux et approfondi.

Il a pris acte de la position du rapporteur consistant à proposer de fermer aux nouveaux entrants l'accès aux régimes spéciaux et indiqué qu'il sera particulièrement vigilant sur ce dossier. Il s'est inquiété du risque d'une remise en cause des acquis sociaux, mais aussi de la perspective de voir baisser le taux de remplacement des pensions, augmenter les taux de cotisation et allonger la durée de cotisation.

M. Claude Domeizel a souligné que le financement des différents régimes spéciaux est assuré non seulement par le biais de subventions de l'Etat, mais aussi grâce aux mécanismes de compensation démographique et de surcompensation, qui ne sont pas retracés dans les documents budgétaires. Il a réservé son opinion sur l'amendement relatif aux pensions outre-mer pour la séance publique, tout en rappelant que les fonctionnaires locaux des territoires ultramarins, dont plus de 80 % sont des contractuels, se trouvent dans une situation souvent défavorable.

Mme Catherine Procaccia s'est inquiétée des perspectives financières des régimes spéciaux et de l'iniquité que constitue leur absence de réforme, au regard de tous les autres assurés sociaux. Elle a apporté son soutien à l'amendement proposé par le rapporteur, tout en considérant que les mesures préconisées par Mme Anne-Marie Payet peuvent être mises en oeuvre parallèlement. Elle a noté au surplus que le mécanisme actuel des majorations de pension fait apparaître de grandes différences entre les territoires pour des raisons sans doute historiques, mais non explicites.

En conclusion, M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis , a considéré que le taux de remplacement, c'est-à-dire la part du dernier salaire d'activité à laquelle équivaut la pension de retraite, sera le paramètre essentiel des prochaines étapes de la réforme des retraites. Il a rappelé les difficultés rencontrées par la commission pour obtenir des estimations du niveau des engagements à long terme des régimes spéciaux et estimé qu'il serait en conséquence très utile de leur donner une valeur d'indicateur de référence dans la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Il a estimé, enfin, que la rédaction équilibrée de son amendement constitue une solution raisonnable pour régler le problème des majorations de pension outre-mer, qui fait l'objet de vives critiques de la Cour des comptes.

La commission a ensuite adopté l'amendement proposé par son rapporteur.

Enfin, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » pour 2006 .

M. Nicolas About, président , a pris acte de ce vote et a invité Mme Anne-Marie Payet à présenter également ses propres propositions sous la forme d'amendements.

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