AUDITION DE M. PHILIPPE DOUSTE-BLAZY, MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES,
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
LE 15 NOVEMBRE 2005

La commission a procédé à l'audition de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a tout d'abord rappelé le contexte dans lequel s'inscrit le projet de loi de finances pour 2006 avec la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, la modernisation de l'outil diplomatique et la poursuite des objectifs assignés par le Président de la République et le Gouvernement.

Le ministre des affaires étrangères a rappelé l'architecture des deux missions : « Action extérieure de l'Etat » et « Aide publique au développement », au sein desquelles figurent les crédits gérés par le ministère des affaires étrangères. Il a souligné que ces deux missions n'englobaient cependant pas la totalité des crédits engagés par l'action extérieure de la France, à laquelle concourent quelque 27 programmes. Il a considéré qu'une vision complète des moyens engagés par l'Etat, offerte désormais par les documents de politique transversale, était fondamentale.

Il a ensuite appelé l'attention de la commission sur le caractère délicat de la gestion 2006, estimant que des difficultés demeureraient dans la gestion quotidienne des postes.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a souligné la modernisation entreprise par le ministère et sa contribution à l'effort de maîtrise des finances publiques. La mission « Action extérieure de l'Etat » est ainsi stabilisée en volume, à hauteur de 2,36 milliards d'euros de crédits de paiement, mais la masse salariale et les effectifs diminuent. Le ministre a rappelé que le ministère avait réduit ses effectifs de 11 % en dix ans, en respectant scrupuleusement la règle du non-remplacement de la moitié des départs en retraite. Estimant que les effectifs devaient désormais être stabilisés, il a considéré que de nouvelles baisses mettraient en cause l'efficacité des politiques menées. Il a souligné que les moyens alloués au fonctionnement s'inscrivaient une nouvelle fois en baisse, le coût de structure du Quai d'Orsay étant revenu de 33 à 25 % du budget en six ans. Les efforts portent également sur la gestion de l'immobilier et l'aménagement du réseau consulaire et culturel. Il a par ailleurs précisé que le ministère avait décidé d'accroître ses investissements dans les systèmes de communication et d'information, dans le cadre d'une réflexion globale sur l'informatisation. Un contrat de modernisation est en cours de négociation avec le ministère du budget, afin que le ministère des affaires étrangères puisse bénéficier du produit d'une partie des gains de productivité qu'il réalise.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a ensuite détaillé les différents programmes confiés au ministère des affaires étrangères.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » comporte 1.420 million d'euros de crédits de paiement. Il couvre une large partie de l'action diplomatique de l'Etat et comprend l'essentiel des moyens dévolus aux ambassades, les contributions internationales obligatoires et les crédits de la coopération militaire et de défense. Evoquant les opérations de maintien de la paix, il a signalé que leur financement était un des principaux enjeux de ce programme et que les crédits qui y sont consacrés devraient être réévalués dans le cadre de la discussion sur le futur contrat de modernisation.

Le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » représente 603 millions d'euros de crédits de paiement, consacrés à l'animation du réseau consulaire français, à l'enseignement français à l'étranger et au traitement des demandes d'asile et la protection des réfugiés. Cet ensemble de services publics fait l'objet d'une modernisation substantielle avec le redéploiement du réseau consulaire en Europe et la modernisation des procédures. Le ministre des affaires étrangères a indiqué que la subvention de fonctionnement de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger marquait une pause, dans le projet de loi de finances pour 2006, qui nécessiterait un recours exceptionnel au fonds de roulement de l'établissement. Il s'est déclaré attentif au fait que l'Agence puisse accomplir ses missions dans des conditions satisfaisantes et s'est engagé à ce que le transfert des compétences immobilières soit effectué de façon à lui permettre de financer ses dépenses prioritaires. Il a précisé que les crédits nécessaires au développement des visas biométriques seraient apportés par les recettes provenant des frais de dossier payés par les demandeurs, dont la part qui revient au ministère des affaires étrangères fait l'objet de discussions dans le cadre du contrat de modernisation. Au niveau européen, la France négocie l'augmentation des frais de dossier, pour les porter de 35 à 60 euros.

Le programme « Rayonnement culturel et scientifique », qui comprend 334 millions d'euros de crédits de paiement, ne concerne que les pays développés. Il vise à promouvoir l'attractivité de la France pour les étudiants et chercheurs, la promotion des idées françaises, la diffusion de la création culturelle contemporaine et la promotion de la langue française. Les moyens mobilisés dépassent les dotations budgétaires grâce aux partenariats et aux cofinancements. Le ministre des affaires étrangères a précisé que les centres d'études en France, actuellement en place dans six pays, seraient développés. Il a indiqué que les subventions aux opérateurs audiovisuels étaient reconduites en dépit des contraintes budgétaires, et que la chaîne d'information internationale était rattachée à la mission « Médias », sous l'égide du Premier ministre. Il a précisé qu'une réflexion était actuellement menée sur la lisibilité et la visibilité de l'action culturelle française et qu'une organisation nouvelle serait mise en place dans l'année à venir.

M. Philippe Douste-Blazy, évoquant enfin les crédits du programme « Solidarité à l'égard des pays en développement », doté de 2 milliards d'euros, a rappelé que l'aide française demeurait concentrée sur la zone de solidarité prioritaire, qui continuerait de recevoir deux tiers de l'aide bilatérale. Les crédits de ce programme progressent de 9,8 %, traduisant les engagements pris par le Président de la République en faveur de l'augmentation de l'aide française. Il a précisé que l'augmentation des crédits était concentrée sur les organismes multilatéraux, mais qu'une réflexion serait engagée sur la visibilité de l'action française dans ce cadre, singulièrement à l'échelon communautaire. Pour ce qui concerne l'aide bilatérale, le ministre a souligné l'augmentation des crédits d'engagement en faveur de l'aide-projet, ainsi que l'augmentation des crédits mis en oeuvre par les opérateurs de la société civile, ONG et collectivités territoriales.

Le ministre des affaires étrangères a ensuite abordé les amendements votés par les commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale.

Il a estimé que l'imputation budgétaire des crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger pouvait effectivement être discutée, mais que sa mission première restait l'enseignement délivré aux enfants français et qu'il soutiendrait en conséquence le maintien de l'imputation budgétaire proposée par le gouvernement.

Evoquant la demande de suppression, formulée par la commission des finances du Sénat, des crédits du portail Internet « Idées de France », au profit de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) et du programme « Personnalités d'avenir », M. Philippe Douste-Blazy a considéré qu'il serait regrettable de supprimer une activité en plein démarrage, pour laquelle Canal France International a déjà recruté une quinzaine de personnes. Il a reconnu que le programme « Personnalités d'avenir » avait permis d'accueillir, pour un coût très faible, des personnalités importantes et qu'il s'agissait effectivement d'un outil important pour notre influence. Pour ce qui concerne l'AEFE, il a rappelé qu'elle avait dégagé des excédents d'exploitation ces dernières années et a déclaré partager le souci de son développement. Le ministère contribue encore en 2006 au programme de construction et d'entretien de l'Agence pour un montant de 11,3 millions d'euros.

M. Philippe Douste-Blazy a par ailleurs indiqué que le vice-président du groupe d'études sur les Français à l'étranger de l'Assemblée nationale avait proposé un amendement visant à octroyer une indemnité annuelle de 18.000 euros à chacun des 155 conseillers élus de l'Assemblée des Français de l'étranger. Tout en se déclarant favorable au principe d'une telle indemnité, le ministre a souhaité qu'elle puisse être financée autrement que par un prélèvement sur les crédits de fonctionnement du ministère.

Le ministre des affaires étrangères a enfin considéré comme un amendement « d'interpellation » du gouvernement la proposition de la commission des finances du Sénat d'annuler 75 millions d'euros sur les crédits de l'audiovisuel public, afin d'améliorer la couverture du coût des opérations de maintien de la paix. Il a confirmé sa détermination à obtenir le rebasage des contributions internationales pour le budget 2007, en souhaitant que la subvention à Radio France Internationale ne soit pas supprimée. Il a considéré, en conclusion, que le projet de loi de finances était ambitieux et s'est déclaré attaché à ce que les postes à l'étranger dégagent des synergies en rassemblant l'ensemble des moyens de l'Etat.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite évoqué cinq dossiers d'actualité internationale.

Evoquant l'application de la résolution 1636 du Conseil de sécurité, le ministre des affaires étrangères a observé qu'en dépit des allégations de la Syrie sur sa volonté de coopération, ce pays n'avait pas donné suite, pour l'heure, aux demandes d'auditions adressées par le juge Mehlis. Il a considéré que l'heure n'était plus aux tergiversations pour la Syrie mais à une coopération totale, sans délai et sans condition, à peine de sanctions individuelles dans le cadre des dispositions prévues par la résolution adoptée par le Conseil de sécurité.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite abordé les questions européennes, réitérant les interrogations du Gouvernement quant au respect du mandat donné à la Commission par les Etats membres sur la dernière offre agricole présentée dans le cadre des négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce. La France attend toujours des avancées de la part des autres grands acteurs de l'OMC, tant sur le volet agricole que dans les autres domaines, pour parvenir à un résultat équilibré. Le ministre a considéré que l'issue des négociations était essentielle au développement des pays les plus pauvres, et pas uniquement à celui des grands pays émergents qui, pour leur part, disposent d'un fort potentiel d'exportations agricoles. La France souhaite un accord à Hong Kong, mais elle n'acceptera pas un accord qui remettrait en cause la réforme de la Politique Agricole Commune adoptée en 2003 par le Conseil, y compris par les Britanniques.

Le dernier conseil « Affaires générales » a permis que s'amorce la toute première discussion à 25, sous présidence britannique, sur le dossier des perspectives financières, et ce, à un mois du Conseil européen de décembre. La présidence britannique a confirmé l'objectif d'un accord, mais rien ne laisse penser qu'elle soit disposée aux nécessaires concessions refusées par le Royaume-Uni en juin. La seule base sérieuse de discussion pour la reprise de négociations en vue d'un accord rapide est constituée des propositions de la présidence luxembourgeoise de juin 2005.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite évoqué la situation en Côte d'Ivoire. La résolution 1633 du Conseil de sécurité du 22 octobre 2005 a confirmé les décisions prises par l'Union africaine au début du mois d'octobre : report d'un an des élections présidentielles, qui devront avoir lieu au plus tard le 31 octobre 2006, maintien du président Gbagbo comme chef de l'Etat et mise en place d'un nouveau Premier ministre, acceptable pour tous, chargé de préparer les élections, de procéder au désarmement des rebelles, au démantèlement des milices et au retour de l'administration sur l'ensemble du territoire. L'échéance du 30 octobre n'a pas provoqué les troubles redoutés. Le président de l'Union africaine, M. Olusegun Obasanjo s'est rendu à Abidjan pour consulter les responsables ivoiriens sur le choix du premier ministre et s'est engagé à ce que cette nomination intervienne d'ici à la mi-novembre. La nomination du Premier ministre devrait intervenir rapidement, afin de passer à la mise en oeuvre effective des engagements pris. Le ministre a déclaré que la France continuerait, avec la même détermination, à accompagner le processus de sortie de crise entamé il y a trois ans, tout en se déclarant convaincu de la possibilité d'une évolution positive dans ce dossier.

M. Philippe Douste Blazy, ministre des affaires étrangères, est ensuite revenu sur les déclarations du Président iranien, M. Mahmoud Ahmadinejad, au sujet d'Israël, en les qualifiant d'inacceptables et en rappelant qu'elles avaient été condamnées très fermement par la France, par les Etats membres de l'Union européenne, ainsi que par le Conseil de sécurité des Nations unies. Sur le dossier nucléaire, M. Ali Laridjani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, a fait part aux ministres de la troïka de la volonté de l'Iran de reprendre les négociations, interrompues en août dernier, à son initiative, par le rejet de l'offre européenne et la décision de reprendre les opérations de conversion d'uranium dans son usine d'Ispahan. Le ministre a rappelé que la France restait disposée à discuter des détails de l'offre européenne et qu'elle attendait de l'Iran qu'il réponde aux demandes répétées du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale pour l'énergie atomique. Seuls les gestes concrets des iraniens détermineront la position des Européens lors du prochain conseil de l'AIEA, qui se tiendra le 24 novembre prochain.

Le ministre des affaires étrangères a enfin évoqué la résolution 1637 du Conseil de sécurité, qui prévoit la prorogation du mandat de la Force multinationale en Irak jusqu'au 31 décembre 2006. L'accord de la France a été motivé par les risques sécuritaires liés à l'hypothèse d'un retrait précipité du territoire irakien, ainsi que par la demande des autorités irakiennes. La France a cependant souligné la nécessité de préserver un lien, dans la résolution, entre le mandat de la force multinationale et le processus politique qui doit conduire le peuple irakien à recouvrer sa pleine souveraineté. Le ministre a considéré qu'au-delà d'une logique sécuritaire, il était essentiel, à un mois des élections législatives irakiennes, de relancer une dynamique politique pour inverser l'engrenage des violences. Il s'est félicité de l'initiative prise par la Ligue arabe, qui devrait déboucher, à terme, sur l'organisation d'une conférence réunissant les Etats voisins et les principaux acteurs du dossier irakien.

Après avoir remercié le ministre de sa présentation, M. Serge Vinçon, président, a indiqué que lors d'un récent séjour au siège de l'ONU à New York, ses interlocuteurs avaient tous tenu à saluer la qualité de l'action diplomatique conduite par la France au sein de l'Organisation.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat (réseau diplomatique et consulaire) » a souhaité être informé du montant et de l'affectation des crédits immobiliers prévus dans le projet de budget pour 2006. Il a interrogé le ministre sur le financement du nombre croissant d'opérations de maintien de la paix (OMP), conduites sous l'égide de l'ONU, et a souhaité disposer d'éléments permettant d'apprécier l'action des ambassadeurs en mission. Il s'est inquiété des moyens permettant d'assurer une meilleure promotion de la langue française à l'étranger. Evoquant, à ce propos, une récente mission en Azerbaïdjan, il a regretté que les bourses d'études destinées aux étudiants étrangers souhaitant apprendre le français n'y soient pas plus nombreuses, de même qu'en Russie ou en Ukraine.

M. Jean-Pierre Plancade, suppléant Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat » (relations culturelles extérieures) a souhaité obtenir des éclaircissements sur les capacités de gestion immobilière conférées à l'AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger) par le décret du 23 décembre 2003, relevant que l'Agence ne pouvait recourir à l'emprunt. Il s'est inquiété des crédits affectés à la chaîne de télévision TV5, insuffisants pour lui permettre de développer le sous-titrage, ainsi que de ceux destinés à RFI (Radio France Internationale). Il a souhaité être informé du différend qui oppose actuellement RFI à Télédiffusion de France (TDF) pour l'utilisation de ses émetteurs.

Puis M. Jean-Pierre Plancade a relevé l'inquiétante dégradation de la situation des Droits de l'homme en Tunisie, à l'occasion du Sommet mondial sur la société de l'information, et a plaidé pour une réaction plus marquée de la France sur ce point. Il s'est félicité que la diffusion, en France, de la chaîne de télévision du Hezbollah « Al Manar » ait été interrompue sur le canal Glob-Cast, mais s'est alarmé de voir cette diffusion poursuivie grâce à deux chaînes du bouquet TPS. Evoquant, plus largement, la position de la France à l'égard du Hezbollah, il a regretté que notre pays ne s'implique pas davantage dans la logique de désarmement de cette milice libanaise terroriste, prévue par la résolution 1559. Enfin, à propos de la Côte d'Ivoire, il s'est interrogé sur l'opportunité, pour la France, de repenser l'ensemble de sa politique africaine.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a apporté les éléments d'information suivants :

- les crédits affectés à l'immobilier seront, en 2006, de 14,5 millions d'euros, soit une baisse de 50 % par rapport à 2005 ; le besoin de financement ainsi créé devra être satisfait par des ressources extra budgétaires comme les produits de cession et les fonds de concours. Les recours aux partenariats publics privés seront accrus ; les ventes de terrains et immeubles devraient rapporter, en 2005, 23 millions d'euros, et les loyers domaniaux 11,6 millions d'euros. Des regroupements de nos sites diplomatiques seront effectués à Pékin et à Djakarta, et des implantations seront rénovées à Bagdad et à New Delhi, permettant ainsi une rationalisation des moyens ;

- la fonction d'ambassadeur en mission a été créée par le Président de la République en 1998 pour l'examen de sujets transversaux. Au nombre de 14, ces postes sont, pour l'essentiel, dévolus à des diplomates ou des fonctionnaires expérimentés et n'induisent pas de surcoût budgétaire. Ils offrent une meilleure visibilité de l'action diplomatique de notre pays dans des domaines sensibles comme l'environnement, les Droits de l'homme, la lutte contre le sida ou contre la drogue et le crime organisé ;

- les OMP bénéficieront, avec les contributions versées par la France à l'OTAN et à l'AIEA, de 226 millions d'euros en 2006 ; l'enjeu du prochain exercice budgétaire sera la mutation du mode de gestion de ces crédits ;

- l'AEFE disposera, en 2006, d'un budget de fonctionnement de 323 millions d'euros, dont 11,3 consacrés aux investissements proviennent du ministère des affaires étrangères. Le ministère des finances étant hostile à ce que l'Agence recoure à l'emprunt, celle-ci devra puiser dans son fonds de roulement pour financer certaines rénovations urgentes ;

- le ministère des affaires étrangères doit, en effet, s'engager plus activement en faveur de la promotion de la langue française à l'étranger, particulièrement au sein de l'enseignement primaire et secondaire. Le français, couramment pratiqué actuellement par les élites de nos pays partenaires, ne le sera plus à l'avenir si une action vigoureuse n'est pas entreprise. Le rôle des écoles françaises à l'étranger est essentiel à cet égard ; une action nouvelle pourrait ainsi prendre la forme de partenariats publics privés (PPP), associant le ministère des affaires étrangères à la Caisse des dépôts. De nouveaux établissements d'enseignement français à l'étranger pourraient être créés grâce à l'achat de terrains, dont une partie ferait l'objet d'un projet immobilier qui financerait l'établissement d'enseignement. Par ailleurs, la politique des bourses doit être développée, comme doit être amélioré l'accueil des étudiants étrangers au sein de nos universités ;

- la France finance plus de 77 % du budget de TV5, qui a crû de 80 % de 1998 à 2002. Il est resté stable depuis cette date ; seul un effort en gestion permettra de dégager les crédits nécessaires au sous-titrage, enjeu majeur pour la chaîne, éventuellement appuyé par nos partenaires au sein de cette chaîne ;

- RFI et TDF développent des analyses divergentes sur l'avenir des ondes courtes. Une négociation sur ce point est en cours entre ces sociétés, mais toute rupture du contrat entraînerait le paiement d'indemnités de dédit ;

- la France a fait part publiquement ce jour de sa préoccupation face aux atteintes à la liberté de la presse constatées en Tunisie ;

- le ministère va examiner sans délai la situation liée à la diffusion d'émissions de la chaîne Al Manar par le bouquet TPS ;

- la France, comme l'ensemble de la communauté internationale, a pour objectif, conformément à la résolution 1559, le désarmement du Hezbollah, mais estime qu'il incombe au gouvernement libanais de mener à bien ce processus. Des entretiens récents avec le Premier ministre libanais Fouad Siniora, dont certains des ministres sont issus des rangs du Hezbollah, ont été menés en ce sens. De même, le rapport de l'envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, M. Roed Larsen, souligne l'intégration progressive du Hezbollah dans la vie politique libanaise, qui est de nature à l'écarter du recours à la violence. La résolution 1636 ne comporte pas d'ingérence politique à l'égard de la Syrie, elle porte sur une question de justice et d'Etat de droit. C'est pour cette raison qu'elle a pu être adoptée à l'unanimité du Conseil de sécurité ; quant à la résolution 1559 relative aux rapports entre la Syrie et le Liban, son but n'est autre que la préservation de l'indépendance du Liban, à l'abri de l'ingérence de tout autre pays ;

- la politique de la France à l'égard de l'Afrique est appelée à évoluer, ne serait-ce que parce que ce continent lui même évolue : il est ainsi marqué par l'irruption de nouveaux acteurs, dont la Chine, comme par de nouveaux enjeux touchant à la démographie, à la menace terroriste et aux mouvements migratoires. Le caractère indissociable de la sécurité et du développement, le renforcement de l'intégration régionale, le rôle accru du secteur privé, la coopération avec l'ONU et l'Union européenne sont autant d'éléments qui guident la France dans son rapport à l'Afrique, qui évoluera de plus en plus de « l'assistanat », dépassé, vers un nouveau partenariat.

Puis Mme Josette Durrieu a regretté que nos actions à l'étranger soient nombreuses à manquer de visibilité par rapport à celles de nos partenaires. Elle s'est ensuite inquiétée du sort des infirmières bulgares et du médecin palestinien détenus en Libye. Elle a par ailleurs souligné l'intérêt que représenterait, pour le développement de la langue française, la gratuité des établissements français à l'étranger. Elle a ensuite exprimé ses vives préoccupations sur le développement du programme nucléaire iranien, estimant qu'il bénéficiait cependant d'une solidarité de fait du monde musulman en apparaissant comme un contrepoids à la détention, par Israël, de l'arme nucléaire, et a estimé que seule la dénucléarisation de la région permettrait de régler pacifiquement ce problème.

M. André Dulait s'est inquiété des risques d'éclatement de l'Irak, à quelques semaines des élections législatives, qui cristalliseront les aspirations à l'indépendance des Kurdes, au nord, et des Chiites, au sud. Cette situation marginalise les sunnites, et pourrait conduire à une dislocation du pays sur des critères qui ne seraient plus seulement religieux.

M. Robert Del Picchia a souligné l'apport des stations de RFI en modulation de fréquence, très écoutées dans les villes où elles sont implantées. Il s'est prononcé en faveur d'une augmentation sensible des bourses attribuées aux enfants français scolarisés à l'étranger. Il s'est dit favorable au maintien du portail Internet « Idées de France », qui pourrait être ultérieurement relayé par celui dont ne manquera pas de se doter la future chaîne d'information internationale. Evoquant l'indemnité prévue pour les élus siégeant à l'Assemblée des Français de l'étranger, il a suggéré qu'elle soit modulée en fonction des contraintes géographiques spécifiques de chacun d'eux. Sur le dossier iranien, il s'est interrogé d'une éventuelle saisine du Conseil de sécurité de l'ONU où le risque d'un veto de la Chine et de la Russie apparaîtrait probablement.

M. Robert Bret a déploré les diminutions successives de la masse salariale du ministère des affaires étrangères qui avaient désormais atteint une limite infranchissable. Il a souhaité qu'une évaluation politique de l'action des ONG complète les seuls critères comptables utilisés pour les apprécier dans le cadre de la LOLF. Il a par ailleurs regretté que la France apparaisse par trop discrète dans son soutien à la lutte menée par les démocrates tunisiens pour les Droits de l'homme, et que notre pays, comme l'Union européenne, soit trop absent sur le dossier israélo-palestinien face à l'omniprésence de la diplomatie américaine.

M. Jean-Louis Carrère a décrit l'important travail effectué par plusieurs régions françaises en faveur de l'usage de la langue française à l'étranger, et a souhaité qu'une coordination s'instaure sur ce point avec le ministère des affaires étrangères. Il a regretté que les récents changements au sein du personnel de la Commission européenne aient été défavorables à la présence de hauts fonctionnaires français, et a souhaité savoir quelles initiatives comptait prendre le ministre sur ce point.

Mme Paulette Brisepierre s'est interrogée sur les perspectives concrètes de réconciliation entre les deux parties en conflit en Côte d'Ivoire.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam a estimé qu'un effort vigoureux devait être accompli en faveur des bourses destinées aux enfants français scolarisés à l'étranger. Elle a attiré l'attention du ministre sur le soutien qu'il convenait d'accorder aux établissements créés par des initiatives privées locales n'appartenant pas à l'ensemble « AEFE » et qui dispensent l'enseignement de la langue française. Elle s'est interrogée sur la négociation en cours du traité avec l'Algérie, jugeant que dans son intitulé, le terme de « coopération » devrait être préféré au terme « d'amitié » compte tenu du contexte.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a apporté les précisions suivantes :

- il serait souhaitable de créer en France une Agence comparable au British Council, permettant une meilleure visibilité de notre action culturelle, scientifique et technique ; une réflexion est en cours à ce sujet ;

- la France, comme l'Union européenne, a constamment appelé à la libération des six infirmières bulgares et du médecin palestinien jugés en Libye, et a oeuvré pour qu'ils puissent être défendus, notamment par des avocats français. Les contacts se poursuivent avec les autorités libyennes sur cette affaire difficile ;

- la dénucléarisation du Moyen-Orient constitue bien sûr un objectif idéal qu'il sera difficile d'atteindre. Il faut, par ailleurs, prendre en compte le besoin croissant de nouvelles énergies dans l'avenir, au premier rang desquelles se trouve le nucléaire civil, dont la maîtrise fait courir le risque que certains pays se dotent du cycle complet du combustible, y compris l'enrichissement d'uranium ;

- la Russie a récemment essuyé un refus public de l'Iran à propos de sa proposition d'enrichir le nucléaire iranien sur son sol. Cette intransigeance pourrait peut-être, à terme, conduire la Chine et la Russie à se montrer plus réservés à l'égard de l'Iran et au risque régional qu'il induit ;

- la saisine du Conseil de sécurité reste une possibilité après la réunion prochaine du Conseil de l'AIEA. Celui-ci a réclamé de l'Iran la suspension de l'intégralité de ses activités sensibles et la pleine coopération de ce pays. L'Agence restera, en tout état de cause, compétente sur ce dossier, même en cas de saisine du Conseil de sécurité de l'ONU ;

- l'unité irakienne est effectivement menacée par un projet fédéraliste qui peut aller très loin. Les divisions de l'Irak entre le nord Kurde et le sud chiite, au détriment des sunnites, sont sources d'inquiétudes. Pour prévenir cette dérive, la France soutient la position de la Ligue arabe et poursuit un double objectif en Irak : assurer le plein exercice de la souveraineté nationale par tous les Irakiens et maintenir l'intégrité territoriale du pays ;

- il serait bon que l'AEFE dégage des ressources pour l'augmentation des bourses scolaires. Les établissements scolaires qui seraient construits à l'étranger grâce au partenariat public-privé devraient comprendre 20 % d'élèves boursiers.

Le ministre des affaires étrangères a rappelé qu'au cours d'un récent voyage en Tunisie, effectué le 1er octobre dernier, il avait évoqué très clairement la question des Droits de l'homme à l'occasion d'une conférence de presse. Il avait également rencontré, à cette occasion, le président de la Ligue tunisienne des Droits de l'homme et des intellectuels tunisiens ;

- l'Union européenne vient de se voir confier le contrôle du point de passage de Rafah, entre l'Egypte et la Bande de Gaza, avec l'accord des deux parties intéressées, israélienne et palestinienne. Elle y effectuera ainsi une tâche primordiale pour assurer le redémarrage économique de cette zone. On ne peut donc plus dire que l'Union est absente au Proche-Orient. La France se félicite, par ailleurs, des récentes déclarations du nouveau responsable du parti travailliste, M. Peretz, invitant Israël à retirer ses colonies de Cisjordanie ;

- le Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement (CICID) a rappelé, lors de sa réunion du 18 mai 2005, le concours essentiel des ONG à la réalisation de la politique française de solidarité internationale. Elles bénéficieront, de la part du ministère des affaires étrangères, de crédits en augmentation de 18 %, en 2006 ;

- les hauts fonctionnaires français sont toujours les plus nombreux au niveau des directeurs au sein des services de la Commission européenne. Ce sont des compatriotes qui dirigent désormais la Direction générale de l'agriculture et celle de l'audiovisuel. Au sein des instances européennes, sur les thèmes touchant au commerce international, aux perspectives financières, à l'élargissement, les analyses françaises sont toujours très attendues et perçues positivement. Ainsi, les propositions touchant à la capacité d'absorption par la Turquie de l'acquis communautaire ont été développées par la France ;

- le choix du futur Premier ministre ivoirien relève de l'action du président nigérian, en sa qualité de président en exercice de l'Union africaine ; cette mission est délicate. Cependant, au-delà de cette nomination, la priorité, pour la Côte d'Ivoire, est une réelle sortie de crise, fondée sur la préparation des élections, le démarrage du désarmement et le retour de l'administration sur l'ensemble du territoire, comme l'exige la récente résolution du Conseil de sécurité, qui prévoit des possibilités de sanction ;

- le traité d'amitié et de coopération en cours d'élaboration avec l'Algérie est un texte ambitieux, qui doit donner un nouvel élan aux relations bilatérales. Par delà une histoire commune souvent douloureuse, il importe de regarder ensemble l'avenir, pour l'Algérie comme pour l'ensemble du Maghreb.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page