B. L'IDENTIFICATION DE MISSIONS PRIORITAIRES

L'agrégat budgétaire de l'administration territoriale regroupe les missions suivantes : la représentation de l'Etat dans les départements, la sécurité, l'accueil du public et la délivrance des titres, les relations avec les collectivités locales, la réglementation générale et l'organisation des élections, le développement économique et les politiques interministérielles, l'animation des politiques régionales et les fonctions logistiques.

Le plan pluriannuel de modernisation des préfectures leur assigne quant à lui six missions prioritaires : la sécurité des personnes et des biens, le service public et la délivrance des titres, le respect de la légalité et de l'Etat de droit, l'intégration sociale et la lutte contre l'exclusion, l'administration et le développement du territoire, la représentation de l'Etat et la communication.

Il réaffirme la vocation des 453 sous-préfectures à constituer le premier réseau d'administration de proximité.

Lors de son audition devant la commission des Lois, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, a souligné que des crédits de vacations d'un montant de 2,65 millions d'euros seraient ouverts sur le budget des préfectures afin de réduire à un mois le délai de traitement des demandes d'asile territorial. Il a annoncé la mise en place d'un nouveau régime juridique de l'asile prévoyant l'unification des deux systèmes de l'asile territorial et de l'asile conventionnel et la compétence de l'Office pour la protection des réfugiés et apatrides pour l'ensemble des demandes.

Votre rapporteur a souhaité dresser un bilan de l'évolution récente de l'une de ces six missions prioritaires : le contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales.

C. L'ÉVOLUTION DU CONTRÔLE DE LÉGALITÉ

L'obligation du contrôle des collectivités territoriales par l'Etat a valeur constitutionnelle. Les prérogatives de l'Etat figurent en effet au dernier alinéa de l'article 72 de la Constitution, selon lequel « le délégué du Gouvernement a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois ». Le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République confirme cette triple mission dévolue au délégué du Gouvernement, désormais qualifié de « représentant de l'Etat ».

Le contrôle de légalité constituait l'un des volets les plus importants de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 et la contrepartie de l'autonomie des collectivités territoriales : la loi transformait la tutelle a priori exercée par le préfet en un contrôle de légalité a posteriori confié au juge administratif saisi par le préfet, c'est-à-dire en un contrôle indirect et juridictionnel .

La loi n° 82-623 du 22 juillet 1982 a complété celle du 2 mars en précisant les conditions d'exercice du contrôle administratif : certains actes énumérés par la loi ne deviennent exécutoires qu'à la double condition d'avoir été publiés et transmis au représentant de l'État .

Le préfet a la possibilité de saisir le tribunal administratif d'un recours, appelé « déféré préfectoral », dans le délai de deux mois suivant la transmission de l'acte. Il est tenu d'informer sans délai l'autorité locale de son intention de saisir le juge et de lui communiquer toutes précisions utiles sur les illégalités qu'il a constatées. Cette procédure vise à limiter le recours au juge et à favoriser le dialogue entre la collectivité et le préfet ; elle tient compte du fait que nombre d'illégalités ne sont que le résultat d'erreurs involontaires.

D'autres formes de déférés préfectoraux existent : suspension d'extrême urgence des actes des collectivités locales en cas de menace pour une liberté publique ou individuelle, déféré en matière de défense nationale... Les sursis à exécution ont été remplacés par des suspensions, accordées de droit si l'un des moyens évoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux sur la légalité de l'acte.

1. L'exercice du contrôle de légalité en 1999 et en 2000

En application des articles L. 2131-7, L. 3132-2 et L. 4142-2 du code général des collectivités territoriales, le Gouvernement a remis au Parlement, à la fin du mois d'août 2002, un rapport sur le contrôle a posteriori des actes des collectivités locales et des établissements publics locaux en 1999 et 2000.

Ce document met en lumière le rôle essentiel de la phase pré-contentieuse du contrôle de légalité.

a) Un volume croissant d'actes transmis au contrôle de légalité

Le nombre d'actes transmis par les collectivités locales et leurs établissements publics s'est élevé à 7 329 272 en 1999 et à 7 736 756 au titre de l'exercice 2000, dernier exercice de recensement.


Evolution de la répartition des actes transmis en 1999 et 2000

Actes transmis

Nombre d'actes transmis en 1999

% du total des actes transmis en 1999

Nombre d'actes transmis en 2000

Différence

% du total des actes transmis en 2000

% d'évolution

Délibérations

3 100 960

42,31%

3 296 162

195 202

42,60%

6,29%

Décisions prises par délégation

304 237

4,15%

289 354

-14 883

3,74%

-4,89%

Décisions de police régle-mentaires et individuelles

657 388

8,97%

690 503

33 115

8,92%

5,04%

Autres actes réglementaires

208 133

2,84%

201 196

-6 937

2,60%

-3,33%

Marchés et contrats

449 012

6,13%

482 606

33 594

6,24%

7,48%

Gestion du personnel (décisions individuelles)

1 375 503

18,77%

1 475 580

100 077

19,07%

7,28%

Urbanisme (décisions individuelles)

861 708

11,76%

924 567

62 859

11,95%

7,29%

Actes non soumis à transmission

372 331

5,08%

376 788

4 457

4,87%

1,20%

TOTAL

7 329 272

100,00%

7 736 756

407 484

100,00%

5,56%

Source : Direction générale des collectivités locales

Cette répartition est assez stable depuis 1990 : les décisions individuelles en matière de gestion du personnel oscillent entre 19 % et 23 % des actes transmis, les décisions individuelles en matière d'urbanisme entre 10 % et 15 %, et les marchés et contrats entre 5 % et 6 %.

b) Une légère diminution du nombre de lettres d'observations adressées par les préfets

174 000 lettres d'observations ont été émises par les services chargés du contrôle de légalité en 2000, contre 176 000 en 1999.

Evolution de la répartition des observations en 1999 et 2000

Observations
par matières

nombre d'observations en 1999

%
du total des observations en 1999

nombre d'observations en 2000

%
du total des observations en 2000

% d'évolution

Délibérations

85 593

48,65%

83 072

47,78%

-2,95%

Décisions prises par délégation

2 323

1,32%

2 238

1,29%

-3,66%

Décisions de police (réglementaires et individuelles)

7 129

4,05%

6 923

3,98%

-2,89%

Autres actes réglementaires

2 584

1,47%

2 490

1,43%

-3,64%

Marchés et contrats

39 022

22,18%

39 531

22,74%

1,30%

Gestion du personnel (décisions individuelles)

26 447

15,03%

25 907

14,90%

-2,04%

Urbanisme (décisions individuelles)

11 556

6,57%

12 635

7,27%

9,34%

Actes non soumis à transmission

1 279

0,73%

1 079

0,62%

-15,64%

TOTAL

175 933

100,00%

173 875

100,00%

-1,17%

Source : Direction générale des collectivités locales

Les délibérations, qui représentent 42,6 % des actes transmis en 2000, donnent lieu à 47,8 % des observations. Les marchés publics, qui ne représentent que 6,2 % des actes transmis, génèrent quant à eux 22,7 % des observations .

c) La persistance d'un nombre élevé de désistements après l'engagement des procédures

Le nombre de recours intentés s'est élevé à 1 713 en 2000, contre 1 868 au titre de l'exercice 1999.

Etat des contentieux sur les cinq dernières années

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Nombre d'actes transmis

5 007 000

5 890 000

6 145 000

6 929 810

7 329 272

7 736 756

Nombre d'observations
sur la légalité

140 269

176 420

178 748

178 442

175 933

173 875

Nombre de recours déposés
devant les tribunaux administratifs

2 018

1 961

1 623

1 729

1 868

1 713

Nombre de désistements

594

477

506

501

239

420

Nombres de recours définitivement déposés

1 424

1 484

1 117

1 228

1 629

1 293

Jugements rendus par les tribunaux administratifs

989

1 020

948

794

966

1027

*dont jugements favorables à la thèse
du préfet

751

840

683

618

736

745

Appels devant les cours administratives d'appel

133

311

168

113

101

111

Arrêts rendus par les cours administratives d'appel

56

115

80

63

77

30

*dont arrêts favorables
à la thèse du préfet

45

104

13

42

46

19

Source : Direction générale des collectivités locales

La persistance d'un nombre élevé de désistements après l'engagement des procédures contentieuses traduit la poursuite et l'efficacité de la concertation menée par les préfets en direction des exécutifs locaux après le dépôt d'un déféré. Les désistements peuvent en effet être interprétés comme la conséquence du retrait ou de la modification de l'acte par la collectivité locale.

Seul l'exercice 1999 enregistre une coupure très nette dans cette tendance (239 désistements). Cette dernière n'est cependant que conjoncturelle puisqu'elle n'a pas été confirmée au titre de l'exercice suivant. En effet, au titre de l'exercice 2000, pour 1 713 déférés , 420 désistements sont intervenus. En conséquence, le nombre de recours définitivement déposés s'est élevé à 1 293.

Notons enfin, comme l'avait souligné la mission d'information du Sénat sur la décentralisation, que le contrôle de légalité est quantitativement insuffisant, le nombre global d'actes contrôlés étant très faible et très inégal d'un département à l'autre .

La mission indiquait ainsi que « l'inégalité de l'application du droit d'une collectivité à l'autre se manifeste par la diversité du taux des observations et du taux de recours, mais aussi par la disparité dans la pratique des transactions et des voies non contentieuses de règlement des litiges. Certains départements se caractérisent par l'absence de tout déféré préfectoral dans l'année, alors que d'autres atteignent ou dépassent la centaine . »

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