EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenu le mercredi 14 novembre 2001 , sous la présidence de M. Jacques Valade, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Léonce Dupont sur les crédits pour 2002 de l'enseignement supérieur .

Un débat a suivi l'exposé du rapport.

M. Michel Thiollière s'est inquiété des conséquences financières pour les collectivités territoriales des retards enregistrés du fait de l'administration centrale dans le démarrage des travaux universitaires sous maîtrise d'ouvrage d'Etat dans le cadre du CPER, dont l'exécution à une date donnée conditionne l'attribution de crédits européens.

Il a également souligné le dérapage des budgets de construction universitaire par rapport aux prévisions initiales, qui conduit les régions à accroître leur part de financement en raison d'un plafonnement de la participation de l'Etat.

S'appuyant sur l'exemple d'étudiants chinois qui ont été conduits à abandonner rapidement leurs études à l'université de Saint-Etienne, en raison d'une préparation insuffisante, il a estimé que l'accueil des étudiants étrangers dans nos établissements universitaires devrait comporter un dispositif d'accompagnement adapté.

M. Jacques Legendre s'est enquis des aides éventuellement prévues en faveur des écoles d'ingénieurs privées pour alléger la participation financière des élèves et de leur famille.

Rappelant les objectifs assignés à l'agence Edufrance par l'ancien ministre de l'éducation nationale et par l'actuel ministre des affaires étrangères, qui prévoyaient l'accueil dans nos universités de 400 000 à 500 000 étudiants étrangers en quelques années, il a regretté que les moyens trop faibles accordés à l'agence n'aient pas permis de réaliser ces objectifs sans doute trop ambitieux.

Il a par ailleurs fait observer que les conditions d'accueil de nos universités étaient moins attractives qu'au Royaume-Uni, alors que des capacités existent du fait de la stagnation des effectifs étudiants, la France se privant ainsi des retombées, notamment économiques, de l'accueil d'un nombre plus important d'étudiants étrangers.

M. Louis Duvernois a estimé que le système universitaire français pâtissait d'un déficit d'image à l'étranger et qu'il convenait d'harmoniser les cursus universitaires européens.

Soulignant, lui aussi, l'importance de la mission de l'agence Edufrance et les mauvaises conditions d'accueil des étudiants étrangers, il a noté que plusieurs milliers de bacheliers étrangers formés dans le réseau des 500 établissements français à l'étranger seraient susceptibles de poursuivre des études supérieures en France, et que l'agence aurait vocation à assurer l'accompagnement de ces étudiants, en développant un accueil inspiré de celui des universités anglo-saxonnes.

Mme Danièle Pourtaud a estimé que la conclusion du rapporteur pour avis était contradictoire avec la présentation, à bien des égards, positive du projet de budget. Elle a rappelé que l'accélération des dépenses d'investissement à Paris et dans la région Ile-de-France résultait d'un refus initial de participer au financement du plan université 2000, cette attitude étant à l'origine de l'état actuel de délabrement de certaines des universités parisiennes ; elle a estimé que la collaboration aujourd'hui heureusement engagée entre la ville de Paris et la région dans le cadre du plan U3M devrait permettre de remédier à cette situation.

Elle a souhaité obtenir des précisions sur les dysfonctionnements évoqués en matière de maîtrise d'ouvrage et a fait observer que la sous-consommation des crédits d'investissement résultait aussi d'appels d'offres infructueux ou de défaillances d'entreprises.

Elle a par ailleurs noté que l'action de l'agence Edufrance avait permis d'accueillir 3.000 étudiants étrangers supplémentaires au cours des deux dernières années universitaires, ce qui est certes loin des objectifs annoncés, et que son efficacité devait également être appréciée, au-delà des seuls moyens budgétaires, en tenant compte de la politique contractuelle engagée avec les universités françaises, qui doivent en effet se tourner davantage vers l'extérieur et améliorer la qualité de leur accueil, avec l'aide sans doute des collectivités territoriales.

M. Michel Guerry a rappelé que les lycées français à l'étranger scolarisaient 40 % d'élèves étrangers et que certains établissements bilingues accueillaient de nombreux étudiants susceptibles de poursuivre des études supérieures en France à la condition de bénéficier de conditions d'accueil satisfaisantes. Il est convenu que le message de nos universités passait difficilement à l'étranger et a estimé que la seule comparaison significative en termes d'accueil d'étudiants étrangers devait être faite avec l'Allemagne.

S'appuyant sur des informations recueillies lors d'un récent colloque sur la coopération franco-marocaine, M. Jacques Valade, président , a regretté que le processus de sélection des étudiants étrangers susceptibles d'être accueillis en France reste fondé sur la maîtrise de la langue française, au détriment de la volonté exprimée par de nombreux étudiants de suivre des études supérieures dans nos universités, ceux-ci étant susceptibles d'acquérir rapidement une maîtrise suffisante de notre langue avant d'entamer un cursus universitaire. Il a estimé qu'une réflexion devait être engagée sur ce sujet.

Il a par ailleurs souhaité que la commission mette rapidement en place une mission d'information sur le patrimoine immobilier universitaire, qui serait notamment chargée d'établir un état des lieux, d'examiner les problèmes de maintenance et de développement des constructions et d'étudier les relations entre l'Etat, les collectivités territoriales et les établissements universitaires au travers du mécanisme des contrats de Plan Etat-régions.

Répondant à ces interventions, M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a indiqué que la conclusion de son rapport résultait logiquement de l'analyse des insuffisances du projet de budget, celles-ci ayant d'ailleurs été soulignées par la principale organisation représentative des enseignants-chercheurs qui lui a fait part de ses inquiétudes concernant notamment le renouvellement des personnels appelés à partir en retraite dans les années à venir. Il a ensuite apporté les précisions suivantes :

- les défaillances constatées en matière de maîtrise d'ouvrage conduisent à des retards dans la réalisation des travaux et à un dépassement des coûts d'objectifs fixés par l'Etat ; la création d'une mission d'information sur le patrimoine immobilier universitaire apparaît en conséquence particulièrement opportune ;

- les chiffres fournis relatifs à l'accueil des étudiants étrangers visent les inscriptions universitaires et non les effectifs « en stock » ;

- nos universités souffrent en effet d'un déficit d'image à l'étranger, du fait d'une promotion insuffisante de notre système universitaire ;

- le refus de la région Île-de-France et de la Ville de Paris de participer au financement du plan Universités 2000 doit être replacé dans le débat de l'époque sur la répartition des compétences, ce refus s'expliquant aussi par la densité des équipements universitaires parisiens et franciliens, très supérieure à celle constatée en régions ;

- la situation de la France au regard des étudiants étrangers doit en effet plutôt être comparée à celle de l'Allemagne qu'à celle des pays anglo-saxons où les conditions d'accueil « linguistique » ne se posent pas dans les mêmes termes ; il serait envisageable de mettre en place dans nos universités des formations accélérées de français précédant la rentrée universitaire, voire de dispenser certains enseignements en langue étrangère ;

- alors que l'enseignement supérieur conditionne l'avenir et le développement de notre pays, on peut regretter qu'il ne constitue pas une priorité budgétaire du Gouvernement.

M. Jacques Valade, président, a confirmé que la mise en place du plan Universités 2000 avait suscité un large débat sur le problème de la répartition des compétences, et que de nombreuses régions, comme l'Aquitaine, avaient accepté, contraintes et forcées du fait de leur sous-équipement universitaire, de déroger à cette répartition fixée par les lois de décentralisation et de participer au financement de ce programme, comme d'ailleurs elles sont conduites à le faire de manière récurrente, dans d'autres domaines, par exemple ceux des infrastructures routières et des transports.

Au terme de ce débat, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur pour 2002 .

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