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N° 390

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 mai 2009

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation du protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée ,

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre

Par M. Bernard KOUCHNER,

Ministre des affaires étrangères et européennes

(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France a signé le 21 janvier 2008, dans le cadre de la mise en oeuvre de la convention de Barcelone pour la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée, le protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée.

I. - Contexte

La convention de Barcelone sur la protection du milieu marin de la Méditerranée du 16 février 1976 a été modifiée en 1995 pour intégrer le littoral dans son titre et dans son champ d'application, chaque Partie étant libre d'étendre cette convention au littoral et de le définir pour ce qui la concerne.

La seule obligation générale définie par la convention de Barcelone imposée aux vingt-deux Parties contractantes dont la Communauté européenne figure dans le paragraphe 3- e de son article 4, qui dispose que les Parties s'engagent à promouvoir la gestion intégrée du littoral en tenant compte de la protection des zones d'intérêt écologique et paysager et de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles. C'est sur cette base que le secrétariat de la convention et son centre d'activités régionales (CAR) du programme d'actions prioritaires (PAP) de Split (Croatie) spécialisé dans les zones côtières ont proposé aux Parties d'engager des négociations visant à l'élaboration d'un protocole consacré à la gestion intégrée des zones côtières de la Méditerranée.

Ce protocole est le résultat d'un long processus de discussions et de propositions émanant des diverses instances du système de Barcelone (conférence des Parties, commission méditerranéenne de développement durable, CAR/PAP de Split) lesquelles par des recommandations et déclarations ont invité les États riverains de la Méditerranée à mettre en place une gestion intégrée des zones côtières afin, ainsi que le souligne le préambule du protocole, de « stopper et d'inverser le processus de dégradation de ces zones et de réduire, de façon significative, la perte de la biodiversité des écosystèmes côtiers ».

Quatorze Parties contractantes ont signé le 21 janvier 2008 à Madrid le texte du protocole. Sa signature marque l'aboutissement d'un processus de consultation, de négociation et d'amélioration du projet de protocole qui a duré six ans. Septième protocole dans le cadre de la convention de Barcelone, le protocole GIZC va permettre aux États riverains de la Méditerranée de mieux gérer et de protéger leurs zones côtières.

Le préambule du protocole fait référence à des instruments internationaux auxquels la France a pleinement adhéré, qu'il s'agisse de la convention de Montego Bay sur le droit de la mer de 1982, la convention Ramsar sur les zones humides de 1971, de la convention sur la diversité biologique (1992) ou de la convention cadre sur les changements climatiques adoptée à New York en 1992. Le préambule met, par ailleurs, en évidence les risques qui pèsent sur les zones côtières et l'urgente nécessité de procéder à leur aménagement et à leur gestion dans une perspective de préservation et de développement durable.

II. - Contenu

Le protocole définit un cadre juridique tout à fait novateur dans le domaine de la gestion intégrée des zones côtières notamment au travers des dispositions suivantes :

Article 1 er - Obligations générales

Cet article précise l'objet du protocole et permet de préciser les concepts nouveaux de zone côtière et de gestion intégrée des zones côtières. Il est fait référence à la convention de Barcelone, telle qu'amendée en 1995, et aux principes généraux qui la sous-tendent, ainsi qu'à ses protocoles, dans la mesure où le protocole GIZC doit s'harmoniser sans aucune contradiction avec tous les autres instruments constituant le « système de Barcelone ».

Article 3 - Champ d'application géographique

Les limites de la zone côtière sont définies de façon à la fois précise et flexible. La précision découle du paragraphe 1 qui se fonde sur des limites bien définies. Il s'agit en mer, de l'étendue de la mer territoriale des États Parties (douze milles nautiques). Toutefois, des limites inférieures peuvent être établies par certains États, à condition d'adresser une déclaration lors du dépôt de l'instrument de ratification du Protocole. Pour ce qui concerne la limite à terre, il s'agit du territoire des unités administratives locales côtières (les municipalités dans plusieurs États méditerranéens ou les autres unités correspondantes, dans d'autres États de la région). Il convient de noter qu'aucune différence n'est faite entre les municipalités situées dans un territoire continental et celles situées dans les îles.

Article 5 - Objectifs de la gestion intégrée des zones côtières

L'article 5 détaille le contenu du concept de gestion intégrée des zones côtières qui est centré sur les moyens de faciliter leur développement durable ainsi que l'utilisation durable de leurs ressources naturelles. Le protocole prend en compte la problématique climatique en assignant à la gestion intégrée des zones côtières l'objectif de prévenir ou de réduire les effets des aléas naturels et en particulier des changements climatiques qui peuvent être imputables à des activités naturelles ou humaines.

Article 6 - Principes généraux de la gestion intégrée des zones côtières

L'article 6 énonce plusieurs principes figurant dans un ordre logique et non hiérarchique qui concernent tous les aspects de la gestion intégrée des zones côtières liés soit au développement durable des activités économiques soit à la protection des ressources et des écosystèmes naturels. Ces principes correspondent à la philosophie de la gestion intégrée des zones côtières appliquée en France (cf. articles L. 321-1 du code de l'environnement et L. 121-1, L. 146-1, L. 146-2 et L. 146-6 du code de l'urbanisme). Il convient cependant d'observer l'utilisation du vocable « capacité de charge » (article 6- b ) qui a un sens différent de celui de la « capacité d'accueil » qui ne s'applique qu'aux documents d'urbanisme (cf. L. 146-2 du code de l'urbanisme) et ne constitue pas un principe général de gestion du littoral.

Article 8 - Protection et utilisation durable de la zone côtière

Cet article, qui a fait l'objet de négociations très difficiles, constitue la pierre angulaire du protocole en énonçant un certain nombre de principes destinés à protéger durablement la frange littorale contre tout risque de « bétonnisation » linéaire de la zone côtière. Cet article constitue un compromis dans la mesure où il pose le principe d'une bande côtière inconstructible qui ne pourra être d'une largeur inférieure à 100 mètres sous réserve d'une possibilité d'adaptation de ce principe en fonction de contraintes spécifiques. L'article 8.2- b prévoit à cet effet plusieurs dérogations liées aux contraintes particulières de certaines zones, ou d'autres contraintes locales liées notamment à la densité de la population ou aux besoins sociaux.

D'autres mesures de protection de la zone côtière sont préconisées, qu'il s'agisse de mesures de limitation du développement linéaire des agglomérations le long de la côte, de mesures d'organisation d'un accès libre et gratuit du public à la mer et le long du rivage ou de mesures de limitation de la circulation et du stationnement de véhicules terrestres sur les espaces naturels terrestres ou maritimes fragiles.

Article 9 - Activités économiques

Toutes les activités économiques ayant nécessairement des effets sur l'équilibre fragile des zones côtières, cet article impose de prendre en compte l'environnement de façon appropriée et proportionnée dans leur exercice conformément aux exigences de développement durable. C'est dans ce contexte que sont énumérés six secteurs d'activités économiques pour lesquels les Etats doivent accorder une attention et un soutien particulier en contrepartie d'une plus grande prise en compte de leurs effets sur l'environnement. Ces secteurs visent l'agriculture, l'industrie, la pêche, l'aquaculture, le tourisme et les activités sportives et de loisir, l'utilisation de ressources naturelles spécifiques, les infrastructures et les installations énergétiques et enfin les activités maritimes.

Article 13 - Patrimoine culturel

Cet article impose un minimum d'obligations devant permettre une meilleure sauvegarde du patrimoine culturel des zones côtières, notamment archéologique ou historique. S'appuyant sur les règles figurant dans la convention de l'Unesco sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, adoptée le 6 novembre 2001, cet article fait, en particulier, référence aux éléments du patrimoine culturel subaquatique des zones côtières qui ne peuvent faire l'objet d'opérations de vente, d'achat ou de troc en tant qu'articles de nature commerciale.

Article 14 - Participation

Dans le cadre de l'application du principe général posé par l'article 15.2 de la convention de Barcelone, cette disposition définit les modalités d'une participation de tous les acteurs aux différentes étapes de la politique de gestion intégrée au niveau de la formulation des stratégies, plans et programmes côtiers ainsi que de leur mise en oeuvre. Gage d'une bonne gouvernance applicable à ce territoire, la participation concerne ici non seulement le public concerné, les collectivités territoriales, les opérateurs économiques ainsi que les organisations non gouvernementales.

Article 16 - Mécanisme de suivi et d'observation des réseaux

Cet article invite les Parties à utiliser et renforcer les mécanismes appropriés de suivi et d'observation existants et à établir des inventaires nationaux des zones côtières qui constituent l'infrastructure pour tout travail prospectif ou opérationnel relatif à la zone côtière. Par ailleurs, afin de favoriser l'échange d'expériences scientifiques, cet article prévoit la participation des Parties à un réseau méditerranéen des zones côtières.

Article 17 - Stratégie méditerranéenne de gestion intégrée des zones côtières

Cette stratégie s'inscrit dans le cadre de la stratégie méditerranéenne du développement durable dont les Parties doivent tenir compte et qu'elles doivent le cas échéant compléter. À cette fin, les Parties sont invitées à définir un cadre régional commun de gestion intégrée des zones côtières afin de coopérer en vue de promouvoir le développement durable dans cette zone.

Article 20 - Politique foncière

Dans le cadre de la promotion de la gestion intégrée des zones côtières, les Parties sont invitées à adopter des instruments et mesures appropriés de politique foncière afin d'assurer la gestion durable des biens publics et privés des zones côtières. Les Parties peuvent à cette fin soit recourir à des mécanismes fonciers (acquisition, cession, donation ou transfert de biens au profit du domaine public), soit instituer des servitudes sur les propriétés.

Article 21 - Instruments économiques et financiers

Un dernier volet de la politique de gestion intégrée des zones côtières concerne la possibilité offerte aux Parties d'adopter des instruments économiques, financiers ou fiscaux destinés à accompagner les initiatives locales, régionales et nationales relatives à la gestion intégrée.

Article 22 - Aléas naturels

Cet article invite les Parties à entreprendre pour les zones côtières des évaluations de la vulnérabilité et des aléas naturels. Il leur incombe, à cet effet, de prendre les mesures requises pour faire face aux effets des catastrophes naturelles et notamment celles liées aux changements climatiques.

Article 28 - Coopération transfrontière

Suivant les principes de l'article 7 du protocole, cet article affirme que les entités locales et régionales sont associées aux travaux de coordination des stratégies, plans et programmes côtiers nationaux de gestion des zones côtières frontalières.

Article 29 - Évaluations environnementales transfrontières

Cet article prévoit la réalisation d'études environnementales dans un contexte transfrontière c'est-à-dire lorsque les activités, plans et programmes concernant la zone côtière relevant de la juridiction d'une Partie sont susceptibles de porter un préjudice grave aux zones côtières d'autres États.

Telles sont les principales observations qu'appelle le protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l'approbation du protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

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Article unique

Est autorisée l'approbation du protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée, signé à Madrid le 21 janvier 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi .

Fait à Paris, le 6 mai 2009

Signé : FRANÇOIS FILLON

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères et européennes,

Signé : BERNARD KOUCHNER

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