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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

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Ministère des affaires étrangères

et européennes

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NOR : MAEJ1105349L/Bleue-1

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le

Gouvernement de la République française et le Gouvernement

de la République du Costa Rica relatif à l'échange de

renseignements en matière fiscale

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ÉTUDE D'IMPACT

I. - Situation de référence et objectif de l'accord

1. Jusqu'à une date récente, les efforts entrepris en matière de transparence et d'échange d'informations fiscales connaissaient peu de progrès. Malgré la publication des premières listes de paradis fiscaux en 2000 par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), les Etats ou territoires non coopératifs en matière fiscale n'avaient guère amélioré leurs pratiques, même si la plupart s'étaient engagés à mettre en oeuvre les standards internationaux en matière de transparence.

A partir de la fin de l'année 2008, sous l'impulsion de la conférence internationale organisée à Paris par les Ministres des Finances français et allemand le 21 octobre 2008, la situation a de nouveau évolué dans un sens favorable. Ainsi, grâce à une volonté politique forte et très largement partagée au plan international, notamment au sein du G20, l'ensemble des Etats ou territoires qui s'y refusaient jusqu'alors 1 ( * ) ont reconnu les standards internationaux en matière de transparence et d'échange d'informations. Dans le même temps, de nombreux pays, et en particulier ceux qui figuraient sur la « liste grise » établie à la demande du G20 le 2 avril 2009 par le Secrétariat de l'OCDE 2 ( * ) , se sont engagés dans la signature d'accords internationaux devant permettre l'échange de renseignements conformément à ces standards.

2. Conformément à son engagement constant en faveur de la transparence et de l'échange d'informations, la France a proposé à l'ensemble des Etats et territoires qui figuraient sur la « liste grise » établie par le Secrétariat général de l'OCDE le 2 avril 2009 de signer des accords d'échange d'informations ou des avenants aux conventions fiscales existantes.

Depuis mars 2009, la France a signé, outre l'accord avec le Costa Rica,
26 accords d'échange de renseignements 3 ( * ) et 7 conventions ou avenants à des conventions fiscales existantes 4 ( * ) . 25 de ces textes ont d'ores et déjà été ratifiés par le Parlement français et 20 sont entrés en vigueur.

Cet accord avec le Costa Rica complète le réseau français de traités internationaux permettant l'échange d'informations fiscales, qui couvre désormais l'essentiel des Etats et territoires significatifs 5 ( * ) parmi ceux listés à l'occasion du sommet du G20 du mois d'avril 2009 et quasiment l'ensemble des Etats et territoires concernés sur la zone européenne.

La France fait partie des premiers Etats à avoir signé un accord avec le Costa Rica. Pour mémoire, si le Costa Rica n'avait pas été identifié en 2000 comme non-coopératif par l'OCDE, le 2 avril 2009 lors de la publication des trois listes OCDE, il figurait sur la liste « noire ». Il a néanmoins pris, dès le 7 avril 2009, l'engagement formel de mettre en oeuvre les standards internationaux de transparence et d'échange d'informations.

3. Sur le plan économique, l'économie du Costa Rica, dont le PIB s'élevait à 29,7 milliards d'USD en 2008, dépend fortement des services qui concentrent les deux tiers du PIB, la part du secteur secondaire étant de 25 %. Cette économie a été touchée fin 2008 par la crise financière internationale, mais connaît une reprise, avec une croissance proche de 2,3 % pour 2010, notamment du fait des mesures prises par le gouvernement costaricien. Par ailleurs, le Costa Rica a récemment mis en oeuvre une stratégie de diversification de ses partenaires commerciaux, en engageant notamment des démarches bilatérales afin d'accélérer la conclusion d'un accord d'association entre l'Amérique centrale et l'Union européenne.

Au 10 février 2010, le nombre d'entités financières supervisées par la SUGEF (Surintendance générale des entités financières) était d'environ 65, dont : 3 banques commerciales étatiques, 11 banques privées, 11 entreprises financières non bancaires, 32 organisations coopératives d'épargne et de crédit. Par ailleurs 18 conglomérats et groupes financiers actifs sont inscrits auprès de la SUGEF. Cinq groupes financiers sont inscrits auprès de la Surintendance générale de valeurs (SUGEVAL) et 6 comptoirs boursiers sont autorisés à opérer sur le marché des changes et supervisés par la SUGEVAL. Face à la crise, la banque privée a plutôt bien résisté, bien que les créances douteuses progressent et que le crédit se concentre au sein du secteur bancaire public.

S'agissant de la présence économique de la France, plus d'un tiers des filiales françaises recensées en Amérique centrale 6 ( * ) se trouvent au Costa Rica. En 2008, selon la Banque de France, le stock d'investissements français a atteint 64 millions d'euros, dont 31 millions d'euros dans les services aux entreprises, 20 millions d'euros dans l'immobilier et 5 millions d'euros dans le secteur des hydrocarbures. Les flux d'investissements français se sont élevés pour cette même année à 32 millions d'euros (69 ème rang mondial). Parallèlement, le stock d'investissements costariciens en France s'est établi à 43 millions d'euros, dont 15 millions d'euros dans l'immobilier et 5 millions d'euros dans les hydrocarbures. Les flux d'investissements costariciens ont totalisé 25 millions d'euros (51 ème rang mondial).

Les principaux groupes français établis au Costa Rica sont les suivants :

- Total (premier investisseur français) : réseau de stations-service et distribution de produits pétroliers ;

- Schneider Electric (distribution électrique, automatismes industriels et contrôle du bâtiment) : usine locale et siège de ses activités en Amérique centrale ;

- Legrand (matériel électrique) : BTcino (filiale italienne de l'équipementier français) approvisionne depuis son implantation au Costa Rica l'ensemble de l'Amérique centrale, les Caraïbes et l'Équateur ;

- GDF SUEZ : mise en service en 2009 d'un parc éolien de 49,5 MW.

Outre ces principaux groupes, plusieurs filiales de sociétés françaises sont recensées au Costa Rica 7 ( * ) .

Les principaux projets suivis par les entreprises françaises au Costa Rica sont la construction et l'exploitation d'un train léger desservant San José, la modernisation et l'extension des installations de traitement des eaux résiduaires et du réseau d'égouts de San José, ainsi que l'ouverture du secteur des télécommunications et des assurances et le développements de grands projets dans le secteur portuaire et hydroélectrique.

Par ailleurs, plusieurs entrepreneurs individuels français sont actifs dans le tourisme, l'importation de vins et spiritueux, les activités de conseil, la production de coeurs de palmier, la fabrication de bijoux, la construction navale et la représentation de fournisseurs de biens d'équipement.

Environ 3 000 Français seraient installés au Costa Rica.

4. Dans ce contexte, l'accord signé le 16 décembre 2010 vise à mettre en place un cadre juridique général de façon à permettre un échange effectif de renseignements en matière fiscale, conformément aux standards internationaux en la matière. En particulier, ces Etats et territoires ne doivent pas pouvoir opposer un éventuel secret bancaire ni subordonner la délivrance de l'information à l'existence d'un intérêt pour l'application de leur propre législation fiscale.

II. - Conséquences estimées de la mise en oeuvre des accords

1. Conséquences économiques et financières

Dans son rapport annuel de 2007, le Conseil des prélèvements obligatoires estimait le montant de la fraude fiscale et sociale annuelle entre 29 et 40 milliards d'euros. Il n'est cependant pas possible d'estimer, même en termes d'ordre de grandeur, la part de la fraude et de l'évasion fiscales qui impliquerait des opérateurs profitant de l'absence d'échange de renseignements existant avec le Costa Rica, et, partant, les conséquences économiques possibles de cet accord.

2. Conséquences juridiques

1. L'ordonnancement juridique n'est pas affecté par cet accord.

L'accord d'échange de renseignements offre la possibilité à la France de demander aux autorités du Costa Rica toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne et de transmettre ces informations aux autorités concernées, y compris les autorités juridictionnelles et administratives.

Pourront être sollicités, selon les termes de l'accord, tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts visés dans l'accord, pour le recouvrement et l'exécution des créances fiscales sur les personnes soumises à ces impôts, ou pour les enquêtes ou les poursuites en matière fiscale pénale à l'encontre de ces personnes.

Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les trusts et les fondations. En outre, le Costa Rica ne pourra pas opposer un éventuel secret bancaire ni subordonner la délivrance de l'information à l'existence d'un intérêt pour l'application de sa propre législation fiscale.

Enfin, l'accord prévoit que le Costa Rica doit adapter sa législation interne afin de rendre effectif l'échange d'informations prévu dans l'accord, c'est-à-dire en rendant l'information accessible, disponible et en mettant en place des mécanismes d'échange d'informations.

2. Au regard des standards internationaux de transparence et d'échange d'informations, le présent accord est conforme au modèle d'accord sur l'échange de renseignements en matière fiscale élaboré par l'OCDE en 2002, comme les accords de même nature conclus généralement par nos principaux partenaires de l'OCDE.

Toutefois, cet accord va plus loin que ces standards, sur quatre points en particulier :

- le champ d'application de cet accord est plus large que celui prévu dans le modèle OCDE, dès lors que l'article 3 n'énumère pas les impôts couverts par l'accord mais précise que sont visés l'ensemble des impôts existants prévus par les dispositions législatives et réglementaires des parties, ainsi que les impôts de même nature établis après la date de signature de l'accord qui s'ajouteraient aux impôts actuels ou les remplaceraient ;

- l'article traitant des dispositions d'application (article 10) prévoit que les parties doivent adapter leur législation interne afin de rendre effectif l'échange d'informations avec la nécessité de réunir trois conditions : l'information doit être disponible et l'administration de la partie requise doit y avoir accès et être en mesure de la transmettre ;

- l'article relatif aux frais (article 9) stipule que le remboursement à la partie requise des frais extraordinaires par la partie requérante ne constitue qu'une faculté ;

- la limite à l'échange d'informations relative aux sociétés cotées, prévue à l'article 5-4 ne s'applique que si cet échange ne peut pas être réalisé sans créer de difficultés excessives.

3. Conséquences administratives

La mise en oeuvre des accords d'échange de renseignements en matière fiscale sera gérée par la sous-direction du contrôle fiscal de la direction générale des finances publiques et, au niveau déconcentré, par les directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales.

Ces services sont déjà en charge de la mise en oeuvre de l'assistance administrative, que ce soit dans le cadre communautaire ou en application des conventions fiscales existantes. Au regard des volumes d'informations déjà échangés, l'entrée en vigueur de l'accord ne devrait pas entraîner de surcharges administratives substantielles. Plus qu'une profonde révision de la politique menée en matière de contrôle fiscal, cet accord permettra surtout aux services de contrôle de ne plus être limités dans leurs investigations et de pouvoir poursuivre leurs enquêtes jusqu'au territoire de la République du Costa Rica.

Enfin, les informations recueillies dans le cadre de l'échange d'informations pourront alimenter le fichier Evafisc, relatif aux comptes bancaires détenus hors de France par des contribuables, de même que les informations recueillies dans ce fichier pourront susciter des demandes d'informations en application de cet accord.

III. - Historique des négociations

Favorisées par le contexte international, les négociations ont pu être conclues en quelques mois depuis la prise de contact jusqu'à la signature de l'accord le 16 décembre 2010.

IV. - Etat des signatures et ratifications

L'accord entre les gouvernements de la République du Costa Rica et de la République française relatif à l'échange de renseignements fiscaux a été signé, par échange de lettres, le 16 décembre 2010 par M. François Baroin, ministre du Budget, des Comptes Publics, de la Fonction Publique et de la Réforme de l'Etat et M. Fernando Herrero, ministre des Finances du Costa Rica.

A ce jour, le Costa Rica n'a pas notifié l'accomplissement des procédures internes requises pour l'entrée en vigueur de l'accord.


* 1 En particulier la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, l'Autriche, Andorre, Monaco et le Liechtenstein.

* 2 Les pays de la « liste grise » sont ceux qui se sont engagés à respecter les standards internationaux en matière d'échange d'informations fiscales et à signer au moins 12 accords conformes à ces standards, sans avoir toutefois signé un tel nombre d'accords à ce jour.

* 3 Andorre, Anguilla, Antigua et Barbuda, Antilles néerlandaises, Bahamas, Belize, Bermudes, Brunei, Dominique, Gibraltar, Grenade, Guernesey, Jersey, Ile de Man, Iles Caïmans, Iles Cook, Iles Turques et Caïques, Iles Vierges Britanniques, Libéria, Liechtenstein, Saint-Kitts et Nevis, Saint-Marin, Saint-Vincent et les Grenadines, Sainte Lucie, Uruguay et Vanuatu.

* 4 Bahreïn, Belgique, Hong-Kong, Luxembourg, Malaisie, Singapour et Suisse.

* 5 Même si l'évaluation de la fraude et de l'évasion fiscales demeure, par nature, extrêmement difficile (cf. infra ).

* 6 Hors Panama.

* 7 Notamment les sociétés suivantes : Acteon (matériel dentaire, siège Amérique latine), Alcatel-Lucent (télécommunications, siège Amérique centrale), Centralys (alimentation animale, siège Amérique latine), Coface Services (notation d'entreprise et gestion de créances), Ipsos (études), Sanofi-Aventis (médicaments et vaccins), Sodexo (restauration), Solétanche Bachy (via sa filiale espagnole Rodio), Yoplait (accord avec la filiale locale du groupe mexicain Sigma Alimentos pour la production de yaourts). D'autres groupes sont représentés par des agents locaux (Air France-KLM, Alstom, AcelorMittal, Degrémont, Pont-à-Mousson, Sogreah).

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