IV. DISPOSITIFS DE PRÉVENTION DES RISQUES

1. La cartographie des zones à risques et la mobilisation des documents d'urbanisme

Pour éviter la répétition des catastrophes, ou du moins pour en limiter les conséquences dommageables sur les biens et sur les personnes, les pouvoirs publics peuvent définir des programmes de prévention, délimiter les zones exposées, encadrer l'utilisation des sols et établir un système d'incitations et de sanction pour décourager les comportements individuels à risque.

En France , l'État élabore et met en oeuvre des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPR) conformément à l'article L. 562-1 du code de l'environnement. Sont visés explicitement et donnent lieu à des plans distincts les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes et les cyclones. Les zones exposées sont délimitées en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque. Tout type de construction ou d'exploitation est interdit dans ces zones. Si une autorisation de construction, d'aménagement ou d'exploitation est accordée par dérogation, alors le PPR prescrit le cadre de réalisation, d'utilisation et d'exploitation.

Sont également délimitées des zones non directement exposées mais dans lesquelles la construction ou l'exploitation aggraverait ou provoquerait de nouveaux risques. Les PPR définissent les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises par les collectivités territoriales dans ces deux types de zones, ainsi que celles incombant aux particuliers. Ils conçoivent également les mesures appropriées pour traiter les constructions déjà existantes avant le PPR. A défaut de mise en conformité avec des mesures rendues obligatoires en raison de la gravité du risque, le préfet peut ordonner leur réalisation aux frais du propriétaire.

Afin de diminuer l'aléa moral et décourager toute construction en zone à risque, un lien est établi avec la couverture assurantielle des catastrophes naturelles. En vertu de l'article L. 125-6 du code des assurances, dans les terrains classés inconstructibles par un PPR, les assureurs ne sont plus soumis à l'obligation de couvrir les dommage s, sauf pour les biens existant avant la publication du PPR. Il n'existe pas non plus d'obligation pour l'assureur lorsque les biens ont été construits en violation des règles administratives tendant à prévenir les dommages des catastrophes naturelles en vigueur lors de leur mise en place.

En Belgique , l'État définit des zones à risque d'inondation en accord avec les régions. Comme dans le modèle français, il est possible pour l'assureur de refuser de couvrir des bâtiments construits en zone à haut risque 18 mois après la publication de l'arrêté de classement (art. 129 loi relative aux assurances du 4 avril 2014) ; dans ces zones, l'assureur peut aussi bien s'affranchir des plafonds de primes fixés par le bureau de tarification.

De même, le droit à l'indemnisation publique complémentaire par la caisse des calamités est fermé dans les zones à haut risque afin de décourager les constructions et d'assurer la stabilité financière du fonds en ne le grevant pas de risques graves et probables. La régionalisation de la caisse des calamités en 2014 visait à assurer que la même autorité soit en charge de la planification et du paiement. Ainsi la perspective de supporter une charge financière importante incite les régions à mener des politiques de prévention rigoureuses.

En revanche, en Espagne , si se retrouve bien le principe d'une planification et d'un classement des sols en prenant en compte les risques naturels, aucune corrélation avec le droit à la couverture assurantielle ou à l'indemnisation complémentaire n'a été relevée au cours de la recherche de la division de la législation comparée. Aux termes du décret législatif royal 7/2015 du 30 octobre 2015 refondant la loi relative aux usages du sol et à la réhabilitation urbaine, les sols ruraux classés comme préservés de l'urbanisation doivent inclure les terrains à risques naturels ; les autorités publiques compétentes en matière d'urbanisme doivent respecter un principe de prévention des risques naturels dans l'aménagement des usages du sol ; les documents de planification doivent inclure une carte des risques naturels dans le rapport de soutenabilité environnementale.

Une réglementation urbanistique complémentaire est prévue par les communautés autonomes , ce qui aboutit de fait à l' hétérogénéité des types de cartographie des risques naturels d'une autonomie à l'autre, donc à des divergences territoriales dans la prévention des risques, sans que ces divergences renvoient nécessairement à des différences objectives dans la nature et la gravité des risques encourus. Cette situation est considérée comme peu satisfaisante par le ministère du développement espagnol, qui a publié un guide méthodologique avec l'Association ( colegio oficial ) des géologues pour l'élaboration des cartes de risques naturels en Espagne. 29 ( * )

L' Allemagne a également mis en place des outils de prévention des risques d'inondations s'appuyant sur la réglementation de l'urbanisme. Le code de la construction intègre ainsi des dispositions de protection contre les crues. Son article 1a dispose, par exemple, que lors de l'établissement du plan d'occupation des sols , les intérêts de la protection côtière ou de la protection contre les crues et la prévention des inondations, en particulier éviter et diminuer les dommages résultants de la montée des eaux, sont à prendre en compte. En particulier, le plan d'occupation des sols peut présenter les plans d'eau, les ports et les surfaces prévues pour la gestion des eaux, à l'instar de celles qui sont gardées libres dans l'intérêt de la protection contre les inondations ou de la régulation de l'évacuation des eaux (article 5).

Les documents d'urbanisme peuvent indiquer (article 9) :

- les surfaces pour les installations de protection contre les crues et pour la régulation de l'évacuation des eaux ;

- les zones dans lesquelles certaines mesures constructives ou techniques doivent être prises par la construction d'installations structurelles, qui serviront à empêcher ou atténuer les dommages liés aux inondations, y compris les dommages découlant des précipitations intenses, ainsi que la nature de ces mesures ;

- les surfaces, sur un terrain constructible, devant être gardées libres pour l'infiltration naturelle des eaux des précipitations, afin de prévenir en particulier les dommages découlant des crues, y compris les dommages liés aux précipitations intenses.

Enfin, les communes allemandes exercent un droit de préemption pour l'achat de terrains dans les zones devant être laissées libres dans un but de protection préventive contre les crues (article 24).


La politique de gestion des risques naturels de la Bavière

Le Land de Bavière mène une politique active de gestion des risques en associant systématiquement les villes et les communes, les responsables d'infrastructures, les entreprises et les citoyens. En 2013, il a lancé le programme d'action 2020plus , afin de parvenir à une meilleure protection contre les crues et à une réduction des dommages potentiels, en articulant différentes mesures de suivi, d'évitement, de protection et de prévention.

Le suivi consiste notamment à analyser l'évènement qui vient de se produire, à identifier des changements de structure et à rétablir le plus vite possible les mesures de protection adéquate après une crue.

L'évitement vise à empêcher de nouveaux dommages potentiels dans les zones de danger et à réduire les risques. Des cartes précisant les zones à risque de crue sont établies par l'administration chargée de la gestion des eaux. La stratégie adoptée combine plusieurs aspects :

- éviter les fonctions sensibles dans les zones propices aux inondations par une renonciation générale à l'aménagement des surfaces inondables pour éviter tout nouveau risque ;

- adapter l'utilisation actuelle aux risques d'inondation, par exemple en revoyant l'étanchéité des fenêtres de cave ou en mettant en hauteur les câbles électriques ;

- et prendre des mesures dans le domaine de la construction, notamment en surélevant les édifices.

La protection comprend la protection technique contre les crues par la création d'installations artificielles visant à retenir, encadrer ou dévier les eaux ou par des systèmes de protection résilients. Elle vise aussi la rétention naturelle des sols, afin d'agir sur la formation et la concentration du débit, ainsi que des interventions sur le tracé des cours d'eau.

Enfin, la prévention passe notamment par l'information du public, autant sur les risques et dangers d'une inondation que sur une situation de crue en cours Cette information est du ressort de la ville ou de la commune.

(Site internet de l'office régional bavarois de l'environnement, https://www.lfu.bayern.de/wasser/hw_aktionsprogramm_2020_plus/index.htm )

En Suède , l' Autorité suédoise pour la protection civile (Myndigheten för samhällsskydd och beredskap - MSB), intervient en matière de prévention des catastrophes naturelles.

Pour les inondations , la MSB compile et tient à jour des cartes générales, afin de créer une base de données destinée au travail de prévention , mais qui auront également vocation à être utilisées pendant la planification du travail des services d'urgence, comme base pour la planification de l'utilisation des terres par les municipalités ou encore comme base pour l'analyse des risques et vulnérabilités et modèle d'anticipation lors des inondations. La MSB met également en place des groupes locaux, forums de collaboration et de coordination entre toutes les parties prenantes concernées par le bassin hydrographique d'une rivière, afin de permettre une amélioration de la connaissance des responsabilités, des rôles et des capacités des différents acteurs. Enfin, la MSB surveille l'évolution des crues printanières en rassemblant des détails sur les évacuations d'eaux par les autorités locales.

Pour les glissements de terrain , la MSB réalise une cartographie générale de la stabilité des terrains dans les zones construites . Cette carte montre les zones susceptibles de subir un glissement de terrain et celles qui ont besoin d'un relevé géotechnique détaillé pour déterminer la stabilité des sols, la plupart des municipalités ayant des conditions de sols incertaines ont accès à ce type d'étude cartographique.

En Suisse , il revient aux autorités cantonales d'identifier les parties de leur territoire qui sont menacées par des dangers naturels, conformément à l'article 6 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979. Elles réalisent des cartes indicatives, tiennent un registre des événements et des ouvrages de protection et appuient les communes dans la mise en oeuvre des mesures de prévention et de protection. Les communes réalisent des cartes de dangers naturels , avec l'appui du canton. Selon un modèle très classique, elles sont ensuite chargées de leur prise en compte dans les outils d'aménagement foncier tels que les plans d'affectation des sols et les permis de construire. Elles sont aussi chargées de la construction de mesures actives de protection, de la mise en place d'un service d'alerte et de l'établissement de plans d'intervention et de l'information de la population. 30 ( * )

Aux États-Unis , le programme national d'assurance inondation (NFIP) comporte une dimension de réduction des risques d'inondation. À ce titre, il demande aux communautés locales de collaborer avec le FEMA pour développer, adopter et tenir à jour des cartes de risque d'inondation (Flood Insurance Rate Maps) . La FEMA est en effet chargée d'entreprendre des études à l'échelle nationale afin de déterminer les zones les plus à risque d'inondations, de coulées de boue et d'érosion à la suite d'une inondation. Elle a également pour mission d'évaluer le risque d'inondation et de déterminer les zones d'assurance.

2. La réduction des risques par la réalisation de travaux publics et la mise aux normes des constructions

Dans les cas où le risque avéré est élevé, les États doivent parfois prévoir un durcissement des normes de construction, une relocalisation des populations exposées ou des travaux publics de protection de grande ampleur.

C'est aux Pays-Bas que l'accent est mis le plus fortement sur la prévention, par nécessité puisque 60 % du territoire et 9 millions de personnes sont exposées directemen t. La politique relative aux catastrophes naturelles est avant tout destinée à empêcher que ne surviennent des dommages grâce à la construction d'un réseau d'infrastructures de protection. L'indemnisation publique des personnes lésées est une réponse consciemment subsidiaire.

L'État néerlandais porte la responsabilité de protéger les citoyens contre les risques d'inondations catastrophiques ( waterveiligheid ) ; il s'agit d'une obligation de valeur constitutionnelle déduite des articles 20 al. 1 et 21 de la Constitution, qui demandent aux pouvoirs publics de veiller à la sécurité existentielle ( bestaanszekerheid ) de la population et à l'habitalité ( bewoonbaarheid ) du pays, ainsi qu'à la protection du cadre de vie ( bescherming van het leefmilieu ). Les wateringues ( waterschappen ), organes locaux de gestion de l'eau, existent depuis le Moyen-Âge et sont reconnues par la Constitution.

Des travaux d'endiguement majeurs ont été réalisés pour construire des ceintures concentriques de barrages très résistants et durables. L'ensemble de la stratégie de protection contre les inondations et de gestion de l'eau est intégrée dans le programme national Delta qui est renouvelé annuellement et piloté par un Commissaire d'État chargé de coordonner les niveaux d'intervention ( Rijkswaterstaat national, waterschappen régionales, municipalités). Un plan d'inspection des digues, barrages et retenues d'eau est lancé en 2017. L'évaluation de la solidité et de la durabilité des ouvrages actuels doit être achevée en 2023 afin qu'à cette date soient fixées des priorités de travaux et de nouvelles normes de construction, tenant compte en particulier des effets du changement climatique à l'horizon 2050. Un fonds Delta disposera de 1,2 milliards € par an, garantis au moins jusqu'en 2030, pour assurer le financement des opérations.

Selon les orientations générales des derniers programmes Delta, les digues et barrages seront rehaussés, élargis et consolidés. Les côtes seront renforcées par un apport de sable et le lit de certaines rivières sera élargi. Est également prévu un durcissement des normes de construction des bâtiments et des documents d'urbanisme et de planification. L'urbanisme devrait être renouvelé en prévoyant notamment le creusement dans les espaces publics de réservoirs, secs la plupart de l'année, mais destinés à absorber l'eau surabondante pour limiter l'effet de précipitations catastrophiques ou des crues.

En Nouvelle-Zélande , l' Earthquake Commission exerce, de manière subsidiaire, une mission de soutien à la recherche et à la formation en matière de catastrophes naturelles pour développer des modes adéquats de prévention et de réduction des risques. Surtout, les séismes dévastateurs de Canterbury ont conduit le Gouvernement à proposer une inflexion de la législation sur la construction.

Le Building Act de 2004 a été amendé en 2016. Les nouvelles dispositions sur les édifices sensibles au risque sismique ( earthquake-prone buildings ) sont entrées en vigueur le 1 er juillet 2017 . Une définition de la sensibilité au risque sismique est donnée à la section 122 du Building Act : sont visés les bâtiments qui auraient une propension à s'effondrer en causant des morts, des blessures ou des dommages matériels pendant ou à la suite d'un séisme modéré. Un séisme est considéré comme modéré s'il produit le niveau de secousses qui serait utilisé comme test pour concevoir un nouveau bâtiment sur le même site. Précisément, un bâtiment est reconnu comme sensible au risque sismique si sa résistance est inférieure à 34 % de la résistance prévue dans les normes de construction des nouveaux immeubles ( New Building Standard - NBS ).

Un recensement national des édifices sensibles doit être réalisé. Ils seront inscrits dans un registre public de la résistance sismique des immeubles. Le ministère de l'économie doit élaborer une méthodologie générale et sur cette base, les autorités locales disposeront de 5 ans à 15 ans selon leur degré d'exposition au risque pour identifier tous les édifices sensibles. La priorité est donnée à l'identification des infrastructures-clefs fragiles : écoles, hôpitaux, structures d'urgence. Le propriétaire d'un édifice classé comme sensible au risque sismique devra produire dans les 12 mois suivants un rapport d'évaluation réalisé par des ingénieurs experts. Sur cette base, le renforcement adéquat ou la démolition de l'immeuble devra être menée dans un horizon de 15 à 35 ans selon les zones.

En France , les pouvoirs publics peuvent recourir à l' expropriation dans les situations extrêmes. Aux termes de l'article L. 561-1 code de l'environnement, « lorsqu'un risque prévisible de mouvements de terrain, ou d'affaissements de terrain dus à une cavité souterraine ou à une marnière, d'avalanches, de crues torrentielles ou à montée rapide ou de submersion marine menace gravement des vies humaines, l'État peut déclarer d'utilité publique l'expropriation par lui-même, les communes ou leurs groupements, des biens exposés à ce risque [...]. »

En outre, le Fonds de prévention des risques naturels majeurs , prévu l'article L.561-3 du même code, dit « Fonds Barnier », indemnise les propriétaires expropriés pour risque naturel, finance des études et des travaux d'aménagement et de prévention dont les collectivités territoriales sont maîtres d'ouvrage dans les communes couvertes par un PPR, et peut sur décision de l'État contribuer au financement de mesures de prévention sur des biens couverts par une assurance contre les catastrophes naturelles. Le fonds est alimenté par prélèvement sur produit des primes additionnelles de cette assurance dans la limite de 12% du produit. Les versements sont effectués par les assureurs. La gestion du fonds est confiée à la Caisse centrale de réassurance (CCR). Par ce biais, le régime de prévention et le mécanisme assurantiel sont à nouveau liés.

Aux États-Unis , la FEMA soutient par des aides spécifiques l'atténuation des risques pour les actions entreprises pour prévenir ou réduire les risques à long terme des éléments naturels contre la vie et la propriété. Les primes collectées à l'occasion de la vente d'assurances inondation par le NFIP servent à financer un programme de bourse d'aide à l'atténuation des inondations visant à réduire le risque général d'inondation. Peuvent prétendre à un financement des activités telles que l'achat de terrains pour en faire des plaines inondables, la stabilisation des sols, la surélévation des structures existantes, la construction d'abris .

En outre, le NFIP prévoit que les autorités locales compétentes adoptent des normes minimales de construction dans les zones inondables . À ce titre, les communautés doivent exiger des permis pour tout projet dans une zone à risque élevé d'inondation, exiger une élévation du sol le plus bas dans tous les nouvelles constructions résidentielles situées dans une zone à risque élevé, restreindre les projets dans les canaux de dérivation réglementaires pour empêcher l'augmentation du risque d'inondation et exiger certains matériaux et certaines méthodes de construction minimisant les dégâts d'inondations à l'avenir.

Par ailleurs, les États fédérés mènent une politique propre de prévention. Ainsi, en Californie , les propriétaires et locataires sont encouragés à réduire leurs risques de dommages en cas de tremblement de terre en veillant à la mise en conformité sismique des immeubles et en se préparant par l'amélioration de l'attache de la maison aux fondations et le renforcement des murs en mauvais état, en sanglant les chauffe-eaux aux murs ou encore en sécurisant les objets fragiles sur les étagères.

En Italie , la prévention des risques 31 ( * ) ne semble pas passer essentiellement par les documents d'urbanisme ( strumenti urbanistici ) ou la réglementation des usages du sol ( consumo del suolo ), même si les régions italiennes sont compétentes pour élaborer des programmes de prévision et de prévention des risques sur la base des lignes directrices nationales, qui s'appuient sur les agences scientifiques publiques. En revanche, dans le cadre du grand plan national Casa Itali a annoncé le 25 août 2016, la mise aux normes sismiques des immeubles d'habitation et des bâtiments publics sera facilitée. Des déductions fiscales sont prévues en loi de finances.

En Suède , le gouvernement octroie 40 millions de couronnes par an dans les zones bâties pour des mesures de prévention. Les municipalités chargées de leur mise en oeuvre peuvent demander à bénéficier d'une subvention. Le document émis par l'Autorité suédoise pour la protection civile MSB sur la réduction des risques de catastrophe en matière d'aléas naturels précise que les mesures de prévention des inondations peuvent inclure la réalisation de digues, d'équipements de pompage ou de dispositifs d'arrêt de la fourniture d'eau et d'évacuation des eaux usées. La prévention des glissements de terrain peut nécessiter des mesures de stabilisation des pentes.

En Suisse , la Confédération et les cantons collaborent à la réalisation des travaux de prévention. La loi fédérale sur l'aménagement des cours d'eau du 21 juin 1991 confie aux cantons la protection contre les crues 32 ( * ) (art. 2). Cette tâche passe en priorité par des mesures d'entretien et de planification. Si cela se révèle insuffisant, les cantons prennent les mesures correctrices qui s'imposent telles que les endiguements, la réalisation de dépotoirs à alluvions et de bassins de rétention. Ils prennent également toute autre mesure propre à empêcher les mouvements de terrain (art. 3). La Confédération accorde parallèlement des fonds pour la construction, la remise en état et le remplacement d'ouvrages et d'installations de protection, l'aménagement et l'exploitation de stations de mesures ainsi que la mise sur pied de services d'alerte, pour assurer la sécurité des agglomérations et des voies de communication (art.6).

Au Royaume-Uni , l'accord conclu entre le gouvernement britannique et les assureurs en 2000 et reconduit en 2008 prévoyait, en échange de la fourniture au plus grand nombre d'une assurance, la mise en place par le Gouvernement de mesures visant à prévenir les crues ou, du moins, à réduire le risque 33 ( * ) . Le gouvernement s'est engagé en 2015 à investir 2,5 milliards de livres (2,82 milliards €) dans les systèmes de protection contre les inondations jusqu'en 2020 , estimant que cet investissement devrait permettre de protéger plus de 300 000 propriétés et de réduire le risque d'inondation de 5 %.

Le ministère de l'environnement, de l'alimentation et des affaires rurales a la responsabilité de la politique de prévention au plan national. Il fournit sur dossier un financement aux autorités de gestion du risque d'inondation et d'érosion côtière. Sont notamment éligibles l'élaboration de stratégies de réduction des risques, la réalisation de projets de construction de tunnels, de murs, de digues, d'écluses ou des stations de pompage , ainsi que les études préalables.

L'agence de l'environnement est responsable de la supervision stratégique de la gestion de toutes les sources d'inondation et d'érosion côtière. À ce titre, elle détermine l'orientation de la gestion des risques par des plans stratégiques, elle fournit des données et des conseils pour renseigner les décideurs gouvernementaux et elle fournit un cadre de soutien à la mise en oeuvre au niveau local. Elle joue enfin un rôle opérationnel de gestion du risque d'inondation dans les rivières principales, les bassins, les estuaires et la mer.

À l'échelon territorial, les autorités locales responsables pour les inondations développent, poursuivent et appliquent la stratégie pour la gestion locale des risques d'inondation de leur zone. Elles tiennent également à jour un registre des biens possédant le risque d'être inondés. Les comités régionaux pour les inondations et les côtes s'assurent que des plans cohérents sont en place pour identifier, communiquer et gérer les risques de crue et d'érosion côtière à travers les bassins versants et les berges. Les conseils de district interviennent dans la gestion de la planification des risques locaux d'inondation et peuvent réaliser des travaux sur les petits cours d'eau.

L'évaluation critique par la Chambre des Communes
de la politique britannique de prévention des risques d'inondation

Un rapport de la Chambre des communes du 26 octobre 2016 sur la prévention des inondations futures pointe les insuffisances du financement du schéma de prévention, malgré l'augmentation des crédits, et la fragmentation des structures en charge de la gestion du risque.

Il propose des pistes d'amélioration dans le cadre d'un nouveau modèle de gouvernance mettant l'action sur une action coordonnée et efficace grâce à l'établissement d'un nouveau commissaire pour les inondations nationales pour l'Angleterre, responsable pour la fourniture de résultats en matière de réduction des risques d'inondation stratégique et de long-terme.

Il recommande le lancement par le ministère de l'environnement, de l'alimentation et des affaires rurales d'une vaste étude sur l'effectivité des approches naturelles de gestion du risque d'inondations telles que l'installation de barrages à fuites, la plantation d'arbres et l'amélioration de la gestion des sols. Il met en avant la possibilité d'utiliser par endroit des terres agricoles pour stocker les eaux de crues.

Il préconise d'augmenter la résilience en partant du principe qu'il est impossible de protéger toutes les propriétés des inondations à chaque fois. Il revient au Gouvernement d'améliorer l'aide aux communautés et aux particuliers pour gérer et surmonter les inondations en :

- rendant redevable des coûts qu'elles engendrent les promoteurs immobiliers qui ne respectent pas les exigences d'urbanisme ;

- décernant aux entreprises du secteur de l'eau le statut de consultant officiel lors des demandes de permis ;

- amendant les normes de construction afin de rendre contraignante l'utilisation de matériaux résistants à l'eau dans les nouvelles constructions

- développant au niveau gouvernemental un schéma d'aide pour soutenir les petites entreprises incapable de souscrire une assurance abordable pour installer des systèmes de résilience.

Il suggère enfin de simplifier la communication au grand public sur les risques d'inondation.

(House of Commons, Future Flood Prevention, HC115) 34 ( * )


* 29 La Cruz Mera, « Planificación urbana y prevención des riesgos - El papel de la legislación y los sistemas de informacion », Ministerio de Fomento, mars 2015.

* 30 Cf. le site du canton de Vaud http://www.vd.ch/themes/territoire/dangers-naturels/

* 31 Au sens de la loi italienne sur la protection civile de 1992, la prévention a pour but d'éviter ou de réduire au minimum la possibilité que se réalisent des dommages. Elle se traduit par des actions d'alerte, de planification de l`urgence, de formation, de diffusion de la connaissance de la protection civile, ainsi que par l'information de la population, l'application des normes techniques et la réalisation d'exercices (art. 2 L.225/1992).

* 32 De même, la loi fédérale sur les forêts du 4 octobre 1991 précise (art.19) que « là où la protection de la population ou des biens d'une valeur notable l'exige, les cantons doivent assurer la sécurité des zones d'avalanches, de glissements de terrain, d'érosion et de chutes de pierres et veiller à l'endiguement forestier des torrents. Des méthodes aussi respectueuses que possible de la nature doivent être utilisées ».

* 33 https://www.abi.org.uk/globalassets/sitecore/files/documents/publications/public/migrated/flooding/statement-of-principles-england.pdf

* 34 https://publications.parliament.uk/pa/cm201617/cmselect/cmenvfru/115/115.pdf

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