PAYS-BAS

Les Pays-Bas sont souvent pris pour exemple en ce qui concerne la qualité de l'utilisation de leur espace, l'équilibre dans la répartition des commerces en général et la permanence d'un commerce de proximité en particulier.

Cette situation tient au fait que jusqu'au début des années 1990 les communes y ont mis en oeuvre une politique active d'achat amiable qui leur a permis d'exercer un « monopole de fait sur les acquisitions de terrain brut à aménager » 1 ( * ) . Au surplus, la construction de surfaces commerciales était régie, à cette époque, par des dispositions restrictives adoptées niveau national.

La réglementation concernait :

- d'une part, à la périphérie des villes, la vente au détail des articles volumineux (voitures, bateaux, caravanes, matériaux de construction et objets d'ameublement) qui faisait l'objet d'un zonage ;

- et, d'autre part, le commerce de détail à grande échelle (grande distribution) dont le développement était fortement limité puisqu'il ne pouvait s'étendre en dehors des zones existantes.

1. La nécessité de définir un nouveau modèle

Les possibilités d'achat ouvertes aux collectivités étant, au début des années 2000, devenues plus limitées du fait de la hausse des prix du foncier, les pouvoirs publics ont conçu un nouveau dispositif. Celui-ci était d'autant plus nécessaire qu'une pression en faveur de la construction de commerces de grande dimension se faisait sentir. Elle était notamment liée la diversification des modes de vente destinée à attirer la clientèle et à l'élargissement des horaires d'ouverture des magasins, y compris le weekend.

Le gouvernement néerlandais a, en conséquence, préparé pendant plusieurs années un nouveau texte relatif à l'aménagement de l'espace des Pays-Bas, la note intitulée « Espace pour le développement », qui définit les principes applicables à l'ensemble du pays. Ce document a été approuvé par les deux chambres du Parlement, respectivement les 17 mai 2005 et 17 janvier 2006. Il prévoit une décentralisation du régime de l'implantation des entreprises, en général et des surfaces commerciales, en particulier. À ce titre il ne fait plus référence à la distinction traditionnelle entre vente au détail des articles volumineux et commerce de détail (grande distribution).

Ce transfert de compétences s'effectue au bénéfice des 12 provinces, équivalent des départements, ainsi que des communes et des communautés d'agglomérations qui existent dans ce pays de 41 526 km 2 et de 16,44 millions d'habitants 2 ( * ) . Les communes peuvent, en effet, influer sur la répartition des commerces de grande taille par le biais des documents d'urbanisme qu'elles élaborent.

En vertu du principe « décentraliser ce que l'on peut, centraliser ce que l'on doit », il n'existe donc, aux Pays-Bas, hormis la note « Espace pour le développement » et les principes généraux qu'elle pose, plus de législation nationale analogue à celle qui régit l'urbanisme commercial en France.

2. Contenu de la note « Espace pour le développement » de 2006

Préparée par le Gouvernement et approuvée par le Parlement, la note « Espace pour le développement » publiée en 2006 a pour premier objectif, de favoriser la bonne implantation de l'ensemble des entreprises et des équipements et non pas seulement celle des commerces de détail et de la grande distribution.

En matière d'utilisation de l'espace à des fins commerciales, elle tend à faire en sorte que les nouvelles implantations de commerce de détail ne s'effectuent pas au détriment des structures commerciales existantes dans les centres commerciaux et les centre villes.

Elle repose sur une politique globale qui ne distingue plus entre les types de commerces et qui, selon son texte même, doit assurer qu'il n'existe pas de grands complexes de distribution aux abords des villes.

Elle prévoit que la politique de localisation des commerces de grande distribution relève des provinces et, à la demande des communes, des communautés de communes qui, peuvent être constituées, en vertu de la loi sur les compétences partagées des communes, par les organes délibérants des provinces afin de traiter des problèmes concernant :

- l'harmonisation spatiale ;

- le logement ;

- l'implantation des entreprises ;

- la circulation et les transports ;

- les espaces récréatifs ;

- et les espaces verts urbains.

Les objectifs de cette politique globale sont de renforcer :

- les possibilités de développement économique, à savoir : l'offre d'implantations suffisantes et adaptées pour l'activité et les équipements ;

- l'usage optimal de toutes les possibilités de transport de personnes et des biens par la route, le rail et l'eau ;

- et le caractère vivable des espaces : qualité, caractère varié, forme architecturale et insertion paysagère des implantations pour toutes les activités urbaines, usage soigneux de l'espace, maillage fin des commerces de détail, mélange fonctionnel et qualité du cadre de vie (sécurité, émissions et bruit).

Pour son application, les provinces établissent tout d'abord des directives qui sont approuvées par le Gouvernement. Puis la politique de localisation des activités doit, toujours en vertu de la même note, garantir l'existence de nouvelles entreprises et équipements qui :

- au point de vue de la sécurité, des nuisances et de l'effet sur le développement du trafic, peuvent s'intégrer dans ou à proximité des espaces d'habitation ;

- lorsqu'ils entraînent des flux de marchandises importants et / ou ont des effets sur la circulation, soient bien raccordés à la circulation et aux liaisons multimodales ;

- demeurent compatibles avec la présence des bureaux, des commerce de détail, de parcs d'attraction et d'autres équipement consacrés au temps libre.

3. Un système décentralisé

Les compétences en matière de gestion de l'espace sont désormais dévolues aux provinces, équivalent des départements, et aux communes dans le cadre constitué :

- pour les provinces et les communautés d'agglomérations par la note « Espace pour le développement » publiée en 2006 et les directives qu'elles établissent ;

- et, pour les communes, par le décret du 21 avril 2008 pris pour l'application de la loi sur l'aménagement de l'espace qui prévoit que l'équivalent du plan local d'urbanisme (dénommé « plan de destination » ou bestemmingsplan ) peut, en vue d'un bon aménagement de l'espace, fixer des règles concernant le commerce de détail et celui des bureaux.

Les dispositions du même décret précisent en outre que le conseil municipal peut établir, à côté du plan local d'urbanisme, un « plan de réalisation » qui détermine le programme de construction et permet de répartir les coûts engagés sur les différentes catégories de terrains lotis. Ce plan de construction concerne notamment la transformation d'un ou plusieurs immeubles formant un ensemble qui étai(en)t utilisé(s) ou aménagé(s) pour d'autres fins en un commerce de détail, de bureau ou de restauration si la surface consacrée aux nouvelles fonctions dépasse 1 000 m 2 .

Les exigences posées par les provinces et les communes doivent être motivées par les considérations tenant à la préservation ou à l'amélioration de la gestion de l'espace. Elles ne peuvent se fonder sur des arguments purement liés à la limitation de la concurrence dans le secteur de la grande distribution.

Les documents antérieurement en vigueur au niveau communal s'appliquent jusqu'à la publication de nouvelles réglementations. Du reste, conformément à une tradition ancienne, les communes peuvent aussi continuer à acheter des terrains et conditionner leur dévolution au commerce ou aux entreprises à des conditions qu'elles déterminent dans le cadre des relations bilatérales qu'elles entretiennent avec les opérateurs commerciaux.

En pratique l'équilibre des compétences est fonction de la politique de chaque province. Ainsi, la province de Sud-Hollande dont la population s'élève à 3,481 millions d'habitants sur un territoire de 3 418 km 2 et dont les principales agglomérations sont La Haye et Rotterdam a décidé, dans un document de programmation approuvé en 2007, qu'elle assumerait la responsabilité de l'autorisation des nouvelles structures de distribution de plus de 2 000 m 2 , tandis que les communes situées dans son ressort seraient compétentes pour les surfaces inférieures à ce seuil.

Si elle ne figure plus dans la réglementation nationale, la division traditionnelle entre la vente au détail des articles volumineux et le commerce de détail à grande échelle n'a pas été abandonnée par toutes les communes. La commune d'Amsterdam a, par exemple, publié en juillet 2007 en complément d'un premier document applicable au commerce de détail, un second texte d'orientation, doté d'une valeur contraignante au plan urbanistique, intitulé Le commerce de détail des objets volumineux, en équilibre 2006-2010, maillage fin et libéralisation partielle . Il tend à gérer les conséquences du transfert de compétences survenu en 2006 et de la libéralisation des conditions de localisation des entreprises, des équipements et des commerces. Elle y souligne notamment que pour l'application des règles relatives au commerce d'objets volumineux, la notion de « périphérie » vise, sur son territoire, les zones situées hors des centres villes mais à l'intérieur des zones urbanisées.

RÈGLES D'URBANISME COMMERCIAL


* 1 Roelof Verhage « Un nouvel outil de politique foncière » dans Études foncières, n° 128, juillet-août 2007, p.  22.

* 2 À titre de comparaison, la superficie du plus grand des départements français, la Gironde, est de 10 000 km 2 pour une population de 1 376 000 habitants.

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