Action publique territoriale

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

Discussion générale

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique .  - C'est avec d'autant plus de plaisir que je m'adresse à vous qu'à travers vous, je sais que c'est à la France des territoires que je m'adresse, et ainsi à l'ensemble des Français.

Le travail de votre commission des lois a été considérable. Autant je puis regretter que le texte ait été découpé, autant, au vu du temps passé par les sénateurs sur ce premier texte, je mesure qu'il eût été humainement impossible de procéder en une seule fois.

Je veux resituer ce texte dans le cadre des attentes de nos concitoyens. Contrairement à ce qui s'est dit, l'enjeu n'en est pas de donner un champ clos aux rivalités entre associations d'élus. Les compétences locales ne sont pas des trophées et nos débats ne procèdent pas dans le rapport de forces. Il s'agit ici de mobiliser les collectivités territoriales. Les élus sont engagés plus que jamais auprès de chaque Français, chaque entrepreneur, chaque agriculteur, pour que chacun ait ses chances et voie des perspectives de redressement. Parce que la France est en crise, nous avons plus que jamais besoin de ce réseau d'élus locaux. Les discours de défiance à leur endroit sont inacceptables. Le président de la République a voulu les mobiliser face à la gravité de la crise et aux ravages du chômage, dès le début de sa mandature, pour le redressement du pays. Pas de succès, dans la bataille de l'emploi, sans eux.

Ce texte rappelle la nécessité absolue de cette mobilisation, magnifiquement illustrée par les états généraux de la démocratie locale. Chaque territoire de France est facteur de richesses et peut contribuer à la croissance. Aucun ne doit se sentir oublié. Ce serait au prix de la confiance. En 1981, Gaston Defferre disait : « Ouvrons les yeux, regardons autour de nous, en quelques années, tout a changé ! ». Trente ans après, la vie de nos concitoyens a encore changé. Les Français parcourent 50 kilomètres par jour en moyenne pour se rendre à leur travail. Il faut être d'autant plus attentif au transport et au logement. Notre démographie est une des plus dynamiques d'Europe et les femmes sont au travail : il faut les aider dans l'accueil des enfants. Les collectivités sont confrontées au défi du développement. Et le lien social doit être préservé.

Le président l'a dit. Il faut faire prendre de l'avance à la France, et créer, sereinement, un nouveau modèle français.

Depuis trente ans, les collectivités territoriales ont tenu leur rôle et assumé leurs responsabilités. Elles conduisent nombre de réformes avec réactivité, souplesse, adaptation. La décentralisation a d'abord, avec les transferts, engagé beaucoup de constructions d'équipements. Il ne s'agit plus de cela aujourd'hui, ni de transferts de personnel, mais de mettre en cohérence les missions de l'État avec celles des collectivités territoriales, garantir que la réforme avance sur ses deux jambes.

L'action publique est décriée alors qu'elle n'a jamais été aussi utile. C'est un facteur d'attractivité, de compétitivité, autant que de justice.

M. François Marc.  - Très bien !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Le dialogue entre État et collectivités territoriales doit être plus clair. La question est celle du sens donné à la puissance publique. Il ne s'agit pas de dénoncer des doublons, mais de s'engager dans un partage des rôles, avec un État recentré sur ses missions fondamentales, fort, déterminé, engagé sur le territoire et en Europe.

Nombre de politiques publiques marquantes ont commencé par des expérimentations, chères à Jean-Pierre Raffarin. La qualité de vie doit beaucoup à la clause de compétence générale. Depuis trente ans, l'article 72 de notre Constitution forme, avec le code général des collectivités territoriales, le cadre d'une action plurielle des collectivités territoriales au service de la population. C'est par une action commune avec l'État que nous serons à la hauteur des attentes des Français.

Le Gouvernement a voulu faire le bilan de la décentralisation, et en a tiré des principes, qui président à ce texte. Notre pays, au plan territorial, ne progresse durablement que dans l'équilibre, a dit Edmond Hervé dans le rapport écrit avec Mme Gourault...

M. Jean-Claude Gaudin.  - Très bien.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - ... qui porte une analyse pertinente sur le passé. J'ai entendu les doutes qui vous tourmentent, et souhaite y répondre ici, avec Mme Escoffier. Je puis vous assurer qu'il n'y a dans ce texte aucune velléité centralisatrice. Il s'est agi de clarifier et simplifier les compétences, réaffirmer le principe de libre administration des collectivités territoriales et de non-tutelle d'une collectivité sur une autre, dans le respect du principe de subsidiarité et de l'expérimentation. Le rapport sénatorial prône aussi le renforcement du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales.

Votre commission des lois a sensiblement modifié l'économie de ce projet de loi. C'est le jeu démocratique. Les conférences des exécutifs ? Nous en avons repris l'idée de votre rapport, avec les conférences territoriales d'action publique. De même, avec le pacte de gouvernance territoriale que nous proposons. Votre président lui-même l'avait évoqué dans la Drôme le 15 septembre dernier, lors d'une réunion publique. Nous vous proposerons donc d'y revenir, par amendement qui ne reprend pas exactement notre texte initial ; j'espère que nous parviendrons à un accord.

Autre proposition que faisait votre délégation : moderniser le département. C'est ainsi que nous lui confions le rôle de chef de file dans les domaines où il est le plus compétent.

Moderniser la fiscalité locale, rechercher de nouvelles ressources, réformer la péréquation tant verticale qu'horizontale. Tout ce travail est engagé, et nous entendons pouvoir avancer dès le projet de loi de finances 2014.

M. François Marc.  - Très bien !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Vous vouliez aussi valoriser les atouts de la coopération entre collectivités territoriales, renforcer les fonctions de contrôle des chambres régionales des comptes. Nous vous suivrons. Comme sur l'attention à porter aux fonctionnaires, et je déposerai le 13 juillet un texte sur la fonction publique territoriale, qui a un rôle essentiel à jouer aux côtés de nos élus.

Reprendre à notre compte l'initiative parlementaire ? Je vous suis, les deux textes sur l'évaluation des normes et l'exercice des mandats locaux seront inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 18 juillet. (On s'en félicite sur le banc des commissions)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Excellente nouvelle ! Très bien, monsieur le président du Sénat !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Il l'a annoncé, je le confirme.

L'unité de la République est au coeur de nos préoccupations et ce projet de loi ne la met pas à mal. Mais l'unité n'est pas l'uniformité. Les spécificités des territoires doivent être prises en compte. Alors que la France doit se redresser, il faut tirer parti du dynamisme farouche de nos élus locaux pour trouver des solutions. C'est pourquoi nous confirmons la région dans son rôle économique et de formation professionnelle, où nous la faisons chef de file.

L'école de la République est de grande qualité, mais il est trop fréquent que l'orientation des enfants se fasse en fonction de la géographie plutôt que de leur choix, tant l'éloignement de certaines formations est pénalisant. Nous devons veiller à mettre l'orientation en cohérence avec la carte des formations, afin que chaque jeune ait vraiment droit à son projet personnel. Comme certains quartiers, des communes se sentent abandonnées, éloignées. Ce sentiment d'abandon est inquiétant. Nous y percevons la même demande de service public, de présence de la République. Il faut conjuguer les efforts de tous les échelons de collectivité. La région ne peut se charger de l'aménagement de chaque commune de France ; il faut que le département y mette la main, en liaison avec elle.

Avec un chef de filat récrit, des maires confortés, comment ne pas adhérer aux conférences territoriales de l'action publique ? On ne peut réagir de la même façon sur tous les territoires, marqués par des réalités géographiques et historiques différentes. Il ne s'agit pas d'imposer une organisation des services publics à la carte, mais de prendre en compte cette diversité. Faute de quoi, à chaque changement, à chaque crise, il faudra changer la loi. C'est pourquoi nous permettrons aux élus de s'organiser entre eux quant aux grandes compétences, selon les territoires. Je fais confiance aux élus de France pour trouver des accords, comme cela se fait déjà dans certaines régions. Pacte de gouvernance, pacte de confiance : je souhaite que nous puissions en discuter.

J'en viens aux villes. Il en est, en France, de grandes, qui n'ont cependant pas le monopole de l'action en faveur du redressement, mais la partagent avec chaque territoire de France. Reconnaître les métropoles est important.

L'Île-de-France est une métropole monde. La métropole Grand Paris a besoin de structurer davantage. L'association des élus Paris Métropole a travaillé des mois sur ce sujet...

M. Philippe Dallier.  - Pour quoi faire ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - ... et je rends hommage au maire de Sceaux qui porte ce projet.

M. Gérard Larcher.  - Nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde !

M. Philippe Dallier.  - En effet, nous ne sommes pas d'accord.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Je parle de la présidence. Nous avons partagé le constat de ces élus. (Mouvements divers à droite) Je sens que le sujet prête à polémique... (Rires sur les mêmes bancs) Il nous semble important de porter le chantier de la coopération intercommunale, en faveur des citoyens. Nous nous proposerons d'y travailler ensemble. La région Île-de-France joue déjà un rôle. L'inquiétude est la suivante : si Paris Métropole a des compétences en matière de logement, quid de la grande couronne ? Sur le fondement des contrats de développement territorial, la région doit garder compétence mais une autorité de la zone dense doit pouvoir se charger de certains programmes. Quand on parle d'autorité opérationnelle de logement, je n'ai pas le sentiment que l'on remette en cause la région.

M. Gérard Larcher.  - Attendons.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Le Grand Paris Express doit être mené à bien, nous nous y sommes engagés.

Deuxième grand chantier, celui de la métropole lyonnaise. Je salue l'accord trouvé entre les élus de Lyon et du département. Il faudra régler la question des transferts financiers, mais la dynamique est retrouvée sur l'agglomération lyonnaise.

Plus complexe est le cas d'Aix-Marseille-Provence, grande porte méditerranéenne dans l'Histoire, qui a du mal, aujourd'hui, à le rester, alors que la France et l'Europe en ont tant besoin. Le port, Fos, l'aéroport, Iter, Ariane : l'État est au rendez-vous. Mais pour les transports, de multiples organisations sont en charge. Même problème pour le logement. Il faut coordonner l'action en matière de transport, de logement, d'éducation et de recherche. L'université d'Aix-Marseille a un rôle majeur à jouer dans le bassin méditerranéen.

Nous nous accordons sur le diagnostic. Alors, comment procéder ? Pour le Gouvernement, ces compétences peuvent être gérées par un seul EPCI, la métropole Aix-Marseille-Provence. L'État a engagé une mission de préfiguration avec les élus et la société civile. Il faudra prendre une décision. Je comprends les réticences des maires mais je veux leur dire qu'en créant des conseils territoriaux à l'image de ce qui se fera dans le Grand Lyon, on retrouvera les compétences des organismes intercommunaux d'aujourd'hui : les maires auront droit à la parole. Ils seront maîtres de leur espace. La question d'un Plan local d'urbanisme (PLU) sur la grande aire métropolitaine a fait peur. À chacun, plutôt, d'écrire son plan local d'urbanisme, afin de les réunir ensuite dans un grand schéma d'aménagement. (M. Jean-Claude Gaudin se montre intéressé) Les populations en ont besoin, qui souffrent d'un vrai problème de mobilité. L'État sera présent aux côtés d'Aix-Marseille-Provence pour qu'elle devienne la grande métropole,...

M. René Vandierendonck.  - Très bien !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - ... le flambeau méditerranéen dont nous avons besoin. De deux choses l'une, soit on n'avance pas et la région restera en retrait des grandes capitales méditerranéennes, soit on avance comme à Lyon et la métropole marseillaise trouvera son rang.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Ils sont très riches.

M. Jean-Noël Guérini.  - Eh oui.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Notre projet de loi améliorera aussi l'intégration intercommunale, essentielle à la clarification de notre paysage institutionnel. Les articles de presse, les déclarations médiatiques qu'ont suscités ce texte ont été choquants. Je tiens à rappeler que plus de 50 % de l'action publique sont portés par les territoires. L'action locale n'est pas gabegique, comme on l'a entendu dire. Les intercommunalités ont pris d'importantes responsabilités, elles ont créé des services : elles ont eu besoin de fonctionnaires pour les assumer. Quant à nos élus, dont plus de 400 000 sont bénévoles, ils sont prêts à relever tous les défis : celui de la compétitivité hors coûts tout comme celui de l'écologie.

Des craintes se sont exprimées : la démocratie ne risque-t-elle pas, avec ce texte, de s'éloigner de la proximité ? Je le conteste. La France a bien fonctionné grâce à son polycentrisme ; il ne s'agit pas de le remettre en cause. Mais les compétences qui ont été transmises représentent une très lourde charge ; elles appellent un accompagnement. Nous entendons travailler à la recherche de compromis, pour une clarification de l'action publique porteuse des valeurs républicaines. Si l'action publique est une, nous n'oublions pas qu'elle est portée par les élus des territoires, ainsi que par les citoyens. (Applaudissements à gauche ; Mme Jacqueline Gourault applaudit également)

M. René Vandierendonck, rapporteur de la commission des lois .  - Ce projet de loi était attendu et redouté. Redouté parce qu'il fallait savoir s'il serait bien un texte de décentralisation ; attendu, parce qu'il devait être l'occasion, monsieur le président du Sénat, de donner une suite positive aux engagements pris en clôture des états généraux par le président de la République, afin de répondre aux attente des élus sur la simplification des normes et le problème lancinant du statut de l'élu local. Vous avez donné des réponses, madame la ministre, je vous en donne acte.

Je commencerai par l'organisation de l'action publique territoriale. Est-ce ce que nous attendions ici ? Non. (On renchérit à droite) L'important, c'est de conserver un ordonnancement complet de la structure territoriale. M. Raffarin, président de la mission d'information sur la décentralisation disait qu'il existe une pensée du Sénat sur le sujet. La commission des lois du Sénat a eu pour seul guide de retrouver ce corps de doctrine partagé, qui prévalait dès la création à Nice de la première métropole. Oui, il faut « faire confiance à l'intelligence territoriale ». Tous ceux qui étaient là en 2009 sont encore là aujourd'hui. De quoi aider un jeune sénateur ballotté sur le Paris-Roubaix de la décentralisation, où les secteurs pavés ne manquent pas... (Rires)

Nous avons toute la discussion pour balayer le terrain. Le Sénat aura toute latitude, nous a dit Mme Lebranchu, pour amender ce texte (exclamations et rires à droite), mais ne faisons pas porter au Gouvernement la nécessité du chef de file, la composition de la conférence territoriale ou la nécessité d'organiser l'action publique de manière conventionnelle sur un strict plan d'égalité entre les parties.

Premier secteur pavé, le problème du chef de file, « instrument d'ordre et de mise en cohérence » selon la Cour des comptes, pour « une meilleure coopération entre les collectivités territoriales ». La commission des lois a constaté que cette notion était encore mal comprise ; elle dit de manière non équivoque que le chef de file organise et non détermine les modalités de l'action commune ; il ne dessaisit personne de ses compétences.

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis, et M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Autre secteur pavé : le pacte de gouvernance territoriale. La décentralisation est vecteur d'émancipation, elle marque la fin de la tutelle pour les « incapables majeurs »... La plupart d'entre nous ont pris ce pacte comme un système de bonus-malus pour passer de la tutelle à la curatelle. (Mlle Sophie Joissains applaudit) Respectons le principe de libre organisation. La conférence territoriale peut choisir d'organiser, par convention, une compétence. La commission des lois a réservé hier soir la question du tourisme...

M. Jean-Claude Gaudin.  - Laissez-la aux communes !

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - ... comme le sport et la culture l'avaient été en 2010.

Sur les métropoles, fions-nous à une approche fonctionnelle de leur rôle, en regard du projet de territoire qui ne répond pas nécessairement aux frontières de l'EPCI. 80 000 habitants du Nord-Pas-de-Calais habitent en dehors du territoire de la métropole et y travaillent pourtant. Cela suppose un certain degré d'intégration des compétences et des fonctions, une certaine taille aussi. Je suis le premier à penser que c'est dans l'intégration de l'innovation, de la recherche, de l'enseignement supérieur que se trouvent les emplois de demain. Mais l'exigence de compétitivité doit se conjuguer avec l'exigence de cohésion sociale. Dans la rue, à Roubaix, on ne m'interpelle pas sur la métropole, mais sur les retombées sociales de la croissance qu'elle permet, une métropole qui doit être inclusive, comme on dit à Bruxelles... On comprend à cet égard que le seul endroit du texte où le mot « Métropole » a droit à la majuscule, c'est pour qualifier celle de Lyon... (Exclamations à droite) Nous aurons un débat, nouveau secteur pavé, sur le nombre des métropoles - qui doit être limité, conformément à la position constante du Sénat.

La métropole de droit commun doit rester une intercommunalité à part entière. Nous en avons intensément discuté, il n'est pas question que la loi en fixe le nombre...

Pour Paris...

M. Philippe Dallier.  - Ah !

M. Jean-Claude Gaudin.  - Paris, Paris, Paris !

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - ... nous avons entendu M. Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, dire que s'il refuse un démantèlement obligatoire des compétences des départements, il peut admettre une forme d'intégration, comme celle que défend M. Dallier...

M. Philippe Dallier.  - Merci !

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - ... pourvu que toute délégation ou transfert se fasse par la voie conventionnelle et que la cohérence soit préservée. Le choix du Gouvernement d'un syndicat mixte n'insulte pas l'avenir et recentre judicieusement sur le logement les compétences du Grand Paris Métropole. Le maire de Lyon rappelle que sa communauté urbaine produit 10 000 logements par an ; à ce rythme, dans l'unité urbaine de Paris, on doublerait et davantage la production de logements. C'est une priorité absolue qui doit nous motiver.

Mlle Sophie Joissains.  - Et Aix-Marseille ?

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Pour Lyon justement, il est apparu hier soir en commission que tant sur le régime électoral à terme que sur les modalités financières nous ne pouvions plus avancer : il est indispensable que le Gouvernement rencontre officiellement et ensemble MM. Collomb et Mercier.

Pour Marseille, nous avons essayé, de façon pragmatique, d'attribuer un nouveau délai de concertation, en parfait accord avec les maires, que je remercie, pour faire la démonstration qu'Aix-Marseille-Provence, comme Lyon, peut devenir une collectivité territoriale sui generis, où seules les compétences stratégiques seront dévolues aux maires et où sera élaboré, en concertation avec eux, un système porteur du plus haut degré jamais atteint de déconcentration. Je remercie la ministre et le président Sueur d'avoir permis la réalisation de cet objectif, à force d'efforts à nul autre pareil.

C'est avec l'accord du Gouvernement que nous avons mis en chantier le développement d'un nouveau concept de pôle métropolitain qui s'intéresserait au tissu rural. Il y a une forte attente à cet égard.

Ce texte ne galvaude pas le terme de métropole ; il ajoute des dérogations aux règles de constitution des communautés urbaines, afin de permettre à des communautés d'agglomération de devenir communautés urbaines. Encore faut-il, mesdames les ministres, que le coût d'une telle réforme ne vienne pas en déduction de l'enveloppe normée... (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Claude Gaudin.  - Bravo !

M. Philippe Dominati.  - Nous sommes les seuls à applaudir !

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - Pour la commission des affaires économiques, les secteurs pavés sont moins nombreux, mais toujours difficiles. Madame la ministre, vous avez eu le courage d'engager ce projet de loi, au coeur de la confrontation de nos visions internes. Vous avez osé essayer de trancher, enfin.

Nous aurions préféré un seul projet de loi. Sa scission a détérioré sa lisibilité, même si, au fond, il n'y a qu'un seul projet.

Nous nous réjouissons que cette partie du projet de loi consacre le fait métropolitain, enjeu européen, en renforçant les compétences des métropoles françaises. Je m'en félicite en particulier pour la métropole de Paris rebaptisée par la commission des lois « Grand Paris métropole ». Nul n'ignore son poids économique. Le syndicat Paris Métropole a été créé à Clichy-sous-Bois...

La métropole de Lyon résulte de la fusion de la communauté urbaine et du département du Rhône. Je me réjouis que Gérard Collomb et Michel Mercier aient exprimé courageusement une vraie vision de l'avenir des métropoles, et me félicite du soutien du Gouvernement à leur démarche.

La métropole Aix-Marseille-Provence constitue un EPCI à fiscalité propre dont le périmètre excède le périmètre de la communauté urbaine de Marseille. Ce projet rencontre une vive opposition, mais je salue la détermination du Gouvernement. Quand l'intérêt d'un grand territoire, quand celui de la France sont en jeu, il est indispensable que l'État intervienne. M. Caselli, président de la communauté urbaine, relève l'existence de six autorités organisatrices de transport, une balkanisation des zones commerciales et d'activité, l'absence de cohérence territoriale. Voilà qui justifie le projet du Gouvernement.

Ce texte n'a pas été assez loin pour rationaliser l'organisation administrative. On peut par exemple se poser la question des départements de la petite couronne.

M. Philippe Dallier.  - On doit se la poser !

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Il est troublant que le président de l'ADF l'évoque lui-même, et que les deux présidents du conseil général de la Seine-Saint-Denis, l'ancien et l'actuel, posent la question...

La commission des affaires économiques s'est saisie de plusieurs articles. Sur le Grand Paris Métropole, elle salue les modifications de la commission des lois à l'article 12 qui ont recentré celui-ci sur la priorité du logement. Le plan métropolitain devra être compatible avec le schéma directeur de l'Île-de-France et tenir compte du schéma régional de l'habitat. Je me suis interrogé sur la pertinence de ces documents et le lien entre eux. Les acteurs du logement de l'Île-de-France saluent ces dispositions. Le projet de loi est cohérent et équilibré.

La commission des affaires économiques se félicite de la détermination du Gouvernement à répondre à l'enjeu majeur du logement en Île-de-France, où l'on ne construit que 37 000 logement par an alors qu'il en faudrait 70 000. Mais le projet de loi ne suffit pas, en effet, madame Schurch. Il faut des moyens, oui, mais aussi une volonté politique. Élaborer un plan d'accord, c'est bien, mais si localement il y a des obstructions importantes, il faudra réfléchir à contraindre davantage les communes en termes de permis de construire. (M. le président Sueur applaudit ; M. Roger Karoutchi s'exclame)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Il faut savoir ce que l'on veut !

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Les articles 18 et 19 concernent le quartier de la Défense. Je les ai abordés la fleur au fusil...

M. Roger Karoutchi.  - Allons bon !

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - ... mais il ne s'agit pas en réalité de clarification ni de simplification. La situation est extrêmement difficile. Ce quartier est le premier quartier d'affaires européen, une opération d'intérêt national depuis 1958 et la création de l'Établissement public pour l'aménagement de la région de la Défense (EPAD) ; sa gouvernance a été modifiée par la loi de 2007 qui a déconnecté les activités d'aménagement et les activités de site. Un établissement public local de gestion a été mis en place, l'Établissement public de gestion du quartier d'affaires de la Défense (EPGD), alors que l'aménagement est national. Six ans après, les objectifs de la loi ne sont pas atteints. Je vous regarde, mais vous n'êtes pas responsable, monsieur Karoutchi.

M. Roger Karoutchi.  - Si vous me regardez, c'est que je connais le dossier. (Sourires)

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Le rapport de la Cour des comptes est édifiant... Un simple procès-verbal signé en décembre 2008, dans des conditions surprenantes, est au coeur du problème. Selon la Cour, il a introduit une insécurité juridique et provoqué des blocages.

L'État a engagé plusieurs contentieux contre des délibérations de l'EPGD. Les articles 18 et 19 apportent une réponse à cette situation, nuisible à l'attractivité du site. On ne peut plus aménager comme on le faisait en 1958 ! Les frais de remise en état des équipements publics sont à la charge de l'EPGD et donc des communes de Courbevoie, Puteaux et le conseil général des Hauts-de-Seine. (Mme Isabelle Debré s'exclame) Les sommes citées, 100 millions d'euros, sont importantes ; elles pourraient être bien supérieures. Mais les trois collectivités territoriales, qui ont largement bénéficié des retombées de la Défense, ont les moyens financiers de les assumer.

Réfléchissons à l'avenir du site à moyen et long terme : ou bien l'État a encore une vision d'aménagement de caractère national, ou il considère que l'aménagement est terminé et il faudra venir à une situation de droit commun.

Sur Marseille, je salue la volonté d'apaisement avec le report du délai.

L'article 31 rénove le statut des métropoles de droit commun. J'approuve le relèvement du seuil démographique de constitution. Comme la commission des lois, nous estimons qu'il faut éviter la métropolisation du territoire. Et comme elle, nous préférons le conventionnement pour le transfert des compétences.

L'article 45 a été supprimé par la commission des lois. Dont acte. Il demandait à ce que chaque région ne comporte qu'un établissement public foncier d'État. Nous voudrions le réintroduire en Île-de-France, où se pose un problème majeur.

La commission des affaires économiques estime que le texte comprend, pour les articles dont elle est saisie, des avancées importantes. Je formule le voeu que notre Haute Assemblée l'adopte. (Applaudissements sur les bancs socialistes et des commissions)

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Très bien !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission du développement durable .  - Je salue l'ardeur avec laquelle le rapporteur s'est emparé de ce texte. La commission du développement durable s'est saisie pour avis des articles 3, 4 et 5 qui organisent la coordination entre les collectivités territoriales et posent la question de l'équilibre entre la reconnaissance légitime du fait métropolitain et celle, tout aussi légitime, du monde rural, qui a paru oublié. L'article 31 et l'article 35 ont également été examinés. La commission des lois a délégué au fond les articles 15, 16 et 17.

Certes, ce projet de loi ne révolutionne pas l'action publique locale. Mais il importe d'aboutir à une réforme utile. Ce texte contient de réelles avancées pour la démocratie territoriale, améliore concrètement l'efficacité de l'intervention des collectivités. C'est dans cet état d'esprit que nous l'avons examiné. Le travail de la commission des lois a été décisif pour faciliter l'action des élus locaux et, en supprimant le pacte de gouvernance territorial, éviter les montages trop complexes de schémas chronophages. Elle a également modifié les domaines de compétences des différents chefs de file pour introduire davantage de cohérence. Le choix initial du Gouvernement faisait du bloc communal le chef de file pour la qualité de l'air !

M. Louis Nègre.  - Catastrophique !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission du développement durable.  - Le monde rural est le grand absent de ce texte. Le fait urbain ne peut être reconnu à son détriment. D'où les deux amendements que nous présentons. Le premier intègre à la conférence territoriale un représentant des élus ruraux par département ; le second crée des pôles ruraux d'aménagement et de coopération afin de conforter les projets engagés par les pays.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Très bien !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission du développement durable.  - Il s'agit de permettre à la ruralité de vivre dans des espaces de projets modernes et innovants, impliquant les habitants et les élus locaux.

Le stationnement est au coeur des politiques de mobilité durable. Dépénalisons la sanction dans ce domaine. (M. Louis Nègre applaudit)

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Très bien !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission du développement durable.  - L'amende est uniforme sur tout le territoire, donc trop élevée dans les petites communes, et pas assez dissuasive dans les grandes villes. L'infraction ne peut être sanctionnée que par les policiers nationaux ou les policiers municipaux assermentés, qui n'ont pas les moyens de remplir cette mission - se crée ainsi un sentiment d'impunité. Le circuit de recouvrement a été critiqué par la Cour des comptes en 2010. La commission du développement durable vous propose deux amendements sur ce sujet.

Avis favorable à l'adoption sans modification de l'article sur les métropoles de droit commun tel qu'amendé par la commission des lois. La refonte du régime des métropoles s'accompagne d'un élargissement du régime des communautés urbaines. L'équilibre ainsi atteint entre grandes métropoles et métropoles moyennes me paraît satisfaisant.

L'article 15 résulte d'un mauvais découpage en trois du texte, la commission du développement durable vous propose de le supprimer. En revanche, les articles 16 et 17 réalisent une coordination satisfaisante du réseau des transports en Île-de-France. Les limites de la création d'un réseau parallèle au réseau existant sont apparues rapidement. Le nouveau Grand Paris Express présenté par le Premier ministre le 6 mars dernier confirme cette approche intégrée, qui impose une collaboration effective entre le Stif et la Société du Grand Paris (SGP). Cette coordination devra avoir lieu dans les meilleures conditions possibles, sans allonger les délais. Les parties prenantes partagent le même objectif d'avancer de concert. La commission vous propose d'adopter les deux articles dans la rédaction proposée par le Gouvernement.

Au total, le projet de loi, largement modifié par la commission des lois, est porteur de progrès pour notre démocratie territoriale ; il fait confiance à l'intelligence des territoires et des élus. La commission du développement durable a donné un avis favorable à son adoption, sous réserve de ses amendements. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; M. Raymond Vall applaudit aussi)

M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - M. Vandierendonck a expliqué la position de la commission des lois. Et d'ajouter : avec quel budget ? J'aurais beaucoup à dire sur le fond du projet de loi, comme maire et président d'agglomération. Mais je partage à 100 % ce qu'a dit notre excellent rapporteur.

J'en viens donc directement aux conditions financières. Comment faire autrement alors que les finances publiques sont un sujet de préoccupation quotidienne pour nombre de collectivités territoriales, qui ne savent plus comment préparer leur budget ? Comment faire autrement quand l'aide de l'État va diminuer dans les années qui viennent ? La commission des finances s'est saisie pour avis de toutes les dispositions financières.

L'article 10 prévoit la couverture intégrale par des EPCI à fiscalité propre de l'ensemble du territoire francilien non couverts par la réforme de 2010. L'achèvement de la carte intercommunale en Île-de-France entraînera une hausse, évaluée à 75 millions d'euros, lissée sur 2015 et 2016, de la dotation d'intercommunalité. Les incidences de cet article sur le Fonds de solidarité des communes d'Île-de-France n'ont pu être évaluées.

L'article 12 crée un établissement public dénommé Grand Paris Métropole, qui disposera des ressources attribuées par ses membres, d'une dotation de fonctionnement et d'un fonds d'investissement métropolitain. Le Gouvernement n'a pu évaluer le montant à financer, car il dépend de l'étendue des compétences exercées. La contribution des membres sera fixée dans les statuts. Le Directeur général des collectivités locales m'a assuré que la dotation de fonctionnement n'était pas assimilable à la DGF, dans la mesure où l'établissement public n'est pas un EPCI à fiscalité propre, mais relèvera de la catégorie des syndicats mixtes. Elle ne sera donc pas non plus une dotation d'intercommunalité et n'entraînera pas une augmentation de la dotation d'intercommunalité de l'ensemble des EPCI. Elle n'entrera pas dans le périmètre de l'enveloppe normée.

Enfin, la métropole de Paris bénéficiera d'un fonds d'investissement métropolitain, mais le Gouvernement n'a pu me dire comment il serait financé. Il pourrait l'être partiellement par les collectivités territoriales concernées.

M. Roger Karoutchi.  - Ah oui ?

M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Mais il n'est pas exclu que l'État participe. Je vous proposerai un amendement de précision.

J'en viens au fonds de péréquation des départements franciliens. Les modalités proposées par le Gouvernement n'étaient pas acceptables, en raison du déséquilibre entre critère de ressources et de charges, qui faisait bénéficier l'essentiel des fonds à un seul département. La commission des finances a souscris à la suppression de cet article, auparavant décidée « à titre conservatoire » par la commission des lois, en raison de la mise en place d'un groupe de travail sur la recherche de ressources pérennes, annoncée le 22 octobre dernier, et d'aborder la question lors de l'examen du projet de loi de finances, lorsqu'il aura rendu ses conclusions. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes ; M. René Vandierendonck, rapporteur, et M. Claude Dilain, rapporteur pour avis : Très bien !)

Les articles 18 et 19 visent à régler le conflit entre les deux établissements de la Défense, en mettant à la charge d'une des collectivités finançant un établissement public local les frais de remise en état du site. Je vous proposerai un rapport d'évaluation du coût.

J'en arrive aux métropoles. Le DGCL estime le coût à 35 millions, à supposer que les communautés initialement concernées deviennent métropoles. Mais la commission des lois, en relevant le seuil démographique, a diminué le nombre d'EPCI éligibles. Et elle a assoupli l'accès au statut de communauté urbaine. Si bien que l'impact financier devrait rester le même.

Pour Lyon, la commission des lois a décidé d'avancer la date de création de la métropole, projet le mieux ficelé, le plus abouti, qui fait l'objet d'un accord entre les parties concernées. Il n'en résultera pas de coûts supplémentaires mais il y a besoin de quelques ajustements techniques. Ainsi l'article 29 prévoit que le Gouvernement déterminera par ordonnance les règles financières et fiscales applicables, qui ne sont pas fixées par ce texte, ce qui ne permet pas de déterminer les potentiels financier et fiscal des collectivités. Une compensation des transferts de charges assurera la neutralité budgétaire et évitera tout risque de tutelle d'une collectivité sur l'autre. Nous vous proposerons quelques amendements.

Nous précisons en particulier que le financement de tout organisme institué dans le cadre de la métropole sera exclusivement financé par les deux collectivités. Vu l'originalité de ce projet, avec en particulier les nouvelles formes de calcul de transferts, qui intègrent le critère de l'épargne nette, le ministère devrait recevoir, conjointement, MM. Collomb et Mercier car ce projet exemplaire pourrait faire des émules.

Sur la métropole Aix-Marseille-Provence, une dotation exceptionnelle d'intercommunalité est prévue la première année. La commission des finances considère que ce régime dérogatoire n'a pas lieu d'être et vous proposera un amendement en ce sens, qui limitera la dotation à 15 millions au lieu de 34, pour ne pas entamer la dotation des autres collectivités.

Sur le reste des articles, nous n'avons pas d'observation particulière à formuler.

Quelles conséquences financières aura ce projet de loi' ? Pour l'achèvement de la carte intercommunale hors petite couronne francilienne, conséquence de la loi de 2010, 75 millions en 2013, 100 millions en 2014. S'y ajoutent les conséquences de ce projet pour l'Île-de-France en 2015 et 2016 : 75 millions. Pour la création des métropoles, le Grand Paris Métropole (GPM) ne pèsera pas sur l'enveloppe globale. Pour Aix-Marseille-Provence, 34 millions d'euros en 2016. Pour Lyon, neutralité, pour les métropoles et les communautés urbaines, en 2015 18 millions, même chose en 2016. Le projet pèsera donc pour 145 millions sur la dotation d'intercommunalité. Cumulés au 1,5 milliard de moins pour les collectivités territoriales, à la péréquation horizontale et verticale, à l'achèvement des schémas départementaux d'intercommunalité, ce sont 250 millions, qu'il nous paraît impossible de mettre à la charge de la dotation globale.

M. Gérard Larcher.  - Bien sûr !

M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Il faut définir ce qui sera pris sur l'enveloppe globale et ce qui sera pris sur le budget de l'État.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Exactement !

M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Si l'on n'en discute pas, ce projet de loi s'en trouverait gravement handicapé. Nos deux commissions ont travaillé dans un souci de clarté et de mise au net, sans hostilité. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes et à droite)

M. René Vandierendonck, rapporteur, et M. Claude Dilain, rapporteur pour avis.  - Très bien ! 

M. Roger Karoutchi.  - Nous pouvons donc applaudir ensemble !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Parlons vrai. Mesdames les ministres, l'amitié qui nous lie depuis longtemps m'y autorise. Nous avons voulu que ce texte fût profondément changé. Nous avons demandé trois textes, plus courts, plus simples, plus percutants et le Gouvernement nous a entendus. Pourquoi ? Parce qu'un triple impératif s'impose : simplicité, clarté, lisibilité. Que voulons-nous, en somme ? La solidarité territoriale d'abord, qui implique l'action des communes, au coeur de notre conception de la République (M. Roland Povinelli applaudit) et l'action des départements pour la solidarité sociale et territoriale. C'est pourquoi il faut aller vers plus de justice, donc de péréquation. Ensuite, il nous faut des régions fortes, plus fortes, avec plus de liberté financière et locale, qui leur donne plus de latitude. Des régions fortes pour l'économie et pour l'emploi, au coeur des préoccupations de nos concitoyens. Si dans d'autres pays d'Europe, il est plus facile de créer des PME, que les collectivités territoriales peuvent prendre des participations, c'est parce que les régions y sont fortes.

Nous voulons, enfin, des métropoles du futur. Il nous faut donc des logiques cohérentes, dans le respect des communes.

Des communautés fortes, disons-nous, cela concerne les métropoles, les communautés urbaines, mais aussi les communautés de communes, irremplaçables. Communautés urbaines et communautés de communes doivent se donner la main dans chaque bassin d'emplois.

Voilà ce que nous voulons. C'est pourquoi nous voulons des textes courts, percutants, auxquels nous allons contribuer. Je remercie M. Vandierendonck de son travail. Notre position repose, madame la ministre, sur une philosophie différente de la vôtre. Autant s'en expliquer clairement. À quoi bon ajouter une conférence territoriale aux structures qui existent déjà, au risque de créer un embrouillamini où l'on ne comprendra plus rien. (Vifs applaudissements à droite et sur certains bancs à gauche) Sans doute est-il utile qu'une conférence se réunisse qui rassemble les élus, comme c'est déjà le cas en Bretagne, mais pas besoin de l'inscrire dans la loi ! Laissons de la souplesse aux élus.

M. Gérard Larcher.  - Eh oui !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - N'allons pas les obliger à donner des avis sur tout avant de les coaguler dans un pacte qui ne se fera jamais ! (« Très bien ! » à droite) Clarté, simplicité, lisibilité ! (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs socialistes) Les communes chefs de file pour la mobilité durable ? (Rires à droite) Et la qualité de l'air ? Mais l'air connaît-il les frontières communales ! (Applaudissements sur les mêmes bancs)

Pour nous, la responsabilité majeure des communes, c'est la proximité, les services publics de proximité. (Applaudissements à droite et au centre et sur plusieurs bancs socialistes)

M. Roland Povinelli.  - C'est l'intelligence même !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous avons refusé, pour les métropoles, l'inflation. Ne croyons pas qu'un mot va tout résoudre ! Le rôle européen de Strasbourg est manifeste, le rôle frontalier de Lille-Roubaix-Tourcoing est patent. Nous les reconnaissons.

Pour Paris, je salue le travail de notre rapporteur et de Claude Dilain. Il faut lutter, comme l'a dit le Premier ministre, contre les intercommunalités de confort. Rassembler des villes pauvres d'un côté, riches de l'autre, c'est le contraire de la solidarité. Le premier problème est celui du logement. Tout doit être mis en oeuvre pour le résoudre.

Sur Aix-Marseille-Bouches-du-Rhône, je salue l'implication active des élus, dont il faut reconnaître l'attachement à l'échelon communal et la nécessité de la concertation. Je sais, madame la ministre, que vous vous êtes beaucoup dépensée. J'appelle de mes voeux une initiative du Gouvernement, pour répondre à des attentes qui sont aussi financières.

S'agissant de Lyon, je salue le travail remarquable de MM. Mercier et Collomb. Ce qui est ici intéressant, et eût pu l'être en Alsace...

M. Gérard Longuet.  - Hélas !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - ... c'est que des initiatives locales puissent changer le territoire. Je salue Edmond Hervé, qui a été le premier à mettre en oeuvre le lien entre la ville centre et sa périphérie, avec une taxe professionnelle unique pour la solidarité.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Bravo !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Cette première expérience a porté ses fruits : puisse l'expérience initiée à Lyon et dans le Rhône faire de même !

Nous avons rédigé un nouveau texte, à partir du vôtre : la discussion, madame la ministre, loyale, nous permettra d'avancer, parce que le Sénat de la République aura dit ce qu'il porte en lui. Ce que nous voulons, en bons disciples de Montesquieu, c'est la clarté et la séparation des pouvoirs. Or le texte opérait une certaine confusion. Ce sont les objectifs, non les formes, qui comptent : l'emploi, l'économie, la solidarité, et tout ce qui nous permet de mieux vivre ensemble dans la clarté. (Applaudissements à gauche, au centre et à droite)

Mme Jacqueline Gourault, présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation .  - Depuis sa création en avril 2009, notre délégation a élaboré près de 25 rapports et procédé à de multiples auditions. Je veux associer les deux anciens présidents, Alain Lambert et Claude Belot à cet important travail, et rendre hommage à Edmond Hervé qui nous a incités à en faire la synthèse. Merci à notre rapporteur et à madame la ministre d'avoir montré que ces travaux peuvent enrichir la discussion. Ils combinent une visée stratégique à long terme et un regard concret sur les besoins du présent. D'où le pragmatisme de nos propositions, souvent consensuelles, les questions de gouvernance restant prégnantes. La décentralisation est à la croisée des chemins, entre besoin d'un État unitaire et besoin de proximité. La question n'est plus du transfert des compétences, mais de leur clarification, et de la coordination des acteurs.

Deuxième point important, la diversité des cultures territoriales, qui demandent à être respectées. Ce qui est bon pour la Bretagne, ne marche pas forcément pour la région Centre. (M. Ronan Dantec applaudit) Ce qui est acquis à Lyon ne peut s'appliquer tel quel à Aix-Marseille. Ce pragmatisme doit prévaloir, et la confiance faite à l'intelligence territoriale.

Troisième élément : la légitimité de tous les niveaux de collectivités territoriales. N'allons pas transposer tels quels les modèles étrangers, encore moins des concepts technocratiques impraticables.

On ne résoudra pas les problèmes sans respecter toutes les communes, échelon de base de la démocratie française. (Mlle Sophie Joissains et M. Roland Povinelli applaudissent) Reste qu'il importe de consolider les intercommunalités.

La métropole lyonnaise est une initiative emblématique, qui simplifie le paysage.

Quatrième point : l'évolution profonde des dynamiques territoriales, qui appelle une différenciation du cadre juridique applicable aux collectivités territoriales, et une simplification du cadre applicable aux métropoles.

Cinquième point, la ruralité, dans ses différentes composantes, car il n'y a pas une ruralité (« Très bien ! » sur le banc des commissions) qui s'opposerait à l'urbanité (« Très bien ! » sur le même banc) Veillons à ce que les ruralités soient respectées, considérées comme des territoires à part entière, même si ruralité et urbanité sont complémentaires, et ne peuvent vivre l'une sans l'autre.

M. Gérard Larcher.  - Nous l'avons toujours dit.

Mme Jacqueline Gourault, présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.  - Nombre de nos propositions sont reprises dans le projet de loi. Non-tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre, mise en oeuvre dynamique de la notion de chef de file, constat de carence en cas d'inertie d'une collectivité territoriale, gestion coordonnée de compétences partagées dans les conférences territoriales, incitation à l'intercommunalité comme échelon privilégié pour l'aménagement opérationnel, en particulier pour l'administration du droit des sols, incitation à une vision intercommunale de l'urbanisme, le maire conservant le permis de construire, réorganisation des métropoles autour d'autres enjeux que le seul fait démographique, en en faisant des territoires d'équilibre qui participent à l'harmonie de l'ensemble.

La sémantique a ici tout son sens. Il aurait été préférable de parler de communautés métropolitaines plutôt que de métropoles, qui peuvent faire craindre qu'elles vont tout absorber. Il faudra veiller à la fluidité entre les filières de la fonction publique territoriale, et à la question de la péréquation, ainsi que M. Germain s'en est clairement expliqué.

Je salue le travail de notre Haute Assemblée, qui, tout en respectant l'équilibre voulu par le Gouvernement, a donné à ce texte sa couleur et son essence, dans le prolongement de la loi de 2010 qui initiait les métropoles et les intercommunalités - aspect qui avait rencontré une quasi-unanimité.

Le bicamérisme est et doit rester une réalité tangible. (Applaudissements sur les bancs socialistes, au centre et à droite)

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Très bien !

M. Christian Favier .  - Nous regrettons les conditions de rédaction de ce texte et les modalités selon lesquelles il a dû être examiné. Les conditions et la méthode sont loin d'aboutir à une nouvelle étape de la décentralisation, qu'attendent nos concitoyens. Pourtant, l'expérience de la mauvaise réforme de 2010 aurait dû vous alerter. Elle a pesé dans le changement de majorité.

M. Roger Karoutchi.  - Remerciez-nous !

M. Christian Favier.  - L'initiative d'états généraux, lancée par le président Bel, a donné lieu à des milliers de contributions. Les centaines d'élus locaux qui y ont participé ont tous déploré la complexité et l'absence de moyens. Tous ont demandé un cadre rénové pour l'intercommunalité, afin qu'elle reste un outil au service des communes, dont le rôle est central dans la vie de la République. Chacun a insisté sur la nécessaire présence de l'État aux cotés des collectivités territoriales.

Las, ce texte est bien éloigné de ces attentes. Il n'y a pas de décentralisation, mais une déstabilisation des administrations locales et l'effacement des communes et des départements au profit des régions, comme le voulait la commission Balladur.

Vous comprendrez notre désaccord. Devant l'ampleur du mécontentement, vous avez scindé votre texte en trois. Nous examinons aujourd'hui un texte partiel. Plutôt que de partir logiquement de la commune, à la base, vous commencez par le sommet ! La conférence territoriale, placée sous l'égide de la région, régira tout par le biais de pactes de gouvernance. Concentrer ainsi tous les pouvoirs en un lieu, c'est aller à l'encontre des principes de libre administration et de non-tutelle. Certes, notre commission des lois y a mis bon ordre, mais la conférence territoriale demeure.

Que faites-vous des conférences des exécutifs ? Leur tort, à vos yeux, est sans doute qu'elles respectent trop les collectivités territoriales qui les composent. En témoigne votre conception du chef de filat, dont je ne suis pas sûr qu'elle soit la même que celle de notre rapporteur.

Vous voulez concentrer les pouvoirs locaux et les éloigner des citoyens. Ainsi des métropoles : vous préparez la fusion des communes et des départements, par transfert de leurs compétences à des structures administratives éloignées des citoyens. Craignons que l'unité du territoire national n'en soit mise à mal.

Les métropoles vont bouleverser notre paysage institutionnel, malgré les aménagements de la commission des lois. Vous allez dans le sens voulu par l'Europe et une économie financiarisée. Les métropoles seront des trous noirs absorbant toute l'énergie du développement économique. Vous prenez le risque d'une politique à plusieurs vitesses. Craignons le développement d'inégalités sociales et territoriales, dangereuses pour la cohésion sociale.

Faut-il favoriser, comme vous le faites, la constitution de baronnies locales pour des élus au quatrième niveau ? On ne construit pas l'avenir en niant son histoire. La cohésion de la France repose sur l'action équilibrée des communes, des départements et des régions. Pourquoi fragiliser l'édifice en période de crise, alors que les collectivités de proximité jouent un rôle d'amortisseur social ?

Pourquoi privilégier la technocratie au détriment des services publics locaux ?

Mme Éliane Assassi.  - Barroso, l'Europe !

M. Christian Favier.  - Notre conception du développement qui met l'humain au centre est très éloignée de votre texte comme de celui de la commission des lois qui n'apporte rien pour le renforcement de la démocratie locale. Or le statu quo n'est pas tenable. Nous devons entrer dans un nouvel âge de la décentralisation. En donnant plus de place aux citoyens dans la décision, ce qui suppose un statut de l'élu, afin que les responsabilités puissent être exercées par un plus grand nombre, en interdisant le cumul des mandats, en donnant plus de place aux différentes sensibilités politiques dans les assemblées délibérantes, en donnant le droit de vote à tous les résidents.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien ! (Murmures à droite)

M. Christian Favier.  - ... en donnant à chaque collectivité territoriale compétence générale, en développant des coopérations volontaires dans la confiance partagée, grâce à une démocratie locale revivifiée. Il faut respecter chaque niveau de collectivité, en institutionnaliser leurs relations, mais toujours sur la base du volontariat.

Enfin pour que ce ne soit pas un jeu de dupes, il faut donner aux collectivités des capacités financières. L'autonomie financière est liée à leur autonomie fiscale. C'est un enjeu démocratique.

Nous regrettons que les conditions de mise en place de cette réforme ne nous aient pas permis de faire advenir notre vision progressiste, conforme aux combats de la gauche. Seule l'acceptation de nos amendements serait de nature à nous faire voter ce texte, encore trop éloigné, dans la rédaction de la commission des lois, des attentes de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs CRC et sur plusieurs bancs à droite)

M. Michel Mercier .  - Je vous souhaite bon courage mesdames les ministres (sourires) car ce chantier n'est jamais facile, tout permanent qu'il est, non par peur des égoïsmes, mais parce que les Français sont profondément attachés à leurs institutions et à leurs communautés locales. Il faut aussi s'adapter soi-même, lorsque l'on veut changer. Il y faut beaucoup de ténacité et accepter que l'on arrive parfois ailleurs qu'à l'objectif que l'on s'était fixé au départ. Nous ne connaissons pas encore le port où nous aborderons. Ce texte a marqué un pas ; il en restera d'autres à franchir. Les choses doivent toujours être replacées dans le temps.

Je comprends bien qu'on ne pouvait tout faire tenir dans un seul texte ; on l'aurait tué par étouffement. C'est à nous qu'il revient de replacer celui-ci dans la perspective de l'ensemble. On ne peut avancer que pas à pas ; ayant moi-même défendu un texte en la matière, j'ai fait l'expérience de cette exigence.

Je remercie le président et le rapporteur de la commission des lois d'avoir voulu faire en sorte que l'on puisse avancer. Nous l'avons fait en affirmant des idées simples. La liberté, d'abord, qui ne va jamais sans la responsabilité. Nos électeurs attendent de nous des résultats. Les élus locaux feront ou ne feront pas ; ils n'ont qu'un maître, le suffrage universel.

Vous avez affirmé la prééminence de la méthode conventionnelle, de l'accord local. Il faut toujours rappeler qu'il n'y a pas de tutelle d'une collectivité sur l'autre et que la commune a un rôle particulier. Sortons de la stérile et fausse opposition entre le rural et l'urbain. La vie allie l'un et l'autre, les villes ont besoin de l'espace rural et réciproquement.

Ce texte affirme et essaie d'organiser le fait métropolitain. Ne galvaudons pas ce mot, qui ne saurait s'appliquer à toute ville de quelque importance. Il n'y a que quelques métropoles, peut-être cinq ou six en France.

Comment ce texte peut-il s'appliquer à Lyon ? Nous avons proposé, Gérard Collomb et moi-même, d'aller vers la construction d'une métropole à Lyon. C'est une idée ancienne. Nous sommes assez différents l'un de l'autre pour nous accorder. Quand on se ressemble, on ne s'entend pas.

Organisons l'avenir. Nous vous demandons de nous laisser faire, en nous orientant, en veillant à éviter chausse-trapes et oublis. C'est un projet formidable que cette métropole qui existe déjà. Depuis longtemps, Lyon est une grande ville qui a toujours regretté en secret de n'être point la capitale. Mais n'allons pas récrire l'Histoire.

Nous ne demandons pas à la capitale de faire pour nous. Nous ne demandons rien.

M. Gérard Longuet.  - Laissez à ceux qui ont besoin.

M. Michel Mercier.  - Nous n'empêchons pas les autres de demander. (Sourires)

Le véritable ennemi de l'unité de la République, c'est l'uniformité.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Très bien !

M. Michel Mercier.  - Tout reste à faire. Pour une communauté urbaine, prendre la place du département n'est pas une victoire, c'est une énorme tâche.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Michel Mercier.  - Il y a encore quelques points qui laissent à désirer. (Sourires)

Il faut que les ressources compensent intégralement les charges transférées. On va transférer la ressource affectée au RSA provenant de l'État ? Oui, pour 27 % de son coût ! Ce qui est écrit ne correspond pas à la réalité. (« Très bien ! » à droite)

M. le président. - Il est vraiment temps de conclure.

M. Michel Mercier.  - J'insiste. Je vous le rendrai ! (Sourires)

Nous ne mettons pas en cause le Sdis unique, qui est un bel outil, mais rappelons que jamais les communes membres de la communauté urbaine n'ont payé de taxe. C'est la communauté urbaine qui paie.

Oui, j'ai envie de voter votre texte. Aidez-nous à le voter ! (Applaudissements au centre ainsi que sur certains bancs socialistes et de l'UMP)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Vive la capitale des Gaules !

M. Jacques Mézard .  - Le primat des Gaules...

Je rends hommage au rapporteur qui a accompli un travail d'« honnête homme ». Sommes-nous toujours au pays de Descartes ? La Ve République est-elle celle de la raison ? Je crois nécessaire de rappeler, in limine, ces deux vers de Boileau : « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement » et « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage ». Nos concitoyens sont plongés dans un abîme de perplexité devant la complexité de notre organisation territoriale.

Moderniser, ce doit être rendre les institutions plus efficaces. Oui, il faut plus de simplicité. Il est bon de consulter les associations d'élus, aux positions respectables et figées, mais le Gouvernement doit assumer ses responsabilités comme le firent, en 1982, Pierre Mauroy et Gaston Defferre. Comment avancer quand un texte traite de compétences financières, un autre de la répartition des compétences, un autre encore de l'articulation des strates territoriales... Il y a actuellement trois textes en navette sur le même sujet ! Il est vrai qu'il est difficile de démêler l'écheveau.

À supposer qu'existe un projet, réunir une majorité des trois cinquièmes pour modifier la Constitution est un exercice plus que délicat. Donc inscrivons-nous dans le cadre constitutionnel actuel. L'exégèse sur le chef de file résulte d'une transaction que n'aurait pas désavouée feu le président Edgar Faure... Qu'attendons-nous ? Des compétences restent partagées entre l'État et les collectivités. Il faut réexaminer la question des Sdis et la coopération des coûts des transferts de compétences. Oui, il faut simplifier.

Comment s'y retrouver, citoyens et élus, entre communes, intercommunalités, cantons, départements, régions... On veut multiplier les schémas, les conférences, les hauts conseils ; à ce compte, que deviendrait le Sénat ?

Arrêtez cette inflation antidémocratique, madame la ministre ! Vous voulez le non-cumul pour les parlementaires, vous multipliez les cumuls horizontaux. Il en faudra, des professionnels de la politique, pour articuler tout cela ! (Applaudissements) Le succès de la loi Chevènement est surtout dû aux enveloppes de DGF, c'est plus difficile en période de vaches maigres. (M. Philippe Dallier approuve)

Vous inventez la scissiparité législative... Le Sénat a travaillé, récrit le texte, qui devient ainsi un ... projet de loi sénatorial. Nous sommes prêts à faire de même sur le non-cumul.

Il est évident que Paris, Lyon, Marseille justifient que l'on conforte le fait métropolitain. La présence ce matin des maires de Lyon et de Marseille justifie le cumul. Nous sommes réservés, comme M. Mercier, sur la multiplicité des métropoles sur tout le territoire, façon de faciliter l'évaporation des départements.

Reportez-vous au travail de Gaston Defferre, à l'époque où l'État assumait ses responsabilités. Tirons tous ensemble la leçon du dévoiement qui s'est ensuivi de l'article 3 de la loi de 1983 sur la répartition des compétences.

Notre groupe se déterminera en fonction de l'évolution du débat. Faisons confiance au Sénat. (Applaudissements sur les bancs du RDSE ainsi que sur plusieurs autres bancs)

La séance est suspendue à 12 h 55.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.