Droit au séjour (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la retenue pour vérification du droit au séjour et modifiant le délit d'aide au séjour irrégulier pour en exclure les actions humanitaires et désintéressées (procédure accélérée).

Discussion générale

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - Parler d'immigration, c'est aussi parler de la France, de son histoire, y compris celle des pages douloureuses, comme vous venez de le faire. Les migrations et les déplacements ne sont pas une nouveauté de cette terre mondialisée. Ce serait une vue courte de le croire quand la France, depuis le XIXe siècle, accueille successivement des Allemands, des Belges, des Italiens, des Espagnols, puis des Portugais, des Algériens, des Marocains, des Tunisiens, des réfugiés d'Amérique latine fuyant les dictatures, des Chinois, des Sénégalais, des Maliens... J'arrête là la liste. Cette immigration fait notre richesse, notre génie. C'est sur cette vieille terre chrétienne que s'est enracinée la tradition juive, sur cette terre catholique que le protestantisme a été reconnu en 1791 après les déchirements des guerres de religion, sur cette terre républicaine et laïque que l'islam, devenu la deuxième religion du pays, trouve progressivement sa place. Oui, faire nation, c'est-à-dire, pour reprendre la formule de Jean Jaurès, être cette « communauté des affections qui nous empêche de retomber dans l'étroitesse des égoïsmes ».

L'immigration, hélas, a été instrumentalisée ces dernières années. Elle est un apport, qui doit être préparé, maîtrisé, régulé et encadré avec apaisement et réalisme, avec fermeté mais sans stigmatiser. La phrase de Michel Rocard conserve toute son actualité, pourvu qu'on en entende aussi le deuxième volet : « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part ». La France ne sera forte qu'en étant elle-même.

M. Richard Yung.  - Très bien !

M. Manuel Valls, ministre.  - La circulaire du 31 mai 2011 empêchait l'accès à l'emploi des étudiants étrangers. Quel tort fait à la France ! Quel non sens que refuser à des personnes hautement qualifiées d'enrichir la France de leur travail ! Avec M. Sapin et Mme Fioraso, nous avons rectifié cette circulaire le 31 mai de cette année pour favoriser le changement de statut pour les étudiants les plus méritants.

Par la circulaire du 6 juillet 2012, l'assignation à résidence est désormais la norme pour les familles pour qu'il n'y ait plus d'enfants en centre de rétention. Pris à la suite des décisions de la Cour de Luxembourg, l'arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet interdit la garde à vue pour séjour irrégulier. Ce progrès en matière de libertés publiques, dont le moteur est l'existence de valeurs et de normes communes en Europe, appelle toutefois des évolutions pour assurer l'efficacité de notre politique d'éloignement. C'est la première raison d'être de ce projet de loi.

Accueil, intégration, assimilation, naturalisation appartiennent à notre tradition républicaine, tout comme l'aide désintéressée qui peut être apportée à des personnes dans le besoin, sans considération de la régularité ou non de leur séjour en France. C'est la seconde raison d'être de ce projet de loi.

Nous voulons apaiser la question de l'immigration et nous réinscrire dans notre tradition républicaine. Nous aurons, au début 2013, un débat sur l'immigration, comme nous prendrons prochainement, dans la concertation, la circulaire sur l'admission exceptionnelle au séjour. Je le dis avec fermeté : il n'y aura pas de régularisation massive comme en 1981 et 1997.

M. Christian Cambon.  - Très bien !

M. Manuel Valls, ministre.  - Il n'y aura pas, durant le quinquennat d'augmentation du nombre de régularisations par rapport à la législature précédente. En revanche, et la différence est de taille, celles qui auront lieu seront fondées sur des critères transparents et objectifs, et non arbitraires. Nous devons la vérité aux Français : la régularisation, dans la situation économique qui est la nôtre, sera l'exception. La pauvreté augmente en France, le Secours catholique nous l'a rappelé dans un rapport alarmant, et les étrangers en sont les premières victimes. L'esprit de la France, c'est d'accueillir dignement, d'offrir les meilleures conditions de logement, d'éducation, d'emploi. Or même nos dispositifs d'hébergement d'urgence sont saturés. Nous devons la vérité aux Français. Chacun doit regarder la réalité en face et agir avec responsabilité, sans céder aux raccourcis qui nuisent à l'unité de la nation.

Nous devons accueillir les étrangers dans des conditions dignes dans les préfectures, j'y veillerai. Je lancerai une réflexion sur le séjour des étrangers malades. Au premier semestre 2013, je défendrai un projet de loi créant un titre intermédiaire de trois ans pour simplifier les démarches administratives, coûteuses en temps et en énergie, et réduire l'incertitude liée au renouvellement de certains titres de séjour.

La France, terre d'immigration, terre d'accueil, est aussi une terre de refuge. Je ne confonds pas immigration et asile.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Très bien !

M. Manuel Valls, ministre.  - L'Ofpra se renforcera de dix officiers de protection pour ramener le délai de traitement des demandes à neuf-dix mois, de l'examen par l'Office à la CNDA.

Je ne laisserai personne caricaturer ce débat. Je suis le ministre de la sécurité mais aussi celui des grandes libertés publiques. Respect des droits de chacun et application ferme des règles : tels sont les deux piliers de ma politique en la matière. Avec ce texte, nous tirons les conséquences des arrêts de la Cour de cassation du 5 juillet 2012, qui s'appuyaient sur une interprétation de la directive « Retour » de 2008 rendue par la Cour de justice de l'Union européenne en décembre 2011. Depuis lors, la garde à vue est interdite pour la vérification du droit de séjour. Les policiers ne disposent que des quatre heures de la procédure de vérification d'identité. De là la création de la procédure de vérification du droit au séjour de situation dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de seize heures. Cette mesure sera accompagnée de toutes les garanties nécessaires : droit à l'examen par un médecin, droit à un interprète, droit à un avocat, droit à l'aide juridictionnelle, droit de contacter toute personne de son choix.

La durée de cette procédure, placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, s'imputera sur la procédure de vérification d'identité qui suivra éventuellement. Idem pour la garde à vue. Seize heures, c'est peu pour un examen sérieux du droit au séjour. Dans ce délai restreint, il faudra répondre à pas moins de cinq questions, dont celle de l'éloignement avec ou sans délai, d'une éventuelle assignation à résidence ou encore d'un placement en rétention.

Une rétention, c'est aussi une privation de liberté. Votre commission des lois a renforcé les droits du retenu, je l'en remercie. En revanche, introduire, comme vous le proposez, un seuil de dix heures, qui pourrait être prolongé de six heures après information du procureur de la République, ne ferait que compliquer les choses.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Absolument !

M. François-Noël Buffet.  - Bien sûr !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je demanderai sa suppression. La nouvelle procédure sera un progrès par rapport à la garde à vue de vingt quatre heures.

Avec ce texte, le Gouvernement entend combattre l'immigration illégale et ceux qui l'exploitent pour en tirer profit, commettant ainsi un acte grave et délictueux.

M. Manuel Valls, ministre.  - A l'occasion de ce texte, d'autres questions apparaissent, comme celle des recours contre la mesure d'éloignement. En 2011, l'intervention du juge judiciaire a été repoussée au cinquième jour de la rétention, il intervient désormais après le juge administratif. Cela mérite une réflexion approfondie. Je souhaite, en accord avec le Premier ministre, confier une mission à un parlementaire, qui portera aussi sur les aspects pratiques, notamment l'accueil des étrangers en préfecture.

Pour finir, le délit de solidarité. Certes, il est peu appliqué...

M. Richard Yung.  - A Sangatte !

M. Manuel Valls, ministre.  - ...mais il pesait comme une épée de Damoclès sur les gens qui apportent une aide de bonne foi, les confondant avec les gens sans foi ni loi qui exploitent la misère. Le gouvernement précédent avait apporté une réponse partielle aux demandes des associations qui oeuvrent partout sur le territoire pour faire vivre concrètement un idéal d'entraide et de solidarité, pas seulement dans le Nord-Pas-de-Calais. L'immunité sera étendue à la belle-famille de l'étranger.

L'immigration ne doit pas reposer sur l'arbitraire. Je veux trouver un chemin sincère, sans naïveté, entre ceux qui souhaitent une immigration zéro et ceux qui défendent l'accueil de tous. Nous avons besoin d'un autre débat sur l'immigration. (Applaudissements des bancs socialistes à la droite)

M. Jean-Pierre Michel, vice-président de la commission des lois, en remplacement de M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des lois .  - Seul le calendrier modifié de nos travaux m'amène à remplacer le président de la commission et son rapporteur, qui nous rejoindront à la reprise.

Ce texte, sans bouleverser la législation du droit au séjour, comble un vide juridique après les arrêts de la Cour de cassation ; il revient sur le honteux délit de solidarité. C'est dire qu'il n'est pas anodin !

Le gouvernement précédent n'avait pas toujours résisté, c'est un euphémisme, à la tentation d'instrumentaliser l'immigration. Celui-ci doit créer une procédure de vérification de situation had oc, après les arrêts de la Cour de Luxembourg et de la Cour de cassation.

Cette mesure constituera un progrès par rapport à la procédure de vérification d'identité. Hélas, monsieur le ministre, à vous qui aimez citer Jean Jaurès, je rappellerai qu'entre l'idéal et le réel, il y a loin. Votre procédure est idéale sur le papier...

Fallait-il supprimer le délit de séjour irrégulier ? Ce serait priver l'État de moyens de poursuivre un étranger qui se maintient sur le territoire malgré les mesures administratives prises à son encontre. Fallait-il supprimer le délit de solidarité ou élargir les immunités pénales ? Sur ce point, la commission vous a suivi.

Ce texte soulève d'autres questions. Entre autres, celle du contrôle au faciès qui reste ouverte à l'article 611-1. Monsieur le ministre, nous sommes sensibles à votre volonté de concilier l'efficacité de la loi et le droit des personnes. Cet équilibre est difficile à trouver ; vous le cherchez. Nous rediscuterons néanmoins ce soir du seuil des dix heures à l'article 2...

Mme Laurence Cohen .  - Depuis 2002, de nombreuses lois ont été adoptées par les gouvernements successifs de droite pour restreindre toujours plus les droits des étrangers, alimentant la rhétorique de l'étranger fraudeur. Nous espérions légitimement d'un gouvernement de gauche une rupture, autre chose que ce texte minimaliste.

Premier désenchantement : ce projet de loi continue à criminaliser les migrants, à stigmatiser les étrangers en délinquants. Loin de profiter de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) pour en finir avec le délit de séjour irrégulier, vous créez un délit de remplacement, celui de maintien sur le territoire « lorsque les mesures propres à permettre l'exécution de l'éloignement ont été effectivement mises en oeuvre ». La justice européenne n'interdit ni n'impose de sanction pénale dans cette situation. Nous optons pour une abrogation pure et simple du délit de séjour irrégulier. Même en dépénalisant le séjour, il sera toujours possible de condamner pour entrée irrégulière, contrairement à ce que prétend l'étude d'impact.

Tel est le droit pénal des étrangers, que ce texte enrichit d'un nouveau et inutile dispositif d'exception. Le choix du Ceseda plutôt que du code de procédure pénale est symptomatique. L'article 2 crée une sorte de garde à vue bis, une retenue par officier de police judiciaire de seize heures après simple notification au procureur de la République -tout cela pour pallier le manque de moyens des préfectures. Après la garde à vue de confort, voici la retenue de confort, régime de privation de liberté sans contrôle du juge judiciaire.

Le Conseil constitutionnel, sur saisine des socialistes, a validé le dispositif, dans lequel l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) est tardive. La plupart des étrangers sont éloignés avant qu'il intervienne. Or ce contrôle judiciaire est essentiel. Depuis la réforme de l'été 2011, ce sont 25 % des personnes concernées qui sont éloignées dans les cinq premiers jours, sans que le JLD n'intervienne. Contrairement à ce que dit l'étude d'impact, le JLD ne vérifie pas dans tous les cas si la privation de liberté est régulière et nécessaire. L'affaiblissement, voire l'absence de contrôle judiciaire, est impropre à assurer un plus grand respect des droits par la police et l'administration. Il faut y remédier par le retour du JLD à quarante-huit heures. Le dispositif proposé ressemble fort à la garde à vue d'avant 2011, sauf qu'il est utilisé à l'encontre de personnes qui n'ont commis aucune infraction.

Autre désenchantement : ce projet fait une interprétation a minima des arrêts de la CJUE et de la Cour de cassation ; en oubliant de garantir des droits essentiels, il expose la France à de nouvelles condamnations.

L'article 8 ne va pas jusqu'au bout de sa logique. Il risque d'exposer certaines personnes portant assistance à des étrangers en situation irrégulière à des poursuites. Le délit de solidarité n'est pas totalement supprimé. La solution la plus simple aurait été de faire de l'immunité le principe et l'infraction, l'exception.

L'article 7 perpétue la possibilité de prononcer une interdiction judiciaire du territoire. L'article premier prévoit seulement un encadrement des contrôles aux frontières, parti insatisfaisant au regard des principes de non discrimination et de prohibition des contrôles au faciès. Il faut supprimer l'alinéa 1 de l'article L. 611-1 du Ceseda.

La machine à expulser mise en place par le gouvernement précédent est loin d'être grippée. Les dégâts causés par cinq ans de sarkozysme auraient dû conduire à réviser les priorités, à rompre avec les abus de la politique du chiffre et à garantir les libertés fondamentales de toutes les personnes présentes sur notre territoire. Seule la dépénalisation des infractions à la législation sur les étrangers peut contribuer à la reconstruction d'une politique d'immigration respectueuse des droits de chacun. Point n'est besoin d'attendre une réforme du Ceseda. Mais la procédure accélérée ne nous donne pas le temps de mener le travail nécessaire.

Nous continuerons à lutter avec les associations pour les droits des étrangers. Le vote du groupe CRC est suspendu à l'évolution du texte.

M. Hervé Marseille .  - Nous sommes réunis pour combler un vide juridique qui n'est pas sans conséquence sur l'activité des services de police et de gendarmerie, après les arrêts de la CJUE et de la Cour de cassation. La garde à vue était, jusqu'à il y a peu, la principale procédure qu'utilisaient les services afin de retenir les étrangers pour faire le point de leur situation.

Le Gouvernement nous propose de créer une nouvelle mesure de retenue administrative qui répond à des nécessités juridiques et opérationnelles, les dispositions relatives à la vérification d'identité de l'article 78-3 du code de procédure pénale étant inadaptée. Grâce à cette nouvelle procédure, un OPJ pourra retenir un étranger le temps strictement nécessaire à l'établissement de sa situation, et au maximum pendant seize heures ; le procureur sera informé dès le début de la procédure et pourra y mettre fin à tout moment. M. Gorce a suggéré de limiter la rétention à dix heures, prorogeable de six heures. Il vaut mieux, selon nous, s'en tenir au délai de seize heures. Le système complexe de la commission serait source de contentieux.

La restriction du champ du délit de solidarité ne doit pas faire oublier la nécessité de réprimer les réseaux et les trafics. Il ne faut pas faire l'amalgame entre les passeurs avec des associations et des personnes qui apportent une aide humanitaire ; c'est à juste titre que l'article 8 étend l'immunité sans abroger le délit. (Applaudissements au centre et sur les bancs socialistes et RDSE)

M. Jacques Mézard .  - Merci de la hauteur de vue de vos propos, monsieur le ministre. Vous avez rappelé ce que doit être la République laïque, ouverte à tous ceux qui la respectent, loin de toute démagogie. Entre les extrêmes de chaque bord, entre les incantations déraisonnables des uns et les barbelés des autres, il existe une solution de raison qui conjugue règle de droit et tradition humaniste : c'est celle que vous proposez, que nous voterons dans la version la plus proche possible de sa rédaction initiale.

Le débat sur l'identité nationale a laissé un goût d'amertume. M. Baroin le qualifiait d'hippopotame dans une mare desséchée... Confusion et amalgame flattaient les plus bas instincts. La nation n'a pas de problème d'identité avec elle-même. Elle n'oublie pas la contribution ni le sang versé au long des siècles par tant de ses enfants venus d'ailleurs. Le décret de 1938, complété par l'ordonnance de novembre 1945, est toujours le socle de notre droit des étrangers ; Daladier entendait créer « une atmosphère épurée autour des étrangers de bonne foi »... Durant le cycle législatif précédent, les droits des étrangers ont été restreints : cinq lois en huit ans ! La majorité de mon groupe a fermement combattu la loi de juin 2011, qui consacrait la pénalisation du droit des étrangers.

La France peut s'enorgueillir de sa tradition d'accueil. Nous ne pouvons pas, pour autant, ouvrir notre porte à tout étranger qui y frappe. La lutte contre l'immigration clandestine est légitime dans la mesure où elle respecte l'humain et est impitoyable avec ceux qui tirent profit de la misère d'autrui. La circulaire de la garde des sceaux, du 6 juillet dernier, est positive.

La nouvelle procédure de retenue introduite à l'article 2 tire la conséquence des jurisprudences que vous avez évoquées. Une durée minimale est nécessaire aux services compétents pour procéder aux vérifications requises, informer la personne concernée de ses droits, pratiquer -le cas échéant- un examen médical, consulter les fichiers, communiquer avec la préfecture. Scinder cette durée en deux parties ne serait pas raisonnable et alourdirait le travail des services de police comme celui du procureur. L'action des services de l'État est difficile ; les stigmatiser est tout aussi inacceptable que de stigmatiser l'étranger, n'en déplaise aux professionnels de l'angélisme... (M. le ministre apprécie)

M. Jean-Jacques Hyest.  - Très bien !

M. Jacques Mézard.  - Respect de la personne, sanction contre les abus de pouvoir, certes, mais respect de la loi de la République et sanction contre ceux qui la défient. Voila pour nous le fil conducteur de la politique de la République. (Applaudissements à gauche, sur les bancs du RDSE et au centre)

M. François-Noël Buffet .  - Il faut mettre urgemment notre législation en conformité avec la jurisprudence de la CJUE, faute de quoi nos services de police et de gendarmerie seront démunis pour mener à bien leur mission. Je regrette la procédure accélérée, nous n'aurons pas les moyens de vérifier que le dispositif est bien opérationnel.

Depuis la décision de la Cour de cassation du 5 juillet dernier, il est interdit de placer un étranger en garde à vue pour séjour irrégulier. La retenue de quatre heures étant insuffisante pour assurer la solidité des décisions préfectorales, vous avez inventé une procédure proche de la garde à vue.

Nous avons déjà beaucoup débattu de l'aide humanitaire. Personne n'a été condamné pour ce motif.

La France est une terre d'accueil et d'immigration, 180 000 titres de long séjour y sont accordés chaque année. Elle doit aussi rester terre d'intégration. Dans la conception française, tout étranger sur notre sol a vocation à s'intégrer et, à terme, à devenir français. Nous devons assurer l'équilibre permanent entre tradition d'accueil et lutte résolue contre l'immigration clandestine. Fermeté et humanité, en d'autres termes.

Nous participons à la construction progressive d'une politique européenne de l'immigration. Rappelons que la lutte contre l'immigration illégale a été renforcée ces cinq dernières années, de même que la politique d'intégration. Nous devons poursuivre notre lutte contre l'immigration illégale, ce qui suppose des procédures efficaces. Or, depuis cet été, les services de police et de gendarmerie ne disposent plus que de la procédure de vérification d'identité et de quatre heures pour la mener à bien. Cette durée est trop courte pour entreprendre toutes les recherches nécessaires.

Le projet de loi propose une retenue de seize heures et garantit les droits essentiels. Il me paraît important de garder ces seize heures et non de les scinder en deux, comme le propose la commission. Le procureur la contrôlera dès son début et pourra y mettre fin à tout moment.

A l'article 8, vous avez souhaité élargir le champ des immunités pour faire droit aux revendications des associations portant assistance aux migrants. Jusqu'à la loi du 7 juin 2011, que nous avons voulue et soutenue, toute personne aidant au séjour irrégulier d'un étranger encourait des peines de cinq ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende. Le Conseil constitutionnel a jugé, dans ses décisions du 5 mai 1998 et du 2 mars 2004, que ce délit ne saurait concerner les associations humanitaires et que la qualification de l'infraction devait tenir compte du principe énoncé à l'article L. 121-3 du code pénal, selon lequel il n'y a point de délit sans intention de le commettre. Avec la loi de 2011, que je rapportais, une immunité pénale pouvait être invoquée par certaines personnes. Je me souviens du vaste débat suscité par cette mesure.

Je suis dubitatif sur l'utilité de la précision apportée en commission par notre rapporteur, relative aux soins médicaux apportés aux étrangers en situation irrégulière, tant elle paraît évidente. J'attends du ministre et du rapporteur des éclaircissements.

Je souhaite, que les efforts menés depuis cinq ans contre l'immigration illégale soient poursuivis. Si je vous ai bien entendu, monsieur le ministre, ils le seront. Nous voterons ce texte en fonction des réponses qui seront apportées au cours du débat, tout en rappelant notre attachement à la durée unique de seize heures. (Applaudissements à droite).

La séance est suspendue à 19 h 40.

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

La séance reprend à 21 h 40.

M. Jean-Yves Leconte .  - Dans quel état la majorité sortante a-t-elle laissé la France ?

M. Jean-Jacques Hyest.  - Rien à voir !

M. Jean-Yves Leconte.  - Comme sur l'emploi, elle a procrastiné. Incroyable vu sa frénésie législative en matière de droit du séjour ! Elle a attendu 2011 pour réformer la garde à vue, malgré les rappels de la Cour européenne des droits de l'homme, du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation.

Après l'arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet 2012, la garde des sceaux a réagi en urgence à propos de la garde à vue pour les étrangers en situation irrégulière alors que l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne datait du 6 décembre 2011. Le texte prend acte de cette jurisprudence, ce qui souligne combien le précédent gouvernement s'est fourvoyé. Avec cinq lois, il n'a eu de cesse de restreindre le droit des étrangers en dénaturant l'esprit de la directive « Retour » de 2008. Il est heureux, monsieur le ministre, que vous répariez cet errement. Aux termes de ce texte communautaire, le maintien illégal sur le territoire appelle une réponse administrative, la réponse pénale intervient en dernier recours quand toutes les procédures administratives sont épuisées.

Dans son discours du 24 juin 2012,au Bourget, le président de la République a fixé une feuille de route : fermeté à l'égard de l'immigration illégale, accueil dans la dignité des étrangers en situation régulière ou de ceux qui ont vocation à l'être.

Ce texte supprime, dans les faits, le délit de solidarité, c'est heureux.

L'article premier met en conformité notre droit avec la jurisprudence européenne et l'arrêt du 5 juillet 2012 de la Cour de cassation. La seule voie consiste à renforcer l'espace Schengen, bel acquis de la construction européenne, et à harmoniser les règles en son sein, d'Athènes à Bergen, de Gdansk à Gibraltar. Ce combat, le Sénat doit le porter fièrement.

L'article 2 crée une procédure de vérification de situation. Attention au contrôle au faciès néanmoins, que la jurisprudence a clairement condamné. Je rappelle l'engagement n°30 du candidat François Hollande. M. le ministre a rappelé les mesures qu'il entend prendre avec le vouvoiement, le matricule des policiers. Ces mesures sont indispensables pour notre jeunesse, pour le respect de la police républicaine après des années de tension. Veillez à chaque moment que la République garantisse respect et sécurité pour tous. Tel est notre objectif. Notre commission s'est interrogée sur la durée de seize heures, elle a proposé dix heures, puis six heures après information du procureur. Si cette nouvelle procédure offre quelques garanties, je rappelle les règles qui s'appliquent à une mesure de privation de liberté : celle-ci doit être proportionnée à l'objet et ne pas être une simple mesure de confort.

Le chantier de mise à plat de la législation sur les étrangers viendra plus tard. A l'heure où la France traverse une grave crise, rappelons l'apport de l'immigration et les immigrés qui luttèrent dans la Résistance. N'oublions pas ce passé, ce serait criminel.

Bâtissons un droit des étrangers plus humaniste en rétablissant l'ordre de l'intervention des juges : le juge judiciaire avant le juge administratif.

Le délit de solidarité qui piétinait la solidarité est abrogé, c'est le signe que la République est de retour.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous voterons ce premier texte ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et du groupe du RDSE)

M. Stéphane Mazars .  - La majorité du groupe du RDSE s'était fermement opposée à la loi de 2011 sur l'immigration, l'intégration et la nationalité. D'aucuns regrettent que ce texte ne la remette pas à plat. Cela dit, l'urgence est de mettre notre droit en conformité avec la récente jurisprudence de la CJUE et de la Cour de cassation.

Le film Welcome avait rappelé l'engagement des associations humanitaires auprès des étrangers en situation irrégulière. Je connais leur rôle fondamental, en tant qu'avocat. Le délit de solidarité, créé en 1938, a été modifié au gré des alternances. En avril 2009, le groupe du RDSE avait demandé sa suppression. M. Besson, alors ministre, nous avait soutenu que ce délit n'existait pas dans les faits. Il a été désavoué par le Conseil d'État le 19 juillet 2010 : les associations humanitaires peuvent être poursuivies sous cette incrimination. Dans l'Aveyron, j'en ai été témoin. (M. Jean-Jacques Hyest s'exclame) Votre projet de loi s'inscrit dans le cadre d'une philosophie d'ouverture à l'autre. Le champ de l'immunité pénale est élargi. Bien sûr, l'aide humanitaire ne doit pas être instrumentalisée, la lutte doit être menée contre les réseaux d'immigration illégale. Avec ce texte, vous mettrez clairement fin à ce délit. Comme l'a dit un anthropologue néerlandais, l'empathie humaine a un ancrage si profond qu'elle trouvera toujours à s'exprimer. Monsieur le ministre, votre loi nous paraît un support adapté pour cette expression ! (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

M. Jean-Jacques Hyest .  - Nos travaux sont désorganisés. Nous travaillons certains jours ; d'autres, non. Et puis la nuit...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Quelle nouveauté !

M. Jean-Jacques Hyest.  - J'avais prévu de ne pas intervenir mais je dois rétablir certaines vérités. Nous n'aurions pas fait ce qu'il fallait... Monsieur Leconte, savez-vous depuis quand existe l'article L. 622-1 du Ceseda ? Non ! Depuis l'ordonnance de 1945 ! Les cours d'appel de Versailles, d'Aix et de Paris soutenaient que la jurisprudence ne s'appliquait pas à cet article. C'est affaire d'interprétation !

En 2008, nous nous étions interrogés sur les différences de jurisprudence entre la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel... car il y a le contrôle de constitutionnalité et celui de conventionalité.

Dans nos débats, on a confondu contrôle d'identité et vérification d'identité... Les arrêts du 5 juillet 2012 ont effectivement créé un vide.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des lois.  - Vous critiquez M. Guéant !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Mais il aurait pu y avoir une autre interprétation ! Effectivement, les quatre heures de la vérification d'identité ne suffisant pas, une nouvelle procédure était nécessaire.

Je suis toujours gêné de voir qu'on suspecte les forces de police et de gendarmerie de ne pas respecter la loi. En tout état de cause, on a dénombré 60 000 gardes à vue sous ce seul chef, celui de vérification d'identité. Votre texte était donc très nécessaire, ainsi que l'abrogation par coordination du délit de séjour irrégulier. Nous avons besoin d'un outil efficace, respectueux des libertés publiques, nous vous soutiendrons.

Après vingt six ans de Parlement, j'en ai vu des projets et propositions de loi sur ce thème ; eh bien, je n'ai jamais pensé que l'immigration était la source de tous nos maux.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Encore une critique de M. Guéant !

M. Jean-Jacques Hyest.  - L'immigration est une force pour la France, disait mon ami Bernard Stasi. Pour autant, on ne peut pas accueillir toute la « misère du monde » comme l'a dit Michel Rocard.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Vous oubliez toujours la suite de la phrase de M. Rocard.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Vous aurez la parole, monsieur Sueur !

L'ordre d'intervention des juges en rétention est important ; je vous suis, monsieur le ministre. Idem pour l'asile. Ce n'est pas la même chose que l'immigration.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Pour éviter des demandes abusives, il faut renforcer l'Ofpra afin de réduire les délais de traitement, mais aussi adopter des règles communes au niveau européen.

Si le texte n'est pas bouleversé, le groupe UMP le votera.

M. Richard Yung .  - Je ne sais si c'est l'ordre alphabétique mais je suis souvent le dernier à intervenir, quand beaucoup a déjà été dit...

Monsieur le ministre, merci pour votre action. Ces derniers mois, vous avez abrogé des mesures prises dans des conditions peu dignes de la tradition française. Et je donne acte à M. Hyest de la constance de sa position, même si certains de ses amis ont instrumentalisé la question de l'immigration et de la nationalité d'une façon peu digne de nos traditions.

Avec l'abrogation de la circulaire du 31 mai 2011 sur les étudiants étrangers, la fin de la présence des familles en centre de rétention et de la liste des métiers sous tension, vous avez fait preuve de fermeté et de justice, ce qui a démontré la capacité de la gauche à mener une politique d'immigration responsable et respectueuse.

Je salue l'annonce d'un projet de loi sur le droit des étrangers au printemps prochain. Puissiez-vous vous inspirer de notre travail au Sénat et des amendements que nous avions déposés sur la loi Besson et les autres...

Une nouvelle procédure conforme au droit européen pour vérification de situation était indispensable aux forces de police. À mi-chemin entre la vérification d'identité et la garde à vue, elle représente un bon compromis entre efficacité policière et respect des droits du retenu. Un ensemble de garanties fortes -examen par un médecin, assistance par un avocat, aide d'un interprète- est donné à la personne retenue ; la commission y a ajouté le droit d'avertir les autorités consulaires et d'être placé dans un local différent de celui des gardés à vue.

J'ai entendu le débat sur le délai de seize heures ; ne créons pas de défiance envers les forces de sécurité et un dispositif par trop complexe.

Le délit de solidarité ? À Sangatte, certaines personnes ont été mises en cause. Peut-être les procédures n'ont-elles pas abouti, mais cette intimidation, cette menace de représailles judiciaires pour délit de solidarité étaient inacceptable. Ne confondons pas marchands d'hommes et bénévoles généreux qui font vivre le troisième terme de notre devise républicaine. Je me réjouis donc de cet article 8.

Pour finir, je reviendrai sur une question importante : l'intervention inversée du juge administratif et du juge judiciaire par la loi de 2011. Certes, le juge administratif est aussi garant des libertés. Reste que le juge des libertés et de la détention a sa spécificité.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Le problème, c'est que deux juges interviennent !

M. Richard Yung.  - Je suis pour l'intervention du juge judicaire avant celle du juge administratif, tout en sachant que ce n'est pas la panacée. Pour un juge unique, peut-être faut-il créer une juridiction spécialisée ? Toutes les pistes de réflexion sont à examiner. Nous soutiendrons le texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Manuel Valls, ministre .  - Je partage l'analyse du rapporteur : ce texte est équilibré entre lutte ferme contre l'immigration illégale et respect résolu du droit des étrangers. Ce texte, qui apporte des réponses partielles sans revoir l'économie générale du droit des étrangers, sera enrichi par votre commission, notamment sur les contrôles au faciès. Un délai de dix heures renouvelé de six heures ? Cela serait complexe, les garanties sont liées à la procédure. De plus, M. Hyest l'a dit, les forces de police ont besoin de temps pour un examen sérieux.

Madame Cohen est désenchantée ? Il est vrai que nous ne dépénalisons pas totalement le droit des étrangers.

L'ordre d'intervention des juges ? La question est importante, ne légiférons pas dans l'urgence. Le Premier ministre a accepté de nommer un parlementaire en mission, nous y reviendrons.

Le contrôle au faciès ? Je vous invite à voter l'amendement du Gouvernement. Vouvoiement, matricule, caméra, refonde du code de déontologie sont des outils techniques, mais l'essentiel est aussi de travailler sur les mentalités. Cela prendra du temps.

M. Marseille reconnaît que ce texte comble un vide juridique. La retenue nouvelle de seize heures est inférieure à la garde à vue de vingt quatre heures, qui était devenue la norme.

Nul ne doit être inquiété pour avoir apporté une aide humanitaire désintéressée ; cette mesure était attendue car le délit de solidarité pesait comme une épée de Damoclès sur les bénévoles. Le Gouvernement entend mener une politique qui respecte le droit et les droits.

M. Mézard a dénoncé les effets négatifs de l'empilement législatif sur le droit des étrangers. La politique d'immigration est un défi européen. Lundi dernier, lors d'une réunion d'Interpol, j'ai rencontré mon homologue transalpin : en Italie, en raison de sa position géographique, la pression migratoire est très forte -des migrants se noient, entre les côtes tunisienne et italienne ; la pression est forte aussi au Maroc, autour de l'enceinte de Ceuta. Effectivement, nous n'avons pas travaillé dans l'urgence. La durée de seize heures a été fixée après mûre réflexion, depuis l'été, après la décision de la Cour de cassation.

Monsieur Buffet, le précédent gouvernement aurait pu anticiper la décision de la Cour de cassation, il y avait eu des signes. Si la loi de 2011 avait élargi le champ des immunités pénales, elle était empreinte d'ambiguïté ; il fallait avancer. Merci de votre soutien à ce texte, qui n'est certes pas une cathédrale législative.

M. Mazars a eu raison de rappeler l'urgence législative : nos services de police avaient besoin d'une nouvelle procédure de vérification de situation. La suppression du délit de solidarité est symbolique, cela est vrai. Depuis la fermeture de Sangatte, le problème s'est étendu à la côte et à la région parisienne.

Monsieur Leconte, je partage votre sentiment : l'intervention du Gouvernement était nécessaire. Il fallait agir.

L'un des objets de ce texte est d'assurer la conformité de nos contrôles des titres de séjour avec Schengen. Je suis attaché à cet espace de liberté de circulation comme à l'espace judiciaire.. Même s'il existe des problèmes liés à l'intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de cet espace, j'ai été gêné par des déclarations de mon prédécesseur, non suivies d'effets d'ailleurs mais qui laissaient penser que nous pourrions en sortir. J'ai dit, lors du premier conseil Justice et affaires intérieures (JAI), en juin, que la France entendait bien y rester. Les règles de l'asile sont en train d'évoluer. Le Parlement doit anticiper ces évolutions. La retenue ne doit durer que le temps strictement nécessaire. Il n'y aura pas de retenue de confort. Un amendement du Gouvernement permet de limiter le « contrôle au faciès », ce qui répondra à vos attentes. Le cadre juridique sera posé.

Monsieur Hyest, comme vous, je regrette que ce projet de loi soit examiné à cette heure tardive, même si cela n'enlève rien à sa qualité. Notre procédure de retenue est plus brève et plus protectrice des droits. Je partage votre souhait que la politique d'immigration soit équilibrée. En effet, monsieur Hyest, l'asile n'est pas l'immigration. Pour que ce droit reconnu internationalement soit réaliste, il faut des procédures rapides et efficaces, qui empêchent son détournement bien connu dans l'est de la France, à Dijon par exemple. Merci pour votre soutien. La politique de l'immigration doit rassembler les grandes formations républicaines, c'est ma conviction. Je ne suis pas un adepte des abrogations ; les modifications législatives doivent s'accompagner d'une politique efficace.

Monsieur Yung, merci d'avoir souligné la clarté des règles instaurées par ce projet de loi.

Je sors conforté de ce débat de haute tenue. (Applaudissements)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

1° Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° Le premier alinéa est supprimé ;

2° Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et les mots : « visés à l'alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « sous le couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou à séjourner en France »

Mme Éliane Assassi.  - Ce projet de loi ne modifie pas le premier alinéa de l'article L. 611-1 du Ceseda relatif au contrôle des titres de séjour sur l'ensemble du territoire, en se contentant de reprendre l'arrêt de la Cour de cassation. Cette position minimaliste n'est pas satisfaisante au regard du principe de non-discrimination et de prohibition des contrôles au faciès.

Il convient de supprimer purement et simplement l'alinéa 1 de l'article L. 611-1 du Ceseda. Les contrôles de titre de séjour doivent relever du seul code de procédure pénale.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Je ne suis pas certain qu'il faille aller jusque-là. Le dispositif actuel distingue bien les procédures administrative et judiciaire. Il faut aborder cette question avec précaution. Le projet de loi comporte des garanties qui me paraissent prémunir contre les excès. Défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Même avis. Il convient de conserver le caractère administratif du contrôle de la régularité du séjour, qui n'est pas la même chose que le contrôle d'identité.  

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Au premier alinéa, les mots : « de nationalité étrangère » sont remplacés par les mots : « dont la nationalité étrangère peut être déduite d'éléments objectifs extérieurs à la personne même de l'intéressé » ;

M. Manuel Valls, ministre.  - Il a parfois été reproché au contrôle d'être effectué « au faciès ». Nous inscrivons dans la loi une solution proposée par la Cour de cassation. Ces critères ont fait leur preuve et n'empêchent pas l'action des forces de l'ordre. Le fait de sortir d'un véhicule immatriculé à l'étranger, par exemple, est un critère accepté. Cet amendement ne bouleverse pas le droit positif, il le conforte,

Ce problème n'est pas l'obsession des policiers et des gendarmes, surtout si l'on sort de la politique du chiffre.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Avis favorable. Cette proposition traduit une inflexion de l'action des pouvoirs publics en un sens plus respectueux des personnes. Mieux vaut confirmer la jurisprudence de la Cour de cassation que de la contredire, comme on le faisait il y a peu.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien !

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement rend superfétatoire notre amendement n°13. Toute la difficulté réside dans la mise en oeuvre de cette disposition par les forces de l'ordre.

L'amendement n°13 est retiré.

M. Alain Richard.  - Mme Assassi a parfaitement raison en droit. La décision de la Cour de cassation du 28 mars 2012 s'applique déjà. Mais quid du mode d'emploi ? Comment déduire la nationalité d'une personne à partir d'éléments objectifs et extérieurs ? A tout le moins, il faudra une instruction de service de niveau national à l'ensemble du personnel chargé d'appliquer cette disposition.

M. Manuel Valls, ministre.  - La règle juridique est consolidée par l'amendement du Gouvernement. Tout reste à faire en termes de pratique. Nous préciserons ces éléments dans les instructions et dans le code de déontologie.

Tout en dénonçant la politique du chiffre, qui a mis sous tension la chaîne judiciaire, des policiers aux magistrats, je suis attaché à ce que les forces de l'ordre produisent des résultats dans la lutte contre la délinquance, pas des chiffres, des résultats tangibles. Le contrôle des sans-papiers était devenu un élément important de la politique du chiffre.

L'amendement n°27 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 551-1, à la première phrase de l'article L. 552-1, à l'article L. 552-3 et au premier alinéa de l'article L. 552-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « quarante-huit heures ».

Mme Éliane Assassi.  - Cet amendement, qui signe le retour du rôle constitutionnel du juge judiciaire, rétablit l'intervention du juge des libertés et de la détention dès quarante-huit heures. Le Conseil constitutionnel a exigé l'intervention d'un magistrat du siège, ce que n'est pas le procureur, au-delà de quarante-huit heures de privation de liberté,

La disposition que nous amendons n'est pas conforme à la jurisprudence de la Cour de Luxembourg et au respect des droits fondamentaux. En métropole, de plus en plus d'étrangers sont éloignés avant que le juge des libertés et de la détention puisse exercer son contrôle.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - La commission est très sensible à cette réflexion. Je sais combien la bataille fut rude ici pour exiger l'intervention précoce du juge judiciaire. Ce projet de loi très spécifique doit combler un vide juridique, sans développer une réflexion complète sur l'intervention du juge judiciaire. J'irai dans votre sens : aucune reconduite à la frontière ne peut avoir lieu sans contrôle de la légalité de cette décision. Pour l'heure, laissons le temps à la réflexion de se poursuivre. C'est pourquoi l'avis est défavorable, même si nous partageons les mêmes préoccupations.

M. Manuel Valls, ministre.  - Je comprends votre préoccupation. Une mesure privative de liberté doit être rapidement soumise à l'autorité judiciaire. Je vous ai annoncé la nomination d'un parlementaire en mission. Dans l'immédiat, Retrait ou rejet.

Mme Éliane Assassi.  - Je vous entends mais je maintiens l'amendement.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous sommes sensibles à la préoccupation que vous exprimez. Le juge des libertés et de la détention est une institution importante, à laquelle nous sommes tous attachés.

L'inversion éventuelle de l'intervention des juridictions exige assurément réflexion. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, un second texte au printemps prochain et un parlementaire en mission. C'est une bonne idée à condition que la mission soit menée avec célérité afin d'enrichir le débat sur le second texte. C'est un engagement important.

L'amendement n°7 n'est pas adopté.

Article 2

Mme Kalliopi Ango Ela .  - Le groupe écologiste veut rompre avec la politique envers les étrangers menée par l'ancienne majorité. L'article 2 instaure une nouvelle mesure de retenue qui ne nous semble pas nécessaire. La Cour de cassation a tiré les conséquences de la jurisprudence communautaire. Nous estimons qu'il n'en découle nul vide juridique. La vérification d'identité applicable à tous suffit amplement.

La plupart des étrangers ne bénéficient d'aucun contrôle de leur droit par un juge indépendant. Si cet article 2 était adopté en l'état, l'étranger pourrait être reconduit à la frontière avant toute intervention du juge des libertés et de la détention.

Nous étions défavorables à l'article 2 adopté par la commission, nous le sommes encore plus au texte initial du Gouvernement que rétablit son l'amendement n°26 rectifié. Nous voterons contre cet article.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - La nouvelle procédure de vérification de situation, très floue et hybride, a une connotation judiciaire alors qu'elle ne poursuit qu'une finalité administrative : l'éloignement. Ce nouveau dispositif ad hoc ressemble fort à la garde à vue antérieure à la loi du 14 avril 2011, avec des droits garantis extrêmement limités. Il sera utilisé à l'encontre de personnes qui n'auront commis aucune infraction.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Défavorable. La logique de cet amendement consiste à renvoyer à une procédure strictement judiciaire, étrangère à notre tradition juridique et de nature à introduire un biais qui n'est pas souhaitable.

Le dispositif proposé est encadré, il présente des garanties qui marquent une vraie différence par rapport à la situation antérieure. Aucun d'entre nous n'apprécie cette rétention administrative. Néanmoins, il faut pouvoir vérifier la situation particulière de ces personnes en situation irrégulière.

M. Manuel Valls, ministre.  - Nous comblons un vide juridique. Supprimer le coeur de ce dispositif ad hoc et revenir aux quatre heures, c'est priver l'État des moyens de gérer les flux migratoires et de les contrôler.

La retenue permet à l'étranger de faire valoir les droits qui lui sont reconnus. Un État doit disposer des moyens juridiques de mener sa politique. Revenir aux quatre heures serait dramatique pour les étrangers eux-mêmes, et pour les forces de l'ordre.

Un parlementaire en mission sera nommé avant la fin de l'année, il rendra ses conclusions avant la fin du premier trimestre 2013 pour permettre le dépôt d'un projet de loi au premier semestre. Il ne s'agit pas de tout abroger pour tout reconstruire. Ce serait dangereux vu l'état de l'opinion. C'est pourquoi j'ai dit clairement que nous ne procéderions pas à des régularisations massives, comme en 1981 et en 1997. Telle est la feuille de route que j'ai reçue du président de la République et du Premier ministre. Nous serons réalistes et fermes. Le droit doit se traduire en pratique. Les sujets complexes ne souffrent pas la caricature. Défavorable.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

L'amendement n°10 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Buffet et les membres du groupe UMP.

I.  -  Alinéas 9 à 13

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger ne peut être retenu que pour le temps strictement exigé par l'examen de sa situation et, le cas échéant, le prononcé et la notification des décisions administratives applicables. La retenue ne peut excéder seize heures à compter du début du contrôle mentionné au premier alinéa. Le procureur de la République peut mettre fin à la retenue à tout moment.

II.  -  Alinéa 17, première phrase

Remplacer les mots :

la vérification du droit de séjour ainsi que son éventuelle prolongation

par les mots :

ainsi que la vérification du droit de séjour

M. Jean-Jacques Hyest.  - Il est vrai, monsieur le rapporteur, que nous nous étions interrogés lors de l'élaboration du texte de la commission. Nous avons réfléchi et préférons revenir au texte initial du projet de loi. Les seize heures sont un délai maximum : si l'on n'a besoin que de trois heures, on s'en contentera. Je ne vois pas quel intérêt auraient les forces de police de garder les personnes plus longtemps que de besoin.

M. le président.  - Sous-amendement n°38 à l'amendement n°1 de M. Buffet et les membres du groupe UMP, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Amendement n° 1, alinéa 3, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et seulement pour autant que son état de santé, constaté le cas échéant par le médecin, ne s'y oppose pas

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Le présent sous-amendement tend à rétablir la mention, que cet amendement ferait perdre, selon laquelle la retenue ne peut se poursuivre que si le médecin n'a pas considéré, lorsqu'il a examiné l'étranger à sa demande, que son état de santé rendait cette poursuite impossible.

M. le président.  - Amendement identique n°26 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Sous-amendement identique n°41 à l'amendement n°26 rectifié du Gouvernement, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

M. Manuel Valls, ministre.  - Scinder les seize heures en dix plus six poserait plus de problème que cela n'en résoudrait. J'accepte le sous-amendement.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, Chevènement, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

I.  -  Alinéa 9, deuxième et troisième phrases

Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :

La retenue ne peut excéder seize heures à compter du début du contrôle mentionné au premier alinéa.

II.  -  Alinéas 10 à 12

Supprimer ces alinéas.

III. Alinéa 17, première phrase

Remplacer les mots :

, la vérification du droit de séjour ainsi que son éventuelle prolongation

par les mots :

ainsi que la vérification du droit de séjour

M. Jacques Mézard.  - La scission de la durée retenue de l'étranger en deux délais successifs de dix et six heures risque de compliquer inutilement la procédure. Comme l'a dit le président Hyest, dans beaucoup de cas, la retenue durera moins longtemps.

L'amendement n°2 rectifié bis est retiré.

Les sous-amendements identiques nos38 et 41 sont adoptés.

Les amendements identiques nos1 et 26 rectifié, sous-amendés, sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 16

Remplacer le mot :

information

par le mot :

autorisation

M. Jean-Yves Leconte.  - Selon l'étude d'impact, pourra également être consulté le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED). Or ce fichier, lui, n'est pas un fichier administratif mais un fichier judiciaire.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - De la réponse du ministre dépendra notre position, qui incline au retrait. Les informations ne peuvent être consultées que par des personnes strictement habilitées.

M. Manuel Valls, ministre.  - Cet amendement veut calquer le régime de prise d'empreintes sur l'article 78-3 du code de procédure pénale.

Cependant, la procédure du projet de loi est conforme à la nature de ce texte. La prise d'empreintes vise à rechercher l'identité de la personne aux fins d'établir son droit au séjour, sous le contrôle de l'autorité judiciaire. Le procureur en est informé. Retrait.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Nous ne sommes pas convaincus par l'argumentation du Gouvernement. L'objectif de l'amendement Leconte n'est pas tant d'obtenir l'autorisation du procureur que de préciser l'encadrement du dispositif. Avis favorable à l'amendement de M. Leconte.

M. Manuel Valls, ministre.  - Ce n'est pas correct.

M. Alain Richard.  - J'irai dans le sens du Gouvernement. On ne peut négliger le fait qu'un nombre significatif de personnes en situation irrégulière sur le territoire français disposent de papiers d'identité contrefaits. Donc, la vérification des empreintes s'impose ; le risque est, pour la personne, que la comparaison d'empreintes débouche sur une enquête judiciaire, laquelle offrira toutes garanties. Dans nos mairies, les agents font tous les ans des stages de reconnaissance de papiers contrefaits, ce qui n'est pas sans résultat.

M. Jean-Yves Leconte.  - Mieux vaut une autorisation du procureur qu'une simple information. Mon amendement légitimera le recours au fichier des empreintes digitales, sans le rendre impossible.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - La Cnil, dans sa décision du 14 octobre 1986, a exclu expressément la consultation de ce fichier dans le cadre de la police administrative.

M. Alain Richard.  - La Cnil ne fait pas la loi.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Mais le décret tient compte de son avis.

M. Jacques Mézard.  - M. Richard a raison sur la nature de l'avis de la Cnil. Mais le texte du projet de loi n'a rien d'inquiétant. D'ailleurs, M. Leconte justifie maintenant la durée de seize heures qui autorisera toutes les vérifications. Avec cet amendement, on est dans la défiance, le procès d'intention. Vous accordez peu de crédit au système judiciaire de la République...

M. Manuel Valls, ministre.  - Nous sommes dans un débat de principe. Je le lui dis avec amitié, le rapporteur se trompe : l'article L. 611-4 est un outil pour mettre en oeuvre l'article L. 611-1. Nous ne parlons pas de contrôle d'identité mais d'identification de celui qui n'a pas les pièces et titres exigés par l'article L. 611-1. Je confirme ma demande de retrait.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Effectivement, le débat n'est pas central. Le Gouvernement s'appuie sur l'article L. 611-4, fort bien ; encore faut-il qu'il prenne le décret nécessaire, ce qu'il n'a pas fait. Dans un souci d'apaisement, et malgré les commentaires peu amènes de M. Mézard, je demande à M. Leconte de retirer son amendement.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La demande d'un décret n'est pas déraisonnable. Le ministre peut indiquer son intention de prendre ce texte. Ainsi, M. Leconte pourrait retirer son amendement avec plus d'ardeur encore.

M. Manuel Valls, ministre.  - L'article L. 611-4 a été élaboré en réponse à l'avis de la Cnil. Je m'engage à donner les éléments nécessaires, nous avons besoin de cette consultation de fichier.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je m'incline.

L'amendement n°14 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 21

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le contrôle de leur respect est assuré par le juge des libertés et de la détention lorsqu'il est saisi en vertu de l'article L. 552-1.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement désigne le JLD comme le garant des exigences légales relatives à la nouvelle procédure de retenue. Il faut prévenir le risque de conflit de compétence. Si le ministre confirme ce que j'ai lu dans le rapport de Gaëtan Gorce, cet amendement n'aura plus d'objet.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Le Gouvernement confirmera sans doute mon jugement. Retrait, sinon rejet.

M. Manuel Valls, ministre.  - La crainte d'un possible conflit entre les deux juridictions est infondée. En outre, l'amendement créerait la confusion car aucune mention du juge compétent n'est faite pour la garde à vue.

L'amendement n°16 est retiré.

L'article 2, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'application de l'article 2, qui précise notamment la durée moyenne nécessaire à la vérification du droit de circulation ou de séjour sur le territoire français de l'étranger, la durée moyenne nécessaire pour le prononcé et la notification des décisions administratives applicables, et la durée moyenne de la retenue appliquée en vertu de cette disposition.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous demandons un rapport sur l'application de cette loi après un an de mise en oeuvre. Cela dit, je conviens que le Parlement a les moyens d'exercer un tel contrôle. Je serai vigilant.

L'amendement n°17 est retiré.

Article 3

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

L'amendement de coordination n°9, rejeté par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Article 4

M. le président.  - Amendement n°37 rectifié, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

la conduire sans délai dans un local de police où elle est remise à un officier de police judiciaire

par les mots :

en rendre compte à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors leur ordonner sans délai de lui présenter sur le champ le contrevenant

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Selon l'étude d'impact, l'article 67-1 nouveau « permet un simple alignement de la situation des agents des douanes sur le régime applicable aux autorités qui sont mentionnées à l'article 78-6 du code de procédure pénale ». Toutefois, la rédaction proposée présente une différence significative avec l'article 78-6 : elle ne prévoit pas que le douanier doive contacter immédiatement l'officier de police judiciaire et obtenir de ce dernier l'autorisation de lui amener la personne. D'où cet amendement de précision.

M. Manuel Valls, ministre.  - L'amendement est en effet nécessaire car les agents des douanes ne possèdent pas la qualité d'OPJ. Favorable.

L'amendement n°37 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis À la première phrase du premier alinéa de l'article 67 quater, après les mots : « vérifier le respect », sont insérés les mots : « , par les personnes dont la nationalité étrangère peut être déduite d'éléments objectifs extérieurs à la personne même de l'intéressé, » ;

L'amendement de coordination n°40, accepté par la commission, est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

Article 5

Mme Kalliopi Ango Ela .  - En décembre 2011, la CJUE rappelait que l'emprisonnement de l'étranger en situation irrégulière était par principe incompatible avec son éloignement et qu'il ne pouvait y avoir de sanction pénale dans le seul cadre du séjour irrégulier. Nous saluons donc l'action du Gouvernement. Le symbole est fort : l'étranger n'est plus considéré comme un délinquant. Toutefois, nous regrettons le maintien du délit d'entrée irrégulière sur le territoire. L'action publique en la matière se prescrivant dans un délai de trois ans, les étrangers entrés irrégulièrement en France, et s'y étant maintenus depuis, seront toujours inquiétés ; les effets du maintien de ce délit sont en réalité équivalents à celui du délit de séjour irrégulier. C'est pourquoi il faut réduire à huit jours le délai dans lequel le délit peut être constaté, sans quoi on vide le texte de sa substance. Nous nous rangeons derrière les propositions du rapporteur de la commission des lois.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« La peine prévue au premier alinéa n'est encourue que lorsque le délit est constaté dans un délai de huit jours à compter de sa commission. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Je retire mon amendement au profit de celui du rapporteur.

L'amendement n°18 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

I.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l'application du présent article, l'action publique ne peut être mise en mouvement que lorsque les faits ont été constatés dans les circonstances prévues à l'article 53 du code de procédure pénale. »

II.  -  En conséquence, alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Je salue le travail de M. Leconte sur ce texte. Le délit d'entrée irrégulière se prescrit actuellement par trois ans. Afin d'éviter qu'il n'ait des effets similaires au délit de séjour irrégulier, que le texte abroge, l'amendement propose que les poursuites pénales ne pourront être engagées que lorsque les faits ont été constatés en état de flagrance.

M. Manuel Valls, ministre.  - Je salue à mon tour le travail de M. Leconte, ainsi que celui de la commission. La précision pouvait faire l'objet d'une instruction du garde des sceaux aux parquets. Cela dit, j'entends votre préoccupation d'éviter toute contrariété avec le directive « Retour » : sagesse.

L'amendement n°28 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

Article 6

Mme Kalliopi Ango Ela .  - Les sénateurs écologistes regrettent la création d'un nouveau délit de maintien sur le territoire qui ressort d'une interprétation extensive, pour ne pas dire erronée, de la jurisprudence de la CJUE. Rien n'oblige la France à créer un tel délit, comme le confirme le rapport Gorce. Si j'ai conscience des améliorations apportées par la commission, celles-ci ne dissipent pas le flou et n'éviteront pas la censure du Conseil constitutionnel. Le groupe écologiste ne votera pas cet article, ni obligatoire, ni nécessaire.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - Je reprends à mon compte les propos de Mme Ango Ela. Le Gouvernement pouvait abroger purement et simplement toute pénalisation du séjour irrégulier -ce que nous souhaitons- ou prévoir qu'il serait encouru seulement après la mise en oeuvre de toutes les mesures coercitives prévues par l'article 8 de la directive ; c'est cette option qu'il a retenue. J'ajoute que cet article est redondant dès lors qu'existe le délit d'obstruction à une mesure d'éloignement.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - En l'occurrence, le verre est plutôt aux trois quarts plein : le délit de séjour irrégulier est supprimé. Il faut faire respecter le droit des personnes autant que la loi républicaine. Ce qui suppose de donner à l'État les moyens de sanctionner une personne qui ne souhaite pas quitter le territoire alors que toutes les diligences ont été faites pour qu'elle se soumette aux lois de la République. La politique d'intégration, la lutte contre les discriminations n'en seront que plus fortes. La jurisprudence comme la directive sont respectées. L'avis est défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - J'irai dans le même sens que le rapporteur. La décision de la CJUE est claire : l'action pénale est légitime lorsqu'elle vient après l'épuisement de toutes mesures propres à garantir un éloignement effectif. Allez plus loin comme le veut Mme Assassi ? L'État de droit ne peut se démunir totalement contre un étranger qui ne respecte pas la loi. Cependant, pour apaiser les inquiétudes, le Gouvernement a déposé un amendement de clarification. Soyez claire, madame Assassi : voulez-vous d'une politique d'éloignement ? Si ce n'est pas le cas, c'est une vraie différence entre nous...

M. Alain Richard.  - Dans le dispositif du Gouvernement, le juge correctionnel devra contrôler régulièrement la régularité des actes administratifs. Ce sera source de contentieux. Il faut poursuivre la réflexion. Je voterai néanmoins l'amendement du Gouvernement.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

 « Tout étranger qui, faisant l'objet d'une mesure de refus d'entrée en France, d'un arrêté d'expulsion, d'une mesure de reconduite à la frontière, d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une interdiction judiciaire du territoire, se sera maintenu sur le territoire français alors que l'administration a accompli toutes les diligences lui incombant dans l'exécution effective de la procédure d'éloignement en mettant en oeuvre régulièrement les mesures de rétention administrative ou d'assignation à résidence respectivement prévues aux titres V et VI du livre V, sera puni d'une peine d'emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 €. »

M. Manuel Valls, ministre.  - Amendement de précision.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 2

Après les mots :

ou d'une interdiction judiciaire du territoire,

insérer les mots :

devenus définitifs,

M. Jean-Yves Leconte.  - Je soutiendrai l'amendement du Gouvernement n°39. Toutefois, il faut une précision : les mesures doivent être devenues définitives.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Il restera des difficultés dans la pratique, liées à l'interprétation de la jurisprudence de la CJUE. Quand considérera-t-on par exemple que l'administration a fait toute diligence ? Ne vaut-il pas mieux en rester à la rédaction de la commission ? Cela motivera notre double avis défavorable, le temps de trouver une solution à l'Assemblée nationale.

M. Manuel Valls, ministre.  - Je suggère de suivre l'avis du rapporteur.

L'amendement n°39 est retiré, de même que l'amendement n°19.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés : 

... - Après le premier alinéa du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l'application de l'alinéa précédent, le seul fait de ne pas exécuter une mesure de reconduite à la frontière ou une obligation de quitter le territoire français ne peut être assimilé au fait de se soustraire à ladite mesure. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Le maintien sur le territoire équivaut-il à la volonté de se soustraire à une obligation de quitter le territoire ? Les peines prévues sont différentes. Bref, c'est un amendement d'appel.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - La réflexion se poursuit, le Gouvernement donnera toutes les précisions utiles. Retrait ?

M. Jean-Yves Leconte.  - Volontiers.

L'amendement n°21 est retiré.

L'article 6 est adopté.

L'article 7 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mmes Benbassa, Aïchi, Ango Ela, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, Mme Archimbaud, M. Desessard et Mme Lipietz.

Avant l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premier, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « faciliter », sont insérés les mots : « dans un but lucratif » et les mots : « la circulation » sont remplacés par les mots : « le transit ».

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Cet amendement précise que l'aide au séjour irrégulier ne peut être poursuivie que si elle est apportée dans un but lucratif.

Sans cette précision, aider à recharge un téléphone portable serait encore passible de poursuites pour délit de solidarité car l'acte n'est pas mentionné dans la liste. Il faut sanctionner les seules aides au séjour irrégulier à but lucratif, celles des passeurs et des marchands de sommeil.

De même, un chauffeur de taxi qui transporterait un étranger en situation irrégulière pourrait être poursuivi. Le terme de « transit » est plus précis que celui de « circulation » et vise expressément les passeurs.

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux personnes physiques ou morales poursuivant un but non lucratif. »

Mme Éliane Assassi.  - Ce texte ne supprime pas le délit de solidarité, il ne fait qu'élargir le champ de l'immunité. Celle-ci doit devenir le principe et l'infraction, l'exception.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Si nous devons répondre aux souhaits des associations, ne fragilisons pas notre arsenal juridique contre les filières d'immigration illégale. D'autant que ce délit a donné lieu à très peu de poursuites.

Je comprends, pour autant, votre volonté d'achever totalement le délit de solidarité, une valeur étrangère au ministre qui l'a porté.

M. Manuel Valls, ministre.  - L'amendement n'est pas anodin : il affaiblirait totalement la lutte contre les filières. Il faut étendre les immunités pénales en maintenant le délit d'entrée irrégulière : il y a là un équilibre à ne pas bouleverser. Défavorable.

L'amendement n°5 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°12 rectifié.

Article 8

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis Au 1°, les mots : « , sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément » sont supprimés ;

II.  -  Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

2° Le 2° est ainsi modifié :

a) Les mots : « sauf si les époux sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou » sont supprimés ;

b) Il est complété par les mots : « , ou des ascendants, descendants, frères et soeurs de son conjoint ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui » ;

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Peut-être en suivant les préceptes d'une ancienne congrégation religieuse...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Pourquoi ancienne ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - ...nous voulons modifier l'article L. 622-4 du Ceseda pour le rendre conforme au code civil : les époux sont tenus à un devoir d'assistance, jusqu'au divorce, ce que n'aurait pas désavoué la Compagnie de Jésus... L'immunité pénale doit être étendue au conjoint séparé.

M. Manuel Valls, ministre.  - Il y a un siècle, ma famille exerçait, dans un pays voisin, le triste métier de banquier de cette Compagnie... Sagesse.

L'amendement n°33 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 4° De toute personne physique ou de toute personne morale ne poursuivant pas un but lucratif portant assistance aux étrangers et leur fournissant de façon désintéressée des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinés exclusivement à leur assurer des conditions de vie dignes et décentes. »

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Amendement de clarification rédactionnelle.

L'amendement n°4 est retiré.

L'amendement n°29, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

Article 9

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

1°A Au 1°, les mots : « , sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément » sont supprimés ;

II.  -  Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Le 2° est ainsi modifié :

a) Les mots : « sauf s'ils sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou » sont supprimés ;

b) Il est complété par les mots : « , ou des ascendants, descendants, frères et soeurs de son conjoint ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui » ;

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.  - Moi aussi, monsieur le ministre, j'aime la rhétorique... Cependant, l'amendement est de coordination.

L'amendement n°34, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°30, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 4° De toute personne physique ou de toute personne morale ne poursuivant pas un but lucratif portant assistance aux étrangers et leur fournissant de façon désintéressée des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinés exclusivement à leur assurer des conditions de vie dignes et décentes. »

L'amendement de coordination n°30, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 9, modifié, est adopté.

Article 10

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

1°A Au 1°, les mots : « , sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément » sont supprimés ;

II. - Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Le 2° est ainsi modifié :

a) Les mots : « sauf s'ils sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou » sont supprimés ;

b) Il est complété par les mots : « , ou des ascendants, descendants, frères et soeurs de son conjoint ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui » ;

L'amendement de coordination n°35, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 4° De toute personne physique ou de toute personne morale ne poursuivant pas un but lucratif portant assistance aux étrangers et leur fournissant de façon désintéressée des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinés exclusivement à leur assurer des conditions de vie dignes et décentes. »

L'amendement de coordination n°31, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 10, modifié, est adopté.

Article 11

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

1°A Au 1°, les mots : « , sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément » sont supprimés ;

II. - Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Le 2° est ainsi modifié :

a) Les mots : « sauf s'ils sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou » sont supprimés ;

b) Il est complété par les mots : « , ou des ascendants, descendants, frères et soeurs de son conjoint ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui » ;

L'amendement de coordination n°36, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Gorce, au nom de la commission.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 4° De toute personne physique ou de toute personne morale ne poursuivant pas un but lucratif portant assistance aux étrangers et leur fournissant de façon désintéressée des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinés exclusivement à leur assurer des conditions de vie dignes et décentes. »

L'amendement de coordination n°32, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 11, modifié, est adopté.

L'article 12 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

Mme Kalliopi Ango Ela .  - Je me réjouis des annonces faites par le ministre sur le futur projet de réforme du Ceseda : la création d'une carte de séjour de trois ans, qui évitera bien des tracas aux étrangers et favorisera l'intégration, ainsi que son engagement de réduire le délai de traitement des demandes d'asile par un accroissement des effectifs de l'Ofpra et de la CNDA. Nous attendons beaucoup du texte dont nous débattrons au premier semestre 2013 et de la nomination d'un parlementaire en mission sur les interventions respectives du juge judiciaire et du juge administratif. Nous faisons partie, monsieur le ministre, des élus soucieux de favoriser l'admission au séjour des étrangers intégrés.

Néanmoins, je regrette la création d'un nouveau délit à l'article 6 et de la nouvelle procédure de retenue de seize heures. Mais je salue la réduction du délai de prescription après l'adoption de l'amendement n°28.

Le groupe écologiste s'abstiendra, en espérant que nous pourrons soutenir le Gouvernement au printemps.

Mme Éliane Assassi .  - Notre désenchantement n'a pas disparu à l'issue de ce débat. Je rappelle la saisine du Conseil constitutionnel par le groupe socialiste lorsque le gouvernement Sarkozy a fait reculer l'intervention du JLD à cinq jours : c'était hier... Monsieur le ministre, vous avez dit que les lois de la République s'appliquaient à tous de la même manière. C'est faux. De nombreuses dispositions du Ceseda témoignent du contraire. Il existe bien un droit spécifique applicable aux étrangers. Aucune urgence ne s'imposait, sinon une réforme profonde du Ceseda.

Nous nous étonnons enfin que ce projet ne soit pas cosigné par le ministre de la justice. Le groupe CRC votera contre ce projet de loi.

M. Jean-Yves Leconte .  - Je me félicite de la qualité de nos échanges. Même ceux qui ne voteront pas le texte ont soulevé des questions qui nous touchent et sur lesquelles nous reviendrons dans le cadre de la future réforme du Ceseda.

L'article premier empêche les contrôles au faciès, mais tout se jouera dans la façon dont il sera appliqué. Sur les articles 2 et 6, le bicamérisme fera son office ; il est essentiel de veiller à l'utilisation des fichiers. Les précisions apportées à l'article 6 rendent la loi plus claire.

Nous sommes impatients de travailler, monsieur le ministre, sur une nouvelle version du Ceseda qui rappellera notre tradition d'accueil et notre histoire. Nous voterons ce texte.

M. Jacques Mézard .  - Je confirme que mon groupe votera unanimement ce texte indispensable. Il y a urgence. Ce texte qui respecte les droits fondamentaux est équilibré entre nécessités du contrôle et respect des libertés des personnes concernées. Nous le soutiendrons sans aucun état d'âme.

M. Jean-Jacques Hyest .  - Nous vous confirmons, monsieur le ministre, que nous voterons ce texte. On ne peut laisser sans moyens les services chargés de contrôler -légitimement- les flux migratoires. Ce contrôle doit être efficace. Se contenter de quatre heures de vérification, c'est annihiler toute politique de l'immigration et l'État de droit. Tenons compte de l'évolution du monde ! Les nouveaux migrants arrivent d'Erythrée, de Somalie.

Mme Éliane Assassi.  - Pourquoi ? Vous interrogez-vous sur les causes ?

M. Jean-Jacques Hyest.  - Un effort supplémentaire en matière de politique de développement est indispensable. Le réduire, même dans cette période de disette budgétaire, serait une regrettable erreur sur le long terme. L'aide au développement doit, dans le cadre européen, contribuer à diminuer les flux migratoires. Nous voterons, je le répète, ce texte respectueux des valeurs de la République et de l'État de droit.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Le travail de la commission a été approfondi. Il y a eu débat, qui a pris en compte la condition des êtres humains soumis à la procédure : présence d'un avocat, d'un interprète, d'un médecin, contact avec les autorités consulaires. Il est précisé, grâce à la vigilance du rapporteur, que les opérations de vérification sont soumises au contrôle du procureur de la République. Ces procédures garantiront les libertés et les droits des personnes.

Nous attachons beaucoup d'importance, monsieur le ministre, à ce que vous avez dit. Ce juge des libertés et de la détention joue un rôle important : il n'est pas un intrus dans un centre de rétention, il y est utile. Vous ne voulez pas en traiter à la légère. Après le rapport de notre collègue parlementaire qui sera cadré dans le temps, nous reviendrons sur cette question lors de l'examen du prochain projet de loi.

Il n'y a chez nous aucun fétichisme : il ne s'agit pas d'abroger pour abroger. Nous ne pouvons ignorer ce que nous avons défendu ici avec M. Badinter. Après la mission d'un parlementaire, un projet de loi d'ensemble nous sera proposé et nous reparlerons de la présence du juge des libertés.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Il le faudra.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Ne nions pas les divergences qui se sont exprimées et qui traversent les groupes politiques eux-mêmes. Mais des garanties ont été apportées. Ce débat a été utile.

Puisqu'ici certains intervenants ont été, sont ou seront des amis de Michel Rocard, n'est-ce pas, madame Assassi, les deux membres de sa citation que vous avez rappelés, monsieur le ministre, et que M. Hyest a cité de manière cursive nous sont chers. La France est une terre ouverte, où l'on a le sens de l'accueil en même temps que le souci de maîtriser l'immigration : ce n'est pas contradictoire mais complémentaire. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Le projet de loi est adopté.

M. Manuel Valls, ministre.  - Je remercie toutes celles et tous ceux qui ont participé à ce débat de qualité, sur un sujet délicat. J'ai rappelé les choix du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Nous publierons dans quelques jours une circulaires sur les régularisations. Nous préparons un projet de loi, notamment sur un nouveau titre de séjour, après le travail du parlementaire en mission et le débat qui se tiendra au Parlement sur l'immigration économique et celle des étudiants.

Il fallait abandonner le délit de solidarité et combler le vide juridique afin que l'État de droit puisse traiter des dossiers des étrangers en situation irrégulière. C'est une politique juste, respectueuse des droits des personnes et ferme, qui tient compte de la situation de l'Europe et du monde. Voter à une très large majorité ce texte, ce n'est pas seulement approuver cette politique mais renforcer la cohésion de notre pays.

Prochaine séance lundi 12 novembre 2012, à 15 heures.

La séance est levée à 1 heure.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du lundi 12 novembre 2012

Séance publique

A 15 heures et le soir

1. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) (n°455, 2011-2012).

Rapport de M. Bertrand Auban, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°75, 2012-2013).

Texte de la commission (n°76, 2012-2013).

2. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord relatif aux pêches dans le sud de l'océan Indien (n°714, 2011-2012).

Rapport de M. André Trillard, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°77, 2012-2013).

Texte de la commission (n°78, 2012-2013).

3. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne et ses États membres (n°715, 2011-2012).

Rapport de M. Christian Cambon, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°79, 2012-2013).

Texte de la commission (n°80, 2012-2013).

4. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires (n°719, 2011-2012).

Rapport de M. André Trillard, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°81, 2012-2013).

Texte de la commission (n°82, 2012-2013).

5. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (n°103, 2012-2013).

Rapport de MM. Yves Daudigny, Ronan Kerdraon, Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès et M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°107, 2012-2013).

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n°104, 2012-2013).