Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF pour 2006 - Mission « Enseignement scolaire » et article 80 - Examen du rapport spécial

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a examiné le rapport de M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, sur la mission « Enseignement scolaire » et l'article 80 rattaché à la mission « Enseignement scolaire ».

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé l'importance des enjeux, ainsi que celle des moyens, concernant la mission « Enseignement scolaire », qui représentait 17,8 % du budget général de l'Etat.

Il a précisé que l'application de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 partageait l'esprit de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Elle avait en effet fixé des objectifs et des indicateurs de performance, ainsi qu'un certain nombre d'éléments chiffrés concernant le système scolaire. Il a souligné que le système scolaire disposait de facteurs d'ajustement, mais que ces derniers étaient limités pour deux raisons : d'une part, il a observé l'existence de contraintes s'agissant des effectifs inégalement répartis sur le territoire, ce qui supposait de la part de l'administration un perpétuel effort d'adaptation géographique ; d'autre part, il a remarqué l'évolution des besoins liés au monde professionnel, qui impliquait des changements dans les filières d'enseignement général et professionnel.

Il a ensuite indiqué qu'au titre de la LOLF, un certain nombre d'indicateurs du projet annuel de performances avaient été modifiés afin, notamment, de supprimer les indicateurs dits « de moyens ». Il a toutefois relevé qu'en matière d'éducation, la disponibilité des indicateurs de performance ne serait pas immédiate dans la mesure où leur élaboration nécessitait des séries longues et des éléments de comparaison.

Il a précisé les changements majeurs du périmètre de la mission « Enseignement scolaire ». A savoir les nouvelles modalités de budgétisation des crédits des pensions civiles et de certaines cotisations sociales, ainsi que l'application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui avait notamment transféré aux collectivités territoriales la compétence des transports scolaires en Ile-de-France et la rémunération des personnes non titulaires exerçant des fonctions ouvrières et de service.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a mis l'accent sur le caractère interministériel de la mission « enseignement scolaire » en indiquant qu'à côté du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, figurait le ministère de l'agriculture, de la pêche et des affaires rurales. Il a indiqué que le programme « Enseignement technique agricole » concernait 173.000 élèves et regroupait 2,1 % des crédits de la mission, tout en précisant que le ministère de l'agriculture était l'un des seuls ministères à avoir respecté la LOLF en matière d'enseignement et à avoir intégré la mission « Enseignement scolaire », ce dont il s'est félicité.

S'agissant du programme 140 « Enseignement scolaire public du 1er degré », M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a souhaité mettre l'accent sur la grève administrative des directeurs d'école qui durait depuis sept ans. Il a indiqué que l'exercice de la fonction de directeur d'école, donnait lieu à un paradoxe, dans la mesure où cette fonction était confiée, dans certains cas, à de jeunes professeurs, alors que partout ailleurs, les fonctions de direction requéraient un minimum d'expérience. Il a souligné l'importance de définir le rôle du directeur d'école. Il a rappelé que l'extension de la décharge horaire, dont bénéficiaient actuellement les directeurs d'école de plus de cinq classes, aux directeurs d'école de moins de cinq classes représenterait un coût d'environ 9.000 emplois équivalent temps plein.

S'agissant du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré », il a indiqué que, dans le cadre de l'ajustement de l'offre d'enseignement aux besoins des établissements, la polyvalence des enseignants était un enjeu important pouvant permettre une adaptation relativement rapide aux évolutions constatées. Il a, néanmoins, relevé que si la pluridisciplinarité des enseignants était dans l'intérêt du ministère, elle ne présentait aucun avantage pour les enseignants. Il s'est interrogé sur la manière dont on pourrait rendre cette polyvalence attractive.

S'agissant du programme 230 « Vie de l'élève », il a observé que les bourses faisaient régulièrement l'objet d'une sous-consommation des crédits, tout comme les fonds sociaux, reportant de ce fait d'une année sur l'autre d'importants reliquats. Il a ainsi précisé qu'en 2005 les fonds sociaux des collèges, des lycées, ainsi que ceux des cantines avaient reporté un reliquat de plus de 48 millions d'euros.

S'agissant du programme 139 « Enseignement scolaire privé du premier et du second degré », M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a noté que l'application du principe de parité avec l'enseignement public avait suscité des débats compte tenu, notamment, de la baisse des effectifs dans l'enseignement public du second degré et de la hausse des effectifs dans l'enseignement privé du second degré.

S'agissant du programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », il a souligné que les indicateurs de performance avaient fait l'objet de nombreuses modifications. Il a également précisé que les subventions allouées aux associations qui soutenaient et développaient la politique de l'éducation nationale du ministère enregistraient une modification liée à la LOLF. Il a indiqué que, dorénavant, cette subvention intégrerait une enveloppe financière correspondant aux besoins de rémunération de ces associations. Ainsi les emplois mis à leur disposition seront, conformément à la demande de la Cour des comptes, transformés en situation de détachement.

S'agissant du programme 143 « Enseignement technique agricole », M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a souligné l'existence de difficultés financières résultant de diverses opérations de régularisation budgétaire depuis 2002, contraignant l'enseignement technique agricole à fonctionner avec des moyens réduits. Et cela, alors même qu'il réalisait des performances très satisfaisantes en matière d'intégration de ses élèves et qu'il parvenait à fournir des réponses éducatives adéquates à des élèves en difficulté. Dans cette perspective, il s'est prononcé en faveur d'une augmentation des crédits de ce programme.

Enfin, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a approuvé l'article 80 du projet de loi de finances rattaché à la mission interministérielle « Enseignement scolaire » relatif au fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Il a expliqué que cet article permettait au ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, de déduire de sa contribution pour non-respect de son obligation d'emplois de 6 % de personnes handicapées, les rémunérations des assistants d'éducation exerçant des fonctions d'accompagnement à la scolarité des élèves ou étudiants handicapés. Il a estimé normal que cet effort financier, d'environ 125 millions d'euros en 2006, puisse être pris en compte dans la mesure où il contribuait à l'insertion sociale et professionnelle des personnes en situation de handicap.

En conclusion, il a souligné que l'application de la LOLF était perçue positivement par les recteurs qui appréciaient de connaître exactement les objectifs qui leur étaient fixés. Il s'est également interrogé sur les méthodes d'enseignement dans certaines matières. Enfin, il a souligné la faiblesse de la formation scientifique.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur spécial pour la qualité de son exposé. Il s'est félicité de ce que la LOLF puisse être source d'améliorations dans la gestion des deniers publics.

M. Alain Lambert a estimé nécessaire que le ministère clarifie sa politique concernant la grève administrative des directeurs d'école. Il s'est également déclaré favorable à la mise en place d'instruments d'incitation afin de développer la polyvalence des enseignants. Il a également souligné concernant l'enseignement privé, qu'on ne pouvait pas ne pas tenir compte de l'arbitrage des familles. Il a enfin confirmé que l'enseignement technique agricole avait fait, par le passé, l'objet de nombreuses régulations budgétaires.

M. Aymeri de Montesquiou a exprimé le souhait que les comparaisons avec les autres pays de l'Union européenne soient systématisées. Il s'est inquiété du faible taux de consommation des bourses et s'est également interrogé sur la nature des enseignements dispensés par l'enseignement technique agricole.

En réponse, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a expliqué que l'enseignement technique agricole n'avait pas vocation à former seulement des agriculteurs mais préparait également les jeunes à des métiers liés par exemple à l'environnement. Il a insisté sur le fait que, bien souvent, l'enseignement technique agricole permettait une intégration sociale et professionnelle de jeunes en voie de déscolarisation.

Après avoir regretté l'absence de développement du rapporteur spécial sur la réduction des zones d'éducation prioritaire, Mme Marie-France Beaufils s'est inquiétée de la faiblesse de l'enseignement scientifique. Elle a souligné que la problématique des directeurs d'école était un enjeu réel, en précisant que ces personnes devaient remplir de nombreuses fonctions. Elle a, enfin, insisté sur l'importance de l'accueil des enfants handicapés dans le système scolaire et ce le plus tôt possible.

En réponse, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a indiqué qu'en mars 2005, 5.837 assistants d'éducation étaient mobilisés sur des fonctions « d'auxiliaires de vie scolaire » dans l'enseignement public primaire et secondaire et que 13.167 élèves bénéficiaient d'un accompagnement individuel, soit une augmentation de 37 % par rapport à 2004.

A M. Serge Dassault qui s'interrogeait sur l'efficacité du « collège unique » et l'insuffisance de professionnalisation des enseignements, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a répondu que la mise en place d'une option de découverte professionnelle en classe de troisième, suite à la loi d'orientation et de programme du 23 avril 2005, permettait d'améliorer l'orientation des élèves et la construction de leur parcours professionnel. Il a également remarqué que les décisions d'orientation professionnelle ne devaient pas intervenir trop tôt dans le parcours scolaire des élèves, ces décisions nécessitant un certain degré de maturité. En outre, il a ajouté que les filières professionnelles étaient des filières exigeantes. A ce titre, l'orientation des élèves dans ces cursus était une question importante.

En réponse à M. Yann Gaillard, qui s'interrogeait sur les missions du Haut conseil de l'éducation, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a précisé que ce Haut conseil, constitué de neuf membres, pouvait, à la demande du ministère, émettre des avis et formuler des propositions sur la pédagogie, les programmes, l'organisation, les résultats du système éducatif et la formation des enseignants.

M. Jean Arthuis, président, s'est inquiété de l'évolution du nombre des professeurs surnuméraires en rappelant que M. Luc Ferry, alors ministre de l'éducation nationale, s'était engagé en 2003 devant la commission des finances à diminuer ce nombre. Il s'est également interrogé sur l'opportunité d'accueillir dans le système scolaire des enfants âgés de 2 ans, considérant, qu'à cet âge là, il n'y avait pas d'obligation scolaire. Il a également plaidé pour que le problème des directeurs d'école soit résolu, et ce, d'autant plus que cette grève administrative avait un impact direct sur la sincérité des chiffres fournis par le ministère s'agissant des effectifs d'élèves.

En réponse, M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, a indiqué que la France était le seul pays, avec la Belgique, à accueillir dans son système scolaire des enfants âgés de deux ans. Ainsi en Finlande, les enfants ne commençaient à fréquenter l'école qu'à l'âge de sept ans. Il a également remarqué que l'accueil des enfants à l'âge de deux ans répondait, dans les zones rurales, à des logiques spécifiques qu'il importait de modifier. Il a également indiqué que le nombre de professeurs surnuméraires était de 3.800 en 2004. Si on pouvait espérer une baisse de ce chiffre, il ne pouvait, en aucun cas, être réduit à zéro compte tenu des rigidités et des temps d'adaptation propres au système scolaire. En tout état de cause, il a expliqué qu'une baisse de moitié des effectifs des enseignants surnuméraires représenterait une économie importante pour le budget du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de réserver son vote sur ces crédits jusqu'à l'audition de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, prévue pour le mardi 15 novembre 2005.

PJLF pour 2006 - Mission « Culture » et compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » - Examen du rapport spécial

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, sur la mission « Culture » et le compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

A titre liminaire, M. Jean Arthuis, président, a salué la présence de M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la mission « Culture » ainsi que du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » au nom de la commission des affaires culturelles.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a rappelé que la commission des finances avait décidé d'évaluer la capacité des ministères à mettre en oeuvre la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) et de faire « oeuvre pédagogique », quitte à examiner peut-être un peu moins précisément les politiques culturelles elles-mêmes.

Il a indiqué que les données détaillées relatives aux plafonds d'emplois, aux crédits et à leur évolution figuraient dans sa note de présentation. Il préférait ne pas y revenir afin de présenter ses observations sur la mission « Culture », ses programmes et le compte d'affectation spéciale attaché à cette mission.

Il a tout d'abord formulé six observations sur l'organisation générale de la mission « Culture ».

Il a remarqué que cette mission représentait 1,11 % du budget de l'Etat, tout en soulignant qu'il n'avait jamais attaché une importance démesurée à ce seuil « quasi mythique ».

Il a ensuite précisé que la justification des dépenses au premier euro de la mission « Culture » devait être améliorée, estimant que la confection du bleu budgétaire « Culture » annexé au projet de loi de finances pour 2006 avait semblé poser quelques difficultés au ministère de la culture et de la communication.

Il a ainsi rappelé qu'un certain nombre de dépenses n'étaient pas « justifiées au premier euro » au sens de la LOLF, au sein des programmes 131 « Création » et 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Il a observé que l'emploi de près de 3 % des crédits de paiement du programme « Création » n'était pas détaillé. Cela correspond à 28,27 millions d'euros au sein de l'action 2-131 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques », et à 11,65 millions d'euros au sein de l'action 3-131 « Soutien à la création, à la production, à la diffusion et à la valorisation du livre et de la lecture ». Il a constaté que certains crédits du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » souffraient également d'une absence de justification.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a proposé de supprimer une partie de ces crédits et de consacrer l'autre à l'amélioration de la sincérité du budget de la mission « Culture », si le ministère ne fournissait pas de précision complémentaire sur leur utilisation.

Il a souhaité que l'origine et l'utilisation des ressources exceptionnelles apportées à l'établissement de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels (EMOC) par le rattachement de produits des cessions de participations financières de l'Etat, pour des opérations à caractère patrimonial, soient présentées avec plus de clarté. Il a rappelé qu'il s'agissait, en fait, de l'affectation à la mission « Culture » des recettes issues de la privatisation des sociétés d'autoroutes, dont le montant total atteignait 108,23 millions d'euros pour la mission « Culture », dont 75,7 millions d'euros pour le programme « Patrimoines », 5,1 millions d'euros pour le programme « Création » et 27,43 millions d'euros pour le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », en incluant la subvention pour charge de service public allouée à l'EMOC.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué que lors du débat sur le projet de loi portant règlement définitif du budget pour 2004, qui s'était tenu au Sénat le mercredi 12 octobre 2005, le ministre de la culture et de la communication avait annoncé que les ressources exceptionnelles apportées à l'EMOC par la privatisation des sociétés d'autoroutes, s'élèveraient à 100 millions d'euros. Il a constaté que le projet de répartition de ces recettes, qui avait soulevé quelques interrogations, notamment de M. Jean Arthuis, président, mais aussi de M. Philippe Marini, rapporteur général, ne semblait pas correspondre à celui qui figurait dans le bleu budgétaire de la mission « Culture ». Il a précisé que la lecture du « bleu » ne lui permettait d'ailleurs pas, à ce jour, de comprendre si les ressources exceptionnelles venaient s'ajouter aux crédits de paiement présentés, ou si elles étaient déjà comprises dans le montant inscrit.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, s'est félicité du renforcement de la lisibilité du budget, grâce à la prise en compte des fonds de concours et des dépenses fiscales.

Il a observé que des précisions devaient être apportées sur l'origine des fonds de concours et la transformation, au cours de l'année 2006, d'une grande partie d'entre eux en « attributions de produits ». Il a indiqué qu'à la différence des fonds de concours qui continueraient à bénéficier du report automatique des reliquats de crédits, les reports d'attributions de produits d'un exercice sur l'autre pourraient être soumis à la limitation de 3 % des crédits ouverts prévue par la LOLF. Il a craint que le ministère de la culture et de la communication n'ait retenu une interprétation particulièrement restrictive des dispositions de la LOLF, limitant ainsi sa marge de manoeuvre en « pêchant par excès de zèle », après avoir « pêché par omission » sur la justification au premier euro.

En ce qui concerne les dépenses fiscales attachées à la mission « Culture », M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a constaté que treize d'entre elles, sur un total de dix-neuf, avaient un rendement non significatif ou non chiffré. Il a souhaité savoir si le ministre de la culture et de la communication entendait supprimer les dépenses fiscales de faible portée, procéder au réexamen systématique de celles dont le coût était inconnu, et réexaminer les dispositifs dérogatoires dont les effets étaient insuffisants, comme l'avait recommandé le Conseil des impôts dans son XXIe rapport au Président de la République de septembre 2003, intitulé « La fiscalité dérogatoire pour un réexamen des dépenses fiscales ».

Il a observé que la structure de la mission « Culture » paraissait quelque peu confuse, dans la mesure où les programmes « Patrimoines » et « Création » semblaient participer à la réalisation des objectifs du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Il a indiqué que ce dernier devrait être rebaptisé plus simplement « Transmission des savoirs », car l'objectif de démocratisation de la culture était, quant à lui, un objectif global de la mission « Culture », déjà décliné dans ses deux autres programmes. Il a souligné que cette modification renforcerait la cohérence globale de la présente mission.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a regretté que le rattachement des opérateurs aux programmes de la mission culture soit incomplet, la Réunion des musées nationaux (RMN) ou l'Institut national des recherches archéologiques préventives (INRAP) ne figurant pas au nombre des opérateurs du programme « Patrimoines ». Il a considéré que l'évaluation des équivalents temps plein travaillé (ETPT) consolidés, c'est-à-dire incluant les ETPT sous plafond du ministère de la culture et de la communication et les ETPT des opérateurs, s'en ressentait.

Il a indiqué que les ETPT des opérateurs représentaient plus de la moitié des moyens humains mobilisés pour réaliser les objectifs de la mission « Culture » et que le ministère devait veiller de très près à leur évolution. Il a rappelé que l'avenir de l'INRAP dépendait de l'observation de la plus grande rationalité possible en matière de recrutement, comme il l'avait noté dans son récent rapport d'information n° 440 (2004-2005) du 29 juin 2005 intitulé « Pour une politique volontariste de la recherche archéologique ».

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a observé que l'évolution des ressources propres des opérateurs mentionnés dans le « bleu » était très préoccupante, leur diminution semblant suivre un mouvement inéluctable, et en accélération.

Il a noté que le ministère de la culture s'appuyait largement sur ses opérateurs pour mettre en oeuvre sa politique culturelle, et que des contrats d'objectif devaient régir leurs relations. Il s'est demandé si de nouveaux objectifs et des indicateurs spécifiques seraient définis pour évaluer la performance de ces contrats. Il a également souhaité savoir si l'utilisation des ressources des opérateurs serait « fléchée » ou si ces derniers pourraient, à leur niveau, mettre en oeuvre la fongibilité des crédits. Il a jugé nécessaire d'avoir communication des contrats d'objectifs, afin de pouvoir évaluer leur insertion dans la politique de performance du ministère de la culture.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué qu'il proposerait à la commission d'adopter deux amendements, l'un réduisant les crédits de la mission « Culture », qui n'étaient pas « justifiés au premier euro » au sens de la LOLF, et l'autre dotant l'INRAP de près de 10 millions d'euros, financés par une ponction sur des crédits non justifiés, afin d'améliorer la sincérité du budget. Il a souligné que la contrainte budgétaire qui devait s'exercer sur les dépenses de l'INRAP n'en serait nullement restreinte. Il a estimé qu'il était nécessaire de prendre en compte le déficit chronique de l'INRAP et l'obligation qui lui incombait de rembourser un prêt consenti par le Trésor pour rétablir la situation de sa trésorerie. Il a rappelé que le ministère de la culture et de la communication financerait le remboursement de ce prêt par une subvention spéciale, qui n'était pas inscrite dans le projet de loi de finances initiale pour 2006.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a observé que l'amendement soumis à la commission prévoyait de pallier « cet oubli », et inciterait le ministère à la plus grande vigilance. Il a noté que cet amendement devrait permettre d'éviter que, comme tous les ans depuis 2004, des politiques culturelles voient leurs crédits réduits en cours d'année pour financer l'INRAP, précisant que de tels mouvements de crédits étaient prévisibles. Le fait de ne pas les inscrire en loi de finances initiale nuisait à l'efficacité des actions menées par le ministère de la culture.

Il a ensuite annoncé qu'un poste de secrétaire général avait été créé au sein du ministère de la culture. La Cour des comptes semblait très favorable à ce mode d'organisation, susceptible, selon elle, de régler les problèmes de coordination entre les trois programmes de la présente mission, les 10 directions d'administration centrale, les 70 établissements publics relevant du ministère, les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et les services départementaux d'architecture et du patrimoine (SDAP). Il a précisé qu'il ne percevait pas clairement quels devraient être le rôle, les pouvoirs et la responsabilité du secrétaire général. Il a indiqué qu'il souhaitait l'auditionner avant d'être convaincu que la création d'un tel poste représentait la garantie d'une meilleure efficacité du ministère.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a ensuite présenté ses observations relatives au programme « Patrimoines ». Il a considéré que ce programme constituait l'action prioritaire du ministère de la culture et de la communication comme le prouvait la répartition des crédits, après la prise en compte des fonds de concours qui lui étaient attachés, soit 39,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 27,4 millions d'euros en crédits de paiement, d'une part, et l'application du schéma de déversement analytique de la mission, d'autre part.

Il a observé, qu'aux termes de ce schéma, les crédits provenant de l'action « Fonctions soutien communes aux trois programmes » du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » étaient réaffectés à 73 %, soit 284,6 millions d'euros, au programme « Patrimoines ». Il a ajouté que ce mouvement de crédits, interne à la mission « Culture », correspondait à la réimputation, sur le programme « Patrimoines », des sommes allouées à la rémunération des personnels des services patrimoniaux des DRAC et des SDAP.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué que le ministère de la culture et de la communication avait tiré les leçons des expérimentations de globalisation des crédits au niveau des DRAC en 2004 et 2005, et regroupé les dépenses de personnel sur la seule action 7-224 afin d'atteindre la taille critique pour le pilotage de la masse salariale. Il a noté que ces dépenses étaient ensuite réaffectées à chaque programme, ce qui permettait d'établir les coûts globaux réels des politiques culturelles menées.

D'autre part, il a rappelé que l'utilisation des ressources exceptionnelles apportées à l'EMOC au titre de la privatisation des sociétés d'autoroutes, qui atteignaient 75,7 millions d'euros pour le programme « Patrimoines », devait être précisée. Il a considéré que la sincérité des crédits de ce programme était obérée par l'absence de prise en compte de la situation financière réelle de l'INRAP.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a souligné que les ressources propres des opérateurs du présent programme avaient diminué de 41,6 % pour la Bibliothèque nationale de France et de 26,3 % pour le Centre Georges Pompidou entre 2004 et 2005. Il a noté que les responsables de ces établissements publics étaient inquiets de cette évolution.

Enfin, il s'est demandé comment le directeur de l'architecture et du patrimoine, responsable du programme « Patrimoines », pourrait exercer son autorité sur les autres directions centrales du ministère, telles que la direction des archives de France, la direction du Livre et de la lecture, et la délégation générale à la langue française et aux langues de France, sur les multiples opérateurs, et sur les services déconcentrés qui participaient à la réalisation de ce programme. Il a estimé que l'élaboration d'une charte de gestion était indispensable au bon fonctionnement du présent programme. Il a indiqué qu'il suivrait également avec attention la répartition des crédits alloués au patrimoine au sein des budgets opérationnels de programme (BOP), et les arbitrages rendus, entre eux, en cours d'exécution.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, s'est inquiété des modalités de pilotage du programme 131 « Création ». Rappelant qu'un « collège de directeurs » serait chargé de coordonner la mise en oeuvre de ce programme, il s'est demandé qui pourrait répondre de la gestion des crédits destinés à la création artistique devant le Parlement.

Il a observé que la santé financière des opérateurs du programme « Création » était préoccupante, leurs ressources propres régressant de 10 % pour la Cité de la musique et de près de 20 % pour l'établissement public du parc et de la grande halle de la Villette entre 2004 et 2005. Il a annoncé que les budgets prévisionnels de ces opérateurs pour 2005 étaient, de plus, présentés en déficit. Il s'est demandé si le projet de loi de finances pour 2006 tenait compte de ces tendances de fond. Il a craint que les crédits du programme « Création » ne soient sous-évalués.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a considéré que les indicateurs du programme « Création » ne prenaient que peu en compte l'action des DRAC, acteurs essentiels de la mise en oeuvre de la politique culturelle. Il a souhaité savoir si la répartition des crédits en BOP dans les DRAC s'accompagnerait de la déclinaison des objectifs et indicateurs de performance du programme « Création » à ce niveau de gestion. Il s'est demandé s'il ne serait pas plus pertinent de définir des outils d'évaluation de la performance spécifiques dans ce domaine. Il s'est également interrogé sur les modalités de gestion des BOP par les DRAC, estimant que si un BOP différent devait correspondre aux crédits déconcentrés de chaque programme de la mission culture, les DRAC seraient dans l'incapacité d'exercer la fongibilité asymétrique prévue par la LOLF.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a ensuite présenté ses observations sur le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

Il s'est demandé s'il convenait de supprimer le million d'euros qui semblait excédentaire pour la réalisation de la cité nationale de l'histoire de l'immigration, soulignant que le coût total prévisionnel annoncé pour ce projet s'élevait à 11 millions d'euros, alors que l'échéancier prévisionnel ne prévoyait que 10 millions d'euros.

Il a souhaité savoir pour quelles raisons, alors que l'inauguration de l'immeuble dit « des Bons enfants » avait eu lieu et que le transfert des bureaux et des personnels était effectué, une dépense d'un million d'euros en autorisation d'engagement était prévue en 2006.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a estimé que dans le cas où le ministère de la culture et de la communication s'engageait dans une politique de réforme ambitieuse, comme pour l'action « Fonction soutien commune aux trois programmes », il conviendrait de proposer des indicateurs temporaires permettant de mesurer la réalisation et le succès de cette réforme.

Il a rappelé que le compte d'affectation spéciale (CAS) « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » était composé des trois programmes suivants : le programme « Industries cinématographiques », dont les recettes s'élevaient à 263,76 millions d'euros, le programme « Industries audiovisuelles », doté de 231,77 millions d'euros et le programme « Soutien à l'expression radiophonique locale », dont les crédits atteignaient 23,75 millions d'euros. Il a indiqué que les dépenses des deux premiers programmes étaient constituées des subventions allouées par le Centre national de la cinématographie et celles du dernier programme par les subventions délivrées par le fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER).

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué que dans la mesure où ce compte d'affectation spéciale était créé par l'article 35 de la loi de finances initiale pour 2006, il ne pouvait pas juger, dès à présent, de sa pertinence. Il a toutefois noté avec satisfaction que la « justification au premier euro » semblait précise.

Il a observé que l'étanchéité des ressources et des dépenses des trois programmes du CAS rendait la question de l'arbitrage entre les sections, et donc la nomination d'un responsable du compte d'affectation spéciale sans objet. Il a constaté que le responsable des programmes « Industries cinématographiques » et « Industries audiovisuelles » était le directeur du centre national de la cinématographie (CNC). Il a regretté que le responsable du programme « Soutien à l'expression radiophonique locale » ne soit pas identifié et a souhaité obtenir des éclaircissements sur ce point.

Il a ensuite rappelé que les dépenses fiscales liées au présent compte d'affectation spéciale s'élevaient à 100 millions d'euros, soit 40 millions d'euros au titre de la déduction des souscriptions en numéraire au capital de sociétés anonymes agréées ayant pour seule activité le financement d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles (SOFICA) et 60 millions d'euros au titre du crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres cinématographiques et d'oeuvres audiovisuelles.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a souhaité qu'un effort particulier soit mis en oeuvre afin d'évaluer la dépense fiscale relative à l'amortissement exceptionnel égal à 50 % du montant des sommes versées pour la souscription de titres de SOFICA.

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a félicité le rapporteur spécial pour la qualité de son intervention.

M. François Trucy a remarqué que les comparaisons internationales n'avaient sans doute pas de sens, tant le périmètre des politiques culturelles variait d'un pays à l'autre. Il s'est demandé si le rapporteur spécial pouvait expliquer la raison de la diminution des ressources propres des opérateurs de la mission « Culture ». Enfin, il a souhaité savoir si des consignes de limitation des demandes de classement de nouveaux sites avaient été données, ce qui expliquerait les blocages auxquels se heurtaient les pétitionnaires dans son département.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a précisé que les subventions pour charge de service public des opérateurs de la mission « Culture » ne diminuaient pas. Il a estimé que la baisse de leurs ressources propres s'expliquait par la diminution de la fréquentation du public et la régression des ventes des catalogues et des objets culturels dérivés. Il a indiqué qu'il n'avait pas connaissance d'une évolution de la politique de classement du patrimoine, mais qu'il serait intéressant d'interroger le ministre sur ce point lors de l'examen en séance publique de la mission « Culture ».

Puis la commission a adopté, à l'invitation de son rapporteur spécial, deux amendements tendant à :

- réduire de 39,92 millions d'euros en autorisation d'engagement et en crédits de paiement les crédits du titre 6 « Dépenses d'intervention » des actions 2-131 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques » et 3-131 « Soutien à la création, à la production, à la diffusion et à la valorisation du livre et de la lecture » du programme « Création » qui ne font pas l'objet d'une « justification au premier euro » ;

- et à réduire de 10,58 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisation d'engagement les crédits non justifiés au premier euro du titre 6 « Dépenses d'intervention » des actions 3-224 « Soutien aux établissements d'enseignement spécialisé » et 4-224 « Actions spécifiques en faveur du public » du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », et à les transférer vers le titre 3 « Dépenses de fonctionnement » de l'action 1 « Patrimoine monumental et archéologique » du programme « Patrimoines », afin que l'INRAP bénéficie d'une subvention pour charges de service public d'un montant équivalent.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité de la présentation de ces deux amendements qui assuraient l'obligation de justifier les dépenses au premier euro et amélioraient ainsi la sincérité de la mission « Culture ».

A l'invitation de M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, la commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Culture » pour 2006 ainsi amendés, et d'adopter sans modification les crédits du compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

PJLF pour 2006 - Mission « Monnaies et médailles » - Examen du rapport spécial

Enfin, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, sur la mission « Monnaies et médailles ».

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a tout d'abord précisé que la mission « Monnaies et médailles » se présentait sous forme d'un budget annexe regroupant les dépenses et les recettes de la direction des Monnaies et médailles (DMM), pour ce qui concernait ses opérations courantes et ses opérations en capital. Cette direction, plus connue sous sa marque « Monnaie de Paris », avait pour rôle essentiel la frappe des pièces d'euros.

Il a déploré une nette dégradation de la transmission des informations, signalant un taux de réponse au questionnaire budgétaire de seulement 20 %, malgré plusieurs relances, et une insuffisante lisibilité du « bleu » qui ne permettait pas d'appréhender facilement la réalité économique de la mission. Il s'est toutefois dit satisfait de l'échange direct qu'il avait eu lors d'une réunion de travail avec M. Dov Zérah, directeur des Monnaies et médailles et responsable des deux programmes de la mission.

S'agissant de l'application de la LOLF, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a estimé que le découplage en deux programmes s'imposait naturellement. Un programme « Activités régaliennes », pour les activités exercées en situation de monopole, et un programme « Activités commerciales », pour celles exercées en secteur concurrentiel. Il a ajouté que la comptabilité analytique, qui faisait partie de la culture de la DMM, avait grandement facilité la répartition des coûts par programme et par action, notant que cette direction d'administration fonctionnait, par bien des aspects, comme une entreprise. Il a de plus observé que le caractère concret, donc mesurable, des activités exercées se prêtait aisément à la logique de performance.

Il a qualifié de paradoxal que le budget annexe des Monnaies et médailles soit présenté au format de la LOLF, alors qu'il était peu probable qu'il survive avec la LOLF, en raison de son article 18 qui imposait à la DMM une triple contrainte : demeurer un service de l'Etat non doté de la personnalité morale, percevoir des redevances, et ce, à titre principal. Or, contrairement au cas des Journaux officiels, dont une partie des prestations pouvaient donner lieu à « rémunération pour service rendu », la nature des recettes de la DMM n'avait pas été explicitée. Il a relevé que ce sujet d'ordre juridique semblait avoir été occulté par celui, plus essentiel mais toujours « tabou », du futur statut de la DMM. Il a conclu au nécessaire examen, par le Parlement ou, à défaut, par le juge constitutionnel, de cette question de conformité à la LOLF du dispositif actuel.

Abordant le programme « Activités régaliennes », M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a observé que la première action, relative à la frappe des pièces d'euros pour le compte de l'Etat français, absorbait 83 % des crédits. Tout en notant une sensible reprise de cette activité (818 millions de pièces demandées pour 2006, soit 45 % de plus qu'en 2005), concentrée sur les petites coupures, il a insisté sur les conséquences fâcheuses, pour l'avenir de la DMM, des stocks excédentaires des plus grosses coupures. Il a précisé que pour ce programme, dont les crédits de paiement s'élevaient à 49,1 millions d'euros, la principale augmentation concernait les achats de métaux, directement liés au niveau d'activité, et que l'effectif demeurait globalement stable à 282 équivalents temps plein travaillé (ETPT).

S'agissant du programme « Activités commerciales », dont il a énuméré les principales actions, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a constaté que, face à de faibles perspectives pour 2006, la Monnaie de Paris se voulait prudente dans sa prévision de recettes, en recul de 25 % par rapport à la prévision 2005. Il a souligné que celle-ci souffrait sur tous ses marchés, pour deux raisons cumulatives : ses coûts de production étaient structurellement élevés et certains instituts monétaires « cassaient » les prix. Il a regretté qu'après l'éclatement, en 2004, de la bulle spéculative sur les monnaies de collection, elle connaisse, en 2005, quelques déconvenues dans le secteur des monnaies courantes étrangères. Mais il a constaté une adaptation des dépenses à des marchés moins porteurs, puisque le programme, d'un montant de 63,6 millions d'euros en crédits de paiement, voyait ses dépenses courantes régresser de 17,5 % et son effectif de 377 ETPT diminuer de 31 ETPT par rapport à 2005.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, s'est félicité de la maîtrise sans relâche que la DMM exerçait sur ses dépenses depuis plusieurs années, en rappelant qu'après être entrée en 2003 dans une démarche de modernisation et de réorganisation qui lui avait permis de dépenser moins et mieux, celle-ci était parvenue à diminuer radicalement son « point mort », c'est-à-dire le niveau de ventes assurant l'équilibre d'exploitation. Ce qui lui permettait, pour 2006, de limiter à 1,3 million d'euros le recours à la subvention du budget général.

Concernant les effectifs, il a souligné un problème récurrent de décompte partiel, 47 fonctionnaires du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dédiés à la présente mission, étant comptabilisés et rémunérés dans l'action soutien du programme 218 de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ». Il a estimé que cette distorsion, d'un impact de 2,1 millions d'euros, était d'autant plus regrettable qu'elle avait déjà été signalée.

Abordant enfin le volet performance, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, s'est réjoui que la DMM ait présenté des indicateurs nombreux et souvent très pertinents. Pour le programme « Activités régaliennes », il a toutefois estimé que certaines simplifications pouvaient être apportées, par la suppression des indicateurs n'offrant pas de marge de progression, tel que celui qui se rapportait aux délais de fabrication. Il a considéré que l'indicateur relatif aux excédents de stocks de produits finis nécessitait un aménagement, pour ne retenir que ce qui relevait de la responsabilité de la DMM et pour donner à la direction générale du Trésor et de la politique économique sa part de responsabilité dans la gestion de la production de monnaie métallique courante. Il s'est inquiété d'une possible difficulté à apprécier la performance au travers de l'indicateur de chiffre d'affaires par ETPT, qui faisait intervenir des prix unitaires de cession très variables selon le niveau d'activité. Il a noté, par ailleurs, qu'aucun indicateur ne mesurait la productivité physique de la DMM dans son activité de frappe de monnaie courante.

S'agissant du programme « Activités commerciales », M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a souhaité un élargissement de la couverture de certains indicateurs particulièrement intéressants. Ainsi, ceux relatifs aux stocks de produits finis ou au chiffre d'affaires par ETPT pouvaient, selon lui, être étendus au secteur des médailles, décorations et divers objets d'art. Celui qui retraçait le taux de marge par famille de produits devrait probablement intégrer les monnaies de collection. Par ailleurs, et au-delà de quelques aménagements de forme explicités dans sa note de présentation, il a préconisé de mieux cerner la rentabilité économique de la Monnaie de Paris, notamment dans un contexte d'éventuelle réorganisation de la frappe à l'échelle européenne, en cas de disparition du monopole. Il a notamment demandé que soit envisagé de suivre le ratio chiffre d'affaires/dépenses courantes.

Sous réserve de ces observations, mais en raison de l'absence de trop nombreuses réponses au questionnaire budgétaire, il a conclu qu'il revenait à la commission de décider soit d'adopter, soit de réserver son vote sur les crédits de la mission « Monnaies et médailles ».

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur spécial pour la qualité de son intervention.

M. Yann Gaillard a demandé comment se répartissait la frappe des pièces d'euros au sein de l'Europe et M. François Trucy, après avoir estimé nécessaire une réaction de la commission face au très faible taux de réponses au questionnaire budgétaire, a interrogé le rapporteur spécial sur le devenir des pièces d'1 et 2 centimes d'euros.

En réponse, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a précisé qu'en général, chaque pays disposait d'un institut monétaire, mais qu'il pouvait faire appel à un autre pays, prenant l'exemple de la Grèce qui, en 2001, avait sollicité la France pour la fabrication de ses propres euros. Il a indiqué, qu'en l'état actuel de cette question, et contrairement à certains pays qui ne les avaient jamais fait frapper ou avaient fini par y renoncer, la France craignait toujours des risques inflationnistes et gardait donc ces pièces d'1 et 2 centimes.

Constatant que la frappe de la monnaie courante française et celle des monnaies courantes étrangères étaient assurées avec les mêmes moyens de production, en l'occurrence l'établissement monétaire de Pessac, M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur la possibilité de distinguer les coûts par programme, sans risque d'arbitraire. Il s'est aussi inquiété des prix accordés par la DMM aux Etats étrangers pour la frappe de leur monnaie courante. Enfin, prenant le relais de M. François Trucy, il a suggéré que la commission réserve son vote sur les crédits de la mission.

A l'issue de ce débat, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, et deM. Bertrand Auban, rapporteur spécial, la commission a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Monnaies et médailles » dans l'attente de la réception de l'ensemble des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

Présidence de M. François Trucy, secrétaire, puis de M. Jean Arthuis, président.

PJLF pour 2006 - Mission « Régimes sociaux et de retraite » et compte spécial « Pensions » - Examen du rapport spécial

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après midi, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport deM. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte spécial « Pensions ».

M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a préalablement souligné que les observations qui allaient suivre seraient formulées au nom de la commission des finances, et qu'il en viendrait ensuite à des considérations plus personnelles.

En premier lieu, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a indiqué que le compte d'affectation spéciale représentait plus de 45 milliards d'euros de crédits de paiement, soit 17 % des crédits du budget général. Il a précisé que les dépenses de pensions constituaient la partie la plus dynamique des dépenses de personnels, les pensions civiles et militaires représentant aujourd'hui plus de 14 % du budget général.

Puis M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a souligné les enjeux de la mise en place du compte d'affectation spéciale.

Il a noté que, malgré leur volume, les charges de pension étaient aujourd'hui disséminées dans le budget de l'Etat et que leur financement n'était pas identifié, en raison du principe de non-affectation des recettes, soulignant que telle était l'une des principales raisons pour lesquelles l'article 21 de la LOLF avait prévu l'instauration d'un compte de pensions, qui devait être équilibré en recettes et en dépenses. Il a ajouté, qu'à cet égard, l'abondement exceptionnel d'un milliard d'euros par l' « Etablissement public de gestion de la contribution exceptionnelle de France Télécom », prévu par l'article 36 du projet de loi de finances, ne devait constituer qu'un fonds de roulement, reconstitué à l'identique en fin de période.

Puis M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a souligné qu'outre la clarification qui résultait de la mise en place du compte de pensions, l'enjeu majeur, pour la commission des finances, en serait la responsabilisation des gestionnaires. Il a rappelé qu'actuellement, chaque ministère « payait » pour les politiques de recrutement passées, les effectifs pensionnés étant rémunérés à partir des sections budgétaires dont ces derniers relevaient lorsqu'ils étaient en activité. Il a relevé que, désormais, les gestionnaires de programmes devraient verser, à proportion des rémunérations d'activité, une « contribution employeur », dont le taux serait calculé pour équilibrer les charges et les recettes de la principale section du compte de pensions, qui concernait les pensions civiles et militaires. Il a noté que, pour 2006, le taux d'équilibre avait ainsi été fixé à 49,9 % concernant les personnels civils, et à 100 % concernant les personnels militaires, cette différence s'expliquant par les situations démographiques relatives de ces régimes : on comptait, aujourd'hui, pour les fonctionnaires civils, 1,6 actif pour 1 pensionné, et, pour les militaires, 0,8 actif pour 1 pensionné.

Puis il a fait remarquer que ces rapports démographiques étaient appelés à se dégrader avec, respectivement, 1,3 fonctionnaire civil actif et 0,7 militaire actif par pensionné en 2010. De ce fait, les taux de « contribution employeur » allaient rapidement augmenter.

Il a invité à mettre en parallèle cette évolution avec l'instauration de la « fongibilité asymétrique », qui ne permettait pas de redéployer des crédits vers des dépenses de personnels, insistant sur le fait que les ministères et les différents gestionnaires de programmes seraient ainsi incités à pondérer différemment leurs décisions de recrutements, non seulement en cours d'exercice, mais aussi lors des conférences budgétaires. Si de telles perspectives pouvaient satisfaire la commission des finances, il a précisé ici que, selon lui, elles se trouvaient fortement préjudiciables à l'emploi public.

Par ailleurs, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a constaté que la démarche de responsabilisation intégrale des gestionnaires était certes avancée, mais qu'elle n'était pas parfaitement aboutie pour les trois sections du compte d'affectation spéciale « Pensions ». Il a ainsi noté que le taux de contribution des employeurs publics et semi-publics, actuellement fixé à 33 %, était anormalement bas et que, concernant les ouvriers des établissements industriels de l'Etat, la faiblesse du taux de « contribution employeur », fixé à 24 %, s'expliquait par le maintien, en complément, d'une subvention prélevée sur les différents programmes à proportion des effectifs pensionnés qui en étaient issus. Il a relevé que le maintien de taux anormalement faibles était contraire à la logique de responsabilisation des gestionnaires, même s'il convenait, sans doute, de ne pas tendre vers une répercussion intégrale des coûts réels sur les contributions. Ces dernières pouvaient, en effet, devenir dissuasives au point de s'avérer pénalisantes, voire paralysantes, pour les gestionnaires de programme. Il a fait remarquer qu'en tout état de cause, la nouvelle présentation avait permis de mettre en lumière ces cas d'asymétrie dans la formation des taux, propres à alimenter un débat constructif sur une évolution équitable des contributions.

S'agissant de la mesure de la performance, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a noté que l'activité principale d'un régime de retraite étant de liquider et de payer les retraites de ses ressortissants, les objectifs paraissaient, fort heureusement, atteints. La plupart des indicateurs existants se bornaient donc à la mesure de l'efficience de la gestion ou de la qualité du service rendu. Cependant, il a relevé que certains d'entre eux avaient été élaborés aux seules fins de suivre l'impact de la réforme des retraites de 2003. Ainsi, il a noté que des indicateurs portant sur l'âge moyen de la radiation des cadres et la durée moyenne des cotisations avaient été mis en place pour les fonctionnaires civils et militaires de l'Etat, ainsi que les ouvriers des établissements industriels de l'Etat.

Concernant la présentation formelle du « bleu », M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a déclaré que les pensions constituaient des dépenses obligatoires. Dès lors, la « justification au premier euro », nouveauté introduite par la LOLF, n'apportait pas d'élément permettant ici d'engager un dialogue budgétaire fructueux. Ainsi, il a considéré que la démarche « classique », qui consistait à analyser l'évolution de la dépense, garderait son intérêt et que c'était bien l'évaluation de la dépense en 2006 qui importait, plus que sa justification au titre de chacun des pensionnés. Il a donc avancé que les « bleus » « Pensions » à venir feraient utilement apparaître la dépense constatée l'année précédente et celle prévue pour l'année en cours, cela pour les différentes recettes et dépenses des comptes concernés.

M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a ensuite abordé l'examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite », indiquant au préalable qu'elle représentait 4,5 milliards d'euros de crédits et consistait à subventionner divers régimes en vue de contribuer à leur équilibre. A ce titre, il a cité la participation de l'Etat au financement du congé de fin d'activité des conducteurs routiers, la subvention d'équilibre aux régimes de retraite de la SNCF et de la RATP, la subvention d'équilibre aux régimes de retraite et de sécurité sociale des marins, et diverses subventions d'équilibre à des régimes en déclin démographique, comme celui des mines ou les régimes en extinction, tels que ceux de l'Imprimerie nationale ou de l'ORTF.

Il a noté que, dans le prisme de la LOLF, cette mission ne correspondait pas non plus à une politique publique pour laquelle la définition d'objectifs aurait comporté des enjeux fondamentaux en gestion. Il s'agissait, ici encore, de payer des retraites et des prestations liquidées en application de la réglementation en vigueur, objectif naturellement atteint.

M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a ajouté que, de même, il était difficile de poursuivre des objectifs d'« efficacité socio-économique » quand les leviers d'action en cours d'exercice étaient inexistants, soulignant qu'en revanche, il était normal que les différents gestionnaires des régimes concernés optimisent les moyens dont ils disposaient afin de garantir le meilleur service à l'usager tout en maîtrisant leurs dépenses. Il a observé que des indicateurs mesurant l'efficience de la gestion et la qualité du service rendu avaient donc été mis en place, bien qu'aucun indicateur ne concerne les fonds paritaires gestionnaires du congé de fin d'activité et la RATP, la subvention d'équilibre qu'ils percevaient ne comprenant pas de participation aux frais de gestion.

Il a précisé que, comme pour le compte de pensions, le « bleu » « Régimes sociaux et de retraite » ne faisait pas apparaître les dépenses prévues pour l'année en cours, ni celles constatées l'année précédente, ce qui constituait une lacune importante dans le contexte du suivi de dépenses obligatoires.

Il s'est enfin étonné du retard pris dans les réponses aux deux questionnaires budgétaires, moins de la moitié d'entre elles lui étant parvenues trois semaines après la date limite fixée par la LOLF au 10 octobre.

Après s'être exprimé au nom de la commission des finances, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, en est arrivé à des considérations personnelles. Il a d'abord estimé que la démarche de performance retenue dans le cadre de la LOLF ne donnait pas une mesure satisfaisante de l'efficacité socio-économique et que l'objectif d'un régime de retraites était aussi d'offrir à ses pensionnés un revenu dont le pouvoir d'achat évoluait avec la richesse du pays, observant qu'aucun indicateur ne suivait cette progression.

Puis il a précisé que les réformes récemment intervenues aboutissaient à une perte de pouvoir d'achat préjudiciable aux retraités, d'autant plus pénalisantes qu'elles s'accompagnaient, par ailleurs, de mesures restrictives concernant l'assurance-maladie. Par ailleurs, selon lui, les ventes d'actifs immobiliers auxquelles procédaient certains régimes spéciaux de retraite allaient à l'encontre des intérêts de leurs ressortissants.

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a salué le travail de M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, et sa capacité à trouver le bon équilibre entre les exigences d'une présentation au nom de la commission des finances et celles tenant à ses propres convictions.

M. François Trucy s'est interrogé sur le positionnement du rapport démographique de la fonction publique de l'Etat par rapport à celui du régime général et M. Jean-Jacques Jégou, après avoir rappelé, concernant l'Imprimerie nationale, les enjeux d'un adossement au régime général, a indiqué que, d'une façon générale, les régimes spéciaux en déclin étaient soutenus par des mécanismes de compensation démographique qui pénalisaient, à l'excès, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNARCL). M. Jean Arthuis, président, pour sa part, s'est interrogé sur les différences de taux de cotisation existant entre le régime de l'Etat et le régime général. Observant que les dépenses de fonctionnement et de gestion de l'établissement national des invalides de la marine (ENIM) se trouvaient en baisse de 1,5 %, il s'est enquis de l'éventualité d'une maîtrise durable de la dépense qui se serait inscrite dans la nouvelle démarche de performance.

En réponse, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a d'abord rappelé qu'il était difficile de procéder à une comparaison directe entre les taux de cotisation de l'Etat et ceux du régime général, car les salariés du secteur privé bénéficiaient également de régimes complémentaires obligatoires au sein desquels les règles de constitution des droits étaient différentes. Au total, si, d'après lui, les taux de cotisations salariales, proches de 8 %, s'avéraient comparables, le taux de « cotisation employeur » de l'Etat, fixé à près de 50 % pour 2006, excédait largement ceux qui s'appliquaient aux employeurs du secteur privé, compris entre 19 % et 26 %. M. Jean Arthuis, président, s'est alors interrogé sur les raisons d'une telle différence de taux de « cotisation employeur ». Après que M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, eut précisé que l'assiette des cotisations du régime de l'Etat était limitée à la rémunération indiciaire et excluait donc les primes, M. Jean-Jacques Jégou a insisté sur le fait que les heures supplémentaires ne donnaient effectivement pas lieu au versement de cotisations.

En réponse aux questions posées,M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que, dans une approche globale, le rapport démographique était aujourd'hui légèrement plus favorable dans le régime de l'Etat que dans le régime général. A l'avenir, ces ratios devaient se dégrader fortement, avec environ un cotisant pour un pensionné à l'horizon 2020, aussi bien pour l'Etat que pour le régime général. En tout état de cause, il convenait, selon lui, d'attendre les résultats du prochain rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR) afin d'affiner une démarche prospective qui reposait sur des évaluations parfois relativement anciennes. Concernant la mise à contribution de la CNRACL, il a indiqué qu'elle résultait d'une application exacte des règles de compensation inter-régimes, lesquelles étaient destinées à établir une solidarité entre les régimes en fonction de leurs situations démographiques respectives. Il se trouvait que la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales bénéficiait d'un rapport démographique comparativement favorable. Cependant, il a ajouté, qu'à titre personnel, il partageait le point de vue critique formulé par M. Jean-Jacques Jégou.

En conclusion, sur la recommandation du rapporteur spécial s'exprimant au nom de la commission des finances et sans préjudice des observations qu'il avait formulées à titre personnel, la commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite» ainsi que ceux de la mission « Pensions ».

PJLF pour 2006 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » et article 75 rattaché - Examen du rapport spécial

Puis la commission a procédé àl'examen du rapport spécial deM. Jacques Baudot, rapporteur spécial, sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » ainsi que sur l'article 75 rattaché.

Dans un premier temps, M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a commenté les difficultés d'élaboration de cette mission et s'est félicité que le gouvernement soit revenu à un intitulé de mission plus significatif pour le monde combattant.

Il a précisé que sur les 5.434 emplois autorisés au sens des équivalents temps pleins travaillés (EPTP), près de 75 % étaient affectés au programme « Liens entre la Nation et son armée » qui bénéficiait également d'un effectif de 383 EPTP rémunérés par ses opérateurs, les musées de chacune des trois armes. Il a constaté que le programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » disposait du reste de l'effectif, soit 1.390 EPTP, et surtout des 1.860 EPTP de ses deux opérateurs, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerrre (ONAC) et l'Institution nationale des invalides (INI).

Il a ajouté que la mission disposerait, en 2006, de près de 3,9 milliards d'euros de crédits de paiement et que les dépenses d'intervention y représentaient 93,4 %, dont les trois quarts étaient destinés à la gestion de la dette viagère.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a souligné que le programme 167 : « Liens entre la nation et son armée » avait pour objectif de promouvoir l'esprit de défense, et que :

- l'action 1 : « Journée annuelle de préparation à la défense » (JAPD) regroupait les moyens de la direction du service national (DSN) et disposait de la majorité des crédits et des effectifs du programme ;

- l'action 2 : « Politique de mémoire » était tournée en priorité vers les jeunes générations ;

- l'action 3 : « Promotion et valorisation du patrimoine culturel » visait à sensibiliser le public à la culture de défense ;

- l'action 4 : « Communication », était pilotée par la délégation à l'information et à la communication de Défense (DICoD).

Le rapporteur spécial a précisé que ce programme disposerait de 279 millions d'euros en crédits de paiement. Il a relevé que l'approximation actuelle de certains des indicateurs proposés témoignait de la difficulté de mesurer la performance de ce programme mais qu'il était toutefois louable d'avoir choisi comme objectif de sensibiliser chaque classe d'âge à l'esprit de Défense par une JAPD de qualité et pour un coût maîtrisé.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a présenté le programme 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » qui comprend l'ensemble des prestations bénéficiant aux anciens combattants et à leurs ayants cause. Il a précisé que :

- l'action 1 : « Administration de la dette viagère » recouvrait les dépenses relatives au paiement des pensions militaires d'invalidité (PMI) et de la retraite du combattant ;

- l'action 2 : « Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité » concernait les droits ouverts à des titulaires d'une pension militaire d'invalidité, avec l'aide de l'ONAC et de l'INI ;

- l'action 3 : « Solidarité » comprenait les prestations et les avantages particuliers ouverts aux pensionnés ou titulaires d'un titre d'ancien combattant ou victime de guerre, l'Observatoire de la santé des vétérans (OSV), de création récente, lui étant rattaché, de même que les subventions à l'ONAC et l'INI ;

- l'action 4 : « Entretien des lieux de mémoire » était chargée de l'entretien courant des monuments et des lieux de la mémoire combattante, tant sur le territoire national qu'à l'étranger ;

- l'action 5 : « Soutien » regroupait les dépenses de soutien des actions aux autres actions du programme.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a relevé que les dépenses fiscales accordées aux anciens combattants figuraient toutes dans ce programme. Pour 2006, leur impact, pour celles qui étaient chiffrables, s'établissait à 585 millions d'euros, soit 15 % des crédits de la mission.

Il a précisé que ce programme disposerait de 3,4 milliards d'euros en crédits de paiement, soit la plus grande part des crédits de la mission (87,5 %), dont 2,8 milliards d'euros pour la dette viagère.

Il a indiqué que le projet de loi de finances pour 2006 permettrait de poursuivre l'augmentation des aides allouées par l'ONAC en matière de secours avec 13,1 millions d'euros, soit un effort de 0,5 million d'euros supplémentaire.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a observé que l'évolution du plafond de la rente mutualiste n'avait pas évolué depuis le bond de revalorisation de 7,5 points en 2003, après des majorations régulières de 5 points les années précédentes.

Régulièrement saisi de demandes concernant l'indemnisation des orphelins, d'une part, du fait de la deuxième guerre mondiale (tels que les orphelins des otages et des résistants) et, d'autre part, de prisonniers du Viet-minh, il a proposé à la commission d'interroger le ministre sur les possibilités de leur accorder des droits à réparation.

Il s'est également inquiété des conséquences pour l'entretien des hauts lieux de mémoire et, notamment de « la Voie sacrée », du transfert, de l'Etat au département, de la responsabilité des routes nationales.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a présenté les deux actionsdu programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale ».

Il a expliqué que l'action 1 « Indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation et des orphelins de persécutions antisémites » assurait la gestion des mesures de réparation résultant de deux décrets : le décret de 1999 qui avait institué une Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation (CIVS), et le décret de 2000 étendant la réparation aux orphelins de victimes de persécutions antisémites.

Il a ajouté qu'il revenait à l'action 2 « Indemnisation des orphelins des victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale » de gérer la réparation étendue par un décret de 2004 aux orphelins de victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale.

Il a précisé que le versement des réparations, pour ces trois dispositifs, était effectué par l'ONAC et que les crédits du programme 158, avec 207 millions d'euros en crédits de paiement, étaient quasiment doublés en 2006 pour répondre à la pleine entrée en application des mesures de réparation prévues par le décret du 27 juillet 2004.

Il a annoncé que l'application des dispositifs prévus pour la réparation était en bonne voie et que l'instauration de ce programme était une saine décision.

En conclusion, M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, s'est félicité du transfert dans cette mission des crédits de réparation. Mais il a regretté, qu'à cette occasion, l'application de la LOLF n'ait pas abouti pleinement. Il a jugé que si l'on pouvait concevoir qu'elle soulevait quelques problèmes de délais d'adaptation des structures, il serait bon que le gouvernement prenne l'engagement de les résoudre dans un délai raisonnable. Il a ainsi cité les dépenses de personnel de la CIVS, qui s'élevaient à 2,6 millions d'euros et n'étaient que ventilées en crédits de soutien depuis le programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du gouvernement ». Il a relevé, également, la répartition des crédits de mémoire dans deux programmes et que la part, intégrée dans le programme 167, des crédits de communication de défense ne représentait que la moitié des moyens consacrés à cette fonction.

Il a enfin noté que si les crédits destinés à la dette viagère étaient en baisse, du fait de la diminution des bénéficiaires,la moyenne des moyens dédiés à chaque ressortissant progressait toutefois de 1,45 %.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a ensuite présentél'article 75 rattaché à la missionqui propose l'extension du droit à pension, dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, au conjoint survivant masculin et au partenaire survivant lié par un pacte civil de solidarité.

Il a déclaré que, dans le personnel militaire, on dénombrait actuellement près de 50.000 femmes. En l'état actuel, le nombre des éventuelles demandes était peu élevé. En conséquence, le coût de la mise en oeuvre de ces dispositions était évalué à 0,5 million d'euros. Il s'est montré favorable à ce dispositif appliquant le principe d'égalité entre les hommes et les femmes.

Enfin, il a évoqué une information, non encore confirmée, selon laquelle les retraites seraient revalorisées de 2 % en 2006.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis,président, s'est inquiété du mode de financement d'une telle mesure.

M. François Trucy, relevant la récente entrée en application d'une des indemnisations prévue dans le programme 158, s'est interrogé sur l'évolution dans les années suivantes des crédits prévus pour 2006. Il a également interrogé le rapporteur spécial sur l'évolution du nombre des bénéficiaires de la retraite des anciens combattants.

M. Jean-Jacques Jégou, après s'être montré rassuré par l'augmentation de 1,45 % des moyens pour chaque ressortissant, s'est inquiété de l'évolution des effectifs des deux opérateurs alors que dans le même temps, le nombre de bénéficiaires était en diminution. Il a également émis des réserves sur les indicateurs de performance proposés pour l'INI.

M. Jean Arthuis, président, s'est inquiété du coût de fonctionnement de l'ONAC, rapporté au montant des masses financières gérées. M. Alain Lambert, après avoir approuvé ces propos, a constaté que les indicateurs proposés en la matière n'étaient pas très révélateurs de l'efficience des services.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a précisé qu'il y avait 4,2 millions de ressortissants de l'ONAC en 2003, et qu'ils devraient être 3,6 millions en 2008, et 2,8 millions en 2013. Il a relevé que, sur l'ensemble des demandes concernant la réparation prévue au programme 158, un nombre significatif de décisions avait déjà été pris, notamment pour l'indemnisation des victimes de spoliation, et qu'une grande majorité des bénéficiaires avait déjà été indemnisée. Concernant les effectifs, il a précisé que l'INI poursuivait la remise à niveau de son effectif, qui était incomplet depuis la suppression du service national. Il a expliqué que le personnel de l'ONAC était plus stable, hormis une évolution en faveur du cadre B. Il a ajouté que l'augmentation constante du nombre des retraités, avec 400.000 bénéficiaires supplémentaires depuis 5 ans, justifiait l'évolution du personnel nécessaire au traitement des dossiers.

M. Claude Haut a évoqué le problème de l'éventualité de mesures de reconnaissance des orphelins de résistants. M. Paul Girod a prolongé la question à propos des orphelins d'anciens prisonniers du Viet-Minh. Il a également évoqué le problème posé par la départementalisation des routes nationales pour l'entretien des « lieux de mémoire ». M. Maurice Blin s'est inquiété de l'extension de cette reconnaissance aux orphelins « pupilles de la Nation ». M. Jacques Baudot, rapporteur spécial, a précisé que ces derniers pouvaient être estimés à 200.000 et soulevé le problème du financement de ces extensions de droit à réparation. Il a d'ailleurs souligné que les associations d'anciens combattants ne semblaient pas considérer cette demande comme prioritaire. En ce qui concernait la départementalisation, il s'est voulu optimiste quant au traitement particulier qui serait réservé aux voies de « mémoire ».

M. Yves Fréville, après avoir, lui aussi, approuvé les propos du président Jean Arthuis, a, par ailleurs, émis des doutes sur le niveau des cibles proposées dans certains indicateurs.

A propos de l'article 75 rattaché, M. Alain Lambert s'est inquiété de la disparité juridique que produirait l'égalité de droit entre les conjoints survivants et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité. Il a donc préconisé une modification rédactionnelle sous forme d'amendement que la commission a adopté.

Suivant la recommandation de son rapporteur spécial, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », et de l'article 75 rattaché ainsi modifié.

PJLF pour 2006 - Mission « Sécurité civile » - Examen du rapport spécial

Puis la commission a procédéà l'examen du rapport spécial de M. Claude Haut, rapporteur spécial, sur la mission « Sécurité civile ».

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a souhaité, en premier lieu, rendre hommage aux dix-neuf sauveteurs décédés en service au cours de l'année 2005 : deux sapeurs-pompiers professionnels, douze sapeurs-pompiers volontaires et cinq pilotes d'avion bombardier d'eau.

Il a indiqué que la mission « Sécurité civile » était aujourd'hui constituée de deux programmes, alors que dans la maquette budgétaire présentée le 16 janvier 2004 par le gouvernement, celle-ci n'en comportait qu'un seul. Il a exposé que la mission, à l'époque intitulée « Protection des populations », n'était constituée que du programme « Sécurité civile ».

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a tenu à rappeler que la commission avait proposé dans un rapport d'information présenté en 2004 par MM. Jean Arthuis, président, et Philippe Marini, rapporteur général, la création d'une mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques ». Il a souligné que l'articulation entre la prévention des risques et la gestion des crises correspondait à un souci de cohérence de l'action de l'Etat sur le plan opérationnel, ainsi qu'à une attente croissante de nos concitoyens. Il a précisé que la mission régalienne de protection des populations ne relevait pas que du ministère de l'intérieur, pilote de la mission « Sécurité civile ». Il a remarqué, qu'ainsi, par exemple, le ministère de l'agriculture était concerné au titre de la protection des forêts contre les incendies, tout comme celui de l'équipement, lorsqu'il s'agissait du sauvetage en mer.

Il a considéré qu'une mission interministérielle aurait donc donné plus de lisibilité à l'action de l'Etat dans ce domaine qui prenait une importance croissante. Il a estimé, au demeurant, que ce souci de coordination interministérielle répondait à une préoccupation exprimée en 2001 par la commission sénatoriale d'enquête sur les inondations, présidée par son collègue Marcel Deneux, et dont son collègue, Pierre Martin était le rapporteur.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a constaté que telle n'avait pas été l'option retenue par le gouvernement qui avait préféré confirmer son choix d'une mission ministérielle, tout en scindant en deux programmes afin de répondre à la prescription de l'article 7 de la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) excluant les missions monoprogrammes.

Il a indiqué que le programme 161 « Intervention des services opérationnels » concernait la mobilisation des moyens nationaux de sécurité et de défense civiles destinés à protéger la population contre les feux de forêts en cas de catastrophes naturelles ou technologiques ou au secours d'urgence et au déminage.

Il a ajouté que le programme 128 « Coordination des moyens de secours » était destiné, précisément, à la coordination de la chaîne des acteurs de la sécurité civile en matière de gestion des crises et au soutien des structures d'intervention.

Il a précisé que le directeur de la défense et de la sécurité civile, au ministère de l'intérieur, était responsable des deux programmes de la mission.

Il a ajouté, qu'en termes d'emplois, les effectifs étaient stables avec 2.604 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2006, au lieu de 2.608 en 2005. Il a constaté que l'essentiel de ces emplois (86,3 %) figuraient dans le programme « Interventions des services opérationnels ».

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a noté que la mission « Sécurité civile » disposerait en 2006 de 463,5 millions d'euros de crédits de paiement, dont 34,7 % pour les dépenses de personnels. Il a déclaré que les moyens des deux programmes de la mission étaient relativement équilibrés, soit 55,3 % pour le programme « Interventions des services opérationnels » et 44,7 % pour le programme « Coordination des moyens de secours ».

Après cette présentation générale de la mission « Sécurité civile », il a abordé le programme « Interventions des services opérationnels ». Il a indiqué que celui-ci comportait les moyens de développer et d'optimiser les services opérationnels nationaux destinés à protéger la population en cas de catastrophe et ce, en complément des moyens départementaux de secours. Il a souligné que cette dernière nuance entraînait de lourdes conséquences financières pour les collectivités territoriales.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué que le programme comportait quatre actions concernant respectivement : la participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts, les interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques, le secours à personnes par hélicoptère et la neutralisation des engins explosifs.

Il a déclaré que le programme était doté de 256,1 millions d'euros en crédits de paiement, en progression de 16,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005. Il a précisé que l'évolution de 52,3 millions d'euros des dépenses de personnels s'expliquait principalement par la prise en compte, en 2006, des dépenses liées au compte d'affectation spéciale « Pensions », provoquant à lui seul un surcoût de 23 millions d'euros, puisque le taux de pension des personnels militaires était de 100 %. Il a observé que, précisément, les 1.504 emplois militaires de la mission « Sécurité civile » avaient tous été concentrés sur le programme « Interventions des services opérationnels ».

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a constaté que les dépenses d'investissement étaient en revanche réduites de 15,9 millions d'euros, soit de 26,2 %, en raison de l'achèvement du programme d'acquisition de deux avions bombardiers d'eau, gros porteurs polyvalents « Dash ». Il a indiqué que les moyens dégagés à la fin de ce marché avaient été partiellement « recyclés » pour le remplacement d'un avion Canadair accidenté en 2004, pour la pérennisation de la location d'un hélicoptère bombardier d'eau et pour l'acquisition d'un module d'intervention en cas de risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques « NRBC ». Il a précisé que le remplacement des appareils accidentés au cours de l'été 2005 ne figurait donc pas dans le présent budget.

Il a relevé que la flotte aérienne de la sécurité civile était actuellement constituée de 65 aéronefs, dont 41 hélicoptères. Il a noté que le renouvellement de la flotte d'hélicoptères était maintenant terminé. Il a constaté que, pour ce qui était de la flotte d'avions qui intervenait principalement dans la lutte contre les feux de forêts, l'année 2005 avait été marquée par trois accidents graves mettant hors d'usage l'un des dix Canadairs, le 1er août 2005, et deux des dix bombardiers d'eau « Tracker », les 19 juillet et 20 août 2005.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a annoncé que le principe du remplacement des appareils accidentés cette année était « admis » par le ministère des finances, bien que les moyens correspondant ne figurent pas dans les crédits proposés pour la mission « Sécurité civile » en 2006. Il a indiqué que le ministère avait engagé une réflexion sur une « optimisation » de la politique d'équipement en aéronefs de la sécurité civile pouvant éventuellement déboucher sur l'achat d'un bombardier d'eau « Dash » au lieu du remplacement de deux « Tracker ». Il a précisé qu'aucune décision n'avait pour l'instant été prise à ce sujet, pour lequel il était lui-même interrogatif.

Il a constaté que la situation n'était donc pas budgétairement satisfaisante. Il a souligné que, le plus souvent, les accidents intervenaient en saison estivale, alors que les arbitrages budgétaires étaient déjà rendus, et jugé cependant qu'il convenait de réagir promptement aux situations d'urgence.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué qu'il y avait lieu de s'inquiéter sérieusement, au travers de ces accidents, de l'état réel de la flotte de sécurité civile. Il a souligné que la totalité de la flotte de Canadairs avait été immobilisée pendant plus d'une semaine au mois d'août. Il a noté que cette immobilisation, au coeur de la haute saison, témoignait incontestablement de la gravité de la situation. Aussi a-t-il indiqué qu'il engagerait durant l'année 2006, sur cette question, un contrôle budgétaire en application de l'article 57 de la LOLF. Il a déclaré qu'il souhaitait, en effet, que les membres de la commission des finances puissent vérifier l'opportunité de la politique suivie en la matière et qu'ils soient mieux éclairés qu'aujourd'hui lorsqu'il s'agissait de se prononcer sur des crédits concernant la flotte aérienne de sécurité civile.

S'agissant de la mesure de la performance attachée au programme « Interventions des services opérationnels », M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué qu'il lui semblait que les objectifs poursuivis couvraient son champ d'une manière significative et que les indicateurs de performance proposés se rapportaient, comme il était souhaitable, à l'efficience des services. Il a relevé que, toutefois, un problème subsistait concernant les indicateurs relatifs au coût total de l'heure de vol des avions bombardiers d'eau et des hélicoptères. En effet, il a déclaré que selon les réponses qui lui avaient été faites par le ministère de l'intérieur, les paramètres de détermination de ces coûts étaient soumis à de fortes variations (coût du carburant, parité euro/dollar) et qu'en conséquence, ces prévisions ne sauraient avoir qu'un « caractère purement indicatif ».

Puis M. Claude Haut, rapporteur spécial, a abordé le second programme de la mission concernant la « Coordination des moyens de secours ». Il a rappelé que les actions de ce programme concernaient respectivement la préparation et la gestion des crises, la coordination des acteurs de sécurité civile et le soutien administratif et logistique de la mission. Il a précisé que ce programme disposerait de 207,4 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse de 26 millions d'euros et de 11,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005. Il a noté que cette évolution traduisait pour l'essentiel des transferts de charges.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a relevé que, là encore, des indicateurs de performance mesuraient opportunément l'efficience des services.

Il a estimé que l'essentiel des moyens du programme, soit 78,2 % était concentré sur la coordination des acteurs de sécurité civile (action 2). Il a précisé que celle-ci correspondait, pour une large part, au soutien de l'Etat aux collectivités territoriales pour le financement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), au travers du Fonds d'aide à l'investissement. Il a rappelé que ce fonds apporterait sa contribution aux dépenses liées à une expérimentation du raccordement de sites de SDIS au réseau Acropol de communication de la police. Il a déclaré qu'il s'agissait du programme Antares, qui amorçait le concept d'infrastructures partagées pour les réseaux de radiocommunications numériques entre SDIS et services de police. Il a indiqué que cette expérience avait été lancée dans les départements de l'Eure-et-Loir et de l'Ain. Il a ajouté que trois autres départements devaient bénéficier de l'expérimentation en 2006. Il a déploré que l'extension, certes opportune, du programme Antares s'effectuait, malheureusement, à crédits constants de la part de l'Etat, soit 64,85 millions d'euros. Il a indiqué qu'il s'inquiétait donc beaucoup de l'accroissement prévisible de la part de l'effort qui serait, une fois de plus, laissée à la charge des SDIS.

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué, en conclusion, qu'il interrogerait, lors de sa prochaine audition par la commission des finances, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le remplacement, indispensable à ses yeux, des trois avions accidentés cette année, ainsi que sur la traduction budgétaire de ces remplacements. Il a ajouté qu'il questionnerait aussi le ministre d'Etat sur l'augmentation prévisible de la participation financière des SDIS, donc des départements, au projet Antares. Enfin, il a rappelé que, selon l'usage, la commission se prononcerait sur les crédits proposés après l'audition du ministre d'Etat et en tenant compte des réponses qui lui seront faites.

Puis un large débat s'est instauré.

M. Jean Arthuis, président, a regretté la faiblesse des moyens engagés par l'Etat pour la sécurité civile, par rapport à ceux assumés par les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), évaluant cette participation à environ 10 %. Il a souhaité que soit établi un tableau retraçant l'évolution des budgets de chaque SDIS depuis une dizaine d'années.

M. Paul Girod a regretté le défaut de « salle de crise » dans à peu près 90 % des préfectures et suggéré que le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, soit interrogé à ce sujet, lors de son audition par la commission prévue pour le mardi 22 novembre 2005. Evoquant une réunion récente à Toulouse pour faire le point sur la gestion de l'accident de l'usine AZF, il a déploré que les crises soient trop rarement suivies de réunions, rassemblant l'ensemble des parties prenantes, destinées aux « retours d'expériences ».

M. François Trucy a déploré que les crédits destinés aux marins-pompiers de Marseille soient mal identifiés dans le budget de la mission « Sécurité civile ». Il s'est aussi inquiété de l'existence d'une politique européenne de sécurité civile pour faire face aux crises majeures, évoquant en particulier les incendies de forêt de l'été dernier survenus au Portugal.

M. Yves Fréville, après s'être interrogé sur les 1.504 personnels militaires figurant dans les emplois de la mission, a regretté ne pas être informé sur la totalité de l'action de l'Etat dans le domaine de la sécurité civile.

M. Roger Besse a déploré la suppression de nombreux centres hospitaliers dans les zones rurales, craignant qu'il n'y ait pas suffisamment d'hélicoptères disponibles pour transporter les blessés.

M. Alain Lambert a évoqué la Conférence annuelle des finances publiques rassemblant les représentants de l'Etat, des organismes de sécurité sociale et des collectivités territoriales, dont il avait proposé la création conjointement avec M. Didier Migaud, député, dans le cadre de leur rapport au gouvernement, sur la mise en oeuvre de la LOLF. Il a fait valoir que la mise en place de cette instance devrait être logiquement précédée par des informations précises, complètes et systématiques destinées au Parlement quant aux décisions prises par l'Etat et ayant des incidences financières sur les collectivités territoriales.

M. Jean Arthuis, président, a dénoncé le fait pour l'Etat de contraindre les SDIS à recourir aux services de pharmaciens ou de médecins, sans se préoccuper des implications financières qui en découlaient pour les collectivités, qualifiant cette attitude de « réglementariste ». Il a souligné que les subventions du Fonds d'aide à l'investissement des SDIS étaient versées tout à la fois avec retard et parcimonie, souhaitant qu'une ferme protestation soit formulée à ce sujet lors de la prochaine audition du ministre d'Etat.

En réponse aux différents orateurs, M. Claude Haut, rapporteur spécial, après avoir observé que, dans le département de Vaucluse, une salle de crise avait été mise en place à la suite des graves inondations de Vaison-la-Romaine, a regretté que la plupart des départements ne disposent pas d'un tel équipement. Il a fait part à la commission, d'informations de presse selon lesquelles le ministère envisagerait d'affecter des crédits pour le réaménagement ou la création de salles de crise dans d'autres départements.

Il a approuvé l'idée de faire connaître au ministre d'Etat la nécessité d'un développement des réunions destinées aux « retours d'expériences » à l'issue d'une crise. Il a indiqué que s'il n'existait pas encore, à proprement parler, de véritable politique commune de sécurité civile, la coopération entre les Etats membres de l'Union européenne s'était, fort heureusement, sensiblement développée au cours des dernières années.

Il a exposé que les militaires figurant dans la mission « Sécurité civile » étaient affectés dans des unités spécialisées de sécurité civile, à savoir les unités d'instruction et d'intervention de sécurité civile (UIISC).

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a confirmé que la difficulté de connaître globalement l'effort consenti par l'Etat pour la sécurité civile tenait au fait que cette mission n'était que ministérielle, alors que la politique suivie dans ce domaine ne relève manifestement pas que du ministère de l'intérieur. Il a donc, à nouveau, regretté que la préconisation de la commission des finances tendant à la création d'une mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques » n'ait pas été suivie par le gouvernement. Il a précisé néanmoins qu'un document de politique transversale (DPT) sur la sécurité civile était prévu, bien que malheureusement non publié à ce jour.

Il a fait part de son intention de relayer auprès du ministre d'Etat, lors de sa prochaine audition, la demande d'information plus complète sur l'incidence, pour les finances locales, des décisions prises par l'Etat. Il a souhaité être appuyé par la commission dans la protestation qu'il émettrait, comme prévu, au sujet des modalités d'attribution des subventions du Fonds d'aide à l'investissement des SDIS, soulignant, une nouvelle fois, leur caractère peu transparent.

M. Paul Girod s'est demandé si l'obligation faite par l'Etat pour les SDIS de recourir à un pharmacien ne devrait pas déboucher sur celle, pour l'Etat, de prévoir l'indicateur de performance correspondant, afin de mesurer l'utilité de la mesure.

M. Jean-Jacques Jégou, en sa qualité de rapporteur spécial pour la mission « Santé », s'est interrogé sur l'existence, au sein de la mission « Sécurité civile », de crédits concernant le transfert d'urgence dans un centre hospitalier.

Après avoir fait valoir que la fermeture des centres hospitaliers ne relevait pas de la mission dont il avait la charge, M. Claude Haut, rapporteur spécial, a rappelé que l'article 124 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, codifié à l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, avait prévu la conclusion de conventions de prise en charge financière entre les SDIS et les établissements de santé, sièges des services d'aide médicale d'urgence.

A l'issue de ce débat, la commission, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Sécurité civile » jusqu'à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, prévue pour le mardi 22 novembre 2005.

PJLF pour 2006 - Mission « Ecologie et développement durable » - Examen du rapport spécial

Enfin, la commission a procédé àl'examen du rapport spécial de Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, sur la mission « Ecologie et développement durable ».

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a indiqué que la mission ministérielle « Ecologie et développement durable » rassemblait 615,59 millions d'euros en crédits de paiement répartis en trois programmes :

- le programme « prévention des risques et lutte contre les pollutions », placé sous la responsabilité du directeur de la prévention des pollutions et des risques, qui mobilise 178,1 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 174 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit 28,3 % des crédits de la mission ;

- le programme « gestion des milieux et biodiversité », placé sous la responsabilité du directeur de la nature et des paysages, qui rassemble sur 167,35 millions d'euros en AE et 154,14 millions d'euros en CP (25 % des crédits de la mission) ;

- le programme « conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable », placé sous la responsabilité du directeur général de l'administration, qui contient 287,52 millions d'euros en AE et 287,46 millions d'euros en CP (46,7 % des crédits de la mission).

Elle a précisé que la mission « Ecologie et développement durable » devrait également bénéficier de crédits provenant de fonds de concours, à hauteur de 6,5 millions d'euros en AE et 10,5 millions d'euros en CP, et que les dépenses fiscales rattachées à cette mission représentaient environ deux fois et demie les crédits budgétaires.

Elle a souligné que la mission « Ecologie et développement durable » apparaissait, à bien des égards, comme la « partie émergée de l'iceberg ». Elle ne représentait que 23,3 % de l'ensemble des crédits des différentes missions consacrés à l'environnement et, sur la base des données 2003, seulement 2,3 % de la dépense nationale liée à l'environnement.

Elle a noté que le ministère de l'écologie et du développement durable présentait la particularité de s'appuyer sur de très nombreux opérateurs, dont les effectifs étaient supérieurs à ceux prévus par le plafond d'emplois du ministère.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a ensuite fait valoir que plusieurs opérations de débudgétisation devaient être prises en compte. D'une part, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage se verraient attribuer des recettes fiscales d'un produit global de 216 millions d'euros, soit 35 % des crédits de la mission. D'autre part, le fonds de prévention des risques naturels majeurs serait mis à contribution pour venir en complément des actions menées par le ministère au titre de cette mission.

Elle a également souligné la situation budgétaire difficile du ministère de l'écologie et du développement durable. Celui-ci se voyait contraint d'arbitrer entre le paiement de ses dettes - qui atteindraient une centaine de millions d'euros - et le lancement d'actions nouvelles.

Enfin, elle a relevé que l'absence de programme « eau » au sein de la mission « Ecologie et développement durable » ne devait pas conduire à un jeu de renvoi des responsabilités administratives. De ce point de vue, elle a fait part de son souhait d'obtenir des clarifications sur le rôle respectif des différents responsables de programme et a estimé qu'une réorganisation de la direction de l'eau en fonction des programmes actuels devrait être étudiée.

Puis Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a mis en relief les principaux éléments notables des différents programmes.

S'agissant du programme « prévention des risques et lutte contre les pollutions », elle a relevé les difficultés rencontrées par le ministère de l'écologie et du développement durable à honorer les engagements pris antérieurement. Elle s'est interrogée sur les différences constatées entre les autorisations d'engagement ouvertes par rapport aux crédits de paiement prévus selon les actions considérées et, plus globalement, sur la capacité du ministère de l'écologie et du développement durable à assurer la réalisation concrète de certaines actions.

Elle a souhaité que le ministère précise clairement l'impact de l'élargissement des missions du fonds de prévention des risques naturels majeurs sur le programme « prévention des risques et lutte contre les pollutions ».

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a ensuite observé que 60 % des crédits de paiement de ce programme correspondaient à des subventions aux opérateurs. Elle a relevé, notamment, que l'ADEME devrait, en théorie, connaître une augmentation réelle de ses moyens, mais a précisé que le ministère procèderait probablement à des redéploiements en gestion.

S'agissant des autres crédits, elle a souligné que le plan de renforcement des effectifs des services d'inspection des installations classées annoncé à la suite de la catastrophe de l'usine AZF - qui prévoyait une croissance de 400 postes des effectifs, dont 200 créations nettes, sur la période 2004-2007 - n'était pas respecté. Elle a précisé que ce plan avait connu, dès 2005, un infléchissement qui se confirmait en 2006, puisque le projet de budget ne prévoyait d'affecter au contrôle des installations classées que 46 postes supplémentaires, par redéploiement. Elle a souhaité qu'un effort particulier soit mené dans ce domaine. Compte tenu des marges de manoeuvre qui apparaissaient par ailleurs, elle a annoncé qu'elle proposerait à la commission un amendement tendant à majorer les crédits du programme « conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » de 3.448.752 euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement, afin d'accroître de 54 ETPT (équivalent temps plein travaillé) les effectifs des services d'inspection des installations classées.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a observé que le programme « gestion des milieux et biodiversité » était soumis aux mêmes contraintes générales que le programme « prévention des risques et lutte contre la pollution », le ministère de l'écologie et du développement durable étant contraint, pour mener des actions nouvelles, de mettre en place un système d'étalement de la dette. Elle a précisé qu'elle demanderait au gouvernement de communiquer l'état exact des dettes du ministère, afin de disposer d'une vision claire des enjeux à venir.

Puis elle a noté qu'environ 62 % des crédits de paiement correspondaient à des subventions aux opérateurs, tout en précisant que les opérateurs les plus importants par les masses financières en jeu - les agences de l'eau - ne percevaient pas de subventions de ce programme. L'action des agences de l'eau se rattachant aux deux programmes de politiques de la mission « Ecologie et développement durable », elle a souhaité avoir connaissance de la répartition de leurs moyens entre les deux grands types d'actions du ministère dans le domaine de la politique de l'eau - lutte contre la pollution et gestion des milieux - afin de pouvoir établir clairement la répartition des compétences entre les deux responsables de programme.

Elle a ensuite indiqué que l'affectation, au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, de 80 % du produit du droit de francisation et de navigation (environ 28 millions d'euros) devrait modifier la répartition des crédits présentée dans le bleu budgétaire. En effet, celui-ci prévoyait l'attribution au Conservatoire de 7,4 millions d'euros en AE et CP. Or, le ministère de l'écologie et du développement durable lui avait indiqué que ces crédits seraient redéployés en gestion au profit des actions en faveur de la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité. Dans la mesure où ceci ne correspondait plus à la justification au premier euro présentée dans le bleu budgétaire, Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a proposé qu'une partie de ces crédits serve à financer le renforcement des effectifs des services d'inspection des installations classées. Elle a également souhaité obtenir des éléments d'information complémentaires concernant l'Office national de la chasse et de la faune sauvage.

S'agissant des autres crédits du programme, elle a constaté que l'importance des crédits consacrés à la mise en oeuvre du réseau Natura 2000, en progression, traduisaient les contraintes communautaires. Elle a rappelé que la France devait achever son réseau (hors sites marins) d'ici le 30 avril 2006, en transmettant à la Commission européenne environ 250 sites manquants au titre des directives « oiseaux » et « habitats ».

Par ailleurs, elle s'est interrogée sur l'efficacité des actions menées au titre de la police de l'eau. L'indicateur retraçant l'évolution de l'efficacité de la police de l'eau prévoyant que seulement 10 % de l'activité totale des effectifs des services de police de l'eau serait consacrée aux contrôles, sur la base de 205 jours de travail annuels par ETPT (équivalent temps plein travaillé) et d'une demi-journée par contrôle, elle a jugé nécessaire d'obtenir des précisions du ministère de l'écologie et du développement durable sur ce point.

Puis Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a indiqué que le troisième programme, « conception et pilotage des politiques environnementales et développement durable », comprenait essentiellement des crédits de personnel.

Elle a précisé que, de ce point de vue, le ministère de l'écologie et du développement durable présentait une situation tout à fait particulière, dans la mesure où il ne disposait pas de corps propres et transférait, en gestion, les emplois et les crédits inscrits sur son budget vers d'autres départements ministériels (équipement, agriculture, finances et santé). Ainsi, il n'exécutait pas la dépense et ne connaissait pas la consommation réelle de ses crédits de personnel.

En outre, elle a noté que le ministère faisait également appel, pour conduire les actions relevant de cette mission, aux services déconcentrés d'autres ministères et à des personnels relevant d'autres missions. Elle a estimé que l'inscription de ces effectifs sur la mission « Ecologie et développement durable » serait, à terme, souhaitable.

De manière plus globale, elle a jugé que cette situation était insatisfaisante et devrait être clarifiée à l'avenir. Elle a noté que le ministère de l'écologie et du développement aurait pu être pilote en matière de gestion interministérielle des effectifs, mais que la pratique n'était pas concluante. En outre, elle a observé que les redéploiements en gestion, en fonction des priorités, étaient rendus quasiment impossibles par la complexité statutaire des quelque 67 corps oeuvrant pour ce ministère.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a souhaité qu'un effort soit mené pour simplifier l'organisation des services déconcentrés contribuant à la mise en oeuvre de la mission « Ecologie et développement durable ». Elle a noté que les premiers retours relatifs aux expériences de rapprochement entre les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) et les directions régionales de l'environnement (DIREN) se révélaient positifs. Cela devait donc conduire à envisager des regroupements.

S'agissant des autres actions menées dans le cadre de ce programme, elle a souligné deux éléments.

D'une part, elle a indiqué que les subventions versées aux associations devraient être soumises à la contrainte budgétaire générale qui pèse sur la mission, le ministère lui ayant indiqué, notamment, que « la nécessaire stabilité des réseaux les plus importants pourrait être mise en question par des niveaux de subvention ainsi amoindris. En ce sens, l'année 2006 constituera probablement un cap difficile pour les associations militantes de la société civile ».

D'autre part, compte tenu des enjeux, notamment financiers, liés aux condamnations potentielles de la France au titre du non-respect des obligations communautaires dans le domaine de l'environnement, elle a souhaité connaître les dossiers en instance devant la Cour de justice des communautés européennes ou qui pourraient faire l'objet de litiges dans un avenir proche. En effet, elle a souligné que les crédits de 909.331 euros inscrits sur l'action « qualité de la réglementation et efficacité de la police de l'environnement » apparaissaient très faibles au regard des enjeux, ce qui lui avait été confirmé par le responsable de programme.

Sous réserve de ces remarques et de l'amendement qu'elle présentait, Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a proposé l'adoptiondes crédits de la mission « Ecologie et développement durable ».

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président, a félicité le rapporteur spécial pour la qualité et l'intérêt de sa présentation.

M. Alain Lambert a relevé qu'avec la mise en place de la LOLF, le budget s'apparentait à une coproduction entre le Parlement et l'exécutif, ce qui constituait une nouveauté dans le cadre de la Ve République. Il a observé que l'environnement, en dépit de la faiblesse des crédits inscrits sur cette mission, représentait une préoccupation d'avenir. Il a recommandé au rapporteur spécial de « passer au crible » les opérateurs de la mission et a relevé que ces derniers devraient être soumis aux mêmes contraintes budgétaires et aux mêmes obligations de performance que le ministère de l'écologie et du développement durable. Il a souligné, notamment, les enjeux liés à l'ADEME.

Par ailleurs, il a estimé que les subventions accordées aux associations devaient être soumises à une contrainte de stabilité en valeur, afin que celles-ci réalisent des gains de productivité. Enfin, il a noté que l'inscription des crédits de personnels sur un programme support constituait une situation transitoire, liée aux insuffisances des systèmes d'information de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président, a jugé nécessaire d'obtenir le récapitulatif des dettes du ministère de l'écologie et du développement durable et a souhaité qu'un éclairage spécifique soit effectué sur la situation budgétaire des agences de l'eau. Il s'est dit réservé quant à la mise en oeuvre concrète du programme Natura 2000. Il a estimé que la proposition de créer des postes d'inspecteur des installations classées n'était recevable que dans la mesure où une économie générale serait opérée sur la mission.

M. Jean-Jacques Jégou a souhaité obtenir des précisions sur les modalités d'indemnisation des assurés en cas de catastrophe naturelle.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a indiqué que l'ADEME se trouvait dans une situation tendue et a fait part de son souhait de contrôler cette agence, en application de l'article 57 de la LOLF, au cours de l'année 2006.

M. Jean Arthuis, président, a suggéré au rapporteur spécial de mener également un contrôle d'Eco-emballages.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a noté que l'inscription de l'ensemble des crédits de personnel au sein d'un programme support permettait au ministère de l'écologie et du développement durable de contourner la règle de fongibilité asymétrique mise en place par la LOLF.

S'agissant de Natura 2000, elle a relevé que ce dossier soulevait la question de la gestion des relations entre la France et l'Union européenne. Elle a précisé que la France avait tardé à se mettre en conformité avec les règles communautaires et a estimé que les difficultés de mise en oeuvre devraient être abordées en amont. De ce point de vue, elle a fait part de son souhait de faire le point sur les échéances à venir en matière de contentieux liés au non-respect des obligations communautaires dans le domaine de l'environnement.

S'agissant des agences de l'eau, elle a observé que l'examen du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques n'était pas achevé, ce qui contribuait à rendre la situation plus complexe. Enfin, elle a indiqué que des informations complémentaires relatives à la prévention des catastrophes naturelles seraient apportées dès que les intentions exactes du gouvernement concernant les missions du fonds de prévention des risques naturels majeurs seraient connues.

La commission a ensuite adopté, à l'initiative du rapporteur spécial et après l'intervention de M. Jean Arthuis, président, un amendement tendant, d'une part à réduire de 7,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement les crédits du programme « gestion des milieux et biodiversité », d'autre part à majorer les crédits de personnel (titre 2) du programme « conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » de 3.448.752 euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement, afin d'accroître de 54 ETPT les effectifs des services d'inspection des installations classées.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Ecologie et développement durable » ainsi modifiés.

Jeudi 3 novembre 2005

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Santé - Informatisation dans le domaine de la santé - Communication

La commission a tout d'abord entendu une communication de M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, sur l'informatisation dans le domaine de la santé.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a indiqué que la mission de contrôle qu'il avait menée en application de l'article 57 de la LOLF sur l'informatisation du secteur de la santé s'inscrivait dans le droit fil de celle menée en 2004 par le président Jean Arthuis, sur l'informatisation de l'Etat, et qui avait donné lieu à la parution d'un rapport d'information ad hoc.

Il a précisé qu'il avait procédé à de nombreuses auditions, ainsi qu'à des déplacements sur le terrain, tant en France qu'au Royaume-Uni.

Dans un premier temps, il a présenté la réalité contrastée de l'informatisation du secteur de la santé en France. Il a ainsi noté que les professionnels libéraux étaient majoritairement informatisés (80 à 85 %) mais que, seuls, 40 à 60 % d'entre eux avaient recours à un dossier informatisé. Peu d'entre eux disposaient d'un dossier patient réellement ouvert, communiquant et utilisant une application moderne. Il a relevé que leur utilisation de l'équipement informatique était principalement orientée vers la transmission des feuilles de soin électroniques. Puis il a souligné que le déploiement du haut débit, auquel seuls 20 % des médecins généralistes avaient accès, constituait un enjeu essentiel pour l'avenir.

Il a ensuite mis en évidence le retard des hôpitaux publics en matière d'informatisation. Il a observé que les hôpitaux, publics comme privés, couvraient globalement le domaine de l'informatique de gestion, mais que les applications étaient vieillissantes et peu intégrées. En revanche, il a indiqué que le dossier patient et les processus de soins étaient insuffisamment informatisés, notamment dans les établissements publics, puisque seuls 20 à 25 % de ceux-ci disposent d'un dossier patient électronique.

De manière générale, il a relevé que les investissements informatiques des hôpitaux publics, estimés à 206 millions d'euros pour 2004, représentaient près de 5 % du total de leurs investissements. Il a toutefois précisé que cette donnée générale recouvrait des situations différentes suivant les établissements considérés. Les centres régionaux de lutte contre le cancer consacreraient ainsi 2 % en moyenne de leur budget d'exploitation à l'informatique, les centres hospitaliers universitaires (CHU) 1,5 %, les centres hospitaliers ou participant au service public hospitalier entre 1 et 1,5 %, les plus petits se limitant à 0,7 %, tandis que la proportion du budget des cliniques privées sous objectif quantifié national consacrée à l'informatique serait de l'ordre de 0,5 % à 1 %.

Il a également souligné quelques réussites notables, comme l'hôpital européen Georges Pompidou, dans lequel il s'était rendu, le CHU d'Amiens, l'institut Gustave Roussy ou encore le centre hospitalier d'Arras.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a fait le point sur le niveau des dépenses informatiques de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Il a indiqué que la CNAMTS, dans le cadre de la préparation de la convention d'objectif et de gestion 2004-2007 passée avec l'Etat, avait présenté une demande de 2,58 milliards d'euros au titre des dépenses informatiques, soit une augmentation de 127 % par rapport au budget de la période précédente 2000-2003. Il a précisé qu'une mission conduite par les inspections générales des affaires sociales et des finances avait validé une enveloppe budgétaire de seulement 1,5 milliard d'euros sur quatre ans, soit 1 milliard d'euros de moins que le projet initialement présenté par la CNAMTS. Il a relevé que, d'après le directeur général de la CNAMTS, cet investissement ne remettrait pas en cause le programme d'économies présenté lors de la réforme de l'assurance maladie, qui devrait se traduire par une moindre dépense de 200 millions d'euros sur la période 2005-2007.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a ensuite resitué la France par rapport aux autres pays.

Il a indiqué que la France était en retard, du point de vue du dossier patient, par rapport à ses voisins d'Europe du Nord, mais légèrement en avance par rapport à ceux d'Europe du Sud. Il a observé que le niveau d'informatisation des hôpitaux allemands était sans doute légèrement supérieur à celui de la France. Il a noté que l'Italie et l'Espagne conduisaient quelques projets régionaux de systèmes d'information de santé, mais qu'ils étaient globalement moins avancés en matière d'informatique hospitalière. Il a relevé que le Canada et le Royaume-Uni avaient récemment engagé des plans ambitieux d'informatisation de leur système de santé, assortis de moyens importants, puis a fait valoir que les Etats-Unis étaient en avance, la moyenne des budgets des hôpitaux universitaires consacrée au système d'information variant entre 2,5 et 5 %.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a mis en évidence les principales faiblesses des systèmes d'information du secteur de la santé en France :

- l'insuffisance du pilotage global, les responsabilités étant éclatées entre une administration centrale sous-dotée en effectifs, des missions spécialisées et des structures annexes ;

- le retard des établissements publics de santé, notamment lié à l'absence, jusqu'à présent, de prise en compte du caractère stratégique des systèmes d'information et de leur nécessaire médicalisation ;

- le cloisonnement des systèmes d'information, caractérisé par l'absence d'interopérabilité de ces systèmes, d'une part, au sein d'un même hôpital, d'autre part, entre les hôpitaux et enfin entre la médecine de ville et les établissements de santé ;

- la faible normalisation internationale des systèmes informatiques ;

- une formation des professionnels de santé inadaptée aux enjeux de l'informatisation.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a toutefois remarqué que plusieurs réformes structurantes pour les systèmes d'information avaient été engagées récemment. Il a observé que le plan d'aide à l'investissement hospitalier « hôpital 2007 » comprenait 275 millions d'euros sur 5 ans pour les systèmes d'information, soit 3 % seulement du total des crédits du plan. Il a précisé que ces aides étaient concentrées sur quelques projets, notamment ceux de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), et que la consommation des crédits paraissait encore insuffisante. Il a noté que la mise en oeuvre de la tarification à l'activité contribuait également à bouleverser le contexte informatique des établissements de santé, de même que la généralisation du dossier médical personnel (DMP), qui constituait un véritable défi pour l'ensemble des acteurs.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a, en effet, estimé que la mise en place du DMP révélait les carences des systèmes d'information et de leur pilotage. Après avoir rappelé les caractéristiques du projet contenu dans la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance-maladie, il a indiqué que l'objectif initial du gouvernement consistait à rendre opérationnel et à généraliser le dispositif à la mi-2007.

Il a indiqué que l'organisation pour atteindre cet objectif avait tardé à se mettre en place, puisque la constitution d'une structure ad hoc -le groupement de préfiguration du dossier médical personnel (GIP DMP)- n'était intervenue que 8 mois après le vote de la loi et n'avait pas été accompagnée d'une réflexion sur le rôle des nombreuses structures existantes. Il a indiqué que le GIP DMP avait élaboré un calendrier en quatre phases devant conduire à une généralisation du déploiement du DMP à partir du 1er janvier 2007.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a toutefois observé que plusieurs questions stratégiques restaient sans réponse. Il a notamment relevé que la définition du contenu concret du DMP soulevait de réelles difficultés. Il s'est interrogé sur l'articulation entre le DMP et le projet de « web médecins » développé par la CNAMTS, qui devrait permettre aux médecins de consulter l'historique des remboursements des soins et prestations versés à chaque patient. Il a fait valoir que la maîtrise du patient sur son dossier soulevait la question de la fiabilité des données stockées et a estimé que les médecins n'utiliseraient le DMP que si celui-ci retraçait réellement les affections du patient. Il a également indiqué que le cadre géographique de mise en oeuvre du DMP n'était pas défini. Enfin, il a remarqué que les différents acteurs devaient être convaincus de la pertinence du projet, ce qui constituait un enjeu majeur.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a déclaré que la généralisation, d'ici à juillet 2007, d'un dossier médical personnel substantiel, apparaissait irréaliste. Il a cité, notamment, les propos du directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins au ministère de la santé et des solidarités, pour qui « la généralisation d'un dossier structuré assez complet demandera vraisemblablement une dizaine d'années. On peut cependant viser pour l'horizon 2007 un déploiement significatif d'un DMP simple (voire « rustique ») pour plusieurs millions de patients ». Il a indiqué que ce point de vue était partagé par l'ensemble des personnes auditionnées et qu'il convenait donc d'en tenir compte dans la conception du projet.

S'agissant du coût et des retombées de ce dernier, il a observé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 ne permettait pas d'identifier les sommes consacrées au développement du DMP, les besoins étant estimés à 100 millions d'euros. Il a indiqué que le coût de fonctionnement de ce dossier en régime de croisière serait compris entre 10 et 20 euros par dossier actif et par an, soit entre 600 millions d'euros et 1,2 milliard d'euros au total. Il a noté que les dépenses induites pour les hôpitaux étaient évaluées à 100 millions d'euros en investissements et 300 millions d'euros en exploitation, même si ce coût serait très variable en fonction des établissements. Il a ajouté que le coût pour la médecine de ville restait difficile à évaluer, mais qu'il serait nécessaire de prévoir une aide en direction des médecins pour assurer le développement de ce projet. Il a enfin constaté que les économies potentielles demeuraient floues et qu'il n'était pas possible d'effectuer un bilan coûts/économies.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a noté que la comparaison avec l'expérience britannique d'informatisation du système de santé, qu'il avait tenu à aller examiner « sur place », révélait les erreurs du projet français. Il a rappelé que le projet anglais avait été conçu à partir de 1998, pour aboutir en 2010. Il a souligné l'importance du contexte politique, marqué par la nécessité d'améliorer la qualité des soins. Il a indiqué que les principes du projet reposaient, d'une part, sur un doublement des dépenses informatiques, qui seraient sanctuarisées ; d'autre part, sur la définition, au niveau central, de standards nationaux pour la diffusion des données informatiques et l'équipement en matériel informatique ; enfin, sur la définition d'un programme national d'informatisation destiné à mieux maîtriser le développement généralisé des nouvelles technologies dans le secteur de la santé. Il a observé qu'il s'agissait d'un programme global, qui incluait, outre le dossier médical personnel, des systèmes électroniques de prise de rendez-vous et de stockage numérique des images.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a précisé que le projet était ciblé sur le Royaume-Uni et que cinq régions avaient été définies, afin de limiter le risque de défaillance d'un système ou d'un industriel. Il a relevé que le fichier central de données ne comprendrait qu'un résumé des informations médicales consignées par les médecins généralistes (GPs).

Il a estimé que ce projet était appuyé par une véritable volonté politique qui se déclinait au niveau administratif. Il a ainsi précisé qu'une « task force » avait été mise en place au sein du NHS (ministère de la santé britannique), puis qu'une agence ad hoc avait été créée. Il a observé que la mise en oeuvre du programme suivait un cap clair et s'échelonnait jusqu'en 2010. Il a toutefois relevé qu'un retard d'environ 18 mois était d'ores et déjà envisagé. Il a indiqué que les personnes rencontrées au Royaume-Uni avaient souligné l'importance, d'une part, du travail de réflexion préparatoire pour aboutir à un cahier des charges valide sur le long terme, d'autre part, des campagnes de communication pour obtenir l'adhésion des patients comme des professionnels de santé.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a fait valoir que le projet britannique bénéficiait de moyens importants, puisqu'un investissement de 6,2 milliards de livres sterling (9,3 milliards d'euros) était prévu d'ici à 2010 pour les seules « dépenses centrales », tandis que les « dépenses locales » étaient évaluées à un milliard de livres sterling par an pour l'ensemble du NHS. Il a précisé que certains anticipaient un coût global bien supérieur, pouvant être compris entre 18,6 et 31 milliards de livres sterling.

Il a souligné que les industriels avaient été mis « sous pression », le NHS ayant obtenu une baisse de 60 % du prix de leur demande initiale et imposé le principe du « payment on reward ».

En conclusion, M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a souhaité que le gouvernement prenne la mesure des enjeux, clarifie ses orientations ainsi que le calendrier de mise en oeuvre du DMP et s'inspire du modèle britannique. Il a rappelé que l'informatisation du système de santé permettrait en premier lieu d'améliorer la qualité du système de santé, ce qui se traduirait, ensuite, par des économies.

Puis il a formulé dix propositions, dont certaines seraient débattues dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 :

1) définir un véritable pilotage central de la politique d'informatisation, qui doit être du ressort de l'Etat et relever d'une structure administrative ayant une visibilité suffisante ;

2) renforcer les moyens et la capacité d'expertise de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins du ministère de la santé et des solidarités ;

3) pérenniser le Groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier (GMSIH) en élargissant ses missions aux enjeux de l'informatisation de la médecine de ville ;

4) associer les professionnels de santé aux orientations stratégiques en matière d'informatisation ;

5) redéployer les crédits non consommés du plan « Hôpital 2007 » vers les actions d'informatisation des établissements de santé ;

6) accroître les investissements consacrés aux systèmes d'information dans les établissements de santé ;

7) clarifier le calendrier de mise en place du DMP, ses objectifs et les moyens qui devront y être consacrés à moyen-long terme ;

8) affecter une part déterminée de la dotation du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville à la mise en oeuvre du DMP ;

9) développer les formations initiale et continue des professionnels de santé ;

10) lancer une campagne globale de sensibilisation des professionnels de santé et du grand public, afin de s'assurer de leur adhésion, condition essentielle de la réussite de ce chantier.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur spécial pour la qualité de son intervention et s'est dit frappé par le défaut de pilotage constaté dans la mise en place du DMP.

M. Yves Fréville a remarqué que, faute d'avoir clairement défini les objectifs au départ, la situation avait finalement peu changé depuis les premières expériences d'informatique médicale. Il a souligné l'importance du rôle de la formation pour le succès d'un projet de cette envergure.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a indiqué que la formation annuelle facultative sur les systèmes d'information, organisée par l'Ecole nationale de la santé publique à destination des directeurs de systèmes d'information hospitaliers et de l'organisation (DSIO), ne réunissait que douze personnes par an pour 1.000 établissements, ce qui constituait un véritable échec.

M. Auguste Cazalet s'est déclaré stupéfait par le retard accumulé par la France dans le domaine de l'informatisation du système de santé et s'est interrogé sur la consommation des crédits destinés aux systèmes d'information.

M. François Trucy a estimé que l'informatisation du système de santé, après un investissement initial, permettrait de susciter des économies considérables, tout particulièrement en raison du décloisonnement de la médecine de ville et de l'hôpital.

M. Maurice Blin a souhaité savoir si les régions pourraient, le cas échéant, intervenir en complément d'un Etat central défaillant dans ce domaine. Il s'est interrogé sur l'impact de la mise en oeuvre de la LOLF sur ce point et a souligné que le problème majeur de l'informatisation résidait dans les réflexes culturels de chacun.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a indiqué qu'une régionalisation éventuelle devrait respecter le principe d'interopérabilité. Il a relevé les différences de coût constatées, pour une même opération, entre l'hôpital public et les cliniques privées.

M. Adrien Gouteyon a jugé « passionnante » la présentation faite par le rapporteur spécial. Il a regretté que la politique menée avec le DMP s'apparente à des effets d'annonce. Il s'est demandé si l'organisation du système de santé français permettait réellement à la volonté politique de s'imprimer sur le terrain. Il a souhaité connaître l'état de l'informatisation des établissements de soins privés, puis a estimé qu'il conviendrait de mettre l'accent sur la qualité des soins apportée par des systèmes d'information performants.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a estimé qu'une volonté politique forte permettrait de vaincre les résistances. Il a noté que les cliniques privées étaient globalement en avance sur les hôpitaux publics et a jugé qu'une attention particulière devrait être portée aux missions d'intérêt général supportées par les établissements publics.

M. Jean Arthuis, président, a indiqué, eu égard à l'intérêt de la présente communication, qu'il conviendrait d'en assurer un suivi, notamment sous la forme d'un débat ad hoc en séance publique au cours du premier semestre 2006.

La commission a alors, à l'unanimité, donné acte, à M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, de sa communication et décidé que les conclusions de sa mission feraient l'objet d'une publication sous la forme d'un rapport d'information.

PJLF pour 2006 - Mission « Action extérieure de l'Etat » - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné le rapport spécial de M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial sur la mission « Action extérieure de l'Etat ».

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a précisé que la mission « Action extérieure de l'Etat » constituait une mission ministérielle relevant du ministère des affaires étrangères. Il a indiqué qu'elle ne retraçait pas toute l'action de l'Etat à l'étranger, car elle ne regroupait ainsi pas les crédits des services des autres ministères à l'étranger. Il a observé que son intitulé n'était donc pas exact.

Il a indiqué que cette mission constituait une des deux missions auxquelles le ministère des affaires étrangères contribuait, l'autre étant la mission interministérielle « aide publique au développement », dont le programme « solidarité à l'égard des pays en développement » était piloté par le ministère.

Il a rappelé que la mission représentait, en termes d'emplois, 13.589 équivalents temps plein travaillé (ETPT), soit 0,6 % du plafond global des autorisations d'emplois et 81,3 % du plafond d'emploi du ministère des affaires étrangères et en termes de crédits budgétaires, 2,36 milliards d'euros de crédits de paiement, soit 0,9 % du total des crédits des missions, correspondant, à hauteur de 35,6 %, à des dépenses de personnel du titre 2.

Il a indiqué que la mission « action extérieure de l'Etat » regroupait trois programmes : le programme « action de la France en Europe et dans le monde », doté de 1,42 milliard d'euros, représentant 60 % des crédits de paiement de la mission et 66 % des dépenses de personnel du titre 2 ; le programme « rayonnement culturel et scientifique », doté de 334 millions d'euros, regroupant 14 % des crédits de paiement de la mission et 10,6 % des dépenses de personnel du titre 2 ; le programme « Français à l'étranger et étrangers en France », doté de 604 millions d'euros, regroupant 26 % des crédits de paiement de la mission et 23,4 % des dépenses de personnel du titre 2.

Il a précisé que pour la réalisation des deux derniers programmes, le ministère des affaires étrangères s'appuyait sur des opérateurs nombreux et importants.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a indiqué qu'en euros courants, les crédits de la mission « action extérieure de l'Etat » progressaient de 2,4 % par rapport à la loi de finances pour 2005. Il a observé que cette progression s'expliquait par des transferts en provenance de l'ancien budget des charges communes, s'agissant des cotisations de retraite et les indemnités des parlementaires européens (7,84 millions d'euros), ainsi que par l'expérimentation de « loyers domaniaux », pour 11,6 millions d'euros.

Il a noté qu'à structure constante, la mission « action extérieure de l'Etat » voyait ses crédits baisser de 18 millions d'euros, soit une diminution en valeur absolue de 0,76 %, la mission faisant mieux que respecter la norme de dépense « zéro volume » édictée par le gouvernement.

Il a indiqué que selon les termes employés par le ministère des affaires étrangères, « la modernisation de l'outil diplomatique se poursuivait au prix de choix rigoureux », qui se traduisaient depuis plusieurs années par une réduction du nombre d'implantations du Quai d'Orsay à l'étranger.

Il a montré que ces choix s'exprimaient en outre par une réduction des emplois en 2006, qui venait s'ajouter à la baisse régulière des effectifs du ministère des affaires étrangères depuis 10 ans (- 11 %). Il a précisé qu'en net, 235 ETPT se trouvaient supprimés dans le projet de loi de finances pour 2006 au ministère des affaires étrangères, mais que 91 correspondaient à des transferts d'assistants techniques auprès de l'agence française de développement, dont 76 au titre de la mission « action extérieure de l'Etat ».

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a formulé sur l'ensemble de la mission plusieurs remarques d'ordre général.

Il a noté que le ministère des affaires étrangères avait accompli un réel effort de transparence dans le recensement de ses biens immobiliers et de ses effectifs grâce à l'aiguillon de la LOLF et que l'on passait ainsi de 9.141 emplois budgétaires en loi de finances initiale pour 2005 à 16.720 ETPT dans le présent projet de loi de finances.

Il a cependant observé que la mise en place de la LOLF se heurtait à deux difficultés : disponibilité très tardive des nouveaux systèmes informatiques (décembre 2005 pour le système « Accord LOLF ») qui ne simplifiait pas les choses et surtout, maintien de gestions séparées pour tous les ordonnateurs secondaires délégués de l'Etat à l'étranger. Il a jugé que tenir autant de comptabilités séparées, devenues plus complexes dans le cadre du nouveau plan comptable, et ce, uniquement pour des crédits de fonctionnement (gestion des quotes-parts de téléphone, de chauffage ou de gardiennage...) ne paraissait pas souhaitable. Il a ainsi appelé à une généralisation des services administratifs et financiers uniques. Il a annoncé qu'il se rendrait, en application de l'article 57 de la LOLF, dès le mois de janvier 2006, dans un poste diplomatique et consulaire pour vérifier les conditions de mise en place de la LOLF.

Il a observé que la « modernisation dans la rigueur » vécue parfois difficilement pas les agents du Quai d'Orsay devait s'accompagner d'une réflexion stratégique sur les missions et l'étendue de l'appareil diplomatique et consulaire à l'étranger, conforme aux ambitions de la France en matière internationale et que le contrat de modernisation envisagé par le ministère avec Bercy devait prendre en compte cette dimension stratégique.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial s'est félicité que M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, ait souhaité créer un « comité d'éthique » au Quai d'Orsay afin d'assurer le respect des règles de déontologie et de désintéressement. Il s'est interrogé sur le point de savoir s'il ne fallait pas aller plus loin dans la réflexion, en posant, sur le modèle de ce qui existait pour les parlementaires, le cas échéant, des règles en termes de déclaration du patrimoine pour les agents pouvant se prévaloir de la qualité d'ambassadeur de la République française ou d'incompatibilités pour les anciens ambassadeurs. Il a jugé que la réputation des agents du Quai d'Orsay devait être préservée à tout prix, car il s'agissait de l'image de la France.

Il a considéré enfin que le principe de sincérité n'était pas respecté par la présente mission, les crédits inscrits au titre des opérations de maintien de la paix (OMP) n'étant pas sincères. Il a observé, dans sa prévision de dépense, que le ministère des affaires étrangères commettait une erreur manifeste d'appréciation qu'il a souhaité détailler.

S'agissant du programme « Action de la France en Europe et dans le monde », il a tout d'abord remarqué que les crédits affectés aux actions multilatérales représentaient 65,6 % des crédits du programme.

Dans ce programme figuraient les crédits consacrés aux opérations de maintien de la paix. Selon ses calculs, il a observé qu'il manquait au minimum 75 millions d'euros pour 2006 au titre des contributions françaises aux OMP de l'ONU et il a indiqué qu'il proposerait un amendement de conséquence.

Il a souligné, en outre, que les contributions obligatoires ou volontaires aux organismes multilatéraux libellées en dollars devaient faire l'objet d'une couverture du risque de change.

Il a proposé par ailleurs de doubler le nombre de bénéficiaires du programme « personnalités d'avenir » et indiqué qu'il proposerait, conformément aux nouvelles règles posées par la LOLF, un mode de financement ad hoc.

Il a noté que la politique immobilière du Quai d'Orsay connaissait une inflexion positive.

Il a regretté enfin que les efforts réalisés en matière d'indicateur de performances restent encore insuffisants en ce qui concernait ce programme. De manière plus générale, il a appelé à un effort de mutualisation des indicateurs de performances relatifs aux actions de soutien entre toutes les missions du budget général.

Concernant le programme « rayonnement culturel et scientifique », il a déploré vivement la vision quelque peu littérale qu'avait le Quai d'Orsay de la fameuse liste des pays en développement établie par l'OCDE et qui voulait que tout euro dépensé par le département dans un pays en développement constituait de l'aide publique au développement. Il a proposé au contraire l'intégration de l'action « Affirmation de la dimension culturelle du développement » (198,8 millions d'euros de crédits de paiement en 2006), qui était du ressort de la mission « Aide publique au développement », dont le rapporteur spécial est M. Michel Charasse, dans le programme « rayonnement culturel et scientifique » afin de lui donner une véritable cohérence.

Il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles « la nouvelle chaîne d'information internationale » ne figurait pas au sein du présent programme, mais au sein de la mission « direction de l'action du gouvernement ».

Il a proposé de supprimer la subvention de 1,9 million d'euros octroyée par le présent programme au « portail » internet « idées de France » qui était largement redondant par rapport aux nombreux sites internet déjà existants, dont il a souligné la grande qualité.

Il a noté que la mise en place des « centres des études en France » avait donné lieu en 2005, à titre expérimental, à l'installation de logiciels en ligne par la société IP SO, sur les crédits du ministère. Il s'est demandé si cette interface entre les universités et les étudiants avait donné satisfaction et si elle avait vocation à être généralisée.

Enfin, il a fait remarquer que les indicateurs de performances, qui paraissaient au premier abord de nature à susciter l'intérêt du Parlement, seraient d'autant plus pertinents s'ils étaient chiffrés et affichaient des valeurs cibles.

Il a formulé ses dernières remarques sur le programme « Français à l'étranger et étrangers en France ».

Il a considéré comme injustifiée la baisse de la subvention à l'AEFE de 2 millions d'euro et a proposé que celle-ci soit diminuée de « seulement » 70.000 euros, afin que l'AEFE participe dans une juste mesure à l'effort de rigueur budgétaire du ministère des affaires étrangères. Il a précisé qu'il proposerait un amendement à ce sujet, gageant cette dépense nouvelle par une économie sur la subvention attribuée au portail internet précédemment évoqué.

Il a remarqué que les recettes issues des frais de visas, qui avaient engendré, en 2004, des recettes de 79 millions d'euros n'étaient pas affectées au présent programme par le biais d'un fonds de concours, ce qui apparaissait regrettable.

Il s'est interrogé enfin sur la justification de la distinction entre, en amont, l'Etat qui délivrait des visas et, en aval, l'Etat qui gérait le séjour et l'éloignement des étrangers.

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a félicité le rapporteur spécial pour la qualité de sa présentation, qui illustrait parfaitement l'apport indéniable que représentait la LOLF pour les parlementaires.

M. Denis Badré a regretté que l'action de la France en Europe n'apparaisse pas comme un programme à part entière. Il s'est inquiété de la modicité de la contribution française au Conseil de l'Europe.

M. Roland du Luart a indiqué que la nécessité de définir un cadre, pour éviter des « dérapages » dans les comportements des agents du Quai d'Orsay ne devait pas avoir pour effet d'empêcher toute reconversion professionnelle. Il a déclaré soutenir le rapporteur spécial « à 200 % » sur sa proposition de doubler les crédits affectés au programme « personnalités d'avenir », notant les forts investissements réalisés par l'Espagne pour développer son influence en Amérique du Sud.

M. Jean Arthuis, président, évoquant un récent déplacement effectué à l'étranger, a dénoncé la perpétuation d'aides ponctuelles en matière culturelle, sans évaluation ou remise en cause de celles-ci. Il a souligné, en outre, que les agents du Quai d'Orsay devaient être soumis à une forte exigence de déontologie.

M. Roger Besse a souhaité obtenir des précisions quant à la suppression des crédits affectés au « portail » internet « idées de France ».

En réponse, M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a indiqué que ce site internet apparaissait redondant par rapport à d'autres sites existants et que son contenu semblait peu convaincant.

M. Yves Fréville a souhaité obtenir des précisions sur l'affectation des loyers dont bénéficiait l'Etat dans le cadre d'un partenariat public privé.

En réponse, M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a souligné que ces loyers étaient directement affectés au budget général, et non au budget des ministères concernés.

Puis la commission des finances a adopté trois amendements présentés par M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial :

- le premier visant à majorer de 75 millions d'euros les crédits affectés à l'action n° 4 (titre 6) « contribution à la sécurité internationale» du programme 105 « action de la France en Europe et dans le monde », en ce qui concernait le calcul de la contribution française aux opérations de maintien de la paix décidées par le conseil de sécurité de l'ONU, et par voie de conséquence à réduire du même montant les crédits de l'action n° 3 « audiovisuel extérieur » du programme 185 « rayonnement culturel et scientifique » (titre 6) consacrés à TV5 et RFI ;

- le deuxième visant à augmenter les crédits de l'action n° 1 « coordination de l'action diplomatique » du programme 105 (titre 6) de 600.000 euros afin de doubler le nombre de bénéficiaires du programme « personnalités d'avenir » du Quai d'Orsay qui passeraient ainsi de 73 en 2005 à 150 en 2006 sur la base d'un coût unitaire actuel de 8.979 euros et par voie de conséquence à réduire les crédits de l'action n° 3 (titre 6) « audiovisuel extérieur » du programme 185, en remettant en cause, pour ce montant, la subvention au « portail » internet « idées de France » ;

- le troisième visant à augmenter les crédits de l'action n° 2 (titre 3) « service public d'enseignement à l'étranger » du programme 151 de 1.300.000 euros et par voie de conséquence à réduire les crédits de l'action n° 3 (titre 6) « audiovisuel extérieur » du programme 185, en remettant en cause, pour ce montant, la subvention au « portail » internet « idées de France ».

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat » ainsi modifiés.

PJLF pour 2006 - Budget Affaires européennes - Examen du rapport spécial

Puis la commission a procédé à l'examen des crédits des affaires européennes (article 50) sur le rapport de M. Denis Badré, rapporteur spécial.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a préalablement regretté que la dimension européenne fût quasiment absente de la nouvelle nomenclature budgétaire issue de la loi du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), bien que le rôle de la France au sein de l'Union européenne fût considérable, tant sur le plan politique que budgétaire, et impliquât plusieurs ministères. A ce titre, il a estimé que le mécanisme du prélèvement sur recettes, qui contribuait à occulter, dans la présentation budgétaire, l'importance de la contribution française, n'était pas réellement satisfaisant.

Il a ensuite abordé trois points : le montant et les caractéristiques du prélèvement sur recettes, les grandes évolutions du projet de budget européen pour 2006, et ses principales observations.

Il a rappelé que le montant du prélèvement sur recettes était indicatif, dans la mesure où il se rapportait à un budget européen dont l'enveloppe définitive n'était pas encore connue. Il en résultait des écarts parfois élevés entre l'inscription budgétaire et l'exécution. Le prélèvement avait ainsi été surestimé de 890 millions d'euros en 2004, puis sous-estimé à hauteur de 770 millions d'euros en 2005, selon les prévisions d'exécution. Il a précisé que la contribution prévisionnelle de la France au budget européen de 2006 s'élevait à 17,995 milliards d'euros, en augmentation de 8,6 % par rapport au montant inscrit dans la loi de finances initiale pour 2005, mais de 3,8 % par rapport à l'exécution anticipée sur ce même exercice. Ce prélèvement avait ainsi quadruplé depuis vingt ans, et crû d'environ 40 % depuis huit ans. Il a indiqué que cette contribution représenterait, en 2006, 6,8 % des recettes fiscales nettes, ce qui constituait une part élevée et en augmentation par rapport à 2005, et impliquait dès lors, selon lui, que l'Europe disposât d'une stratégie claire sur le long terme.

Abordant le deuxième point de son intervention,M. Denis Badré, rapporteur spécial, a estimé que les choix auxquels l'Union européenne devait faire face étaient plus politiques que budgétaires. Il a établi une analogie avec la LOLF, dont les principes, selon lui, valaient autant pour le budget de la France que pour celui de l'Union européenne. Après avoir rappelé que le budget pour 2006 correspondait à la dernière année des perspectives financières 2000-2006, il a constaté que certaines carences des programmations antérieures réapparaissaient, en dotant le budget européen de moyens en augmentation soutenue afin de se conformer aux plafonds fixés, sans pour autant procéder aux choix politiques nécessaires. Il a ainsi relevé que les dépenses afférentes à la politique régionale augmentaient fortement en vue de respecter la programmation fixée.

Il a renouvelé son opposition au principe du « chèque britannique », dont la prise en charge représenterait un coût de 1,6 milliard d'euros pour la France en 2006. Ce qui faisait courir le risque de revendications analogues de la part des principaux pays contributeurs nets, au premier rang desquels les Pays-Bas, et donc d'une dislocation de l'Europe. Il a également rappelé que la France, en tant que second contributeur et second bénéficiaire en volume du budget européen, occupait une position singulière et forte au sein de l'Union européenne.

Il a ensuite déploré que les négociations portant sur les perspectives financières pour la période 2007-2013 n'aient pas encore abouti, alors que l'exercice 2006 se révélait déterminant, en tant qu'année de référence, pour la détermination de l'évolution des futures dépenses. Il a rappelé que la proposition de la Commission européenne, présentée en février 2004, puis actualisée en avril 2005, retenait une hypothèse de crédits d'engagement culminant à 1,26 % du revenu national brut (RNB) de l'Union européenne. Par ailleurs, le Parlement européen avait proposé des perspectives financières dont le chiffrage était proche de celui de la Commission. Enfin, le compromis proposé par la présidence luxembourgeoise en juin 2005 se fondait sur des crédits d'engagement représentant en moyenne 1,06 % du RNB, soit un montant largement inférieur à celui proposé par la Commission. Il a considéré que ce compromis constituait vraisemblablement la seule base de discussion possible pour l'achèvement des négociations, mais s'est demandé dans quelle mesure il était possible d'établir des axes stratégiques pérennes, compte tenu de telles divergences dans les propositions budgétaires.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a indiqué que les propositions de la Commission et du Conseil relatives au projet de budget pour 2006 reposaient sur, respectivement, une augmentation substantielle de 6 % et de 4,9 % des crédits de paiement. La proposition du Conseil comportait une croissance soutenue des crédits de paiement de la politique agricole commune et des fonds structurels, de respectivement 4,6 % et 9,5 %. Il a ajouté, néanmoins, que la forte hausse de ces dépenses était moins préoccupante que durant les exercices antérieurs, dans la mesure où de réels progrès dans l'exécution des fonds structurels avaient été enregistrés. Il a relevé, en outre, que les dépenses afférentes aux actions extérieures diminuaient, et que les crédits de recherche et développement étaient toujours sous-consommés. Ce qui témoignait d'une mauvaise articulation entre les politiques nationales et communautaire dans ce domaine.

Exposant ses principales observations, il a considéré que le Pacte de stabilité devait lier non seulement les douze Etats de la zone euro, mais également l'Union européenne elle-même, afin de rendre l'évolution des contributions des Etats membres plus cohérente avec leur situation budgétaire dégradée. Il a estimé que le budget européen ne méritait sans doute pas son nom. En effet, le vote des recettes et dépenses émanait d'institutions distinctes, tandis que la nécessité d'une refonte des politiques européennes et d'un débat politique plus lisible était occultée par les négociations sur les perspectives financières. A cet égard, il a regretté que la renationalisation partielle de certaines politiques communautaires fût parfois présentée comme une perspective d'avenir.

Evoquant le « processus de Lisbonne », il a considéré qu'il était encore trop « incantatoire ». Il importait de s'interroger sur la place de l'Europe dans l'économie mondiale et sur les moyens de renforcer réellement sa compétitivité, en donnant davantage de « souffle » à ce processus. Il a également plaidé en faveur d'une aide communautaire au développement plus efficace. Il a estimé, enfin, que la France devait reprendre l'initiative sur l'avenir de l'Europe. Ainsi le Sénat n'avait guère « d'autre choix » que d'adopter l'article 50 du projet de loi de finances pour 2006.

M. Jean Arthuis, président, a remercié M. Denis Badré, rapporteur spécial, pour son exposé dynamique et son « enthousiasme », qui inciterait ses collègues à adopter l'article 50 relatif à la contribution de la France au budget européen.

Après que M. Bernard Angels eut considéré que la contribution française était insuffisante, la commission a adopté l'article 50 du projet de loi de finances pour 2006 sans modification.

PJLF pour 2006 - Mission « Remboursements et dégrèvements » - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné le rapport spécial de Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

M. Jean Arthuis, président, de manière liminaire, a signalé que Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, avait reçu la veille au soir, seulement, de la part du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, l'ensemble des réponses au questionnaire sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Il a souligné qu'en tout état de cause le délai limite de réponse, fixé par l'article 49 de la LOLF au 10 octobre, n'avait pas été respecté.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, a confirmé cette situation. Elle a indiqué qu'elle n'avait auparavant reçu que six réponses sur les 54 questions adressées au ministère, conformément aux prescriptions de la LOLF, avant le 10 juillet dernier, dont deux réponses seulement au 10 octobre dernier. Elle a déploré que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, maître d'oeuvre dans l'introduction de la LOLF, n'ait pas été plus soucieux d'assurer, en amont de la discussion budgétaire, l'information du Parlement.

Concernant plus directement la mission « Remboursements et dégrèvements », elle a tout d'abord formulé quelques observations sur les sommes en jeu. A cet égard, elle a indiqué que la mission dont elle est en charge représente, par son volume, la plus importante de l'ensemble des missions budgétaires, celle-ci regroupant en effet des crédits évaluatifs qui, au total, s'élevaient à 68,4 milliards d'euros. Elle a rappelé, à titre de comparaison, que les crédits de la mission « Enseignement scolaire » étaient de 59,7 milliards d'euros, que ceux de la mission « Engagements financiers de l'Etat » étaient de 40,9 milliards d'euros, et que ceux de la mission « Défense » étaient de 36 milliards d'euros.

Elle a fait observer que les deux programmes qui composaient la mission s'avéraient d'importance inégale. Elle a ainsi précisé que le programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat » regroupait des crédits évaluatifs d'un montant de 55 milliards d'euros. Elle a signalé que ce programme s'avérait, pour les deux tiers, constitué des remboursements et dégrèvements de TVA (pour 36,9 milliards d'euros), suivis des remboursements et dégrèvements d'impôt sur le revenu (pour 7 milliards d'euros). Elle a indiqué également que le programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » regroupait, quant à lui, des crédits évaluatifs d'un montant de 13,3 milliards d'euros, et correspondait pour les deux tiers aux remboursements et dégrèvements de taxe professionnelle.

Puis Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, a souligné que la mission « Remboursements et dégrèvements » n'avait, à ses yeux, guère de raison d'être, dans la mesure où elle regroupait des dépenses qui résultaient, notamment, de textes législatifs participant de politiques publiques différentes, et que ces dépenses, comme telles, présentaient un caractère essentiellement hétéroclite. Elle a rappelé que, dans leur rapport d'information de 2004 relatif à la mise en oeuvre de la LOLF, M. Jean Arthuis, président, et M. Philippe Marini, rapporteur général, avaient jugé nécessaire, afin d'accroître la lisibilité des dépenses de l'Etat, de ventiler entre les différentes missions concernées les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », crédits qui, lors de l'élaboration du rapport précité, ne devaient constituer qu'un simple programme de la mission « Engagements financiers de l'Etat ». Elle a rappelé également qu'il avait été proposé d'inclure les dégrèvements législatifs d'impôts locaux dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dont le rapporteur spécial était M. Michel Mercier. Elle a indiqué que la commission des finances de l'Assemblée nationale avait soutenu, sur ce sujet, un point de vue analogue.

Elle a alors souligné que les problèmes suscités par la non-ventilation des crédits entre les différentes missions concernées s'étaient trouvés aggravés par l'adossement de la redevance à la taxe d'habitation en 2005, dans la mesure où les exonérations de redevance avaient été remplacées par des dégrèvements qui relevaient de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Elle a précisé que la Cour des comptes, dans son récent rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2004, avait estimé que, pour préserver la lisibilité des dépenses relatives à cette politique, il aurait été préférable de rattacher les dégrèvements de redevance à la mission « Médias », dont M. Claude Belot était le rapporteur spécial.

Elle a rappelé que le gouvernement, cependant, avait justifié son refus d'un regroupement par finalité en faisant valoir : d'une part, que ce regroupement, du point de vue technique, n'aurait pas été possible pour le 1er janvier 2006 ; d'autre part, et surtout, que la coexistence, au sein d'une même mission, de crédits limitatifs et de crédits évaluatifs n'était pas souhaitable. Elle a expliqué la position du gouvernement en rappelant qu'avec la LOLF, les parlementaires, au sein d'une mission, avaient en effet la possibilité de proposer des augmentations de crédits « gagées » par la diminution d'autres crédits de la même mission. Elle a exposé qu'ainsi, selon le gouvernement, il convenait d'isoler les crédits évaluatifs des crédits limitatifs afin d'éviter que les parlementaires ne proposent, par voie d'amendement, d'accroître les crédits limitatifs d'un programme à partir d'un programme constitué de crédits évaluatifs.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, a déclaré ne pas être convaincue par ces arguments, précisant que la LOLF exigerait nécessairement, lors des premières années de son application, la constitution d'une « doctrine », non seulement de la part du Conseil constitutionnel, mais aussi de la part des commissions des finances des deux assemblées parlementaires, en particulier en matière de recevabilité financière.

Elle a fait remarquer, par ailleurs, que la seule autre mission à comporter des crédits évaluatifs, la mission « Engagements financiers de l'Etat » dont M. Paul Girod était le rapporteur spécial, comprenait des crédits qui n'étaient pas tous évaluatifs. Elle a ainsi exposé que deux des programmes de cette mission (le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » et le programme « Appels en garantie de l'Etat ») étaient constitués de crédits évaluatifs, mais que les trois autres programmes de la mission (les programmes « Epargne », « Majoration de rentes » et « Versement à la Caisse nationale d'allocations Familiales ») étaient constitués de crédits limitatifs. Elle a indiqué que, bien que l'Etat eût une compétence liée pour ces trois derniers programmes et n'était donc pas maître de ses dépenses, à la lettre du texte, la LOLF n'empêcherait pas le Parlement d'adopter une augmentation de crédits limitatifs « gagée » par une diminution de crédits évaluatifs.

Elle a insisté sur le fait que les arguments du gouvernement, sur le fond, ne lui semblaient donc pas convaincants. Elle a relevé que l'impossibilité technique de regrouper les remboursements et dégrèvements par finalité devrait être surmontée pour la loi de finances initiale pour 2007.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, a ensuite tenu à souligner le caractère perfectible des objectifs et indicateurs de performance des programmes de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Rappelant que MM. Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard, députés, dans leur rapport d'information sur la mise en oeuvre de la LOLF, avaient déjà remarqué que « le bloc de crédits le plus important de tout le budget se trouvait associé à la stratégie de performance la plus sommaire », elle a appelé, pour l'avenir, à une amélioration des indicateurs des programmes de cette mission, que ces programmes se trouvent ou non rattachés à d'autres missions.

Dressant la liste des insuffisances à cet égard, elle a en premier lieu relevé que les indicateurs existants ne permettaient pas d'évaluer de manière satisfaisante dans quelle mesure avait été atteint l'objectif unique de la mission, consistant à « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible ». Ainsi, elle a noté que, concernant le programme 200 relatif aux impôts d'Etat, les deux indicateurs prévus (le « taux de demandes de remboursement de crédit TVA non imputable et de restitutions d'impôts sur les sociétés remboursées dans un délai inférieur ou égal à 30 jours » et le « taux de réclamations contentieuses en matière d'impôt sur le revenu traitées dans un délai d'un mois ») n'intéressaient pas les versements de la prime pour l'emploi (PPE), non plus que les opérations relatives à l'action 5 du programme (« autres produits directs, indirects et divers »), soit environ le sixième des crédits de ce programme. De même, elle a précisé que, dans le cas du programme 201 relatif aux impôts locaux, le seul indicateur (le « taux de réclamations contentieuses relatives à la taxe d'habitation traitées dans le délai d'un mois »), ne concernant que la taxe d'habitation, ne couvrait qu'environ 20 % du programme. Elle a insisté sur le fait que, par conséquent, 80 % des crédits ne faisaient l'objet d'aucun indicateur. Dans ces conditions, elle a relevé qu'en particulier, aucune évaluation de la satisfaction de l'usager n'était prévue s'agissant de la taxe professionnelle.

En second lieu, elle a relevé que l'objectif unique de « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible » n'était, à l'évidence, pas suffisant. Elle a noté qu'aucun indicateur, en effet, ne permettait de mesurer la performance des dégrèvements et remboursements législatifs. A cet égard, elle a cité tout particulièrement le cas de la prime pour l'emploi (PPE), au titre de laquelle plus de 2,4 milliards d'euros étaient demandés pour la mission « Remboursements et dégrèvements ». Elle a regretté une telle lacune, compte tenu des montants considérables en jeu. Elle a ajouté que le rapport d'information de M. Jean Arthuis, président, sur les objectifs et indicateurs de performance de la LOLF, avait d'ailleurs signalé, en 2005, cette défaillance, de même que le rapport sur la mise en oeuvre de la LOLF remis au gouvernement, en septembre dernier, par M. Alain Lambert, sénateur, et M. Didier Migaud, député, en leur qualité de parlementaires en mission. Elle a jugé nécessaire de retenir, pour chaque programme de la mission, un objectif d' « évaluation de l'efficacité des remboursements et dégrèvements », en observant que, si l'efficacité des remboursements et dégrèvements ne dépendait pas du responsable des programmes, il appartenait à ce dernier, toutefois, d'évaluer l'efficacité des principaux remboursements et dégrèvements.

En troisième et dernier lieu, Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, a noté que le gouvernement, dans les présentations respectives des deux programmes de la mission, indiquait, dans des termes semblables, que « le premier objectif » de chacun de ces programmes consistait « à permettre progressivement l'identification précise et complète des dégrèvements et des remboursements concernés [...], grâce à la mise en oeuvre des systèmes d'information futurs (programme COPERNIC et système d'information budgétaire, financier et comptable) ». Soulignant le paradoxe d'un objectif officiellement revendiqué par le gouvernement au titre de la mission, mais qui ne figurait pas parmi ceux associés aux programmes eux-mêmes, elle a souhaité que l'objectif d'une identification précise et complète des dégrèvements ou remboursements se trouve, pour l'avenir, clairement fixé. Elle a insisté sur la nécessité de cette démarche en vue d'assurer l'information du Parlement.

Un large débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a précisé que, si les remboursements avaient un caractère automatique, sur lequel le Parlement trouvait peu de raisons de débattre, les dégrèvements, en revanche, pourraient être assimilés à des dépenses fiscales, au titre des différents programmes pertinents de rattachement.

M. Yves Fréville a déclaré approuver la tonalité du rapport de Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale. Il s'est dit avoir été frappé par le caractère « médiocre » du bleu budgétaire « Remboursements et dégrèvements », notamment dans la mesure où la distinction entre dégrèvements législatifs et dégrèvements non législatifs n'y apparaissait pas. A cet égard, il a pointé une différence inexpliquée : d'une part, l'annexe « Effort financier en faveur des collectivités locales », concernant la « contrepartie de divers dégrèvements législatifs sur contributions directes locales », se référait explicitement au programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », et indiquait une demande de crédits pour 2006 à hauteur de 10,7 milliards d'euros ; d'autre part, le bleu budgétaire « Remboursements et dégrèvements », au titre de ce programme 201, indiquait une demande de crédits de 13,3 milliards d'euros. Il a souhaité que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie apporte une explication sur ce point.

Débattant avec M. Jean Arthuis, président, sur les dépenses concernées par la notion de dégrèvements d'impôts locaux, M. Yves Fréville a relevé que les progrès accomplis, depuis une dizaine d'années, en termes de statistiques, restaient en la matière insuffisants pour assurer toute l'information utile.

M. Jean-Jacques Jégou s'est interrogé sur la notion de dégrèvements non législatifs. Il a échangé, sur ce sujet, avec Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, et avec M. Jean Arthuis, président, ce dernier soulignant l'ambiguïté, en pratique, de la nature législative ou non des dégrèvements d'impôts.

A l'issue de ce débat, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, et de Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, la commission, compte tenu de l'impossibilité dans laquelle s'était trouvée la rapporteure spéciale d'exploiter les réponses tardivement envoyées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie au questionnaire budgétaire, a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », jusqu'à plus ample information.

PJLF pour 2006 - Mission « Provisions » - Examen du rapport spécial

Enfin, la commission a examiné le rapport spécial de M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, sur la mission « Provisions ».

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a tout d'abord tenu à signaler le « singulier manque de performance » dont le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avait témoigné, dans son délai de réponse aux questionnaires budgétaires. Il a indiqué que, le 10 octobre dernier, date limite impérative de réponse aux questionnaires fixée par l'article 49 de la LOLF, il n'avait reçu aucune réponse à la quarantaine de questions qui avaient été adressées au ministère avant le 10 juillet. Il a précisé qu'il avait, depuis lors, reçu les réponses attendues, mais que ce retard n'était pas satisfaisant.

Rejoignant les propos de Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale sur la mission « Remboursements et dégrèvements », il a rappelé que plusieurs autres rapporteurs spéciaux avaient déjà eu à signaler de tels retards, en ce domaine, de la part du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a cité pour exemples M. Marc Massion, rapporteur spécial sur la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », et M. Bernard Angels, rapporteur spécial sur la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ». Il a exprimé son regret que le ministère chargé de mettre en oeuvre la LOLF n'ait pas davantage fait porter ses efforts sur l'information du Parlement, à la date prescrite par la loi organique.

Pour ce qui concerne la mission « Provisions » elle-même, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a souhaité commencer par quelques rappels. Il a indiqué, d'abord, que la mission « Provisions » avait été créée en application de l'article 7 de la LOLF, cet article prévoyant expressément les deux dotations constitutives, respectivement, des deux programmes de la mission. Il a également relevé que ces programmes regroupaient des crédits qui, dans la nomenclature issue de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, figuraient au sein du budget des charges communes.

Il a précisé, en premier lieu, que la dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » correspondait aux crédits des « mesures générales intéressant les agents du secteur public » de l'ancien budget des charges communes. Il a expliqué que cette dotation avait vocation à permettre le financement des mesures générales en matière de rémunérations dont la répartition, par programme, ne pourrait être déterminée avec précision au moment du vote des crédits.

Il a rappelé, en second lieu, que la dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » correspondait aux crédits de l'ancien budget des charges communes pour « dépenses éventuelles », d'une part, et pour « dépenses accidentelles », d'autre part. Il a signalé que ces deux types de crédits, qui jusque là étaient distincts, se trouvaient désormais fusionnés au sein du programme 552. Il a fait observer que l'intitulé même de ce programme dénotait la disparition formelle de la notion de dépenses éventuelles. Il a expliqué que cette disparition résultait logiquement de la suppression, par la LOLF, de la notion juridique de crédits « provisionnels », que les crédits pour dépenses éventuelles avaient vocation à compléter, en tant que de besoin. Pour finir sur ce point, il a indiqué que cette dotation pour « dépenses accidentelles et imprévisibles », comme son nom l'indiquait clairement, avait pour fin d'assurer les crédits nécessaires à des dépenses accidentelles, imprévisibles, et urgentes. Il a précisé qu'il s'agissait notamment des dépenses liées à des catastrophes naturelles, en France ou à l'étranger, ou à des événements extérieurs qui nécessiteraient le rapatriement de Français. Il a fait valoir que la répartition de toutes ces dépenses, compte tenu de leur nature même, ne pouvait être déterminée avec précision au moment du vote des crédits.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a ensuite formulé plusieurs observations sur les crédits de la mission « Provisions », et d'abord du point de vue de leur nature. Il a ainsi indiqué que la mission rassemblait, en ses deux dotations, des crédits globaux destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote, et répartis en tant que de besoin par programme, en cours d'exercice, entre les autres missions. Il a remarqué que ces crédits, eux-mêmes limitatifs, étaient cependant, par définition, susceptibles d'entraîner une dérogation au caractère limitatif des programmes qu'ils auraient à compléter. Il a insisté, d'autre part, sur le caractère « spécifique » reconnu par la LOLF à la mission « Provisions ». Il a ainsi fait observer que cette mission se trouvait dénuée d'objectif de performance et que ses programmes, subséquemment, ne faisaient l'objet d'aucun indicateur.

S'agissant du montant des crédits, il a indiqué que la mission, pour 2006, représentait 487 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 135 millions d'euros de crédits de paiement. Il a signalé que le montant de ces crédits de paiement faisait, de la mission « Provisions », la mission la moins dotée du budget général.

Il a signalé, en premier lieu, que la dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques », comme les lignes budgétaires équivalentes pour 2005, ne faisait l'objet d'aucune demande de crédits. Il a rappelé que cette dotation avait vocation à assurer le paiement des rémunérations publiques, dont la répartition par programme ne pouvait être déterminée avec précision au moment du vote des crédits. Par conséquent, il a fait valoir qu'une budgétisation nulle de ce programme supposait que l'ensemble des rémunérations avait pu être réparti a priori entre les programmes des autres missions. Il s'est félicité de cette situation, dans la perspective d'une rationalisation des crédits, comme dans celle d'une meilleure lisibilité budgétaire.

En second lieu, il a indiqué que, pour la dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles », par rapport aux crédits équivalents inscrits en loi de finances initiale pour 2005, 6 fois plus de crédits d'engagement étaient demandés, et 1,6 fois plus de crédits de paiement.

Il a exposé que la hausse des crédits de paiement, suivant l'une des réponses fournies par le gouvernement au questionnaire budgétaire, se trouvait liée, notamment, à l'accroissement des dépenses éventuelles et accidentelles depuis plusieurs années. Il a indiqué que cette situation avait en effet conduit, dans certains cas, à traiter ces dépenses par décret d'avances. Par ailleurs, il a indiqué que, d'après le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, les autorisations d'engagement qui ne trouvaient pas leur correspondance dans les crédits de paiement (soit 352 millions d'euros), étaient destinées, pour la plus large part, au financement de frais de justice. Il a remarqué que ces frais, jusqu'à présent, avaient été réglés sur crédits évaluatifs, sans ordonnancement préalable. Il a rapporté que, selon le ministère, pour ces dépenses qui, dans les dernières années, avaient témoigné un fort dynamisme, la LOLF, en imposant le principe de crédits limitatifs, avait rendu nécessaire une provision au titre de dépenses accidentelles.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a toutefois exprimé son insatisfaction à l'égard des explications fournies par le gouvernement. Il a indiqué qu'il demanderait à celui-ci, en séance publique, davantage d'éclaircissements. Il s'est notamment interrogé sur les raisons du « transit », par la mission « Provisions », d'autorisations d'engagement destinées, par avance, à des dépenses relevant de la mission « Justice ». Il a souligné que ces dépenses pour frais de justice, compte tenu des montants provisionnés, paraissaient en grande partie anticipées.

Pour conclure, en citant le rapport rédigé en 2000 par M. Louis-Ferdinand de Rocca-Serra au nom de la commission des finances et consacré aux dépenses éventuelles et accidentelles, il a souligné que la sincérité budgétaire imposait de veiller à ce que les crédits demandés pour la mission « Provisions » ne soient pas dénaturés et ne servent pas, ainsi, à corriger des évaluations de crédits initiales insuffisantes, au profit d'autres missions.

A l'issue de cette présentation, un débat s'est engagé.

M. Yves Fréville s'est interrogé sur l'absence d'autres types de provisions que ceux des programmes 551 et 552 au sein de la mission homonyme. Il a fait observer que de nombreuses provisions se trouvaient, par ailleurs, prévues dans d'autres missions du budget général.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a indiqué, en réponse, que les crédits regroupés par la mission « Provisions », au contraire des provisions figurant dans d'autres missions, étaient en principe des crédits pour provisions non affectées a priori.

M. Jean Arthuis, président, a observé que la mission « Provisions » constituait un simple « isolement », par la LOLF, de crédits qui figuraient auparavant dans le budget des charges communes.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Provisions ».