Mme Céline Brulin. Le Premier ministre l’a dit hier devant l’Assemblée nationale et l’a répété aujourd’hui devant le Sénat : le travail doit payer davantage que l’inactivité. Voilà justement un amendement allant dans ce sens.

Vous le savez, l’indemnisation des déplacements des aides à domicile pose problème depuis longtemps. Il s’agit d’un sujet de plus en plus prégnant, alors que le prix des carburants a particulièrement augmenté. Certains salariés sont contraints de faire de nombreux kilomètres tout en sachant qu’ils en seront « de leur poche », si je puis dire. De nombreux rapports ont pointé cette difficulté : par cet amendement, nous cherchons à faire avancer les choses.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. La mobilité constitue une contrainte majeure pour les professionnels de l’aide et de l’accompagnement à domicile, à laquelle l’article 7 de la présente proposition de loi apporte un début de réponse.

Toutefois, la création d’un crédit d’impôt au titre des seuls professionnels de l’aide à domicile constituerait une différence de traitement difficilement justifiable aux yeux des autres professionnels concernés par de fréquents déplacements : avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Comme vient de le souligner Mme la rapporteure, l’article 7 contribuera à apporter des réponses en matière de soutien à la mobilité des aides à domicile.

Le fonds qui sera mis en place sera doté de 100 millions d’euros par an, une somme qui permettra de soutenir le pouvoir d’achat des aides à domicile et de favoriser la mise à disposition de véhicules sur l’ensemble du territoire.

Avec ce fonds, nous souhaitons promouvoir des politiques actives de soutien à la mobilité au niveau des employeurs et des autorités de tarification que sont les départements.

Si nous partageons votre objectif, madame la sénatrice, le mécanisme fiscal que vous proposez ne permet pas d’élaborer une politique active de soutien à la mobilité impliquant l’employeur et les territoires. La discussion s’engagera véritablement lorsque nous aborderons l’article 7 : nous espérons vraiment que l’adoption de cet article permettra un réel effet de levier.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 286.

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. J’ai bien écouté Mme la rapporteure et Mme la ministre, notamment lorsqu’elles ont évoqué les hausses de salaire.

Certes, on ne peut prendre une mesure pour certaines branches et pas pour d’autres ; certes, il revient aux partenaires sociaux de suivre l’évolution du Smic.

Mais tout le monde sait bien que les services à la personne ne sont pas solvables actuellement. Autrement dit, si personne ne se résout à aider ce secteur, vous pourrez mettre en place toutes les négociations que vous voulez, les salaires n’augmenteront pas !

Ma question s’adresse à vous, madame la ministre : le projet de loi Grand Âge, qui sera examiné à la fin de l’année, comportera-t-il des mesures permettant d’augmenter les revenus des professionnels de l’aide à domicile ? À mon sens, c’est la seule solution à notre disposition, à moins de demander aux bénéficiaires de payer plus, ce qui n’est pas vraiment, me semble-t-il, dans l’air du temps.

Madame la ministre, que ferez-vous pour « solvabiliser » les services d’aide à la personne ?

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je souhaite dire quelques mots pour compléter les propos de notre collègue.

Je suivrai bien entendu l’avis de la commission et ne voterai pas cet amendement, mais je tiens à souligner l’importance de ce sujet, qui doit être mis rapidement sur la table.

Comme chacun le sait, la question du temps passé dans les transports et celle du coût du kilomètre parcouru sont essentielles pour les professionnels des services à domicile.

Certes, la présente proposition de loi n’est pas le texte approprié pour traiter des aspects financiers du problème, mais il faut avoir à l’esprit que la fin de partie risque d’être vite sifflée pour ce secteur si ces différents points – je pense aussi aux questions inhérentes de coordination – ne sont pas réglés rapidement.

Madame la ministre, je forme le vœu qu’au détour du futur projet de loi de programmation pluriannuelle l’on puisse enfin discuter du financement et de l’organisation des services à domicile, en prenant soin de tenir compte de l’ensemble des coûts supportés par les professionnels, et pas seulement des frais liés à la présence à domicile.

Si l’on ne fait rien, c’est la fin des services à domicile : les patients, les Français en général, y perdraient beaucoup.

Par ailleurs, il faudra déterminer comment faire évoluer la tarification – conserver une tarification à l’heure, mettre en place une dotation ou un système mixte… Il s’agit d’un vrai sujet : trouver le prix juste à la fois pour améliorer la reconnaissance du professionnel et pour que le reste à charge demeure raisonnable pour les bénéficiaires.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Catherine Vautrin, ministre. Hier, j’ai conclu la discussion générale en disant que nous avions besoin, sur ce sujet, de travailler sur trois points : quelle stratégie, quelle gouvernance, quel financement ?

Comme vous, j’ai conscience de la nécessité absolue de valoriser ces métiers. Cela passe évidemment – ne tournons pas autour du pot – par une reconnaissance sonnante et trébuchante, mais aussi par la valeur accordée au métier. Quel avenir peut-on avoir quand on s’engage dans les métiers de l’humain ? C’est une vraie question.

Nous examinons aujourd’hui un texte sur le bien-vieillir, mais la question serait exactement la même s’il agissait d’un texte sur la petite enfance.

Nous avons donc besoin, comme je l’avais dit en audition et comme je l’ai redit hier, de discuter d’une stratégie globale. Pour ce qui concerne la dimension juridique, j’ai bien conscience que nous ne pouvons procéder par bribes, qu’une lecture globale est requise. C’est la même chose sur un sujet aussi fondamental.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je suivrai l’avis de la commission, mais je tiens à revenir sur l’intervention de son président.

Madame la ministre, comme je l’ai dit hier lors de la discussion générale, il y a urgence. La CNSA débloque 50 millions d’euros… C’est insuffisant ! Il faudrait dix fois plus pour éviter la catastrophe dans les établissements et les associations d’aide à domicile.

Lorsque je l’avais interpellée, votre prédécesseure avait confirmé que nous aurions besoin de moyens supplémentaires. Cette année, les prévisions de financement de la cinquième branche annoncent un excédent de 1,3 milliard d’euros. Utilisons-le, au moins en partie, pour sauver la situation !

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. J’y insiste, ce sujet est fondamental. Pour reprendre les termes du président Mouiller, nos services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) vont mourir.

Je ne suis plus responsable de Saad ou de Ssiad (service de soins infirmiers à domicile), mais j’ai, pendant longtemps, participé à la création et au fonctionnement de tels services. Mes collègues qui s’en occupent actuellement me disent qu’ils se trouvent dans une impasse totale. Ils rencontrent des difficultés de recrutement de personnel, parce que ces métiers ne sont pas reconnus. Les professionnels ne sont pas rémunérés à la hauteur de leur travail.

En outre, il s’agit à 90 % ou 95 % de femmes, qui, pour des raisons d’organisation, sont bien souvent obligées de travailler à temps partiel, réalisant des contrats de 27 heures, plus pratiques pour organiser les tournées.

Les temps de déplacement entre deux soins, c’est-à-dire entre le domicile de deux patients, ne sont, pour ce qui concerne les associations à but lucratif privées – et il en existe de nombreuses –, pas payés, ce qui me fait dire qu’il s’agit presque d’esclavagisme.

Dans nos services publics, nous essayons soit de fournir une voiture, soit de rémunérer les temps de déplacements. Mais les coûts qui en résultent causent un déséquilibre financier permanent qui menace le fonctionnement de nos Saad.

Nous en convenons tous : il s’agit d’un problème majeur pour la survie des soins à domicile. Le virage domiciliaire que chacun appelle de ses vœux ne pourra intervenir sans accorder aux Saad les moyens financiers nécessaires à leur fonctionnement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je suivrai l’avis de la commission, mais je tiens moi aussi à dire un mot sur ce sujet, car nous avons de très grandes difficultés, dans les départements, à conserver les employés des Saad.

À l’échelle départementale, il est bien sûr possible de financer des voitures, mais les employés utilisent souvent leur propre véhicule pour réaliser leur tournée. Certains refusent ainsi de se rendre dans des communes rurales éloignées.

Madame la ministre a dit vrai : il faut absolument repenser le financement de ces services. L’article 7 constitue un premier apport important, mais pour renforcer le virage domiciliaire, il faut tout repenser pour conserver et amplifier l’aide à domicile.

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. Je tiens à joindre ma voix à celle de mes collègues, car – je le note –, peu de sujets font l’objet d’un tel consensus entre nous.

Ce problème n’est pas nouveau, et nous constatons que cela fait trop longtemps que nous entendons que ce sujet est intéressant, important, qu’une attention particulière y sera consacrée, qu’on va y réfléchir, mais qu’il est toujours différé, reporté.

Or la situation est grave. On nous dit qu’il y a un problème de financement, mais les budgets sont le fruit d’un choix politique. À quand un véritable choix politique mettant l’accent sur le vieillissement et le grand âge ?

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.

Mme Élisabeth Doineau. J’ai moi aussi envie d’en rajouter une couche, car ce sujet est majeur. La création d’une carte professionnelle, à l’article 6, est révélatrice de ce que représente cette proposition de loi par rapport aux attentes de l’ensemble des professionnels qui s’occupent du domicile : rien du tout !

Nous attendons tous une loi établissant une véritable stratégie pour l’embauche et l’attractivité de ces métiers, car, actuellement, la désespérance prime : celle des professionnels du secteur ; celle des élus, qui voient qu’on ne répond pas aux besoins des personnes âgées et handicapées de leur territoire ; et, bien sûr, celle de ces dernières, qui, faute de personnel, ont rarement affaire à une même personne. Or il est délicat d’intervenir épisodiquement auprès d’un tel public. Tout le monde est en difficulté.

J’interviens donc moi aussi sur cet article 6, car il est temps d’apporter une vraie réponse !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 286.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 6 - Amendement n° 286
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l'autonomie
Organisation des travaux

Article 6

I. – Après l’article L. 313-1-3 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 313-1-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 313-1-4. – Les professionnels intervenant au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées disposent d’une carte professionnelle.

« La délivrance de la carte professionnelle est soumise à l’obtention préalable d’une certification professionnelle attestant de la qualification et de la compétence des prestataires d’aide à domicile ou à la justification de deux années d’exercice professionnel dans des activités d’intervention au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées.

« Un décret définit les catégories de professionnels bénéficiant de la carte professionnelle, les modalités de délivrance et de retrait de cette carte ainsi que les facilités associées à la détention de la carte pour la réalisation des tâches des professionnels intervenant au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées, notamment en termes de mobilités. »

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.

M. le président. L’amendement n° 319, présenté par Mme Nadille, MM. Patriat, Iacovelli, Théophile, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Mohamed Soilihi, Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

professionnels

insérer les mots :

de l’accompagnement

La parole est à Mme Solanges Nadille.

Mme Solanges Nadille. Cet amendement vise à préciser le périmètre de la carte professionnelle créée par l’article.

En effet, la formulation « professionnels intervenant au domicile » paraît trop large. Il convient de recentrer le périmètre sur les métiers de l’accompagnement plutôt que de l’étendre à l’ensemble des activités professionnelles pouvant être exercées au domicile des personnes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Cet amendement tend à préciser que la carte professionnelle créée par l’article 6 concernerait les seuls professionnels de l’accompagnement intervenant au domicile des personnes âgées ou en situation de handicap.

Cet ajout est à la fois insuffisamment précis, donc susceptible de créer des oubliés de la carte, et inutile, puisqu’un décret doit définir les catégories de professionnels concernés.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Le Gouvernement estime que la formulation « professionnels intervenant au domicile », trop large, doit être recentrée sur les métiers de l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie. Il s’agit de les distinguer, par exemple, des professionnels du ménage ou des coachs sportifs.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 319.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 142 rectifié bis, présenté par Mme Devésa, M. Henno, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et J.M. Arnaud, Mme de La Provôté, M. Duffourg et Mme Romagny, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après la deuxième occurrence du mot :

professionnelle

insérer les mots :

ou d’un parcours professionnel

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.

Mme Anne-Sophie Romagny. La rédaction de l’article 6 issue des débats en séance publique à l’Assemblée nationale conditionne l’éligibilité à la carte professionnelle à l’obtention d’une certification professionnelle.

Une telle rédaction exclut l’ensemble des parcours professionnalisants qui, s’ils n’ouvrent pas le droit à une certification, doivent également être valorisés.

Ainsi, dans le secteur des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile, les relais assistants de vie (RAVie) constituent un dispositif adapté au secteur, car ils permettent aux assistants de vie de rompre l’isolement professionnel, de prévenir les situations de maltraitance, d’encourager les bonnes pratiques et d’ouvrir sur une offre de formations professionnelles.

Le suivi d’un parcours professionnalisant au sein d’un RAVie est sanctionné par un passeport professionnel qu’il convient de valoriser en rendant ses détenteurs éligibles à la carte professionnelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Cet amendement a pour but de ne pas limiter l’octroi de la carte professionnelle aux seuls professionnels de l’accompagnement à domicile justifiant d’une certification professionnelle.

Il est satisfait par le texte de la commission : nous avons déjà précisé que les professionnels justifiant de deux années d’exercice professionnel dans des activités d’aide à domicile pourraient prétendre à l’octroi de la carte.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Madame Romagny, l’amendement n° 142 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Anne-Sophie Romagny. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 142 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 57 rectifié est présenté par Mmes Féret, Lubin et Le Houerou, MM. Roiron et Kanner, Mmes Canalès et Conconne, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bonnefoy, MM. Chaillou, Cozic, Fagnen, Gillé, Jacquin, Lurel et Mérillou, Mme Monier, MM. Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et M. Weber, Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 141 rectifié bis est présenté par Mmes Devésa et Saint-Pé et MM. Henno, Canévet et Duffourg.

L’amendement n° 229 rectifié est présenté par Mme Bourcier, MM. V. Louault et Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Brault, Capus et Verzelen, Mme Lermytte et M. Chevalier.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

prestataires d’aide

par le mot :

intervenants

La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 57 rectifié.

Mme Corinne Féret. Cet article crée une carte professionnelle pour améliorer la reconnaissance de l’ensemble des professionnels intervenant à domicile.

La rédaction que nous proposons, sans revenir sur l’obligation de certification professionnelle, ouvre l’éligibilité de la carte professionnelle à l’ensemble des professionnels intervenant à domicile, quel que soit leur statut.

Au-delà de cet amendement, j’insiste à mon tour sur l’absolue nécessité d’une plus grande reconnaissance et d’une plus grande valorisation de tous ces métiers, qui sont indispensables dans l’accompagnement et la prise en charge des personnes âgées.

La carte professionnelle est certes une petite proposition, mais elle tend vers une meilleure reconnaissance de ces métiers à ce point difficiles et pénibles que de grosses difficultés de recrutement existent. De nombreuses structures ne trouvent pas suffisamment de personnel pour répondre aux besoins très importants de nos aînés et des familles.

Ce sera tout l’enjeu, madame la ministre, de la grande loi qui portera, comme vous l’avez annoncé, sur la gouvernance, la stratégie, mais aussi, bien sûr, sur le financement de ces métiers.

M. le président. L’amendement n° 141 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 229 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Je suis d’accord avec Mme Féret : en distinguant certains salariés au détriment d’autres professionnels, cette carte professionnelle risque de décevoir. Elle pourrait se révéler un outil clivant, alors que l’objectif est de reconnaître le travail essentiel réalisé à domicile.

Cet amendement vise à réintégrer l’ensemble des professionnels intervenant à domicile dans le dispositif de la carte professionnelle, sans distinction.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Ces amendements identiques de précision rédactionnelle remplacent l’expression « prestataires d’aide à domicile » par celui d’« intervenants à domicile » pour désigner la qualification attendue des bénéficiaires de la carte professionnelle.

Cette modification vise à bien inclure parmi les professionnels concernés les salariés du particulier employeur.

La commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 57 rectifié et 229 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 192, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

ou à la justification de deux années d’exercice professionnel dans des activités d’intervention au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées

La parole est à Mme Mathilde Ollivier.

Mme Mathilde Ollivier. L’article 6 instaure la délivrance d’une carte professionnelle aux aides à domiciles. Si cette disposition, déjà mise en place dans de nombreux services d’aide à domicile, est positive en ce qu’elle va dans le sens d’une meilleure reconnaissance professionnelle des métiers de l’aide à domicile et qu’elle sécurise les personnes accompagnées, sa formulation actuelle, en limitant l’obtention de cette carte à deux années d’exercice professionnel, est trop restrictive.

Comment expliquer aux personnes aidées que certains professionnels détiennent et présentent une carte professionnelle et d’autres pas ? Les prestations de la majorité des services à domicile sont quotidiennes – parfois même vingt-quatre heures sur vingt-quatre –, et les remplacements sont fréquents. Tout professionnel doit donc pouvoir présenter sa carte professionnelle et la restituer au service en cas de sortie.

Selon la CFDT, le taux de turnover au sein du secteur de l’aide à domicile atteint 70 %. Selon l’Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles (UNA), 92 % des structures ont ouvert des postes en 2019, dont 22 % n’étaient pas pourvus, et 64 % des structures comptent des postes vacants depuis des années.

Les raisons de cette sinistralité sont largement connues : selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), en 2021, les conditions de travail, les faibles rémunérations, l’isolement et les horaires provoquent des départs et rendent ce métier très peu attractif.

Dans ce contexte, si la carte professionnelle contribue à une meilleure reconnaissance professionnelle et favorise le sentiment d’appartenance à une équipe, elle ne peut apparaître que comme une mesure mineure, dès lors que cette proposition de loi ne traite pas les causes profondes du manque d’attractivité de ces métiers.

En tout état de cause, les services doivent pouvoir la délivrer sans condition d’ancienneté afin de rendre les dispositions de cet article plus réalistes et effectives.

M. le président. L’amendement n° 155 rectifié bis, présenté par Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme Bourcier, MM. Wattebled et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Brault, V. Louault et Rochette, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer le mot :

deux

par les mots :

trois

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. L’objet de cet amendement est d’aligner le nombre d’années d’expérience professionnelle requises, à défaut de diplôme, pour l’obtention de la carte professionnelle, sur les dispositions du cahier des charges des services autonomie, soit trois ans.

M. le président. L’amendement n° 265, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

professionnel

insérer les mots :

ou bénévole

La parole est à Mme Silvana Silvani.

Mme Silvana Silvani. L’article 6 crée une carte professionnelle pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile. La commission des affaires sociales du Sénat a élargi le dispositif aux professionnels justifiant de deux années d’expérience.

À l’heure actuelle, 65 % des professionnels sont sans diplôme. La carte professionnelle constituant un premier pas pour tenir compte de cette réalité, nous proposons d’en étendre le bénéfice aux personnes cumulant deux années d’expérience bénévole dans les activités d’intervention au domicile de personnes âgées ou handicapées.

Sur le terrain, nous constatons bien souvent que des personnes ayant été amenées à intervenir au domicile d’un membre de leur famille décident de poursuivre cette activité auprès d’autres personnes.

Par ailleurs, cet ajout permet de s’aligner sur les conditions d’accès à une validation des acquis de l’expérience (VAE) pour que les années d’expérience bénévole ouvrent droit à l’obtention d’un diplôme. Il serait dommage de prendre des mesures en deçà d’une réglementation déjà existante. Nous proposons par conséquent de faire bénéficier les bénévoles de cette reconnaissance de leur qualité d’aidants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. L’amendement n° 192 vise à rendre le texte de la commission moins restrictif en supprimant la condition de justification de deux ans d’exercice professionnel pour prétendre à l’obtention de la carte professionnelle.

Ce faisant, il restreint toutefois le bénéfice de la carte aux professionnels ayant préalablement obtenu une certification professionnelle et a donc un effet contraire à celui recherché par ses auteurs.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 155 vise à allonger à trois ans la condition de durée d’activité pour pouvoir prétendre à l’obtention de la carte professionnelle en l’absence de certification professionnelle.

La commission estime que la durée de deux ans est adéquate et émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 265 vise à comptabiliser les interventions à titre bénévole dans l’appréciation de la condition de deux années d’exercice dans des activités d’intervention à domicile pour bénéficier de la carte professionnelle.

Il est vrai que des associations organisent des actions d’accompagnement à domicile à titre bénévole, notamment au bénéfice de personnes âgées isolées, et ces actions doivent être saluées.

Toutefois, de telles activités pourraient se révéler plus difficiles à justifier que des expériences professionnelles, ce qui complexifierait le dispositif.

Par ailleurs, la carte professionnelle vise à octroyer une forme de reconnaissance à des intervenants professionnels. Aussi cette ouverture pourrait-elle brouiller le message, sachant que l’enjeu est essentiellement symbolique.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.