Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, passoires thermiques l’hiver, bouilloires thermiques l’été : les bâtiments scolaires ne font pas exception à ce que nous connaissons par ailleurs dans le logement.

Les écoles mobilisent 30 % des dépenses énergétiques des communes pour leurs bâtiments publics, qui eux-mêmes représentent 76 % de la consommation énergétique de ces collectivités.

En plus d’être à l’origine d’importantes déperditions d’énergie, la mauvaise performance thermique des écoles nuit au bien-être de la communauté éducative et à l’apprentissage des élèves.

Le patrimoine immobilier scolaire est constitué de 51 000 établissements – écoles, collèges et lycées –, parmi lesquels 44 000 relèvent du premier degré. Majoritairement construites il y a plus de quarante ans, très énergivores, ces écoles demandent des rénovations globales qui vont mettre à l’épreuve les budgets des communes.

Le Président de la République a déclaré en septembre dernier ne plus vouloir d’écoles qui soient des passoires thermiques ; il a annoncé un grand projet de rénovation, impliquant l’octroi des financements nécessaires aux communes qui ne peuvent pas assumer seules ces travaux.

L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) indique que le coût de la rénovation d’une école classique, composée de cinq classes et dotée d’un local périscolaire, d’une cantine et d’une salle polyvalente, est estimé à 3 millions d’euros.

Si l’on multiplie ce chiffre par le nombre d’écoles de notre pays – il y en a dans près d’une commune sur deux –, on mesure les besoins financiers nécessaires pour répondre à l’ambition affichée.

L’abondement annoncé du fonds vert, à hauteur de 500 millions d’euros chaque année, apparaît insuffisant lorsque l’on sait que l’Institut de l’économie pour le climat a estimé à 1,4 milliard d’euros par an, jusqu’en 2050, les investissements nécessaires pour la rénovation des bâtiments scolaires.

De plus, il faut compter dix ans pour que la collectivité bénéficie du retour sur investissement résultant des économies réalisées sur ces dépenses énergétiques.

La présente proposition de loi vise à réduire le minimum de participation financière des collectivités pour les projets de rénovation thermique des bâtiments scolaires, en l’abaissant de 20 % à 10 %.

Cette réduction de l’autofinancement des communes implique que les financements extérieurs augmentent. Pourtant, rien n’est dit quant aux moyens qui leur seront octroyés pour compenser cette baisse.

Il convient en outre de rappeler que 66 % des écoles primaires sont situées dans des communes de moins de 10 000 habitants. Le pouvoir exécutif gagnerait à renforcer l’accompagnement en ingénierie des plus petites communes ou, du moins, à simplifier les démarches de demande de financement en créant un guichet unique.

Nous sommes là devant une proposition de loi qui n’engage pas véritablement le Gouvernement.

Pourtant, la semaine dernière encore, mon groupe a défendu un amendement visant à allouer 100 millions d’euros supplémentaires à la rénovation du bâti scolaire. Il a été rejeté, comme a été rejeté l’abondement de ce programme, à hauteur de 20 millions d’euros, proposé par nos collègues écologistes.

La stratégie des petits pas n’est pas permise en matière de rénovation des établissements scolaires comme des autres bâtiments, car nous sommes encore bien loin du compte si nous voulons atteindre les objectifs fixés par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, et le décret « tertiaire ». Ce dernier texte impose une réduction de la consommation énergétique des bâtiments français de 40 % en 2030 par rapport à 2010, puis de 50 % en 2040 et de 60 % en 2050.

Bien sûr, nous sommes favorables à une évolution du droit permettant de réduire la participation minimum des collectivités à ces travaux ; je pense notamment aux petites communes rurales, pour lesquelles un tel projet se réalise souvent sur plusieurs mandats. C’est valable pour les écoles et, plus largement, pour l’ensemble des bâtiments communaux, dont les coûts de fonctionnement et les factures d’énergie ont explosé.

Toutefois, la rénovation des bâtiments scolaires, identifiée par le Président de la République comme l’une des priorités de la planification écologique, implique le déploiement de moyens financiers adéquats.

Ces réserves étant formulées, nous voterons néanmoins cette proposition de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la rénovation énergétique des bâtiments scolaires est un enjeu majeur, tant pour la qualité des conditions d’apprentissage que pour le bien-être des élèves, des enseignants et du personnel municipal qui y travaille.

Combien d’entre eux font encore l’expérience de salles de cours et, plus largement, de locaux vétustes ou mal isolés ! Froid en hiver, chaleur en été ; à ces difficultés bien connues s’ajoute désormais la volonté d’aménager des îlots de fraîcheur et de désimperméabiliser les cours d’école face au risque de canicule en été et aux précipitations en hiver.

Cette rénovation est aussi un élément essentiel de la transition écologique des collectivités territoriales. À eux seuls, les bâtiments scolaires représentent en effet près de la moitié du bâti des collectivités. Il s’agit en majorité de bâtiments anciens qui ne correspondent plus aux normes actuelles de construction. Les chiffres ont été cités, je ne les répéterai pas : les écoles représentent près du tiers de la consommation d’énergie des bâtiments communaux.

Ces constats ont été clairement établis par la mission d’information sur le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique menée au début de cette année, mission à laquelle a notamment participé mon collègue du RDSE Bernard Fialaire ; les travaux de cette mission ont inspiré la présente proposition de loi.

Il paraît difficile de s’opposer à cette proposition de loi, car les collectivités ont besoin de soutien pour le financement de la transition écologique, qui est estimé à plus de 40 milliards d’euros jusqu’en 2050, soit 1,4 milliard d’euros par an.

Nos collectivités font face, comme l’État, les entreprises ou les ménages, au resserrement des possibilités d’emprunt et à l’inflation des prix, qui limitent leur capacité de financement externe.

De ce point de vue, l’abaissement, de 20 % à 10 %, du seuil minimal de participation de ces collectivités est probablement de nature à accélérer ou à débloquer certains projets, a fortiori si la charge d’investissement apparaît disproportionnée.

À mon sens, la question est plutôt de savoir quelles marges de manœuvre nous accordons, en tant que législateur, aux acteurs locaux dans la mise en œuvre de ce soutien. La proposition de loi prévoit que le niveau minimal de participation pourra toujours être fixé par le préfet de département. Ce sera une faculté et non une obligation.

En Gironde, nous avons revu des seuils au sein de la commission d’élus de la DETR. C’est, selon moi, à cette échelle qu’il convient de concentrer nos efforts pour éviter une législation abondante, au profit d’une décentralisation assumée qui permette d’adapter les politiques publiques au plus près des attentes du territoire.

Nos territoires, nos communes ne connaissent pas tous le même niveau d’investissement ; d’où l’importance des décisions décentralisées en la matière.

Nonobstant cette remarque, les membres du groupe RDSE voteront en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Bernard Buis. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai été gestionnaire d’établissements scolaires pendant plus de trente-huit ans et maire d’une commune rurale pendant vingt-trois ans ; je suis conseiller général, puis départemental, depuis dix-neuf ans. Alors, mes chers collègues, je dois dire que le sujet de cette proposition de loi me touche particulièrement !

Permettez-moi donc, à mon tour, de saluer le travail mené par Nadège Havet et l’ensemble des signataires de ce texte. Celui-ci reprend une recommandation du rapport de la mission d’information sur le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique, dont Nadège Havet était la rapporteure.

Ce rapport alarmant dressait un constat édifiant sur le nombre de passoires thermiques dans le bâti scolaire. L’évolution démographique de la France dans les années 1960 et 1970, combinée à l’allongement de la scolarité obligatoire de 14 à 16 ans, avait imposé la construction de nombreux bâtiments scolaires dans un délai très contraint pour accueillir les nouveaux élèves. Nous avons tous en tête les collèges, tristement célèbres, de « type Pailleron ». Il fallait alors construire un collège par jour, une école par semaine et un lycée par mois !

Aujourd’hui, en 2023, dans le parc immobilier scolaire des collectivités territoriales, on ne recense pas moins de 51 000 écoles, collèges et lycées, majoritairement construits avant 1975 : 51 000 bâtiments scolaires anciens, mal isolés, donc très énergivores.

Or, avec une surface totale de près de 140 millions de mètres carrés, le parc immobilier scolaire, à lui seul, représente quasiment 50 % de l’ensemble du bâti des collectivités locales.

Autrement dit, nous avons aujourd’hui en France environ 51 000 passoires énergétiques dans lesquelles sont scolarisés les élèves français.

Alors qu’il n’a jamais été autant question d’énergie dans notre société, et à l’heure où la notion de sobriété commence à infuser peu à peu nos pratiques de consommation, nous devons agir pour améliorer l’efficacité énergétique du bâti scolaire dans notre pays.

Pour y parvenir, nous devons aider les élus locaux. Ainsi, demain, les maires bâtisseurs se transformeront en maires rénovateurs !

Tel est bien le sens de cette proposition de loi.

Comment peut-on réussir le défi de la transition énergétique sans les élus locaux ? Leur redonner des marges financières, c’est permettre de moins gaspiller d’énergie et offrir un meilleur niveau de confort pour les enseignants, le personnel de l’éducation nationale et nos enfants ou nos petits-enfants.

Ce double défi ne peut attendre. Que ce soit pour des raisons réglementaires, économiques ou environnementales, le parc du bâti scolaire doit être rénové au plus vite, avec la participation des collectivités.

L’État aussi doit prendre sa part ; il le fait, au travers du plan de financement ÉduRénov, développé grâce à la Banque des territoires. Ce plan de financement s’élève à 2 milliards d’euros ; l’objectif affiché est ambitieux : 40 000 écoles rénovées d’ici à 2034, dont 2 000 l’année prochaine.

Si l’État est désormais au rendez-vous de ce double défi, nous devons cependant aller plus loin dans l’accompagnement des collectivités.

Certes, elles ont la possibilité de bénéficier de la DETR, de la DSIL, du fonds vert ou de financements externes, notamment par d’autres collectivités.

Néanmoins – je ne suis pas le premier à le dire –, le lancement des projets rencontre de nombreux freins, en matière d’ingénierie, d’accès aux dotations ou de coût. L’un de ces freins est la participation minimale du maître d’ouvrage, aujourd’hui fixée à 20 % du financement des investissements.

J’ai eu à connaître, dans mon canton du Diois, de plusieurs exemples de collectivités qui ont rassemblé des financements à hauteur de 80 % du coût total – elles auraient parfois pu recevoir plus encore –, mais n’ont pas trouvé dans leurs ressources les 20 % restants ; leur bâti scolaire n’a donc pas pu être rénové.

Cette proposition de loi est donc positive pour les petites communes et, plus globalement, pour toutes les communes de nos territoires, car elle vient modifier cette règle relative au seuil de 20 % en laissant aux préfets le soin de moduler ce seuil en fonction de la capacité financière des communes.

Comme le disait l’écrivain français André Lévy, « ne demandez pas à l’école de vous donner des frissons, demandez-lui plutôt de vous étonner ». Alors, mes chers collègues, pour que les élèves français cessent de frissonner dans les classes et les gymnases, aidons les collectivités territoriales en votant pour ce texte ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal.

M. Claude Raynal. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de Mme Havet, cosignée par plusieurs membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, portant sur la rénovation énergétique des bâtiments scolaires complète utilement les dispositifs existants, notamment la DETR et la DSIL.

Les établissements scolaires sont, pour la plupart, des témoins désuets d’une époque révolue en matière de gestion énergétique. La majorité des bâtiments scolaires a plus de cinquante ans. Les établissements récents sont plus rares : seuls 3,8 % d’entre eux ont moins de vingt ans.

En mars 2020, le rapport de l’ingénieur général des mines François Démarcq avait chiffré à 40 milliards d’euros les investissements nécessaires, toutes écoles confondues, pour atteindre les objectifs du décret « tertiaire » pour 2030.

Madame la ministre, avant l’été, vous évoquiez une facture de 52 milliards d’euros, sur dix ans, pour les seules écoles publiques.

Alors que des investissements massifs sont nécessaires pour respecter nos engagements environnementaux, les marges de manœuvre financières des élus locaux diminuent. Il en est de même, malheureusement, pour l’État. Le financement des baisses d’impôt pèse lourd sur ses caisses ; ce sont autant de recettes manquantes, qui auraient pu être utilement employées, notamment à financer la rénovation du bâti scolaire.

Les régions et départements n’ont pour leur part pratiquement plus d’autonomie fiscale et les communes comptent surtout sur la taxe foncière, dont les augmentations sont difficilement acceptées.

Il reste aux collectivités la possibilité de réorienter une partie de leurs ressources vers la rénovation énergétique des bâtiments scolaires, mais cela remettrait en cause les autres priorités que fixent actuellement les exécutifs locaux au service de leur territoire.

Nous devons par ailleurs faciliter l’accès au financement, qui est parfois peu lisible pour les élus locaux, entre les subventions européennes, comme le Fonds européen de développement régional (Feder), et les dotations étatiques, comme la DETR, la DSIL, ou le fonds vert. À cela s’ajoute la multiplicité des acteurs impliqués, qu’il conviendrait sans doute de rationaliser.

L’AMF fait souvent remarquer que l’accès à ces dotations est complexe. Les élus rencontrés par la mission d’information sur la rénovation du bâti scolaire présidée par Jean-Marie Mizzon évoquent sur ce point une « usine à gaz » et un « parcours du combattant ».

Le contexte inflationniste, l’incertitude sur les recettes et la limitation du levier fiscal continuent de contraindre les collectivités dans leur recherche de financement pour l’accélération de l’action climatique.

Madame la ministre, vous n’ignorez pas qu’agir davantage implique systématiquement des choix difficiles pour des investissements qui ne trouvent jamais leur équilibre sans recettes fiscales supplémentaires.

L’enjeu lié à la rénovation des bâtiments est considérable pour les collectivités locales qui s’engagent dans ces projets avec la promesse implicite d’un investissement durable. Par ailleurs, on ne parle peut-être pas assez de l’incertitude quant à la pérennité de certains établissements, qui rend la situation particulièrement précaire. Si l’État, dans sa planification scolaire, décide ultérieurement de fermer des classes ou des établissements, cet investissement peut représenter en fin de compte un gaspillage de ressources publiques.

Toujours est-il qu’en prévoyant un abaissement, de 20 % à 10 %, de la participation minimale du maître d’ouvrage au montant total des financements apportés par des personnes publiques, la présente proposition de loi ne révolutionne pas le financement de la rénovation thermique des bâtiments scolaires. D’ores et déjà, bien des collectivités, même en s’y efforçant, ne parviennent pas à trouver des subventions à hauteur de 80 % des besoins. Mais ce texte a le mérite d’apporter une réponse bienvenue aux collectivités qui pourraient en bénéficier, puisque les besoins de financement de la rénovation incombent encore très largement aux élus locaux.

Pour ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendra la présente proposition de loi. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadège Havet applaudit également.)

M. Max Brisson. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en ouverture de mon intervention, je voudrais vous présenter la situation de la commune d’Os-Marsillon, dans le département des Pyrénées-Atlantiques.

Son école compte deux classes et une quarantaine d’élèves, sur les quatre-vingts du regroupement pédagogique intercommunal (RPI) constitué avec la commune voisine d’Abidos. Elle est exiguë et ne répond plus à la hausse de la population du bassin de Lacq, autrefois gazier, mais aujourd’hui orienté vers les énergies vertes et en plein renouveau de l’emploi industriel. Pis, elle se situe en zone inondable, comme en atteste le plan de prévention des risques d’inondation (PPRI).

Ne pouvant étendre sur place l’édifice de type Jules-Ferry, le maire d’Os-Marsillon, Jérôme Toulouse, opte pour un bel emplacement entre mairie et église. Le total du projet est d’abord estimé à 900 000 euros, puis réévalué à 1,2 million. Pour le financer, l’État lui accorde royalement une DETR de 200 000 euros… Guère de risque que cette proposition de loi lui apporte une réponse ! En l’état, M. le maire ne peut financer le projet ; il ne peut pas plus y renoncer, car le risque d’inondation est réel, avéré par les débordements fréquents de la rivière Baïse qui jouxte l’école. Voilà son dilemme !

Ce dilemme, Jean-Marie Mizzon et Nadège Havet l’ont parfaitement posé dans le cadre de la mission d’information sur le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique. Qu’ils soient tous deux remerciés pour leurs travaux !

Oui, mes chers collègues, de grands défis se posent à nous en matière d’adaptation des bâtiments scolaires. Performance énergétique, végétalisation, accessibilité, normes de sécurité, mais aussi nouvelles approches pédagogiques : autant de défis qui justifient le déploiement de plans de rénovation ambitieux.

Toutefois, la mise en œuvre de pareils projets est souvent contrainte par un montage complexe et des études préalables exigeantes, nécessitant ressources financières et ingénierie. Elle se heurte à la disparité des réponses à apporter, tant il existe une diversité de maîtres d’ouvrage impliqués – régions, départements, EPCI, syndicats, communes – et de bâtiments concernés – vieux lycées napoléoniens, établissements modernes, petites écoles rurales, grandes écoles urbaines.

Je mets donc en garde contre toute prolifération de normes, toute harmonisation centralisatrice imposée par un gouvernement souvent enclin à guider à marche forcée l’action des collectivités.

Or je devine déjà, rue de Grenelle, le début d’un refrain qui chantonne à qui voudrait bien l’entendre que les collectivités ont des difficultés à assumer cette compétence.

Je veux le dire ici : elles n’ont jamais à rougir du travail accompli. Devons-nous rappeler l’état de délabrement des lycées lors du transfert de leur responsabilité de l’État aux régions, à la fin des années 1980 ? Devons-nous pointer du doigt l’état général des bâtiments publics à la seule charge de l’État, comme les préfectures ou les palais de justice ? Non, en la matière, aucune leçon ne peut leur être donnée !

Les collectivités les plus solides – régions, départements, communes importantes –, avec les moyens financiers et l’ingénierie qui sont les leurs, font souvent aussi bien, si ce n’est mieux, que l’État lui-même.

S’appuyant sur des ingénieurs et des techniciens experts, elles n’ont d’ailleurs pas attendu que l’État leur en donne l’ordre pour recentrer leurs objectifs vers la performance énergétique et la transition écologique.

Cette clarification faite, posons la question qui anime le débat d’aujourd’hui : comment réussir à accompagner au mieux les projets de rénovation des écoles communales, en particulier des petites écoles qui, par leur nombre et leur taille, constituent une singularité française ?

Certes, cette proposition de loi pourra faciliter, quelque peu, le quotidien de certains maires de petite commune, mais elle n’est qu’une ébauche de réponse.

En effet, elle ne suffira pas à résoudre durablement la question de la transition écologique des petites écoles, ces véritables poumons au cœur des villages, vecteurs d’attractivité et de dynamisme.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Elle a le mérite d’exister !

M. Max Brisson. Ces petites écoles sont une richesse française et une exception européenne. Une vision modélisante cherche parfois à réduire cette richesse, au nom de la modernité, alors que ces écoles échappent à la bascule inquiétante que connaissent des pans entiers de notre système éducatif.

Limitées, voire dépourvues d’ingénierie, contraintes par leurs budgets, les communes dont elles dépendent ne parviennent plus à adapter leurs écoles aux exigences de notre siècle.

En résultent de nombreux bâtis peu ou mal isolés, vieillissants et non conformes aux nouvelles exigences pédagogiques, environnementales, d’inclusion et de sécurité.

La bonne volonté des maires et de leurs équipes n’est pas ici mise en cause. Bien au contraire, ils déploient des trésors d’énergie pour entretenir l’école de leur village.

À l’image de l’intervention des régions et des départements pour les lycées et les collèges, rendue possible par un puissant acte de décentralisation, j’en appelle à un nouveau contrat scolaire, fondé sur une confiance réciproque, dans le respect des responsabilités de chacun.

Ce contrat pourrait largement s’inspirer des quinze propositions présentées par Gérard Larcher le 6 juillet dernier, mais il devra s’accompagner des moyens financiers et humains indispensables à l’action des collectivités.

Pourquoi, ainsi, ne pas instaurer un guichet unique de subventions publiques, regroupant l’ensemble des fonds d’investissement et d’équipement mis à leur disposition en matière de rénovation et de construction scolaire ?

Pourquoi ne pas instaurer un vrai dialogue entre maire et préfet quant à l’intérêt du projet de rénovation, ses objectifs et ses modalités de financement ?

Pourquoi ne pas mettre en œuvre une dotation spécifique ne visant que les projets de rénovation de petites écoles en zone rurale ?

Voilà des pistes de réflexion à ouvrir au plus vite, pour enfin offrir aux communes les moyens de notre ambition écologique.

Au-delà, si l’on élargit le champ de cette proposition de loi, une question se pose clairement, depuis plusieurs années : celle du renouvellement du partenariat entre l’éducation nationale et les collectivités locales. Ce pourrait être l’autre volet du nouveau contrat que j’appelle de mes vœux.

Lorsque les lois de décentralisation ont été mises en œuvre, dans les années 1980, la question était essentiellement immobilière, au sens où il fallait rénover les mètres carrés hérités du passé et en construire de nouveaux pour répondre à la démocratisation de l’enseignement. À l’exception de certains équipements spécifiques, la question pédagogique n’était nullement posée, non plus que celle de la transition écologique.

L’étanchéité de la responsabilité de chacun a donc été totale. Aux collectivités territoriales les bâtiments, l’hébergement et la restauration ; à l’éducation nationale la pédagogie et l’organisation des enseignements.

Mais les temps ont changé ! La révolution numérique bouscule la pédagogie. Celle-ci est profondément liée aux équipements et aux aménagements diligentés par les collectivités. L’étanchéité n’a donc plus de sens.

Aujourd’hui, nous devons penser ainsi : « Dis-moi comment tu équipes et aménages une école, un collège ou un lycée, et je te dirai quelle pédagogie je peux y pratiquer et comment organiser les enseignements. »

Rénover une école, un collège ou un lycée est un acte pédagogique tout autant qu’un cheminement vers la transition écologique. Il doit se construire dans un partenariat repensé entre l’État et les collectivités territoriales.

Vous voudrez bien m’excuser, mes chers collègues, de m’être ainsi bien éloigné du contenu de cette proposition de loi (M. Stéphane Piednoir sen amuse.), mais il me semble que le jeu en valait la chandelle ! Le sujet méritait d’être abordé dans son ensemble.

Au-delà des montages financiers et des taux de subvention, à l’heure de la performance énergétique, de la transition écologique et de la pédagogie numérique, une nouvelle approche du rôle de chacun me semble nécessaire.

Bien entendu, dans l’attente d’une telle évolution, je ne suis pas opposé à la proposition de loi que Nadège Havet et le groupe RDPI nous proposent d’adopter aujourd’hui ; l’avancée qu’elle permettra est certes minime, mais elle n’en est pas moins intéressante. C’est la raison pour laquelle, in extremis, je l’ai cosignée et pour laquelle le groupe Les Républicains, en responsabilité, la votera ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Brault.

M. Jean-Luc Brault. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, qu’il soit nourri des récits de Pagnol, des photographies de Doisneau ou de nos propres souvenirs, l’imaginaire autour de l’école cultive une certaine image de la France : celle des tableaux noirs et des craies blanches, des interros-surprises et des bonnets d’âne, bien sûr, mais aussi celle des enfants emmitouflés dans leurs manteaux, un bonnet de laine sur la tête.

J’ai personnellement connu une telle école primaire, de 1954 à 1963. Or l’hiver qui commence nous rappelle hélas ! que cette image-là n’appartient pas au passé. De trop nombreuses écoles sont encore des passoires thermiques. Cela vaut aussi, malheureusement, pour les collèges et les lycées.

Ces passoires thermiques sont une mauvaise manière que nous faisons aux enseignants comme aux élèves. Ils subissent le froid en hiver et la chaleur en été, ce qui nuit à la qualité de l’enseignement et à la transmission des savoirs.

Mais ces passoires thermiques sont également une mauvaise opération pour nos collectivités territoriales, qui se doivent de montrer l’exemple en matière d’économies d’énergie.

C’est une mauvaise opération, d’abord, du point de vue économique : les élus locaux en sont bien conscients, eux qui suivent de près l’évolution des factures pour ces bâtiments. La hausse des prix de l’énergie est d’autant plus forte que les bâtiments sont mal isolés.

Cela l’est, ensuite, du point de vue climatique. Comme l’a indiqué notre rapporteur, les écoles, collèges et lycées représentent 45 % de la surface du patrimoine bâti des collectivités, mais 84 % de leurs émissions de gaz à effet de serre. C’est colossal ! Or les collectivités sont également soumises aux impératifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et doivent s’y attaquer dès maintenant.

Le 7 décembre dernier, un accord a été trouvé entre le Parlement européen et le Conseil pour réviser la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Cet accord prévoit la rénovation d’au moins 16 % des bâtiments non résidentiels les moins performants d’ici à 2030 et de 26 % d’entre eux d’ici à 2033.

Cette dynamique, portée par l’Union européenne et partagée par nos partenaires européens, est extrêmement ambitieuse. Elle doit maintenant se concrétiser dans les territoires. Les collectivités doivent prendre leur part des initiatives.

C’est pourquoi je tiens à saluer le travail réalisé sur ce sujet par la mission d’information dont Nadège Havet était la rapporteure. Le groupe RDPI a choisi d’inscrire à notre ordre du jour, dans son espace réservé, un texte utile pour nos collectivités, qui vise à transcrire dans la loi l’une des propositions de la mission d’information.

La proposition qui nous est faite est très simple et très opérationnelle : prévoir un taux dérogatoire pour la participation minimale des collectivités aux travaux qu’elles mènent en tant que maître d’ouvrage lorsque ces travaux concernent la rénovation énergétique des bâtiments scolaires.

Il s’agit de lever un blocage juridique pour permettre aux collectivités d’engager des travaux de rénovation. Le préfet pourra abaisser de 20 % à 10 % ce taux de contribution minimale. Ce changement est certes modeste, monsieur le rapporteur, mais il est important pour nos petites communes et pour nos maires ruraux attachés à la bonne gestion de leurs deniers.

Alors que le prix des rénovations peut atteindre 1 700 euros au mètre carré – je sais, en tant qu’ancien professionnel du bâtiment, qu’il peut même aller bien au-delà –, il convient d’assouplir les contraintes liées au schéma de financement. Cette règle de la contribution minimale a sans doute eu sa justification en droit, mais elle ne semble adaptée ni à l’urgence climatique ni à la capacité contributive des collectivités et singulièrement de nos petites communes rurales.

Les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront bien évidemment en faveur de cette proposition de loi, madame Havet, mesure pragmatique et de bon sens. Nous espérons que les élus locaux sauront utiliser la nouvelle marge d’action qui leur sera ainsi donnée et qu’elle permettra d’atteindre l’objectif d’ici à 2030. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)