compte rendu intégral

Présidence de M. Dominique Théophile

vice-président

Secrétaire :

Mme Marie-Pierre Richer.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

État C (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Deuxième partie

Loi de finances pour 2024

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2024, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 127, rapport général n° 128, avis nos 129 à 134).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Seconde partie (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Immigration, asile et intégration

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

La parole est à Mme la rapporteure spéciale.

Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année, l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » s’inscrit pleinement dans l’actualité.

Il est au cœur de l’actualité migratoire, tout d’abord, puisque notre pays connaît une très forte hausse du nombre de demandeurs d’asile. Le Gouvernement s’attend en effet à 160 000 demandes d’asile en 2024, soit environ 20 % de plus que le record historique établi en 2019 avec près de 133 000 demandes.

Il se situe dans l’actualité internationale, ensuite, notamment avec la poursuite de l’accueil en France des personnes déplacées d’Ukraine en raison du conflit avec la Russie.

Il s’inscrit dans l’actualité de notre assemblée, enfin, avec l’adoption, le 14 novembre dernier, du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, dit Immigration, dans une version significativement améliorée par rapport au texte initial.

Il est d’ailleurs évident que ce texte rend l’exercice d’analyse du présent budget mal aisé cette année. En effet, par construction, le budget de la mission a été établi sans prendre en compte les modifications figurant dans le projet de loi Immigration, notamment celles qui ont été apportées par le Sénat. Aujourd’hui, il ne nous revient que d’analyser les crédits pour ce qu’ils sont.

Il n’est d’ailleurs nullement besoin de reprocher au budget de cette mission de ne pas intégrer des modifications à venir de la politique d’immigration et d’intégration pour constater ses trop nombreux écueils, même en l’état du droit.

D’un point de vue général, les crédits de paiement sont en hausse d’un peu plus de 7 %, soit 150 millions d’euros supplémentaires, s’établissant ainsi à 2,16 milliards d’euros.

Si l’on y regarde de plus près, on note quelques petites améliorations dans ce budget, mais celui-ci souffre aussi de sérieux défauts.

Parmi les petites améliorations, on constate des efforts supplémentaires en direction des crédits consacrés aux centres et locaux de rétention administrative pour les étrangers en situation irrégulière. On observe également quelques hausses – modérées – des crédits destinés à l’éloignement des migrants en situation irrégulière et à la lutte contre l’immigration clandestine.

À l’inverse, les écueils auxquels se heurte ce budget sont beaucoup plus nombreux.

Le premier écueil est que la présentation de ces crédits est incomplète et manque de lisibilité. En effet, comme l’année dernière, le budget prévu n’intègre pas les dépenses liées à l’accueil des personnes déplacées d’Ukraine. Par ailleurs, quasiment la moitié des dépenses de la mission transitent par des associations, dans des conditions qui échappent aujourd’hui trop largement à la connaissance du Parlement : il faudra y remédier.

Le deuxième écueil concerne la dotation au titre de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA). Pour 2024, son montant serait en baisse de 21 millions d’euros et s’établirait à 294 millions d’euros.

Un tel montant est manifestement sous-estimé, car cette prévision repose sur un objectif de raccourcissement des délais de traitement des demandes d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) qui manque de réalisme, en particulier au vu du nombre record de demandes. C’est a fortiori le cas dans un contexte de mouvements sociaux à l’Ofpra.

Le troisième écueil a trait aux résultats obtenus sur le fondement des crédits demandés chaque année.

Je citerai l’exemple de la lutte contre l’immigration irrégulière. Pour donner un seul chiffre, moins de 11 500 retours forcés de personnes en situation irrégulière ont été exécutés en 2022, soit un niveau inférieur de 40 % à celui qui a été constaté en 2019, et ce alors même que la pression migratoire est aujourd’hui plus forte. Le nombre annuel de retours forcés exécutés a même été plus faible en 2022 que durant toutes les années de la décennie 2010.

Enfin, le quatrième et dernier écueil – et sans doute le plus grave – est structurel.

Comme les années précédentes, les équilibres entre les différents types de dépenses ne sont pas bons. Alors que les dépenses liées à l’asile représentent deux tiers des crédits, ceux qui sont dévolus à l’intégration n’en représentent qu’environ un cinquième, ceux qui portent sur la lutte contre l’immigration irrégulière un dixième.

Or une politique d’immigration réussie doit garantir à la fois le renvoi des étrangers en situation irrégulière et l’intégration effective des personnes autorisées à rester en France. C’est une question de bon sens et d’acceptabilité sociale de l’immigration. En ne garantissant pas cet équilibre, le budget de la mission rate finalement sa cible, ce qui est d’ailleurs le cas d’année en année.

En conclusion, les crédits de la mission ne répondent aux besoins en matière d’immigration et d’intégration ni en l’état du droit ni dans celui que le Sénat a construit pour l’avenir il y a quelques semaines.

La commission des finances propose donc le rejet des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens en mon nom et en celui de ma collègue Muriel Jourda, également rapporteur pour avis de la commission des lois, qui ne peut être présente aujourd’hui.

Madame la secrétaire d’État, le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » est un peu le rocher de Sisyphe du Gouvernement.

Nos conclusions sont toujours à peu près les mêmes, puisque nous émettons cette année encore un avis défavorable sur les crédits de cette mission, tout en mesurant les difficultés de l’exercice.

En matière de lutte contre l’immigration irrégulière, les résultats ne sont pas brillants, chacun le sait. On constate un découplage croissant entre le nombre des mesures d’éloignement prononcées et le nombre des mesures d’éloignement exécutées. Nous savons que, malgré l’augmentation des capacités d’accueil et d’hébergement, nous sommes encore loin de répondre aux besoins.

Plus généralement, toutes les procédures d’éloignement sont soit trop lentes, soit insuffisantes.

Les résultats ne sont pas beaucoup plus brillants en matière d’asile.

L’effort est pourtant considérable pour ce qui est de l’Ofpra, qui voit ses moyens augmenter. Désormais, le traitement des demandes d’asile est plus rapide en France que dans les autres pays européens – l’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs, du moins dans le cas d’espèce.

Malgré tout, il s’agit de résultats très fragiles, puisque, comme vient de le rappeler Mme la rapporteure spéciale, en raison de l’augmentation importante des flux migratoires, les délais de traitement des demandes s’accroissent de nouveau.

Par ailleurs, les hypothèses du Gouvernement nous semblent optimistes en ce qui concerne le montant de la dotation au titre de l’ADA. L’exécutif prévoit une baisse du nombre d’allocations, car il espère une diminution des délais de traitement des demandes par l’Ofpra. Nous craignons, pour notre part, que ces prévisions ne se réalisent pas.

De tels résultats en demi-teinte sont aussi à déplorer en matière d’intégration.

Nous considérons que le récent renforcement des services des étrangers en préfecture est pertinent, tout en soulignant que cette initiative était attendue de tous ceux qui veulent réellement faciliter les prises de rendez-vous et, plus généralement, améliorer notre politique d’intégration.

Cela étant, le renforcement de ces services passe par un recours massif à des contractuels, lesquels n’ont pas forcément la connaissance et la technicité nécessaires.

En outre, nous sommes en désaccord avec votre administration – davantage qu’avec le ministre de l’intérieur et vous-même, madame la secrétaire d’État –, qui peine à lâcher le contrôle dont elle a la charge au travers de la délivrance et du renouvellement des quelque 180 types de titres de séjour, pour lesquels les conditions d’octroi sont à chaque fois différentes.

Cette grande variété des titres de séjour a pour inconvénient de rendre l’application des dispositions extrêmement complexe et de rendre encore plus aléatoire l’expérimentation d’une instruction « à 360 degrés » – comme on la nomme – des demandes de titres de séjour.

Je le redis, la question des titres de séjour a vocation à être réexaminée.

Les difficultés que rencontrent les services des étrangers en préfecture touchent également l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), qui est plus particulièrement chargé d’une mission d’intégration des étrangers.

J’en veux pour preuve, et je me contenterai de cette seule donnée qui est la dernière disponible, le taux de rotation de son personnel. Celui-ci est d’environ 37 %, ce qui signifie que la totalité de ses effectifs est renouvelée en l’espace de trois ans. Dans ces conditions, il est difficile pour les agents de l’Ofii d’acquérir des compétences spécialisées dans des métiers qui ont pourtant du sens et sont essentiels.

C’est dire si nous allons de déception en déception. Voilà aussi pourquoi, quels que soient les efforts réalisés, nous voterons contre le budget de cette mission.

Je termine mon propos en évoquant un sujet rarement abordé, celui des accords internationaux conclus entre la France et certains pays d’émigration, en particulier les accords franco-algériens de 1968, 1985, 1994 et 2001, sujet auquel nous avons consacré tout un chapitre dans notre avis budgétaire.

À cet égard, il nous faudra – c’est notre souhait – entrer beaucoup plus dans le détail, car il est difficile, dans de si brefs délais, de se faire une idée vraiment définitive de la pertinence de ces conventions internationales pour notre pays.

Pour ne prendre que cet exemple, les accords internationaux entre la France et les pays d’Afrique de l’Ouest, signés sous la présidence de Nicolas Sarkozy, ont un périmètre et des effets extrêmement variables.

À cette heure, la France est partie à plus de 110 accords internationaux avec des pays d’émigration. Pour ce qui est des accords franco-algériens, certains éléments nous paraissent indiscutablement pertinents, quand d’autres le sont moins.

Ces accords créent un statut spécial plutôt favorable aux ressortissants algériens en termes d’accès aux titres de séjour, de séjour et de circulation. À l’inverse, ils sont moins en leur faveur dans certains domaines : je pense en particulier à l’absence d’accès aux titres de séjour pluriannuels et de procédure de type passeport talent.

Il reste un impensé sur les questions pénales. Les binationaux sont nombreux ; or, l’Algérie n’extradant pas ses ressortissants, il est impossible d’extrader et de mettre à exécution les mandats d’arrêt adressés à des Franco-Algériens qui seraient par exemple impliqués dans des affaires de trafic de stupéfiants.

Voilà présentées très succinctement les observations que je souhaitais formuler. Si le temps dont je disposais avait été plus long, j’aurais volontiers évoqué le travail conduit par la commission des lois de l’Assemblée nationale en matière d’immigration, mais j’aurai évidemment d’autres occasions de le faire. (Sourires.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Philippe Tabarot. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Tabarot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen de la mission « Immigration, asile et intégration » intervient alors que les problématiques migratoires ont plus que jamais retenu l’attention des Français et du législateur.

Il y a moins d’un mois, nous discutions du projet de loi Immigration, actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale. Nous aborderons bientôt de nouveau cette question lorsque nous débattrons de la proposition de loi constitutionnelle déposée par le groupe Les Républicains.

Ce sujet se trouve donc au cœur de l’actualité.

Pourtant, au regard de l’ampleur de l’enjeu, l’effort budgétaire consenti pour cette mission demeure en deçà de nos attentes.

Comme l’ont souligné les rapporteurs pour appuyer leur avis défavorable sur les crédits de la mission, le compte n’y est pas.

Après la parenthèse de la pandémie, la tendance à la hausse des flux de personnes entrant sur le territoire depuis une vingtaine d’années, aussi bien légalement qu’illégalement, s’est confirmée.

C’est la problématique des étrangers en situation irrégulière qui soulève tout particulièrement des interrogations quant à notre capacité à mener à bien nos politiques en matière migratoire.

Par exemple, en 2022, la France comptait plus de 400 000 bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME), soit une hausse de près d’un tiers par rapport à 2016.

Bien entendu, les négociations autour du pacte européen sur la migration et l’asile se poursuivent au sein des instances de l’Union européenne, de même que se prolonge l’examen du projet de loi Immigration en France. Attendre un retournement de tendance semble néanmoins peu raisonnable à court terme. Il est donc indispensable d’agir.

Pourtant, les crédits du programme 303 « Immigration et asile » consacrés à la lutte contre l’immigration irrégulière ne représentent qu’un volume assez faible des crédits de la mission : 12 %, soit 260 millions d’euros.

Cette faiblesse relative de l’effort financier contribue probablement à la faiblesse des indicateurs : ainsi, le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) s’établit en deçà de 7 % depuis 2020.

En outre, bien que nous saluions l’annonce de l’extension graduelle des capacités d’accueil des centres de rétention administrative (CRA), nous estimons que l’augmentation du nombre de places dans l’Hexagone, telle qu’elle est envisagée dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) – d’environ 1 850 places en 2023 à 3 000 places en 2027 –, est difficilement concevable si l’on s’en tient à la trajectoire actuelle.

Il y a un réel risque d’effet de ciseaux entre le nombre de places et celui des personnes mises en rétention, comme le laisse craindre la remontée des taux d’occupation des CRA.

J’en viens aux politiques en matière d’asile.

Commençons par saluer la réduction du délai de traitement des demandes, qui a atteint en moyenne 311 jours au mois de septembre dernier.

Cela étant, il ne faut pas oublier que cette réduction n’est pas sans lien avec le « trou » des arrivées observé durant la pandémie. En fait, les progrès réalisés pourraient rapidement être contrebalancés par la reprise rapide du nombre des demandes.

Concernant le versement de l’allocation pour demandeur d’asile, nous partageons le constat établi par les rapporteurs d’un manque de sincérité des prévisions. En effet, si les crédits dévolus à cette allocation affichent une baisse faciale et si les hypothèses concernant la progression des demandes d’asile sont prudentes, le Gouvernement exclut les versements effectués aux personnes déplacées d’Ukraine qui bénéficient de la protection temporaire. Pourtant, s’ils y figuraient, ces versements représenteraient une part substantielle de la dotation au titre de l’ADA.

Pour ce qui est du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française », nous constatons qu’au vu des besoins notre pays reste en retard, malgré une hausse des crédits l’an passé, hausse qui n’a d’ailleurs pas été reconduite cette année.

Or l’intégration, notamment par la langue, est une composante essentielle de la politique migratoire. C’est du reste pourquoi le Sénat en a voté le renforcement le mois dernier.

L’évolution de ces crédits ne saurait être découplée de celle des flux eux-mêmes, au risque que l’on intègre mal, voire que l’on n’intègre pas du tout.

Sans entrer davantage dans le détail, nous dressons une fois de plus le constat d’une politique d’asile et d’immigration menée au fil de l’eau, qui ne se dote pas des moyens de maîtriser la situation, ce dont pâtissent à la fois les Français et les étrangers résidant en France.

La mission « Immigration, asile et intégration », telle qu’elle nous est soumise, n’est donc pas à la hauteur des enjeux politiques, humains ou encore administratifs inhérents à ces questions.

Pour l’ensemble de ces raisons, et comme l’an passé, le groupe Les Républicains suivra l’avis défavorable des rapporteurs et ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox.

M. Aymeric Durox. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, samedi soir, le terrorisme islamique a encore frappé notre pays. Un touriste allemand a été tué, alors qu’il visitait notre capitale avec son épouse. Deux autres passants ont été attaqués avant que le terroriste ne soit neutralisé par des policiers.

Ce terroriste a un nom : Armane Rajabpour-Miyandoab !

MM. Thomas Dossus et Guy Benarroche. Armand !

M. Aymeric Durox. Retraçons son parcours : il est issu d’une famille qui a fui l’Iran des mollahs et qui a été accueillie par la France. Notre pays l’a donc élevé, nourri, lui a donné un espoir, la possibilité de s’émanciper.

Il a choisi de nous remercier en semant la mort et la désolation.

Il y a quelques semaines, sa mère a signalé son comportement à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Or rien n’a été fait par le ministère de l’intérieur : la responsabilité du ministre doit aujourd’hui être mise en cause.

Hélas, trois fois hélas ! cet individu est certes un Français né en France – comme le ministre de l’intérieur s’est empressé de le rappeler –, mais il est d’abord et avant tout issu de l’immigration de culture musulmane – comme toujours, le ministre a omis de le préciser… –, comme 97 % des auteurs d’attentats terroristes depuis 2015. Les dernières attaques, d’Arras à Annecy en passant par Rambouillet nous le rappellent douloureusement.

Le lien entre immigration et terrorisme islamique est donc – nul n’en doutait d’ailleurs – malheureusement évident.

Il l’est aussi en matière d’insécurité du quotidien puisque, selon les mots mêmes du Président de la République, prononcés le 26 octobre 2022 sur France 2, « quand on regarde aujourd’hui la délinquance à Paris, on ne peut pas ne pas voir que la moitié au moins des faits de délinquance qu’on observe viennent de personnes qui sont des étrangers, soit en situation irrégulière, soit en attente de titre ».

Pour être plus précis, selon la statistique institutionnelle du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), en Île-de-France, 93 % des personnes mises en cause pour des vols sans violence dans les transports en commun franciliens et 81 % de celles qui le sont pour des vols avec violence sur ce réseau sont identifiées comme étant étrangères.

Par ailleurs, dans notre pays, un détenu sur quatre est de nationalité étrangère, sans compter tous ceux qui sont d’origine étrangère. La situation est donc catastrophique.

Face à cela, que propose le Gouvernement ? Encore plus d’immigration, comme en témoigne le budget de cette mission pour 2024, qui atteint 7,9 milliards d’euros, contre 7,1 milliards d’euros en 2023, soit une hausse de 11 %.

Tous les budgets explosent : ils illustrent la volonté du Gouvernement de ne pas contrôler l’immigration, alors même que le récent projet de loi Immigration, débattu sur ces travées, qui n’était certes pas la panacée, mais qui comportait quelques mesures de bon sens, a été soigneusement vidé de toute substance en commission à l’Assemblée nationale à cause de l’alliance des macronistes, de la gauche et de l’extrême gauche.

Les résultats de la lutte contre cette immigration massive sont quant à eux ridicules. Alors qu’environ 80 % des demandes d’asile sont finalement déboutées par l’Ofpra, seulement 10 % des OQTF sont exécutées. D’ailleurs, la plupart des terroristes qui ont ensanglanté notre pays étaient soumis à des obligations de quitter notre territoire qui n’ont pas été exécutées…

Ce n’est pas une ligne comptable qui réglera ce problème vital pour notre pays. C’est d’ailleurs pourquoi nous ne voterons évidemment pas en faveur de ces crédits.

Pour régler définitivement le problème de l’immigration, il faudra faire appel au souverain suprême, le peuple, comme nous nous y engageons et comme les Français le veulent depuis des années, et ce par l’organisation d’un référendum sur la question migratoire.

Les Français veulent sortir de ce cauchemar, nous les y aiderons.

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à n’en pas douter, l’immigration est un sujet politique majeur.

Après avoir voté un projet de loi d’ampleur, nous examinerons, dans la foulée du projet de loi de finances, une proposition de loi constitutionnelle relative à la souveraineté de la France, à la nationalité, à l’immigration et à l’asile.

Les crises géopolitiques s’enchaînent en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Ces tragédies provoquent des déplacements de populations, notamment vers l’Europe. Nous observons, depuis plusieurs années déjà, un fort accroissement des flux migratoires.

En 2022, le nombre des franchissements illégaux de la frontière extérieure de l’Europe a bondi de 64 % par rapport à 2021. Il a encore augmenté en 2023. Au sein de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), la France et ses partenaires européens doivent déployer davantage de moyens pour faire face à cet afflux.

L’immigration légale connaît, elle aussi, une forte progression au sein des pays de l’OCDE : 300 000 immigrés permanents en France pour la seule année 2022 – un chiffre record au cours de ces quinze dernières années.

Nos capacités d’accueil sont malheureusement limitées. Nous devons donc choisir les étrangers qui seront admis à rester sur notre territoire. Notre groupe souhaite que ce choix s’opère sur le fondement de contingents fixés par le Parlement.

La dignité et l’efficacité nous appellent à apporter des réponses rapides aux étrangers. Personne, pas plus les intéressés que la France et ses finances publiques, n’a véritablement intérêt à ce que les procédures traînent en longueur.

Les dispositions du projet de loi Immigration devraient permettre d’accélérer les procédures, donc de réaliser quelques économies. Il nous faut absolument éviter une hausse du nombre d’étrangers ne pouvant être ni régularisés ni expulsés.

Depuis trop longtemps maintenant, madame la secrétaire d’État, les obligations de quitter le territoire français sont insuffisamment exécutées. Nous savons que vous travaillez à pallier cette carence. Il faut absolument que nous y parvenions, ce qui implique que nous nous fixions une obligation de résultat.

Pour la quatrième année consécutive, le taux d’exécution des OQTF est inférieur à 7 %. Nos concitoyens ne peuvent pas le comprendre. Lorsque l’intéressé ne s’exécute pas volontairement, nous devons disposer des moyens de l’y contraindre.

À ce titre, il faut poursuivre le travail que vous avez engagé, madame la secrétaire d’État, en concluant des accords de réadmission avec les pays d’origine, et ce afin d’obtenir les incontournables laissez-passer consulaires.

Jugeant que les hausses de crédits sont insuffisantes au regard des défis qui nous attendent, la commission des finances du Sénat a émis un avis défavorable sur le budget de la mission.

Pour ce qui nous concerne, nous sommes convaincus que la question migratoire est primordiale pour l’ensemble de nos concitoyens et, plus encore, pour ceux des territoires les plus exposés. Je pense notamment aux territoires ultramarins, comme Mayotte, où une pression considérable met à mal le pacte républicain.

L’intégration est une problématique cruciale, dans laquelle nous devrions nous impliquer pour assurer la cohésion de notre nation. Les défis sont immenses, mais la France ne peut pas les relever seule. L’Union européenne doit apporter des solutions, ce qui passera par l’adoption de son pacte sur la migration et l’asile.

Même si l’immigration pourrait bénéficier d’un budget plus important, le groupe Les Indépendants votera les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Florennes.

Mme Isabelle Florennes. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2024 fait de la transition écologique, tout comme du réarmement des services publics, de la lutte contre la fraude, de la réduction des déficits publics et de la lutte contre l’inflation, une priorité absolue.

N’aurait-il toutefois pas fallu ajouter à ces axes prioritaires la politique d’immigration et d’intégration, compte tenu des débats qui nous agitent depuis plusieurs mois et qui résultent en partie de la forte accélération des flux migratoires ?

Certes, les crédits de la mission sont en hausse de 47 millions d’euros en crédits de paiement, mais ils sont en baisse de 34 % en autorisations d’engagement.

Certes, le périmètre de la mission a évolué cette année, mais les crédits de paiement apparaissent justement comme le meilleur indicateur de l’évolution de ce budget en 2024.

En neutralisant les effets de périmètre, ces crédits de paiement sont en hausse d’environ 5,4 %, soit une augmentation de 109 millions d’euros. À l’inverse, les crédits restent sur une dynamique baissière en autorisations d’engagement.

À l’heure où nous nous engageons à modifier sensiblement notre législation en matière d’immigration, n’est-il toutefois pas temps d’augmenter les autorisations d’engagement de la mission, plutôt que de les baisser ?

Je suis consciente que le présent budget ne représente qu’une faible part des crédits de l’État dans ce domaine – 7,9 milliards d’euros pour 2024 –, mais le renforcement de notre législation doit aussi s’accompagner d’une vision budgétaire pour l’avenir.

La mission se compose de deux programmes, dont les évolutions budgétaires sont, dans chaque cas, significatives.

Le budget du programme 303 « Immigration et asiles » augmente de 259 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à 2023, une hausse liée à la lutte contre l’immigration irrégulière et à la poursuite du plan permettant l’augmentation du nombre de places en centre de rétention administrative, celui-ci devant atteindre 3 000 places en 2027, contre 1490 en 2017.

En outre, et comme l’année dernière, les crédits demandés au titre de ce programme n’intègrent pas les dépenses relatives à l’accueil des bénéficiaires de la protection temporaire en provenance d’Ukraine, dont le nombre est estimé à 95 000.

Le système d’information France-Visas a pour vocation la dématérialisation des procédures d’instruction des demandes de visa et l’externalisation de la constitution des dossiers, notamment dans les pays où la demande est la plus forte ; les moyens alloués à ce programme sont-ils susceptibles d’augmenter ?

Concernant la dématérialisation des procédures de dépôt et d’instruction des demandes de titre de séjour, si les rapporteurs – et je souscris à leur point de vue – soulignent l’intensification du processus en cours, ce qui est positif, force est de constater que les délais de traitement des demandes de rendez-vous sont encore trop longs et que la plateforme est très souvent saturée, notamment dans les départements franciliens.

Par ailleurs, bien que des renforts en personnel, notamment vacataire, aient été fournis, les effectifs restent largement insuffisants dans les services d’accueil des étrangers de certaines préfectures, comme les rapporteurs l’ont d’ailleurs souligné.

Enfin, le programme « Intégration et accès à la nationalité française », qui retrace les crédits alloués à la politique d’intégration des étrangers primo-arrivants et des réfugiés, connaît une baisse de son budget de 20 %, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement, alors même que, selon nous, un effort budgétaire en ce domaine est indispensable.

D’une façon plus générale – en cela, je partage la position de mes collègues de la commission des lois et de ceux de la commission des finances –, le budget de la présente mission ne répond pas aux défis auxquels nous sommes – et allons être – confrontés en matière d’immigration et d’intégration ; nous ne voterons donc pas ses crédits.