Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Non, elle ne l’écrasera pas du tout ! (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Les décrets sont prêts. Ils ont reçu l’accord de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF). Nous les publierons la semaine prochaine, et, avec eux, plusieurs guides.

Le premier est une sorte de guide très simple, en seize pages. Il rappelle précisément le pourquoi et le comment de ces COP. Nous sommes allés tellement vite sur les modalités, les objectifs et les difficultés que nous avons fini par oublier le reste. J’étais à Dieppe vendredi dernier pour faire un cas pratique avec les élus concernés par l’EPR de Penly, qui est l’un des grands projets d’envergure nationale. J’envisage également de me rendre dans un département, qui compte énormément de communes, pour me pencher sur le cas pratique de la garantie communale, qui inquiète dans certains territoires et réjouit ailleurs.

Il ne m’a pas échappé que certains ont tenté de remettre une pièce dans la machine. Dans quelques jours, nous disposerons d’éléments qui nous permettront d’avancer.

Ce matin, pendant un peu plus d’une heure, j’ai répondu à une quinzaine de questions au moment du lancement du Salon des maires. À ma grande surprise, il n’y en a eu aucune sur le ZAN. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Ça va venir ! La question n’est pas encore arrivée sur le terrain !

M. Christophe Béchu, ministre. C’est la preuve qu’il existe maintenant une attente pour que les choses bougent. Pour être précis, sur 120 questions, une dizaine seulement concernaient le ZAN.

Pour autant, en descendant à l’échelle des territoires, on s’aperçoit qu’il existe un décalage par rapport aux différentes craintes, car nous savons tous que la lutte contre l’étalement urbain n’est pas une option.

En ce qui concerne les COP, je vous invite à me suivre. La semaine prochaine, je me déplace lundi dans le sud de la France, jeudi en l’Occitanie et vendredi en Nouvelle-Aquitaine. Le meilleur moyen de savoir ce qu’est une COP, d’être rassuré et de constater qu’il ne s’agit pas d’un exercice normatif, c’est d’y assister.

Quel est le diagnostic ? C’est tout simplement la photo des émissions de l’année précédente. Nous demanderons ensuite aux collectivités régionales dans quels domaines elles peuvent aller plus vite. Certaines pourront mettre l’accent sur la géothermie, quand d’autres préféreront développer le biométhane, la stratégie sur la biodiversité ou les services express régionaux métropolitains. Nous additionnons les projets des territoires. (M. François Patriat applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Chevalier.

M. Cédric Chevalier. Monsieur le ministre, le fonds vert aide nos collectivités et leurs groupements à s’engager pleinement dans la transition écologique.

Toutes les communes, y compris rurales, peuvent prétendre à ces crédits, et nous nous en réjouissons. Ce fonds est un succès, salué par les élus.

Pourtant, certains retours de terrain alertent encore quant à la difficulté d’accès aux subventions. Les démarches restent longues et complexes, surtout pour les collectivités qui sont peu dotées en ingénierie.

Prenons un exemple très concret, tiré de mon département, la Marne, et lié à l’éclairage public, sujet qui représente près du quart des dossiers du fonds verts, d’après les chiffres publiés par votre ministère en juin dernier. Pour déposer un dossier visant à rénover son parc d’éclairage public, une commune doit fournir une série d’indicateurs.

Je pense en particulier à la puissance totale économisée, à la réduction de la densité surfacique moyenne de flux lumineux installé sur la surface du projet ou encore à la surface de trame noire créée par le projet. Ce sont des éléments parfois compliqués à obtenir, surtout pour certaines petites communes qui s’appuient sur un réseau d’éclairage public vétuste.

De plus, certains élus s’étonnent du fait que les critères du fonds vert outrepassent les normes. Si nous gardons l’exemple de l’éclairage public, la température de couleur maximale demandée pour le fonds est de 2 700 kelvins alors que la réglementation impose au maximum 3 000 kelvins.

Notre rôle est de continuer à bâtir collectivement un environnement propice à l’adaptation de nos collectivités territoriales au changement climatique.

Dès lors, pouvez-vous énoncer avec précision vos ambitions pour simplifier les candidatures au fonds vert, afin de permettre à toutes les collectivités de soumettre leurs projets dans les meilleures conditions ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question. À la minute où je vous parle, le fonds vert, c’est plus de 17 500 demandes de subventions auprès de l’État, soit 5 milliards d’euros de demandes de crédits pour 2 milliards d’euros disponibles.

Près de 8 000 dossiers ont été acceptés, et 2 milliards d’euros de subventions seront accordés aux collectivités territoriales pour accélérer sur les questions de biodiversité, d’adaptation ou d’atténuation. Pour avoir un ordre de grandeur, 2 milliards d’euros, c’est le doublement de l’enveloppe de soutien à l’investissement aux collectivités territoriales ; il s’agit en effet à peu près du montant auquel on parvient lorsque l’on additionne la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR).

L’élément qui explique très certainement le succès du fonds est que nous avons refusé les appels à projets et les appels à manifestation d’intérêt, afin que le dispositif soit souple. Corollaire de cette souplesse, cela a donné lieu parfois à des souplesses préfectorales qui se sont traduites par des rigidités…

Permettez-moi de bien préciser les choses. Voilà un an, nous nous demandions si ce fonds allait trouver son public, s’il y aurait suffisamment de dossiers et si les portes d’entrée que nous avions imaginées allaient être opérationnelles.

L’afflux des dossiers nous a conduits à retenir un peu moins de la moitié des demandes, en essayant de mettre plutôt l’accent sur les projets qui pourraient démarrer en 2023, l’idée étant de faire se rejoindre la question du financement et celle de l’urgence. Cependant, je dois le reconnaître, sur certains territoires, d’aucuns ont voulu « innover » et ont ajouté des critères. Nous allons donc faire en sorte que l’édition numéro deux s’applique de manière différente.

Ce sont 2 350 dossiers de rénovation thermique des bâtiments et presque 2 000 dossiers de rénovation des éclairages publics, pour un peu plus de la moitié du fonds, qui ont été déposés. C’est beaucoup plus que sur les autres champs. Voilà pourquoi il y a parfois eu cette tentation d’ajouter des critères. (M. François Patriat applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Pillefer.

M. Bernard Pillefer. La loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables vise à mettre en place sur le territoire des zones d’accélération des énergies renouvelables (ZAER). C’est aux communes qu’il revient de définir, après concertation avec leurs administrés, les zones dans lesquelles elles souhaitent implanter prioritairement des projets d’énergies renouvelables.

Depuis le 1er juillet 2023, et jusqu’à la fin de l’année 2023, les élus locaux sont donc invités à faire des propositions de zones d’accélération.

Il y a un mois, ma collègue Annick Jacquemet interrogeait le Gouvernement sur la publication de décrets visant à mettre en œuvre des ZAER. La ministre de la transition énergétique nous avait alors informés que la définition de ces zones ne requérait pas de décrets.

Pourtant, le dispositif manque singulièrement de clarté. Les communes doivent déterminer leurs zones d’accélération avant le 31 décembre 2023. Mais nous avons aussi appris que, passé cette échéance, il restera possible pour les communes de communiquer des zones d’accélération à l’État. Certaines sont actuellement sollicitées avec insistance par leur préfet pour présenter leur carte d’accélération.

Que se passera-t-il en cas de carence de zones ? En particulier, monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer qu’aucun régime de sanction n’est prévu dans le cas où les communes ne désigneraient pas de ZAER ? Dans ce cas, est-il par ailleurs prévu que l’État prenne le relais ? Si oui, de quelle manière ? En concertation avec les communes ou unilatéralement ? Nous avons besoin d’éclaircissements.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Pillefer, je suis à la fois ému et touché par votre question, qui concerne plus particulièrement le portefeuille de ma collègue Agnès Pannier-Runacher, mais je me ferai un immense plaisir de vous apporter quelques éclairages sur les énergies renouvelables.

Vous le savez, nous mettons en France en moyenne deux fois plus de temps que nos voisins allemands pour faire aboutir des projets d’énergie renouvelable. C’est vrai pour le photovoltaïque, pour l’éolien et aussi pour l’éolien offshore.

Une loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a été votée. Certaines personnes ont été tentées d’imaginer de possibles droits de veto sur certains projets, ce qui a abouti à un mécanisme de consultation des maires, via les ZAER, avec une date butoir fixée au 31 décembre 2023. Au-delà de cette date, il n’y aura pas de sanction.

Mme la ministre l’a précisé, si ce délai devait être dépassé de quelques jours, ce ne serait pas un drame. Si des élus devaient donc compléter ou envoyer leurs ZAER avec un peu de retard, cela ne poserait pas de difficultés majeures.

Permettez-moi néanmoins de vous faire remarquer que si cette date butoir avait été fixée en mars ou en juin, d’aucuns n’auraient pas manqué non plus de trouver cette échéance trop rapide ! (Mme Audrey Linkenheld sexclame.)

Nous avons collectivement le souvenir un peu douloureux de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, votée à l’unanimité en 2005, qui prévoyait une échéance de dix ans pour atteindre l’objectif de mise en accessibilité des bâtiments. En 2015, nous nous sommes rendu compte que nous n’étions pas prêts. Peut-être aurions-nous pu faire ce constat un peu plus tôt ? J’assume donc le fait d’avoir fixé un délai rapproché, l’idée étant d’avoir le plus de zones d’accélération possible, afin de pouvoir renseigner les acteurs.

Il y aura deux cas de figure. Certaines collectivités souhaiteront délibérer, mais elles signaleront au préfet qu’elles ne sont pas totalement prêtes. Nous leur accorderons sans difficulté un délai supplémentaire. Mais d’autres collectivités n’envisageront pas de définir leurs ZAER. À ce moment-là, la question du rôle de l’État pour préciser ces zones d’accélération pourra se poser. Sur ce point, je vous renvoie vers ma collègue.

Quoi qu’il en soit, la date du 31 décembre 2023 est une très forte indication, mais il n’y aura pas de sanction à compter du 1er janvier 2024. Par ailleurs, un délai complémentaire sera accordé aux communes pour communiquer les documents aux préfectures.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc.

M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, il faut le saluer, avec votre planification écologique, l’État amorce un virage réel en matière de transition. Ça va un peu plus loin et ça va un peu plus fort : tant mieux !

Néanmoins, le décalage entre l’immensité des besoins et les moyens déployés est réel : 7 milliards en 2024, et encore en recyclant des crédits là où il en faudrait trois fois plus. Le challenge est donc réel. Ce sera l’objet de nos débats lors de l’examen du projet de loi de finances.

En matière de transition écologique, il n’y a pas que l’enjeu stratégie bas-carbone. Or, dans vos COP, il n’y a que six mois pour coopérer et deux mois seulement pour construire dans chaque région des diagnostics partagés, qui s’adressent essentiellement – quand on regarde les invités – aux grandes collectivités territoriales.

Si nous voulons vraiment associer les collectivités, il faut qu’elles aient les moyens de contribuer. Urgence ne veut pas dire précipitation. Je viens d’entendre votre réponse sur les constructions de diagnostics partagés dans ces COP. Grosso modo, si j’ai bien compris votre propos, ce serait « à la carte ». C’est ce qui ressort aussi de la circulaire de la Première ministre et des échanges que j’ai eus avec deux chargés de mission responsables des COP dans deux régions différentes.

Monsieur le ministre, si chaque territoire rédige des feuilles de route à la carte, en fonction de ses choix, quelle est l’articulation avec la feuille de route nationale ? Comment atteindra-t-on les objectifs qui ont été présentés en septembre ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Tout d’abord, monsieur le sénateur Blanc, et de manière un peu plus personnelle, je me réjouis de vous entendre vous exprimer pour la première fois dans cet hémicycle. Cela me rappelle un passé commun, même si vous adoptiez alors parfois des postures moins constructives en vous adressant à moi : je savoure aussi la façon dont nous allons pouvoir œuvrer en faveur d’un champ qui, par définition, devrait tous nous réunir.

En effet, le sujet de la transition écologique, ce n’est pas de savoir qui marque le but ; c’est de savoir comment on sauve le terrain !

Il y a, en effet, la question des financements et il y a celle de la méthode.

Sur les financements, 10 milliards d’euros seront débloqués l’année prochaine. Car il faudra évidemment ajouter les autorisations d’engagement aux crédits de paiement compte tenu du fait, en particulier dans le domaine du ferroviaire, que l’État ne paie pas l’année où les études sont lancées. Ce sont donc bien 10 milliards qui seront engagés. C’est une première marche vers les 33 milliards d’investissements publics jugés nécessaires par le rapport Pisani-Ferry.

Par ailleurs, il convient de relever au passage un effet de levier intéressant. On s’est en effet rendu compte dans le cadre du fonds vert que les 2 milliards d’euros qui ont été investis génèrent en moyenne 10 milliards d’euros d’investissement si l’on additionne les projets rendus possibles.

Sur la démarche des COP, je vous renvoie à ce que j’ai indiqué au sénateur Gillé. On ne part pas d’une feuille blanche. Le délai peut sembler bref, mais il existe d’ores et déjà sur la quasi-totalité des territoires des planifications, des projets, des perspectives, des investissements qui ont été conduits par les régions, par les départements, par les intercommunalités. Il convient de les additionner.

Nous avons choisi comme date le mois de juin de l’année prochaine, pour deux raisons.

D’abord, nous connaîtrons alors la somme des besoins avant d’avoir commencé à construire le projet de loi de finances pour 2025. Nous pourrons alors aborder la question des moyens et des potentiels des engagements financiers de l’État avec une idée plus précise des objectifs à atteindre.

Ensuite, cette date nous permettra de nous assurer du bouclage. En effet, énormément de leviers sont à la main des territoires, mais d’autres dépendent de l’État ou des engagements internationaux. C’est la somme de tous ces éléments qui devra nous permettre de tenir nos objectifs, en assumant une démarche ascendante et une démarche descendante qui convergent l’une vers l’autre.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour la réplique.

M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, je vois que vous n’avez rien perdu de votre capacité à apporter des réponses de qualité, à ce détail près que ma question concernait les communes rurales qui ne sont pas associées dans les COP.

L’enjeu est bien de savoir comment elles vont pouvoir contribuer : 90 % du territoire n’est pas artificialisé. Ce sont elles qui en ont principalement la responsabilité. Si elles ne sont pas en mesure d’élaborer des diagnostics précis pour enrichir la feuille de route régionale, nous aurons du mal à évaluer les besoins financiers qui seront indispensables pour conduire à bien la transition écologique. Voilà ma crainte !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre. L’Association des maires ruraux de France (AMRF) est systématiquement associée à la totalité des COP. La Bretagne envisage de lancer sa COP avec 750 parties prenantes. (M. Cédric Chevalier fait un signe de dénégation.)

Il y aura des dispositifs différents, mais l’association du mode rural est une réalité. J’en veux pour preuve le Grand atelier des maires ruraux pour la transition écologique, conduit par la vice-présidente Fanny Lacroix. Si ses projets et ses travaux vous passionnent, je ne peux que vous en faire la publicité et vous inviter à les regarder.

Très concrètement, la dotation pour la valorisation des aménités rurales décidée dans le cadre de ce budget, monsieur le commissaire aux finances, aura pour vocation d’accompagner les 88 % du territoire occupé par la ruralité.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc.

M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, l’enjeu est d’associer en profondeur les collectivités de ce pays. Si nous n’avons pas la possibilité de les associer territoire par territoire, non pas dans le cadre de leurs associations, mais sur la base de ce qu’elles produisent, nous louperons, me semble-t-il, le coche !

Voilà pourquoi nous aurions sans doute eu besoin d’un peu plus de temps pour élaborer un diagnostic partagé.

Il faut aller plus loin que la simple consultation de l’AMRF ou autres associations d’élus pour élaborer des diagnostics, afin de mieux voir ce que sont les planifications dans chacune des collectivités.

Aujourd’hui, on le sait, l’objectif est d’encourager la planification, y compris à l’échelle des petites communes rurales. Je crains que nous n’ayons raté là une occasion. Au final, les COP permettront, comme je le soulignais initialement, de nous inscrire dans la stratégie nationale bas-carbone, de tenir compte des enjeux de mobilité et d’énergie. Mais quid des enjeux d’artificialisation des terres et de reconversion des sites ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Monsieur le ministre, réservoirs naturels, espaces de production d’énergies renouvelables, trésors de biodiversité, puits de carbone, les espaces ruraux représentent d’importants potentiels écologiques sur 88 % de la surface de notre pays.

Les collectivités locales, qui sont sans nul doute des rouages essentiels de la transition écologique, sont en première ligne pour faire face aux catastrophes naturelles et aux effets du dérèglement climatique.

Nombre d’entre elles sont engagées de longue date dans l’Agenda 21, les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), les projets alimentaires territoriaux (PAT), la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi).

En 2024, le cadre unique et pluriannuel de politique territoriale prendra à l’échelle des intercommunalités la forme d’une seconde génération de contrats de relance et de transition écologique (CRTE), rebaptisés « contrats pour la réussite de la transition écologique ».

Pour nombre d’élus locaux, les CRTE n’ont pas suffisamment rempli leur promesse de contrat intégrateur et n’ont fait qu’ajouter une couche au millefeuille des documents d’aménagement du territoire. Dans un récent rapport d’octobre dernier, la Cour des comptes constate d’ailleurs un bilan mitigé.

Monsieur le ministre, le 14 novembre dernier, lors du lancement d’une COP régionale, vous admettiez que les CRTE étaient « améliorables ».

La seconde génération de ces contrats annoncée prendra-t-elle en compte ces critiques ? Comment comptez-vous remédier à ces défauts pour que les CRTE soient des contrats intégrateurs porteurs d’un véritable projet de territoire, avec les moyens financiers et en ingénierie adéquats pour les collectivités ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Un très grand nombre de projets existent déjà dans les territoires ruraux. On aurait donc tort de penser que c’est parce qu’on lance la planification que les maires se saisissent de ces enjeux ! Certes, il existe autant de situations que de communes. Mais, globalement, les élus se sont jetés à l’eau.

Pour avoir été dans une vie antérieure récente président d’une communauté urbaine dans laquelle la plus petite commune comptait moins de 150 habitants, je puis vous assurer que celle-ci n’était pas la moins active pour voir comment, à son échelle et à son niveau, décarboner, modifier ou piétonniser une partie de son espace.

Vous avez cité à juste titre les propos que j’ai tenus le 14 novembre, et que je ne renie pas, ainsi que les critiques mitigées de la Cour des comptes sur les CRTE. Ils ont eu pour mérite de permettre le recensement des projets existants au début du mandat, en période post-covid, et de constater parfois certaines convergences dans la façon d’avancer.

Mais ils présentaient un biais. Ce recensement de projets ne donnait pas lieu à un recensement des aides et des financements susceptibles de les accompagner. Nous avions donc une liste de ce qui existait, mais sans les solutions allant avec.

Avec cette nouvelle génération, nous souhaitons – comme je l’ai dit, peut-être maladroitement, tout à l’heure – que « les tuyaux » se rencontrent. Le projet de loi de finances permettra de recruter dans chaque département un agent supplémentaire pour accompagner cette transition écologique et ce suivi. En passant de l’ancienne à la nouvelle génération de ces revues de projets, nous espérons en milieu d’année prochaine, au moment de la finalisation des COP, connaître la hauteur des besoins et des montants qui devront être alloués afin que le dispositif fonctionne. Tel est l’enjeu pour les six prochains mois.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour la réplique.

Mme Marie-Claude Varaillas. La transition écologique exige des outils lisibles, ainsi que des fonds suffisants à disposition des collectivités.

Nous savons par exemple que 81 % de la consommation énergétique des communes est issue des bâtiments publics, souvent anciens et mal isolés, et que nous avons, par des travaux de rénovation, beaucoup à gagner en matière d’émission de CO2.

Le fonds vert est une très bonne initiative. Ses crédits augmentent, et je m’en félicite. Mais il ne représente que 25 % des subventions. Il faut trouver les 75 % de financements restants !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre. Je ne puis que vous donner raison, et j’irai même plus loin : notre pays compte 480 millions de mètres carrés de bâtiments publics si l’on additionne ceux de l’État et ceux des collectivités territoriales. L’État a un devoir d’exemplarité. Nous ne pouvons pas nous contenter d’expliquer aux particuliers qu’ils doivent réaliser des travaux ou aux entreprises qu’elles doivent avancer sur le décret tertiaire sans agir sur nos propres bâtiments !

Le projet de loi de finances comprend donc des crédits pour l’immobilier de l’État, avec 1,5 milliard d’euros de crédits fléchés en direction des 43 908 écoles, afin de les accompagner de manière prioritaire. Ces dernières sont en effet bien souvent le premier poste de dépenses à l’échelle d’une commune, en particulier les plus petites d’entre elles.

En ce qui concerne le bouclage global, je vous renvoie au plan présenté avec Gabriel Attal le 14 septembre dernier, à la fois sur les prêts de la Caisse des dépôts et consignations, la mobilisation de la DSIL ou de la DETR et le complément de fonds vert, qui permettra d’avancer sur le dispositif.

Enfin, nous aurons l’occasion bientôt d’évoquer le tiers financement, qui commence à se déployer. Il s’agit d’un moyen alternatif d’accélérer la rénovation des bâtiments.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold. (Applaudissements sur des travées du groupe RDSE.)

M. Éric Gold. Monsieur le ministre, je ne vous parlerai pas des « mesures spectaculaires » réclamées par l’ONU. J’évoquerai l’implication de l’ensemble de nos territoires dans toute leur diversité. Pour cela, les outils et les moyens donnés aux collectivités doivent être à la hauteur.

Je pense par exemple aux plans climat-air-énergie territoriaux, qui semblent un peu à la peine, alors qu’ils sont déployés à l’échelon intercommunal, ce dernier étant certainement le plus adapté pour la planification écologique, puisqu’il est synonyme de bassin de vie.

Selon l’Ademe, si la quasi-totalité des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) devant réaliser un PCAET avaient lancé la démarche cet été, seuls 57 % d’entre eux l’avaient déjà réellement adopté. Par ailleurs, très peu ont un objectif égal ou supérieur à l’objectif national de neutralité carbone en 2050.

Au-delà des besoins massifs en investissements et du millefeuille administratif, qui gêne parfois les élus et les agents dans la conduite de leurs projets de transition, il peut exister un manque criant de formation et de sensibilisation des élus aux enjeux environnementaux.

La formation, l’accompagnement et l’augmentation des capacités d’ingénierie publique pourraient accélérer la déclinaison territoriale des objectifs nationaux, notamment dans les petites collectivités.

Conscients des enjeux et des besoins, les maires ruraux se sont saisis du sujet, à travers un atelier qui a réuni 100 élus volontaires pendant six mois, aboutissant à une position politique de 90 pages, conçue comme une boîte à outils.

Monsieur le ministre, il y a un an, en ouverture du Congrès des maires, vous avez annoncé des temps de formation à la transition écologique pour tous les édiles, avec l’objectif d’en former au moins 30 000. D’une part, un tel projet ne semble pas avoir pris l’ampleur espérée. D’autre part, il ne paraît pas concerner les agents publics, qui sont pourtant aussi en première ligne sur ces dossiers.

J’aimerais savoir si ces temps de formation pour les maires commencent, selon vous, à porter leurs fruits, et s’ils incluent également les agents des collectivités territoriales.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Gold, vous avez évoqué les PCAET, la formation et le grand atelier de la transition écologique.

Si l’on voit le verre à moitié vide, les PCAET n’ont été adoptés que sur 57 % des territoires. Je veux tout de même insister sur le fait que la démarche est aujourd’hui lancée dans 96 % des EPCI, et je pense sincèrement qu’au début de l’année prochaine – les chiffres dont nous disposons datent de cet été –, le bilan commencera à être proche de l’objectif.

La formation est clé.

Nous sommes partis non pas d’un « truc » pensé dans les ministères, mais d’un exemple concret : ce qui s’est fait avec une association locale des maires dans l’Indre. Et nous avons dupliqué ce dispositif, pour parvenir, sur le premier semestre, à 500 maires formés.

Je maintiens l’objectif de 30 000 maires formés d’ici à la fin de ce mandat municipal. Le rythme auquel nous allons parvenir permettra de les compter en milliers entre maintenant et l’année prochaine. Nous voulions être certains que le format correspondait aux besoins.

Quid de ce format ? Il ne s’agit pas du rapport détaillé du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Ce sont les conséquences, dans un département, de ce qu’est d’ores et déjà la réalité du dérèglement climatique : l’accélération du nombre de jours de sécheresse, la hausse des températures moyennes, les perspectives telles que définies par les interventions de Météo-France, de l’Office français de la biodiversité (OFB), de l’Office national des forêts (ONF) – bref, non pas des cabinets de conseil extérieur, mais les opérateurs de l’État, qui utilisent l’ensemble des connaissances qu’ils ont acquises.

Dans ce domaine, je veux aussi souligner que l’Ademe a lancé voilà quelques heures au Salon des maires – bien évidemment avec le concours du ministère – le réseau des élus référents pour la transition écologique et énergétique. Derrière, il y a l’idée que, dans chaque commune de France, une femme ou un homme peut bénéficier d’une formation par l’Ademe et devenir le point de remontée des difficultés et des sujets sur lesquels nous avons potentiellement des contraintes diverses, depuis l’architecte des Bâtiments de France (ABF) jusqu’aux panneaux photovoltaïques sur les bâtiments en bois, etc.

C’est à la fois par la formation des maires et des conseillers municipaux et l’appui aux opérateurs et aux agents de l’État que nous serons capables d’accélérer le mouvement partout.