M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Comme le constatait la Cour des comptes dans son rapport de 2022 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, l’évaluation et le suivi des effets induits par les conventions conclues entre les professionnels de santé et l’assurance maladie sont insuffisants.

Leurs incidences ne sont pas non plus connues du Parlement en temps utile. J’en veux pour preuve ce dont nous débattions tout à l’heure, à savoir que nous ne disposons pas de la traduction financière des nouvelles conventions nationales en cours de négociation.

Le présent amendement tend à introduire deux modifications au régime applicable à ces conventions, afin de mieux en maîtriser les répercussions financières.

D’une part, il vise à permettre au ministre chargé de la sécurité sociale et de la santé de s’opposer à l’entrée en vigueur d’une convention dont les conséquences financières remettraient en cause de manière substantielle – je dis bien substantielle – la trajectoire des dépenses d’assurance maladie votée par le Parlement.

D’autre part, il vise à remplacer dans le code de la sécurité sociale le délai de six mois nécessaire à l’entrée en vigueur d’une mesure conventionnelle dépensière par un délai subordonné à la date d’entrée en vigueur d’une loi de financement de la sécurité sociale tenant compte de ses conséquences sur la trajectoire des dépenses d’assurance maladie.

Pour le dire plus simplement, nous souhaitons pouvoir cerner les enjeux financiers qui découlent des négociations.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. La commission propose de modifier le régime applicable aux conventions, afin de mieux en maîtriser les incidences financières.

Je rappelle que le code de la sécurité sociale prévoit déjà un mécanisme suspendant l’entrée en vigueur de revalorisations conventionnelles, dès lors que le comité d’alerte de l’Ondam considère qu’il existe un risque sérieux de dépassement.

D’ailleurs, les pouvoirs publics mettent en œuvre ce type de mesure sans même attendre le déclenchement d’un tel mécanisme. Par exemple, en 2023, l’assurance maladie a décalé de six mois l’entrée en vigueur du bilan de soins infirmiers pour les patients dépendants de moins de 85 ans, car la trajectoire de remboursement excédait déjà les prévisions.

Je rappelle aussi que les accords conventionnels respectent l’enveloppe de l’Ondam votée en loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que la trajectoire pluriannuelle fixée par la loi de programmation des finances publiques ; en outre, les ministres peuvent déjà s’opposer à leur publication, le cas échéant.

Enfin, la commission propose de modifier les dispositions relatives au délai de six mois nécessaire à l’entrée en vigueur de nouvelles mesures conventionnelles. Cette modification reviendrait, dans la plupart des cas, à supprimer ce délai. Je ne suis pas favorable à une telle évolution, car nous savons que le mécanisme actuel est utile pour réguler les dépenses de soins de ville.

Pour l’ensemble de ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je doute un peu de l’opérationnalité du dispositif proposé par la commission.

Mes chers collègues, nous allons bientôt voter le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or notre maîtrise de la trajectoire des dépenses est toute relative, puisque, in fine, ce texte sera adopté via le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution : c’est donc le Gouvernement seul qui établira le montant de l’Ondam.

J’ajoute qu’un certain nombre de négociations conventionnelles viennent de s’engager, et que le Gouvernement n’en a pas tenu compte dans ses prévisions financières pour 2024. Admettons, par exemple, que ces négociations aboutissent avec les uns ou les autres – on parle beaucoup des négociations avec les médecins, mais il en existe avec les différentes catégories de soignants – et qu’elles conduisent à des revalorisations tarifaires. Imaginons que les infirmières obtiennent enfin une revalorisation de leur lettre clé : que fera-t-on ? Devra-t-on considérer que notre vote n’a pas été respecté ?

L’amendement devrait a minima préciser que le dispositif ne peut s’appliquer que dans le cas où une négociation conventionnelle conduirait au dépassement du seuil d’alerte – et encore, l’amendement resterait difficilement applicable.

Si je comprends bien les motifs pour lesquels la commission a fait cette proposition – je pense notamment à la coexistence d’une absence effective de régulation des dépenses de soins de ville et d’un contrôle plus strict de l’hôpital qui, lui, est soumis à des mises en réserve prudentielles –, je considère que tout cela n’est pas très adroit.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. J’entends les remarques de notre collègue Jomier et je les comprends. Cet amendement donne surtout l’occasion à la commission de délivrer un message : nous déplorons l’absence d’anticipation et de prévisions financières.

Pour ne citer que cet exemple, l’objectif de dépenses en matière de soins de ville est continuellement dépassé. (M. Bernard Jomier acquiesce.) Il s’agit certes d’un système de guichet, mais on constate en permanence que les prévisions sont allègrement dépassées.

Avec cet amendement, non seulement on considère qu’il faut mettre un peu de sérieux dans tout cela, mais on demande un minimum de prévisibilité.

J’espère que le Gouvernement, lorsqu’il réfléchit aux négociations conventionnelles, en anticipe les conséquences financières. J’imagine mal qu’on négocie avec les professionnels de santé sans avoir la moindre idée des incidences budgétaires de ces négociations. Sans de telles prévisions, il serait vraiment bien difficile de négocier.

Il faut a minima que nous parvenions à faire en sorte que l’Ondam relatif aux soins de ville soit enfin respecté. Dans ce cadre, les dépassements ne pourraient être tolérés que pour les seules dépenses de guichet.

De surcroît, nous pensons qu’il faut anticiper sur les incidences financières des négociations conventionnelles, de sorte à améliorer le pilotage des dépenses d’assurance maladie. Tel est le message que nous défendons à travers cet amendement.

M. Bernard Jomier. C’est donc un amendement d’appel ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 274.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel avant l'article 27 - Amendement n° 274
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024
Article 27 (début)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 27.

L’amendement n° 1244, présenté par MM. Temal et Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, M. Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Avant l’article 27

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 114-8 du code des relations entre le public et l’administration est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du I est complété par les mots : « , ainsi que pour établir son droit au bénéfice éventuel d’une prestation ou d’un avantage prévus par des dispositions législatives ou des actes réglementaires et, le cas échéant, lui attribuer lesdits prestations ou avantages. » ;

2° Le premier alinéa du II est ainsi modifié :

a) Les mots : « peuvent échanger » sont remplacés par le mot « échangent » ;

b) Le mot : « éventuellement » est supprimé.

La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Cet amendement, dont le dispositif s’inspire de la proposition de loi, déposée par Rachid Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, visant à lutter contre le non-recours aux droits et prestations sociales, tend à faire de l’échange des données entre les différentes administrations, aujourd’hui conçu comme un outil d’information des usagers, un outil opérationnel d’attribution de droits sociaux, et ce dès la promulgation de la présente loi, et non à l’horizon de 2027, comme le prévoit l’expérimentation lancée par le Gouvernement.

Dans la période de forte inflation que nous connaissons, ce sont nos concitoyens les plus fragiles qui subissent le plus durement les effets de la hausse des prix, notamment ceux des biens de première nécessité. Or le non-recours aux prestations sociales peut atteindre plus de 60 % selon les dispositifs concernés.

Nous défendons donc une démarche de bon sens qui permettrait à nos concitoyens de bénéficier pleinement des droits auxquels ils sont éligibles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Nous comprenons parfaitement l’objet de cet amendement et votre intention est tout à fait légitime, ma chère collègue.

Cependant, les modifications que vous proposez sont assez marginales, elles portent sur les dispositions générales du code des relations entre le public et l’administration et elles sont en réalité satisfaites par les dispositions spécifiques du code de la sécurité sociale.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous comprenons l’objectif que vous visez, madame la sénatrice, et nous partageons votre souci de lutter contre le non-recours – c’est également un enjeu important pour le Gouvernement.

La loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, a déjà permis beaucoup d’avancées en ce sens.

La lutte contre le non-recours passera aussi, et surtout, par la mise en œuvre de l’un des engagements du Président de la République, le projet de solidarité à la source.

Dès le 1er janvier prochain, les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) et de la prime d’activité pourront déclarer leurs ressources sur la base du montant net social. Cette ligne sur le bulletin de paie constitue un premier effort de simplification qui permettra de supprimer les erreurs, les indus et les rappels fragilisant la situation des allocataires.

Au premier trimestre de l’année 2025, les déclarations des allocataires seront préremplies pour simplifier encore davantage leurs démarches et encourager le recours aux droits.

Par ailleurs, comme vous le savez, nous complétons dès cette année nos efforts en étendant le dispositif « territoires zéro non-recours » à trente-neuf collectivités. C’est l’ensemble des acteurs de la solidarité qui travailleront ensemble pour aller vers les publics les plus éloignés de leurs droits.

Vous le constatez, madame la sénatrice, le Gouvernement est résolument engagé dans la lutte contre le non-recours. Modifier encore les textes n’accélérera pas les travaux en cours. Une telle démarche étant sans doute inutile, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Le non-recours accroît les risques de basculement dans la précarité. Il résulte souvent, selon les différentes études publiées, d’un manque d’informations, qui découle lui-même, dans nos territoires, d’un vrai repli des services publics qui diffusaient jusqu’à maintenant, au plus près des citoyens, ces informations sur les aides existantes.

Les maisons et les bus France Services ne peuvent pas tout faire, d’autant qu’ils impliquent un effort des collectivités locales elles-mêmes pour pallier l’absence des services publics dans nos territoires, en particulier ruraux, et pour garantir un meilleur accès aux informations et, donc, aux prestations.

Aujourd’hui, un certain nombre d’initiatives privées voient le jour, comme le site www.mes-allocs.fr qui tire parti, non seulement de la complexité du système des prestations sociales, mais aussi des difficultés pour y accéder.

On assiste à une marchandisation tarifée d’une démarche censée être universelle, gratuite – des principes à la base du fonctionnement de nos administrations et de l’accès aux prestations –, avec des slogans du type « il n’a jamais été aussi simple de faire valoir ses droits » et des promesses d’accompagnement payant pour 29 euros « seulement » par trimestre…

Alors, certes, vous avez lancé l’expérimentation « territoires zéro non-recours » qui a impliqué un certain nombre de collectivités – comme pour France Services –, mais tous les leviers doivent être activés, dont l’échange de données entre administrations.

Si cet échange existe – le président de la commission l’a assuré –, il faut qu’il soit efficace et opérationnel. Cela évitera cette marchandisation de l’accès aux prestations dans laquelle nombre de nos concitoyens vont très vite verser, tant ils rencontrent des difficultés à s’informer sur les aides et à accéder aux services publics qui pourraient les accompagner dans leurs démarches pour recourir aux prestations sociales.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. En 2019, Carole Grandjean, alors députée, et moi-même avons commis un rapport sur la fraude sociale et son pendant, le non-recours aux prestations sociales. Nous avons fait un certain nombre de propositions qui ne sont malheureusement pas encore mises en œuvre, dont l’échange de données faisait évidemment partie.

Je ne suis pas persuadée que le dispositif de cet amendement soit complètement opérationnel, mais, à l’évidence, le non-recours aux droits est un problème majeur aujourd’hui. Aussi, les propositions que l’on a formulées, notamment celles sur l’information des publics les plus fragiles, doivent absolument être prises en considération.

Enfin, je dois vous dire mon hostilité absolue à la solidarité à la source, dans la mesure où nos bases de données sont complètement tronquées : on risque d’encourager la fraude plutôt que de favoriser la lutte contre le non-recours, qui est pourtant un impératif.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1244.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 27 - Amendement n° 1244
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024
Article 27 (interruption de la discussion)

Article 27

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du 6° du II de l’article L. 114-17-1, après le mot : « santé », sont insérés les mots : « , le centre de santé ou la société de téléconsultation » ;

2° L’article L. 162-1-15 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « et après avis de la commission prévue à l’article L. 114-17-2, à laquelle participent des professionnels de santé » sont supprimés ;

b) Après le même I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie peut également, après que le centre de santé ou la société de téléconsultation mentionnée à l’article L. 4081-1 du code de la santé publique a été mis en mesure de présenter ses observations, subordonner à l’accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant excéder six mois, le versement des indemnités journalières mentionnées à l’article L. 321-1 et au 2° de l’article L. 431-1 du présent code prescrites par les professionnels de santé exerçant au sein de ces structures, en cas de constatation par ce service :

« 1° Du non-respect des conditions prévues, respectivement, à l’article L. 321-1 et au 2° de l’article L. 431-1 ;

« 2° Ou d’un nombre ou d’une durée des arrêts de travail prescrits par les professionnels exerçant au sein du centre de santé ou de la société de téléconsultation et donnant lieu au versement d’indemnités journalières ou d’un nombre de tels arrêts de travail rapporté au nombre de patients pour lesquels au moins un acte ou une consultation a été facturé au cours de la période considérée significativement supérieurs aux données moyennes constatées pour les centres de santé ou les sociétés de téléconsultation ayant une activité comparable dans le ressort de la même agence régionale de santé ou au niveau national.

« Toutefois, en cas d’urgence attestée par le professionnel de santé prescripteur, l’accord préalable de l’organisme débiteur des prestations n’est pas requis pour le versement des indemnités journalières. » ;

c) Le II est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « santé, », sont insérés les mots : « au centre de santé ou à la société de téléconsultation, » ;

– à la seconde phrase, les mots : « du professionnel de santé » sont supprimés et sont ajoutés les mots : « ou au I bis » ;

3° L’article L. 315-1 est ainsi modifié :

a) Les trois derniers alinéas du II sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’un contrôle effectué par un médecin à la demande de l’employeur, en application de l’article L. 1226-1 du code du travail, conclut à l’absence de justification d’un arrêt de travail ou de sa durée ou fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré, ce médecin transmet son rapport au service du contrôle médical de la caisse dans un délai de soixante-douze heures. Ce rapport précise si le médecin diligenté par l’employeur a ou non procédé à un examen médical de l’assuré.

« Si ce rapport conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail ou de sa durée, le médecin en informe également, dans le même délai, l’organisme local d’assurance maladie, qui suspend le versement des indemnités journalières. Cette suspension prend effet à la date à laquelle l’assuré a été informé de cette décision. Toutefois, dans le cas où le médecin diligenté par l’employeur a estimé que l’arrêt de travail est justifié pour une durée inférieure à celle fixée par le médecin prescripteur, la suspension prend effet à l’échéance de la durée retenue par le médecin diligenté par l’employeur.

« Le service du contrôle médical peut, au vu du rapport, décider de procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré. S’il décide de procéder à cet examen, il n’est pas fait application de la suspension du versement des indemnités journalières jusqu’à ce que ce service ait statué.

« Le service du contrôle médical peut en outre être saisi par l’assuré, qui en fait la demande à son organisme de prise en charge. Le délai dans lequel cette demande est effectuée ainsi que le délai dans lequel intervient le nouvel examen de la situation de l’assuré sont fixés par décret en Conseil d’État.

« Lorsque le rapport fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré, le service du contrôle médical ne peut demander la suspension du versement des indemnités journalières qu’après un nouvel examen de la situation de l’assuré. » ;

b) Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :

« VIII. – Les missions du service du contrôle médical sont exercées par les praticiens conseils mentionnés à l’article L. 224-7 du présent code. Ceux-ci peuvent déléguer, sous leur responsabilité, la réalisation de certains actes et de certaines activités au personnel des échelons régionaux et locaux du contrôle médical disposant de la qualification nécessaire. Lorsque ces délégations concernent des auxiliaires médicaux, lesdites missions sont exercées dans la limite de leurs compétences prévues par le code de la santé publique. Lorsque, dans le cadre de ces délégations, des auxiliaires médicaux rendent des avis qui commandent l’attribution et le service de prestations, elles s’exercent dans le cadre d’un protocole écrit. » ;

4° Le III de l’article L. 315-2 est ainsi modifié :

a) La troisième phrase est ainsi rédigée : « Lorsque le service du contrôle médical estime, à l’issue de l’examen d’un assuré, qu’une prescription d’arrêt de travail n’est pas ou n’est plus médicalement justifiée, l’intéressé en est directement informé. » ;

b) À l’avant-dernière phrase, les mots : « praticien-conseil » sont remplacés par les mots : « service du contrôle médical ».

II. – Le a du 2° du I s’applique à compter du 1er février 2024.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 816 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L’amendement n° 920 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 1245 est présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Michau et Ouizille, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 816 rectifié.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le Gouvernement justifie les dispositions de l’article 27, en insistant sur l’augmentation des dépenses au titre des indemnités journalières (IJ), alors même que, selon la Commission des comptes de la sécurité sociale, le dépassement de 300 millions d’euros constaté par rapport à l’objectif fixé en loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 est « quasiment intégralement dû au contexte inflationniste persistant qui a tiré à la hausse le coût moyen des arrêts de travail de façon plus importante qu’anticipée ».

Par ailleurs, l’essentiel de la hausse du nombre des arrêts de travail s’explique par l’augmentation du taux d’emploi et le vieillissement de la population active.

Si le Gouvernement s’attarde sur la question du nombre des arrêts de maladie, il ne pondère jamais ce constat par une prise en compte de l’intensification bien plus dynamique du travail. Ainsi, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), le taux de salariés exposés à trois contraintes physiques ou plus s’élevait à 34 % en 2016, contre 12 % en 1984.

Si le taux d’absentéisme des moins de 30 ans a explosé, c’est aussi parce que ces jeunes sont touchés par l’intensification du travail et qu’ils ont un rapport conflictuel avec celui-ci, notamment en raison du manque de sens qui caractérise certaines activités, lequel a été largement étudié.

L’intensification du travail, le manque de sens, l’insécurité socioéconomique affectent plus particulièrement les jeunes et les cadres.

Quant aux arrêts pour épuisement professionnel, ils sont devenus la première pathologie à l’origine des arrêts de travail de longue durée.

Aucun de ces éléments n’est pris en considération dans cet article 27 qui se contente, une fois de plus, d’ignorer la question du travail, de sa perte de sens et de son intensification délétère pour la santé et qui fait peser sur les épaules des salariés toute la charge de la sanction.

S’il faut lutter contre les arrêts maladie indus, il serait préférable de lutter au préalable contre la dégradation des conditions de travail et la perte de sens au travail.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 920.

Mme Marianne Margaté. Cet été, le ministre de l’économie s’est alarmé de l’augmentation des dépenses au titre des indemnités journalières versées par l’assurance maladie ces dernières années, puis a proposé un allongement des délais de carence en cas d’arrêt de travail.

Si le Gouvernement a finalement renoncé à instaurer un délai de carence plus long, il a trouvé une alternative qui consiste à fliquer les malades, en prévoyant la suspension du versement de leurs indemnités journalières.

Envisager la suspension automatique de ces indemnités à la suite d’un contrôle mandaté par l’employeur est scandaleux ! Le contrôle des arrêts de travail indemnisés par l’assurance maladie doit rester l’apanage de l’assurance maladie, laquelle offre des garanties en termes de débat et de recours.

Le Gouvernement a décidé de mener une bataille contre ce qu’il appelle les « travailleurs enclins à la paresse » et les « médecins de connivence », en offrant la possibilité aux employeurs de mandater un médecin qui contrôlera les arrêts de travail de leurs salariés.

Si la lutte contre la fraude est indispensable, la casse sociale n’est pas une option, a dénoncé le syndicat des médecins généralistes MG France.

Le risque d’une dérive vers une privatisation du contrôle de l’assuré social et d’une instrumentalisation de la procédure par l’employeur pour précariser des salariés en position de fragilité est inacceptable. Nous refusons la stigmatisation des assurés sociaux et des médecins prescripteurs au nom de la réduction des dépenses au titre des indemnités journalières versées par l’assurance maladie.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1245.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à supprimer l’article 27, dont le but est de maîtriser le nombre d’arrêts de travail que le Gouvernement considère – je dis bien considère – comme injustifiés.

Pourtant, il existe déjà un certain nombre de dispositifs en la matière, puisqu’une entreprise a la possibilité depuis longtemps de faire appel à un médecin agréé par l’ordre des médecins pour contrôler les arrêts maladie.

Avec cet article, vous entendez renforcer ces mesures : vous octroyez au médecin diligenté par l’employeur le pouvoir de contrôler et de remettre en cause la durée de l’arrêt de travail prescrit par le médecin généraliste ; vous suspendez de manière automatique le versement des indemnités journalières ; enfin, vous rendez possible la suspension de ces indemnités à la date retenue par ce médecin, et non à la date de notification au travailleur, et ce sans intervention du praticien-conseil.

Pour nous, il s’agit d’une dérive vers une privatisation des contrôles de l’assurance maladie, ce qui est inacceptable. Si le médecin mandaté par l’employeur peut jouer un rôle d’alerte, la décision finale de suspendre les indemnités ne peut être prise que par un tiers indépendant de l’employeur, du payeur et du prescripteur.

Le non-respect du principe d’impartialité entraîne une fragilisation du système des indemnités journalières. Ces dernières ne peuvent en aucun cas être supprimées sans un avis systématique du médecin-conseil de l’assurance maladie.

Nous dénonçons de surcroît le fait qu’aucune procédure contradictoire instaurant un délai permettant à l’assuré de saisir le contrôle médical de l’assurance maladie ne soit prévue par le texte.

Enfin, si nous comprenons bien qu’il se justifie par le souci de faire des économies, l’article 17 ne s’attaque pas aux causes réelles de l’augmentation des dépenses au titre des indemnités journalières, à savoir les conditions de travail, la pénibilité des postes ou la santé mentale des travailleurs.