M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour la réplique.

M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, trêve de « en même temps », je vous interroge sur les zones Natura 2000 ! Comme d’habitude, le Gouvernement laisse passer ce type de projet pour arrondir les angles en fin de négociation.

M. Marc Fesneau, ministre. Non !

M. Laurent Duplomb. Chaque renoncement supplémentaire ouvre un peu plus la porte de la décroissance. Une fois de plus, votre gouvernement en portera l’entière responsabilité ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

devenir de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Billon. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Monsieur le ministre, qui voulons-nous protéger ? Toutes les trois minutes, un enfant est victime de violences sexuelles. Chaque année, 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles. Au total, 5 millions d’adultes ont subi des violences sexuelles dans leur enfance.

Par ailleurs, 92 % des victimes ne sont pas entendues et seulement 3 % des personnes mises en cause pour viols sur mineurs sont condamnées. Qui voulons-nous protéger ?

Telle est la question posée par le juge Édouard Durand, coprésident de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), entendu par la délégation aux droits des femmes, la semaine dernière.

En 2021, le Président de la République a promis à toutes les victimes qu’elles ne seraient plus jamais seules.

En 2021, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences faites aux enfants a été créée pour une durée de trois ans. Ses travaux doivent s’achever le 31 décembre prochain. La Ciivise est devenue un espace reconstructeur, qui accompagne les victimes. Se pose donc la question de son maintien.

En trois ans, elle a accompli un travail titanesque et salvateur. Elle a recueilli près de 30 000 témoignages. En trois ans, la Commission a fait des propositions fortes avec pour seule boussole la volonté de protéger enfin les mineurs et de condamner les agresseurs.

Dans une lettre publiée lundi dernier, les membres de la délégation aux droits des femmes et sa présidente, Dominique Vérien, ont appelé le Président de la République à maintenir la Ciivise.

Monsieur le ministre, ma question est simple et appelle une réponse claire : comptez-vous maintenir la Ciivise ? Si oui, sous quelle forme ? (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Annick Billon, soyez en assurée, il y aura évidemment une suite aux travaux de la Ciivise.

Sous l’autorité de la Première ministre aura lieu le 20 novembre prochain un comité interministériel à l’enfance, qui permettra de compiler beaucoup de données. Vous l’avez rappelé, la Ciivise a réuni 30 000 témoignages d’enfants – ce n’est pas rien ! C’est une structure que je connais bien, car j’étais le ministre chargé notamment des questions liées à la protection de l’enfance lorsque la Ciivise a été créée. Je reconnais donc le travail fondamental de cette structure.

Cette commission a été créée pour trois ans. Qu’adviendra-t-il maintenant ? De quels outils et de quel type de commission avons-nous besoin ? Faut-il aller vers une Ciivise II ? Faut-il revoir ou amplifier cette structure ?

Les chiffres sont terrifiants et avérés. Un enfant toutes les trois minutes est victime d’inceste, d’agression sexuelle et de violences sexuelles dans notre pays. Cela soulève le cœur, donne envie de vomir et de crier. Il convient donc d’agir. Pour ce faire, nous avons besoin d’acteurs, de travail de terrain et de professionnels.

Les arbitrages seront faits dans quelques jours. Je comprends l’émoi qui peut avoir saisi la délégation aux droits des femmes du Sénat. Soyez assurée, puisque c’est la grande cause du Président de la République, que l’ambition qui était la nôtre voilà trois ans est encore plus vive aujourd’hui !

M. Loïc Hervé. On attend donc la conférence de presse ?

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.

Mme Annick Billon. Monsieur le ministre, vous ne nous dites toujours pas clairement si la Ciivise sera maintenue.

Une assemblée ou une institution doit toujours être incarnée pour garantir son efficacité, nous en savons quelque chose au Sénat.

Le juge Édouard Durand, avec son expertise, sa détermination, ses convictions, a démontré qu’il était l’homme de la situation. La Ciivise ne peut se passer du juge Édouard Durand ! (Bravo ! et applaudissements.)

baisse du niveau scolaire

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour le groupe Les Républicains.

M. Jacques Grosperrin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale. Qu’il me soit permis d’y associer notre excellent collègue Stéphane Piednoir.

Monsieur le ministre, lundi dernier ont été publiés les résultats de l’évaluation nationale réalisée sur les élèves de quatrième en mathématiques et en français. Vous avez réagi à cette annonce en trouvant ces résultats inquiétants. Vous avez même affirmé que le collège était en situation de difficulté et qu’il risquait d’être en panne. Non seulement le collège est « en panne », mais il est aussi véritablement en recul !

Consultation après consultation, évaluation après évaluation, on se rend compte depuis plusieurs années que les jeunes Français sont en situation difficile et que les résultats baissent.

Pour mémoire, en 2000, la France se situait dans le premier tiers de l’évaluation du programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa) des pays de l’OCDE. En 2022, la France est tombée dans le deuxième tiers alors que, concomitamment, le budget de l’éducation nationale a augmenté.

En 2018, lorsque vous étiez secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, le budget de l’éducation nationale était de 51 milliards d’euros, contre 63 milliards d’euros en 2024, soit 12 milliards d’euros supplémentaires. C’est le budget de la justice et trois fois le budget de la culture, alors que le système éducatif compte 404 000 élèves de moins.

Monsieur le ministre, quelles réformes structurantes et puissantes allez-vous proposer pour répondre, non pas à une crise, mais plutôt à un échec majeur de notre système éducatif ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Gabriel Attal, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Jacques Grosperrin, j’ai eu l’occasion de le dire dès ma nomination au ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, mon objectif est l’élévation du niveau général de nos élèves. (M. Michel Savin sexclame.) Tous les chantiers que j’ai ouverts doivent y concourir.

Quand on travaille pour restaurer l’attractivité du métier d’enseignant, on agit pour élever le niveau de nos élèves. Quand on travaille pour restaurer l’autorité du maître à l’école, on agit pour l’élévation du niveau des élèves.

Quand on réforme le lycée professionnel, Carole Grandjean et moi-même le faisons, on agit pour l’élévation du niveau des élèves.

Quand on agit pour faire respecter les règles, les valeurs de la République et la laïcité à l’école, on agit pour l’élévation du niveau des élèves.

Même quand on lutte contre le harcèlement scolaire, outre que l’on agit pour la dignité des personnes, on agit pour l’élévation du niveau des élèves, parce qu’un enfant qui est malheureux à l’école, c’est un enfant qui ne peut plus apprendre.

Les évaluations qui ont été publiées disent tout d’abord que nous sommes en train de changer positivement la donne à l’école primaire.

La génération 2017 – celle qui est entrée au CP quand le Président de la République a été élu pour la première fois et dont nous avons massivement réinvesti la scolarité à l’école primaire – s’en sort mieux que les générations précédentes. (M. Rachid Temal ironise.) Bien évidemment, il est trop tôt pour faire le bilan, mais force est de constater que cette génération, qui est entrée en sixième cette année, s’en sort mieux en lecture, en écriture et en calcul. Il faut continuer.

Ces évaluations disent aussi que le collège – vous l’avez dit – est un véritable sujet de préoccupation. Songez qu’un élève sur quatre, à l’entrée en quatrième, n’a pas le niveau de lecture attendu en fin de CM2 !

M. Gabriel Attal, ministre. Je présenterai, au début du mois de décembre, des mesures fortes pour l’élévation du niveau général à l’école et au collège. Je le dis : je n’ai aucun tabou.

J’ai d’ores et déjà avancé un certain nombre de pistes : sur les manuels scolaires, sur l’organisation en cycles, sur les groupes de niveau…

J’assume cette dernière proposition. De fait, les enseignants m’expliquent qu’il est difficile de faire progresser une classe qui réunit des élèves qui ne savent pas lire et des élèves qui lisent très bien et qu’une telle situation finit par tirer tout le monde vers le bas. Cette proposition fait débat, mais je l’assume.

Je présenterai, au début du mois prochain, des mesures fortes pour que nous puissions avancer. C’est un enjeu non seulement pour nos élèves et pour notre école, mais aussi pour l’avenir de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour la réplique.

M. Jacques Grosperrin. Monsieur le ministre, j’attendais que vous nous parliez de la réforme du collège unique, qui existe depuis 1975.

Vous nous avez parlé des groupes de niveau. Vous avez raison : ce n’est pas tabou. Je crois même qu’il faut aller plus loin. Si l’on veut passer d’un collège de la résilience à un collège de la réussite, il faudra certainement passer par des réformes structurelles.

Si vous le souhaitez, vous trouverez, au Sénat, avec la proposition de loi de mon collègue Max Brisson, dont j’ai été le rapporteur, des pistes efficaces. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Pierre-Alain Roiron. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et des familles.

En 2018, le Président de la République avait annoncé vouloir « répondre aux défis du vieillissement ».

La proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France sera examinée la semaine prochaine à l’Assemblée nationale.

Une enquête récente, menée par la Fédération hospitalière de France, a révélé que 85 % des Ehpad se trouvaient en situation déficitaire à la fin de l’année 2022. Ces déficits tendent à devenir structurels et croissants dans ce secteur – pour ne pas dire, hélas !, qu’ils le sont déjà.

J’ai été alerté, hier, sur la situation budgétaire de plusieurs Ehpad de mon département. Je pense notamment à celui de Richelieu, dont le bilan déficitaire atteint plus de 400 000 euros. Dans moins de trois ans, cet établissement atteindra son seuil minimal de fonctionnement et ne sera plus en mesure de rémunérer ses employés.

Cette situation alarmante résulte de facteurs multiples comme l’inflation alimentaire, le coût de l’énergie – en augmentation de 33 % en 2023 – ou encore la compensation très partielle des revalorisations salariales des soignants.

Madame la ministre, faites-vous le choix de délaisser nos aînés ? Faites-vous le choix de délaisser le personnel des Ehpad, qui travaille dans des conditions déjà très difficiles ?

L’État doit être à la hauteur de ces enjeux. Je suis persuadé que l’ensemble de mes collègues ici présents sont d’accord avec moi.

Dès lors, ma question est simple et appelle une réponse concrète : le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre des compensations financières pérennes et intégrales ? Compte-t-il s’attaquer de front à la question du troisième âge et des Ehpad pour assurer à nos aînés un accompagnement digne ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE-K. – M. Christian Bilhac applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et des familles.

Mme Aurore Bergé, ministre des solidarités et des familles. Monsieur le sénateur, la question que vous posez est essentielle au regard du défi démographique qui est devant nous.

En 2030, 20 millions de Français auront plus de 60 ans. Nous devons sortir collectivement du déni sur cette question.

En outre, vous l’avez dit, la situation de nos Ehpad, qui accueillent aujourd’hui 700 000 Français, est très critique.

Face à cette situation, nous avons mis en place plusieurs éléments.

D’abord, un fonds d’urgence, doté de 100 millions d’euros, a été débloqué par la Première ministre dès cet été, de manière à répondre à l’urgence conjoncturelle, liée à l’inflation, à l’augmentation des rémunérations, à la question des prix de l’énergie et de l’alimentation, autant de facteurs ayant pu conduire à des situations qui méritent une réponse immédiate.

Lors des assises nationales des départements de France, qui se sont tenues la semaine dernière, nous avons également, avec la Première ministre, annoncé des éléments plus structurels.

Nous allons tout d’abord, dès 2024, via la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), accroître de 150 millions d’euros les compensations dues aux départements au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH).

Surtout, nous amorçons, avec l’ensemble des présidents de département, une refonte en profondeur des fonds de concours pour 2025. Ces fonds doivent enfin avoir du sens et être moins nombreux. Dans les grandes lignes, il s’agit d’arrêter d’empiler des fonds de concours pour mettre en œuvre des politiques publiques beaucoup plus lisibles et augmenter ainsi la prise en charge par l’État.

Ce que nous avons mis sur la table, et je crois que les départements sont en accord avec cette proposition, c’est que 50 % de toutes les dépenses nouvelles engagées au titre de l’autonomie soient prises en charge par l’État, via la CNSA, à partir de 2025. C’est un engagement majeur en corrélation, encore une fois, avec le défi démographique qui est devant nous.

Vous l’avez dit, nous reprenons l’examen, à partir de lundi, d’une proposition de loi qui pose des bases importantes, sur le plan sociétal comme en matière de reconnaissance des professionnels. J’espère que ce texte sortira enrichi du Sénat.

J’attends également beaucoup de nos échanges sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, notamment de la fusion des sections soins et dépendance des Ehpad. (M. François Patriat applaudit.)

agriculture ukrainienne

M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Kristina Pluchet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Monsieur le ministre, le 8 novembre dernier, par la voix de sa présidente, Mme von der Leyen, la Commission européenne a recommandé officiellement l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Ukraine.

Cet avis favorable doit être approuvé à l’unanimité par les Vingt-Sept lors du prochain Conseil européen des 14 et 15 décembre prochains, à Bruxelles.

Sans évoquer la question diplomatique que pose cette initiative, dans un contexte de recherche de paix et de désamorçage du conflit, je souhaite vous poser la question fondamentale de la préservation de nos intérêts agricoles.

Vous revenez d’Ukraine, où vous avez annoncé œuvrer au « renforcement de la coopération agricole entre nos deux pays » et travailler avec cet État sur le chemin de son adhésion à l’Union européenne et invoqué la « solidarité » des agriculteurs dans le contexte de « l’ouverture du marché européen aux produits agricoles ukrainiens ».

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous éclairer sur vos intentions ?

Si la position favorable de la France ne fait désormais aucun doute, êtes-vous bien conscient du désarroi des agriculteurs français, pris en étau entre des normes européennes toujours plus exigeantes et complexes, une ouverture toujours plus grande à la concurrence, avec la multiplication des accords de libre-échange, et une envolée du coût des intrants et de l’énergie ?

Monsieur le ministre, quels intérêts défendez-vous ?

Votre dernière déclaration, largement relayée par vos soins sur les réseaux sociaux, sonne comme une volte-face pour de nombreux syndicats agricoles.

Nous ne pouvons prendre le risque de sacrifier nos intérêts. Comment allez-vous protéger l’agriculture française dans une telle perspective ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question.

Il n’y a aucune volte-face. Au contraire, je suis venu en Ukraine réaffirmer plusieurs de nos positions.

À la vérité, beaucoup de ce qui se joue en Ukraine relève de l’avenir de l’Europe, de l’avenir de l’agriculture en Europe, mais également de l’avenir de l’agriculture française.

La première position que j’y ai réaffirmée, c’est le soutien indéfectible de la France et de l’Europe à l’agriculture et aux agriculteurs ukrainiens.

Les territoires de ce pays subissent les bombardements et la pollution. Je me suis rendu dans une chèvrerie qui n’était qu’à 500 mètres de la ligne de front. Voyez dans quelles conditions produisent ces agriculteurs ! Cela me paraît la moindre des choses que de dire que nous serons à leurs côtés, y compris dans la reconstruction, y compris dans la dépollution, pour que le potentiel agricole ukrainien puisse s’exprimer.

Pour autant, la solidarité n’empêche pas la lucidité sur les enjeux qui sont les nôtres.

En l’occurrence, l’Ukraine est l’une des grandes puissances agricoles mondiales. Dans la perspective des préconisations de la Commission européenne et des négociations qui pourraient s’ouvrir – attendons les décisions du Conseil du mois de décembre prochain –, nous devons être vigilants sur deux points.

Premièrement, il faut une convergence des modèles entre les vingt-sept pays membres de l’Union européenne et un accompagnement de nos amis agriculteurs ukrainiens. Il ne saurait en être autrement ; à défaut, les distorsions de concurrence seront trop importantes. C’est un élément important, comparable aux clauses miroir des accords de commerce.

Deuxièmement, il convient d’entrer dans cette logique en coopération avec les Ukrainiens.

En effet, nous avons besoin que l’Europe soit davantage encore une puissance agricole, une puissance qui garantisse sa souveraineté et sa sécurité alimentaires, y compris à ses frontières. À cet égard, je préfère travailler avec des alliés comme les Ukrainiens plutôt qu’avec d’autres, qui exerceraient sur nous une pression sur la sécurité alimentaire, comme le fait aujourd’hui M. Poutine à nos frontières extérieures.

Si nous parvenons à coopérer plutôt qu’à entrer en concurrence, si nous parvenons à faire converger les modèles, nous y gagnerons tous. Tel est l’enjeu que je suis venu réaffirmer, y compris en signalant à mes interlocuteurs les distorsions de concurrence pénalisantes qui existent aujourd’hui – je pense à la volaille, par exemple, mais aussi à d’autres domaines comme le sucre, production que votre région connaît bien, madame la sénatrice.

Il convient de tenir un discours de vérité et un discours de souveraineté collective. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour la réplique.

Mme Kristina Pluchet. Merci, monsieur le ministre, de votre réponse.

Toutefois, je veux rappeler que le poulet industriel ukrainien afflue sur le marché français, au détriment de notre filière d’excellence, depuis que l’Union européenne a suspendu les droits de douane par solidarité avec l’Ukraine.

Il est vraiment temps de défendre avec force l’agriculture française. Notre souveraineté alimentaire doit être une vraie priorité nationale ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Amel Gacquerre applaudit également.)

rénovation des passoires thermiques en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Rojouan. Ma question s’adresse à M. le ministre du logement.

Devant le fiasco de votre politique du logement, je vais en rajouter une couche, monsieur le ministre.

En effet, sommés de se mettre aux normes dans des délais intenables, les petits propriétaires bailleurs concernés par les rénovations thermiques – ils sont nombreux en France – font leurs comptes. Or, en termes d’équilibre financier, cela ne passe pas.

Si, pour les secteurs géographiques des métropoles, où les loyers sont plutôt élevés, on peut tendre vers un équilibre sur un nombre d’années acceptable, ce n’est absolument pas le cas dans des départements ruraux comme le mien, en raison du faible niveau des revenus et, surtout, des loyers.

Ces deux secteurs ont malheureusement un point commun : les devis qui y sont réalisés montrent que le coût des travaux y est quasiment le même.

Ma question est simple, monsieur le ministre : qu’allez-vous faire pour que la ruralité ne soit pas une fois de plus pénalisée par une politique nationale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du logement.

M. Patrice Vergriete, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Rojouan, vous évoquez un sujet important : la rénovation énergétique des logements en secteur rural.

Ainsi que je le disais moi-même dans cet hémicycle il y a une semaine, dans un département comme la Creuse, plus de la moitié des logements obtiennent une note de F ou G au diagnostic de performance énergétique.

Le Gouvernement répond à cet enjeu par de nombreuses mesures.

La réforme de l’aide à la rénovation énergétique, qui sera mise en œuvre à partir du 1er janvier 2024, constitue déjà une réponse très concrète. Cette aide pourra couvrir jusqu’à 90 % du montant des travaux des ménages très modestes que vous avez évoqués.

Pour un ménage de classe moyenne – situé entre le cinquième et le huitième déciles –, le montant de l’aide sera de 60 % des travaux. Si ces derniers se montent à 55 000 euros, on peut ainsi imaginer que l’aide s’élèvera à 33 000 euros, auxquels on peut évidemment ajouter l’aide éventuelle des collectivités locales, mais aussi, par exemple, puisque vous avez évoqué les loyers modérés, le dispositif Loc’Avantages.

Je rappelle aussi, pour ce qui concerne le reste à charge, que nous avons prolongé l’éco-prêt à taux zéro.

Surtout, le dispositif fiscal du déficit foncier, qui permet de déduire les charges des travaux des revenus locatifs, est doublé jusqu’en janvier 2025 pour des travaux permettant d’atteindre la performance de classe D.

Si j’ajoute à cela le dispositif fiscal Denormandie, que nous avons également prolongé, ou encore la prime à la sortie de la vacance, quantité d’aides permettent de faire face à ces enjeux aujourd’hui. Il faut les saisir toutes !

Si ce n’était pas suffisant, la loi Logement permettra de renforcer encore ces dispositifs pour la ruralité.

Vous voyez, monsieur le sénateur, que la ruralité n’est pas abandonnée. Loin de là ! (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, pour la réplique.

M. Bruno Rojouan. J’aimerais vous croire, monsieur le ministre, mais ce gouvernement, dans le domaine du logement, a réussi un triple exploit, jamais inégalé : la construction de logements neufs est bloquée ; l’achat-vente de logements anciens est au plus bas depuis des décennies ; et là, vous allez conduire à un blocage du locatif, ce qui aboutira à une situation dramatique ! Tous les clignotants sont au rouge.

En politique comme ailleurs, il n’y a aucune honte à essayer de corriger les dispositifs qui sont en place. Ce serait tout à votre honneur. Ce serait aussi faire preuve de courage. Or, en politique, souvent le courage paie ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 22 novembre 2023, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Mathieu Darnaud.)