M. Pierre Laurent. Cet amendement porte sur le contrôle des ventes d’armes. Nous avons déposé l’an dernier une proposition de loi assez complète sur ce sujet, qui est désormais récurrent et appelle des progrès significatifs en termes de garanties démocratiques et de transparence.

Alors que la France est au troisième, voire au deuxième rang des exportateurs mondiaux d’armement, nous sommes très en retard du point de vue des garanties démocratiques et de la transparence. En comparaison, il existe dans de nombreux parlements européens, entre autres, des commissions parlementaires chargées de suivre de près les contrats d’armement.

Nous proposons de créer une délégation interparlementaire chargée de contrôler les autorisations et les licences, qui disposerait, si nécessaire, d’un droit de veto et dont les travaux seraient couverts par le secret de la défense nationale.

Les dispositions que nous proposons sont plus ambitieuses que celles prévues dans l’amendement n° 293 que présentera le président Cambon sur le même sujet, qui vise à confier cette mission à la délégation parlementaire au renseignement.

Nous devons progresser de manière significative sur ces questions, pour des raisons liées à la démocratie et au contrôle de la destination de ces armes. Par ailleurs, notre base industrielle technologique et de défense étant organisée autour d’une ambition exportatrice, les contrôles doivent être beaucoup plus poussés que ceux actuellement exercés par le Parlement ; pour autant, je ne remets pas en cause le sérieux du travail des commissions dédiées.

Mme la présidente. L’amendement n° 199, présenté par MM. Gontard, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 6 decies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 6 … ainsi rédigé :

« Art. 6 … I. – Il est constitué une délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage, commune à l’Assemblée nationale et au Sénat.

« Elle exerce un contrôle a posteriori de la politique du Gouvernement en matière d’exportation de matériels de guerre et matériels assimilés, de transfert de produits liés à la défense ainsi que d’exportation et de transfert de biens à double usage, y compris dans le domaine des programmes de coopération au regard des engagements internationaux de la France. Lui sont notamment communiqués :

« 1° Des éléments d’informations issus du Gouvernement concernant la délivrance des autorisations d’exportation et de licences relatives aux matériels de guerre et assimilés ainsi qu’aux biens à double usage, le type et le nombre d’équipements exportés, les destinataires finaux, les utilisateurs finaux, l’utilisation finale déclarée, les notifications de refus, toutes mesures de suspension, modification ou abrogation de licence ainsi que leur justification ;

« 2° Un rapport annuel de synthèse exhaustif précisant le nombre de refus à l’exportation par pays, en précisant les critères de refus, les types et quantités de matériels de guerre et assimilés concernés, les destinataires et les utilisateurs finaux ainsi que l’utilisation finale déclarée. Il précise également les informations relatives aux types et aux quantités de matériels de guerre et assimilés, les destinataires et les utilisateurs finaux ainsi que l’utilisation finale déclarée pour chacune des catégories couvertes par le rapport ;

« 3° Les cessions onéreuses et gratuites et les prêts réalisés en année N-1 par le ministère de la défense.

« II. – La délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage est composée de six députés et de six sénateurs respectant les équilibres politiques de chacune des assemblées. Les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargée de la défense et des affaires étrangères sont membres de droit de la délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage. La fonction de président de la délégation est assurée alternativement, pour un an, par un député et un sénateur, membres de droit.

« Les autres membres de la délégation sont désignés par le président de chaque assemblée de manière à assurer une représentation pluraliste. Les députés qui ne sont pas membres de droit sont désignés au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Les sénateurs sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.

« III. – La délégation peut entendre :

« 1° Le Premier ministre ;

« 2° Les membres du Gouvernement et leur directeur de cabinet ;

« 3° Le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale ;

« 4° Les directeurs en fonction des services mentionnés au I, accompagnés des collaborateurs de leur choix en fonction de l’ordre du jour de la délégation, ainsi que toute personne placée auprès de ces directeurs et occupant un emploi pourvu en conseil des ministres ;

« 5° La commission interministérielle des biens à double usage ;

« 6° Le comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations de matériels de guerre ;

« 7° Les représentants du personnel et des organisations représentatives des entreprises exportatrices d’armements ;

« 8° Toute personnalité qualifiée dans les domaines du droit international humanitaire, du droit international public ou de l’économie de la défense.

« IV. - Les membres de la délégation sont autorisés ès qualités à connaître des informations ou des éléments d’appréciation définis au I et protégés au titre de l’article 413-9 du code pénal, à l’exclusion des données dont la communication pourrait mettre en péril l’anonymat, la sécurité ou la vie d’une personne relevant ou non des services intéressés.

« Les agents des assemblées parlementaires désignés pour assister les membres de la délégation doivent être habilités, dans les conditions définies pour l’application du même article 413-9, à connaître des mêmes informations et éléments d’appréciation.

« V. - Les travaux de la délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage sont couverts par le secret de la défense nationale.

« Les membres de la délégation et les agents des assemblées mentionnés au IV sont astreints au respect du secret de la défense nationale pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en ces qualités.

« VI. – Chaque année, la délégation établit un rapport public dressant le bilan de son activité, qui ne peut faire état d’aucune information ni d’aucun élément d’appréciation protégés par le secret de la défense nationale.

« Dans le cadre de ses travaux, la délégation peut adresser des recommandations et des observations au Président de la République et au Premier ministre. Elle les présente au président de chaque assemblée.

« VII. – La délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage établit son règlement intérieur. Celui-ci est soumis à l’approbation du bureau de chaque assemblée.

« Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation sont financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires dans les conditions fixées par l’article 7.

« VIII. - La délégation parlementaire à la revue des exportations d’armement et de biens à double usage exerce les attributions de la commission de vérification prévue à l’article 154 de la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement, à peu près identique au précédent, s’appuie sur les propositions formulées par Jacques Maire et Michèle Tabarot dans leur rapport d’information sur le contrôle des exportations d’armement, ainsi que sur les travaux d’Amnesty International et du Parlement européen.

De nombreuses propositions de loi ont déjà été déposées à l’Assemblée nationale et au Sénat par divers groupes politiques, ce qui témoigne d’un constat transpartisan de la nécessité de renforcer le contrôle du Parlement en matière d’exportation d’armes.

Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des propos de Pierre Laurent. L’instauration d’une délégation parlementaire permettrait au Parlement d’effectuer un contrôle a posteriori efficace de notre politique d’exportation d’armement et de biens à double usage, et de s’assurer du respect des engagements internationaux de la France en matière de droit humanitaire, tout en respectant le secret-défense.

Mme la présidente. L’amendement n° 71, présenté par MM. Temal, Devinaz et Kanner, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Todeschini, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 6 decies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 6 … ainsi rédigé :

« Art. 6 … – I – Il est constitué une délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armements, commune à l’Assemblée nationale et au Sénat. Cette délégation est composée de cinq députés et cinq sénateurs.

« II. – Les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires étrangères et de la défense sont membres de droit de la délégation à l’évaluation des exportations d’armement.

« La fonction de président de la délégation est assurée, alternativement, pour un an, par un député et un sénateur, désigné par les membres de droit de la délégation. Les autres membres de la délégation sont désignés par les présidents de leur assemblée respective tâchant de reproduire les équilibres politiques de chacune d’entre elles. Les députés qui ne sont pas membres de droit sont désignés au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Les sénateurs qui ne sont pas membres de droit sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.

« III. La délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement a pour mission d’évaluer a posteriori l’action du Gouvernement en matière de contrôle et de soutien aux exportations d’armement. Cette délégation a notamment pour mission d’évaluer la validité des licences d’exportations attribuées par le Gouvernement au regard du respect des traités internationaux et de l’évolution du contexte dans l’État acheteur. La délégation évalue également la procédure de contrôle des biens et technologies à double usage. Cette délégation exercerait une évaluation a posteriori sur certaines demandes d’exportation d’armement et de biens à double usage faisant l’objet d’un examen en Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre et en Commission ministérielle des biens à double usage. Elle évalue les activités du Gouvernement au regard du respect des critères de la position commune de l’Union européenne et du traité de commerce des armes.

« À cette fin, le Gouvernement lui transmet chaque année un rapport comportant une description de l’action du Gouvernement en matière de contrôle des exportations, des éléments relatifs aux critères des procédures d’attributions de licences au sein de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations des matériels de guerre, de la commission interministérielle des biens à double usage et du comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations et des transferts de matériels de guerre et assimilés, des critères de la liste des matériels soumis au régime de prohibition et d’éléments d’appréciation relatifs à l’activité générale des entreprises exportatrices de matériel de guerre.

« IV. Les travaux de la délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement sont couverts par le secret des affaires et par le secret de la défense nationale. Les membres de la délégation sont astreints au respect du secret des affaires et de la défense nationale pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en ces qualités. Chaque année, la délégation établir un rapport public dressant le bilan de son activité ou présentant ses recommandations. Ce document ne peut faire état d’aucune information ni d’aucun élément d’appréciation portant atteinte au secret des affaires ou de la défense nationale. Les agents des assemblées parlementaires désignés pour assister les membres de la délégation doivent être habilités, dans les conditions définies pour l’article 413-9 du code pénal, à connaître des mêmes informations et éléments d’appréciation.

« V. Dans le cadre de ses travaux, la délégation peut adresser des recommandations et des observations au Président de la République et au Premier ministre ainsi qu’aux ministres compétentes. Elle les transmet au président de chaque assemblée.

« VI. – La délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement établit son règlement intérieur. Celui-ci est soumis à l’approbation du bureau de chaque assemblée.

« VII. Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires dans les conditions fixées par l’article 7 de la présente ordonnance. »

La parole est à M. Rachid Temal.

M. Rachid Temal. Cet amendement ressemble aux deux précédents, mais avec quelques nuances que je vais détailler.

Nous proposons de créer une délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement. En effet, nous soutenons totalement l’industrie de défense et l’export, mais nous considérons par ailleurs normal que le Parlement, au travers de son rôle d’évaluation des politiques publiques, ait accès à des données précises sur ce sujet. Il s’agit bien d’une logique d’évaluation a posteriori, dans le cadre du secret-défense.

Nous serons attentifs à l’avis qui sera donné sur l’amendement n° 293 de la commission. Je l’ai dit à Christian Cambon et au ministre : à force de ne pas avancer sur ce sujet, nous risquons de passer d’une absence de contrôle à un contrôle total avant même la réalisation des ventes.

Mieux vaut adopter une politique des petits pas, en progressant vers une logique d’évaluation contrôlée via le secret-défense, que de laisser monter les enchères jusqu’au jour où nous ne pourrons plus faire autrement que d’instaurer un contrôle a priori.

Mme la présidente. L’amendement n° 201 rectifié, présenté par MM. Gontard, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « renseignement », sont insérés les mots : « et à la revue des exportations d’armements et de biens à double usage » ;

b) Après la première phrase du deuxième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle exerce également un contrôle a posteriori parlementaire de la politique du Gouvernement en matière d’exportation de matériels de guerre et matériels assimilés, de transfert de produits liés à la défense ainsi que d’exportation et de transfert de biens à double usage, y compris dans le domaine des programmes de coopération au regard des engagements internationaux de la France. » ;

c) Après le 7°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Des éléments d’informations issus du Gouvernement concernant la délivrance des autorisations d’exportation et de licences relatives aux matériels de guerre et assimilés ainsi qu’aux biens à double usage, le type et le nombre d’équipements exportés, les destinataires finaux, les utilisateurs finaux, l’utilisation finale déclarée, les notifications de refus, toutes mesures de suspension, modification ou abrogation de licence ainsi que leur justification. » ;

2° Le premier alinéa du II est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « quatre députés et quatre sénateurs » sont remplacés par les mots : « cinq députés et cinq sénateurs » ;

b) À la deuxième phrase, après le mot : « défense », sont insérés les mots : « et des affaires étrangères » ;

3° Après le 8° du III sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« …° La commission interministérielle des biens à double usage ;

« …° Le comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations de matériels de guerre ;

« …° Les représentants du personnel et des organisations représentatives des entreprises exportatrices d’armements. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 199, qui est également inspiré par les travaux d’Amnesty International et du Parlement européen.

Plutôt que de créer une nouvelle délégation parlementaire, il vise à étendre le champ de compétences de la délégation parlementaire au renseignement en y ajoutant des prérogatives relatives à l’exportation d’armement et de biens à double usage.

Si ce n’est pas l’option privilégiée par nos collègues Jacques Maire et Michèle Tabarot dans leur rapport, qui lui préfèrent des solutions plus ambitieuses, elle nous semble ouvrir la voie à un compromis. La DPR étant soumise au secret-défense, cette disposition permet de conjuguer un minimum de contrôle parlementaire avec les exigences lourdes – parfois trop lourdes – du secret-défense.

Notre rapporteur propose également d’étendre les prérogatives de la DPR. Je salue ce choix fort de la majorité sénatoriale, qui permettrait enfin à la France de se conformer au code de bonne conduite européen, dont l’importance a été rappelée par des résolutions du Parlement européen de 2008 et de 2020.

La mouture de l’amendement n° 293 de la commission, qui va suivre, nous semble d’ailleurs plus intéressante que celle de notre amendement, en cela qu’elle crée une commission au sein de la délégation parlementaire au renseignement, constituée de quatre parlementaires chargés de ce sujet.

Nous proposons donc de rectifier notre amendement pour le rendre identique au n° 293, dont la rédaction nous semble meilleure.

Mme la présidente. L’amendement n° 293, présenté par M. Cambon, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement en matière d’exportations de matériels de guerre, de biens sensibles et à double usage ainsi que l’évaluation de sa politique en la matière sont exercés par une commission de vérification des exportations d’armement.

La commission de vérification constitue une formation spécialisée de la délégation parlementaire au renseignement. Elle est composée de deux députés et de deux sénateurs. Les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de la défense en sont membres de droit. Les deux autres membres de la commission de contrôle sont désignés de manière à assurer une représentation pluraliste. Le président de la commission est désigné chaque année par les membres de la délégation.

II. – La commission prend connaissance de tous les documents, pièces et rapports susceptibles de justifier les décisions prises par le Gouvernement dont :

1° Les licences générales d’exportation visées au 1° de l’article L. 2335-3 du code de la défense ;

2° Les licences globales d’exportation visées au 2° du même article ;

3° Les licences individuelles d’exportation visées au 3° du même article ;

4° Les rapports d’activité et avis de la commission interministérielle pour l’étude des exportations des matériels de guerre ;

5° Les demandes ayant fait l’objet d’un refus explicite ou implicite ;

6° Les demandes retirées de l’instruction à l’initiative des demandeurs :

7° les procès-verbaux des contrôles adressés au comité ministériel des contrôles a posteriori ainsi que des rapports d’activité et avis de celui-ci ;

8° Les rapports des inspections compétentes dans ce domaine.

III. – La commission peut entendre :

1° Le Premier ministre ;

2° Les membres du Gouvernement, leur directeur de cabinet, leurs directeurs généraux et directeurs d’administration centrale ;

3° Le Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale ;

4° Le Chef d’État-major des armées ;

5° Le Délégué général pour l’armement ;

6° Les directeurs des services de renseignement.

IV. – Les travaux de la commission et l’établissement de son rapport sont réalisés dans les conditions prévues par les IV, V et VI de l’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

V. – La désignation des membres de la commission de vérification des exportations d’armement intervient dans un délai de quatre mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.

VI. – Le VIII de l’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi rédigé :

« VIII. – La délégation parlementaire au renseignement exerce les attributions de la commission de vérification des fonds spéciaux prévue à l’article 154 de la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002 et de la commission de vérification des exportations d’armement prévue à l’article … de la loi n° … du … de programmation militaire pour les années 2024-2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Cambon, rapporteur. Il s’agit d’un sujet important qui revient régulièrement dans les débats parlementaires relatifs au contrôle des ventes d’armes. Nous savons que ce domaine fait l’objet de contrôles beaucoup plus importants dans d’autres parlements.

À l’heure actuelle, les ventes d’armes font l’objet d’un examen par une commission présidée par le Premier ministre, la commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG), qui examine les licences d’exportation et émet, selon des critères bien identifiés, un avis favorable ou défavorable.

Cependant, l’ensemble de ce travail ne donne lieu qu’à un assez modeste rapport – même s’il a pris, grâce à vous, monsieur le ministre, un peu d’ampleur ces derniers temps – qui ne permet en aucun cas un véritable échange politique, comme on devrait l’avoir dans un régime parlementaire. Cela a été dit, notre pays est en pointe en termes de ventes d’armes, et 200 000 salariés travaillent dans nos industries d’armement : le problème n’est donc pas tout à fait négligeable… J’y insiste, le contrôle et l’échange politique ne peuvent pas avoir lieu.

Il est normal que différents groupes se soient manifestés au sein de la commission pour faire des propositions, que nous avons examinées. Je me suis moi-même engagé, en commission, à déposer un amendement dont le contenu n’est pas tout à fait nouveau puisqu’il faisait l’objet d’une proposition de loi que je n’avais pas défendue alors, même si j’avais reçu les encouragements du ministre de la défense de l’époque.

En l’occurrence, de quoi s’agit-il ? D’utiliser un organisme interparlementaire que vous connaissez bien, au moins par le nom, la délégation parlementaire au renseignement, laquelle rassemble quatre députés et quatre sénateurs et mène un travail de contrôle des activités de renseignement. Elle comprend en son sein une commission chargée du contrôle des fonds secrets.

Cette délégation fonctionne depuis dix ans à la plus grande satisfaction des gouvernements successifs. J’en fais partie, comme d’autres ici : je pense notamment à François-Noël Buffet, qui a présidé la DPR – la présidence faisant l’objet d’une alternance entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Nous respectons strictement les règles extrêmement sévères de secret absolu qui s’imposent aux membres de la DPR. Les réunions se font sans téléphone, dans une salle blanche. Nous auditionnons des personnalités sur les questions du renseignement – je vous laisse imaginer ce que cela a pu être au moment des actions terroristes. La DPR remet ensuite un rapport circonstancié au Président de la République, qui en fait ce qu’il veut : il peut faire retirer des éléments qui ne doivent pas, de son point de vue, être communiqués au public.

Cet organisme existe, fonctionne et est très apprécié. Il n’a jamais porté atteinte aux règles de fonctionnement et de secret que j’évoquais il y a un instant. Aussi, plutôt que de créer une nouvelle délégation, avec tout ce que cela sous-entend, j’ai estimé plus utile de l’utiliser et de créer en son sein une commission, sur le modèle de la commission de vérification des fonds spéciaux, qui vérifierait, évidemment a posteriori, les exportations d’armes.

Concrètement, comment les choses pourraient-elles se passer ? Le rapporteur de la CIEEMG peut venir une ou deux fois par an, lors de séances spécifiques de cette commission, présenter en quelque sorte un bilan des autorisations et des refus de licence. Ainsi, si le Gouvernement est attaqué – et il le sera un jour, car il y aura fatalement un accident déplorable –, il pourra dire qu’il a rendu compte de son activité au Parlement, lequel le confirmera et le rapportera au Président de la République, celui-ci étant, de par ses compétences, tout à fait en mesure de prendre les décisions qui s’imposent.

Voilà pourquoi cet amendement peut se substituer aux amendements, qui sont tout à fait respectables et vont dans le même sens, de mes collègues, avec leur soutien. Mais je supplie le Gouvernement de nous entendre sur ce sujet. De très nombreux journalistes et ONG suivent les activités de ventes d’armes de la France – vous le savez, monsieur le ministre. Un jour ou l’autre, lorsqu’un problème surviendra, et d’ailleurs même s’il n’y en a pas, il faudra bien trancher cette question.

Une ouverture avait été faite par l’ancien Premier ministre Jean Castex – je lui en rends hommage –, qui avait autorisé, par voie de décret, trois ministres – celui des armées, celui des affaires étrangères, et celui de l’économie et des finances – à venir ensemble devant le bureau ou une formation de chacune de nos assemblées. Jusqu’à présent, les trois ministres n’ont pas trouvé le temps de nous rencontrer, mais nous savons que leur emploi du temps est très chargé ; nous n’avons pas renouvelé nos invitations puisque nous n’avons jamais eu de feu vert pour cela.

Pour conclure, cette proposition d’utiliser la DPR serait l’occasion de régler une bonne fois pour toutes le problème et de faire un premier pas – à mon sens, cela s’arrêtera là – qui sera tout de même très utile pour le contrôle parlementaire.