M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Depuis de nombreuses années, nous savons que la pollution atmosphérique a des conséquences néfastes sur la santé humaine.

Santé publique France estimait en 2021 à 40 000 le nombre de décès prématurés par an dus à la pollution de l’air. Dans le Grand Lyon, métropole où je vis, plus de 15 000 personnes sont exposées à un niveau excessif de dioxyde d’azote.

Il y a urgence et la France est à la traîne ! Or la mise en place de ces ZFE se fait plus ou moins difficilement selon les territoires. Les collectivités ont besoin du soutien de l’État pour assurer le succès du dispositif.

La répétition étant l’art de la pédagogie, j’aimerais avoir si le Gouvernement prévoit de mettre en œuvre un plan de communication national afin de sensibiliser l’ensemble des citoyennes et des citoyens et de lever les ambiguïtés sur les réels objectifs d’une ZFE, que vous avez soulevées, monsieur le ministre, dans votre propos introductif.

Le Gouvernement prévoit-il d’autoriser le déploiement de moyens de contrôle et de rendre ainsi les ZFE réellement efficaces ?

Envisagez-vous d’instiller de la souplesse pour permettre aux populations éloignées des centres métropolitains et ne disposant ni de transports en commun ni des moyens financiers nécessaires pour changer de véhicule, d’y accéder sous certaines conditions, comme le préconisait la mission flash de l’Assemblée nationale sur les mesures d’accompagnement de la création de zones à faibles émissions mobilité ? À ce titre, le cas de Strasbourg me semble très intéressant.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur, la communication est théoriquement obligatoire dans les mois qui suivent la mise en place d’une nouvelle ZFE par une collectivité territoriale.

Toutefois, nous avons bien compris la limite de ce dispositif. Certaines personnes faisant probablement moins attention aux panneaux d’affichage que d’autres, alors qu’il s’agit des moyens d’expression des collectivités locales, et la pédagogie étant bien l’art de la répétition, je vous confirme qu’une campagne nationale beaucoup plus forte a vocation à être menée au deuxième trimestre de cette année. J’y associerai le groupe des quarante-trois présidents d’agglomération pour étudier avec eux les arguments à mettre en avant et les éléments sur lesquels nous devons insister.

Cette communication est importante pour rappeler la finalité de la mesure et pour ne pas la laisser dépeindre comme recherchant un objectif de forte exclusion, même si j’ai conscience que ce risque existe.

Vous m’interrogez sur l’accompagnement des collectivités, en particulier sur les moyens de rendre effectives les ZFE. Tout l’enjeu – j’ai eu l’occasion de le préciser – consiste à se donner les moyens de construire des dispositifs clés en main dont les collectivités pourront se saisir pour assurer le contrôle automatisé du respect des zones à faibles émissions. Celles qui ne souhaiteraient pas un tel contrôle pourraient d’ailleurs s’en passer : les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) à Lyon, par exemple, comme partout en France, sont déjà habilités à sanctionner le non-respect d’une ZFE-m.

Il faut suivre, en matière de moyens automatisés, des procédures relevant de l’Antai, mais pas seulement. Nous nous penchons actuellement sur cette question. Nous voulons que les solutions retenues permettent d’intégrer dans la future base de données les véhicules des personnes en situation de handicap, qui ne sont pas concernés par le dispositif, les véhicules anciens et les véhicules utilitaires qui bénéficieraient d’exonérations.

Vous m’interrogez également sur l’accessibilité sociale. L’enjeu, je vous le confirme, est d’éviter toute situation d’exclusion. C’est la raison pour laquelle nous mettons en place un groupe de travail, de même que nous suivons de près l’initiative strasbourgeoise.

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. La question des ZFE, dont nous débattons aujourd’hui, concerne principalement les métropoles.

Pour autant, la pollution atmosphérique touche tout le monde. Les conséquences néfastes sur l’environnement dépassent d’ailleurs le cadre de nos seules frontières.

Les ZFE poussent à l’interdiction de l’usage de véhicules polluants, qui sont souvent ceux des ménages à faibles ressources. Il s’agit fréquemment du seul moyen de transport disponible pour se rendre au travail, étudier ou se faire soigner.

Nous ne pouvons nous contenter d’interdire ; il nous faut également assurer la transition des mobilités en la soutenant davantage. Dès lors, la question du coût nous paraît centrale.

Je prendrai un exemple simple, celui de la performance économique du fret ferroviaire. En raison de la flambée actuelle du prix de l’électricité, le transport ferroviaire aurait avantage à faire rouler des locomotives diesel sous caténaire plutôt que d’utiliser l’énergie électrique. Le chantier de transport combiné de la plateforme de Rennes est ainsi contraint d’envisager un surcoût du transport ferroviaire, alors que le mode diesel reviendrait beaucoup moins cher.

Les entreprises en reviennent donc forcément à des modes de transport plus polluants. Il en va ainsi des liaisons entre Rennes et le sud-est de la France, tandis qu’un autre projet est singulièrement avancé entre Rennes et Lille pour des marchandises partant de la campagne et à destination de ces mêmes villes.

Monsieur le ministre, ne serait-il pas temps d’envisager des dispositions spécifiques afin de ne pas contrarier les projets de transport vertueux ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur Lahellec, vous allez m’obliger à citer une nouvelle fois un rapport sénatorial. (Sourires.)

En effet, l’excellent rapport d’information Comment remettre la SNCF sur rail ? s’intéressait aux moyens de doubler la part du fret ferroviaire en France pour revenir dans la moyenne européenne. À se pencher sur les préconisations formulées par les sénateurs, dont certains sont ici présents, la question du coût n’est pas l’élément déterminant pour bloquer le déploiement du fret ferroviaire.

Un rendez-vous important se tiendra sans doute à la fin de ce mois : la remise du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI). Ce sera une bonne occasion de mesurer notre degré d’ambition ferroviaire. À ce titre, je ne me tourne pas seulement vers Didier Mandelli, dont chacun se souvient du travail sur la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, ni vers Philippe Tabarot, qui a été membre de cet organisme.

Pour aller plus loin, deux questions sont incidemment posées.

En premier lieu, il faut examiner les suites à donner à la LOM. Les fameux RER métropolitains sont des éléments de réponse. Ils apportent une offre de substitution dans les territoires les plus denses, donc dans les ZFE.

En second lieu, et plus largement, se pose la question du fret. La régénération du réseau est positive pour tous les trains, fret compris. Si certaines difficultés peuvent être liées à cette régénération sur les plateformes, d’autres sont liées à l’existence d’une centaine de sociétés différentes exploitant les wagons de fret et dont les systèmes d’accroche ne sont pas automatisés, ce qui provoque des troubles musculo-squelettiques pour les personnes qui les manœuvrent et entraîne des temps de logistique qui ne sont pas nécessairement adaptés.

Votre question prolonge notre débat en ce que le développement du fret permet de diminuer la circulation des poids lourds sur notre territoire et pas uniquement à l’intérieur des ZFE. Si cet enjeu n’est pas en lien direct avec notre discussion, il s’inscrit bien dans une lutte plus large, à la fois pour la décarbonation et contre les pollutions.

Je vous donne donc rendez-vous dans quelques semaines, monsieur le sénateur, pour poursuivre cette réflexion au moment de nous pencher sur la question du ferroviaire.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. L’instauration de ZFE dans les grandes métropoles françaises est liée à un objectif clair de santé publique. Chacun connaît les effets de la pollution – qui entraîne 40 000 décès chaque année – sur la santé humaine.

La multiplication des ZFE dans les prochaines années suppose néanmoins une meilleure acceptation sociale. La transition écologique ne pourra se réaliser ni être imposée dans un contexte de rejet.

À l’heure actuelle, cette acceptation rencontre des obstacles. Dans une partie des plus grandes métropoles de l’Hexagone, les réseaux de transport en commun demeurent insuffisamment développés pour permettre aux habitants de se déplacer rapidement, particulièrement dans les communes périurbaines qui ne bénéficient pas, contrairement aux centres-villes, d’une offre de transport public adaptée. Dans ces communes à dominante pavillonnaire, éloignées des zones d’emploi, l’utilisation du véhicule personnel relève dès lors d’une nécessité.

Une fois ce constat dressé, il nous faut urgemment résoudre l’équation financière. Les dispositifs existants en matière de transition vers des véhicules propres, y compris la surprime dans les zones à faibles émissions, ne peuvent constituer une aide suffisante pour les millions de ménages modestes concernés. La diminution du prix des véhicules électriques, annoncée depuis plusieurs années, ne se matérialise que lentement ; or ce coût important constitue une barrière difficilement franchissable pour nos concitoyens les moins aisés.

Dès lors, monsieur le ministre, ma question est très simple : comment le Gouvernement compte-t-il améliorer l’accompagnement financier des ménages les plus modestes dans l’acquisition de véhicules propres ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur Longeot, je souscris à tous vos propos, sauf pour dire que la question est simple… (Mme Annick Jacquemet et M. Jean-François Longeot acquiescent.) Si tel était le cas, nous aurions déjà trouvé des consensus nous permettant d’y répondre.

Au regard du nombre de personnes qui considèrent que l’écologie punitive est l’ennemie de l’écologie et que conduire une politique de transition écologique contre les Français n’entraîne ni transition écologique ni adhésion,…

M. Laurent Duplomb. C’est pourtant ce qui se passe !

M. Christophe Béchu, ministre. … mieux vaut chercher à inciter plutôt qu’à contraindre. Nous devrions tous, de bonne foi, nous retrouver sur cette position.

Des injonctions contradictoires transparaissent très concrètement : je les assume. On ne peut attendre des secteurs industriels concernés qu’ils soient matures alors qu’ils veulent savoir avec certitude si certaines lois vont entrer en vigueur avant de développer ou de mettre en place une partie de leur recherche et développement…

Où est la solution ? Elle se trouve à mi-chemin entre ceux qui exigent la mise en place immédiate des radars afin de sanctionner rapidement et ceux qui appellent à ne pas les installer. La voie intermédiaire consiste à conserver les dates prévues, à adopter les mesures d’accompagnement et à miser sur deux éléments.

Le premier élément, c’est la mise en place d’un marché des véhicules hybrides et électriques de seconde main. Dans quel monde les ménages achètent-ils des voitures neuves ? Dans notre pays, l’âge moyen des propriétaires de voitures neuves est de 57 ans. Or ces propriétaires appartiennent rarement aux deux derniers déciles. On se retrouve donc avec des aides laissant un reste à payer inatteignable pour les plus fragiles compte tenu du prix des véhicules électriques. C’est la raison pour laquelle il est si important de développer la seconde main.

Le second élément, c’est la mise à disposition de véhicules de plus petit gabarit. Il s’agit du chaînon manquant dans la mesure où nous savons tous qu’il est impossible de développer un réseau de transports en commun à même de se substituer totalement à la voiture individuelle dans les 36 000 communes de ce pays.

Dans les zones denses, il est souhaitable de développer les transports en commun pour les rendre plus performants. Mais ce serait une aberration, notamment écologique, de faire rouler des cars à vide dans des secteurs où il serait préférable de se tourner vers une voiture propre ! L’alternative n’est pas toujours envisageable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur le manque de lisibilité et de prévisibilité globale des ZFE-m qui handicape les entreprises et les transporteurs dans leurs décisions de renouvellement de flotte.

En effet, si le cadre législatif laisse aux métropoles une grande souplesse pour déterminer le calendrier de mise en œuvre, les conditions d’accès aux zones et les mesures d’accompagnement, cette flexibilité entraîne surtout une forte différenciation d’une métropole à une autre.

Aussi, quand la majorité d’entre elles, à l’instar de la métropole bordelaise, dont je suis issue, n’en sont qu’à la phase de concertation, la métropole de Grenoble interdit dès à présent la circulation des véhicules utilitaires légers et poids lourds non classés, Crit’Air 5, 4 et 3.

C’est pourquoi, en sus d’approfondir le processus d’harmonisation des mesures à l’échelon national, il est primordial que vous répondiez plus concrètement aux difficultés structurelles que rencontrent les professionnels dans leur adaptation aux nouvelles normes imposées par ces ZFE.

En effet, leur parc, composé quasi exclusivement de véhicules diesel classés au mieux Crit’Air 2, est tributaire d’une offre industrielle de véhicules classés 0 ou 1 encore très réduite, notamment sur les segments des véhicules les plus lourds et ayant besoin d’une autonomie élevée.

Ajoutez à cela d’importants délais de livraison, des coûts d’acquisition élevés et des incertitudes sur la disponibilité et l’avitaillement en énergies alternatives, et vous aurez autant de raisons de trouver une voie de négociation avec les métropoles afin d’obtenir des délais de mise en œuvre. Merci de m’éclairer sur vos orientations en la matière.

Enfin, pouvez-vous m’indiquer, monsieur le ministre, s’il est envisageable que l’État mette en place, sur le modèle de la transition énergétique des logements, différents opérateurs pouvant accompagner les entreprises, en qualité de tiers financeurs, dans leurs décisions de renouvellement des flottes ?

Cette démarche incitative permettrait un recours simplifié et plus économique au rétrofitage, par exemple, mais aussi la baisse des coûts de production des véhicules Crit’Air 0 ou 1 ainsi qu’une diminution du reste à charge des demandeurs, lequel est toujours aussi élevé malgré les subventions de l’État et des territoires.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Madame la sénatrice Delattre, je vous remercie de cette question, qui me permet de me concentrer sur les véhicules professionnels.

Avant de répondre plus précisément, je vous rappelle qu’il existe des aides spécifiques pour les artisans. Je parle d’une enveloppe de 9 000 euros dans le cadre de la prime à la conversion, d’un bonus écologique, qui peut monter jusqu’à 4 000 euros, et de la surprime ZFE pour la prime à la conversion, qui peut elle-même monter jusqu’à 3 000 euros. Ensuite, il existe un dispositif spécifique pour les poids lourds, avec un appel à projets coordonné par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) permettant un accompagnement jusqu’à 100 000 ou 150 000 euros par véhicule lourd dans le cadre de la mutation d’une flotte logistique.

Je passe rapidement sur ces aides, qui ne sont pas le cœur de votre question. Vous m’interrogez en effet, d’un côté, sur l’harmonisation, de l’autre, sur la façon d’accompagner la filière, indépendamment de ces aides.

L’harmonisation va être au cœur des préoccupations des groupes de travail animés par Mme Jean et M. Moudenc, qui pourront s’appuyer sur l’Ademe et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) ainsi que sur le secteur de la logistique. Il est primordial d’intégrer les professionnels à ces groupes de travail pour faire remonter leurs préoccupations, comme vous venez de le faire, madame la sénatrice, sur la difficulté de procéder à un changement de motorisation.

L’âge moyen du parc professionnel est un peu moins élevé que celui du parc des particuliers. La raison en est simple : plus une voiture est vieille et plus elle consomme et le prix de l’essence étant l’un des éléments de leur compétitivité, les entreprises ont plutôt tendance à rajeunir leur parc. Il s’agit donc de problématiques différentes.

En ce qui concerne le tiers financement, je vous avoue que je m’interroge. Dans quelques jours, ce n’est pas un secret, le Gouvernement va soutenir une proposition de loi, qu’il avait appelée de ses vœux, sur le tiers financement pour la rénovation thermique des bâtiments des collectivités locales. Pourrait-on imaginer un dispositif du même type pour le rétrofitage ? La question est ouverte…

M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, comme toutes les grandes métropoles françaises, Nantes devra mettre en place une ZFE au plus tard le 31 décembre 2024.

Sur le plan purement environnemental, cela peut apparaître comme une bonne nouvelle pour la santé des Nantais. Toutefois, dès le lendemain, c’est-à-dire le 1er janvier 2025, la dérogation accordée pour l’atterrissage des avions à Nantes Atlantique tombera. De ce fait, de nombreux avions survoleront Nantes, une ville que vous connaissez bien, et notamment des quartiers comme Graslin, l’Erdre, Bretagne, qui comptent des dizaines de milliers d’habitants.

Monsieur le ministre, convenez qu’il va être difficile pour nous de parler de zones à faibles émissions, dès lors que les émissions toxiques liées au transport aérien vont remplacer celles du transport routier. Le Président de la République a fait le choix, voilà quelques années, d’abandonner le projet de transfert et de maintenir l’aéroport à proximité du centre-ville. Les Nantais vont donc en subir directement les conséquences en matière de qualité de l’air dans les prochaines années.

Monsieur le ministre, aurons-nous à Nantes une vraie ZFE ou bien une ZFE en trompe-l’œil, les particules fines des avions venant remplacer celles des voitures ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Madame Garnier, curieusement, il arrive souvent que je sois très surpris par les questions d’élus proches géographiquement de mon territoire. (Sourires.) Je m’attendais à beaucoup de questions, mais pas à celle-là !

J’en avais préparé d’autres, qui ne m’ont pas encore été posées, en particulier sur les ports. En effet, des maires m’ont fait savoir qu’ils souhaitaient des mesures à ce sujet. C’est un dossier que nous ouvrons : il s’agit de nous assurer que les efforts entrepris pour l’électrification des ports ne se traduisent pas par l’émission de particules fines venant des bateaux à quai.

Dois-je comprendre, madame Garnier, que vous nous suggérez de prolonger les dispositifs applicables à l’aéroport Nantes-Atlantique et arrivant à échéance ? Ou souhaitez-vous que nous menions un travail spécifique sur ce point ? Je suis bien évidemment ouvert à cette dernière hypothèse.

Notre sujet est non pas de nous interroger sur l’origine des émissions, mais bien de mesurer les impacts positifs. La seule chose que je puisse dire, à la minute où je vous parle, c’est que les territoires qui ont déjà été obligés d’instaurer une ZFE étaient en dépassement de seuils. Nantes n’est pas dans ce cas.

Je suis à votre disposition, tout comme à celle de Mme la présidente de la métropole nantaise, pour prolonger cette discussion. Je vous confirme que la circulation automobile n’est pas seule en cause. Il est d’autres types de pollution auxquels le Gouvernement s’attaque avec la même ardeur.

Quand nous mesurons les seuils pour savoir si un territoire doit passer en ZFE, nous ne distinguons pas les sources de pollution. En revanche, nous nous attachons à évaluer l’impact des ZFE déjà mises en place. Pour l’instant, la seule pour laquelle nous disposons d’un minimum de recul, c’est celle de Paris, où l’on estime que 50 000 à 100 000 habitants sont sortis des seuils de pollution.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.

Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, vous avez dit à plusieurs reprises qu’il allait falloir faire preuve de pédagogie pour expliquer cette réforme. Vous comprenez qu’il va être difficile d’expliquer aux Nantais qu’il y aura, demain, les bonnes particules fines, liées aux passages des avions, et les mauvaises particules fines, liées à la circulation automobile !

Je suis bien évidemment ouverte à votre proposition de rencontre et d’échange. Le sujet mérite d’être étudié de près pour garantir aux Nantais la qualité de l’air qu’ils appellent de leurs vœux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre. Je n’aimerais pas que l’on nous prête, à l’un et à l’autre, des propos que nous n’aurions pas tenus : à la minute où nous parlons, ni vous ni moi ne disposons d’éléments nous permettant de dire que la situation va se dégrader à l’échéance que vous avez évoquée, ni dans quelle proportion.

Notre souci commun est la santé des habitants. Nous devons donc être en mesure de déterminer la part de chaque source potentielle de pollution en particules fines ou en dioxyde d’azote.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. Monsieur le ministre, la mise en place de zones à faibles émissions est une nécessité qui réclame beaucoup d’anticipation. En effet, la ZFE mobilité va contraindre un grand nombre de nos concitoyens à moins utiliser leur voiture thermique, trop ancienne.

S’il s’agit d’une bonne chose non seulement pour la décarbonation de notre mode de vie, mais surtout pour l’amélioration de la qualité de l’air, ce qui est tout de même le but premier de ce dispositif, c’est aussi une très mauvaise nouvelle pour ceux qui n’ont aucun autre moyen personnel de se déplacer. C’est le cas notamment des personnes habitant dans les villes, ou en périphérie de villes, où les transports en commun et les mobilités dites douces sont à la peine actuellement.

Dans certains territoires, l’offre de transports en commun s’est réduite avec la crise du covid-19. La situation s’est ensuite aggravée avec les difficultés de recrutement de chauffeurs et le coût de l’énergie. Les services ne fonctionnent pas à plein et n’ont pas retrouvé partout le niveau d’avant-covid. Or il est légitime que tous les citoyens puissent trouver des solutions pour leurs déplacements quotidiens. Monsieur le ministre, avez-vous envisagé des consultations citoyennes à même d’accompagner sereinement cette transition ?

Si les transports publics relèvent de la compétence des collectivités, nous savons très bien que certaines d’entre elles n’offrent pas encore toutes les alternatives utiles, faute d’investissement.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire concrètement comment l’État compte aider les collectivités à court, moyen et long terme pour développer les solutions alternatives au « tout-voiture » ? Je veux parler de véritables pistes cyclables et de cheminements de piétons dignes de ce nom.

Enfin, si nous voulons que le calendrier soit respecté et que l’acceptabilité sociale soit assurée, il faut que l’instauration des ZFE soit juste. Les vignettes Crit’Air le sont-elles ? C’est une question que l’on peut légitimement se poser, sachant qu’elles n’intègrent, par exemple, ni la masse ni la consommation du véhicule.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Madame la sénatrice, j’ai déjà répondu sur la question de la pédagogie ; je vais donc me concentrer sur les modes de transport alternatifs à la voiture que vous avez évoqués et sur la façon d’accompagner ces usages.

Il faut être juste, tout n’est pas seulement de la faute des collectivités locales ou de l’offre. Le vrai sujet, c’est que nous n’avons pas retrouvé le niveau de fréquentation pré-covid, même là où l’offre est restée comparable. Certains de nos concitoyens se méfient et ne veulent pas se retrouver à touche-touche dans des transports en commun. Je le répète, à offre constante, la fréquentation a reculé dans un certain nombre d’endroits.

Au-delà de ce constat, nous savons que les besoins d’investissement sont importants, d’où la relance de l’appel à projets pour les transports en commun en site propre.

Je souhaite également évoquer deux programmes, qui ne sont pas du tout mineurs : d’une part, le plan Vélo, qui s’élève à 250 millions d’euros en 2023, soit le double de la moyenne de ces quatre dernières années, d’autre part, le plan covoiturage, doté de 200 millions d’euros, mis en œuvre cette année.

Nous sommes convaincus que la lutte contre l’autosolisme et le recours aux solutions souples est l’un des moyens les plus sûrs d’être au rendez-vous climatique, sans bouleverser notre parc. De ce point de vue, nous constatons des résultats spectaculaires dans un certain nombre de collectivités, en particulier dans celles où une aide financière a été mise en place pour accompagner le covoiturage, soit précisément ce que le Gouvernement entend soutenir.

La suite, ce sont les infrastructures et les réflexions sur un certain nombre de sujets dans le cadre de la planification écologique. Certains préconisent que l’on donne aux élus locaux la capacité de faire davantage en autorisant, par exemple, le relèvement du versement transport, impôt s’appuyant sur la masse salariale des entreprises pour financer les réseaux de transport sur tout notre territoire.

Faut-il aller plus loin ? La question est ouverte : je pense que le taux de TVA réduit de 5,5 % sur les transports est une excellente idée en ce qu’elle permet de redonner du pouvoir d’achat ou du soutien à l’investissement dans les territoires.

Nous devons bien évidemment concentrer notre action non seulement sur les voitures thermiques, mais aussi sur les autres mobilités qui permettent de les remplacer.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.

Mme Angèle Préville. Monsieur le ministre, je n’incriminais pas du tout les collectivités. Je vous interpellais sur la nécessité d’un choc de l’offre : les pistes cyclables en France ne sont pas au niveau que nous pourrions attendre. Si peu de gens les utilisent, c’est souvent pour des questions de sécurité.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Angèle Préville. Nos concitoyens doivent pouvoir utiliser leur vélo en toute sérénité.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre. Je partage votre constat, mais il est assez rare que l’on décide d’une piste cyclable à l’échelon du ministère.

Le plan Vélo est là pour répondre aux éventuels besoins financiers, mais le déficit de volonté politique ne dépend pas que du Gouvernement.