M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.

M. Claude Kern. Mes chers collègues, je vous lirai la déclaration de Jean-Pierre Moga, que je partage.

« Cet amendement, s’il était voté, tendrait à porter un coup important à nos PME locales et à nos exploitants agricoles.

« Le secteur viticole et celui des spiritueux sont des secteurs économiques locaux créant de la richesse et des emplois avant tout dans les territoires ruraux. À ce titre, ils jouent un rôle fondamental pour l’équilibre économique des territoires.

« L’amendement dont nous débattons vise à déplafonner l’indexation des accises sur l’inflation de la même manière que pour le tabac, alors que les structures des prix de ces produits sont complètement différentes : le tabac est un produit dont le prix est complètement administré par les pouvoirs publics ; l’alcool dépend, lui, d’un prix de marché indépendant de l’État.

« L’inflation a déjà frappé la filière alcool de plein fouet ces dernières semaines : le prix du verre a grimpé de 60 %, les matières agricoles ont flambé, l’étiquetage a été renchéri. Il n’y a aucune raison d’augmenter encore davantage le prix de l’alcool.

« De surcroît, nous savons très bien que ce renchérissement se traduira par des importations massives d’alcool depuis l’étranger, dans toutes les zones frontalières de notre pays.

« Chers collègues, pour soutenir nos filières et nos emplois, je crois qu’il est important de ne pas porter ce coup de massue à un secteur qui se débat déjà, comme il le peut, avec l’inflation actuelle. » (Marques dapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Il est en effet question de santé publique dans le budget de la sécurité sociale, mais aussi, évidemment, des conséquences sur le secteur économique – personne ne le nie.

Si cette mesure a reçu un avis favorable de la commission, c’est parce qu’elle est très mesurée. Elle vise simplement à ne pas maintenir le plafond de 1,75 %, qui n’est plus en adéquation avec la situation de l’inflation.

J’entends mes collègues du secteur viticole et partage leur constat, mais le problème du secteur n’est pas la fiscalité.

Je constate en revanche que le Gouvernement nous a annoncé un grand virage de la prévention. Les trois grands problèmes de santé publique dans notre pays sont le tabac, l’alcool et la pollution de l’air. Madame la ministre, sur le tabac, vous avez baissé le pavillon ; sur l’alcool, vous venez de vous planquer ; sur la pollution de l’air, votre gouvernement a été condamné plusieurs fois.

Votre virage de la prévention est à 180 degrés : c’est un demi-tour ! Vous ne traitez aucune des thématiques principales de prévention. Vous vous moquez du monde ! Voilà la réalité, vous ne tenez aucune position courageuse en matière de prévention.

Sur lequel de ces trois grands problèmes de santé publique nous proposez-vous d’agir ?

L’alcool ? Vous venez d’émettre un avis défavorable au simple fait de supprimer un plafond de 1,75 % alors que l’inflation est à 5,6 % ! Quelles mesures proposez-vous ? Aucune !

Quelles mesures sur la pollution de l’air, la santé environnementale dans votre projet de budget ? Aucune !

Pardon, mais, pour réaliser un virage de la prévention, vous manquez de courage ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Thomas Dossus applaudit également.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1039 rectifié quindecies.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains et, l’autre, du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 1039 rectifié quindecies
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 614 rectifié

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 34 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 322
Pour l’adoption 103
Contre 219

Le Sénat n’a pas adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et RDPI.)

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 582 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Fialaire, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

L’amendement n° 1040 rectifié ter est présenté par M. Jomier, Mme Préville, M. Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic, Marie, Montaugé, Sueur, Tissot, Devinaz, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Antiste et Assouline, Mme Blatrix Contat, MM. Bouad, Bourgi et Cardon, Mme Conway-Mouret, MM. Durain et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme de La Gontrie, MM. Leconte, Lozach, Lurel, Magner et Michau, Mme Monier, MM. Pla et Raynal, Mme S. Robert, MM. Roger, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe et M. Vaugrenard.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 1613 bis, du code général des impôts, il est inséré un article 1613… ainsi rédigé :

« Art. L. 1613 …. – I. – Il est institué une contribution perçue par la Caisse nationale de l’assurance maladie sur les boissons alcooliques :

« 1° Définies par la catégorie « Autres bières » à l’article L. 313-15 du code d’imposition sur les biens et services ;

« 2° Conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail soit directement, soit par l’intermédiaire d’un professionnel ou préalablement assemblées et présentées dans des récipients non destinés à la vente au détail afin d’être consommables en l’état ;

« 3° Contenant un ou plusieurs arômes naturels ou artificiels et au moins vingt grammes de sucre ou une édulcoration équivalente par litre exprimée en sucre inverti.

« II. – Le tarif de la contribution mentionnée au I est déterminé par décret au 1er janvier 2023. Il est relevé au 1er janvier de chaque année dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le second chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Le tarif est publié au Journal officiel par arrêté du ministre chargé du budget.

« III. – A. – La taxe est due lors de la mise à la consommation en France des boissons mentionnées au I. Elle est acquittée, selon le cas, par les fabricants, les entrepositaires agréés, les importateurs, les personnes qui réalisent l’acquisition intracommunautaire de ces boissons, les représentants fiscaux des opérateurs établis dans un autre État membre de l’Union européenne mentionnés à l’article 302 V bis ou par les personnes mentionnées au 4° du I de l’article 302 D.

« B. – Il appartient au redevable de démontrer que les quantités de sucres comprises dans les produits taxés et non prises en compte dans le calcul de l’impôt ne sont pas des sucres ajoutés. À défaut, le redevable est tenu au paiement du complément d’impôt.

« IV. – Cette taxe est recouvrée et contrôlée sous les mêmes règles, conditions, garanties et sanctions qu’en matière de contributions indirectes.

« V. – Par dérogation aux dispositions précédentes, les bières répondant aux critères du I produites par les brasseries dont la production annuelle, tous produits confondus, est inférieure à 200 000 hectolitres ne sont pas redevables de cette contribution. »

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 582 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. Cet amendement vise à adopter une taxation spécifique, inspirée du modèle de la taxe « prémix », sur les bières sucrées industrielles.

Les grandes marques qui développent ces bières aromatisées misent à la fois sur le goût sucré, sur un prix attractif et sur le marketing pour toucher les jeunes publics.

Nous souhaitons protéger les plus jeunes, particulièrement attirés par leur goût, en évitant de faire de ces boissons des produits d’entrée vers la consommation d’alcool.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 1040 rectifié ter.

M. Bernard Jomier. Nous abordons ici le cas particulier de la consommation des adolescents, qui sont, semble-t-il, la cible marketing.

Nous avons légiféré, dans cet hémicycle, pour pénaliser les prémix à base de vin. Par parallélisme et dans le même esprit, nous proposons la même démarche pour les prémix à base de bière.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’ai expliqué précédemment la position de la commission à ce sujet.

Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Cet amendement pose un problème juridique. Les bières sont déjà assujetties à une taxation strictement encadrée par la directive européenne du 19 octobre 1992 concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur l’alcool et les boissons alcooliques.

Deux taux sont possibles : un taux réduit pour les bières qui titrent 2,8 degrés d’alcool et un taux normal pour les bières dépassant ce seuil.

Il semble difficile de créer une tranche fiscale supplémentaire sans une modification de la directive, ce qui nécessiterait, au préalable, de bâtir un consensus avec nos partenaires.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol. L’Europe a bon dos !

M. Bernard Jomier. Quel courage !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Monsieur Jomier, vous m’interpellez pour la troisième fois. J’ai de l’humour, mais j’ai aussi des limites.

Voici donc ma réponse. Je n’ai jamais manqué de courage. Je respecte et connais votre engagement de longue date en matière de santé et nous partageons même tous les deux l’honneur d’être élus de Paris.

Je suis quelqu’un de très courageux. Je suis ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, des professions libérales, de la consommation et des indépendants.

M. Mathieu Darnaud. Waouh ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Si vous aviez voulu défendre les sujets majeurs qui ont été abordés cet après-midi – lutte contre la consommation de cannabis ou d’alcool par exemple – et sur lesquels vous nous reprochez, par manque de courage, d’avoir effectué un virage à 180 degrés, vous auriez pu les « accrocher » dans la quatrième partie du projet de loi, ce qui vous aurait permis d’en débattre également avec le ministre de la santé et de la prévention. (M. Bernard Jomier ironise.)

Vous me l’accorderez : je ne suis « que » ministre déléguée à Bercy. Je vous répondrai donc non pas sur la partie dépenses, mais sur la partie recettes de ce texte.

Par ailleurs, quand on a augmenté le paquet de cigarettes de 50 centimes en cinq ans, on est assez mal placé pour donner des leçons en matière de prévention.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Les petites brasseries qui se montent dans les territoires ruraux sont aussi confrontées à l’augmentation du coût de l’énergie, des matières premières, des verres et des emballages – Daniel Laurent l’a très bien décrit.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Elles ne sont pas concernées !

M. Daniel Chasseing. Ces entreprises sont, à 98 %, de très petites entreprises (TPE). Les sucres, nécessaires au brassage, sont naturellement présents dans les bières.

Ne modifions pas la fiscalité des bières en fonction du taux de sucre. Cela entraînerait des difficultés pour nos entreprises et n’aurait pas d’effets bénéfiques dans le domaine social.

Les bières ne sont pas des prémix, c’est-à-dire des boissons alcoolisées, aromatisées et gazeuses.

Vous indiquez que les brasseries artisanales seraient exemptées du dispositif. Les bières sont-elles aromatisées, plus ou moins sucrées ? C’est très compliqué.

Monsieur Jomier, l’augmentation des prix empêche-t-elle véritablement les gens de consommer ? Mieux vaut faire de la prévention dans les collèges, les lycées et les associations pour alerter sur les dangers de l’addiction et de la consommation excessive.

Pour toutes ces raisons, je voterai contre ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Permettez-moi cette précision qui va rassurer mes collègues : l’objet de l’amendement concerne exclusivement les bières aromatisées et sucrées dont la production annuelle dépasse 200 000 hectolitres.

Aussi les autres bières et les petites brasseries seraient-elles exemptées de la taxation. Est-ce bien cela ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Absolument ! (Mme Émilienne Poumirol manifeste sa satisfaction.)

M. Jérôme Bascher. En théorie !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 582 rectifié et 1040 rectifié ter.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Article additionnel après l'article 8 - Amendements n° 582 rectifié et n° 1040 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 8 - Amendements n° 977 et n° 515 rectifié bis

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l’adoption 297
Contre 42

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.

L’amendement n° 614 rectifié, présenté par MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article 1613 ter du code général des impôts, après les mots : « pour boissons destinés », sont insérés les mots : « et les aliments destinés ».

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Les études récentes sur le surpoids et l’obésité relèvent des disparités de plus en plus inquiétantes entre les Français, ainsi que leurs conséquences sur la longévité, le bien-être et la précarité.

Je ne reviens pas sur le constat selon lequel l’obésité connaît en France une situation épidémique. La prévalence du diabète de type 2 et des maladies chroniques dépasse, dans certains départements français, en particulier outre-mer, 40 %.

L’amendement de Stéphane Artano vise à étendre aux aliments la contribution perçue sur les boissons et préparations liquides. Il s’agit, en d’autres termes, de taxer les aliments sur-sucrés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes d’accord : manger trop sucré n’est pas bon pour la santé.

Mieux vaudrait peut-être diminuer le nombre de bonbons que l’on offre aux enfants plutôt que de proposer une telle taxation sur les aliments sucrés.

Les taux du barème actuel sont conçus non pas pour les aliments, mais pour les boissons, tout comme les autres dispositions du régime fiscal qui leur est applicable.

Si l’on comprend bien l’intention de son auteur, l’amendement ne semble pas opérationnel, en ce qu’il ne permet pas une mise en œuvre aboutie de la fiscalité sur les produits trop sucrés.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 614 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 614 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 516 rectifié bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 977, présenté par M. Dossus, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :g

La seconde colonne du tableau du deuxième alinéa du II de l’article 1613 ter du code général des impôts est ainsi rédigée :

« 

TARIF APPLICABLE (en euros par hl de boisson)

6,24

7,28

8,3

9,34

11,42

13,5

15,58

19,72

23,88

28,02

32,16

36,32

40,48

44,62

48,78

».

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement porte cette fois-ci sur un produit légal. (Sourires sur les travées du groupe GEST.)

Les dommages causés sur l’organisme par la consommation importante de sucre sont connus et documentés : diabète, affections cardiovasculaires, surpoids, cholestérol, hypertension.

Le problème de santé publique est réel et doit être traité de manière plus efficace. Pour d’autres produits tout aussi nocifs – nous en avons parlé –, l’État a pris ses responsabilités.

Comme l’a rappelé Mme la ministre, une taxation dissuasive a ainsi été mise en place sur le tabac. Réévaluée à intervalles réguliers, elle s’accompagne de slogans et images dissuasifs sur l’emballage. Aujourd’hui, 80 % du prix du paquet de cigarettes est constitué de taxes et accises. Le résultat est sans appel : le volume des ventes de tabac a été divisé par deux entre 1990 et aujourd’hui.

Il nous faut employer la même méthode avec les produits les plus sucrés, en premier lieu les sodas. Il existe aujourd’hui une taxe sur le sucre ajouté dans les boissons non alcoolisées, mais son taux est trop faible pour produire de véritables effets en termes de santé publique.

Pour la plupart des sodas commercialisés, le montant de la taxe s’élève à moins de 15 centimes par litre de boisson. Nous vous proposons un saut quantitatif qui doublerait le taux de la taxe pour que les prix s’en ressentent et que les habitudes alimentaires en soient modifiées.

Nous souhaitons également que la réévaluation soit aussi régulière que pour le tabac, afin de maintenir l’effet dissuasif dans le temps.

C’est également un enjeu de finances publiques pour le financement de notre sécurité sociale. La taxe rapporte, dans sa forme actuelle, un peu plus de 480 millions d’euros à la sécurité sociale. Or l’adoption de l’amendement permettrait de doubler cet apport. Cela serait plus que bienvenu en cette période de crise budgétaire.

Enfin, j’appelle votre attention sur le fait que d’autres pays suivent cette voie. Dans son projet de loi de finances pour 2023, le Maroc instaure ainsi une taxe similaire sur tous les produits alimentaires contenant du sucre ajouté. Nous pourrions suivre cet exemple.

M. Jérôme Bascher. Va-t-on taxer les cornes de gazelle ?

M. le président. L’amendement n° 515 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Belin, Charon, D. Laurent, Frassa, Klinger et Brisson, Mme Dumont, MM. Gremillet, Babary, Segouin et Cadec, Mmes Jacques, Drexler et Dumas, M. Genet, Mme Belrhiti et MM. Bouloux et Allizard, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article 1613 ter du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, le tableau est ainsi rédigé :

«

QUANTITÉ DE SUCRE (en kg de sucres ajoutés par hl de boisson)

TARIF APPLICABLE (en euros par hl de boisson)

Inférieure ou égale à 1

4,68

2

5,46

3

6,22

4

7

5

8,56

6

10,12

7

11,68

8

14,80

9

17,91

10

21,01

11

24,12

12

27,21

13

30,36

14

33,46

15

36,58

»

2° Au troisième alinéa, le montant : « 2,07 € » est remplacé par le montant : « 3,10 € ».

La parole est à M. François Bonhomme.

M. François Bonhomme. Dans le même esprit, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a prévu une modulation de la taxe soda en fonction du taux de sucre contenu dans les boissons concernées.

Cette taxe dite de nouvelle génération visait à lutter contre la surconsommation de sucres ajoutés – riches en calories et sans véritable valeur nutritionnelle – qui entraînent dans le temps l’apparition de nombreuses maladies et pathologies comme l’obésité, le diabète, les accidents vasculaires cérébraux et maladies cardiovasculaires ou encore des problèmes bucco-dentaires. En outre, les études épidémiologiques anciennes et récentes confirment toutes que le sucre favorise la diffusion de certains cancers.

Alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une consommation maximale de 25 grammes par jour et par personne, la consommation en France s’élève à 100 grammes – soit quatre fois plus – et à 300, 400 ou 500 grammes pour certaines catégories de population.

Dans ce contexte, il est établi que la consommation de sodas, en particulier chez les plus jeunes, engendre une forte surconsommation de sucre. Il est donc urgent que les pouvoirs publics se saisissent du problème et agissent beaucoup plus fortement contre ce fléau.

La taxe soda vise à modifier durablement le comportement du consommateur par la contrainte financière qu’elle fait peser sur lui. L’augmentation substantielle de la fiscalité a une véritable vertu dissuasive et entraîne une baisse importante des achats de boissons sucrées.

L’amendement tend à augmenter de 50 % le tarif applicable à la quantité de sucre par hectolitre de boisson. Je rappelle que nous visons les populations les plus jeunes, qui sont les plus touchées par le phénomène et par cette situation sanitaire.

Par ailleurs, on sait que le prix exerce sur ces populations généralement précaires un effet de levier.

Enfin, je précise que les recettes de la taxe viendraient alimenter le financement de notre sécurité sociale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements tendent à durcir le barème en fonction de la quantité de sucre comprise dans les sodas.

Je rappelle que la version 2018 de la taxe soda, au barème progressif, n’a toujours pas été évaluée. Ce n’est qu’à l’issue de son évaluation qui devrait avoir lieu dans le cadre du quatrième volet du programme national nutrition santé (PNNS) qu’une réforme sera jugée nécessaire ou non.

Enfin, la commission a adopté récemment un rapport d’information sur la lutte contre l’obésité. Nous pourrons esquisser des solutions à l’occasion du débat sur ses conclusions.

En tout état de cause, l’évaluation de la taxe soda, d’ores et déjà prévue, est une étape préalable.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Même avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. Alors même que le Gouvernement s’y était engagé, l’évaluation de la taxe soda instaurée en 2018 n’a toujours pas eu lieu. À l’époque, Mme Buzyn nous avait répondu qu’elle était prématurée… Heureusement, nous avons des retours du milieu médical.

Le fait que les producteurs de boissons sucrées aient diminué leurs taux de sucre et réduit les contenances semble par ailleurs indiquer que la mesure produit ses effets.

Je ne comprends pas la procrastination du Gouvernement sur ce sujet. Cela fait quatre ans que nous attendons le rapport !

Savez-vous ce qui se passe, madame la ministre ? En France, 5,3 % de la population est diabétique et 200 000 cas supplémentaires sont recensés chaque année. Certes, cela provoque des maladies cardiovasculaires, mais les professionnels du secteur bucco-dentaire nous alertent régulièrement : ils voient arriver en rendez-vous des enfants de 3 à 5 ans auxquels il faut arracher toutes les dents, avec les complications que l’on imagine ! Et je ne parle pas des complications liées à l’âge lorsqu’une maladie chronique comme le diabète se développe.

Dans ce contexte, faudrait-il continuer à dire : c’est intéressant, on va voir… ?

Madame la ministre, vous n’avez pas réalisé le travail d’évaluation précise auquel s’était engagé le gouvernement en 2018 ; pourtant, nous savons déjà que la taxation a eu des effets favorables. Que l’on évalue ou pas, les effets délétères sont parfaitement connus. Compte tenu des enjeux sanitaires, je ne comprends pas cet attentisme et cette tergiversation.

M. Jomier évoquait tout à l’heure l’alcool, le tabac et la pollution de l’air. Je considère que la multiplication du sucre est un sujet absolument majeur : il faut taxer les sodas, ces calories vides sans valeur nutritive, dont les effets délétères sont pires encore sur le jeune public, le plus touché et le plus précarisé.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je comprends l’impatience de mon collègue. Pour autant, je ne partage pas du tout sa vision et juge encore moins opportun le dispositif qu’il propose.

Ce n’est pas en taxant que nous atteindrons l’objectif souhaité par François Bonhomme ; il nous faut réfléchir à un certain nombre de mesures, à commencer par l’éducation en matière d’alimentation.

On voit des enfants qui n’ont plus de dents parce que l’on met du Coca-Cola dans leurs biberons ! Donne-t-on du Coca-Cola aux nourrissons ? Vous pourrez prendre toutes les mesures que vous voudrez : quand ce ne sera plus du Coca-Cola, ce sera autre chose !

En effet, pour remplacer le sucre, on mettra des édulcorants qui sont fabriqués à base de pétrole et on aura gagné ! On s’apercevra dans quelques années que ces mêmes produits sont cancérigènes, notamment pour les enfants. Évidemment que ces produits ne sont pas faits pour les enfants !

C’est la raison pour laquelle nous devons faire preuve d’une grande humilité dans notre approche. Si je ne prétends pas avoir la connaissance nécessaire, je prétends néanmoins que les taxes comportementales sont bien souvent contre-productives et déplacent les consommations.

Il serait préférable de mener une véritable politique de prévention en matière d’alimentation et, madame la ministre, d’évaluer en effet les mesures qui ont été prises. Seules ces dernières nous permettront d’étayer notre réflexion par des arguments qui ne seront pas trop subjectifs.