M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l’article.

M. Ronan Dantec. Nous allons discuter des conséquences sociales de la réouverture d’une centrale à charbon.

Il y a quelques semaines seulement, le Président de la République et le Gouvernement nous disaient fièrement qu’ils avaient mis un terme à la production électrique à base de charbon. C’était même le socle de la crédibilité de la transition écologique revendiquée par ce gouvernement. Or, quelques semaines plus tard, on rouvre une centrale à charbon…

Il serait assez facile de faire de l’ironie sur ce zigzag, sur ce salto arrière. Je n’en ferai pas, et je souhaite que, sur toutes les travées de cet hémicycle, nous soyons conscients de l’extrême gravité de la situation énergétique française.

Tous les rapports qui émanent de Bruxelles nous annoncent un hiver terrible. Le coût de l’électricité en France pourrait être jusqu’à cinq fois supérieur à ce que l’on observera dans d’autres pays européens. C’est une fragilité incroyable du système français.

M. Laurent Duplomb. À qui la faute ?

M. Ronan Dantec. Cette fragilité vient de notre incapacité à anticiper depuis plusieurs décennies, avec une espèce de nostalgie pompidolienne de la France, de son parc nucléaire, de ses grandes entreprises énergétiques… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Il ne faut pas faire de nucléaire, pas faire de barrages…

M. Ronan Dantec. Pendant que tous les autres pays européens avançaient à marche forcée vers les énergies renouvelables, la France est la seule à n’avoir pas tenu ses objectifs. Si nous passons l’hiver, ce sera grâce au photovoltaïque et à l’éolien de l’Espagne, du Portugal, de l’Écosse, de l’Angleterre et de l’Allemagne.

Monsieur le ministre, nous sommes aujourd’hui dans un plan d’urgence qui relève de l’économie de guerre. Quelles sont vos propositions, à part ce rafistolage d’urgence avec une centrale au charbon, qui est incontournable, mais qu’il faut encadrer ?

Il faut mettre en place une véritable stratégie.

M. le président. Il faut conclure.

M. Ronan Dantec. Nous devons promouvoir la sobriété et le développement massif des énergies renouvelables.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2019, ici même, dans cet hémicycle, nous avions voté la fermeture des quatre centrales à charbon pour l’horizon 2022.

Mon groupe était pour, mais nous y avions mis deux conditions, qui étaient les mêmes que celles posées par le rapporteur Daniel Gremillet.

Première condition : l’ensemble des salariés devaient être repris, avec une garantie de l’État sur leurs conditions de départ ou de reclassement. Puisque c’était une décision de l’État, il était hors de question que ses conséquences retombent sur les territoires.

Seconde condition : la sécurité d’approvisionnement. Étions-nous certains, en prenant la décision de fermer les quatre centrales, que nous pourrions ensuite passer les pics hivernaux ? On nous avait répondu oui.

Trois ans après, nous allons réarmer la centrale de Saint-Avold pour la rouvrir. Il y a aussi celle de Cordemais, même si l’on n’en parle pas… Je connais bien le dossier, pour m’y être rendu à plusieurs reprises. Vous n’avez rien planifié, vous avez expliqué aux salariés qu’il y avait un projet de conversion du site en Ecocombust, que ce projet était abandonné, puis qu’il était repris… Mme Pompili n’a rien dit et, au dernier moment, on leur a expliqué que, finalement, la centrale fermait. Et voilà que, trois mois plus tard, on leur demande de revenir pour mettre en œuvre le projet d’Ecocombust !

Nous pensons qu’on ne peut pas conduire une politique énergétique sans avoir un débat sérieux au Parlement.

Monsieur le ministre, combien de salariés va-t-il falloir pour réarmer la centrale à charbon de Saint-Avold ? À quelles conditions salariales seront-ils réembauchés ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, sur l’article.

M. Thomas Dossus. Nous assistons vraiment à la fin des illusions sur le modèle énergétique français. En réaction à l’intervention de Ronan Dantec, j’entendais certains dénoncer la fermeture de Fessenheim… C’est au contraire parce que nous nous sommes enferrés dans le nucléaire, avec un mix énergétique complètement déséquilibré, que nous sommes obligés de rouvrir aujourd’hui, avec 30 réacteurs en carafe, une centrale à charbon.

C’est parce que nous avons toujours voulu le nucléaire comme solution à tous nos problèmes que nous devons rouvrir une centrale à charbon !

« Le réel, c’est quand on se cogne », disait Lacan. Aujourd’hui, le réel, ce sont nos 29 réacteurs nucléaires en carafe et un mix énergétique complètement déséquilibré qui nous pousse au bord du gouffre.

Le réel, c’est la fin des illusions. Et les illusions, c’est quand Élisabeth Borne nous disait il y a quelques semaines que la France serait la première nation à sortir des énergies fossiles.

Et vous voulez persévérer dans cette erreur, ouvrir 6 nouveaux EPR, voire 14…

Cette réouverture d’une centrale à charbon doit nous servir d’alerte, et nous ouvrir les yeux sur le déséquilibre de notre ambition énergétique. Cessons de nous enferrer dans cette fausse solution qu’est le nucléaire !

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, sur l’article.

M. Laurent Duplomb. Le réel, c’est aussi qu’à chaque fois qu’il y a des projets en dehors du nucléaire, il y a des associations pour lutter contre !

Chez moi, un projet de 27 éoliennes est à l’arrêt, alors qu’il est très bien accepté partout sur le territoire. Il a été repoussé par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), et repoussé par les associations environnementalistes, au motif que cela risquait de mettre en danger le milan royal !

Partout où il y a un projet d’éolienne, on nous sort l’argument du milan royal, dont la première cause de mortalité serait… les éoliennes. Au point même qu’un tribunal, voyant qu’on en tuait partout, s’est demandé si c’était vraiment une espèce protégée ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Pour faire de l’électricité, on aurait pu traiter à la fois le problème de l’eau potable et celui de la régulation des rivières avec des barrages hydroélectriques. Or tous les barrages hydroélectriques, depuis trente ans, ont été combattus puis supprimés.

Le dernier projet en date était le barrage du Serre de la Fare, chez moi, en Haute-Loire, en 1988 : il y a eu des manifestations monstres pour l’interdire, alors qu’il servirait aujourd’hui non seulement pour distribuer de l’eau potable, mais aussi pour réguler le débit de la Loire, pour irriguer et surtout pour produire de l’électricité.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. le président. L’amendement n° 336 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Montaugé, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad et Cardon, Mme M. Filleul, MM. Antiste, Assouline et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. Chantrel, Mme Carlotti, M. Cozic, Mme de La Gontrie, MM. Devinaz, Féraud, Jacquin, P. Joly, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Michau et Pla, Mme Préville, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Stanzione et Tissot, Mme Van Heghe, M. Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les présentes dispositions ne constituent pas une révision du plan mentionné au même article 2.

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Afin de protéger juridiquement les dispositifs d’accompagnement social inclus dans le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) mis en œuvre sur le site de la centrale Émile-Huchet de Saint-Avold, il nous paraît souhaitable d’indiquer dans le projet de loi qu’il n’est pas nécessaire de réviser ce plan de sauvegarde de l’emploi pour redémarrer la centrale à charbon selon les dispositions prévues dans cet article 15. La demande, je le précise, émane des salariés de la centrale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. J’entends la demande, qui nous a également été soumise en audition. Cela étant, s’agissant de cette proposition de préciser dans le texte que la conclusion de contrats à durée déterminée (CDD) n’emportera pas et n’engagera pas révision du PSE, la rédaction actuelle me semble suffisamment claire pour qu’il ne soit pas nécessaire de procéder à cet ajout. Même si cette précision est apportée au texte, elle n’empêchera en rien un éventuel recours contre le PSE devant le juge.

L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Mmes et MM. les sénateurs me pardonneront de ne pas m’avancer sur la question de la politique énergétique : elle est très éloignée de mon champ de compétences.

Si je devais partager un avis très personnel, j’indiquerais simplement être très à l’aise avec le programme de construction nucléaire annoncé par le Président de la République. J’y insiste, c’est un avis personnel, conforme au demeurant à l’orientation que j’ai toujours essayé de défendre. Je considère effectivement le nucléaire comme une bonne énergie, mais le débat, bien sûr, reste ouvert…

À propos du sujet qui nous occupe, beaucoup ont évoqué le choc avec le réel.

Le réel, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est aussi une guerre en Ukraine, la menace d’un défaut d’approvisionnement en gaz par la Russie et la nécessité de trouver des sources d’énergie alternatives et complémentaires pour améliorer notre propre production. Contrairement à ce que j’ai entendu jusqu’à présent, le réel, c’est aussi cela !

Quand vous nous expliquez, monsieur Gay, que le Gouvernement, voilà quelques mois ou quelques années, assurait que l’approvisionnement était garanti, je me permets de répondre qu’à cette période il n’avait à aucun moment été imaginé que la Russie attaquerait l’Ukraine et que nous pourrions nous trouver dans une difficulté telle que celle que nous connaissons aujourd’hui.

S’agissant de l’amendement n° 336 rectifié, je confirme les propos de Mme le rapporteur : les mesures prévues par le PSE ne sont pas remises en cause par les dispositions de l’article 15 – le débat nous permet de le préciser, et c’est une bonne chose. Ces dispositions permettent simplement, sans modification du PSE, d’embaucher temporairement à la centrale à charbon de Saint-Avold, en CDD et sur la base du volontariat, les salariés concernés par ce plan. Leur congé de reclassement sera alors reporté à due concurrence des périodes travaillées.

Sans revenir sur les droits des salariés fixés dans le PSE, l’article 15 tend à aménager l’exécution du congé de reclassement, en offrant aux salariés volontaires une possibilité d’être réembauchés temporairement. Le présent projet de loi le garantit et la discussion autour de cet amendement permettra peut-être de rassurer tous ceux qui pourraient avoir une interrogation quant au fond du texte et sa mise en œuvre.

Pour ces raisons, je demande le retrait de l’amendement n° 336 rectifié. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Monique Lubin, l’amendement n° 336 rectifié est-il maintenu ?

Mme Monique Lubin. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 336 rectifié est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 193, présenté par M. Gay, Mme Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, seconde phrase

Après le mot :

titre,

insérer les mots :

dans le respect des accords de la branche des industries électriques et gazières,

II. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Ce n’est pas votre dossier, je le comprends, monsieur le ministre, et il est vrai que nous n’étions pas dans les mêmes conditions voilà trois ans. Mais reprenez tous les débats que nous avons ouverts dans cet hémicycle et vous verrez que nous posions déjà ces questions, et pour la centrale de Cordemais, et pour celle de Saint-Avold. Nous vous alertions sur de probables difficultés.

La guerre en Ukraine ne peut pas être la justification de tous les maux que nous subissons ! Il y a de sérieux problèmes d’approvisionnement et de sécurité du réseau électrique. Potentiellement, un blackout pourrait survenir cet hiver en France ou dans un autre pays européen – mais avec des conséquences sur le nôtre, puisque le marché électrique européen est désormais interconnecté.

C’est pourquoi, je le redis, nous devons avoir un débat ici, au Parlement, sur l’avenir de l’opérateur EDF et sur la politique énergétique. M. Patrick Pouyanné, dont ne peut pas dire qu’il soit communiste ou écologiste, appelle lui-même à une planification énergétique.

Enfin, monsieur le ministre, je réitère la question précise que je vous ai posée : combien faudra-t-il de salariés pour réarmer la centrale de Saint-Avold ?

J’ai à ma disposition des chiffres, je voudrais vous les donner… Avant la fermeture, le site comptait 87 salariés au statut du personnel des industries électriques et gazières (IEG) et 200 intérimaires. La moitié des 87 salariés sont partis à la retraite ; les autres sont en congé de reclassement. Pensons-nous véritablement qu’ils vont tous revenir ? Quelle sera la formation des intérimaires qui participeront à la relance de la centrale ?

Ces questions justifient nos deux amendements nos 192 et 193, que je vais présenter brièvement.

À nos yeux, il n’est pas possible de déroger au droit du travail avec un CDD de trente-six mois. La moindre des choses que nous devons aux salariés volontaires, c’est de leur garantir le statut du personnel des IEG et de faire en sorte qu’à l’issue des trente-six mois, ils retrouvent leur projet de reclassement tel qu’ils vont l’abandonner pour venir réarmer la centrale. C’est un minimum !

Je pense donc, mes chers collègues, que nous devrions au moins voter le premier de ces deux amendements, l’amendement n° 193, qui garantit à ces salariés le statut du personnel des IEG.

M. le président. L’amendement n° 192, présenté par M. Gay, Mme Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Cet amendement a déjà été défendu.

L’amendement n° 315, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer le mot :

trente-six

par le mot :

douze

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. La guerre en Ukraine met sérieusement en danger nos approvisionnements en gaz, et ce alors que 5 millions de ménages, il faut le rappeler, sont déjà en situation de précarité énergétique en France.

Cette situation est d’autant plus dramatique du fait des retards conséquents que notre pays a pris dans sa transition écologique, fragilisant sa souveraineté énergétique et sa résilience aux chocs exogènes – c’est effectivement la guerre en Ukraine, monsieur le ministre, mais c’est surtout l’incapacité à être résilient face à n’importe quel choc !

Pris de court, le Gouvernement est conduit à rouvrir les centrales à charbon au moment même où le temps imparti pour engager des mesures drastiques de lutte contre le dérèglement climatique se restreint : trois ans, selon le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC.

La réouverture de centrales à charbon ne peut être que très temporaire et il ne devrait en aucun cas être question de prévoir déjà leur relance pour les trois prochaines années. La leçon que nous donne le contexte géopolitique est bien que nous devons absolument accélérer notre transition énergétique par un effort inédit de sobriété, d’efficacité énergétique et de développement des énergies renouvelables. C’est un scénario que l’on connaît depuis la démarche Négawatt ; il est tout de même ancien !

En outre, le présent article s’inscrit dans une perspective de dérogation au droit du travail, en escamotant l’étape de renouvellement des CDD de dix-huit mois.

Pour toutes ces raisons, nous proposons par cet amendement de supprimer la possibilité de conclure dès le départ des CDD jusqu’à trente-six mois – on s’inscrit presque directement dans cette perspective – et de limiter leur durée à douze mois, avec renouvellement possible. Il s’agit ainsi de garantir que l’ouverture de ces centrales à charbon restera bien une mesure de très court terme, qui ne saurait se substituer à une politique radicale de transition écologique, d’autant plus impérieuse que la situation internationale met désormais en péril l’approvisionnement en énergie de la France pour cet hiver.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous examinons ici trois amendements à peu près identiques.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je voudrais tout d’abord rassurer mon collègue Fabien Gay : les salariés conserveront le bénéfice des accords de branche des industries électriques et gazières. M. le ministre l’indiquera sans doute, mais c’est un point qui nous a été confirmé.

Nous cherchons effectivement à réduire autant que possible les délais d’intervention. Mais, je dois le dire, trente-six mois seront bien nécessaires face aux défis qui sont devant nous.

Monsieur le président, je voudrais tout de même terminer mon intervention sur ces trois amendements en faisant observer que, par les décisions que nous allons prendre sur cet article 15, et sur l’article 16 qui sera sans doute examiné demain, nous allons demander à des hommes et des femmes de retourner travailler dans cette centrale à charbon – et ils vont le faire. Pourquoi le feront-ils ? Certes, les conditions de travail ont été mises en place pour que ce soit possible. Mais ils vont le faire, aussi, parce qu’ils aiment leur outil de travail, parce qu’ils aiment leur terre et, je le dirai avec modestie, parce qu’ils aiment la France.

Les uns et les autres, nous prenons des décisions. Cela a été le cas concernant cette centrale à charbon de Saint-Avold. Tout d’un coup, on a dit aux hommes et aux femmes qui y travaillaient qu’ils n’étaient rien (M. Laurent Duplomb opine.),…

M. Fabien Gay. C’est vrai !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. … que leur travail était inutile.

Ce sont les derniers amendements sur lesquels je rapporte, monsieur le président, et c’est pourquoi, en tant que parlementaire, mais aussi peut-être en votre nom, je souhaite ce soir dire à ces hommes et ces femmes merci ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements et, à défaut, émettra un avis défavorable.

Je confirme que les salariés volontaires se verront maintenus dans le cadre statutaire des IEG le temps de cette réembauche. C’est prévu ainsi.

M. Fabien Gay. Ce n’est pas écrit !

M. Olivier Dussopt, ministre. Vous avez de l’expérience, monsieur Gay. Vous savez que tout n’est pas écrit dans la loi. Les décrets d’application sont faits pour cela !

Vous m’avez demandé combien de personnes il faudrait employer pour relancer la production. Nous estimons ce nombre à 70 personnes.

Vous m’avez demandé des précisions quant aux conditions proposées. Si un article de la presse quotidienne régionale du Nord n’était pas paru ce matin, j’aurais eu quelques scrupules à vous donner des éléments ; mais ledit article de La Voix du Nord citant des représentants des organisations syndicales, je pense pouvoir vous répondre.

Le salaire moyen des salariés concernés s’établissait autour de 4 500 euros nets. Ils seront réembauchés de manière temporaire avec une augmentation de 5 % par mois, assortie d’une prime mensuelle de 5 500 euros brut. Autrement dit, celles et ceux qui accepteront cette réembauche dont nous avons besoin le feront avec une rémunération mensuelle qui sera approximativement le double de ce qu’ils percevaient. J’apporte ces précisions tout en m’associant aux remerciements de Mme le rapporteur.

Je saisis l’occasion de ce dernier avis avant de céder la place à mon collègue Olivier Klein pour vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, des échanges que nous avons eus depuis le début de cette matinée autour du titre Ier du projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et LR, et sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je suis prêt à retirer l’amendement n° 192, monsieur le président, mais je maintiens l’amendement n° 193. Mme la rapporteure insiste sur l’effort que vont faire ces hommes et ces femmes. Elle a raison car, voilà trois mois, on a fermé la centrale en leur expliquant qu’ils n’étaient plus rien et, maintenant, on les rappelle et on leur dit qu’on a besoin d’eux pour la sécurité d’approvisionnement !

Je connais parfaitement les conditions de leur embauche, et je les connaissais avant même la sortie de l’article de La Voix du Nord. Mais une question se pose, à la fois pour les travailleurs qui étaient sous statut du personnel des IEG et pour les intérimaires dont j’ai parlé précédemment – parce qu’il en faudra, des intérimaires, dès lors que la moitié des 87 anciens salariés sous statut sont partis à la retraite ! La demande est que tous puissent être embauchés en bénéficiant du statut IEG.

À mon sens, c’est la moindre des choses que nous pouvons faire, ici, au Parlement : garantir aux 70 salariés, qu’ils soient intérimaires ou sous statut, qu’ils reviendront travailler en étant protégés par le statut du personnel des IEG. C’est une protection pour eux comme pour nous, car cela nous garantit que toute personne qui viendra réarmer la centrale à charbon sera formée pour le faire, y compris par les anciens, et travaillera dans les meilleures conditions de sécurité.

Donc, je retire l’amendement n° 192, mais je n’abandonnerai pas l’amendement n° 193, sur lequel je me pose même la question de demander un scrutin public.

M. le président. L’amendement n° 192 est retiré.

La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. J’avais demandé à intervenir un peu plus tôt dans le débat. Je me permets donc de revenir sur le propos général qui a été tenu sur l’article.

On regarde souvent ce qui se passe en Allemagne en matière d’énergie. Celle-ci est régulièrement citée en exemple pour la particularité de son mix énergétique, qui, par des prises de décision remontant à de nombreuses années, a favorisé les énergies renouvelables. Je constate aujourd’hui que ce pays est en très grande difficulté en matière de production énergétique et pour faire face à sa consommation. Ces difficultés sont, pour des raisons différentes, d’une complexité à peu près équivalente à celle que nous connaissons aujourd’hui en France.

Il me semble donc qu’il ne faut pas opposer les modèles de production. Dans le cadre des discussions que nous aurons sur la future programmation pluriannuelle de l’énergie, il faudra adopter une posture visant à pousser tous les curseurs en parallèle afin de faire face aux besoins – grandissants dans les années à venir – en énergie électrique et, contrairement à la situation actuelle, se donner des marges suffisantes pour répondre aux situations exceptionnelles.

Ma première remarque est donc de rappeler qu’il faut non pas opposer les modes de production – pour prendre un exemple au hasard, les énergies renouvelables au nucléaire –, mais progresser sur l’ensemble d’entre eux.

S’agissant précisément des centrales à charbon, je soutiens l’amendement visant à ce que les personnels repris bénéficient du statut du personnel des IEG.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Franck Montaugé. On le leur doit ! Par conséquent, je voterai cet amendement et je pense que mon groupe fera de même.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je rejoins totalement Fabien Gay quant à la nécessité d’un débat approfondi sur la réalité de la situation, avec des chiffres sans tabou.

On parle tout le temps de l’Allemagne ; aujourd’hui, les contrats qui s’y négocient pour le pic de consommation de l’hiver sont trois fois moins chers qu’en France. Donc, l’Allemagne, avec l’effort qu’elle a fourni sur les énergies renouvelables, ne s’en sort pas si mal. C’est la réalité des chiffres économiques – je sais que je parle à des libéraux !

Je rejoins Fabien Gay sur un autre point. À la centrale de Cordemais – je me suis moi aussi beaucoup battu pour le projet Ecocombust (Marques de scepticisme sur les travées du groupe CRCE.) –, on a vu face à nous un État qui n’était plus du tout stratège. Il faut revenir à un État stratège !

Enfin, pour répondre à M. le ministre, j’observerai que nous subissons actuellement deux crises, et pas une seule.

Il y a une crise des énergies fossiles, notamment le gaz, liée à la situation en Ukraine. À ce propos, je veux solennellement dire ici que l’Europe doit absolument « gagner » – je mets le mot entre guillemets puisque nous ne sommes pas engagés dans cette guerre. Si l’Europe sort affaiblie du conflit ukrainien, c’est la fin du multilatéralisme, et donc la fin de toute possibilité de stabiliser le climat au niveau mondial.

Autrement dit, et c’est un point que l’on n’a pas assez en tête aujourd’hui, le sort du climat mondial se joue aussi en Ukraine.

La deuxième crise – mon collègue Thomas Dossus y a fait référence – se caractérise par le fait que 30 de nos centrales nucléaires sont à l’arrêt, cela parce que nous sommes adossés à 70 % sur une seule machine ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Voilà vingt ans que les écologistes disent que ce n’est pas sérieux et qu’avec une technologie unique, tout défaut de fabrication systémique des machines risque de nous créer de graves difficultés. C’est ce qui nous arrive ! On recense notamment 12 centrales nucléaires ayant des problèmes de corrosion. Nous étions lucides !

Si nous voulons avoir un débat sérieux, il faut ne pas mélanger les deux crises et les affronter toutes deux. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Nous n’allons pas faire ce soir la discussion sur le nucléaire, nous aurons d’autres occasions ! Mais je pense que la France a besoin d’un véritable débat sur cette question, car c’est un débat qui n’a jamais eu lieu.

Je souhaite simplement revenir sur quelques interventions.

Monsieur le ministre, ce n’est pas du fait de la guerre en Ukraine que nous avons 30 réacteurs nucléaires à l’arrêt aujourd’hui, ou qu’il nous manque 9 gigawatts, que nous importons aujourd’hui. La fermeture de la centrale de Fessenheim n’est pas en cause non plus puisqu’elle représente seulement 1,8 gigawatt, à comparer au volume précédemment cité. À l’heure actuelle, chaque jour, nous avons recours à des importations depuis l’Espagne et le Portugal, étant précisé que, par moments, la production portugaise repose à 100 % sur les énergies renouvelables.

Monsieur Duplomb, on ne peut pas non plus nous accuser d’être opposés à l’éolien. Sur ces travées, nous, sénateurs écologistes, faisons preuve de cohérence et de constance.