M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 125.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 4 bis D - Amendement n° 125
Dossier législatif : proposition de loi visant à démocratiser le sport en France
Article additionnel après l'article 4 bis D - Amendement n° 128

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 bis D.

L’amendement n° 127, présenté par Mmes G. Jourda et Conconne, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Harribey, MM. Devinaz et Jacquin, Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 4 bis D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur la création de « parcours deuxième chance par le sport ». Il donne lieu à un débat dans chacune des commissions des deux assemblées en charge des questions sportives.

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. L’objet de cet amendement reprend la recommandation n° 16 du rapport d’information intitulé Quels tremplins pour le sport en outre-mer ?, qui a été remis par Catherine Conconne, Viviane Malet, Lana Tetuanui et moi-même au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, présidée alors par Michel Magras.

Si l’articulation du parcours sportif avec le parcours scolaire est une nécessité, le « double parcours » étant au cœur de l’accompagnement des sportifs, peu de voies sont ouvertes aux jeunes talents sportifs en échec scolaire, particulièrement en outre-mer.

Aussi, nous demandons que soit engagée une réflexion sur la création de parcours « deuxième chance par le sport », afin de ne pas gâcher des potentiels existants et d’offrir à de jeunes sportifs talentueux les opportunités d’encadrement qu’ils méritent. Le sport peut en effet être une voie pertinente de « deuxième chance ».

Certes, cet appel à l’engagement d’une réflexion sur ce sujet passe par un rapport. Je sais que la commission n’aime pas ce procédé, mais nos moyens sont limités.

Nous souhaitons donc que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la création de parcours « deuxième chance par le sport », qui trouvera, je l’espère, une traduction législative.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Savin, rapporteur. Il est vrai que le Sénat n’aime pas beaucoup les rapports. Toutefois, la commission est prête à faire un geste ce soir, non pas sur cet amendement, auquel elle est défavorable, mais – je le dis par anticipation – sur l’amendement suivant n° 128, pour lequel elle s’en remettra la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Je vais vous surprendre : je suis moi d’aussi d’accord pour qu’un rapport soit remis sur les parcours « deuxième chance par le sport ».

Réfléchir à la façon dont le sport et le dispositif « Sésame vers l’emploi pour le sport et l’animation dans les métiers de l’encadrement », lancé par le ministère des sports, pourraient être mieux utilisés, c’est une priorité pour Jean-Michel Blanquer et moi-même. Je pense notamment aux écoles de la deuxième chance que sont les micro-lycées ou les micro-collèges avec option Sésame.

Dans un premier temps, le rapport ne contiendra pas grand-chose de concret, puisque nous en sommes encore au stade de la réflexion. Une telle mesure a tout son intérêt en outre-mer puisque nous souhaitons y mettre en place un dispositif spécifique pour les élèves et l’éducation, dont je ne détaillerai pas les axes élaborés par le ministère de l’éducation nationale. Renforcer le lien entre les formations dans le domaine de l’animation et du sport et les moyens de prévenir le décrochage scolaire nous paraît tout à fait intéressant, et nous y travaillons.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 127.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 4 bis D - Amendement n° 127
Dossier législatif : proposition de loi visant à démocratiser le sport en France
Article 5

M. le président. L’amendement n° 128, présenté par Mmes G. Jourda et Conconne, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Harribey, MM. Devinaz et Jacquin, Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 4 bis D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur les voies d’accès aux parcours sportifs de haut niveau en outre-mer, avec pour objectif d’éviter le déracinement précoce des jeunes talents. Ce rapport envisage le renforcement des moyens des centres de ressources d’expertise et de performance sportive et des structures territoriales dédiées au sport, l’Institut martiniquais du sport en Martinique et Institut de formation et d’accès aux sports en Guyane et leur intégration à une réelle dynamique de performance au sein du réseau Grand Institut national du sport, de l’expertise et de la performance. Ce rapport donne lieu à un débat en séance publique dans chacune des deux assemblées.

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. L’objet de cet amendement reprend une autre recommandation du rapport d’information voulu par Michel Magras quand il était président de la délégation sénatoriale aux outre-mer, dans le cadre de la préparation des futurs jeux Olympiques : trouver les moyens de mobiliser toutes les filières.

Nous appelons à une réflexion sur la structuration des réseaux ultramarins de performance, au travers d’un rapport sur les voies d’accès aux parcours sportifs de haut niveau en outre-mer, avec pour objectif d’éviter le déracinement précoce des jeunes talents.

L’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep) étant l’acteur majeur de structuration de la performance et du haut niveau à l’échelon national, c’est à lui que revient ce rôle d’attraction. Le grand Insep a vocation à organiser sur l’ensemble du territoire national un réseau de structures de développement du sport de haut niveau et de la performance. Seules deux structures outre-mer sont labellisées : les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives (Creps) de Guadeloupe et de La Réunion.

Il convient donc d’accroître la mission de soutien du grand Insep aux structures territoriales, et de donner aux structures locales les moyens de s’intégrer à la dynamique et au projet du grand Insep. Vous comprenez ainsi aisément les enjeux : priorité est donnée à la structuration des voies d’accès au parcours sportif de haut niveau en outre-mer, laquelle éviterait le déracinement précoce de nos jeunes talents.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Savin, rapporteur. Il est vrai que les équipes de France bénéficient des talents de ces jeunes, filles et garçons, qui viennent des départements d’outre-mer. La question du déracinement des jeunes talents sportifs ultramarins, pointée par la délégation aux outre-mer, mérite d’être soulevée. Les réponses du Gouvernement sur ce sujet sont attendues.

La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Nous partageons votre préoccupation, et voulons également que les jeunes d’outre-mer puissent continuer leur carrière et mener leur projet scolaire et sportif là où ils vivent.

Nous avons structuré les réseaux ultramarins de performance autour de deux établissements publics : un Creps à Pointe-à-Pitre, pour le secteur Antilles-Guyane, et le Creps de la Réunion pour le secteur océan Indien.

Ces établissements ont bénéficié d’un renforcement de six postes dans le cadre du déploiement des maisons régionales de la performance, et du transfert des compétences « sport de haut niveau » des délégations régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) vers les Creps. En 2022, quatre postes supplémentaires sont fléchés vers l’outre-mer : trois pour la Martinique, un en Guyane. L’objectif prioritaire est de mieux accompagner le parcours des sportifs, depuis la détection jusqu’à l’accès à la haute performance, avec une attention particulière portée aux difficultés liées au déracinement.

Le renforcement humain sera accompagné d’un renforcement financier de l’Agence nationale du sport (ANS), dont l’enveloppe pour les territoires d’outre-mer est passée de 12 millions à 20 millions d’euros entre 2019 et 2022. Le ministère des outre-mer double depuis quatre ans, sachez-le, l’aide que mon ministère apporte aux outre-mer. C’est intéressant pour la population locale, mais aussi pour la performance sportive car, comme l’a dit M. le rapporteur, dans beaucoup de disciplines, nos sportifs ultramarins nourrissent les sélections des équipes de France ; nous en sommes très fiers et heureux.

Pour ces raisons, l’avis est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 128.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 bis D.

TITRE II

RELATIF AU RENOUVELLEMENT DU CADRE DE LA GOUVERNANCE DES FÉDÉRATIONS, DE LEURS INSTANCES DÉCONCENTRÉES, DES LIGUES PROFESSIONNELLES ET DES ORGANISMES DE REPRÉSENTATION ET DE CONCILIATION

Article additionnel après l'article 4 bis D - Amendement n° 128
Dossier législatif : proposition de loi visant à démocratiser le sport en France
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 23

Article 5

Le II de l’article L. 131-8 du code du sport est ainsi rédigé :

« II. – Les statuts mentionnés au I du présent article prévoient les conditions propres à garantir la parité dans les instances dirigeantes de la fédération tant au niveau national que régional, dans les conditions prévues au présent II.

« 1. Lorsque la proportion de licenciés de chacun des deux sexes est supérieure ou égale à 15 %, les statuts prévoient les conditions dans lesquelles doit être atteinte une représentation strictement paritaire lors du renouvellement des membres élus des instances dirigeantes nationales qui interviendra à compter du 1er janvier 2024.

« 2. Lorsque la proportion de licenciés d’un des deux sexes est inférieure à 15 %, les statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garantie dans les instances dirigeantes nationales de la fédération une proportion minimale de sièges pour les personnes de chaque sexe pouvant prendre en compte la répartition par sexe des licenciés, sans pouvoir être inférieure à 40 % des sièges des membres élus pour les personnes de chaque sexe à compter du renouvellement des instances qui interviendra à compter du 1er janvier 2024. Les statuts devront par ailleurs prévoir une représentation strictement paritaire lors des renouvellements des membres élus des instances dirigeantes nationales qui interviendront à compter du 1er janvier 2028 quelle que soit la proportion de licenciés des deux sexes.

« 3. Les statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garantie dans les instances dirigeantes régionales de la fédération une proportion minimale de sièges pour les personnes de chaque sexe pouvant prendre en compte la répartition par sexe des licenciés, sans pouvoir être inférieure à 30 % des sièges des membres élus pour les personnes de chaque sexe à compter du renouvellement des instances qui interviendra à compter du 1er janvier 2024. Cette proportion minimale ne pourra être inférieure à 40 % des sièges des membres élus pour les personnes de chaque sexe à compter du renouvellement des instances qui interviendra à compter du 1er janvier 2028.

« 4. La proportion de licenciés de chacun des deux sexes est appréciée au niveau national sans considération d’âge ni de toute autre condition d’éligibilité aux instances dirigeantes. »

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, sur l’article.

M. Jean-Jacques Lozach. Le titre II concerne la question sans doute la plus délicate et la plus sensible de la présente proposition de loi, celle de la gouvernance.

J’ai confiance en la volonté d’avancer du mouvement sportif. Brigitte Henriques, la présidente du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), qui est en quelque sorte « la fédération des fédérations », a eu le courage de lancer ce débat au sein de son conseil d’administration, ce qui était difficile au vu de l’hétérogénéité des situations en termes de proportions de licenciés de chaque sexe dans chaque fédération.

Bien sûr, nous devons tenir compte de ces débats et de leurs conclusions pour leur donner, si possible, une traduction législative, pour ne pas dire un débouché politique. J’ai noté, en particulier, la tribune percutante que la présidente du CNOSF a publiée dans un hebdomadaire bien connu, intitulée sans ambiguïté : « Les instances sportives fédérales doivent devenir paritaires ».

Nous avons à faire, en réalité, à des organismes qui exercent directement, par délégation – ou par subdélégation, puisque les ligues sportives professionnelles sont également concernées – une mission d’intérêt général. Il me paraît donc légitime que l’État donne l’impulsion pour avancer sur la voie de l’égalité hommes-femmes dans le sport.

Notre position est très proche de celle exprimée dans le texte issu de l’Assemblée nationale. Un amendement du Gouvernement modifie toutefois quelque peu la donne, notamment sur le calendrier et les instances concernées.

M. le président. Il faut conclure.

M. Jean-Jacques Lozach. Cet amendement vise à fixer une borne pour la parité, à 2024 pour les instances nationales et à 2028 pour les organes régionaux.

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l’article.

Mme Sylvie Robert. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article est vraiment au cœur du processus de démocratisation du sport, dans la mesure où il s’agit d’accroître la parité au sein des instances nationales et régionales des fédérations. Il n’est pas seulement symbolique, bien évidemment : il doit être le reflet d’une ambition collective que nous devons porter pour renforcer la place des femmes dans le mouvement sportif et, par là même, impulser une dynamique positive en faveur de la pratique sportive féminine.

En 2019, ce sont 38,8 % des licences sportives qui étaient détenues par des femmes, un pourcentage quasiment identique à la part d’athlètes féminines de haut niveau, qui est de 39 %. En affinant l’analyse, nous pouvons constater que les femmes sont majoritaires dans neuf fédérations seulement, tandis que les fédérations multisports sont beaucoup plus féminisées.

En termes de représentativité au niveau des instances des fédérations, des progrès ont été réalisés en faveur de la parité, singulièrement depuis la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Le taux de féminisation des conseils d’administration des fédérations olympiques est passé de 27,4 % en 2009 à 42,13 % en 2021. Pour autant, cette évolution n’est pas suffisante et doit être confortée.

Le débat que nous allons avoir ne porte pas tant sur le constat, que nous partageons tous, qu’il est nécessaire de tendre vers la parité, mais plutôt sur le rythme à suivre. Pour le dire simplement, nous sommes favorables à une accélération du renouvellement des instances, à la fois nationales et régionales, et des fédérations, dans le sens d’une vraie féminisation.

Malheureusement, les observations empiriques qu’on peut mener en dehors du secteur sportif montrent que la parité ne progresse que lorsque des règles strictes sont fixées, avec des objectifs chiffrés. L’incitation n’a qu’un impact marginal et les dates butoirs placées à des échéances lointaines ne favorisent aucunement le déclenchement d’une dynamique.

Nous devons donc nous montrer très proactifs sur le sujet pour intégrer un mouvement global en faveur de l’égalité. Aujourd’hui, sur 36 fédérations olympiques, seules 2 sont présidées par des femmes ! Cet état de fait, vous le savez, est tout sauf une fatalité.

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, sur l’article.

M. Olivier Paccaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de faire entendre une voix légèrement différente, qui n’est pas pour autant politiquement incorrecte. Faire progresser la parité est un objectif évidemment louable, mais il faut avoir conscience qu’une fédération sportive, un district départemental ou une ligue régionale, ce n’est pas une commune, ce n’est pas une collectivité territoriale.

Ce qui réunit les habitants d’une collectivité territoriale, c’est une géographie. Pour les membres d’une association sportive, d’une fédération, c’est une passion. Nous sommes nombreux ici à être sportifs et à savoir ce qu’est la passion, qui nous fait avancer. Beaucoup de fédérations comptent des membres totalement bénévoles, ce qui n’est pas le cas à certains échelons des collectivités. Avec ce texte aux intentions louables et cet objectif de parité, nous allons sacrifier certaines bonnes volontés, masculines comme féminines, et nous priver de leur concours. (Marques dagacement sur les travées du groupe SER.) C’est la limite de ce volontarisme.

Je connais, pour ma part, le District Oise de football, le DOF,…

M. Stéphane Piednoir. Nous le connaissons tous ! (Sourires.)

M. Olivier Paccaud. … qui, en effet, ne compte pas beaucoup de femmes. J’espère qu’il y en aura de plus en plus, et que la pratique du football féminin se développera ; peut-être l’entrée de davantage de femmes au DOF y contribuera-t-elle.

Mais je serais triste qu’à toutes ces personnes qui siègent depuis des années, passant tous leurs week-ends aux bords des stades et donnant le meilleur d’eux-mêmes, on dise : « Au revoir messieurs, c’est fini ! »

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, sur l’article.

M. Patrick Kanner. Quand j’entends les arguments de M. Paccaud, j’ai envie de pleurer !

Si l’on vous avait écouté, mon cher collègue, nous n’aurions jamais imposé les binômes dans les conseils départementaux.

M. Olivier Paccaud. Cela n’a rien à voir !

M. Patrick Kanner. Bien sûr que si, sur le plan idéologique ! Il faut qu’à un moment donné, sur le plan politique, nous fixions des objectifs suffisamment forts pour que la parité s’impose à l’ensemble de la société. Vous n’en voulez pas, je l’ai bien compris.

M. Olivier Paccaud. Je n’ai pas dit cela !

M. Patrick Kanner. J’appartiens à une formation politique qui a porté l’objectif de la parité et qui en a fait un objectif majeur, un objectif républicain, mes chers collègues de droite !

M. Olivier Paccaud. Nous en avons assez de vos leçons de morale !

M. Patrick Kanner. Nous pourrons vérifier quels sont les engagements des uns et des autres lors de l’examen des trois premiers amendements déposés sur cet article.

Les arguments de pragmatisme que vous utilisez tombent face à la réalité. Avec de tels arguments, la parité ne serait pas un objectif, elle serait simplement subie. Pour notre part, nous voulons en faire un objectif. L’amendement du Gouvernement, même s’il va dans le bon sens, introduit quelques réserves que nous pensons inutiles.

Mes chers collègues, je vous inviterai donc à examiner avec bienveillance les amendements qui vous sont présentés, tout simplement parce qu’ils sont des amendements de progrès et que nous avons des messages à faire passer aux sportives qui, aujourd’hui, veulent être représentées.

Sylvie Robert a indiqué qu’il n’y avait que deux présidentes de fédération olympique. C’est le double de ce que j’ai connu quand j’étais ministre chargé des sports ! (Sourires sur les travées du groupe SER.) On progresse donc, mais si lentement que cela mérite un effort de notre part. C’est le sens des amendements que nous défendrons.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, sur l’article.

Mme Annick Billon. Dès que l’on parle de parité dans cet hémicycle, on s’agresse les uns et les autres ; je le regrette ! Ce sujet mérite toute notre attention, et nous devons en débattre posément.

Oui, nous avons besoin qu’il y ait davantage de présidentes et d’arbitres femmes. S’il y en avait plus, les femmes seraient peut-être plus nombreuses à pratiquer certaines activités sportives.

Faire progresser la parité est une obligation pour établir une société meilleure, nous devons tous en avoir conscience. Il est ainsi prouvé, et on l’observe dans les pays nordiques, que lorsque l’égalité professionnelle et salariale est une réalité, les espaces publics sont beaucoup plus sûrs.

Je remercie d’ores et déjà M. le rapporteur, qui a essayé de trouver une voie, avec des contraintes supplémentaires mais acceptables. Nous allons en discuter, tranquillement.

Je rejoins également Sylvie Robert lorsqu’elle dit que sans contrainte, on n’avance pas. Cela est valable dans le monde professionnel comme dans le monde politique. Restons calmes, débattons, et nous avancerons vers davantage de parité !

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, sur l’article.

M. Stéphane Piednoir. Mme Billon a raison, il serait bon que nous puissions nous exprimer sur la parité sans nous invectiver les uns les autres – et sans donner de leçons de morale, monsieur Kanner !

M. Patrick Kanner. Absolument !

M. Stéphane Piednoir. Vous faites, mon cher collègue, une gravissime erreur de raisonnement, pardon de vous le faire remarquer. Vous avez parlé de pragmatisme. Je pointerais surtout un problème d’arithmétique.

La parité dépend en effet du référentiel. En politique, la base est la même, puisqu’il y a à peu près autant de femmes que d’hommes en France, et même un peu plus : la population française tout entière est le vivier dans lequel on puise les élus de la République. Pour les fédérations sportives, la base n’est pas la même : il est faux de dire qu’il y a autant de femmes que d’hommes dans chaque fédération sportive. Dès lors, votre raisonnement ne tient plus.

Outre ce problème de raisonnement, vous donnez, comme d’habitude, d’insupportables leçons de morale. S’ajoute une différence d’interprétation : l’égalité n’est pas la même chose que l’équité.

Pour ma part, je suis favorable à l’équité, qui implique de respecter les proportions que l’on observe dans la société. Autant cela avait du sens d’imposer la parité, comme vous l’avez fait sur le plan politique, autant cela n’en a pas pour les fédérations.

M. Patrick Kanner. Aucun espoir, donc ? Vive la réaction !

Mme Sylvie Robert. Incroyable !

M. Stéphane Piednoir. En effet, dans les fédérations, le déséquilibre est très facilement observable, même par vous, monsieur Kanner, si vous faites un tout petit effort d’intelligence ! (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Gardez-la pour vous…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Savin, rapporteur. Étant à l’origine de ce changement, je vais tenter d’expliquer son objet à mes collègues. Je remercie Annick Billon d’avoir rappelé que l’on pouvait discuter de ce sujet sans que le débat soit excessivement passionné.

Il est faux de dire que nous ne voulons pas de la parité. Ce n’est pas ce qui ressort des discussions que nous avons eues en commission. Je rappelle que 34 des 89 fédérations ont changé de président. Un renouvellement est enclenché, donc, avec le mouvement olympique, depuis quelques années.

Seules 15 fédérations sur 97 sont dirigées par le même président pendant plusieurs mandats : notre débat ne porte donc que sur un petit nombre de présidents.

Pour ce qui concerne la parité, la proposition qui est faite n’est pas, comme je l’ai entendu, de fixer une date d’échéance lointaine, mais de tenir compte de la situation actuelle des fédérations sportives. La commission a donc prévu que toutes les fédérations comptant plus de 15 % de licenciés de chaque sexe devront atteindre la parité en 2024, soit dans deux ans. Il est donc faux, encore une fois, de dire que nous ne souhaitons pas la parité !

Il y a des fédérations qui, du fait de leur histoire ou de la nature de leur activité, comptent moins de 15 % de licenciés d’un des deux sexes. Pour ces fédérations, nous fixons un palier de 40 % en 2024, et un objectif de 50 % en 2028. C’est dans six ans ! Ces fédérations auront l’obligation, pendant ces six ans, de mener un travail de fond important, de trouver des femmes qui puissent s’investir dans la vie des fédérations, des comités départementaux (CDOS) et des comités régionaux (CROS) olympiques et sportifs.

Recruter, former, faire participer ces personnes, ce n’est pas rien ! Je rappelle que certaines fédérations ont, aujourd’hui, des postes ouverts pour des femmes qui restent non pourvus.

Nous pourrions nous faire plaisir et imposer la parité pour toutes les instances en 2024, quitte à s’apercevoir à ce moment-là que les postes ouverts ne seront pas pourvus, car les fédérations n’auront pu effectuer le travail de détection, de formation et d’accompagnement nécessaire. Ce serait passer à côté de l’objectif.

Nous sommes pour la parité, ne dites pas le contraire ! La seule différence porte sur le calendrier. Le Gouvernement souhaite que la parité soit établie en 2024. Avec notre proposition, plus de 80 % des fédérations atteindront la parité à cette échéance. Mais la dizaine ou la quinzaine de fédérations qui ont peu de licenciés d’un des deux sexes bénéficieront de quatre ans supplémentaires pour accomplir le travail de recrutement nécessaire.

Comme l’a dit Jean-Jacques Lozach, le mouvement olympique est très proche de notre position et souhaite en effet organiser un accompagnement vers la parité.

Les chiffres montrent qu’il manque 3 000 femmes dans les instances régionales. Cela impose un travail de fond à ce niveau. C’est pourquoi nous avons proposé un calendrier pour aller vers la parité. Une de nos collègues a même déposé un amendement tendant à reporter la parité dans les instances régionales à 2032.

Nous souhaitons accompagner la parité, et non pas l’imposer. Ne laissons donc pas dire que le Sénat est sur la réserve dans ce domaine. Il a plutôt une position de bon sens, tenant compte de la situation des fédérations.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, puisque nous commençons la discussion sur le titre II par cet article, qui traite expressément de parité, je me permets de le rattacher aux autres articles portant sur le même sujet, parce qu’il ne peut pas être étudié isolément.

Le monde du sport, tel que vous l’avez évoqué, messieurs les sénateurs, est un système ancien, assez conservateur, dont je vais vous décrire les contours.

Nous parlons bien de parité, c’est-à-dire d’un nombre égal de femmes et d’hommes. Je vous présenterai ultérieurement quelle trajectoire nous avons retenue pour atteindre une parité totale au niveau national, et à celui des organes déconcentrés des fédérations, ce qui est nouveau.

Cet objectif me paraît pertinent non seulement parce qu’il s’agit de la grande cause défendue par le Président de la République, et que mon secteur doit s’en emparer, mais aussi parce que c’est une question de démocratie. Impliquer autant de femmes que d’hommes dans le monde du sport est tout naturel puisque, comme vous l’avez dit, il y a autant de femmes que d’hommes dans la société. Il n’y a donc aucune raison de ne pas avoir de parité dans le sport.

Le présent article ne peut pas être dissocié de celui qui porte sur la limitation du nombre de mandats. La première fois que j’ai reçu Denis Masseglia, qui était président du CNOSF jusqu’en 2021, il m’a dit que j’étais « sa onzième ministre »… Quant au président de la fédération dans laquelle j’étais inscrite, il est resté en poste quelque vingt-quatre années ! Et les cas similaires sont nombreux.

Aussi est-il important, si l’on parle de parité, de statuer également sur la possibilité d’accéder aux plus hauts postes de responsabilité, comme celui de présidente d’une fédération. Il est anormal que, sur 114 fédérations, 13 seulement soient présidées par une femme – et 2 parmi les fédérations olympiques.

J’ai vu pire : au Japon, comme on le voit sur toutes les photos, j’étais la seule femme dans un monde d’hommes. Il n’est pas possible que le sport renvoie cette image à la société, alors même que l’on veut encourager nos concitoyens des deux sexes à pratiquer un sport !

J’entends vos arguments sur la difficulté, parfois, de trouver des femmes qui acceptent de participer à la vie des instances. Or, pour prendre un exemple, qu’est-ce qui empêche les dirigeants du club de football dans lequel mon fils est inscrit de s’adresser à moi, sa mère ?