M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant tout, je veux remercier nos rapporteurs de la politique des territoires, Bernard Delcros et Louis-Jean de Nicolaÿ, pour leur travail.

Sachez, mes chers collègues, que vous avez beaucoup de chance… En effet, il aura fallu attendre la crise des « gilets jaunes » et la crise sanitaire pour se rendre compte de la nécessité de ne pas oublier les territoires, en particulier les territoires ruraux, qui jouent un rôle essentiel dans la cohésion économique et sociale.

Après huit années successives de diminution de crédits, c’est la première fois que nous observons une augmentation, légère, des crédits de cette mission, grâce au plan de relance.

C’est le cas du budget de l’ANCT : il est porté à 61 millions d’euros, alors qu’il s’établissait à 54 millions d’euros, notamment du fait de l’évolution des crédits destinés à l’ingénierie de 10 millions d’euros à 20 millions d’euros en 2021.

Nous nous réjouissons également de la naissance d’un nouvel outil de contractualisation avec les territoires, le programme « Petites villes de demain ».

Je tiens à rappeler que c’était une préoccupation et une préconisation du Sénat, avec, en 2018, l’adoption à l’unanimité de la proposition de loi, que j’avais déposée avec notre ancien collègue Martial Bourquin, portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs. À cette occasion, nous avions milité pour que l’on prête une attention particulière aux plus petites villes, qui étaient jusqu’alors les « oubliées » de l’aménagement du territoire.

On peut également se satisfaire de la prorogation du dispositif des ZRR jusqu’en 2022. Elle avait été réclamée dès l’année dernière dans un rapport d’information relatif à l’avenir de cet outil, rédigé par Frédérique Espagnac, Bernard Delcros et moi-même. Comme souvent, nous avons le tort, au Sénat, d’avoir raison trop tôt !

Mme Dominique Vérien. C’est vrai !

M. Rémy Pointereau. Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en réponse à une question d’actualité au Gouvernement du 21 octobre dernier, nous a confirmé l’ouverture du chantier destiné à réformer les critères et les mécanismes financiers associés aux ZRR. Sachez que le Sénat, maison des territoires, sera plus que jamais vigilant sur ce sujet. En effet, nous tenons aux ZRR. Plus encore, nous pensons qu’elles peuvent et doivent être un levier essentiel pour une politique de relocalisation.

En outre, j’espère que cette relocalisation ne se fera pas là où c’est déjà mouillé, sans que jamais le ruissellement arrive jusqu’aux territoires ruraux.

À l’écoute de ces satisfecit, on aurait tendance à dire : « Ne tirez pas sur le pianiste ! » (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) Malgré tout, quelques motifs d’inquiétude et d’interrogation subsistent, et ils sont majeurs.

La première inquiétude porte sur l’avenir de la prime d’aménagement du territoire, qui se réduit comme peau de chagrin. J’espère que les amendements visant à rehausser les crédits de la PAT seront adoptés.

La seconde interrogation concerne la distribution des crédits de l’ANCT. L’absence de lisibilité nous inquiète : à quels territoires profitera la hausse de 10 millions d’euros ? Est-ce aux petites communes, aux intercommunalités ou encore aux départements ? Nous le saurons peut-être tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État !

Pour conclure, j’observe que le manque de lisibilité constitue le grand problème de cette mission.

Nos rapporteurs ont suffisamment pointé du doigt la dispersion de crédits, conséquence d’une transversalité ministérielle qui complexifie la lecture de la mission « Cohésion des territoires ».

On reproche souvent aux élus de ne pas assez utiliser les outils qui leur sont destinés : mais comment voulez-vous qu’ils s’y retrouvent, dans un tel labyrinthe ? C’est pourquoi je souscris à la recommandation de nos rapporteurs, qui vous demandent de rassembler tous les crédits, et principalement ceux alloués aux politiques contractuelles, au sein d’une même mission.

Malgré tout, comme l’a dit mon collègue Mathieu Darnaud, les élus du groupe Les Républicains voteront les crédits de cette mission ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la crise sanitaire a rappelé les difficultés, mais aussi les atouts de nos territoires, notamment en zone rurale. Je veux les saluer, car ils portent en eux les solutions de demain : ce sont des emplois qui peuvent être créés.

À cet égard, je regrette les faibles dotations des programmes 112, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », et 162, « Interventions territoriales de l’État ». Certes, ces programmes représentent 200 millions d’euros, mais, sur un total de 8 milliards d’euros consacrés à l’aménagement du territoire, c’est bien peu !

Concernant le programme 112, la baisse de 32 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 13 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à 2020 est significative. On invoque le plan de relance, qui absorberait un grand nombre de crédits. L’explication est recevable, mais elle ne saurait masquer une baisse de crédits de paiement pour certains dispositifs. Les députés de la majorité à l’Assemblée nationale l’ont eux-mêmes reconnu.

Certains dispositifs subissent cette baisse et sont voués à disparaître, comme la prime d’aménagement du territoire, qui a bénéficié aux PME et maintenu des emplois. Elle doit être prolongée, à l’instar des zones de revitalisation rurale : la date butoir du 31 décembre 2020 est un couperet brutal.

Certes, on nous annonce l’augmentation des moyens en ingénierie de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, soit plus de 9 millions d’euros, et des maisons France Services. Mais puisqu’on veut aider la ruralité, j’invoquerai le bon sens paysan : nous attendons surtout des preuves !

Or, à ce jour, en raison du contexte, qui a ralenti son fonctionnement, l’ANCT n’a pas été en mesure d’entrer en action. Nous n’avons pas pu dresser son bilan. Pourtant, elle est appelée à jouer un rôle, notamment dans la relance. La relocalisation productive fera figure de test. L’objectif ambitieux de création ou de maintien de 13 000 emplois dans la relocalisation territoriale sera donc regardé avec attention.

Quant aux maisons France Services, nous attendons aussi de constater leur valeur ajoutée par rapport aux anciennes maisons de services au public (MSAP). Cela passe par une labellisation de la part des élus. L’objectif pour 2021 d’un taux de réalisation des démarches sans redirection de 90 % est très ambitieux : ne décevons pas les espoirs qu’il inspire. La communication intensive du Gouvernement ne doit pas déboucher sur des déceptions.

Quant au programme 162, consacré aux interventions territoriales de l’État, il est faiblement doté. Les sommes qu’il représente – 41 millions d’euros en autorisations d’engagement et 40,5 millions en crédits de paiement – restent dérisoires.

Il faudra également mesurer l’efficacité de terrain des huit actions de cette mission. Les projets doivent être appuyés, car la crise sanitaire a ralenti le déploiement de certains d’entre eux. Mais ce sont surtout les populations locales qui jugeront les résultats de ces plans.

Bref, les moyens accordés sont en baisse et nous le regrettons. On peut heureusement compter sur la sagesse du Sénat pour que certains crédits alloués soient augmentés.

La cohésion de nos territoires doit rester prioritaire et la crise sanitaire actuelle exige des soutiens supplémentaires, car le déconfinement risque d’être plus sensible que le confinement lui-même.

Malgré notre déception, nous voterons donc les crédits de ces missions ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Raymond Hugonet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au titre de la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2021, je concentrerai mon intervention sur les crédits de la politique de la ville inscrits au programme 147.

Le 16 octobre 2017, dans mon département, l’Essonne, plus d’une centaine de maires lançaient l’appel de Grigny en faveur des quartiers populaires, après quarante ans de politiques de la ville aux résultats notoirement insuffisants – c’est un euphémisme.

Le 14 novembre 2017, Emmanuel Macron prononçait le discours de Tourcoing, dans lequel il annonçait un plan de mobilisation nationale pour les quartiers populaires, confié à l’ex-ministre de la ville Jean-Louis Borloo.

On connaît la suite : en avril 2018, le chef de l’État enterre purement et simplement le rapport dont il a lui-même passé commande à Jean-Louis Borloo. Il ose même cette formule honteuse : « Ce n’est pas à deux mâles blancs d’échanger un rapport. Ce n’est pas ça, la République. » Pour ma part, je dirais bien autre chose…

Tout récemment, le 14 novembre dernier, soit trois ans jour pour jour après l’appel de Tourcoing, plus d’une centaine d’élus – toutes tendances politiques confondues –, dont une douzaine d’Essonniens, publient une lettre ouverte au Président de la République pour l’égalité républicaine de nos quartiers prioritaires. C’est un véritable appel au secours pour non-assistance à territoire en danger.

Que s’est-il passé en trois ans ? Seules quelques mesures ont pu être engagées, portées principalement par les villes elles-mêmes. L’État, pour sa part, n’a mené que quatre initiatives.

De surcroît, la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de covid-19 a, depuis lors, frappé de plein fouet les mêmes villes. Or aucune mesure ambitieuse n’a été prise pour répondre à la détresse sociale et économique des communes concernées et cette inertie se paye cash. Aujourd’hui, un autre virus se développe dans les quartiers et même au-delà, celui du décrochage à la politique, et ce ne sont pas des lois fumeuses sur le séparatisme qui y changeront quelque chose !

De nombreux voyants sont passés au rouge. Les demandes d’aide alimentaire explosent. Le chômage augmente dangereusement. Le nombre d’allocataires du revenu de solidarité active (RSA) progresse vertigineusement. Les inscriptions dans les associations culturelles et sportives diminuent massivement.

Au regard de cette situation alarmante, le projet de loi de finances pour 2021 affiche aujourd’hui une triste réalité : les villes et les quartiers prioritaires restent un angle mort du plan de relance. L’absence de choix est le signe patent d’un manque de vision. L’ANRU a redémarré, mais le Gouvernement, lui, est resté au bord de la route.

Force est de constater que l’ambition formulée par le Président de la République – changer le visage des quartiers d’ici à la fin du quinquennat – a fait long feu. La cohésion des territoires n’est pas une vaine politique : il s’agit de permettre à l’ensemble de nos concitoyens de vivre dans des conditions décentes.

Madame la ministre, il serait grand temps d’agir, car tout cela ne pourra plus durer bien longtemps ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, le logement est au cœur des préoccupations de nos concitoyens et la crise sanitaire a montré à quel point il était important d’accompagner ce secteur pour offrir à chacun un lieu de vie décent.

Pour faire face à cette crise, sanitaire autant qu’économique, des moyens substantiels sont mobilisés dans le cadre de ce projet de loi de finances, qu’il s’agisse des différents programmes budgétaires concernant le logement au sein de cette mission ou des crédits de la relance.

La mission « Cohésion des territoires » traduit un effort budgétaire important en faveur du logement : les moyens alloués s’élèvent à 16,1 milliards d’euros. À ces crédits, en augmentation par rapport à 2020, s’ajoutent 7,5 milliards d’euros du plan de relance. Je tiens à remercier la commission des finances et la commission des affaires économiques d’avoir voté les crédits de la mission.

Sur la base de ces moyens, trois priorités animent mon action ministérielle.

Premièrement, je veux mener une politique d’accès au logement plus juste et plus solidaire.

En cette période de crise, le budget consacré aux aides personnalisées au logement sera doté de 500 millions d’euros supplémentaires, pour atteindre 15,7 milliards d’euros.

La réforme des APL en temps réel, effective à compter du 1er janvier 2021, permettra de mieux accompagner les Français dont les revenus ont diminué en raison de la crise. Cette réforme contracyclique de justice sociale est particulièrement importante dans la période actuelle.

Par ailleurs, le Gouvernement mobilise des moyens sans précédent pour favoriser l’accès au logement des personnes sans domicile fixe, qu’elles soient à la rue ou hébergées. Le projet de loi de finances pour 2021 dote ainsi le programme 177 de 2,2 milliards d’euros, soit une hausse de 209 millions d’euros par rapport à 2020.

Concrètement, cet effort permettra de pérenniser 14 000 nouvelles places d’hébergement et de recruter 150 personnels supplémentaires au sein des services intégrés de l’accueil et de l’orientation dans chaque département, pour améliorer l’orientation et la prise en charge des personnes sans domicile.

Dans le cadre de l’acte II de la stratégie Pauvreté, ce programme bénéficie de moyens supplémentaires qui permettront notamment d’ouvrir 1 500 places d’hébergement pour les femmes sortant de maternité et de financer vingt-cinq équipes mobiles de prévention des expulsions locatives.

De plus, je confirme l’engagement du Gouvernement dans le déploiement du plan Logement d’abord. Ce projet de loi de finances donne au ministère les moyens d’une véritable accélération dans l’application de ce plan, non seulement par le financement de nouveaux territoires de mise en œuvre accélérée du plan Logement d’abord, mais aussi par le renforcement du financement des pensions de famille, avec une revalorisation très attendue du forfait journalier. Ce dernier passe de 16 à 18 euros.

Les objectifs de production de logement social sont maintenus : le minimum est fixé à 110 000 logements sociaux, dont 40 000 prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI). À cet égard, nous nous appuyons sur les moyens mis en œuvre dans le pacte d’investissement État-HLM 2020-2022.

Il s’agit bien d’un minimum : nous avons récemment engagé une discussion avec l’Union sociale pour l’habitat (USH) pour fixer un objectif global ambitieux sur deux ans, à savoir les années 2021 et 2022, permettant de compenser la baisse conjoncturelle des agréments en 2020.

Cet objectif est ambitieux, mais il est d’une importance capitale : pour l’atteindre, je mobiliserai l’ensemble des parties prenantes – bailleurs sociaux, collectivités et services instructeurs de l’État.

Deuxièmement, j’entends mener un effort sans précédent pour la rénovation des logements.

Le plan France Relance doit consacrer 6,7 milliards d’euros à la rénovation énergétique, dont 2 milliards d’euros pour la rénovation thermique des logements privés, 4 milliards d’euros pour les bâtiments publics, 500 millions d’euros pour la réhabilitation du parc social et 200 millions d’euros pour les PME et TPE.

MaPrimeRénov’ est désormais la principale aide de l’État à la rénovation énergétique pour les particuliers, en complément des certificats d’énergie. Lancé en début d’année, ce dispositif connaît déjà une forte dynamique, puisque plus de 160 000 dossiers ont été déposés à ce jour.

Grâce au plan de relance, MaPrimeRénov’ devient accessible à tous en 2021 – propriétaires et copropriétaires, bailleurs comme occupants, avec des forfaits modulés en fonction du niveau de revenus. Nous nous fixons comme objectif pour 2021 de financer plus de 400 000 rénovations via ce dispositif.

L’action du Gouvernement en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments publics est tout aussi ambitieuse. L’appel à projets lancé pour les bâtiments de l’État est un véritable succès. De très nombreux dossiers ont été déposés, allant bien au-delà de l’enveloppe prévisionnelle de 2,7 milliards d’euros. Par ailleurs, 1,3 milliard d’euros seront affectés à la rénovation des bâtiments des collectivités, en particulier les écoles, les collèges et les lycées. Nous serons particulièrement attentifs à ce que ces rénovations soient également menées dans les quartiers de la politique de la ville et concourent à l’objectif que nous nous sommes fixé : consacrer au moins 1 % du plan de relance à ces quartiers.

En parallèle, le budget de l’ANAH sera voté demain en conseil d’administration. Il donnera à cette agence des moyens d’intervention sans précédent, à savoir 2,7 milliards d’euros, en faveur la rénovation énergétique des logements, de la résorption de l’habitat indigne ou encore du redressement des copropriétés dégradées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens également à saluer l’adoption par le Sénat, au titre de la première partie du projet de loi de finances, de l’amendement de votre collègue Didier Rambaud visant à harmoniser les critères de la TVA à 5,5 % sur les travaux de rénovation énergétique et les critères de l’écoprêt à taux zéro. Ces dispositions permettront d’améliorer la lisibilité et la cohérence des aides à la rénovation énergétique.

Troisièmement et enfin, je suis pleinement mobilisée en faveur de la relance de la construction neuve, qui doit être une construction durable.

Vous avez raison : les chiffres de la construction en 2020 sont inquiétants et nous devons faire face à cette menace. Nous devons soutenir la construction neuve, car nous avons besoin d’un plus grand nombre de logements ; mais il faut soutenir des opérations de construction et d’aménagement durables, qui permettent également de lutter contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain. Au total, 650 millions d’euros y sont consacrés dans le cadre du plan de relance.

Pour mobiliser l’ensemble des acteurs autour de cette démarche, j’ai signé, le 10 novembre dernier, avec les associations de collectivités territoriales et les professionnels de la construction, un pacte pour la relance de la construction durable.

Ce pacte suit deux grands axes : d’une part, simplifier et accélérer les procédures ; d’autre part, soutenir l’émergence de projets de constructions durables, qui promeuvent à la fois la qualité des logements et la sobriété foncière. Il s’agit d’un acte politique fort, qui sera décliné localement en étroite collaboration avec les élus locaux, les professionnels du bâtiment et les services de l’État.

Pour donner de la visibilité, on a précisé le devenir du dispositif fiscal Pinel et du prêt à taux zéro lors de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.

Le prêt à taux zéro constitue le principal dispositif de soutien à l’accession à la propriété. En cette période, le Gouvernement a choisi de privilégier sa stabilité en le prorogeant jusqu’à la fin de l’année 2022.

Quant au dispositif Pinel, le Gouvernement a décidé de le proroger jusqu’en 2024 tout en organisant, à compter de 2023, le transfert d’une partie du coût du dispositif en faveur du soutien au logement locatif intermédiaire géré par les institutionnels. C’est le choix de l’efficacité, qu’il s’agisse du coût du logement, du ciblage territorial ou encore de la gestion locative.

Concrètement, le taux de la réduction d’impôt diminuera à compter du 1er janvier 2023, sauf pour les opérations les plus vertueuses d’un point de vue environnemental ou situées dans un quartier prioritaire de la politique de la ville et respectant des critères de qualité intrinsèque des logements – je pense par exemple à la taille des pièces.

D’ici à la fin mars 2021, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport visant à améliorer les conditions de financement du logement intermédiaire par les institutionnels.

À ce titre, je salue l’adoption de l’amendement présenté par M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, visant à supprimer l’agrément préalable aux opérations de construction de logements locatifs intermédiaires (LLI) institutionnels. Cette simplification majeure du dispositif permettra de fluidifier la réalisation des opérations tout en donnant à l’État les moyens d’assurer un suivi de la production et le contrôle du respect des obligations.

Enfin, j’évoquerai la réforme de l’organisation et du fonctionnement d’Action Logement.

Je connais l’engagement du Sénat sur ce sujet. Je sais tout l’intérêt qu’il y porte et je salue le travail mené par Mmes les sénatrices Valérie Létard, Dominique Estrosi Sassone, Viviane Artigalas et Marie-Noëlle Lienemann au sein de la mission d’information de la commission des affaires économiques.

Le Gouvernement est fermement attaché à ce qu’une réforme soit menée et souhaite travailler dans un climat de confiance avec les partenaires sociaux. Une concertation va se dérouler avec eux. Elle va commencer à la fin de l’année et devrait aboutir, d’ici à la fin du premier trimestre 2021, à un accord sur les points suivants : mise en place d’une gouvernance plus transparente, plus lisible et plus efficiente d’Action Logement, ce qui suppose de mener à son terme la réforme de 2016 ; optimisation de la gestion et des emplois de la PEEC, afin d’améliorer l’efficacité des interventions en faveur des salariés, des entreprises et des politiques nationales du logement et de la ville.

Dans un calendrier encore plus rapproché, lié au contexte économique, nous sommes convenus avec les partenaires sociaux de conclure un avenant à la convention quinquennale. Ce document permettra de déployer plus efficacement les moyens disponibles en appui du plan de relance et de discuter de la meilleure méthode permettant de soutenir le NPNRU, pour renforcer les moyens dont l’ANRU a besoin. Notre objectif est que cet avenant soit signé en janvier prochain.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je cède la parole à mon collègue Joël Giraud, qui va vous présenter les autres programmes de la mission ! (Mme Patricia Schillinger applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Joël Giraud, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes la chambre des territoires et, mieux que quiconque, vous connaissez leur diversité. Le rôle de l’État est de réduire les fractures territoriales en apportant une réponse qui tienne compte de leurs spécificités. Il s’agit de faire vivre la promesse républicaine d’égalité, en particulier d’égalité des territoires.

Cet impératif est encore plus prégnant dans le contexte inédit que nous connaissons, marqué par une crise sanitaire majeure qui amplifie certaines fractures territoriales.

C’est tout le sens du budget que nous vous présentons, avec un plan de relance massif et territorialisé. C’est aussi le sens des crédits de la mission « Cohésion des territoires », en particulier des programmes 112, 147 et 162, qui portent respectivement sur l’impulsion et la coordination de la politique d’aménagement du territoire, sur la politique de la ville et sur les interventions territoriales de l’État.

Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et moi-même nous félicitons de défendre un budget dans lequel les territoires occupent une place importante.

Certes, la lecture d’ensemble est parfois peu aisée, compte tenu de la répartition des crédits entre la mission « Plan de relance » et les missions du budget général. Vous êtes nombreux à l’avoir souligné dans vos rapports spéciaux et rapports pour avis : c’est un débat qui traverse tout le projet de loi de finances.

Toutefois, si l’on ajoute aux crédits du programme 112 les fonds du plan de relance, on observe que les moyens du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire sont en hausse de 40 % : c’est bien là l’essentiel. Ces fonds passent de 208 à 291 millions d’euros, soit une hausse de 83 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Monsieur de Nicolaÿ, vous savez qu’en la matière Bercy a coutume de procéder par le biais de conventions de délégation de gestion. En cas de transfert de crédits en faveur du programme 112, les chiffres seraient certainement plus lisibles : la question reste en débat. Je remercie d’ailleurs les orateurs qui nous ont fait part de leur soutien à cet égard. Notre démarche n’aboutira peut-être pas, mais, en tout état de cause, elle pose le problème de la lisibilité d’ensemble.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je souligne plus particulièrement le doublement des crédits destinés à l’ingénierie : ces derniers passent de 10 à 20 millions d’euros. C’était une demande forte du ministère lors des négociations budgétaires. Vous l’avez tous dit : bien souvent, pour les plus petites collectivités, les projets mettent du temps à se concrétiser, non pas faute de financements, mais tout simplement par manque d’ingénierie.

Nombre d’entre vous sont intervenus sur ce sujet. Je l’ai déjà précisé à l’occasion du débat consacré à l’ANCT, organisé à la demande du groupe du RDSE, et lors de diverses auditions, notamment au Sénat : les crédits d’ingénierie vont bien au-delà de ces 20 millions d’euros.

L’ANCT est financée au niveau national ; malgré sa grande jeunesse – nous l’avons démontré lors du débat que j’évoquais –, cette agence a fait la preuve de son efficacité. En outre, des crédits vont être mis à la disposition des territoires pour financer des missions d’étude, menées par des cabinets privés. Quant aux volontaires territoriaux en administration (VTA), que M. Roux appelle de ses vœux, ils seront encore plus près de la réalité du terrain. J’ai examiné les amendements déposés et je vous rassure : ces postes sont bien financés !

Ce budget répond véritablement à l’exigence d’équité territoriale. Nous agissons en faveur des territoires fragiles grâce à l’accélération du déploiement des espaces France Services, qui renforcent le lien entre les habitants et leur administration.

C’est un des engagements de l’agenda rural, dont 30 % des mesures étaient réalisées ou en voie de l’être au début de l’année 2020. Lors du dernier comité interministériel aux ruralités (CIR), nous étions à environ 50 %. Bien sûr, une fois que l’enfant est né, il faut continuer à l’accompagner : rien ne serait pire que de ne pas suivre sa croissance. C’est bien ma mission particulière que d’accompagner l’agenda rural – à cet égard, je réponds à la remarque de M. Roux.

Les maisons France Services bénéficient d’un abondement de 28 millions d’euros en 2021, soit 10 millions d’euros de plus qu’en 2020, pour garantir d’ici deux ans au moins un espace France Services par canton, y compris – je le précise – dans les quartiers de la politique de la ville. Le déploiement de France Services est une mesure forte de l’agenda rural.

Au titre du plan de relance, 20 millions d’euros sont prévus pour compléter le financement des mesures de l’agenda rural. Je vous rappelle que, lors du CIR présidé par le Premier ministre le 14 novembre dernier, 5 milliards d’euros du plan de relance ont été fléchés vers la ruralité, en particulier sur les thématiques de la santé, de l’emploi et des transitions écologique et numérique.

S’y ajoute une mesure introduite par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, que vous avez tous saluée : la prolongation de deux ans de tous les dispositifs zonés, sans exception, en particulier les zones de revitalisation rurale. C’était un engagement du Gouvernement et nous y étions tous particulièrement attachés. Il est désormais inscrit dans le projet de loi de finances.

J’en viens à la politique de la ville.

L’ambition du Gouvernement est bien de renforcer la cohésion de tous les territoires et de mieux prendre en considération tous leurs habitants, en particulier ceux des quartiers prioritaires, où, comme l’a répété le chef de l’État, la République doit plus que jamais s’assurer qu’elle tient sa promesse de justice et d’égalité.

Les crédits étaient sanctuarisés depuis 2017 : en 2021, ils augmenteront. Pour mémoire, ce même budget avait diminué de 85 millions d’euros en 2012 avant d’être amputé de 110 millions d’euros supplémentaires entre 2012 et 2017 !

L’augmentation du budget du programme 147, consacré à la politique de la ville, à hauteur de 46 millions d’euros, traduit aussi cet engagement porté par Nadia Hai, ministre déléguée chargée de la ville.

L’exigence d’équité territoriale vaut bien sûr pour les quartiers prioritaires. C’est un engagement fort que le Premier ministre a affirmé aux maires en leur assurant que ces territoires recevraient bien 1 % du plan, soit au moins 1 milliard d’euros. À ce titre, nous suivons deux axes prioritaires : premièrement, l’emploi et le développement économique – M. Dallier en a parlé –, « parce que c’est le premier vecteur d’émancipation » ; deuxièmement, l’attractivité des territoires, à travers l’aménagement du cadre de vie de leurs habitants.

Face à l’impact économique de la crise, il y a un grand enjeu de relance de l’emploi et d’accompagnement vers l’emploi, notamment pour les plus jeunes : il y va du développement attractif de nos quartiers, principe au cœur des cités de l’emploi, que nous impulsons.

En parallèle, nous augmentons les crédits dévolus aux parcours emploi compétences : le taux de prise en charge par l’État est porté de 48 % à 80 % dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Nous pérennisons les postes d’adultes-relais pour un coût de 10 millions d’euros et nous déployons 4 millions d’euros supplémentaires pour renforcer la formation professionnelle à travers les établissements pour l’insertion dans l’emploi.

Face aux défis engendrés par la crise, pour défendre la continuité éducative et lutter contre le décrochage scolaire, l’ambition que nous portons avec les cités éducatives va être amplifiée.

Ainsi, nous dégageons 17 millions d’euros supplémentaires pour labelliser 40 nouveaux territoires, qui s’ajouteront aux 80 premiers. C’est une méthode innovante, plébiscitée par les acteurs de terrain – certains d’entre vous l’ont rappelé –, qui travaillent ensemble avec pour seul objectif de mieux accompagner chaque jeune, pour qu’il puisse croire en ses chances. C’est aussi une occasion de réaffirmer le rôle central de l’école comme creuset républicain par excellence de l’égalité, pas simplement face aux savoirs.

Enfin, le renouvellement urbain est une question essentielle. Au-delà du bâti, l’enjeu, ce sont les mobilités, le cadre de vie et la mixité sociale, qui doivent être mieux pris en compte.

Sur ce sujet comme sur les autres, nous n’avons pas à rougir ! Aux côtés des élus et des bailleurs, l’État entend bien poursuivre en 2021 son engagement dans le NPNRU pour améliorer les conditions de logement et le cadre de vie de nos concitoyens.