M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Comme Mme de La Gontrie, je trouve ce débat quelque peu étrange. Le texte dont nous débattons comprend des dispositions sanitaires, mais aussi économiques. Il traite également de la démocratie de proximité, ce sujet étant fondamental.

Force est de dire que les choses sont complexes, nous sommes dans le brouillard. Je suis très à l’aise pour évoquer ces questions puisque je ne suis plus conseiller général et que je ne serai pas candidat lors des prochaines élections départementales ou régionales. Les élus nous font confiance pour œuvrer dans le sens de l’intérêt général et servir la Nation. Vous avez mandaté un grand expert pour nous éclairer sur les échéances départementales et régionales, mais pourquoi ne pas faire confiance au Parlement ? L’Assemblée nationale et le Sénat comprennent des élus et des personnels de qualité, très compétents d’un point de vue juridique, notamment au sein des commissions. Ces personnes pourraient nous éclairer sur ces sujets.

Par ailleurs, notre institution a toute légitimité pour fixer le calendrier électoral. À cet égard, je rejoins ce qu’a dit le président Kanner dans son intervention sur la démocratie locale. Il ne faut pas que nous connaissions de nouveau les taux d’abstention du premier tour des municipales. Les élections départementales et régionales sont aussi importantes pour la démocratie de proximité.

Je me rallierai donc à l’avis de la commission des lois.

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote.

Mme Nadège Havet. Un mot sur l’amendement de M. le rapporteur.

Les deux dispositifs proposés, qui ont fait l’objet de discussions en commission des lois, posent une question de fond et de forme.

Sur le fond, des considérations constitutionnelles sur les injonctions du Gouvernement nous invitent à exprimer une certaine prudence.

Sur la forme, cet amendement tend à exiger du Gouvernement ce qu’il a en réalité déjà annoncé, à savoir une décision à la fin de l’année sur la tenue des scrutins de mars 2021, à l’issue de la mission confiée à Jean-Louis Debré, qui consulte aujourd’hui et travaille à l’émergence d’un consensus sur la question afin que les élections, ainsi que la campagne qui les précède, puissent se tenir dans les meilleures conditions.

Pour ces raisons, notre groupe n’aurait pas voté l’amendement n° 10 et ne pourra pas non plus voter l’amendement n° 91, même rectifié.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.

M. Philippe Bonnecarrère. Je ne vois pas de brouillard sur cette question.

Premièrement, la date des élections doit-elle être maintenue ? La réponse est oui, dans un fonctionnement démocratique normal.

Deuxièmement, sommes-nous ou non en mesure de permettre des élections dans des conditions sanitaires sûres pour nos concitoyens ? C’est à cette fin que nous proposons le vote par correspondance.

Troisièmement, l’amendement proposé par M. le rapporteur sur la date de publication du décret est-il une réponse ? Je n’en suis pas tout à fait convaincu. Je pense en fait que cet amendement, s’il était adopté, pourrait permettre au Gouvernement de dire qu’il n’a pas été en mesure de publier le décret à la date arrêtée et que, dans ces conditions, il n’y a pas d’autre solution que de reporter les élections.

Quatrièmement – et c’est le seul sujet pour moi –, le Gouvernement conservera-t-il à l’Assemblée nationale les dispositions que nous avons introduites dans le texte s’agissant du vote par correspondance ? Si la réponse est oui, les élections départementales et régionales pourront avoir lieu dans des conditions correctes. Si la réponse est non, cela signifie que le Gouvernement a déjà pris la décision de reporter ces élections et qu’il en a déjà convaincu sa majorité. Dans ce cas, il ne pourra pas prendre prétexte de la situation sanitaire puisque nous lui aurons proposé des modalités de vote par correspondance, sur lesquelles je n’ai pas entendu de critiques de fond.

À titre personnel, je considère que nous ne pourrons prendre position sur ce sujet qu’à l’issue de l’examen du texte par l’Assemblée nationale et lorsque le Gouvernement aura pris une décision. La situation sera alors claire. C’est la raison pour laquelle je disais que je ne voyais pas de brouillard sur ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Merci, monsieur le rapporteur, de cet amendement, que je soutiendrai bien évidemment.

Étant membre non pas de la commission des lois, mais de la commission des affaires étrangères, je n’ai pas participé aux discussions sur ce texte. Je souhaite donc attirer votre attention sur l’élection pour nos compatriotes expatriés.

Si vous avez besoin de visibilité et de sécurité en France pour les élections régionales, il en va de même – et peut-être plus encore – pour les Français de l’étranger. Ils ne doivent pas être exclus du dispositif. Eux aussi ont besoin d’être informés le plus rapidement possible des dates des élections.

M. Jean-Yves Leconte. Cela a été intégré au texte !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Ce débat est très fructueux, très riche.

Ce qui importe à la commission des lois, c’est essentiellement la sécurisation du scrutin s’il devait se tenir. C’est pour cela que nous avons adopté dans notre texte des dispositions sur le vote par correspondance.

Notre collègue Leconte a d’ailleurs déposé un amendement visant à permettre l’application de ces dispositions lors des élections consulaires. Cela rassurera Mme Garriaud-Maylam.

Ce qui nous importe, c’est, premièrement, le vote par correspondance, sécurisé ; deuxièmement, le régime des procurations. Ces deux dispositions ont été adoptées.

La question de la date des élections est subordonnée à notre capacité à sécuriser ce scrutin. À cet égard, je prends acte de l’engagement de M. le secrétaire d’État, qui nous a indiqué que le Gouvernement avait demandé à Jean-Louis Debré de remettre son rapport de mission d’ici à trois semaines. C’est un élément très important. Lors de nos délibérations, nous nous étions posé la question de la durée de cette mission, et c’est parce que nous ignorions qu’elle serait brève que j’ai été mandaté à l’issue de notre débat pour présenter cet amendement.

Puisque le terme est proche, et compte tenu de nos échanges, je retire cet amendement, en accord avec le président de la commission, de sorte que nous puissions délibérer sereinement à partir des conclusions du rapport de M. Debré.

Article additionnel après l'article 11 - Amendement n° 91
Dossier législatif : projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire
Article additionnel après l'article 11 - Amendement n° 70

M. le président. L’amendement n° 91 rectifié est retiré.

L’amendement n° 68, présenté par Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les personnes définies à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles et les personnes en situation de fragilité financière définies au deuxième alinéa de l’article L. 312-1-3 du code monétaire et financier sont exonérées des commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire et des facturations de frais et de services bancaires durant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire et prorogé en application de l’article 1er de la présente loi.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement porte sur l’exonération des commissions perçues par les établissements financiers en cas d’irrégularités de fonctionnement de compte bancaire pour les personnes en grande fragilité financière. Nous avons déjà abordé ce sujet lors de l’examen des précédents textes portant sur l’état d’urgence sanitaire.

Nous savons très bien combien peuvent coûter les irrégularités de fonctionnement bancaire. Les frais peuvent parfois atteindre plusieurs centaines d’euros par an. Nous proposons donc de suspendre ces frais pour les personnes en grande fragilité financière pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire.

M. le président. Le sous-amendement n° 89, présenté par M. Bas, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 68, alinéa 3

1° Remplacer les mots :

en situation de fragilité financière définies

par les mots :

qui bénéficient de l’offre spécifique prévue

2° Supprimer les mots :

et des facturations de frais et de services bancaires

3° Après le mot :

prorogé

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

dans les conditions prévues à l’article L. 3131-14 du code de la santé publique.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Pour faire simple, la commission est d’accord avec les auteurs de l’amendement pour que, en cas de découvert, les mesures prises pour rééquilibrer un compte n’entraînent pas de frais pour son titulaire. En revanche, nous ne souhaitons pas prendre de dispositions particulières s’agissant des frais de gestion courante du compte, car ces frais ne sont pas différents en période de covid et en période de sécurité sanitaire.

Tel est le sens de ce sous-amendement à l’amendement de nos collègues du groupe socialiste.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Madame la sénatrice, nous avions déjà eu l’occasion de débattre de ce sujet lors de l’examen d’un précédent projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire. C’était en mai, sauf erreur de ma part. Le Gouvernement avait à l’époque émis un avis défavorable sur cette proposition. Dans le droit fil de cet avis, j’émets aujourd’hui aussi un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur le sous-amendement du rapporteur.

Depuis 2017, nous avons apporté de nombreuses protections aux publics fragiles en cas de frais d’incidents bancaires. Auparavant, il n’y avait pas de plafond, y compris pour les publics fragiles. Les banques n’avaient aucune contrainte pour fixer leurs critères d’identification des publics fragiles.

En 2018, le ministre de l’économie et des finances a obtenu des banques françaises que les frais d’incidents bancaires soient plafonnés pour les publics les plus vulnérables. Vous connaissez le dispositif : plafonnement à 25 euros par mois de tous les frais d’incidents ; plafonnement à 20 euros par mois et à 200 euros par an des frais d’incidents pour les bénéficiaires de l’offre spécifique que les banques doivent proposer à leurs clients en situation de fragilité ; augmentation de 30 % du nombre de bénéficiaires de cette offre spécifique.

En 2020, le ministre de l’économie et des finances a signé un décret pour mieux encadrer encore l’identification des publics fragiles. Je n’entre pas dans le détail.

Le principe du plafonnement des frais d’incidents bancaires et l’ensemble des mesures que nous avons prises sur ce sujet ont été consignés dans une charte qui a été homologuée par décret du ministre de l’économie et des finances.

Enfin, nous avons resserré le suivi de cette question. L’Observatoire de l’inclusion bancaire a été chargé de relever chaque trimestre les données à ce sujet, au lieu de deux fois par an auparavant. Il analysera notamment la façon dont les banques détectent la fragilité et le nombre de personnes concernées. Sur la base du prochain bilan de l’Observatoire, nous serons prêts à enrichir le dispositif actuel, en concertation, évidemment, avec les parlementaires qui travaillent activement sur ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je suis très favorable à cet amendement. Je rappelle que, en février dernier, nous avons voté, sur proposition du groupe socialiste, un texte visant à rendre effectif le plafonnement des frais bancaires. Entre le dire et le faire, il y a parfois en effet la moitié de la mer !

Je pense que tous les dispositifs nécessaires pour que les frais soient véritablement plafonnés ne sont pas mis en œuvre, sinon nous n’aurions pas eu à débattre de ce sujet au Sénat il y a quelques mois. Les mesures que tend à prévoir cet amendement sont donc absolument nécessaires.

Les problèmes d’exclusion bancaire sont majeurs. En cette période de très grande fragilité et de casse sociale, ils seront plus graves encore. À cet égard, je vous renvoie au débat que nous avons eu sur la proposition de loi visant à rendre effectif et à renforcer le plafonnement des frais bancaires.

Pour l’instant, il y a beaucoup de bonnes intentions, mais, dans la réalité, le compte n’y est pas.

Pour ma part, je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.

M. Rémi Féraud. Monsieur le secrétaire d’État, Nathalie Goulet l’a rappelé, nous avons déjà évoqué les problèmes des frais bancaires depuis le début de la crise, y compris lors de l’examen d’une proposition de loi que j’avais défendue et qui a été adoptée.

Il est vraiment temps de renoncer aux éléments de langage que Bercy relaie concernant l’engagement d’autorégulation des banques. Dans la période d’urgence sanitaire que nous connaissons, ce sont les plus pauvres qui vont payer le plus de frais bancaires, à un moment où ils sont mis en difficulté.

Ce sujet soulève également la question de l’efficacité des politiques publiques. Le soutien aux ménages les plus modestes est déjà insuffisant, mais si les 100 ou 150 euros qui leur sont alloués leur servent uniquement à payer des frais bancaires, on est loin de l’objectif de départ.

Il me semble donc qu’il serait vraiment très utile d’adopter cet amendement dans le présent texte.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 89.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 11 - Amendement n° 68
Dossier législatif : projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire
Article additionnel après l'article 11 - Amendement  n° 71

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11.

L’amendement n° 70, présenté par Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Par dérogation aux articles L. 2212-1 et L. 2212-7 du code de la santé publique, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, et jusqu’à trois mois après sa cessation, l’interruption de grossesse peut être pratiquée jusqu’à la fin de la quatorzième semaine de grossesse et le délai d’accès à l’interruption de grossesse par voie médicamenteuse est allongé de deux semaines.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous avons déjà eu plusieurs fois l’occasion, lors de nos débats sur l’état d’urgence sanitaire, de pointer les difficultés que rencontrent les femmes pour accéder à une IVG alors que les services de soins sont embolisés du fait de l’accueil des victimes du covid.

Il est proposé ici que, pendant la période d’urgence sanitaire, le délai d’accès à l’IVG soit prolongé de deux semaines. Vous le savez, le débat sur la prolongation du délai, de manière générale, a déjà eu lieu à l’Assemblée nationale. Pour notre part, nous proposons ici non pas une disposition pérenne – le moment viendra, nous aurons ce débat –, mais une disposition pour une durée strictement limitée à celle de l’état d’urgence sanitaire.

Ayez bien à l’esprit que l’accès à l’hôpital aujourd’hui est réservé d’abord aux victimes du covid et aux personnes dont l’état de santé le justifie, mais que l’accès à l’IVG n’est plus du tout une priorité pour le monde médical.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Mes chers collègues, c’est naturellement une question que nous nous devons d’examiner avec beaucoup d’attention.

Aujourd’hui, un certain nombre de femmes enceintes qui souhaiteraient faire procéder à une interruption volontaire de grossesse tardent à en faire la demande pendant les périodes de confinement parce qu’elles craignent d’être contaminées en se rendant dans un établissement hospitalier. Cette crainte, nous dit-on, pourrait perdurer après la fin du confinement, le virus n’ayant pas disparu, comme le prouvent d’ailleurs les décisions de reconfinement qui ont été prises par le Gouvernement.

Pendant toute la période qui a suivi la fin du premier confinement, un certain nombre de femmes peuvent ne pas avoir été rassurées à l’idée de se rendre dans des services hospitaliers ou avoir vu leur mouvement entravé.

C’est donc sur la base de cette interrogation – je ne peux pas parler véritablement de constat – que cet amendement a été déposé pour la troisième fois depuis le début de la crise sanitaire.

Le Gouvernement a eu l’occasion de dire qu’il avait pris la mesure du problème en rendant possibles, par exemple, les vidéoconsultations, lesquelles se sont développées, et qu’il avait été attentif à ce que les droits des femmes en matière d’accès à l’interruption volontaire de grossesse soient respectés pendant la période de lutte contre le fléau du covid-19.

Par ailleurs, nous l’avons constaté, le report du délai normal légal pour pratiquer une IVG ne fait pas l’objet d’un consensus médical. Un certain nombre de médecins soulignent même que, à partir de la douzième semaine, une telle intervention médicale comporte des inconvénients beaucoup plus importants que pendant la période précédente.

Tous ces éléments combinés me font penser qu’il ne faut modifier les échéances prévues dans la loi de 1975 que d’une main tremblante.

Pour ma part, je préférerais que le Gouvernement nous explique ce qu’il met en œuvre pour assurer le respect des droits des femmes en matière d’interruption volontaire de grossesse avant d’envisager une telle mesure.

La commission, comme elle l’avait fait lors des deux précédents examens du même amendement, a émis un avis défavorable.

Pour autant, il importe que la demande de nos collègues du groupe socialiste ne soit pas traitée d’une manière inadéquate. Il est donc très important, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous apportiez des éléments de réponse qui puissent rassurer pleinement tous ceux d’entre nous qui sont inquiets.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. À l’invitation du rapporteur Bas, je vais m’efforcer de vous apporter une réponse adéquate. Cet amendement soulève en effet de vraies questions.

Nous le savons tous, les fortes tensions du système de santé qui résultent de l’épidémie à laquelle nous faisons face ont créé de véritables préoccupations s’agissant de l’accès effectif à l’avortement lors de la première vague. La dégradation récente de la situation sanitaire est susceptible d’entraîner les mêmes difficultés.

Vous avez cependant constaté que les conditions de ce deuxième confinement sont sensiblement différentes de celles de la première vague, avec davantage de possibilités de mobilité. Pour autant, il faut évidemment rester très attentif à l’effectivité de l’accès à l’avortement.

En avril dernier, nous avions décidé le rétablissement par voie réglementaire des adaptations pour l’IVG médicamenteuse pour préserver le droit à l’avortement pendant cette phase d’urgence sanitaire, le recours à la téléconsultation, à la vidéoconsultation pour la prise des médicaments – le rapporteur l’évoquait –, ainsi que la facilitation du retrait des médicaments nécessaires en pharmacie, ou encore l’extension de deux semaines de la période pendant laquelle l’IVG médicamenteuse peut être pratiquée, soit jusqu’à la fin de la septième semaine de grossesse.

L’ensemble de ces mesures est en cours d’examen dans le cadre nouveau du confinement tel qu’il a été établi par le Président de la République, puis précisé par le Premier ministre hier. Nous sommes en train d’évaluer quelles dispositions doivent être réactivées, ou pas, pour assurer l’effectivité de l’accès à l’avortement. C’est, je pense, ce qui nous réunit tous.

Par ailleurs, madame la sénatrice, dans le cadre de l’examen de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, à l’Assemblée nationale, le 8 octobre dernier, le Gouvernement s’est engagé – et a saisi le Comité consultatif national d’éthique à cette fin – à étudier la perspective d’étendre de façon pérenne les délais impartis pour pratiquer l’IVG hors période de crise sanitaire.

C’est la raison pour laquelle, dans l’attente de cet avis, je vous invite à retirer l’amendement. Sinon, en cohérence avec la position adoptée par le Gouvernement à l’occasion de cette proposition de loi, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 70.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 11 - Amendement n° 70
Dossier législatif : projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire
Article additionnel après l'article 11 - Amendement n° 82 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 71, présenté par Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les victimes des violences mentionnées à l’article 132-80 du code pénal ne peuvent être soumises au couvre-feu, ou maintenues en confinement dans le même domicile que l’auteur des violences, y compris si les violences sont présumées. Si l’éviction du conjoint violent ne peut être exécutée, un lieu d’hébergement permettant le respect de leur vie privée et familiale leur est attribué.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous l’avons constaté lors du premier confinement, cette configuration de vie très particulière a provoqué une explosion des violences intrafamiliales. Le ministre de l’intérieur avait constaté, au bout de dix jours de confinement, 32 % d’augmentation des signalements dans les zones gendarmerie, 36 % pour la préfecture de police de Paris.

Dans cette nouvelle période de confinement, il faut donc mettre en place des protections. Il convient de préciser que les victimes ne sont pas soumises à l’interdiction de se déplacer, et donc au couvre-feu ou à ce qui en tient lieu désormais, et ne peuvent pas être maintenues en confinement dans le même domicile que l’auteur des violences. Si l’éviction du conjoint violent ne peut être exécutée, un lieu d’hébergement doit leur être attribué.

De nombreux efforts de communication ont été déployés, nous le savons, pour rappeler aux femmes, mais aussi aux enfants, qu’ils pouvaient se signaler. Cet effort doit être est inlassablement poursuivi et il est très important d’affirmer que, couvre-feu ou non, confinement ou non, ces personnes méritent protection.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a déjà permis l’adoption d’un amendement de même nature pour ce qui concerne les quarantaines. Il s’agit là aussi de mettre à l’abri une personne menacée de violences conjugales ou ayant subi de telles violences pendant la période du confinement, même si celle-ci est plus souple que la précédente.

La commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement émet également un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 11 - Amendement  n° 71
Dossier législatif : projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire
Explications de vote sur l'ensemble (début)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11.

L’amendement n° 82 rectifié ter, présenté par M. Kerrouche, Mmes Lubin et de La Gontrie, M. Bourgi, Mmes Bonnefoy, Harribey, S. Robert, Conconne, Conway-Mouret et Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme Lepage et M. M. Vallet, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dès la publication de la présente loi, un décret définit les conditions dans lesquelles les activités physiques dynamiques individuelles sur et depuis la plage sont autorisées et dans lesquelles les plages, les plans d’eau, les lacs et les forêts sont ouverts au public, par dérogation aux mesures prises dans le cadre du 1° et du 2° de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est un sujet que nous connaissons bien, puisque nous avons déjà eu l’occasion de débattre, lors des précédents textes sur l’état d’urgence, de la question de l’accès aux plages, aux plans d’eau, aux lacs et aux forêts. Lors du premier texte, rappelez-vous, il n’était pas possible d’accéder à ces lieux. Il a fallu des discussions assez soutenues avec le Gouvernement pour que les plages soient finalement accessibles suivant un concept d’activités dites « dynamiques ».

Il est proposé ici, de la même manière, que les activités soient autorisées sur les plages, ainsi que sur les plans d’eau, les lacs et les forêts, ouverts au public. Il doit être clair que, dans cette période, ces espaces sont ouverts à nos concitoyens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Tout d’abord, pendant cette période de confinement, l’accès aux plages n’est pas interdit ; c’est très important.

Ensuite, il est vrai que nous avons voulu, au moment de la sortie du premier confinement, faciliter l’accès aux activités nautiques. C’était d’autant plus possible et souhaitable que nous arrivions à la période de l’été et que la vitesse de circulation du virus était extrêmement faible.

Nous sommes dans une situation bien différente de retour au confinement, tandis que le virus circule à une vitesse plus importante. Il me semble que les souplesses déjà prévues par des décisions du Gouvernement sont suffisantes et qu’il ne faut pas aller au-delà.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour deux raisons.

D’une part, ces précisions nous semblent relever davantage du domaine réglementaire que de la loi. D’autre part, le décret paru ce matin prévoit que les parcs et jardins resteront ouverts, de même que les plages. Pour autant, les activités nautiques, je me permets de le préciser, restent interdites.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Dois-je comprendre, monsieur le secrétaire d’État, que le décret répondant à la question est paru ce matin et qu’il n’y a donc plus d’ambiguïté ? Notre objectif est très pragmatique : il s’agit d’éviter toute confusion et des interprétations différentes des préfets suivant les départements, notre littoral étant extrêmement étendu.

Si vous le confirmez devant le Sénat, monsieur le secrétaire d’État, engageant ainsi le Gouvernement, nous retirons l’amendement.