M. Jean-Jacques Lasserre. Monsieur le ministre, je suis très déçu par votre réponse. Lorsqu’il existe des occasions comme celle-ci, des preuves de réelle volonté, je crois qu’il faut savoir s’adapter à la situation nouvellement créée et ne pas répondre, comme vous le faites, par une fin de non-recevoir. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)

conséquences du froid sur la production d’électricité

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le président, mes chers collègues, je vous propose un intermède sous forme de bulletin météo : on nous annonce une vague de grand froid pour demain et après-demain ; l’affolement s’entend sur tous les médias, avec les recommandations des présentateurs météo des chaînes télévisées.

Je ne comprends pas, car nous avons déjà connu une vague de froid très intense voilà cinq ans, une dizaine de jours entre la fin du mois de janvier et le début du mois de février. La consommation journalière d’électricité a été supérieure de 10 % à celle qui est annoncée pour cette semaine. Pour autant, tout a bien fonctionné. Aussi, je m’adresse au Gouvernement : pourquoi y aurait-il un problème aujourd’hui ? Pourquoi cet affolement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. De l’affolement, je ne sais pas où vous en voyez, monsieur le sénateur ! En tout cas, il n’y en a pas du côté du Gouvernement.

Le rôle du Gouvernement est de veiller à sécuriser notre approvisionnement en électricité. C’est ce que nous avons fait avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et en préconisant des mesures simples et de bon sens.

Nous devons diversifier notre bouquet énergétique et développer les énergies renouvelables, qui sont les énergies d’avenir et dont la production est déjà aujourd’hui l’équivalent de six réacteurs nucléaires.

Nous devons aussi revenir sur certaines erreurs du passé, notamment des constructions qui sont des passoires énergétiques et engendrent beaucoup de gaspillage. Pour lutter contre le gaspillage, nous avons notamment mis en place un plan de rénovation thermique des bâtiments qui a, en plus, le mérite de créer non seulement de nombreux emplois locaux, non délocalisables, pour nos artisans, mais aussi de nouvelles filières de production d’électricité, qui, elles aussi, sont fortement pourvoyeuse d’emplois.

Comme vous le voyez, nous prenons des précautions, mais nous considérons que tout le monde doit être associé à cette politique, y compris les citoyens. En effet, c’est tous ensemble que nous réussirons. Il est évident que maintenir des appareils en veille produit un gaspillage complètement inutile. Il ne paraît donc pas complètement aberrant de recommander un certain nombre de bonnes pratiques.

RTE nous le dit, il n’y a aujourd’hui aucune prévision de coupure. S’il devait y avoir un problème, vous seriez bien évidemment informés.

Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement prend en main cette question, travaille pour l’avenir, crée de l’emploi grâce aux nouvelles énergies.

M. Jean Bizet. C’est scolaire !

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État. Bref, nous faisons face. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean-Marie Bockel et Mme Chantal Jouanno applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour la réplique.

M. Jean-Claude Lenoir. Madame la secrétaire d’État, je veux à la fois vous remercier et féliciter le Gouvernement.

Je vous remercie de nous avoir expliqué que, si le cap difficile annoncé est surmonté, c’est grâce à nos outils de production, notamment au nucléaire (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.),…

M. Jean-Claude Lenoir. … qui constitue la base de notre approvisionnement.

Je vous remercie également d’avoir dit précédemment qu’abaisser d’un ou deux degrés le chauffage permet d’économiser deux réacteurs. Cela laisse entendre que nous avons de l’influence sur la température.

M. Jean-Louis Carrère. Quelle est la question ?

M. Jean-Claude Lenoir. Or nous la subissons, et nous aurons bien sûr à en tirer des conséquences.

Enfin, je souhaite féliciter le Gouvernement. La loi relative à la transition énergétique prévoyait de fermer d’ici à 2025 entre vingt et vingt-quatre réacteurs.

M. Jean-Louis Carrère. La question ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Gilles. C’est la réplique !

M. Jean-Claude Lenoir. Je le félicite de ne pas respecter l’engagement du chef de l’État, qui prévoyait la fermeture de Fessenheim en 2016.

M. Jean-Louis Carrère. La question ! (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)

M. Jean-Claude Lenoir. Heureusement, nous continuerons d’avoir la puissance nécessaire pour alimenter les usagers ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation des gîtes ruraux

M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour le groupe du RDSE.

Mme Hermeline Malherbe. Ma question a trait au développement de l’économie touristique. Je veux évoquer ici l’inquiétude de plusieurs acteurs de l’économie touristique ainsi que de certaines communes rurales concernant les gîtes de France et les bistrots de pays.

La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, a conforté les départements dans leurs actions en matière de politiques culturelle, sportive et touristique, en insistant sur la mission de solidarité territoriale. Légitimité leur est donc donnée pour accompagner les projets et les équipements dans les territoires ruraux. Pour autant, cette même loi NOTRe, en mettant fin à la clause de compétence générale, a supprimé l’aide financière directe aux entreprises.

Les gîtes de France et les bistrots de pays, que nous avons particulièrement développés dans les Pyrénées-Orientales, représentent une activité tout à la fois économique et touristique, dont le développement et la pérennité sont bien souvent conditionnés par l’aide que leur apportent les départements.

Ma question est donc double : les gîtes de France et les bistrots de pays sont-ils considérés comme des entreprises ou, plus précisément, comme de l’immobilier d’entreprise ? Pouvons-nous, en tant que départements, toujours accompagner les acteurs touristiques, particulièrement dans les zones rurales ? (Applaudissements sur les travées du RDSE. – MM. Jean-Louis Carrère et Simon Sutour applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des collectivités territoriales.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d’État auprès du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales. Vous l’avez dit, madame la sénatrice, une réforme territoriale importante a été conduite durant ce quinquennat : les régions, dont la taille et les compétences ont été élargies, s’occupent des questions de développement économique ; les départements, vous l’avez rappelé, ont été recentrés sur leurs compétences sociales et sur l’ingénierie territoriale ; les intercommunalités ont été adossées aux bassins de vie des habitants – elles sont d’ailleurs, au 1er janvier 2017, au nombre de 1 266, contre 2 062 au 1er janvier 2016 – ; quant aux communes, elles disposent de la clause de compétence générale.

Lors des débats parlementaires – je rappelle que la loi NOTRe a été adoptée par la Haute Assemblée –, vous avez décidé qu’un certain nombre de compétences seraient partagées, au premier rang desquelles le tourisme. Les départements peuvent ainsi s’engager dans des actions de développement économique, dès lors – c’est le point important – que leur intervention ne constitue pas une aide directe. En effet, dans le cadre de la clarification des compétences, les aides directes sont du ressort des régions. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a octroyé, pour la prise en charge de ces interventions, 450 millions d’euros aux régions.

Toutefois, les départements demeurent compétents pour mener des actions de promotion dans le domaine touristique, par le biais des comités départementaux du tourisme. Ils peuvent également créer des équipements sportifs et touristiques, dont ils sont propriétaires. Un département peut ainsi exploiter lui-même ou via un syndicat mixte un gîte rural, une base de loisirs ou une station de ski. La distinction se fait sur la qualification d’aide directe afin de savoir si, oui ou non, le département peut intervenir en soutien.

M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour la réplique.

Mme Hermeline Malherbe. La difficulté vient du fait que les régions ne se sont pas positionnées sur le tourisme rural…

M. Simon Sutour. Elles n’ont plus d’argent !

Mme Hermeline Malherbe. … que représentent les gîtes de France et les bistrots de pays. Dans les territoires, le problème reste entier. En 2017, il faudra trouver le moyen de partager les choses de la façon la plus efficace possible. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

stratégie internationale de la france en matière de sécurité et de défense

M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe écologiste.

M. André Gattolin. Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Jamais depuis sa création, il y a bientôt soixante ans, l’Union européenne n’aura fait l’objet d’une telle entreprise de déstabilisation et encouru un tel risque de désintégration. Elle n’est en effet plus seulement en proie à des divisions internes, des réactions nationalistes et des accès de populisme, elle fait aussi l’objet d’attaques croisées, de la part tant de la Russie que désormais des États-Unis, au travers des propos très vigoureux prononcés par leur nouveau président élu qui, après s’être félicité du Brexit, appelle dorénavant d’autres pays à suivre la voie du Royaume-Uni.

M. Trump, puisqu’il faut le nommer, s’est également livré ce week-end à une charge inédite contre l’OTAN.

Il devient ainsi évident que les États-Unis, sans abandonner le commandement de l’OTAN, entendent exiger des États membres qu’ils rehaussent leurs dépenses militaires conformément à leur engagement d’y consacrer 2 % de leur PIB d’ici à 2025.

Aussi, dans ce contexte qui s’accompagne d’un changement profond de stratégie géopolitique de notre allié historique, peut-on, monsieur le ministre, faire plus longtemps l’économie d’une véritable armée commune européenne ? Certes, la France et l’Allemagne ont, le 11 septembre dernier, proposé la mise en œuvre d’une coopération structurée permanente en matière de défense. Elle a été présentée lors du dernier Conseil européen, mais les échanges sur ce sujet ne figurent malheureusement pas dans les conclusions.

Plus récemment, lors de ses vœux aux forces armées, le Président de la République a proposé de porter notre effort de défense à 2 % du PIB, mais sans évoquer de contribution spécifique à la défense européenne.

Alors, monsieur le ministre, la France et l’Allemagne entendent-elles à présent développer plus avant leur proposition lors de la tenue, le 3 février prochain, du sommet européen de Malte consacré à l’Europe ? Il y a, je crois, vraiment urgence en la matière. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le sénateur, vous avez raison de poser la question de la sécurité en Europe, de celle des Européens. Il faut appréhender cette question avec beaucoup de clairvoyance, car le monde change et de nouvelles menaces apparaissent. Je pense à la menace terroriste, mais également à toute une série d’évolutions technologiques, comme les cybermenaces, qui nécessitent sur l’ensemble des flancs d’assurer notre sécurité en Europe, notamment avec l’OTAN. Cela a été décidé en juillet dernier à Varsovie lors du dernier sommet de l’OTAN, où étaient présents les États-Unis.

L’Europe doit prendre sa part de façon complémentaire, non pas en se substituant. Vous avez évoqué la perspective des 2 % : il est effectivement nécessaire d’augmenter l’effort de défense au sein de l’Europe.

Pendant longtemps, le sujet a été tabou. Je ne reviendrai pas sur les débats relatifs à la Communauté européenne de défense, car cela nous ramènerait trop loin. Il est vrai que, jusqu’à présent, de nombreux pays étaient réticents. Mais, face à la nouvelle donne internationale et à l’attitude américaine – une certaine forme de désengagement –, une prise de conscience a eu lieu. Elle a permis au Conseil européen d’adopter, le 15 décembre dernier, une orientation en matière de défense.

Vous avez raison, l’Allemagne et la France ont pris leur part pour préparer les conditions de cet accord politique. J’ai fait, avec mon homologue Frank-Walter Steinmeier, des propositions ; Jean-Yves Le Drian en a fait de même avec Ursula von der Leyen. Nous avons été moteurs dans cette affaire.

Nous avons maintenant les grands axes d’une ligne stratégique, d’une autonomie de décision. Dans le même temps, le principe d’un fonds de financement a été décidé, qu’il faudra bien sûr débloquer pour mettre en œuvre une politique de recherche et d’armement. Il est très important de préserver notre autonomie.

Nous en sommes là ; nous avons fait de considérables bonds en avant, mais, en effet, le moment est venu de réaffirmer la nécessité de la cohésion et de la solidarité européennes.

Vous avez eu, au début de votre propos, des mots assez durs…

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. … lorsque vous avez évoqué les adversaires de l’Europe. Ils existent, certes, et nous les connaissons depuis longtemps ; toutefois, il me semble que la meilleure réponse ne réside pas dans la polémique, mais dans l’unité et la cohésion de l’Europe, au travers, par exemple, d’engagements concrets en matière de défense, qui en sont une très belle illustration. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.)

conférence de paris

M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Gilbert Roger. Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Le 15 janvier dernier, la France a accueilli, à Paris, soixante-dix pays et organisations internationales pour une conférence internationale pour la paix au Proche-Orient. Cette conférence a été l’occasion de réaffirmer solennellement l’attachement de la communauté internationale à une solution à deux États – Israël et la Palestine – vivant côte à côte en paix et en sécurité, prérequis indispensable pour permettre la reprise des négociations bilatérales entre les parties, gelées depuis avril 2014.

Néanmoins, au terme de cette conférence, qu’il convient de saluer, s’ouvre une lourde période d’incertitudes. Le futur président américain, qui prendra ses fonctions le 20 janvier prochain, a fait connaître sa volonté de revenir sur le statu quo observé par les pays occidentaux en transférant l’ambassade américaine en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem. Forte de ce soutien, la droite israélienne plaide désormais ouvertement pour l’intégration dans le territoire israélien des colonies illégales, tandis que l’extrême droite réclame l’annexion militaire de la zone C, ce qui s’oppose à la résolution 2334 de l’ONU.

Les 2 et 11 décembre 2014, l’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté deux résolutions invitant le gouvernement français à reconnaître l’État de Palestine. À cette occasion, votre prédécesseur, M. Laurent Fabius, s’était engagé en affirmant : « En cas d’échec, la France devra reconnaître l’État de Palestine. »

Même si le communiqué final de cette conférence a un poids symbolique, celle-ci n’a pas permis de réunir les principaux intéressés – Israéliens et Palestiniens –…

M. le président. Votre question !

M. Gilbert Roger. … ni d’aboutir à des mesures concrètes permettant de progresser dans les négociations de paix.

Monsieur le ministre, le Président de la République est-il prêt à transformer sans tarder cet engagement solennel en acte politique, en reconnaissant dès à présent l’État de Palestine ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le sénateur, la France est déterminée, vous l’avez constaté ; elle a ainsi accueilli la réunion du 3 juin 2016, qui réunissait trente-cinq participants, et la conférence de dimanche dernier, qui en a réuni le double, avec tout le Conseil de sécurité de l’ONU, unanime, le G20, unanime également, ainsi que la Ligue arabe et l’Union européenne. Après des échanges extrêmement fructueux, les participants ont réaffirmé solennellement la nécessité que reprennent, le plus vite possible, les négociations entre les parties israélienne et palestinienne. Il y a urgence !

Nous avons fait l’objet de nombreuses pressions ; il y a ainsi eu des polémiques – vous les avez constatées –, qui sont selon moi excessives, caricaturales et déplacées, qu’elles proviennent du gouvernement israélien ou du Hamas, qui a condamné notre rencontre, qualifiée d’« absurde ».

Nous sommes sur le bon chemin, me semble-t-il. La voie est, il est vrai, étroite, nous le savons, mais, sur le terrain, la situation se dégrade très rapidement, avec un risque d’accélération et d’escalade des violences, que nous ne pouvons que condamner. Quels qu’en soient les responsables, nous combattons le terrorisme et la violence.

Cela étant dit, nous voulons aussi nous mobiliser encore plus pour la paix au Proche-Orient. Il ne s’agit pas d’un sujet venant après les autres – la Syrie, l’Irak –, mais, au contraire, de l’un des éléments de l’ensemble de la question du Moyen-Orient. Il ne faut pas l’oublier, parce que cela fait de nombreuses années que cette frustration s’installe et que cette menace se développe. Avec une colonisation croissante, la viabilité de l’État palestinien sera de plus en plus difficile à assurer.

Cela est ressenti sur le terrain, au point que, vous l’avez rappelé, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté, le 23 décembre dernier, la résolution 2334, qui a été très critiquée alors qu’elle ne fait que rappeler le droit international.

Vous évoquiez enfin la question de la capitale et des deux États.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Bien entendu, l’érection de Jérusalem en capitale ne pourra procéder que d’une négociation. Toute initiative préalable, comme un transfert d’ambassade, serait en effet vécue comme une provocation et un risque majeur.

Vous pouvez donc compter sur la France pour continuer de défendre la même orientation, la même volonté : aboutir à une négociation et à un accord, pour qu’enfin l’État palestinien soit créé, reconnu et viable. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)

prédicat

M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour le groupe Les Républicains.

M. Alain Marc. Ma question s’adressait à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, mais elle n’est pas présente, ce qui montre son degré de considération pour la représentation nationale…

Nous constatons aujourd’hui une baisse de la performance scolaire de nos élèves. Le classement international du programme PISA nous place au vingt-sixième rang ; personne ne peut nier que ce classement est insatisfaisant pour la sixième nation du monde.

Certes, ces mauvaises performances sont multifactorielles. Néanmoins, on sait aujourd’hui qu’une réelle exigence de maîtrise de la langue est absolument indispensable à la réussite scolaire de tous les apprentissages, y compris des mathématiques. Or il ressort des directives édictées par les services de Mme la ministre de l’éducation nationale que votre exigence en matière grammaticale s’accompagne de termes pédagogiques comme le « prédicat », dont seuls les enseignants, dont j’étais, et – je l’espère – les élèves maîtrisent le sens. Cela me fait penser au ridicule « référentiel bondissant » des années quatre-vingt, qui désignait tout simplement le ballon…

Le Gouvernement va-t-il faire quelque chose pour que soient définies simplement ces notions, qui pourraient ainsi être partagées par les parents, et abandonner ce langage abscons, dont savait si bien se moquer Molière ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

M. André Vallini, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, le constat est sans appel : le niveau des élèves en français baisse depuis trente ans ; ce constat est unanime.

Le Gouvernement ne se contente pas de le déplorer, il a décidé d’agir. Nous avons demandé au Conseil supérieur des programmes de repenser l’apprentissage de la langue française. Ce conseil a donc élaboré des programmes de grammaire qui garantissent un apprentissage complet pour tous les élèves et qui font appel, au début de l’apprentissage, à la notion de prédicat, que vous citiez. Il s’agit d’une notion – je l’ai découverte il y a quelques jours, comme vous, sans doute (Sourires.) – qui est enseignée depuis très longtemps en sciences du langage.

M. Jean-Pierre Sueur. Elle remonte à Aristote !

M. André Vallini, secrétaire d’État. Cela dit, l’apprentissage de cette notion n’empêche pas de continuer d’enseigner les compléments qui s’y ajoutent. Les élèves continueront donc d’apprendre ce que sont les compléments d’objet direct, d’objet indirect et d’objet second.

M. André Vallini, secrétaire d’État. La grammaire, monsieur le sénateur, ne se négocie pas entre l’enseignant et l’élève, comme certains voudraient le faire accroire ; elle s’apprend, car elle s’impose.

Ainsi, si les programmes de l’école élémentaire et du collège ont été repensés, c’est parce qu’ils souffraient d’un manque de cohérence. Il a fallu les orienter vers l’acquisition par tous les élèves d’un nouveau socle commun de connaissances, de compétences, de culture, avec un seul objectif : relever le niveau en français de tous les élèves de France. (MM. Alain Bertrand, François Marc et Jean-Pierre Sueur applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour la réplique.

M. Alain Marc. On sait que l’abaissement du niveau d’exigence en matière de maîtrise de la langue maintient les inégalités dans le corps social.

M. Vincent Peillon, prédécesseur de Mme Najat Vallaud-Belkacem, avait déjà réformé les rythmes scolaires, ce qui a accentué, on le sait, les inégalités spatiales et sociales,…

M. Jean-Louis Carrère. C’est vous qui avez lancé cette réforme !

M. Alain Marc. … mais qui n’a en rien résolu l’échec scolaire.

J’espère que les paroles que vous venez de prononcer, monsieur le secrétaire d’État, ne sont pas pure hypocrisie,…

M. Alain Marc. … car il ne faudrait pas avoir à la bouche les mots « réussite scolaire » ou « égalité » et se comporter de façon tout à fait différente en n’élevant pas le niveau d’exigence. Nous avons besoin de cette élévation, car c’est à ce prix que l’école redeviendra l’ascenseur social qu’elle était mais qu’elle n’est, hélas, plus depuis trente ans. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

justice

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question s’adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Samedi soir, une bande de voyous venue d’Athis-Mons a semé la terreur dans un quartier paisible de Juvisy-sur-Orge. Tout le monde a en mémoire la dramatique attaque de deux voitures de police à Grigny ; deux policiers avaient été gravement brûlés.

Ces phénomènes d’attaque en bande se multiplient et sont également observés dans les transports. Certains TER dans le Rhône, en région parisienne et en Provence-Alpes-Côte d’Azur ont été pris pour cible et assiégés par des casseurs.

Ces bandes ont souvent deux caractéristiques : elles sont constituées notamment de mineurs et elles procèdent d’une communautarisation de notre société. Elles sont portées par la haine de notre pays, de ce que nous sommes, et cette haine s’exerce aveuglément et gratuitement.

Mme Dominique Estrosi Sassone. À Juvisy, ce saccage criminel a été suivi de l’interpellation de onze voyous, mineurs pour la plupart, niant les faits ; faute de preuve suffisante, tous ont été relâchés.

Face à cette nouvelle forme de délinquance, la réponse pénale n’est manifestement plus adaptée à la gravité des faits. Pourquoi, monsieur le garde des sceaux, continuez-vous à nier cette réalité ? Pourquoi n’avez-vous jamais, au cours des cinq années écoulées, durci votre politique pénale à l’égard des mineurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées de l’UDI-UC. – Huées sur les travées du groupe CRC.)

Mme Cécile Cukierman. Parce qu’on doit protéger les mineurs !

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Quand avez-vous entendu, madame la sénatrice, quelqu’un nier cette réalité ? N’avez-vous pas participé à tous nos débats depuis cinq ans sur les différents textes par lesquels nous avons durci la législation ?

En outre, le temps de la justice n’est pas celui de l’émotion, de la réaction. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)