M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 136 et 78 ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Pour ce qui concerne l’amendement n° 136, comme j’ai défendu tout à l’heure ce point, je souscris, madame Blandin, à votre proposition d’inscrire le principe du conventionnement durable, en lien avec les collectivités territoriales, pour les structures qui ne bénéficient pas de label.

Il me semble que l’amendement du Gouvernement répond à votre proposition, mais, dans le cas où il serait rejeté, je serai favorable au vôtre.

Quant à l’amendement n° 78, il comporte deux points distincts.

Je l’ai dit, je suis favorable au premier, qui consiste à restaurer l’agrément du ministre chargé de la culture pour toutes les structures labellisées.

Pour ce qui concerne le second point, je comprends, madame Prunaud, votre proposition d’instaurer une obligation de présélection paritaire pour les nominations des dirigeants des structures labellisées.

Comme l’ensemble du Gouvernement, je suis très attachée au respect de la parité, qui est un objectif général d’ores et déjà inscrit dans la circulaire de 2010 qui régit les structures labellisées.

Ce principe préside également à la procédure de sélection des dirigeants ; des dispositions seront précisées par décret en Conseil d’État sur les différents types de labels.

L’objectif de parité est-il suffisamment garanti par ces dispositions, sans qu’il soit besoin de le renforcer ? Je n’en suis pas sûre. Je m’interroge en effet sur un point.

Malheureusement, nous sommes très souvent confrontés à l’insuffisance de candidatures féminines. Nous essayons de rechercher des candidates féminines, mais pas toujours avec succès. Des appels à proposition pourraient donc être infructueux, parce que non paritaires.

Cette interrogation me conduit à m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée sur votre amendement, et s’il n’était pas adopté, je tiendrais compte de votre préoccupation dans le cadre des décrets d’application.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 188.

(L’amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 136.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 78.

(L’amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 77, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Après les mots :

démocratisation culturelle

insérer les mots :

, d’égal accès entre les femmes et les hommes aux domaines culturel et artistique

2° Remplacer les mots :

et des auteurs

par les mots :

, des auteurs et des techniciens

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Il nous semble essentiel d’ajouter deux nouveaux éléments dans le cahier des missions et des charges élaboré par les structures culturelles et artistiques sollicitant de l’État une labellisation.

Cette dernière, gage de qualité et d’intérêt d’un projet, devrait en premier lieu faire de l’égalité entre les sexes dans le domaine de la culture et des arts une priorité absolue – nous y revenons !

On le voit bien, la question de la parité est aujourd’hui insuffisamment traitée. Le Laboratoire de l’égalité, l’UNESCO, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, pour ne citer qu’eux, font un constat inquiétant, pour ne pas dire alarmant : moins de 30 % des musées nationaux sont dirigés par des femmes ; les œuvres de ces dernières représentent à peine un quart de celles qui sont exposées ; à peine 35 % des intervenants à la télévision sont en fait des intervenantes ; en 2013-2014, seuls 3 % des concerts programmés dans les théâtres et opéras français étaient dirigés par des femmes ; enfin, on compte une femme pour cinq hommes travaillant dans le domaine du cinéma. Ces remarques rejoignent, madame la ministre, celles que vous venez de nous présenter.

Ces chiffres donnent le vertige. Ils démontrent à quel point est long et difficile le chemin qui reste à parcourir pour que le monde de la culture et des arts soit à la pointe de la lutte contre les discriminations sexuelles. Inscrire l’égalité entre les sexes dans le cahier des missions et des charges des structures labellisées ne revient donc pas à durcir un texte législatif, mais peut permettre de mener cette bataille essentielle.

Par ailleurs, nous proposons que la prise en compte des actions en matière de professionnalisation des structures souhaitant la labellisation englobe l’ensemble des acteurs de la création artistique et culturelle, y compris les techniciens. En effet, alors que le texte actuel se limite à évoquer les artistes et les auteurs, il omet de mentionner les techniciens, qui sont pourtant les « petites mains de l’ombre » nécessaires à la création. Sans éclairagistes, sans monteurs son, par exemple, il est impossible de créer.

Ainsi, il semble normal que l’on juge l’intérêt et la justesse d’un projet artistique et culturel à l’aune des efforts réalisés pour professionnaliser les artistes, mais aussi ces techniciens sans qui rien ne serait possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le respect du principe de parité, objectif auquel nous souscrivons, figure en bonne place dans l’ensemble du projet de loi. Il est mentionné aux alinéas 3 et 4 de l’article 3.

Nous n’estimons pas nécessaire de l’inscrire une nouvelle fois à l’alinéa 2, alors qu’une telle mention pourrait, à cet alinéa, entrer en contradiction avec le respect du principe de la liberté de création.

Les auteurs de l’amendement prévoient également de faire référence aux techniciens, ce qui ne semble pas non plus très opportun.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Madame la sénatrice, votre amendement vise un double objectif.

Sur le premier point, le principe d’égal accès des femmes et des hommes à la tête des institutions culturelles, il me semble que vous trouvez satisfaction à l’alinéa 4 de l’article 3, qui fixe, parmi les conditions, le respect des principes de transparence et d’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités. Cette exigence permettra, dans le cahier des charges de chaque type de label, de favoriser la parité dans l’accès aux programmations et aux moyens de production. Votre attente me paraît donc sur ce point satisfaite.

Pour ce qui concerne le second point, vous souhaitez étendre l’objectif de professionnalisation des structures labellisées aux techniciens de la création artistique, alors que le texte actuel ne vise effectivement que les artistes et les auteurs.

Je comprends là aussi votre souhait, mais je tiens à rappeler que la politique des labels est avant tout une politique en faveur des artistes et de la création artistique. La logique d’élargissement de l’objectif de professionnalisation supposerait d’ajouter l’ensemble des personnels qui concourent à la création, notamment les personnels administratifs.

Je crois que nous ne devons pas nous disperser sur cette question et ne pas éloigner les établissements labellisés de leur mission en faveur de la professionnalisation des artistes.

Dans le même esprit, j’ai souhaité mobiliser des moyens nouveaux en 2016 en faveur de l’indépendance artistique et de l’association entre des artistes et des établissements culturels, en modernisant la circulaire relative aux résidences d’artistes, afin de favoriser, par exemple, les résidences d’artistes associés sur la longue durée, ainsi que les résidences de jeunes créateurs.

Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 77.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 26, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer le mot :

, qui

par les mots :

ainsi que les modalités de renouvellement des labels et de création de nouveaux labels, en élargissant leurs champs disciplinaires. Ils

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Nous n’avions pas pu présenter cet amendement en première lecture, puisqu’un amendement de réécriture globale de l’article 3 avait été adopté.

Cela étant, le présent projet de loi reconnaît, par exemple, le marionnettiste comme artiste. Il conviendra désormais de reconnaître son travail au même titre que celui des autres artistes, et la politique de labellisation va y participer.

En premier lieu, notre amendement a pour objet de favoriser l’émergence de nouveaux labels et de nouveaux champs de labellisation.

En second lieu, l’étude d’impact fait apparaître la portée insuffisante des textes réglementaires encadrant l’attribution des labels pour un véritable contrôle par les pouvoirs publics des conditions de labellisation. Il semble donc nécessaire de mieux encadrer ce processus et de prévoir que le pouvoir réglementaire fixera, notamment, les conditions de renouvellement et de création des labels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Les auteurs de cet amendement souhaitent que l’article 3 prévoie également les modalités de création de nouveaux labels.

Une telle précision n’est pas inutile, mais nous pensons peu pertinent de prévoir a priori qu’il conviendra d’élargir leurs champs disciplinaires, comme je l’ai dit ce matin lors de la réunion de la commission. Si cette extension ne doit pas être exclue et doit rester libre, elle ne saurait constituer un objectif en soi, puisque cela pourrait revenir in fine à réduire inévitablement les moyens pour les champs d’activité les plus légitimes au bénéfice des nouveaux champs qu’il deviendrait ainsi obligatoire de consacrer.

J’invite donc Mme Robert à rectifier son amendement en supprimant les mots « en élargissant leurs champs disciplinaires ». À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Je soutiens totalement l’objectif de renouvellement des labels et de création de nouveaux labels que vous défendez, madame la sénatrice. Cette volonté est compréhensible au regard de l’évolution des pratiques, de l’émergence de nouvelles esthétiques, ainsi que de ces champs que les artistes, souvent précurseurs, nous invitent à défricher et qui sont parfois issus du croisement nouveau de certaines disciplines.

C’est d’ailleurs ainsi que nous entendions travailler sur le nouveau décret d’application, puisque ce dernier, élaboré en concertation, fait référence à une liste de labels qui pourrait évoluer dans le temps.

Ce sujet peut être pris en compte au niveau réglementaire. L’affirmer au plan législatif serait un atout supplémentaire et je m’en remets à la sagesse de votre assemblée sur ce point.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Si l’on s’en remet à ce qu’ont dit Sylvie Robert et Mme la ministre, on peut considérer que la création de nouveaux labels comprend la notion d’élargissement des champs disciplinaires. Si tel est bien l’intention exprimée par M. le rapporteur dans sa demande de rectification, je n’y vois pas d’objection à titre personnel – ma collègue dira ce qu’elle en pense.

Sur le fond, nous ne voulons pas considérer que les labellisations interviennent dans un cadre fermé, comme a semblé le suggérer M. le rapporteur – auquel cas, les marionnettistes eux-mêmes n’auraient pas pu être reconnus. De nouvelles disciplines doivent pouvoir être labellisées. M. le rapporteur a semblé dire qu’il fallait conserver un cadre fermé, sinon les moyens risquaient d’être réduits pour les disciplines artistiques déjà labellisées. Je suis en désaccord avec cette approche.

Malgré ces divergences d’appréciation, nous pouvons considérer que la rédaction rectifiée de cet amendement permet l’élargissement des champs disciplinaires.

M. le président. Madame Robert, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?

Mme Sylvie Robert. Pour prolonger le débat, le rapporteur a considéré que la notion d’élargissement des champs disciplinaires complétait la création de nouveaux labels. Dans notre esprit, il s’agissait simplement de préciser ce que pouvait recouvrir la création de nouveaux labels, c’est-à-dire l’ouverture à de nouvelles esthétiques, comme l’a expliqué Mme la ministre.

J’accepte la rectification suggérée par M. le rapporteur, à partir du moment où nous sommes tous d’accord sur le fait que la création de nouveaux labels prend en compte les nouvelles esthétiques dans un esprit d’ouverture – le décret futur y fera référence. Les nouveaux labels ne se substitueront pas aux labels actuels, mais ils accompagneront l’évolution de la création vers les esthétiques de demain.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer le mot :

, qui

par les mots :

ainsi que les modalités de renouvellement des labels et de création de nouveaux labels. Ils

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Puisque cela m’a été demandé, je précise qu’il n’était pas dans mon intention d’empêcher l’élargissement des champs disciplinaires. Pour moi, cette notion est couverte par la possibilité de créer de nouveaux labels. C’est une évidence et si Mme la ministre confirme ce point de vue, supprimons la mention « en élargissant leurs champs disciplinaires » qui est superfétatoire.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Les explications qui viennent d’être données me conviennent. Je précise cependant que je n’aurais pas voté en faveur de cet amendement dans sa rédaction initiale. Bien sûr, j’aurais voté une rédaction faisant référence à de « nouvelles esthétiques » ou à des labels « élargis » ou « actualisés ».

En effet, la mention « en élargissant leurs champs disciplinaires » correspond tout à fait à une situation réelle, celle d’une direction régionale des affaires culturelles qui fait pression sur une scène nationale pour qu’elle « avale » la scène musicale « musiques actuelles » et la dissolve. On peut lire cette rédaction de manière paranoïaque en y voyant un encouragement à la concentration. Certes, telle n’était pas l’intention des auteurs de l’amendement, mais je voterai de bon cœur cet amendement, maintenant qu’il a été rectifié. (M. André Gattolin applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement rectifié ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 26 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.

(L’article 3 est adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine
Article 4 B (supprimé)

Article 3 bis

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 27, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de mettre en place un dispositif permettant à l’État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements de consacrer 1 % du coût des opérations de travaux publics au soutien de projets artistiques et culturels dans l’espace public.

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à rétablir l’article qui prévoyait la remise d’un rapport sur la mise en place d’un éventuel dispositif de taxation de 1 % sur les travaux publics de l’État et des collectivités locales dans l’espace public, pour financer des projets artistiques.

Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, le « 1 % artistique » est de moins en moins utilisé par les collectivités territoriales. Ce rapport devrait évaluer les possibilités de financer mieux plus de projets et permettre aux artistes de développer leur création.

M. le président. L’amendement n° 79, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’état de l’application du dispositif de décoration des constructions publiques, sur les difficultés rencontrées par l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics à l’origine de l’opération immobilière dans la mise en application du dispositif et sur l’opportunité de le rendre contraignant.

La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Cet amendement vise également à demander un rapport, mais pas dans le même esprit.

Tout comme en première lecture, mon groupe considère qu’il n’est pas pertinent d’ouvrir les conditions du « 1 % artistique » en étendant son assiette à l’ensemble des travaux publics et, surtout, en incluant le spectacle vivant parmi ses destinataires.

S’agissant de l’extension de ce prélèvement à l’ensemble des travaux publics, quid de l’accompagnement financier, dans une période où les collectivités locales rencontrent les difficultés que l’on connaît ? Certes, on pourrait trouver intéressant d’élargir ainsi l’« assiette ».

Dans le même temps, on augmenterait le nombre des bénéficiaires. C’est là qu’apparaît l’idée de l’ouverture au spectacle vivant qui, à notre sens, reviendrait à asséner un coup mortel aux artistes plasticiens, déjà suffisamment touchés par la précarité.

Nous sommes un certain nombre, dans cet hémicycle, à être élus locaux, maires et nous savons donc quelle va être la tentation des élus. Par manque de moyens, ou par facilité, parfois – il faut le reconnaître ! –, ils vont accompagner leurs inaugurations par des spectacles vivants en lieu et place de ce qui aurait dû être une œuvre artistique. Prendre un tel risque nous semble donc mériter réflexion, car l’ouverture au spectacle vivant, par définition ponctuel, peut conduire, à notre sens, à la disparition des œuvres exposées de manière pérenne dans l’espace public, par commodité, comme je l’ai expliqué.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous ne pouvons pas souscrire à ces orientations.

Cela dit, il nous semble primordial de travailler aujourd’hui sur la question du « 1 % artistique », dispositif essentiel de la diffusion de la culture et des arts. De nombreuses collectivités locales ne respectent pas, aujourd’hui, leurs obligations et il nous paraît important qu’un rapport soit établi, mais sur la situation actuelle, sur les difficultés actuelles rencontrées dans la mise en place de ce dispositif avant de se préoccuper de son élargissement au « goudron », comme on dit pour simplifier, et au spectacle vivant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission de la culture et son rapporteur ne sont pas sectaires. Cependant, comme vous le savez, il y a deux choses que le Sénat n’aime pas : la multiplication des demandes de rapports au Gouvernement et l’insertion de l’adverbe « notamment » dans le texte des articles, qui introduit un flou.

Ces deux amendements visent à obtenir du Gouvernement un rapport sur la création d’un dispositif « 1 % travaux publics » au bénéfice de projets artistiques et culturels dans l’espace public et des arts de la rue.

La commission a supprimé cette disposition qui ne lui paraît pas opportune. J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Pour ce qui concerne l’amendement n° 27, même si je comprends la préoccupation exprimée par M. le rapporteur de ne pas multiplier les rapports remis au Parlement, l’espace public est devenu depuis plusieurs années un lieu intéressant et déterminant pour l’accès à la culture comme pour la revitalisation du lien social. L’institution d’une telle mesure pourrait concerner des opérations tout à fait justifiées. C’est dans cet esprit que le ministère de la culture avait lancé la Mission nationale pour l’art et la culture dans l’espace public, dont les réflexions rejoignent cette approche.

C’est pourquoi je suis, en l’espèce, favorable à l’élaboration d’un rapport qui permettra le débat avec la représentation nationale sur les moyens de mettre à profit l’expérience du « 1 % » sur les constructions publiques et d’envisager, éventuellement, d’autres voies pour développer la présence artistique et les projets culturels dans l’espace public.

Cette démarche doit-elle passer par un objectif chiffré, dont je sais qu’il suscite les interrogations de nombreuses collectivités territoriales ? Rien n’est moins sûr. C’est la raison pour laquelle j’estime que ce rapport nous permettra de mieux nous déterminer.

J’émets donc un avis favorable sur l’amendement n° 27.

En revanche, pour ce qui concerne l’amendement n° 79, l’avis du Gouvernement est défavorable. En effet, ses auteurs proposent l’élaboration d’un rapport sur l’application du « 1 % artistique » actuel, pour lequel les informations existent et sont déjà largement diffusées. Ainsi, dans les Chiffres clés du ministère de la culture et de la communication – une publication annuelle – figurent les éléments relatifs à l’exécution du « 1 % artistique ». Ces données sont également restituées dans les réponses aux questions écrites que les parlementaires veulent bien poser au Gouvernement. La communication et la pédagogie constituent des outils importants pour inciter à la réalisation de ces projets.

J’ajoute, enfin, que le ministère pilote, depuis 2014, les Journées du 1 % artistique, organisées en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, ainsi qu’avec le ministère de l’agriculture. Cette opération mobilise chaque année des centaines d’établissements d’enseignement en France et contribue à rappeler tout l’intérêt que présente ce dispositif pour le soutien à la création dans le champ des arts plastiques.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 3 bis demeure supprimé.

Chapitre II

Le partage et la transparence des rémunérations dans les secteurs de la création artistique

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 3 bis (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine
Article 5

Article 4 B

(Supprimé)

M. le président. L’amendement n° 28 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences qu’il entend tirer de la concertation sur l’amélioration de la transparence dans les relations entre auteurs et éditeurs du secteur du livre, initiée en 2015 entre les organisations représentatives de ces acteurs.

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. M. le rapporteur nous répète souvent la même motivation, mais j’aimerais qu’il en change, en l’espèce.

Certes, le Sénat n’est pas favorable à la multiplication des rapports. J’ai personnellement combattu cette tendance du Parlement lorsque je présidais la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois qui a existé pendant trois ans dans cette assemblée, et a été bien utile. À ce titre, je suis souvent intervenu pour rappeler qu’il fallait éviter de demander un rapport chaque fois que l’on voulait échapper à l’application de l’article 40 de la Constitution.

J’ajoute que, lorsque nous contrôlions l’application effective de ces dispositions, nous constations que ces rapports n’étaient produits que très rarement. D’ailleurs, si ces rapports devaient vraiment être rédigés, les administrations ne feraient plus que cela !

Je suis donc tout à fait d’accord avec M. Leleux lorsqu’il explique qu’il ne faut pas en abuser.

Cependant, dans le cas qui nous occupe, le rapport que nous demandons a une utilité - certains rapports peuvent être utiles ! Nous souhaitons par conséquent rétablir l’article 4 B. En effet, un accord a été conclu entre le Syndicat national de l’édition et le Conseil permanent des écrivains sur le contrat d’édition à l’heure du numérique qui a été concrétisé par une ordonnance du 12 novembre 2014.

Ce rapport nous permettrait d’apprécier la mise en œuvre des dispositions de l’ordonnance et de l’arrêté d’extension, ainsi que les résultats de la suite du dialogue entamé depuis l’automne 2015 entre les organisations représentatives des éditeurs et des titulaires des droits d’auteur.

Beaucoup de sujets restent à régler pour procéder au partage des rémunérations dans le secteur du livre numérique et pour garantir la transparence : fréquence de la reddition des comptes, organisme gérant le compte d’exploitation, modalités de l’information de l’auteur, conditions de l’encadrement des provisions sur retour, champ de compétence du médiateur du livre.

Pour que ce chantier avance, nous avons besoin d’évaluer les mesures déjà prises et leurs effets. Très souvent, dans les domaines touchés par une révolution technologique et par de nombreuses modifications, un rapport nous aide à bien légiférer et à mieux réglementer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Vous avez admis, mon cher collègue, que les assemblées devaient faire un effort pour essayer d’alléger la loi, afin qu’elle ne soit pas aussi bavarde que nous pouvons le constater depuis quelques années.

Madame la ministre, j’ai bien écouté votre intervention lors de la discussion générale. Vous avez été parfaite ! Vous avez dit, presque textuellement, que la loi devait présenter un cadre et qu’il fallait laisser les organisations professionnelles s’insérer dans ce cadre. Je souscris totalement à vos propos.

En l’espèce, il s’agit de demander au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport concernant le bilan des négociations en cours entre auteurs et éditeurs. Selon les dernières informations que nous détenons, ces négociations avancent bien : des points de blocage existent, comme dans toute négociation, mais il faut laisser les choses évoluer.

Malgré une rédaction allégée par rapport à celle qui a été introduite en première lecture par l’Assemblée nationale, cet amendement demeure une demande de rapport, procédé auquel la commission est un peu rétive.

Sans méconnaître l’intérêt de dresser un tel bilan, il convient de rappeler que de multiples moyens sont d’ores et déjà à la disposition du Parlement pour qu’il soit informé par le Gouvernement : questionnaires budgétaires, questions écrites ou orales, auditions constituent autant de solutions. A contrario, les rapports, trop fréquemment demandés dans les textes de loi, sont rarement remis au Parlement ou avec un tel retard que leur utilité devient incertaine – vous n’y êtes pour rien, madame la ministre, puisque vous venez de prendre vos fonctions !

Il n’y a pas d’opposition entre nous sur le fond. Nous savons que les négociations interprofessionnelles se déroulent. Je préfère donc que nous évitions de demander au Gouvernement un rapport sur ce sujet. Je propose en revanche à Mme la présidente de la commission de la culture de procéder prochainement à des auditions des auteurs et des éditeurs pour savoir où ils en sont. Enfin, madame la ministre, vous pouvez vous engager devant le Parlement à rendre ce rapport, sans qu’il soit besoin de l’inscrire dans la loi.

L’avis de la commission est donc défavorable.