M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Je vous prie, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de M. Le Foll, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

Tout d’abord, les prêts bonifiés ont été maintenus, en réponse à une demande forte des organisations professionnelles agricoles, et malgré des paramètres désormais moins incitatifs. C’est l’application directe de la nouvelle réglementation européenne qui conduit à en limiter la durée à cinq ans. Par ailleurs, dans un contexte de taux bas, l’intérêt des prêts bonifiés est moins net qu’il ne l’était voilà quelques années.

En pratique, les crédits publics disponibles pour soutenir ce mode d’intervention en faveur de l’installation peuvent très bien être utilisés pour d’autres interventions, comme les aides aux investissements réalisés par des jeunes.

Ensuite, concernant les droits à paiement de base, il s’agissait de permettre leur transfert entre fermiers.

Le 10 mars, Stéphane Le Foll s’était engagé auprès des agriculteurs à ce que les fermiers puissent, au même titre que les autres agriculteurs, transférer leurs références à un fermier reprenant tout ou partie de leur exploitation.

C’est un sujet très important, sur lequel le Gouvernement avait décidé d’avancer, malgré les réticences de la Commission européenne. Cette dernière a finalement donné son accord officiel sur cette possibilité de transfert entre fermiers, dans les mêmes conditions que les autres types de transfert. Là encore, il s’agit de conditions requises par la réglementation européenne.

En ce qui concerne les aides couplées et le verdissement, ainsi d’ailleurs que les autres aides, je peux vous dire que toutes les règles sont désormais connues, pour la plupart depuis octobre 2014.

Toutes les informations, y compris les notices techniques, sont disponibles et reprises sur le site pac2015.gouv.fr. Chacun doit maintenant s’attacher à les diffuser clairement. C’est d’ailleurs un des objectifs des comités d’appui que le ministre a demandé à chaque préfet de mettre en place pour informer les agriculteurs et les accompagner dans la constitution de leurs demandes d’aides.

Sur la question de l’indemnité compensatoire aux handicaps naturels, je tiens d’abord à rappeler que cette dernière va connaître sa plus forte augmentation depuis sa création, en atteignant plus de 1 milliard d’euros dès 2017, conformément aux engagements pris par le Président de la République à Cournon-dAuvergne en 2013.

Je souligne que la France a obtenu satisfaction sur quasiment toutes ses demandes face à la Commission, qui défendait de manière globale une conception de cette aide n’ayant jamais été celle de notre pays.

Votre question précise sur la suppression de la limite d’âge, jusqu’alors fixée à 65 ans, porte sur un point mineur. La France n’a pu faire prévaloir sa position, mais cette suppression n’aura qu’une incidence très limitée, dans la mesure où quelqu’un qui aurait des revenus extra-agricoles d’un certain niveau ne pourra de toute façon pas toucher cette aide, comme c’était déjà le cas auparavant. En revanche, un agriculteur toujours en activité dans les zones de montagne concernées et âgé de plus de 65 ans touchera toujours l’aide, ce qui n’est pas choquant en soi et permet de répondre à certaines demandes. L’impact sur les jeunes et l’installation ne sera que très marginal.

Enfin, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a retenu le principe de la compensation obligatoire à tout défrichement.

Cette compensation peut se faire soit en reboisement, soit au travers de travaux sylvicoles pour un montant équivalent ou par le versement d’une somme équivalente au Fonds stratégique de la forêt et du bois.

Il faut noter que, à la suite de l’intervention de nombreux sénateurs, y compris du Limousin, la reconquête d’espaces agricoles enfrichés n’entre pas dans le champ de la compensation : des boisements de moins de trente ans sont, sous certaines conditions, exemptés d’autorisation de défrichement, et donc de compensation. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a également dispensé d’autorisation les défrichements réalisés dans des communes de montagne à très fort taux de boisement – supérieur à 70 %. Si les communes ou les parcelles que vous évoquez remplissent ces critères, il ne devrait pas y avoir de difficultés.

De manière globale, la protection des forêts et le reboisement ayant été reconnus d’intérêt général par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, le principe général de compensation obligatoire en cas de défrichement apparaît entièrement légitime au regard des services rendus par la forêt.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Je remercie M. le secrétaire d’État de cette réponse, qui semble très claire. J’en ferai part aux agriculteurs.

Je regrette que les bonifications de prêts soient limitées dans le temps. Par ailleurs, en zone de montagne, souvent le foncier manque mais le défrichement est impossible à mettre en œuvre au regard des dépenses à engager : 3 000 euros par hectare, c’est beaucoup, sachant qu’il faut aussi prendre en compte les frais de dessouchage et de remise en culture. Enfin, j’espère que les règles de la PAC sont désormais parfaitement connues. En avril, elles ne l’étaient pas encore complètement.

aménagement des conditions de transport pour les élèves de formation biqualifiante

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 1052, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Cyril Pellevat. Je souhaite appeler l’attention sur la formation biqualifiante aux métiers de la montagne proposée au lycée Frison-Roche de Chamonix.

Ce lycée fait partie des quatre établissements de l’académie de Grenoble dispensant à des lycéennes et des lycéens ayant déjà un bon niveau sportif une formation destinée à les aider à mener un double projet d’orientation professionnelle articulé autour des métiers de la montagne.

Les jeunes suivent le programme scolaire des filières générales, technologiques ou professionnelles, assorti de contenus ciblés propres à la préparation des diplômes d’État des métiers de la montagne. Ils peuvent ainsi valider, à l’issue du lycée, une première partie d’un diplôme d’État d’accompagnateur en montagne, de ski alpin ou de ski de fond, qui assure une employabilité immédiate.

Afin de compléter la culture montagnarde des élèves, est associé à ce programme d’enseignement technique un enseignement pratique en montagne, soit sur des sites-écoles, soit sur des parcours d’initiation de niveau facile à peu difficile pour le ski, les raquettes ou l’escalade.

Tout d’abord, je tiens à souligner et à saluer les efforts de l’éducation nationale et des équipes pédagogiques associées pour proposer aux jeunes des vallées et des montagnes des formations innovantes qui leur assurent un débouché rapide et efficace dans le secteur économique, majeur dans mon département de la Haute-Savoie, des activités touristiques du ski et du plein air.

Ces formations sont notamment un réel enjeu pour les emplois saisonniers en montagne. Elles connaissent un grand succès : 200 personnes étaient présentes lors de la journée « portes ouvertes » organisée par l’établissement, fin janvier 2015.

Il conviendrait que le ministère aille plus loin, afin de rendre encore plus performant ce dispositif, qui porte ses fruits. Dans cette perspective, je désire soulever le problème du transport des élèves pour leurs activités en plein air.

En effet, si l’on prend l’exemple du lycée Frison-Roche, la nature de l’environnement immédiat de l’établissement fait que les terrains utilisés pour la pratique relèvent rapidement d’une cotation « assez difficile », pas toujours adaptée aux exigences techniques et pédagogiques ni au niveau sportif des élèves, selon la météorologie et le type d’exercices. Or la réglementation actuelle sur les transports scolaires ne permet pas une mobilité rapide des élèves et des coordonnateurs vers des sites plus appropriés ; elle manque de souplesse.

Aussi serait-il souhaitable d’envisager un dispositif qui puisse permettre d’améliorer la mobilité des élèves, toujours dans un cadre réglementaire. Cela permettrait de réaliser l’activité sportive en zone adaptée, de modifier le programme d’activité le matin même ou de permettre un repli en cas de mauvais temps, d’alléger la charge de travail administratif des coordonnateurs et des services comptables du lycée.

Enfin, l’utilisation des ressources locales serait source d’économies pour le budget de la région. Les écoles de ski possèdent des minibus, les professionnels de la montagne ont des véhicules à neuf places et les établissements scolaires pourraient s’équiper.

Conscient de la responsabilité qui incombe à l’institution scolaire à l’égard des élèves qui lui sont confiés durant le temps scolaire et de l’obligation de surveillance pour qu’ils ne subissent aucun dommage, conscient de la rigueur des dispositifs de transport, sachant que la formation biqualifiante retient l’attention du rectorat et qu’elle est très suivie, je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de m’indiquer quelles solutions pourraient être envisagées afin d’améliorer cette formation particulièrement innovante et unique, à travers un aménagement en matière de transport des élèves.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur Pellevat, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse à la question très précise que vous avez posée.

L’organisation de sorties scolaires participe à la mission éducative des établissements d’enseignement. C’est pourquoi le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche l’encourage vivement.

Cependant, ces sorties scolaires ne peuvent intervenir que dans un cadre réglementé qui assure la sécurité des élèves.

Ainsi, la circulaire 2011-117 du 3 août 2011 prévoit que le transport des élèves et des accompagnateurs doit être assuré par un conducteur professionnel. En tout état de cause, il n’appartient pas aux enseignants, au regard de leurs obligations statutaires, de conduire des véhicules, que ceux-ci soient personnels, de location ou de service.

Néanmoins, à titre exceptionnel, un enseignant en service peut conduire un véhicule personnel après y avoir été autorisé par le chef d’établissement et quand l’intérêt du service le justifie. Ces conditions doivent se matérialiser au travers d’un ordre de mission. Je tiens en outre à préciser que cette mesure a un caractère supplétif et n’est utilisée qu’en dernier recours, c’est-à-dire en cas d’absence momentanée d’un transporteur professionnel ou de refus de celui-ci d’effectuer le trajet. De plus, elle s’applique uniquement dans le cadre des activités scolaires obligatoires ou de certaines activités périscolaires.

Vous faites état de la situation des élèves en biqualification en zone de montagne. Ces derniers ont un emploi du temps établi à l’avance, dans lequel les sorties scolaires ont un caractère régulier et prévisible. Dès lors, en application des textes que je viens de vous rappeler, l’établissement doit faire appel à un conducteur professionnel. C’est une règle de sécurité essentielle, prise dans l’intérêt des personnes transportées, ainsi que des enseignants.

Monsieur le sénateur, notre école est responsable de l’éducation des jeunes de notre pays, mais également et prioritairement de leur sécurité lorsqu’elle les a sous sa garde. C’est avec ce souci constant que le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche conduit son action.

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat.

M. Cyril Pellevat. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d’État. Bien évidemment, je suis un peu déçu. Les établissements scolaires demandent un peu plus de souplesse. Sachez que les lycées qui proposent ce type de formation biqualifiante aux métiers de la montagne attendent beaucoup plus du ministère sur ce point précis.

commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en france

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 1053, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Richard Yung. Sur les quelque 3 millions de demandes de visa d’entrée en France reçues chaque année par nos consulats, 10 % sont rejetées en moyenne, ce taux variant fortement selon les pays.

Ensuite, nous ne savons pas très bien ce qui se passe. Il existe une commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France, qui siège à Nantes, mais nous ne disposons pas des chiffres retraçant son activité. À ma connaissance, il est très rare que cette commission fasse droit aux demandes des ressortissants étrangers qui la saisissent, mais je ne détiens pas de données précises. De même, je ne sais pas quel sort le ministère réserve à l’avis de la commission : le suit-il en règle générale ou lui arrive-t-il de passer outre ?

Le 17 juillet 2014, j’ai interrogé par écrit le ministre des affaires étrangères sur ce sujet. Il n’y a pas eu de réponse, non plus qu’à un second courrier adressé en décembre 2014… Cette situation m’a conduit à poser la présente question orale au Gouvernement : c’est mon dernier espoir d’obtenir une réponse !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur Yung, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

Les étrangers qui se voient refuser la délivrance d’un visa par un poste diplomatique ou consulaire doivent, avant tout recours contentieux devant la juridiction administrative, présenter un recours administratif préalable devant la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France, la CRRV, créée en novembre 2000.

La commission dispose d’un délai de deux mois pour se prononcer. À défaut, le recours est réputé avoir fait l’objet d’une décision implicite de rejet. La CRRV, par son rôle de filtre, permet de limiter le nombre des recours contentieux devant le tribunal administratif de Nantes, compétent en première instance depuis 2010.

Le nombre de recours introduits devant la CRRV a augmenté de 277 % entre 2010 et 2014, pour atteindre le chiffre record de 19 864. Pour information, 5 269 recours avaient été enregistrés en 2010. Cette progression est liée à deux facteurs : la progression quantitative de la demande de visas et la communication, par les postes diplomatiques et consulaires, des motifs de refus et des voies de recours, procédure d’information qui a été généralisée aux visas de court séjour en avril 2011.

La commission, dont les effectifs n’ont pu croître dans les mêmes proportions que le nombre des recours, malgré de réels efforts de redéploiement des emplois équivalents temps plein au sein de la sous-direction des visas, a donc dû faire face à un accroissement brutal de ses tâches.

Ne pouvant traiter tous les recours dans le délai réglementaire de deux mois malgré la rationalisation de ses méthodes de travail, elle a mis en place un préexamen systématique et immédiat des demandes qui lui sont adressées, afin de détecter, d’une part, les recours manifestement irrecevables ou mal fondés, et, d’autre part, les recours devant être examinés en urgence compte tenu du caractère solide des éléments apportés.

Cette nouvelle organisation et la mise en place d’une commission mensuelle supplémentaire ont permis une augmentation constante du nombre de décisions explicites prises par la CRRV depuis 2012 : elle a été de 76 % entre 2012 et 2014.

Enfin, pour l’année 2014, sur 19 864 recours enregistrés, la commission en a rejeté 19 578 et 286 ont fait l’objet d’une recommandation de délivrance de visa.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. On voit bien quels sont les chiffres : 3 millions de demandes de visa, 300 000 rejets, 19 000 recours, 280 décisions favorables aux requérants, le Gouvernement restant de toute façon libre de suivre ou non l’avis de la CRRV…

Notre sentiment est ce que toute cette procédure ne sert pas à grand-chose. Elle donne un faux espoir aux déboutés. Je reprendrai cette discussion avec le ministre de l’intérieur.

Un élément de réponse m’a surpris. Je croyais que la loi française disposait désormais que l’absence de réponse valait accord de l’administration. Or j’observe que, en l’espèce, c’est le contraire. Ce sera un deuxième sujet de discussion avec le ministre de l’intérieur…

situation des chrétiens d'orient

M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1069, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Gilbert Roger. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la plainte pour crime contre l’humanité déposée le 10 septembre 2014 par la Coordination des chrétiens d’Orient en danger, la CHREDO, à l’encontre de Daesh, que le procureur de la Cour pénale internationale a décidé d’instruire.

Au moins quatre-vingt-dix chrétiens de rite assyrien sont aux mains de Daesh depuis la fin du mois de février 2015, à la suite de l’enlèvement par le groupe djihadiste des habitants de deux villages du nord-est de la Syrie, situés dans une zone contrôlée par les forces kurdes. La France doit agir et s’engager davantage dans la lutte contre les exactions commises à l’encontre des chrétiens d’Orient et des diverses minorités, en raison de leur religion, et des musulmans sunnites qui ne partagent pas les croyances des membres de Daesh.

Je demande donc à M. le ministre de bien vouloir m’indiquer quelles initiatives compte prendre le Gouvernement pour protéger les chrétiens d’Orient et si celui-ci est disposé à soutenir la plainte pour génocide et crime contre l’humanité déposée par la CHREDO contre Daesh devant la Cour pénale internationale.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le sénateur, M. le ministre des affaires étrangères et du développement international, retenu à l’étranger, m’a chargé de vous répondre.

La France condamne fermement les violences et les exactions à l’encontre des civils, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique. Elle est particulièrement préoccupée par la situation des chrétiens d’Orient, avec lesquels la France entretient des liens spécifiques hérités de l’histoire.

Vous nous interrogez sur les initiatives que compte prendre le Gouvernement pour protéger les chrétiens d’Orient et les autres populations persécutées. La France n’a pas attendu pour agir. Dès l’offensive de Daesh vers Mossoul, en juillet 2014, elle a apporté une assistance aux déplacés, notamment chrétiens ou yézidis, et a favorisé l’accueil de ces personnes sur son sol au titre de l’asile.

Le 27 mars, elle a convoqué une réunion ministérielle du Conseil de sécurité des Nations unies consacrée aux victimes de violences ethniques ou religieuses au Moyen-Orient. À l’occasion de ce débat inédit, elle a proposé l’élaboration par les Nations unies d’une charte d’action comprenant quatre volets : l’accompagnement humanitaire, pour répondre à l’urgence ; l’accompagnement militaire, pour permettre le retour des populations persécutées sur les terres dont elles ont été chassées ; les solutions politiques inclusives dans les pays en crise ; la lutte contre l’impunité pour les auteurs des crimes, dont certains sont constitutifs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Comme l’a annoncé le ministre des affaires étrangères et du développement international, la France accueillera prochainement une conférence internationale consacrée à la mise en œuvre de ces orientations pour la protection des personnes victimes de violences ethniques ou religieuses. Nous sommes également en contact constant avec les autorités locales et nationales en Irak, afin que tout soit mis en œuvre pour assurer cette protection.

Concernant la lutte contre l’impunité pour les auteurs des crimes, la France appelle tous les États à adhérer au Statut de Rome, pour que justice soit rendue aux victimes des crimes les plus graves ayant une portée internationale. Comme l’a souligné le ministre des affaires étrangères et du développement international lors de la réunion du 27 mars, il est indispensable que le Conseil de sécurité saisisse la Cour pénale internationale. Nous vous rappelons que la France a présenté au Conseil de sécurité, en mai 2014, une résolution visant à déférer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale. Cette résolution, qui était soutenue par plus d’une soixantaine d’États, s’est cependant vu opposer les vetos russe et chinois.

Nous encourageons par ailleurs les États sur le territoire desquels les membres de Daesh ont perpétré des crimes ou dont ils ont la nationalité à les poursuivre et à les juger en vertu de leur compétence au titre des lois nationales et des conventions internationales auxquelles ils sont parties.

situation des sans domicile fixe dans les centres-villes

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, auteur de la question n° 1044, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Patrick Courtois. En France, selon une étude de l’INSEE parue en novembre dernier, le nombre des sans domicile fixe a progressé de 44 % au cours des onze dernières années. Cette augmentation sensible se traduit par une concentration de plus en plus en importante dans les centres-villes, prenant souvent la forme de rassemblements de quatre ou cinq personnes qui, pour éviter la solitude liée à leurs conditions de vie très difficiles, ont plusieurs chiens pour animaux de compagnie. Ces rassemblements ne constituent pas en eux-mêmes un délit, car, en vertu d’un principe républicain, toute personne dispose du droit de circuler librement, mais ils peuvent être une source de perturbation de l’ordre public.

Il ne s’agit naturellement pas de remettre en cause le droit de circuler librement, mais seulement de souligner que ces rassemblements engendrent un climat d’inquiétude et posent un réel problème de salubrité publique : excréments d’animaux sur la voie publique, conditions d’hygiène plus que sommaires, etc.

En tant que maire, je suis souvent sollicité par mes administrés pour tenter d’apporter une solution à ce problème. Je souhaiterais donc savoir quelles dispositions pourraient être prises par les élus locaux ou les forces de police pour dissuader ces rassemblements, sans pour autant porter atteinte à la liberté de circuler dans les centres-villes. Il s’agit avant tout de trouver des solutions pouvant apaiser l’inquiétude des citoyens sans stigmatiser des personnes qui sont déjà suffisamment en souffrance.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui m’a chargé de répondre à votre question.

Vous évoquez un sujet qui appelle des réponses mesurées et adaptées au contexte local, à Mâcon comme partout en France. Un équilibre doit être trouvé entre le respect de la liberté d’aller et venir, constitutionnellement protégée, et la préservation de l’ordre public. Le sujet nécessite également d’être traité avec humanité, car il s’agit d’hommes et de femmes confrontés à des situations personnelles difficiles ; j’ai bien noté que telle était votre approche.

Pour commencer, je voudrais rappeler le cadre législatif permettant de sanctionner les comportements qui pourraient troubler l’ordre public.

L’article 312-12-1 du code pénal sanctionne d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende « le fait, en réunion et de manière agressive, ou sous la menace d’un animal dangereux, de solliciter, sur la voie publique, la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien ». Des sanctions pénales beaucoup plus lourdes sont prévues pour l’exploitation de la mendicité d’autrui, en particulier lorsque cette infraction est commise à l’égard d’un mineur.

Ces dispositions pénales fondent juridiquement les services de police à effectuer des contrôles dont la mise en œuvre peut, en elle-même, suffire à faire cesser les troubles à l’ordre public qui seraient constatés. En outre, le maire dispose de pouvoirs de police lui permettant de prendre les mesures qui lui paraissent nécessaires en vue de préserver le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Bien évidemment, ces mesures doivent toujours rester proportionnées aux dommages potentiels ; la juridiction administrative s’en assure lorsqu’elle est saisie.

Par ailleurs, l’une des meilleures manières de prévenir les troubles à l’ordre public consiste sans doute à prévoir des dispositifs d’accueil adaptés. Par exemple, à Paris, la préfecture de police a mis en place, de longue date, une brigade d’assistance aux personnes sans abri. Dans de nombreuses villes, les municipalités ont confié aux associations la gestion de centres d’accueil, dont certains répondent aux besoins des personnes sans domicile fixe en leur offrant la possibilité de stocker leurs bagages ou encore d’accueillir leur chien.

Bien entendu, aucune des mesures que je viens d’évoquer ne saurait suffire à elle seule. Seule une combinaison des dispositifs préventifs, sociaux, mais aussi, quand cela est nécessaire, répressifs, est de nature à répondre efficacement à votre questionnement, qui invite à une réflexion municipale globale sur les règles et les principes du vivre-ensemble.

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais le problème reste entier. Nous sommes désarmés durant la journée. À Mâcon, il existe un asile de jour et un asile de nuit, mais, lorsque des rassemblements de personnes fortement alcoolisées se forment dans le centre-ville, notamment près des magasins d’alimentation, cela pose des problèmes considérables de relations entre les populations. Il y a parfois des bagarres ou des tentatives d’extorsion de fonds, et les forces de police sont complètement désarmées.

C’est un sujet important, qu’il faut examiner calmement, dans le respect de la dignité humaine ; il ne s’agit pas du tout de repousser les SDF hors des centres-villes. Il faudrait que le ministère de l’intérieur et l’Association des maires de France travaillent ensemble sur ce sujet, car j’ai peur que les habitants ne finissent un jour par faire eux-mêmes la police.

place de l'éducation nationale dans le système de formation par apprentissage

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1061, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Bruno Sido. Je souhaite appeler l’attention de Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche sur la place de l’éducation nationale au sein du système de formation par apprentissage, à la suite du diagnostic et des propositions de réformes publiés le 19 décembre 2014 par le Conseil d’analyse économique, instance placée auprès du Premier ministre.

La lecture de cette étude, dont Jean Tirole, « prix Nobel » d’économie, est l’un des auteurs, fait apparaître un constat préoccupant pour les formations de niveau V comme le certificat d’aptitude professionnelle, le fameux CAP.

En effet, de 2004 à 2010, la progression du nombre d’apprentis s’explique par l’essor de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur : le nombre d’apprentis y a augmenté de 24 %. À l’inverse, le nombre d’entrées en apprentissage des élèves de niveau CAP a diminué de 6 %.

Pour expliquer cette situation, certains pointent le fait que l’apprentissage peine à être perçu comme une solution positive d’orientation. Il s’agit là d’un vrai défi, que la formation des enseignants doit permettre de relever. De fait, ce sont souvent des collégiens en difficulté qui sont orientés par défaut vers l’apprentissage. Sans doute les enseignants pourraient-ils être davantage formés à identifier les talents autres qu’académiques.

Mettons-nous à la place d’un apprenti en CAP qui débute sa formation et s’aperçoit que les matières académiques conservent une place prépondérante. Cela peut contribuer à expliquer le taux d’échec considérable – il est de 40 % – en CAP. En somme, l’apprentissage de niveau V est encore trop scolaire et trop éloigné des besoins des entreprises, pour deux raisons : l’insuffisante association des entreprises à la définition des programmes et l’excessive lourdeur des procédures pour ouvrir une nouvelle formation.

Enfin, l’apprentissage implique de trop nombreux intervenants, peu ou mal coordonnés. Simplifier la gouvernance est un enjeu majeur pour gagner en efficacité et mieux comprendre qui est responsable de quoi.

Dans ces conditions, je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer quelles mesures concrètes sont prévues pour réduire le taux d’abandon en CAP et mieux répondre aux forts besoins du tissu économique.