M. le président. Monsieur Collin, l’amendement n° 367 rectifié est-il maintenu ?

M. Yvon Collin. L’amendement de la commission offrant un spectre plus large en faveur de l’agriculture, je retire le mien.

M. le président. L’amendement n° 367 rectifié est retiré.

Madame Primas, l’amendement n° 756 rectifié est-il maintenu ?

Mme Sophie Primas. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je le mets aux voix.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 122, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 18

Compléter cet alinéa par les mots :

, à condition notamment de répondre aux objectifs suivants :

II. – Après l'alinéa 18

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« – la recherche d’autonomie des exploitations et la valorisation des ressources du territoire sur lequel se met en place le projet ;

« – la participation avec les collectivités territoriales au développement de projets agricoles de territoire, dont la structuration d’approvisionnement de la restauration collective en produits biologiques et locaux. » ;

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Les cent trois projets retenus à la suite de l’appel à projets du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt témoignent de la capacité d’initiative des acteurs agricoles de notre territoire pour traduire l’ambition agroécologique de la France.

Ils témoignent également de la diversité des projets qui touchent aussi bien à l’autonomie alimentaire des troupeaux qu’à la qualité de l’eau, à la réduction des intrants, au développement de l’agriculture biologique ou à la conservation des sols qu’à l’agroforesterie.

On peut donc s’attendre à une mobilisation similaire sur les territoires. Pourtant, pour certains projets, des dispositifs de soutien existent déjà. Je pense notamment aux dispositifs relatifs au développement des énergies renouvelables sur les exploitations.

Aussi, pour répondre aux grands enjeux nationaux identifiés, dans un souci de péréquation nationale, il serait opportun de circonscrire la bonification des aides ou les aides spécifiques à des objectifs plus précis.

En l’occurrence, eu égard à la situation des éleveurs contraints par l’augmentation du coût des aliments et de l’énergie et compte tenu des besoins d’appui à la structuration des filières biologiques, je propose que ces bonifications soient réservées aux projets répondant à des objectifs d’autonomie des exploitations et de structuration des filières biologiques et locales pour l’approvisionnement de la restauration collective.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. Monsieur Labbé, je suis une fois encore désolé de devoir m’opposer à votre amendement, même si je ne doute pas que nous nous retrouverons sur d’autres amendements. Je pensais en effet que nous vous avions convaincu, car s’il est un sujet sur lequel nous semblons tous être d’accord, en dépit de nos divergences, c’est bien celui du GIEE. Ne bridons pas le dispositif, ne le restreignons pas, laissons faire les choses !

Vous dites qu’il ne peut pas y avoir d’aide bonifiée s’il ne peut pas y avoir de collectivités locales dans les GIEE. Peut-être y aura-t-il des collectivités locales dans les GIEE et peut-être n’y en aura-t-il pas. Ce choix appartiendra aux agriculteurs. Laissons-les décider de ce qu’ils veulent faire.

De surcroît, vous visez un double objectif : l’autonomie des exploitations et l’amélioration des pratiques afin de réduire l’incidence sur l’eau et les sols. C’est très bien, certains GIEE y veilleront mais d’autres ne le feront peut-être pas. Donc, par votre amendement, vous bridez les aides bonifiées pour les GIEE.

Nous en reparlerons sûrement à l’occasion de l’examen d’autres amendements. Mais le message essentiel que nous devrions tous porter, c’est celui d’une agriculture moderne dans laquelle chaque agriculteur, chaque groupement d’agriculteurs, est libre de cultiver ce qu’il veut, comme il l’entend, à condition de respecter la transition vers l’agroécologie, la diminution des intrants. C’est un objectif que partagent tous les agriculteurs. Mais si nous leur imposons autoritairement une manière de cultiver, cela ne fonctionnera pas, monsieur Labbé.

Vous êtes enclin, par votre culture politique, à penser que la base a raison et qu’elle peut porter des projets. Laissez donc la base, en l’occurrence les agriculteurs des GIEE, soutenir des projets. Laissons, je le répète, l’initiative aux acteurs de terrain, ne la bridons pas. S’il y a des collectivités locales dans un GIEE, tant mieux ! Et s’il n’y a pas besoin de collectivités locales, ce n’est pas plus mal, car cela signifie que l’autonomie économique se met en place.

M. Didier Guillaume, rapporteur. C’est pourquoi, monsieur Labbé, si vous ne retirez pas votre amendement, je serai au regret d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 122 est-il maintenu ?

M. Joël Labbé. M. le rapporteur me renvoie à de futurs amendements sur lesquels j’obtiendrai peut-être satisfaction… Nous souhaitions, par le présent amendement, cibler véritablement les politiques. Cela étant, j’entends aussi qu’à trop fermer le champ on ne peut plus restreindre. (M. le rapporteur acquiesce.) Cette fois encore, je vais donc retirer mon amendement, dans l’attente de jours meilleurs…

M. le président. L’amendement n° 122 est retiré.

L'amendement n° 596 rectifié, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les critères déterminant la majoration des aides publiques privilégient les exploitants agricoles.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Les GIEE peuvent compter parmi leurs membres des personnes physiques comme des personnes morales, publiques ou privées.

Il est précisé que les agriculteurs restent maîtres des GIEE en détenant la majorité des voix au sein des instances décisionnelles. Cependant, rien n’est clairement établi quant à la ventilation des majorations d’aides publiques.

En effet, comme le note le rapport, la reconnaissance de GIEE peut entraîner le bénéfice de majorations d’aides publiques.

Le nouveau règlement sur le deuxième pilier de la PAC prévoit que le taux de soutien public aux investissements réalisés dans un cadre collectif puisse faire l’objet d’une majoration pouvant aller jusqu’à vingt points. Le GIEE pourrait en bénéficier. Il pourrait aussi être le cadre de mise en œuvre des futures MAE – mesures agroenvironnementales – systèmes. Potentiellement, une grande partie des aides publiques pourrait être attribuée au secteur agricole via les GIEE.

Nous souhaitons que ces aides bénéficient en priorité aux exploitants et aux exploitations agricoles et qu’elles ne soient pas captées par des personnes morales publiques ou privées. Tel est le sens de notre amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. Monsieur Le Cam, vous avez évoqué une majoration pouvant atteindre vingt points. Évidemment, une telle mesure est d’ordre réglementaire et donc étrangère au domaine législatif.

Cela étant, la commission est favorable à votre amendement, qui, j’en suis quasiment certain, va être adopté à l’unanimité. Les dispositions qu’il comporte confortent ce que nous répétons depuis un certain temps, à savoir que la priorité doit être donnée aux agriculteurs, qui doivent donc être les premiers bénéficiaires des aides des GIEE.

Mme Sophie Primas. Ce n’est pas ce que vous nous avez dit tout à l'heure !

M. Didier Guillaume, rapporteur. Bien sûr que si ! M. le Cam veut inscrire cette priorité aux agriculteurs dans la loi ; c’est très important et cela m’importe. J’ai dit tout à l’heure qu’il ne fallait pas fermer la porte et refuser que des non-agriculteurs qui viennent travailler sur l’exploitation pour réaliser des expertises, aider à une transition puissent bénéficier des aides bonifiées. Cela va tout à fait dans le même sens : priorité aux agriculteurs, mais non pas exclusivement à eux, et aide à l’agriculture.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 596 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 123, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 18

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 311-… – Seules les installations collectives de méthaniseurs, exploitées ou détenues par une personne physique ou morale, publique ou privée, sont admises au bénéfice des soutiens publics. Cette condition est remplie dès lors que l’installation est constituée dans le cadre d’un groupement d’intérêt économique et environnemental tel que défini à l’article L. 311-4. » ;

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement qui vise à favoriser les méthaniseurs collectifs. Il n’y a aucune raison, là encore, de restreindre le dispositif. Nous sommes cohérents avec les positions que nous avons adoptées depuis le début de cette discussion. Les méthaniseurs peuvent être collectifs ou ne pas l’être.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sur la question de la méthanisation, je souligne que le développement des méthaniseurs collectifs s’accélère actuellement. L’objet du plan « énergie méthanisation autonomie azote » est d'ailleurs de favoriser cette accélération. L’objectif de 1 000 méthaniseurs d’ici à 2020 devrait être atteint avant cette date, compte tenu de la rapidité de leur mise en place.

Mais il peut y avoir des méthaniseurs individuels qui ont du sens,…

M. Didier Guillaume, rapporteur. Bien sûr !

M. Stéphane Le Foll, ministre. …dans la mesure où certaines situations géographiques rendent parfois difficiles les regroupements.

Par ailleurs, je souligne que, dans le cadre de la vingt et unième conférence climat sur la lutte contre les gaz à effet de serre, la question du méthane sera posée. Il faut donc tout faire pour recycler le méthane et le transformer en énergie. Mais des règles pourront concerner la couverture d’un certain nombre de fosses à lisier ou autres fosses à fumier, qui peuvent être couvertes de manière très simple, afin de récupérer le méthane qui se dégage, de faire de l’énergie et de la cogénération sur l’exploitation.

Prenons garde à ne pas aller dans un seul sens, car il sera peut-être nécessaire de mettre en place des systèmes spécifiques pour des méthaniseurs individuels, précisément dans le cadre de la lutte contre les gaz à effet de serre.

Le présent projet de loi ne doit pas avoir pour seul objectif les méthaniseurs collectifs, mais doit laisser ouvertes d’autres possibilités, dans la mesure où de grandes questions vont se poser, en particulier, je le répète, en termes de lutte contre les gaz à effet de serre. Il faut donner aux agriculteurs qui ne peuvent pas se regrouper la possibilité de couvrir leurs fosses, de récupérer le méthane et faire de la cogénération.

M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.

M. Daniel Dubois. Sur cette question des méthaniseurs, je prends note de votre optimisme, monsieur le ministre. Je suis moi-même optimiste, mais il me semble que, actuellement, de très nombreuses difficultés freinent l’émergence des projets de méthaniseurs et leur réalisation sur le terrain.

Comme je vous l’ai déjà dit, un certain nombre de territoires développent des projets extrêmement importants. Ainsi, dans le département de la Somme, six ou sept projets sont en cours de montage, mais de réelles difficultés font obstacle à leur réalisation. Les procédures sont très complexes et très longues. (MM. Charles Revet et Jean Bizet opinent.) Les élus sont confrontés à des détails, des difficultés relatives à la commercialisation, aux branchements… C’est beaucoup plus compliqué qu’on ne le dit

Il serait selon moi intéressant d’examiner ce sujet, qui correspond tout à fait aux textes de loi d’avenir. Je regrette d'ailleurs qu’il n’en soit pas question dans le présent projet de loi. Si les choses pouvaient s’améliorer, monsieur le ministre, ce serait très bien.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Notre finalité, en déposant cet amendement, était d’éviter des dérives possibles vers des méga-exploitations dans lesquelles l’élevage serait un sous-produit dissimulant une activité industrielle.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 682, présenté par Mmes Nicoux, Bourzai et Bataille, MM. Bérit-Débat, M. Bourquin, Courteau, Daunis, Dilain, Fauconnier et S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Mirassou, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 21

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

2° L’article L. 666-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, les producteurs de céréales membres d’une personne morale reconnue comme groupement d’intérêt économique et environnemental en application de l’article L. 311-4 peuvent commercialiser leurs propres céréales au sein de ce groupement dans le cadre de la mise en œuvre de son projet pluriannuel. Ils déclarent à un collecteur de céréales les quantités ainsi commercialisées. Ces quantités sont soumises à la taxe visée à l’article 1619 du code général des impôts. » ;

La parole est à Mme Renée Nicoux.

Mme Renée Nicoux. Le projet de loi initial donnait aux producteurs de céréales associés dans un GIEE la possibilité de commercialiser leurs semences sans passer par un organisme stockeur.

À l’Assemblée nationale, cette disposition avait suscité de nombreuses interrogations, non pas sur son objectif mais sur certains de ses effets, qui avaient abouti à sa suppression.

Le présent amendement vise à réintroduire le principe initial, tout en l’améliorant, afin de répondre aux inquiétudes légitimement soulevées par les députés.

Nous estimons en effet que les projets soutenus par les GIEE doivent comporter des éléments de simplification de nature à favoriser l’action collective, la complémentarité entre exploitations, et à concrétiser une conduite économique d’ensemble des exploitations les composant.

Le transfert direct des céréales est l’un de ces aspects.

Pour autant, les informations pertinentes pour la gestion du marché et les contributions versées en règle générale ne doivent pas être écartées.

Ainsi, le présent amendement tend à ce que les échanges de céréales entre membres d’un GIEE ne soient pas conditionnés à un passage physique par un collecteur agréé. En revanche, ils restent soumis aux déclarations statistiques et au versement des taxes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. Nous souhaitons rétablir la disposition en cause qui, comme Mme Nicoux l’a rappelé, avait été supprimée par l’Assemblée nationale, d’autant que, loin de viser n’importe quoi – des commercialisations dans tous les sens –, cet amendement institue des garde-fous : les céréaliers auront les mêmes obligations déclaratoires que les collecteurs et les taxes parafiscales prélevées aujourd’hui par les collecteurs seront dues par les céréaliers.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.

M. Jean Bizet. Je voterai l’amendement n° 682, lequel ne me choque pas.

Je souhaiterais revenir sur l’amendement n° 312, qui n’a malheureusement pas été adopté.

Monsieur le ministre, je voudrais relever une ambiguïté. Vous vous êtes focalisé sur le certificat d’obtention végétale. Tout comme vous, j’ai un faible pour ce certificat, que je préfère au brevet – le président Raoul et vous-même le savez bien ! C’est un titre de propriété qui, à la différence de ce dernier, protège sans capter. Mais, pour le GIEE, vous avez imaginé un échange de semences entre agriculteurs par le biais de l’entraide. Ce faisant, vous prenez le risque de propager des semences contaminées par un champignon, un virus ou un quelconque parasite à tous les agriculteurs membres du GIEE, et donc de disséminer un éventuel problème sanitaire.

C’est la raison pour laquelle l’économie de l’échange intra-agriculteurs au sein des GIEE sera fortement handicapée.

Si, au contraire, vous interdisez cet échange, l’agriculteur peut toujours – vous connaissez la loi tout aussi bien si ce n’est mieux que moi ! – semer de nouveau ses semences !

J’ai fait abstraction de la non-perception de taxes et de cotisations volontaires qui entraverait le domaine de la recherche et du développement, mais j’insiste bien sur le risque sanitaire existant en cas d’échange de semences. Cette notion d’entraide entre agriculteurs d’un même GIEE part d’un bon sentiment, mais fait courir un risque que vous ne pourrez peut-être pas maîtriser demain.

L’amendement n’a pas été adopté, mais nous reviendrons certainement sur cette question lors de la deuxième lecture. Mon intervention n’a rien à voir avec les histoires de brevet ou de certificat d’obtention végétale ; je le répète, nous avons la même analyse sur ce dernier point, qui est une invention franco-française assez pertinente.

J’en reviens à l’amendement de Mme Nicoux que je voterai, notamment parce que notre collègue a pris la précaution de ne pas soustraire les membres d’un GIEE du paiement des cotisations.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 682.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt
Articles additionnels après l’article 3 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l’article 3

M. le président. L'amendement n° 125, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre V du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’intitulé est complété par les mots : « et l’aide bénévole » ;

2° L’article L. 325-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’aide bénévole est apportée de façon volontaire, par un individu extérieur à l’exploitation, de façon ponctuelle et temporaire, sans rémunération, ni lien de subordination avec l’exploitant.

« Les conditions d’application du précédent alinéa sont fixées par décret. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Je voudrais évoquer une nouvelle pratique d’aide bénévole appelée le wwoofing – world wide opportunities on organic farming – qui, depuis quelques années, se développe en France et dans le monde.

Elle consiste pour des agriculteurs biologiques à accueillir sur les fermes, pour des durées plus ou moins longues, des jeunes ou moins jeunes qui veulent découvrir le métier en apportant éventuellement une aide, en échange d’un hébergement et de nourriture. L’aide est bénévole et tout lien de subordination est exclu.

Ces notions de bénévolat et d’absence de lien de subordination sont essentielles. Ce sont ces garanties qui excluent, de fait, le risque de tomber dans les dérives tant du travail dissimulé que de l’opportunisme.

Cet amendement vise donc à combler le vide juridique dont pâtit aujourd’hui cette pratique, autant pour encourager celle-ci que pour la protéger des abus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. M. Labbé le sait bien, la commission est défavorable à sa proposition.

Cet amendement tend à attribuer le statut d’entraide agricole à l’aide bénévole apportée dans les fermes par des individus extérieurs au monde agricole.

Le problème vient du fait que l’entraide est conçue comme un échange de services entre agriculteurs, qui suppose un retour. Cela a été fait pour le GIEE, et un amendement a d’ailleurs été adopté à une très large majorité. Le wwoofing relève d’une autre logique et n’entre pas du cadre de l’entraide.

Donner le statut d’entraide à la pratique du wwofing risquerait, par ailleurs, d’entraîner le développement de pratiques d’indemnisation des frais engagés, qui pourraient s’apparenter à du travail dissimulé.

Aussi, je vous demande, monsieur Labbé de retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement n° 125 est-il maintenu ?

M. Joël Labbé. Je maintiens cet amendement d’appel. Il faudra bien, à un moment ou à un autre, apporter une réponse juridique au développement de ces pratiques liées aux agricultures alternatives.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 125.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 115 rectifié, présenté par Mmes Espagnac, Bourzai et Nicoux, est ainsi libellé :

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 341-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après les mots : « l'aide financière de l'État », sont insérés les mots : « et des collectivités territoriales » ;

2° Il est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces aides sont modulées et plafonnées sur la base de critères économiques de l'exploitation, du nombre d'actifs, de facteurs environnementaux et d'aménagement du territoire. »

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. Dans de nombreuses parties de notre territoire, l’essentiel de la vie agricole est assuré par ce qu’il est convenu d’appeler les « petites exploitations ». C’est le cas dans mon département, les Pyrénées-Atlantiques, notamment au Pays Basque. Ce sont elles qui assurent le maintien de l’utilisation agricole des terres et, ce faisant, celui du tissu rural. Elles participent tant à la préservation de l’espace naturel qu’au maintien de l’emploi dans nos territoires.

Le présent projet de loi, qui est si important pour l’avenir de notre agriculture et qui met l’agroécologie au cœur de ses objectifs, ne peut traiter ces petites exploitations que comme un atout à préserver. Malheureusement, celles-ci doivent faire face à des contraintes structurelles importantes, comme l’absence d’économies d’échelle, le surcoût des champs fixes, l’isolement et l’éclatement des structures, ou encore la complexité des systèmes.

En reprenant la rédaction initiale de l’article L. 341-1 du code rural contenue dans la loi de 1999, cet amendement vise à prévoir un cadre dont pourraient bénéficier les « petites fermes », alors que, vous le savez tous, la grande majorité des aides publiques sont à ce jour proportionnelles à la taille des exploitations.

M. le président. L'amendement n° 589 rectifié, présenté par M. Labazée et Mmes Bourzai et Nicoux, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 341-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces aides sont modulées et plafonnées sur la base de critères économiques de l'exploitation, du nombre d'actifs, de facteurs environnementaux et d'aménagement du territoire. »

La parole est à Mme Bernadette Bourzai.

Mme Bernadette Bourzai. Je précise que j’ai cosigné l’amendement que vient de présenter Mme Espagnac. Bien que, je le sais, cette question relève davantage de la politique agricole commune, des mesures ont été adoptées par certains pays de l’Union européenne pour ce type d’exploitation, qualifié de « petites fermes ».

Dans ma région, le Limousin, ces dernières représentent une part non négligeable des petites exploitations : 11 % des exploitations limousines spécialisées dans l’élevage ont moins de dix bovins. Or le seuil d’accès à la prime à la vache allaitante est fixé à dix dans le règlement qui s’appliquera en France.

Ce type d’exploitation correspond aussi à des localisations particulières.

Je veux insister en particulier sur une tradition du Pays de Tulle – tout le monde en mesurera l’importance –, qui remonte à Colbert et à la mise en place de la manufacture d’armes de Tulle. À l’époque s’était développée la pratique de l’ouvrier-paysan, qui partageait son temps entre le maintien d’une petite exploitation agricole et le travail dans la manufacture.

Par ailleurs, dans le bassin de Brive, des petites fermes sont spécialisées dans l’élevage notamment du veau de lait sous la mère qui est de grande qualité et qui présente un marché de niche dans la production de viande. Ces exploitations sont souvent associées au maraîchage, aux cultures fruitières et légumières et au tabac. Permettez-moi, mes chers collègues, de vous faire observer que la disparition de toute aide à l’implantation de tabac les mettra en difficulté.

Même si le présent projet de loi n’est pas le cadre le plus approprié pour évoquer ce sujet, j’espère que M. le ministre m’apportera une réponse. J’ai également saisi le Président de la République de cette question. Je souhaiterais soit que l’on en revienne au seuil précédent, qui était fixé à trois bovins, soit, s’il faut faire des concessions, que soit retenu celui de cinq. En tout cas, il faut prendre en compte ces exploitations qui méritent d’être soutenues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. Ces deux amendements sont sensiblement les mêmes, à l’exception près que l’un vise un financement, outre par l’État, comme prévu dans le présent projet de loi, par les collectivités territoriales, ce qui peut poser problème.

Je partage totalement l’objectif brillamment défendu par Mme Espagnac de favoriser le modèle de l’agriculture familiale, avec des fermes qui assurent le maillage des territoires ruraux.

Mais l’amendement n° 115 rectifié est totalement satisfait par les dispositions de l’article D. 341-1 du code rural et de la pêche maritime de nature réglementaire, comme l’a jugé le Conseil constitutionnel dans une décision rendue en 2007.

Je vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, qui est satisfait par le droit existant, même si, je le répète, je suis tout à fait favorable au modèle de l’agriculture familiale, lequel est excellent.

Madame Bourzai, M. le ministre va maintenant pouvoir vous répondre précisément sur la question du nombre de vaches dans les petites fermes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ces deux amendements soulèvent plusieurs questions. Ils visent des « aides modulées et plafonnées sur la base de critères économiques de l’exploitation, du nombre d’actifs, de facteurs environnementaux et d’aménagement du territoire. » Mais le premier d’entre eux tend à ce que ces aides soient apportées tant par l’État que par des collectivités locales.

Or on ne peut pas obliger des collectivités locales, auxquelles est reconnue la libre administration, à mener des politiques dont nous fixerions nous-mêmes les règles d’application. On ne peut pas leur demander de financer des politiques et, en plus, leur dire comment le faire !

J’en viens à la prime à la vache allaitante versée aux agriculteurs dans le cadre des aides couplées. Pour ces aides, j’ai pris la décision de fixer le plancher à dix vaches. La question de la répartition de l’ensemble de ces aides à l’égard des éleveurs dont les troupeaux ont un nombre bien supérieur de bovins se pose aujourd'hui, sachant que, chez les éleveurs spécialisés en viande bovine, la moyenne est d’une unité de travail humain pour soixante vaches allaitantes.

Je rappelle que la bataille que j’ai conduite sur le couplage des aides a conduit l’Europe à aller dans le sens que nous souhaitions, mais aussi à fixer des règles consistant à évaluer le nombre de vaches sur une année pour les primer toutes. Par conséquent, il y aura plus de vaches primées qu’auparavant, et nous serons obligés de fixer des critères qui permettront de ne pas dépasser l’enveloppe globale, laquelle s’élève à environ 662 millions d’euros.

Je reviens sur la question des petites exploitations, celles à moins de dix vaches. Vous avez même évoqué, madame la sénatrice, des exploitations à trois vaches.