compte rendu intégral

Présidence de M. Charles Guené

vice-président

Secrétaires :

M. Jean Boyer,

Mme Catherine Procaccia.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.

impact de doha dans les pays du sud

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Vincent Placé. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du développement.

Monsieur le ministre, cher Pascal Canfin, à défaut d’avoir réalisé un accord universel ambitieux, la conférence de Doha a mis en valeur l’urgence de progresser vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre. En effet, les rapports scientifiques confirment la réalité du réchauffement climatique et ses conséquences désastreuses, tant pour la biodiversité que pour l’homme.

L’augmentation globale des températures entraîne la fonte de nombreux glaciers, y compris chez nous, dans les Alpes par exemple. Ce phénomène accroît également les problématiques agricoles, de ressources en eau douce, de disparition d’espèces. Pour l’homme, les impacts sont graves : le risque d’inondations côtières est décuplé, tandis que certaines maladies se propagent, notamment via les moustiques ou les pollens.

Certaines régions du monde sont particulièrement vulnérables et ne disposent pas des moyens nécessaires pour y faire face. Les pays du Sud représentent en particulier un point central de la problématique du réchauffement climatique.

D’une part, la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre doit se faire avec tout le monde.

D’autre part, pour que les accords fonctionnent et que les pays les plus riches acceptent des règles contraignantes, il faut éviter la concurrence internationale qui risquerait de les pénaliser à cause de leurs efforts en faveur de la protection de l’environnement. Nous avons donc un intérêt économique à ce que les pays du Sud participent à l’action pour le climat.

Enfin, les pays du Nord ont également une obligation à agir, au nom de leur « responsabilité historique » dans le changement climatique.

À la suite du terrible typhon Bopha, les Philippines ont lancé un appel à tous les dirigeants pour agir contre le réchauffement climatique. Les pays du Sud réclament aux pays développés des financements pour faire face aux effets du réchauffement.

Le Président de la République, François Hollande, a proposé que la France accueille la conférence de l’ONU sur le climat en 2015, lors de la conférence environnementale à Paris.

Le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a, quant à lui, proposé qu’un sommet précède le grand rendez-vous de 2015.

Le groupe écologiste au Sénat se réjouit de ces annonces, mais s’interroge : la France sera-t-elle prête ?

Si la lutte contre le réchauffement climatique n’a pas de valeur, elle a un coût.

Je conclurai par une question.

Un sénateur du groupe UMP. Sur la fin du monde ? (Sourires.)

M. Alain Gournac. C’est demain la fin du monde !

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le ministre, quels financements la France mobilise-t-elle actuellement pour la lutte contre le changement climatique, notamment en faveur des pays du Sud ? Comment atteindre les fameux 100 milliards de dollars par an de financement pour le climat en 2020, conformément aux engagements de Copenhague ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur plusieurs travées du groupe socialiste. – MM. Stéphane Mazars et Robert Hue applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du développement.

M. Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement. Monsieur le sénateur Jean-Vincent Placé, vous m'interrogez sur les financements mobilisés par la France en faveur du climat, notamment en direction des pays du Sud.

J'ai participé au sommet de Doha avec Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères, et Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Nous avons pris une part active à ces négociations : la France avait la plus importante représentation ministérielle et une délégation de parlementaires était présente, dont le sénateur Ronan Dantec que je tiens à saluer particulièrement.

Lors de cette négociation, je me suis plus singulièrement impliqué sur les questions financières : pour avoir représenté l'Union européenne avec mon collègue britannique, j'ai mesuré à quel point ces sujets étaient centraux et conditionnaient notre capacité, ou notre incapacité, à trouver un accord international sur le climat.

La France a tenu les engagements qu'elle avait pris à Copenhague (M. Ronan Dantec opine.), ce que l'on appelle les financements « précoces » et a mobilisé 1,2 milliard d'euros sur trois ans. Je tiens à souligner que si cet engagement a été tenu en 2010, en 2011 et en 2012, c'est bien grâce à l'effort du précédent gouvernement, et je tenais à le souligner. (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.)

Par delà les engagements passés, nous avons une responsabilité sur les engagements futurs et notre responsabilité c’est bien évidemment d’aller au-delà de ce qui a déjà été fait. Nous avons décidé d'affecter en priorité 6 milliards d'euros dans le secteur des énergies, en particulier les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique. Ce choix n’a pas été fait auparavant. Ces financements contribueront à la lutte contre le changement climatique.

Nous avons décidé d'affecter 10 % de la taxe sur les transactions financières françaises au développement. La moitié de ces 10 % viendra abonder ce que l'on appelle le « Fonds vert pour le climat », qui a été décidé à Copenhague. Par conséquent, nous allons augmenter notre financement « climat ».

Par ailleurs, vous le savez, monsieur le sénateur, la France est le pays le plus actif dans la négociation avec ses dix partenaires européens pour mettre en place une taxe européenne sur les transactions financières et en affecter une partie au développement ainsi qu'à la mobilisation en matière de financement « climat ».

En ce qui concerne l’agenda international, non seulement la France a respecté ses engagements passés, mais surtout, aujourd'hui, elle est en pointe. Vous pouvez compter sur nous, mais nous avons aussi besoin de la mobilisation de l'ensemble des parlementaires pour que l'accord de 2015 à Paris soit un succès. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE et sur quelques travées de l’UMP. – MM. Aymeri de Montesquiou et Jean Boyer applaudissent également.)

situation de la banque de france

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

Monsieur le ministre, depuis 1993 et la mise en œuvre du système européen de banques centrales, l’indépendance de la Banque de France a été jugée indispensable – ce qui est extrêmement important – dans le cadre d'une construction européenne qui, dois-je le rappeler, a été rejetée par nos concitoyens lors du référendum de 2005.

Certes, la Banque de France est indépendante – elle ne peut effectivement pas faire fonctionner « la planche à billets » pour répondre aux besoins de liquidité de l'État –, mais elle est aussi une institution dont le capital appartient à l’État, qui peut la charger de missions d’intérêt général, aux termes de certaines dispositions du code monétaire et financier.

Le Président de la République, M. François Hollande, a déclaré à plusieurs reprises que son adversaire principal était le monde de la finance, ce qui a notamment permis le rassemblement du 6 mai dernier. Les membres du groupe CRC partagent cette prise de position et la portent avec force et détermination.

Aussi semble-t-il totalement incompréhensible que, dans ce climat, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, entende réduire de manière drastique les effectifs de cet établissement qui, rappelons-le, est un service public. Peut-on parler de réduction quand il s'agit de la suppression de 2 000 postes ?

Oui, ce sont 2 000 postes qui vont manquer dans les succursales déconcentrées, rendant notamment plus difficile le traitement des dossiers de surendettement, l’une des missions d’intérêt général confiées à la Banque de France, avec une satisfaction globalement partagée.

Oui, ce sont 2 000 postes qui vont manquer pour affiner l’action de la Banque publique d’investissement, alors même que la qualité de l’information économique dont dispose la Banque de France est une condition nécessaire à l’action du nouvel établissement !

Oui, ce sont 2 000 postes qui vont manquer, alors même que les missions essentielles de sécurité des moyens de paiement, de connaissance de l’activité de l’ensemble des acteurs financiers comme des milieux économiques de la Banque de France justifient pleinement que l’institution dispose des effectifs nécessaires !

Oui, ce sont 2 000 postes qui vont manquer, alors même que se pose de plus en plus la question de la qualité de la monnaie européenne, que la BCE, la Banque centrale européenne, semble vouloir confier à des entreprises sous-traitantes.

Oui, ce sont 2 000 postes qui vont s’ajouter aux plans de licenciements qui assombrissent l’avenir de milliers de femmes, d’hommes et de leurs familles aux quatre coins de notre pays.

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire face au plan Noyer de déstructuration de la Banque de France ? Allez-vous convoquer une table ronde avec les personnels, dont nous soutenons la lutte, et l’ensemble des parties prenantes ?

Il est temps que cesse cette logique tueuse d’emplois qui, de Florange à la Rue de la Banque, d’Aulnay-sous-Bois à Petit-Couronne, de Sanofi aux 3 Suisses, méprise l’intérêt général. (M. Bruno Sido marque son impatience.)

M. Alain Gournac. C’est long !

Mme Laurence Cohen. Selon nous, les salariés de toutes ces entreprises, et de bien d’autres d’ailleurs, ont besoin d’un bouclier législatif, par exemple une loi (Non ! sur les travées de l'UMP) qui interdise les suppressions d’emplois à visée boursière et qui donne des droits et des pouvoirs nouveaux aux salariés. Pour notre part, nous y sommes prêts. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste. – Mme Françoise Laborde et M. Robert Hue applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Madame la sénatrice, je tiens à vous dire toute l'attention que je porte au sujet que vous évoquez.

En effet, nous avons le souci non seulement de moderniser l'action publique, celle de ses opérateurs, mais aussi, et dans le même temps, de préserver la qualité du service public, l'emploi et la couverture géographique de ses prestations. C’est bien ce qui se passe avec la Banque de France.

Je ne polémiquerai pas avec vous sur le fait de savoir ce qui a été rejeté en 2005. Je ne crois pas que ce soit la construction européenne, même s'il s'agissait d'un texte européen important. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Pour notre part, nous restons profondément attachés à la construction européenne.

Dans ce contexte, la Banque de France doit faire face à une mutation profonde et importante de ses conditions d'exercice dans le cadre de ses missions. Ce constat l’a poussée à engager une réflexion sur l'optimisation de son organisation. Comme vous l'avez dit, le gouverneur a présenté, le 21 septembre dernier, un plan de réorganisation, qui fait actuellement l'objet d'une consultation auprès des personnels et des acteurs locaux. J'ai moi-même reçu les syndicats de la Banque de France à Montbéliard, dont je suis l'élu.

Vous l'avez souligné, la Banque de France est une autorité indépendante. L'État étant son actionnaire, il veille à ses missions d'intérêt général. Je porte donc une attention particulière à la conduite de ce plan de réorganisation.

Si, finalement, je soutiens ce plan, en y accordant, je le répète, la plus grande attention ainsi qu’aux discussions qu'il faut mener, c'est pour quatre raisons.

Premièrement, ce plan garantit le maintien d'une couverture géographique importante, notamment par la présence d'une succursale de la Banque de France dans chaque département, voire davantage là où les conditions économiques et géographiques le justifient. Ainsi, la Banque de France maintiendra des bureaux d'accueil et d'information dans les villes où se présentent plus de 1 000 visiteurs par an, soit cinq par jour. Dans le Val-de-Marne par exemple, département dont vous êtes élue, madame la sénatrice, les bureaux d'accueil de Vincennes, d'Ivry-sur-Seine et de Créteil, notamment, seront conservés.

Deuxièmement, le plan permet une optimisation de la gestion des activités qui ne nécessitent pas un contact avec le public. Cependant, je peux vous l’assurer, par exemple, tout ce qui va dans le sens du traitement du surendettement sera maintenu et défendu.

Troisièmement, soyons réalistes, le plan repose sur un calendrier très progressif : aucune fermeture d'unités tertiaires n’interviendra avant 2016. En ce qui concerne l’activité fiduciaire, les choses se feront également de manière progressive, en lien avec la livraison de nouveaux centres fiduciaires.

Quatrièmement enfin, et surtout, je ne peux pas accepter d'être qualifié de tueur d’emplois. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Oh ! ce n’est pas bien !

M. Pierre Moscovici, ministre. Il n’est pas dans les intentions du Gouvernement d’agir ainsi.

Un plan de sauvegarde de l'emploi existe pour les 227 agents – j’insiste sur ce chiffre – qui sont concernés par les fermetures de caisse. Compte tenu des départs à la retraite, seuls 175 agents seront touchés par les reclassements géographiques ou fonctionnels. La Banque de France prévoit déjà les formations et les offres de mutation qui permettront d'anticiper dans les meilleures conditions cette mobilité. Aussi, in fine, je tiens à le dire ici, ce plan se fera sans aucun licenciement.

Mme Annie David. Sans licenciement mais pas sans perte d'emploi !

M. Pierre Moscovici, ministre. Madame Cohen, vous pouvez être certaine que les consultations et les concertations seront menées et que, en tant que représentant de l'État actionnaire, j'y serai très attentif. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Stéphane Mazars applaudit également.)

péréquation

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Hier, sur l’initiative des radicaux et du président du RDSE, Jacques Mézard, de nombreux sénateurs, appartenant à différents groupes politiques, et le président du Sénat lui-même, ont interpellé en urgence le Premier ministre pour dénoncer les modifications des critères de répartition des fonds départementaux de péréquation.

M. Jean-Michel Baylet. Ces modifications ont été introduites à l’Assemblée nationale dans des conditions que nous jugeons inacceptables (M. Alain Gournac s’exclame.), tant sur le fond que sur la forme. Cette situation est intolérable. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) En effet, quelques députés ont subrepticement introduit, par voie d’amendement, de nouveaux critères de répartition de ces aides financières, et ce afin de favoriser particulièrement leurs collectivités (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.), au détriment des départements les plus en difficulté. Chers collègues de l’opposition, étant donné la manière dont vous avez traité les collectivités, je vous encourage à faire preuve de davantage de tranquillité ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste. – Mme Hélène Lipietz et M. Jean-Vincent Placé applaudissent également.)

Ce sont notamment les territoires ruraux qui ont été pénalisés, alors que ce sont les plus fragiles. Vous en conviendrez, madame la ministre, il s’agit d’une curieuse conception de la péréquation financière et de la justice fiscale.

Ces nouveaux critères, insérés par l’Assemblée nationale dans le projet de loi de finances pour 2013, profitent surtout aux départements les plus riches, les mieux dotés et les plus peuplés, au détriment des autres – les deux tiers de nos départements, soit dit en passant –, dont la plupart connaissent déjà des difficultés financières immenses pour faire face aux dépenses du quotidien, ces dépenses à caractère social qui sont si nécessaires aujourd'hui pour protéger nos concitoyens de la crise.

Madame la ministre, ce n’est pas notre conception de l’égalité des territoires. Nous savons d'ailleurs que ce n’est pas davantage la vôtre ni celle du Président de la République. (M. Alain Gournac s’exclame.) Une telle évolution est en effet manifestement en contradiction avec les engagements que nous avons pris durant la campagne électorale. Cette évolution est également incompatible avec la création d’un ministère de l’égalité des territoires. Faut-il rappeler à nouveau, dans cette enceinte où on s’intéresse en priorité aux territoires, que la péréquation constitue la base de la justice territoriale ?

La procédure parlementaire ne permet malheureusement pas de revenir sur ces mesures injustes, puisque l’Assemblée nationale a définitivement adopté le budget ce matin. Cependant, nous avons cru comprendre – nous avons même compris – que notre initiative d’hier avait rencontré un écho auprès du Premier ministre, et que celui-ci était prêt à annuler le dispositif en question.

Madame la ministre, pouvez-vous prendre l’engagement formel devant le Sénat…

M. Jean-Michel Baylet. … qu’il en sera bien ainsi ? Quand, et à quelle occasion, le Parlement aura-t-il la possibilité de se prononcer sur ces questions essentielles pour les territoires ? Enfin, que pouvez-dire aux sénateurs et aux élus locaux pour les assurer du respect des principes d’équité dans les dispositifs de péréquation ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste. – MM. René-Paul Savary, Philippe Adnot et Jean Boyer applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, Anne-Marie Escoffier et moi-même avons animé un débat complexe, riche d’échanges, sur plusieurs dispositions destinées à venir en aide aux territoires les plus en difficulté. Un fonds d’urgence doté de 170 millions d'euros a été créé par le Gouvernement pour soutenir les départements.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement a entendu les débats sur les critères d’attribution des sommes gérées par ce fonds. Le débat a eu lieu, et il est maintenant important de s’atteler à la mise en place concrète du fonds.

Monsieur Baylet, vous savez que le Gouvernement a fait beaucoup d’efforts en termes de péréquation dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013, et que nous rejoignons en grande partie votre analyse. Le fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, a été mis en place, et les dispositions proposées ont été examinées au sein du groupe de travail du Comité des finances locales. Le Gouvernement a proposé un dispositif équilibré, en intégrant des critères de charges – des revenus moyens, en particulier – dans l’ensemble des dispositifs de péréquation. C’est une volonté forte de la gauche, vous l’avez rappelé, que d’intégrer de tels critères de charges, des critères justes, pour ajuster la péréquation horizontale entre les territoires. C’est aussi une volonté forte du Sénat, puisque cette proposition figurait dans le rapport rédigé par Charles Guené et Anne-Marie Escoffier au nom de la mission commune d’information sur la taxe professionnelle, qui a été rendu public en juin dernier.

S'agissant des critères de répartition du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux, les fameux DMTO, la logique du Gouvernement est la même. Nous avons intégré des critères de charges – et donc pris en compte des revenus moyens – pour renforcer les effets péréquateurs de ce fonds. Les débats à l’Assemblée nationale ont conduit à des modifications sensibles, dont je regrette qu’elles n’aient pas pu être examinées par votre Haute Assemblée à cause du rejet, ici même, de la première partie du projet de loi de finances pour 2013. (Eh oui ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

Un sénateur du groupe socialiste. Merci la droite !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il est dommage que nous n’ayons pas pu avoir ce débat sur le fonds de péréquation des DMTO car, si nous l’avions eu, nous n’en serions pas là. (Exclamations sur certaines travées de l'UMP.)

Les premières simulations des effets du fonds de péréquation des DMTO ont suscité beaucoup d’inquiétudes sur les travées de votre assemblée. Nous avons entendu ces inquiétudes. Nous avons évalué le dispositif dans le cadre du Comité des finances locales. Comme le Premier ministre s’y est solennellement engagé, les fonds de péréquation de la CVAE et des DMTO seront réexaminés aussi vite que possible au cours du premier semestre 2013, au vu des résultats des simulations dont vous avez parlé. C’est un engagement du Premier ministre.

M. Bruno Sido. Ah bon ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il nous reste à trouver un véhicule législatif.

Je voudrais ajouter un mot, monsieur Baylet. C’est vrai que vos arguments sont justes, mais c’est vrai aussi que, s'agissant des fonds de péréquation tels qu’ils ont été organisés ces dernières années, et tels qu’ils continuent de l’être, nous avons beaucoup de soucis. Il faudra que l’on se parle de façon très précise sur la péréquation verticale, c'est-à-dire sur l’introduction de plus de justice dans les dotations de base. Je pense que, si nous faisons ce travail, nous aurons moins de difficultés, et il y aura moins de ces bagarres d’amendements qui conduisent parfois à des échecs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – M. Stéphane Mazars applaudit également.)

modification des scrutins électoraux

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais c’est un bonheur que ce soit vous qui y répondiez, madame la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Les Français, comme les parlementaires, sont aujourd'hui confrontés à de grands problèmes, en matière de fiscalité, de sécurité, d’emploi, etc.

Mme Laurence Rossignol. En matière d’UMP aussi !

M. Roger Karoutchi. De la part du Gouvernement, on ne voit pas – en tout cas nous ne voyons pas – beaucoup d’évolution. En revanche, que de créativité en matière électorale ! Un président de groupe de notre noble assemblée, appartenant à la majorité présidentielle, nous a d’ores et déjà annoncé le résultat des prochaines élections sénatoriales (Exclamations sur les travées de l'UMP.),…

M. Roger Karoutchi. … en indiquant que, du fait de la réforme, la gauche remporterait quatre sièges de plus. (M. Jean-Vincent Placé s’exclame.) Un certain nombre de présidents de conseil général affirment que la réforme prévue pour les élections cantonales défavoriserait les territoires ruraux.

M. Bruno Sido. Complètement !

M. Roger Karoutchi. La réforme prévue pour l’élection des sénateurs défavoriserait également les départements ruraux, notamment en raison de la place de la proportionnelle.

On reporte, à condition que le Conseil constitutionnel l’accepte, les élections cantonales et régionales. On réforme le mode de scrutin des élections sénatoriales. On nous annonce une réforme du mode de scrutin des élections européennes. On nous annonce l’introduction d’une part de proportionnelle aux élections législatives. On nous annonce des réformes concernant l’intercommunalité.

M. Michel Berson. Le changement !

M. Roger Karoutchi. Nous ne voyons toujours pas venir de vraies réformes économiques et sociales fondamentales pour le pays. En revanche, votre capacité d’initiative lorsqu’il s’agit de conserver le pouvoir…

M. Alain Gournac. Pour ça, ils sont forts !

M. Roger Karoutchi. … par des réformes électorales est absolument incontestable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Chantal Jouanno applaudit également. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Michel. Vous n’avez pas honte ? Et Marleix ? C’est scandaleux, oui scandaleux !

M. Roger Karoutchi. Du calme, mon cher collègue !

M. Alain Gournac. Oui, du calme !

M. Roger Karoutchi. Je sais bien que ce que je dis vous gêne, mais ne vous énervez pas,…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ce n’est pas bon pour le cœur !

M. Roger Karoutchi. … ce n’est effectivement pas bon pour le cœur ! (M. Jean-Pierre Michel s’exclame.)

Madame la ministre, ne serait-il pas temps que le Gouvernement fasse une pause dans ses réformes électorales ? Voyons d'abord ce que nous devons faire au niveau économique et social, et laissez les électeurs exprimer leurs opinions dans le cadre des systèmes électoraux en place, qui n’ont pas démérité.

M. David Assouline. Vous les avez charcutés !

M. Roger Karoutchi. En tout cas, nous attendons une confirmation de la part du Gouvernement, la confirmation que les réformes électorales ne seront pas menées au pas de charge, au risque d’être censurées par le Conseil constitutionnel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Chantal Jouanno et M. Jacques Legendre applaudissent également. – Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur Karoutchi, je ne relèverai pas tous les propos que vous avez tenus. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Catherine Procaccia. Les questions appellent des réponses !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le projet de loi qui a été adopté hier par la commission des lois du Sénat…

M. Jean-Pierre Sueur. Tous les articles ont été adoptés !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … prévoit effectivement de reporter à 2015 les élections cantonales et régionales. Je vous rappelle que, à la suite de l’abrogation du conseiller territorial,…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Vous allez finir par le regretter !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … sur l’initiative du Sénat…

M. Jean-Michel Baylet. Eh oui ! Il a bien fait de le supprimer !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … et à une très large majorité dans les deux chambres, il était prévu que cinq élections se tiennent en 2014,…