Sommaire

Présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires :

MM. Alain Dufaut, Jacques Gillot.

1. Procès-verbal

2. Décès d'un ancien sénateur

3. Dépôt d'un rapport

4. Saisine du conseil constitutionnel

5. Démission de membres de commissions et candidatures

6. Conventions internationales. – Adoption définitive en procédure d'examen simplifié de quatre projets de loi dans le texte de la commission

Convention relative à l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA). – Adoption définitive de l’article unique du projet de loi

Accord relatif aux pêches dans le sud de l’océan Indien. – Adoption définitive de l’article unique du projet de loi

Accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne. – Adoption définitive de l’article unique du projet de loi

Convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires. – Adoption définitive de l’article unique du projet de loi

7. Financement de la sécurité sociale pour 2013. – Discussion d'un projet de loi

Discussion générale : MM. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget ; Mmes Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Carle

Mmes Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille ; Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion ; MM. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales ; Ronan Kerdraon, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social ; Mme Isabelle Pasquet, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille ; M. Ronan Kerdraon, en remplacement de Mme Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance-vieillesse ; MM. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et maladies professionnelles ; Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances.

Mme Marisol Touraine, ministre.

Demande de réserve

Demande de réserve des articles 11 à 20 et des amendements tendant à insérer des articles additionnels à ces articles. – Mmes Marisol Touraine, ministre ; Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. – La réserve est ordonnée.

Discussion générale (suite)

MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud, M. Alain Milon, Mme Catherine Génisson, M. Dominique Watrin, Mme Muguette Dini, M. Jean-Pierre Plancade.

Mme la présidente de la commission.

8. Demande d’avis sur un projet de nomination

9. Nomination de membres de commissions

Suspension et reprise de la séance

10. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi organique

11. Financement de la sécurité sociale pour 2013 – Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale (suite) : MM. Jean Desessard, Philippe Bas, Mmes Michelle Meunier, Laurence Cohen, M. Serge Dassault, Mmes Samia Ghali, Catherine Procaccia, Patricia Schillinger, MM. René-Paul Savary, Jacky Le Menn, Jean-Étienne Antoinette, Jean-Luc Fichet.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.

Clôture de la discussion générale.

première partie

Article 1er

Mme Isabelle Pasquet.

Adoption de l'article.

Article 2 et annexe A

M. Dominique Watrin.

Adoption de l'article et de l’annexe A.

Adoption de la première partie du projet de loi.

Levée d’une demande de réserve

Mme Marisol Touraine, ministre.

Renvoi de la suite de la discussion.

12. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires :

M. Alain Dufaut,

M. Jacques Gillot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Décès d'un ancien sénateur

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean-Pierre Tizon, qui fut sénateur de la Manche de 1983 à 1996.

3

Dépôt d'un rapport

M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre, en application de l’article 145 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, le rapport évaluant les effets péréquateurs des dotations de péréquation verticale et du fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des finances et à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.

Il est disponible au bureau de la distribution.

4

Saisine du conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil Constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 novembre 2012, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution de la loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc (2012-657 DC).

Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

5

Démission de membres de commissions et candidatures

M. le président. J’ai reçu avis de la démission de M. Vincent Capo-Canellas, comme membre de la commission des affaires économiques, et de M. Jean-Claude Merceron, comme membre de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

J’informe le Sénat que le groupe de l’UDI-UC a fait connaître à la présidence le nom des candidats qu’il propose pour siéger :

- à la commission des affaires économiques, en remplacement de M. Vincent Capo-Canellas, démissionnaire ;

- à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique, en remplacement de M. Jean-Claude Merceron, démissionnaire.

Ces candidatures vont être affichées et les nominations auront lieu conformément à l’article 8 du règlement.

6

Conventions internationales

Adoption définitive en procédure d’examen simplifié de quatre projets de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de quatre projets de loi tendant à autoriser la ratification de conventions internationales.

Pour ces quatre projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

convention relative à l'agence pour la sécurité de la navigation aérienne en afrique et à madagascar (asecna)

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA)
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention relative à l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) (ensemble sept annexes), signée à Libreville, le 28 avril 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA)
 

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) (projet n° 455 (2011-2012), texte de la commission n° 76, rapport n° 75).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

accord relatif aux pêches dans le sud de l'océan indien

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord relatif aux pêches dans le sud de l'océan Indien
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord relatif aux pêches dans le sud de l'océan Indien, signé à Rome, le 7 juillet 2006, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord relatif aux pêches dans le sud de l'océan Indien
 

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord relatif aux pêches dans le sud de l’océan Indien (projet n° 714 (2011-2012), texte de la commission n° 78, rapport n° 77).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

accord sur le transport aérien entre le canada et la communauté européenne

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne et ses États membres
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne et ses États membres (ensemble trois annexes et deux déclarations), signé à Bruxelles, le 17 décembre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne et ses États membres
 

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord sur le transport aérien entre le Canada et la Communauté européenne et ses États membres (projet n° 715 (2011-2012), texte de la commission n° 80, rapport n° 79).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

convention de hong kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention internationale de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires (ensemble une annexe), adoptée à Hong Kong, le 15 mai 2009, signée par la France à Londres, le 19 novembre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires (projet n° 719 (2011-2012), texte de la commission n° 82, rapport n° 81).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires
 

7

 
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2013

Discussion d'un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (projet n° 103, rapport n° 107, avis n° 104).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Demande de réserve

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale examiné aujourd’hui par la Haute Assemblée s’inscrit dans une stratégie de retour à l’équilibre des finances publiques, tout en préservant naturellement les priorités affectées à la politique de protection sociale du Gouvernement.

Le redressement des finances publiques est une nécessité, comme cela a été dit à plusieurs reprises du haut de cette tribune, d’abord parce que la France a donné sa parole et qu’un grand pays doit respecter ses engagements.

Il est aussi indispensable, car notre pays se doit de rétablir sa souveraineté, qui a été au moins en partie aliénée au profit d’institutions financières et d’agences de notation. Retrouver cette souveraineté, c’est rendre la parole au seul vrai décisionnaire des politiques de ce pays, c'est-à-dire au peuple.

Le redressement des finances publiques est aussi un impératif moral. Comment accepter que les générations futures, par les impôts qu’elles devront acquitter, remboursent des dépenses engagées par les générations qui les ont précédées, d’autant que ces dépenses sont moins des dépenses d’investissement que des dépenses de fonctionnement ?

Enfin, le désendettement de notre pays est un impératif pour la compétitivité de nos entreprises et donc de la France, tant il est vrai que la puissance publique depuis maintenant de nombreuses années lève trop de liquidités sur le marché. C’est autant d’argent en moins pour l’investissement dans le secteur productif.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s’inscrit donc dans la stratégie de redressement des comptes publics engagée par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, sous l’autorité, bien évidemment, du Président de la République, François Hollande.

Convenons qu’il y avait une certaine urgence à mettre en œuvre une telle politique au vu de l’aggravation du déséquilibre des finances publiques ces dernières années. Et la protection sociale a, hélas ! contribué à cette dégradation.

Entre 2002 et 2012, près de 160 milliards d’euros de dettes supplémentaires ont été contractés par les différentes administrations de sécurité sociale, qu’il a fallu financer en levant des fonds sur les marchés financiers : 160 milliards d’euros qu’il faudra désormais rembourser ; 160 milliards d’euros qui, d’ailleurs, ont été transférés à la CADES, une CADES dont la durée de vie a été prolongée de 2021 à 2024 lorsque la majorité précédente a décidé de revenir sur la règle d’or sociale. Pourtant, c’est cette même majorité qui avait adopté il y a quelques années ladite règle d’or, qui imposait de ne transférer de nouvelles dettes à la CADES qu’à la condition de transférer parallèlement des recettes supplémentaires de façon à amortir la dette ainsi contractée. Tel ne fut pas le cas. Et l’on sait que, si une dette considérable a été transférée à la CADES, ce fut sans recettes supplémentaires en vue de l’amortissement, rendant obligatoire l’allongement de la durée de vie de la caisse, c'est-à-dire l’appel aux générations futures pour payer les dépenses de fonctionnement contractées par les générations actuelles.

Le Gouvernement s’inscrit en rupture avec cette politique qui n’a que trop duré.

Il est vrai que, au cours des cinq dernières années, la crise a été pour beaucoup dans la dette supplémentaire de 160 milliards d’euros encore que, entre 2002 et 2007, ce sont près de 70 milliards d’euros de dettes qui furent contractés par les autorités du pays alors même que la crise n’avait pas encore éclaté.

S’il est donc intellectuellement honnête de convenir que la crise fut en partie responsable de ces dettes supplémentaires, il n’est pas moins honnête d’affirmer que les politiques publiques menées depuis 2002 ont contribué par elles-mêmes à l’aggravation de la situation. Puis-je rappeler qu’en 2002, en 2001, en 2000 la protection sociale, tous régimes confondus, était excédentaire, qu’elle n’a été déficitaire que par la suite, pour devenir très gravement déficitaire, et enfin déficitaire de manière insupportable ?

Il faut rompre avec les politiques de financement à crédit des mesures de protection sociale.

Deuxième rupture par rapport aux politiques passées, vous l’aurez sûrement remarqué, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit pas de déremboursement, ni l’instauration de nouvelles franchises ou de taxes qui frapperaient aveuglément la grande majorité de nos concitoyens dans des proportions insupportables. On le sait, il y a cinq ans, les franchises médicales furent instituées. La recette était de 1 milliard d’euros. On le sait également, ces dernières années, et à deux reprises, une taxe sur les mutuelles fut instaurée, avec un rendement de 2,2 milliards d’euros en année pleine. Bref, ce sont les assurés, les patients, qui ont été sollicités, non seulement par ces mesures de recettes, mais également par des mesures de déremboursement puisque, sous l’empire de la majorité précédente, le taux de protection sociale a diminué de 1,7 %.

Tel n’est pas la politique du Gouvernement, qui souhaite maintenir le taux de protection sociale tout en tentant de redresser les comptes publics et ceux de la protection sociale.

Qu’il me soit permis à présent de développer ces divers points.

Le déficit tendanciel au titre du régime général et du fonds de solidarité vieillesse est en 2012 de 19,7 milliards d’euros, alors que le déficit voté l’an dernier dans la loi de financement de la sécurité sociale avait été fixé à 17,4 milliards d’euros.

Cette aggravation dans l’exécution appelle des mesures correctrices, que Mmes Marisol Touraine, Dominique Bertinotti, Marie-Arlette Carlotti et moi-même allons vous présenter. Elles permettront de réduire ce déficit tendanciel de 19,7 milliards d’euros à 13,9 milliards d’euros en exécution. Si ce déficit reste important, convenons toutefois que l’amélioration est considérable. C’est donc un effort de 5,8 milliards d’euros que le Gouvernement demande au Parlement de bien vouloir approuver par son vote, afin de commencer à apurer les déficits publics que notre pays a accumulés et qu’il va devoir supporter encore quelques années, je le crains.

Cet effort de 5,8 milliards d’euros consiste d’abord en économies dans la dépense.

Ainsi, le taux d’évolution de l’ONDAM a été fixé à 2,7 %, ce qui permettra de réaliser l’année prochaine une économie de 2,4 milliards d’euros, qui est loin d’être négligeable. J’ai entendu dire, ici ou là, que cet objectif serait encore fixé à un niveau trop élevé. Je ferai simplement remarquer qu’entre 2007 et 2012 l’évolution moyenne de l’ONDAM a été, non de 2,7 % ni davantage de 2,8 % ou de 2,9 %, mais bien de 3,3 % d’une année sur l’autre.

En ce début de mandature, il semble que le gouvernement de Jean-Marc Ayrault prenne plus que le premier gouvernement Fillon la mesure de l’état très préoccupant de nos finances sociales en fixant un ONDAM, certes exigeant, mais qui ne risque pas de compromettre les politiques de santé publique que nous entendons mettre en œuvre et sur lesquelles Marisol Touraine reviendra tout à l’heure.

Cette économie de 2,4 milliards d’euros ne suffira pas pour atteindre l’effort de 5,8 milliards d’euros que je viens d’indiquer. C’est la raison pour laquelle sont prévues des mesures de recettes supplémentaires sur lesquelles je reviendrai dans un instant.

Qu’il me soit permis de préciser que, en dépit de cette politique très volontariste de retour à l’équilibre de nos finances publiques, les priorités du gouvernement de Jean-Marc Ayrault inscrites dans ce PLFSS ont été financées sans recours à l’emprunt.

C’est vrai pour l’allocation de rentrée scolaire, l’ARS, augmentée de 25 %. Cette mesure, qui représente un coût de 450 millions à 480 millions d’euros, sera financée par un effort demandé aux ménages bénéficiant du quotient familial, puisque le plafond du quotient familial sera abaissé de 2 336 euros à 2 000 euros.

Cette somme de 450 millions d’euros n’est pas soustraite aux familles en vue d’abonder le régime général, de financer une autre politique que la politique familiale. Cet effort demandé à certaines familles…

M. Gilbert Barbier. Les familles « riches » ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. … permettra à celles qui en ont davantage besoin d’avoir une vie un peu moins dure, dans la mesure où ce sont les enfants scolarisés de ces familles qui bénéficieront d’une aide supplémentaire.

C’est donc dans le cadre de la politique familiale lui-même que ce transfert s’effectue.

C’est pourquoi je suis un peu étonné quand j’entends dire que cette mesure participerait d’une « politique contre les familles », qu’elle contribuerait à mettre à bas la politique familiale mise en œuvre depuis si longtemps dans notre pays. Je le répète, il ne s’agit que d’un transfert de certaines familles vers d’autres, transfert qui s’intègre pleinement dans la politique familiale.

Cet étonnement ne peut que croître lorsque l’on veut bien se souvenir que la branche famille, excédentaire en 2002, était déficitaire l’année dernière, comme elle l’est, hélas, cette année encore ! Ceux-là mêmes qui nous accusent de vouloir mettre à bas la politique familiale sont précisément ceux qui, par leurs décisions, ont abouti à rendre déficitaire la branche famille.

Cet étonnement grandit encore lorsque l’on fait l’effort de se rappeler que ces mêmes personnes, à l’occasion des lois de finances et de financement pour 2012, ont sous-indexé les prestations familiales, ce qui a entraîné une perte de pouvoir d’achat pour l’ensemble des familles de près de 500 millions d’euros. Entre ceux qui déplacent 480 millions d’euros de certaines familles vers d’autres et ceux qui, ces dernières années, ont laissé la branche famille devenir déficitaire, pour ensuite sous-indexer les prestations familiales et, par leurs décisions, amputer le pouvoir d’achat des familles de près de 500 millions d’euros, je laisse le soin aux parlementaires de juger. Lesquels, finalement, ont une politique familiale cohérente ? Lesquels, en revanche, ont mené une politique familiale qui, pour enthousiaste qu’elle ait pu paraître dans les termes, l’a été un peu moins dans la réalité des faits ?

Autre mesure d’une grande portée symbolique : la possibilité pour des salariés ayant commencé à travailler très jeunes de partir en retraite à soixante ans. Cette mesure non plus n’est pas financée par l’endettement ; elle l’est par un relèvement de 0,1 point des cotisations salariales et patronales. On peut critiquer ce relèvement des cotisations mais on ne peut certainement pas reprocher au Gouvernement de mettre en œuvre des politiques financées par l’emprunt. Cette dernière critique, en revanche, peut s’appliquer à nombre de décisions prises ces dernières années.

J’en viens à la partie de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 consacrée aux recettes, qui se décline au travers de plusieurs chapitres.

Une première série de mesures relève de l’équité la plus élémentaire : je veux parler de la réforme du régime social des indépendants, le RSI. Je tiens d’emblée à préciser que l’ensemble de ces mesures a été approuvé par le conseil d’administration du RSI. C’est un point très important, qui mérite d’être souligné.

Ce projet de réforme a été approuvé parce qu’il comporte des mesures de justice élémentaire auxquelles il me paraît très difficile de s’opposer. D’abord, cette réforme profitera à 4,5 millions d’indépendants qui ne font pas partie des plus favorisés, puisque la cotisation minimale, en cas de chiffre d’affaires nul ou très faible, sera diminuée. De l’ordre de 940 euros, cette cotisation passera à un peu plus de 300 euros pour les indépendants n’ayant réalisé aucun chiffre d’affaires et augmentera progressivement jusqu’à un chiffre d’affaires de 36 000 euros. Bref, pour 4,5 millions de nos concitoyens relevant de ce régime, il s’agit donc incontestablement d’une amélioration, d’un soulagement au regard des cotisations qu’ils doivent acquitter.

Par ailleurs, en demandant aux auto-entrepreneurs de cotiser au titre de la protection sociale de la même manière que celles et ceux avec qui ils sont en concurrence – pour l’instant, relativement déloyale –, nous faisons également preuve d’équité. Aligner les cotisations des auto-entrepreneurs sur les cotisations de ceux qui exercent les mêmes métiers dans le commerce ou dans les services fera que la concurrence entre ces professionnels sera la moins faussée possible.

Il demeure que les auto-entrepreneurs conservent des avantages incontestables : d’abord, des facilités déclaratives qui, à mon sens, sont de bon aloi ; ensuite – c’est un avantage considérable –, l’absence de cotisation minimale en cas de chiffre d’affaires nul.

Une autre mesure de justice concerne ceux des indépendants qui, à l’autre extrémité de la distribution des revenus, ne cotisent pas sur la totalité des revenus qu’ils perçoivent. On le sait, la cotisation est plafonnée puisque, au-delà de 180 000 euros, aucune cotisation n’est appelée. Il vous est proposé d’opérer un déplafonnement, mesdames, messieurs les sénateurs, afin que les indépendants, comme tous les autres actifs de notre pays, cotisent sur l’ensemble de leurs revenus.

C’est une mesure de justice élémentaire, même si j’admets que, pour certaines professions – je pense à certains avocats –, l’effort sera incontestablement assez rude pour l’année prochaine. Mais comment pourrait-on justifier cette libéralité consentie à certains professionnels lorsque de lourds efforts sont requis de tant de nos concitoyens, et alors même que ceux à qui est demandé cet effort supplémentaire font partie des actifs disposant des revenus les plus élevés ?

Une autre mesure de justice et d’équité consiste à réintégrer dans l’assiette sociale un certain nombre d’éléments afin de rendre plus justes et plus compréhensibles les dispositifs en vigueur.

Les frais professionnels sont déjà déduits du résultat des sociétés. Or les indépendants qui animent ces sociétés déduisent de nouveau ces frais professionnels non seulement de leur assiette fiscale mais également de leur assiette sociale. Il vous est proposé de réintégrer ces frais dans leur assiette sociale.

Enfin, une autre mesure d’équité s’appliquera à ces professionnels lorsqu’ils sont rémunérés sous forme de dividendes. On estime en effet que, au-delà d’un versement en dividendes excédant 10 % des fonds propres de l’entreprise, il s’agit moins de dividendes que d’éléments de revenus de type salarial et que, comme tels, ces revenus doivent être soumis aux cotisations salariales.

Voilà la réforme qui vous est proposée pour le régime social des indépendants. La recette qui en découlera pour les régimes de protection sociale est incontestable. Elle est nécessaire. J’ai tenté, en vous présentant l’économie de cette réforme, de vous convaincre que celle-ci était bien fondée sur des critères de justice et d’équité difficilement contestables.

Demander à nos concitoyens retraités de contribuer, faiblement mais réellement, par une taxe additionnelle, à la protection sociale participe également de l’équité. C’est l’anticipation d’une réforme d’ampleur que mes collègues présenteront très prochainement au Parlement. Cette contribution des retraités à la solidarité nationale a été portée à 0,30 %. On sait qu’elle ne touche que les retraités non seulement imposables mais acquittant effectivement l’impôt, c’est-à-dire ceux qui sont astreints à un taux de CSG de droit commun. Le rendement est important. L’effort est réel mais je crois que, en conscience, on peut demander cet effort à nos concitoyens retraités dans la mesure où, je le répète, tous les citoyens sont appelés à contribuer au redressement nécessaire de notre pays.

Des mesures de santé publique sont également prévues : relèvement des droits sur le tabac et taxe sur la bière.

Sur le tabac, là encore, une réforme structurelle vous est proposée qui consiste à porter à 15 % la part spécifique de l’imposition. En France, les droits sur le tabac ont une particularité par rapport à ceux qui sont appliqués chez nos voisins : la part proportionnelle est plus importante que la part spécifique, ce qui a deux conséquences en cas de relèvement des prix du tabac.

La première est que les cigarettes les plus chères augmentent davantage que les cigarettes les moins chères, ce qui se traduit inévitablement par un déport du marché vers les cigarettes les moins chères ; l’effet en termes de santé publique n’est donc pas celui que nous pourrions espérer. Cette politique de santé publique est celle qu’ont menée tous les gouvernements depuis pratiquement une vingtaine d’années.

La deuxième conséquence préjudiciable, c’est que ce déport vers les cigarettes les moins chères ampute les recettes pour la puissance publique à due concurrence. Je le répète, il n’est pas souhaitable, lorsqu’une décision est prise en en espérant une recette, que celle-ci ne soit pas au rendez-vous.

C’est donc une réforme de structure qui est proposée, réforme qui revient à harmoniser la fiscalité propre aux droits du tabac en France avec les systèmes appliqués ailleurs, notamment en Europe.

J’ajouterai une précision concernant le tabac à rouler, caractéristique des politiques de santé publique menées ces dernières années en matière de lutte contre le tabagisme : quand le prix des cigarettes en paquet classique augmentait, celui du tabac à rouler, dont on sait qu’il est plus nocif que le tabac en cigarettes préconditionnées, était affecté de droits inférieurs. Nous souhaitons donc harmoniser progressivement les droits sur le tabac à rouler, d’abord en relevant le droit d’accise. À terme, le tabac à rouler sera frappé des mêmes droits que les cigarettes. Je crois que, là encore, cette politique ne peut être que comprise, en tout cas, j’en forme le vœu.

La taxe sur la bière a suscité à l’Assemblée nationale une discussion au demeurant tout à fait intéressante. J’indique, pour la bonne clarté du débat, qu’il s’agit d’un droit d’accise, qui ne compromet en rien la compétitivité de nos brasseries, ni leur capacité d’exportation, puisque les droits d’accise sont perçus là où le produit est consommé ; dès lors que c’est en Grande-Bretagne, par exemple, que telle brasserie du nord de la France exporte ses produits, c’est aussi en Grande-Bretagne que la bière est taxée au titre des droits d’accise et non pas en France.

Cette taxe ne soulève donc aucun problème en termes de compétitivité ou de capacité d’exportation de nos entreprises qui produisent de la bière. La question n’est pas là.

La question est bien de savoir si, pour des raisons de santé publique notamment, il ne serait pas légitime d’augmenter les droits sur la bière lorsque l’on sait que les droits d’accise sur la bière en France sont parmi les plus faibles d’Europe. Ils sont deux, trois, voire quatre fois plus faibles qu’en Belgique, qu’aux Pays-Bas qu’en Grande-Bretagne ou qu’en Irlande. En Allemagne, les droits sont comparables ou moins élevés. En tout cas, dans les pays où les droits sont plus élevés, ceux qui apprécient de boire de la bière ne jugent pas ces droits hautement scandaleux. Je pense que la même réaction interviendra lorsque cette disposition aura été votée et mise en œuvre.

Quoi qu’il en soit, nous proposons une augmentation de cinq centimes pour un demi titrant 4,5 degrés d’alcool ; il nous semble que cet effort, pour réel qu’il soit, est néanmoins tout à fait supportable.

J’en viens, enfin, au dernier train de mesures relatif aux régimes de retraite. Certains de ces régimes sont structurellement déficitaires et ne pourront, sans effort complémentaire, verser en 2013 les prestations qu'ils doivent assumer. C'est le cas des caisses de retraite des agents des collectivités locales, des professions libérales et des électriciens et gaziers.

S’agissant de ces trois régimes, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous soumettra des dispositions qu'il vous demandera de bien vouloir adopter eu égard à leur impérieuse nécessité. Je conçois bien qu’il n'est jamais très agréable de demander aux uns et aux autres de cotiser davantage pour garantir des prestations. Mais il est du devoir du Gouvernement de proposer les augmentations que nous examinerons ultérieurement, afin précisément d’assurer le versement effectif des prestations en 2013.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, telle est l'économie globale du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je me devais de vous rappeler le contexte financier et budgétaire dans lequel s'inscrit ce texte, de vous indiquer les tendances des dernières années, tendances avec lesquelles il faut rompre, et de vous préciser les recettes attendues des dispositions que nous vous soumettons. Ces recettes sont nécessaires pour diminuer le déficit et garantir un régime de protection sociale, dont chacun sait bien, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège au sein de la Haute Assemblée, qu’il est l'un des éléments essentiels de notre unité nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, par mon propos, qui complète celui de mon collègue Jérôme Cahuzac, je souhaite attirer votre attention sur les enjeux des politiques de retraite, de santé et de famille que nous vous proposons dans ce premier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la mandature.

Avec ce texte, qui marque une inversion par rapport à la politique menée au cours des années précédentes, le Gouvernement a l’ambition de répondre à une attente, à savoir la réhabilitation de l’expression « protection sociale », très dévoyée ces derniers temps. D’aucuns ont parlé à n’en plus finir de « rupture », une rupture non seulement avec le passé, mais également avec les fondements de notre contrat républicain et les valeurs dominantes de notre pays. En son nom, de très nombreuses régressions ont été justifiées.

Une régression sociale d’abord, lorsqu’un nombre croissant de nos concitoyens rencontrent des difficultés financières pour faire face aux aléas de la vie, à la vieillesse ou à la maladie.

Une régression quant à nos valeurs fondatrices ensuite, lorsque le discours sur l’assistanat devient un leitmotiv et sert surtout d’alibi pour ébranler les piliers de notre système de protection.

Une régression politique, enfin, lorsque le renoncement à notre modèle social semble masqué par des choix tactiques, qui n’ont pas été soumis à nos concitoyens.

Le bilan du dernier quinquennat est sans appel. Les droits sociaux n’ont cessé de reculer et – Jérôme Cahuzac l’a indiqué – la dette a atteint un niveau record. La situation des Français est doublement détériorée : ils doivent maintenant payer plus alors qu’ils sont moins bien protégés.

Le recul des droits sociaux s’est traduit non seulement par une réforme injuste des retraites qui a frappé en particulier celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt, mais aussi par la limitation de l’accès aux soins et l’affaiblissement du niveau de protection de nos concitoyens.

En quoi consiste la facture dont nous avons hérité ? Un déficit cumulé de 90 milliards d’euros sur le seul dernier quinquennat, déficit qui pèse sur les choix que nous devons aujourd'hui effectuer.

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale marque une inversion radicale des priorités : nous faisons le choix, assumé, de ne pas faire porter d’efforts nouveaux sur les assurés. Alors même que nous sommes confrontés à une double exigence – faire les économies que requiert la situation budgétaire difficile de notre pays et apporter de nouvelles réponses sociales aux attentes de nos concitoyens –, nous avons donc choisi de ne pas demander aux assurés de renoncer à des droits ou à des protections.

Je le dis sans ambages, pour nous, la protection sociale est non pas un fardeau, mais un atout dans la compétition internationale. Puisque nous sommes engagés depuis quelque temps dans un débat sur la compétitivité de l’économie française, je tiens à répéter en cet instant de manière extrêmement forte que, même si notre compétitivité a incontestablement reculé au cours des dernières années, le niveau de notre protection sociale constitue une manière de renforcer l’attractivité de la France et la situation des salariés. Au fond, c’est la certitude d’être protégés qui permet à nos concitoyens de prendre des risques et qui, au niveau collectif, garantit un système de solidarité important.

La ligne d’horizon du projet de loi de financement de la sécurité sociale, c’est bien le renforcement de la protection des Français.

Protéger les citoyens consiste d’abord à donner à chacun d’entre eux la garantie d’avoir accès aux soins sans obstacle financier, social ou territorial.

La progression de l’ONDAM, c'est-à-dire des dépenses de santé et d’assurance maladie, pour 2013 a été fixée à 2,7 %. Je sais que l’annonce de ce taux, dont le niveau est supérieur à celui de 2,5 % arrêté auparavant, a suscité de nombreuses discussions. De la sorte, nous voulons marquer la priorité que nous donnons à la santé. Par rapport à 2012, ce sont ainsi 4,6 milliards d’euros supplémentaires qui seront investis pour la santé de nos concitoyens. La croissance des dépenses consacrées à l’hôpital sera par ailleurs strictement équilibrée avec celle des soins de ville, soit légèrement moins de 2 milliards d’euros dans les deux cas. Enfin, 650 millions d’euros supplémentaires seront affectés au secteur médico-social.

Dans le même temps, comme l’a rappelé Jérôme Cahuzac, nous prévoyons d’allouer 1,5 milliard d’euros de recettes supplémentaires à l’assurance maladie grâce, notamment, à la mise en place de taxes comportementales et à la suppression de niches sociales. Voilà, là encore, un signe de la priorité que constitue la santé des Français pour le Gouvernement.

Protéger les Français, c’est également assurer la pérennité de notre système de retraites par répartition. La consolidation de ce système nécessite de garantir le contrat entre les générations, lequel est aujourd'hui – il faut bien le dire – peu lisible et relativement incertain pour les plus jeunes. Alors qu’ils sont âgés de trente ou de trente-cinq ans, certains d’entre eux se demandent s’ils pourront continuer à bénéficier de la solidarité nationale et collective une fois arrivés à l’âge de la retraite.

L’une des exigences qui s’imposent à nous, c’est d’apporter, grâce aux mesures que nous vous proposons, une visibilité durable à nos systèmes de retraite, afin de garantir aux Français qu’ils peuvent compter sur la solidarité nationale.

Or la réforme de 2010, qui devait résoudre toutes les difficultés, a, en réalité, profondément fragilisé notre système de retraite. Si aucune mesure n’avait été prise depuis notre arrivée aux responsabilités, le déficit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse s’élèverait aujourd'hui à 10,2 milliards d’euros. Nous le ramènerons à 6,6 milliards d’euros, en consacrant 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires pour l’année 2013, ce qui est un signe de nos priorités, de notre engagement et de notre volonté.

Le Fonds de solidarité vieillesse et les différents régimes de retraite bénéficieront d’une partie des recettes nouvelles. Le financement de la politique de lutte contre la perte d’autonomie sera complété par la cotisation que nous souhaitons instaurer sur les retraites et qui concernera les retraités qui sont aujourd'hui imposables.

Je tiens à le dire, je suis pleinement consciente des difficultés auxquelles sont aujourd'hui confrontés les conseils généraux dans la mise en œuvre de la politique en faveur des personnes âgées. C'est la raison pour laquelle, à l’occasion d’une rencontre avec les membres de l’Association des départements de France, le Président de la République a annoncé la création d’un fonds de soutien exceptionnel aux départements qui connaissent des difficultés financières, doté de 170 millions d’euros.

Pour le long terme, lors de cette même rencontre, il a été décidé d’engager une concertation entre, d’un côté, le Gouvernement et, de l’autre, les conseils généraux pour déterminer les modalités d’un financement pérenne et durable de l’ensemble des allocations universelles. Nous pensons aux allocations dédiées au handicap – Marie-Arlette Carlotti les évoquera certainement –, mais évidemment aussi à l’allocation personnalisée d’autonomie.

À partir du moment où le Gouvernement fait le choix, affirmé et assumé, de ne pas faire reposer sur des assurances privées ou sur la capacité privée des Français la responsabilité de la prise en charge de la perte d’autonomie et, en fin de parcours, de la dépendance, c’est par un mode de financement solidaire qu’il faut envisager la réforme de la prise en charge de la perte d’autonomie.

Qui dit solidarité dit contribution de l’ensemble de nos concitoyens, dès lors que leurs revenus le leur permettent. C’est dans cet esprit que nous avons souhaité les mettre à contribution, y compris les retraités, en tout cas, et j’insiste sur ce point, ceux d’entre eux qui sont imposables.

L’assainissement financier des régimes de retraite n’est pas une fin en soi, même si nous devons garder à l’esprit cette exigence. Il nous revient aujourd’hui de réparer des injustices qui touchent certaines catégories de retraités. C’est pourquoi le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit de permettre aux travailleurs non salariés agricoles de bénéficier de points de retraite gratuits en compensation des périodes d’invalidité et de maladie et de donner aux travailleurs de l’amiante le droit de prendre leur retraite à soixante ans, quel que soit leur régime.

De façon plus générale, l’année 2013 sera déterminante pour garantir l’avenir de nos retraites. En consolidant les différents régimes, nous posons dès aujourd’hui, comme l’a rappelé Jérôme Cahuzac, les bases d’une concertation à venir avec les partenaires sociaux.

Protéger les Français, c’est encore donner la priorité à la famille. Dominique Bertinotti reviendra sur ce point dans quelques instants. Je tiens à le redire, la défense de la famille n’appartient à aucune formation politique. Les choix qui ont été effectués ces dernières années montrent d’ailleurs bien qu’elle n’est pas le monopole de l’actuelle opposition.

Dès le mois de juillet dernier, nous avons pris la décision d’augmenter de 25 % l’allocation de rentrée scolaire. Cette mesure a bénéficié à 5 millions d’enfants et à 3 millions de familles. Dans le même esprit, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à instaurer le tiers payant des dépenses de garde d’enfant pour les familles modestes.

Ce texte va également beaucoup plus loin, en reconnaissant l’égalité des droits. La famille doit accompagner les mutations de notre société. Si vous confirmez des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, mesdames, messieurs les sénateurs, sera créé un congé de paternité et d’accueil du jeune enfant pour ouvrir le congé de paternité à la personne qui vit avec la mère.

Au cours des années passées, le Gouvernement avait retiré 350 millions d’euros à la branche famille. À l’inverse, entre la loi de finances rectificative et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous vous proposons d’affecter 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires à cette même branche.

Protéger les Français, c’est aussi les assurer contre les risques liés au travail.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles présentera un excédent d’environ 300 millions d’euros en 2013, après avoir été déficitaire de 100 millions d’euros en 2012.

S’agissant plus particulièrement des travailleurs de l’amiante, un rapport me sera remis le 1er juillet 2013, lequel évaluera les voies d’accès à leur allocation de cessation anticipée d’activité, afin de leur rendre justice.

Protéger les Français, c’est enfin rendre réel et pleinement effectif l’accès aux droits.

À cet égard, le Gouvernement a fait le choix de renforcer l’attention qu’il porte aux problèmes rencontrés par les jeunes femmes dans le domaine de l’accès à la contraception.

Ainsi, le projet de loi que je vous présente aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, prévoit d’étendre le remboursement des moyens contraceptifs déjà remboursés, de manière à assurer une prise en charge à 100 % pour les mineures âgées de quinze à dix-sept ans révolus.

Il vise également à garantir la prise en charge à 100 % des interruptions volontaires de grossesse – les IVG – et, même si cela n’apparaît pas dans les dispositions du texte, l’ONDAM a été calculé en tenant compte de la revalorisation des actes d’IVG qui était demandée par les établissements et les professionnels de santé ; j’insiste sur ce point.

Au-delà, il s’agit pour nous d’engager des réformes de structure importantes, car nous avons le devoir de moderniser la protection sociale. En effet, nous devons faire face aux profondes évolutions que connaît notre société. Ainsi, le présent texte doit nous permettre de mieux relever les défis liés au vieillissement de la population et à l’évolution des pathologies, mais aussi de mieux répondre aux attentes des Français.

Le premier axe de la modernisation engagée consiste à renforcer notre politique d’économies.

Alors que certains nous accusent de matraquage fiscal, je tiens à rappeler de manière très claire que le PLFSS que nous présentons prévoit 2,4 milliards d’euros d’économies, dont 1 milliard d’euros portera sur la politique du médicament, via la mise en avant de la place et du rôle des génériques. Par ailleurs, la rationalisation des achats et la maîtrise des dépenses nous permettront de réaliser 650 millions d’euros d’économies à l’hôpital.

Enfin, nous réaliserons le reste des économies – soit un montant comparable à celui des économies accomplies à l’hôpital – dans le domaine de la médecine de ville, grâce à une meilleure organisation des parcours et à la maîtrise médicalisée des dépenses.

Le deuxième axe de la modernisation consiste à diminuer progressivement le reste à charge pour les Français, soit la somme qui demeurera à leur charge après le remboursement de la sécurité sociale et, le cas échéant, des mutuelles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n’accepte pas qu’une part croissante de nos concitoyens soit amenée à renoncer à se soigner pour des raisons financières. Il est de notre responsabilité commune de permettre à chacun d’avoir accès à des soins de qualité au tarif opposable.

C’est d’ailleurs le sens de la négociation relative aux dépassements d’honoraires, laquelle a abouti, le 25 octobre dernier, à la signature d’un accord par la majorité des syndicats représentatifs. Grâce à ce dernier, les Français pourront, demain, être mieux soignés, mieux pris en charge et mieux accompagnés.

Tout d’abord, cet accord rend désormais impossibles les dépassements abusifs.

J’interviens à cette tribune alors que certains professionnels de la santé sont aujourd'hui mobilisés…

M. Gilbert Barbier. En grève, voulez-vous dire !

Mme Marisol Touraine, ministre. Or l’ensemble des professionnels, des médecins ou des représentants des syndicats que j’ai pu rencontrer m’ont indiqué la nécessité de mettre un terme aux dépassements abusifs, dont ils reconnaissent unanimement eux-mêmes qu’ils ont des répercussions négatives sur l’ensemble de la profession.

Il me paraît donc étonnant que certains ne comprennent pas, voire refusent, l’institution d’un seuil au-delà duquel les dépassements seront considérés comme abusifs alors même que la sanction des 5 % de médecins pratiquant des tarifs qui ne sont pas défendables suscite l’unanimité ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

De plus, toujours dans le cadre de l’accord susvisé, les médecins se sont engagés à geler les tarifs de leurs consultations, dès lors qu’ils souscriraient au contrat d’accès aux soins. En retour, leurs patients seront mieux remboursés par l’assurance maladie, et j’insiste sur ce point. En outre, une série d’actes pratiqués en secteur 1, c’est-à-dire remboursés par la sécurité sociale, seront revalorisés.

Certains soutiennent que des dépassements d’honoraires sont effectués parce que les tarifs de la sécurité sociale n’ont pas été revalorisés au cours des années passées.

Or, d’une part, dans le contexte économique actuel, que personne ne peut ignorer – d'ailleurs, certains évoquent la nécessité de tenir compte de la gravité de la situation –, je ne vois pas comment nous pourrions, en quelques semaines, ni même en quelques mois, opérer le rattrapage de décennies de non-augmentation ou d’insuffisantes augmentations de ces tarifs !

D’autre part, contrairement à ce que certains voudraient laisser croire, l’accord qui a été signé le 25 octobre dernier prévoit une revalorisation, en particulier d’actes de chirurgie, au cours des trois années à venir.

Par ailleurs, toujours selon cet accord, 5 millions de personnes supplémentaires bénéficieront de consultations au tarif remboursé par la sécurité sociale, même si leur médecin pratique des dépassements d’honoraires : au total, demain, 10 millions de Français auront droit au tarif de la sécurité sociale lorsqu’ils consulteront leur médecin.

Le troisième et dernier axe de la modernisation consiste à réorganiser notre système de santé pour garantir, sur le territoire, un égal accès aux soins.

Il s’agit de réaménager la médecine de proximité et de faire en sorte de mieux structurer sa relation avec l’hôpital public.

Parce qu’il occupe une place singulière dans notre système de santé, l’hôpital public doit voir réaffirmer la spécificité de ses missions. C'est la raison pour laquelle le présent projet de loi réintroduit la notion de « service public hospitalier », ce qui a des traductions très concrètes en termes de mécanismes de financement.

Ainsi, le texte prévoit que soit mis fin à la convergence tarifaire entre établissements privés et publics. Concrètement, l’hôpital public, qui exerce des missions particulières, comme la formation ou l’accueil de personnes en grande précarité, ne sera plus financé de la même façon que les établissements privés.

À ce sujet, je tiens à souligner dans cette enceinte qu’un rapport sénatorial, adopté à l’unanimité par tous les partis représentés dans cet hémicycle, appelait, dans ses conclusions, à une révision des mécanismes de financement de l’hôpital public et de tarification à l’activité, ainsi qu’à un arrêt de la convergence tarifaire. (Plusieurs sénateurs du groupe socialiste font un signe d’assentiment.)

Cette évolution du financement est donc un élément tout à fait important.

Cela étant, la démarche de confiance que j’ai engagée s’est traduite, le 7 septembre dernier, par le lancement d’un pacte pour l’hôpital, dont l’ambition est de renouer le lien qui unit les responsables politiques à la communauté hospitalière.

Pour ce qui est de l’activité libérale pratiquée à l’hôpital public, sujet qui revient dans le débat de manière régulière, j’ai confié à Mme Dominique Laurent une mission de concertation, qui doit porter non seulement sur les honoraires pratiqués, mais aussi sur leur transparence, sur la manière dont les médecins exercent cette activité libérale, ainsi que sur l’existence de files d’attente. Sur ce dernier point, je crois qu’un consensus se dégage aujourd'hui pour considérer qu’il n’est pas normal que l’on puisse obtenir plus rapidement un rendez-vous quand on opte pour une consultation privée plutôt que pour une consultation publique.

Sur proposition de son rapporteur général, la commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement tendant à la suppression de dispositions introduites par l’Assemblée nationale, mesures qui donnaient le sentiment que le Parlement souhaitait se prononcer avant que Mme Laurent, qui vient d’engager ses travaux, ne rende ses conclusions. Souhaitant que toute sa place soit donnée à la concertation, je souscris à l’initiative de M. Daudigny.

En parallèle du rôle de l’hôpital, la place de pivot de la médecine libérale dans notre système de santé doit être réaffirmée.

Dans certains territoires, accéder à un médecin est parfois devenu difficile. Nous devons engager avec détermination le combat contre les déserts médicaux.

Sur ce sujet, je tiens à répéter dans cette enceinte que je suis fermement opposée à toute mesure de coercition : la liberté d’installation des médecins n’a jamais été et ne sera pas remise en cause par le Gouvernement. Très concrètement, dès 2013, nous prévoyons de créer 200 postes de praticiens territoriaux de médecine générale. Les députés ont amendé cette mesure pour permettre à des médecins salariés des hôpitaux, des centres de santé ou des centres mutualistes de participer à la lutte contre la désertification médicale.

Dans quelques semaines, j’aurai l’occasion d’annoncer un plan global de lutte contre les déserts médicaux, sujet auquel, mesdames, messieurs les sénateurs, je sais que vous êtes très attentifs.

Hélas, il n’existe pas de mesure miracle pour enrayer ce phénomène, qui s’est propagé au cours des dernières années. En revanche, l’adoption d’un ensemble de dispositions répondant aux attentes des jeunes professionnels nous permettra d’avancer, comme une meilleure revalorisation du travail en équipe ou une meilleure prise en compte de la localisation des soins d’urgence.

Pour terminer, dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons prévu un certain nombre de taxes comportementales, destinées à orienter l’attitude de certains de nos concitoyens à l’égard, en particulier, du tabac ou de l’alcool. Au cours de l’année prochaine sera examiné un grand projet de loi relatif à la santé publique ; il devra affirmer les principes d’organisation et les priorités de la santé publique, ainsi que la manière de mieux prendre en compte la prévention. Je souhaite que l’examen du présent texte nous permette d’amorcer ce débat.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le choix, assumé, du Gouvernement est double : engager de façon résolue les comptes sociaux pour garantir la protection des Français face aux aléas de la vie ; affirmer de manière claire notre volonté de maintenir notre système de protection sociale, sans lequel il ne saurait y avoir de pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – M. Jean-Pierre Plancade applaudit également.)

(M. Jean-Claude Carle remplace M. Jean-Pierre Bel au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Carle

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme mes collègues Jérôme Cahuzac et Marisol Touraine l’ont précédemment déclaré, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, déposé dans une période de forte contrainte budgétaire, témoigne de l’attachement du Gouvernement à la politique familiale.

Vous n’êtes pas sans savoir que la jeunesse est au cœur du projet porté par le Président de la République. La politique familiale contribuera à la réalisation de son engagement à cet égard.

Ce soutien déterminé à la politique familiale et à la jeunesse s’inscrit en rupture par rapport à la politique menée par le précédent gouvernement. (M. Henri de Raincourt s’exclame.) Ce dernier, comme Jérôme Cahuzac vient de le rappeler, a laissé le déficit se creuser, en inscrivant des dépenses supplémentaires à la charge de la branche famille, sans prévoir de recettes équivalentes. Il a ensuite retiré à cette même branche une part de contribution sociale généralisée, à l’occasion du dernier transfert de dette à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, en 2011. Enfin, il a sous-indexé la revalorisation des prestations familiales et préféré stigmatiser les familles – par exemple, en suspendant les allocations familiales – plutôt que développer le soutien à la parentalité.

Avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, nous voulons rompre avec cette politique et faire porter notre effort sur trois axes prioritaires : le rétablissement de l’équilibre financier de la branche famille, l’action en faveur des familles les plus modestes, l’engagement pour l’égalité entre les familles.

Pour ce qui concerne le premier axe, en six mois, entre la loi de finances rectificative pour 2012 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, près de un milliard d’euros de ressources nouvelles auront été affectés à la branche famille. Le déficit de cette branche aurait dû s’élever à 3,3 milliards d’euros en 2013 ; grâce à l’action du Gouvernement, il sera ramené à 2,7 milliards d’euros, ce qui annule l’incidence financière de la crise. Cet effort constitue un signe clair en direction non seulement des partenaires sociaux chargés de la branche famille, mais aussi de l’ensemble des parents ; nous le poursuivrons en respectant une trajectoire de retour de la branche famille à l’équilibre d’ici à 2017.

Le deuxième axe privilégié par le Gouvernement est l’accentuation de son action en faveur des familles les plus modestes.

Tout d’abord, Marisol Touraine l’a rappelé, la revalorisation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire a été l’une des premières mesures du quinquennat. Cette réforme juste était également responsable, puisque la disposition a été compensée par une recette nouvelle.

Ensuite, le Gouvernement cherche des solutions pour favoriser l’accès à la garde des enfants des familles modestes qui travaillent. Il envisage ainsi, dans le cadre d’une expérimentation, le versement du complément du mode de garde en tiers payant. Contraintes d’avancer les frais de garde, certaines familles modestes peuvent renoncer à faire garder leur enfant pour cette raison : l’accès à l’emploi des parents, en particulier celui des femmes, s’en trouve ainsi dégradé. Dans le même temps, et souvent sur les mêmes territoires, certaines assistantes maternelles gardent moins d’enfants qu’elles ne sont autorisées à le faire, faute de parents en mesure de procéder à l’avance de frais. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 prévoit donc, je le répète dans le cadre d’une expérimentation, que les familles disposant de ressources inférieures au revenu garanti dans le cadre du revenu de solidarité active seront dispensées de l’avance de la totalité des frais, puisque l’aide de la caisse d’allocations familiales sera directement versée à l’assistante maternelle.

Enfin, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a introduit un système qui permettra de prévenir l’expulsion des familles en difficulté sans léser les bailleurs : cette mesure s’inscrit dans la continuité de sa politique en faveur des familles modestes. Le dispositif juridique est simple : il consiste à prévoir, pour les trois allocations logement – à savoir l’aide personnalisée au logement, l’allocation de logement sociale et l’allocation de logement familiale –, un rétablissement automatique de l’allocation lorsqu’un dossier de surendettement a été déclaré recevable.

Troisième et dernier axe prioritaire, le Gouvernement s’engage en faveur de l’égalité entre les familles, avec la création d’un congé de paternité et d’accueil de l’enfant ouvert au père et au partenaire du parent contribuant à l’éducation de l’enfant. Cette mesure répond aux recommandations émises par la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, dès 2007, ainsi qu’à une exigence d’égalité entre les salariés, certaines entreprises ou collectivités locales offrant déjà ce congé, les autres ne le proposant pas. La discussion des articles nous donnera l’occasion de préciser la portée et le contenu de ce dispositif, qui ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement.

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 n’est qu’une étape. Le Gouvernement va poursuivre son action et accompagner la réflexion sur l’architecture des prestations familiales ouverte à l’occasion de la grande conférence sociale qui s’est tenue les 9 et 10 juillet dernier. À cette occasion, les partenaires sociaux ont souligné la nécessité d’une meilleure adéquation entre les dispositifs et les besoins des familles. Cette réflexion se poursuivra notamment dans le cadre d’un Haut conseil de la famille aux missions et à la composition élargies. Cette nouvelle politique conjuguera harmonieusement soutien à la natalité, participation effective des femmes à l’activité économique et protection des intérêts des familles les plus fragiles.

La politique familiale, vous le savez, ne peut se résumer aux seules prestations familiales : le Gouvernement souhaite également intensifier le développement des services aux familles, autrement dit des missions de service public à l’enfance et aux familles. Pour cela, la politique familiale doit cibler deux priorités : le renforcement de l’accueil des jeunes enfants, ainsi qu’une politique rénovée de soutien à la parentalité. Nous nous fonderons sur le travail mené dans le cadre d’une concertation citoyenne pour préparer la prochaine convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la Caisse nationale des allocations familiales prévue pour le premier trimestre de l’année 2013. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, très simplement exprimé, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale garantit un bon budget aux personnes âgées et montre que la politique de l’âge est une priorité de notre gouvernement ; il comporte 360 millions d’euros de mesures nouvelles destinées à accompagner les personnes âgées risquant une perte d’autonomie et un objectif de progression des dépenses en leur direction de 4,6 %.

Par ailleurs, avec l’inscription, dès les premiers mois de la législature, de la réforme, si longtemps attendue, de la prise en charge de la perte d’autonomie dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement prouve sa volonté de faire de la cause de l’âge un axe prioritaire de son action.

Les expérimentations des parcours de santé que ce PLFSS met en place constituent la clé de l’avenir et de la soutenabilité de notre système de santé. Dans le cadre des projets pilotes qui seront déployés seront intégrés les services au cœur de l’accompagnement des personnes âgées à domicile : les services de soins infirmiers à domicile, les SSIAD, et les services d’accompagnement et d’aide à domicile, les SAAD. Il est nécessaire de favoriser le rapprochement de ces services, afin que la réponse aux besoins de santé soit mieux coordonnée. Les élus des conseils généraux ici présents – j’ai moi-même été conseillère générale – ne le savent que trop bien.

Les services polyvalents d’aide et de soins à domicile, les SPASAD, qui regroupent aide à domicile et soins infirmiers, pourront également, dans le cadre de ces projets pilotes, déroger aux modalités réglementaires de financement et d’organisation. Un amendement en ce sens, issu d’un échange constructif entre les députés et le Gouvernement, a été voté par l’Assemblée nationale et nous nous en réjouissons. Le caractère « pilote » des projets dans lesquels pourront s’inscrire les SPASAD nous permettra de bénéficier d’enseignements utiles à l’amélioration de leur modèle de financement. Nous posons ainsi la première pierre indispensable à l’amélioration du « modèle SPASAD » et à son déploiement sur les territoires.

En commission des affaires sociales, certains d’entre vous, et en particulier M. le rapporteur Ronan Kerdraon, ont demandé qu’un rapport sur ces services polyvalents soit présenté au Parlement : je peux d’ores et déjà vous dire que je suis favorable à l’amendement déposé en ce sens.

Disons-le aussi, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale inscrit résolument la politique de l’âge dans la bataille de l’emploi.

La progression de l’objectif national de dépenses pour le secteur des personnes âgées sera de 4,6 % en 2013. Au sein de cette enveloppe, nous ouvrons 147 millions d’euros de crédits de médicalisation : concrètement, nous renforçons le nombre et la qualité des personnels encadrant les personnes âgées en établissement, ce qui permettra la création de 6 400 à 8 200 emplois dès l’année prochaine.

De plus, un nouveau fonds de restructuration de 50 millions d’euros va permettre de sauver plusieurs milliers d’emplois et de nous préparer à faire face au besoin de 300 000 emplois d’ici à 2020, tel que l’a établi la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES. Les critères de répartition de ce fonds, définis dans une circulaire, ne privilégieront – je vous le dis d’ores et déjà – que l’effort de modernisation, de professionnalisation et d’intégration dans les parcours de santé.

Le Doubs, mais aussi le Rhône, et bien d’autres départements encore, ont engagé une démarche de modernisation, que je tiens à saluer. Nous encourageons ces expérimentations, comme le montre l’arrêté dont j’ai obtenu la publication rapide pour leur permettre d’être menées en toute sécurité juridique, mais aucune d’entre elles ne doit être privilégiée au détriment des autres : toutes seront évaluées en temps voulu, en fonction de l’amélioration de la qualité du service rendu à l’usager et des conditions d’exercice des professionnels.

Enfin, vous le savez, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie inscrit dans la loi le financement de la réforme de l’autonomie, auquel elle contribuera intégralement dès 2014, de telle manière que la vie des Français, de tous les Français, personnes âgées aidées, aidants, familles, professionnels, en soit nettement améliorée. Je tiens à insister sur ce point, notamment devant les sénateurs qui aujourd’hui s’interrogent sur la justice de cette contribution : pour une personne percevant une retraite de 1 320 euros, cette contribution s’élèvera à 4 euros ; elle touchera 8,8 millions de retraités et les retraités les moins aisés, soit 7,2 millions, en seront exemptés, nous l’avons dit. Le texte du projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous l’avez constaté, a d’ailleurs évolué en ce sens à l’Assemblée nationale, et je crois que, aujourd’hui, on ne peut en aucun cas parler de mesure injuste.

Mme Éliane Assassi. C’est votre interprétation !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Les associations et syndicats de retraités que j’ai rencontrés l’entendent bien ainsi : cette disposition est aussi une mesure de solidarité intergénérationnelle; et les Français sont prêts à le comprendre. Si nous voulons réussir la réforme de la perte d’autonomie – pas seulement pour la prise en charge de la nôtre, mesdames, messieurs les sénateurs, mais aussi pour celle de nos enfants et nos petits-enfants –, cette contribution additionnelle, encore une fois mesurée et cantonnée à la moitié des retraités, est non seulement nécessaire, mais également juste, puisqu’il s’agit d’un effort dédié, qui n’aura d’autre vocation…

M. Gilbert Barbier. Que de faire payer les riches !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. … que de financer cette réforme, selon les termes mêmes du code de l’action sociale et de la famille. C’est pourquoi je vous demanderai de faire preuve de responsabilité et de cohérence sur ce sujet au cours de ces débats.

C’est une grande cause pour notre gouvernement que celle de l’âge. Plus n’est besoin d’épiloguer sur les cinq années de promesses et d’annonces du gouvernement précédent ! J’espère que nos échanges de cette semaine seront fructueux et riches. Nous nous sommes mis au travail et nous vous en donnons la preuve dès l’examen du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le redressement de nos comptes publics se fera, mais il se fera dans la solidarité et dans la justice.

Avec un ONDAM médico-social en progression de 4 % et une enveloppe de près de 9 milliards d’euros consacrée aux établissements et services médico-sociaux pour les personnes handicapées, en augmentation de 3,3 % – soit 286 millions d’euros de plus qu’en 2012 –, le Gouvernement affiche clairement son ambition : agir en faveur de nos concitoyens les plus vulnérables, malgré un contexte financier extrêmement difficile.

Ces crédits supplémentaires se répartiront de la manière suivante : outre les 35 millions d’euros de « rebasage », 126 millions d’euros de plus seront affectés aux mesures nouvelles, c’est-à-dire aux créations de places, et 122 millions d’euros le seront au soutien des établissements et des services médico-sociaux.

Parce que ce budget nous autorise à agir dans deux directions à la fois, 3 000 places nouvelles seront créées en 2013. Elles permettront d’amorcer un rééquilibrage, que nous poursuivrons au cours des prochaines années, en faveur de l’accueil des autistes, des personnes atteintes de handicap lourd, des polyhandicapés et des handicapés psychiques. Un retard certain a déjà été constaté à plusieurs reprises dans ce domaine.

Il nous faut également trouver des solutions innovantes, afin d’apporter des réponses particulières et spécifiques aux problèmes des personnes handicapées vieillissantes. Mme Delaunay et moi y travaillons. Il nous faut aussi remédier ici ou là aux disparités territoriales, que certains ont constatées dans leurs départements.

Parallèlement à la création de ces 3 000 places, nous donnerons aux structures existantes les moyens d’assurer aux personnes handicapées une prise en charge de qualité.

C’est sur ces points que nous marquons une rupture claire avec la politique du Gouvernement précédent.

Depuis deux ans, nous le savons, les établissements et services médico-sociaux ont été soumis à de très fortes contraintes financières. Celles-ci ont provoqué un décrochage important de l’ensemble des salaires du secteur. Le risque d’une baisse de la qualité de l’accueil et de l’accompagnement des personnes en situation de handicap – elle commençait d’ailleurs à se faire sentir – était très fort.

Ce secteur, que vous connaissez en votre qualité d’élus locaux, mesdames, messieurs les sénateurs, est extrêmement vivace. Il compte 200 000 salariés et accueille 300 000 personnes handicapées, dont 150 000 mineurs. Ses établissements souffraient énormément ; il était donc urgent d’agir. C’est ce que nous proposons dans le cadre du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ainsi, nous opérons un tournant : pour le Gouvernement, la qualité de la prise en charge des personnes handicapées est une priorité.

À cet effet, le taux de reconduction de la masse salariale sera de 1,4 %, ce qui représente un effort de 90 millions d’euros supplémentaires par rapport à l’année précédente. Le même taux de reconduction sera appliqué aux autres dépenses de fonctionnement, soit 30 millions d’euros de plus que l’année précédente. C’est là, je tiens à le souligner, une mesure de justice. Elle donnera un peu d’air à un secteur qui en avait bien besoin et rendra du pouvoir d’achat à des centaines de salariés qui avaient décroché financièrement. Surtout, et c’est notre objectif principal, ne l’oublions pas, elle permettra d’accompagner mieux et plus précisément que nous ne le faisions jusqu’à présent les personnes en ayant le plus besoin.

Mesdames, messieurs les sénateurs, avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement démontre qu’il s’engage pleinement en faveur des Français les plus fragiles et par là même qu’il est déterminé à agir pour la justice, cette justice qui est l’idéal de nombreux progressistes dans cette enceinte, cette justice qui nous motive souvent pour avancer et agir, cette justice pour laquelle les Français ont voté. Elle est portée, en quelque sorte, par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault et trouve sa traduction, j’en suis certaine – en tout cas, je le constate dans le domaine des personnes handicapées – dans le présent PLFSS.

Le projet de loi que nous vous présentons aujourd'hui mérite d’être soutenu par tous ceux qui partagent cette exigence de justice et d’équité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, mesdames les ministres, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 s’inscrit dans le cadre d’une nouvelle politique, celle qu’ont voulue les Français en portant François Hollande à la présidence de la République. Il s’agit d’une politique de protection et d’équité.

Protection d’abord : nous en avons vu la traduction dès les décisions prises au mois de juillet, à savoir la majoration de l’allocation de rentrée scolaire et le retour à la retraite à soixante ans pour certains travailleurs. Le texte que nous examinons aujourd’hui procède à de nouvelles avancées, notamment au remboursement à 100 % de l’interruption volontaire de grossesse.

Équité ensuite : c’est le principe directeur de la nouvelle majorité politique de ce pays en matière de prélèvements obligatoires. Les niches fiscales et sociales sont ainsi profondément remises en cause.

J’en viens maintenant au texte lui-même.

Un projet de loi de financement de la sécurité sociale, c’est un texte « tout en un » : il nous invite à porter notre regard sur le passé – c’est l’objet de la première partie, l’arrêté des comptes pour 2011 –, socle du budget social, à contempler le présent – c’est la finalité de la deuxième partie dédiée à l’actualisation des prévisions pour 2012 – et, enfin, à nous projeter vers l’avenir, l’année 2013. C’est ce que nous ferons lors de l’examen des troisième et quatrième parties, consacrées respectivement aux recettes et aux dépenses.

Notre héritage financier, c’est celui de la période 2008-2011. À tous points de vue, il constitue un lourd passif, tout d’abord en termes de solde structurel.

Fait anormal, en 2008, les administrations de sécurité sociale sont entrées en crise, en déficit structurel. Or les comptes sociaux devraient être en excédent structurel afin d’accumuler des réserves et d’être en mesure de faire face au défi du vieillissement de la population !

Plus impardonnable encore, le déficit structurel s’est creusé jusqu’en 2010, pour atteindre 0,9 point de PIB. À la crise s’est ajoutée une gestion peu responsable. Et le déficit structurel ne tend à se résorber que depuis 2011.

En 2009, la composante structurelle représentait 60 % du déficit des administrations de sécurité sociale. En 2010, cette part atteignait même 75 %. En 2011, le solde structurel représentait encore les deux tiers de ce déficit.

La responsabilité du creusement du solde structurel incombe en quasi-totalité au pilotage des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Par construction, le Fonds de réserve pour les retraites et la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, sont en excédent. L’UNEDIC, l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, peut être conjoncturellement déséquilibrée, dans des proportions importantes, mais le mode de gestion des partenaires sociaux tend vers l’équilibre structurel.

Sur le plan budgétaire, nous avons connu des déficits records dans les précédentes lois de financement de la sécurité sociale : 29,6 milliards d’euros en 2010, 22,6 milliards d’euros en 2011.

Sur le plan des comptes, à l’article 2 du présent PLFSS, il vous est proposé, mes chers collègues, d’approuver un rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2011, inédit. Le passif financier net s’établit ainsi à cette date à 111,2 milliards d’euros, soit 5,5 % du PIB, contre 4,9 % du PIB un an plus tôt. L’endettement financier a atteint en fin d’année dernière 170 milliards d’euros, contre 147 milliards d’euros un an auparavant.

En 2012 – c’est le présent –, le déficit de l’ensemble des régimes de base et du Fonds de solidarité vieillesse devrait être encore de l’ordre de 19,3 milliards d’euros, dont 13,1 milliards d’euros pour le régime général. Ce déficit représente le double de celui qui avait été enregistré en 2008.

Le déficit a été réduit de l’ordre de 10 milliards d’euros par rapport à 2010. Toutefois, cette réduction a été moins marquée en 2012 qu’en 2011, en raison d’une progression ralentie de la masse salariale et des recettes correspondantes.

En réalité, nous devons la bonne tenue relative de l’année 2012 aux collectifs budgétaires de l’exercice, en particulier à celui du 16 août. Rappelons que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 fixait un objectif de déficit pour le régime général de 13,8 milliards d’euros. Avant le vote du collectif de l’été, la Commission des comptes de la sécurité sociale anticipait, pour le régime général, un déficit de 15,5 milliards d’euros sur l’année. Après une première estimation des mesures contenues dans le collectif budgétaire, elle l’a réévalué à 14,6 milliards d’euros. Puis, au mois d’octobre, ayant estimé que le rendement des mesures votées au mois de juillet serait meilleur que prévu, elle a jugé que le déficit n’atteindrait finalement que 13,1 milliards d’euros.

C’est donc grâce au vote des collectifs budgétaires de 2012 que l’objectif du PLFSS pour 2012 a été non seulement tenu, mais dépassé.

Mes chers collègues, le Sénat avait ouvert la voie.

En effet, voilà un an, la nouvelle majorité sénatoriale prenait ses responsabilités. Elle adoptait des amendements majeurs dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, avec un double objectif : réduire les niches sociales et augmenter les prélèvements sur le capital. Ses initiatives s’inscrivaient dans la ligne des propositions de la Cour des comptes, laquelle estimait qu’il était possible de réduire les niches sociales de l’ordre de 10 milliards d’euros.

La nouvelle majorité du Sénat proposait plus de 8,2 milliards d’euros de recettes nouvelles, dont 5,2 milliards d’euros au profit de la sécurité sociale. Ces recettes étaient ciblées sur des niches sociales jugées à la fois inefficaces et inefficientes dans le rapport du Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, lequel était présidé par M. Henri Guillaume, inspecteur général des finances. Le gouvernement précédent avait refusé cette mise à niveau des recettes.

Lors de l’examen des collectifs budgétaires de 2012, et en particulier lors de celui du projet de loi de finances rectificative du 16 août, ont été adoptées les principales mesures que nous proposions à l’automne 2011. Toutes les propositions de réduction de niches sociales et la quasi-totalité de celles qui visaient à relever la taxation du capital ont été reprises. La gauche a ainsi nettement participé à l’amélioration des comptes de la sécurité sociale, à la diminution des niches et à une plus grande justice pour ce qui concerne la contribution de chacun à la protection sociale.

Il nous faut poursuivre le redressement des comptes en 2013. Le déficit de la sécurité sociale est une anomalie que nous devons nous employer à faire cesser au plus tôt.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, l’effort de redressement des comptes représentait 29,8 % du déficit tendanciel. Le Gouvernement nous propose de faire un effort plus important en 2013, puisqu’il représenterait 32,3 % du solde tendanciel.

La répartition de l’effort est aussi très différente entre le PLFSS pour 2012 et le PLFSS pour 2013.

Les mesures nouvelles en recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 s’appuyaient à 73 % sur de nouvelles taxes et seulement à 10 % sur la réduction des niches sociales. Pour 2013, le Gouvernement fait davantage reposer l’effort sur la suppression des niches sociales. Elles constituent 35 % des mesures nouvelles en recettes. Je citerai ainsi le déplafonnement des cotisations maladie du régime des indépendants, l’assujettissement des indemnités de rupture conventionnelle au forfait social, le passage du forfait au réel pour l’emploi d’un salarié à domicile, ou bien encore l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les salaires.

Les mesures nouvelles en dépenses portent essentiellement sur la branche maladie. Je les détaillerai ultérieurement, lorsque j’aborderai l’assurance maladie.

Le poids du passé, c’est la dette sociale, dette que nous devrons financer encore durant de longues années. Aucune reprise de dette de la branche famille et de la branche maladie par la CADES n’est prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Il existe pourtant une opportunité au regard des taux courts particulièrement attractifs dont bénéficie l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, en 2012, lesquels pourraient se maintenir à un niveau favorable en 2013. C’est donc l’ACOSS qui financera à court terme le déficit de 2012.

Je tiens cependant à exprimer ma constance et ma cohérence s’agissant des principes de bonne gestion : dette et trésorerie ne doivent pas être confondues. Je souhaite donc une reprise des déficits de 2012 et de 2013 de la branche famille et de la branche maladie par la CADES au plus tôt, c’est-à-dire désormais en 2014.

Pour la période 2012-2017, les projections prévoient un déficit cumulé de ces deux branches de 34,6 milliards d’euros. Dans l’hypothèse d’une évolution au fil de l’eau de leur déficit, le surcroît nécessaire de recettes nouvelles sera, à compter de 2014, de l’ordre de 3,5 milliards d’euros, ce qui représente l’équivalent de 0,25 point de CRDS. Et gardons à l’esprit que l’extinction de la CADES est envisagée dès 2024. Pour éviter des charges plus lourdes encore, il nous faut organiser, année après année, la reprise par la CADES des déficits sociaux.

Telles sont les principales considérations que je souhaitais livrer à au Sénat sur les recettes et l’équilibre.

Le présent texte est profondément respectueux des engagements exprimés voilà un an par la majorité sénatoriale. Pour la première fois, en matière de niches sociales, nous passons des discours aux actes. Certes, cela fait parfois grincer des dents, mais la réduction des niches sociales est une œuvre nécessaire et juste si nous voulons obtenir des recettes à la hauteur des besoins sociaux – santé, retraites, dépendance, famille – que nous devons financer.

C’est pourquoi la commission des affaires sociales a déposé un amendement primordial tendant à rétablir l’article 14 du PLFSS relatif à la réforme des prélèvements sociaux applicables aux carried interests, article supprimé par l'Assemblée nationale. Il y a là une question fondamentale d’équité.

Nous souhaitons aussi innover en matière de fiscalité nutritionnelle. Nous désirons non pas mettre en place une nouvelle logique de rendement, mais envoyer un signal important. Nos habitudes alimentaires ont changé ; nous recourons de manière croissante aux produits industriels. Ce changement est à la source d’une industrie agroalimentaire, que je souhaite florissante, à condition de veiller à la qualité de ce que nous mangeons. C’est dans cet esprit que la commission des affaires sociales vous présentera un amendement visant à insérer un article additionnel après l’article 23 bis et à créer une taxe additionnelle sur les huiles de palme et de coprah. En effet, la haute teneur en acides gras saturés de ces dernières doit conduire les industriels à y recourir avec modération. La taxe que nous proposons doit les y inciter.

J’en viens maintenant à l’assurance maladie.

Les dépenses de l’ensemble des régimes obligatoires de base sont estimées à 190 milliards d’euros en 2013. Le déficit devrait diminuer légèrement pour s’établir à 5,1 milliards d’euros. L’ONDAM, qui correspond à la plus grande part de ces dépenses, est fixé à 175,4 milliards d’euros pour 2013, soit une progression de 2,7 % par rapport à 2012. Quant aux soins de ville et à l’ONDAM hospitalier, ils progresseront chacun de 2,6 % en 2013. In fine, une enveloppe supplémentaire de 4,6 milliards d’euros sera dédiée à la santé, enveloppe qui inclut, bien sûr, la progression de 4 % de l’ONDAM médico-social.

Alors que le rythme spontané des dépenses d’assurance maladie est estimé à 4,1 % pour 2013, respecter un ONDAM à 2,7 % exige de prendre des mesures pour limiter leur croissance automatique. Ces mesures se chiffreront à 2,4 milliards d’euros en 2013, dont un peu plus de 1 milliard d’euros viseront les produits de santé.

Nous le mesurons bien, l’ONDAM de 2013 et, plus encore, ceux des années suivantes sont exigeants. Ils requièrent des réformes de structure pour que notre système de santé accompagne au mieux le vieillissement de la population et le développement des maladies chroniques.

Ces réformes ont été engagées par le Gouvernement. Certaines trouvent déjà une traduction dans le PLFSS pour 2013. Pour autant, madame la ministre, nous aurons besoin d’adopter une loi relative à l’accès aux soins ainsi qu’une loi de santé publique pour traduire le changement de cap que vous avez initié.

Renforcer les soins de proximité et l’accès aux soins, redéfinir le service public hospitalier et adopter des mesures de justice : telles sont les priorités que comporte le PLFSS qui nous est soumis.

Renforcer les soins de proximité et l’accès aux soins passe d’abord par la lutte contre les dépassements d’honoraires, chantier laissé trop longtemps à l’abandon et que le présent gouvernement a pris à bras-le-corps. Le résultat des négociations conventionnelles devra naturellement être jugé à l’aune de la mise en œuvre de l’avenant n° 8 à la convention des médecins libéraux, mais je suis persuadé que celui-ci porte en germe une profonde réorientation. Il permettra, notamment, d’appliquer les tarifs opposables aux bénéficiaires de l’aide pour une complémentaire santé, l’ACS, et de geler puis de modérer les dépassements à l’échelle de chaque praticien, donc sans effet d’aubaine possible. Il permettra également d’améliorer les tarifs opposables et de revaloriser les prises en charge pour les médecins de secteur 1.

En termes structurels, il prolonge donc l’évolution vers un meilleur équilibre entre la rémunération à l’acte, qui doit naturellement perdurer, et la capitation sur objectifs de santé publique, qui doit être développée en complément.

Le PLFSS contient d’autres mesures allant dans le sens du renforcement des soins de proximité.

Il s’agit, bien sûr, de la reconnaissance et de la valorisation de la coordination à l’échelle pluriprofessionnelle, aspect essentiel pour mieux répartir les compétences entre les professionnels de santé. La commission des affaires sociales a d’ailleurs décidé de travailler sur cette question.

Il s’agit également de l’amélioration de la permanence des soins. Plus généralement, il sera nécessaire d’évaluer rapidement les conséquences des diverses modifications apportées ces dernières années, tels que le passage de l’obligation au volontariat et le transfert de la compétence aux agences régionales de santé, les ARS.

Il s’agit aussi de la lutte contre les déserts médicaux, de l’expérimentation du tiers payant pour les étudiants et de celle du parcours de santé pour les personnes âgées courant un risque de perte d’autonomie.

Redéfinir le service public hospitalier constitue un deuxième axe du présent PLFSS.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, a présenté au mois de juillet dernier, sur l’initiative de Jacky Le Menn et Alain Milon, un rapport sur le financement des établissements de santé. Par ailleurs, nous avons tenu un débat en séance sur ce sujet le 1er octobre. Je me félicite que plusieurs mesures que nous proposions alors figurent dans le présent PLFSS. Ainsi, un travail de contrôle du Sénat débouche rapidement sur des mesures législatives.

Je pense, bien sûr, au processus de convergence tarifaire, que le PLFSS prévoit d’abroger, mais aussi à l’élargissement de l’assiette des crédits mis en réserve en début d’année, au-delà des seules missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, les MIGAC.

En outre, le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés va être abondé d’une enveloppe supplémentaire de 189 millions d’euros par rapport à 2012, ce qui permettra notamment – point très important – d’investir dans les systèmes d’information.

Enfin, le PLFSS prévoit de reporter l’entrée en vigueur de la tarification à l’activité dans les hôpitaux locaux, de décaler la suppression des tarifs journaliers de prestations et programme la mise en œuvre de la facturation individuelle. Madame la ministre, même si je comprends les difficultés techniques que rencontrent les établissements, ce dernier projet me semble essentiel si l’on veut avancer dans le domaine de la création de véritables parcours de santé.

La dernière priorité que j’identifie dans le présent PLFSS porte sur les mesures de justice. Elles concernent les demandeurs d’emploi, les personnes détenues et les exploitants agricoles.

Je ne saurais oublier les avancées importantes que le Gouvernement a proposées en faveur des femmes : remboursement à 100 % de l’IVG et de la contraception pour les mineures, revalorisation tarifaire des activités d’IVG pour mettre un terme à la fermeture de services.

Après avoir évoqué – certes rapidement, mais nous étudierons les articles au cours des prochains jours – le contenu du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, je souhaite m’arrêter quelques instants sur deux sujets très distincts : les médicaments et l’information du Parlement.

En 2013, comme en 2012, la maîtrise de l’ONDAM reposera largement sur des baisses de prix de médicaments.

Alors que les objectifs d’évolution des dépenses d’assurance maladie sont, je l’ai dit, exigeants pour la période de programmation 2012-2017, nous devons être bien conscients du fait que continuer de faire reposer majoritairement la maîtrise de l’ONDAM sur des baisses de prix se heurtera, à un moment ou à un autre, à certaines limites. Et je ne parle pas des questions en matière de compétitivité économique pour notre pays que cela soulève. Cette remarque concerne également certaines baisses de tarifs, par exemple dans le secteur de la biologie médicale.

Prenons tout de même la mesure des chiffres : globalement, les remboursements de l’assurance maladie relatifs à des médicaments s’élèvent à 27 milliards d’euros. Notons cependant que les économies réalisées dans ce domaine atteignent un peu plus de 2 milliards d’euros pour les seules années 2012 et 2013.

Or, sur une longue période, l’augmentation des dépenses de médicaments ne résulte ni d’un « effet prix », nettement négatif ces dix dernières années, ni d’un « effet volume », lequel a été stable. Elle est uniquement due à un effet de structure, c’est-à-dire à un déplacement de la prescription vers des médicaments plus coûteux.

Cet « effet structure » est complexe à contrecarrer : il découle à la fois de stratégies délibérées des entreprises et des habitudes de prescription « à la française ». Mieux et moins prescrire me semble devoir être un objectif prioritaire, les baisses de prix ne constituant que des réponses de court terme.

Sur mon initiative, la commission des affaires sociales a déposé plusieurs amendements visant à engager le débat sur ces questions. Elle propose, notamment, d’anticiper au 1er janvier 2014 la prescription en dénomination commune internationale.

Pour ce qui concerne les prix, le sujet est largement débattu. Certes, des écarts persistent avec nos principaux voisins vis-à-vis de certaines classes thérapeutiques ou de certains médicaments. Ils proviennent notamment du mécanisme de régulation que la France a choisi de mettre en place à travers le Comité économique des produits de santé, le CEPS, autrement dit une négociation globale entre les pouvoirs publics et les entreprises.

Il est vrai, par ailleurs, que le prix des génériques est relativement élevé. Le Gouvernement prévoit de réaliser 300 millions d’euros d’économies sur ce poste en 2013. En réalité, cette situation s’explique par la forte proportion de médicaments génériques fabriqués en France ou en Europe et par l’attribution de marges élevées aux pharmaciens, décision qui répondait à l’objectif d’accélérer la substitution.

De manière générale, les comparaisons internationales sont délicates à manier, selon que l’on examine les prix à la sortie de l’usine et les prix finaux, incluant les marges et les taxes.

Plusieurs articles du présent PLFSS nous ont amenés à considérer les différentes taxes et contributions des entreprises pharmaceutiques. Sans entrer dans le débat relatif à leur niveau, je suis tout de même inquiet de leur complexité et de leur multitude. Nous aurions intérêt à simplifier le système ; c’est d’ailleurs le chemin qu’esquisse l’article 24. Pouvez-vous m’indiquer, madame la ministre, les orientations que vous entendez prendre sur ce sujet ?

Je me fais également l’écho des inquiétudes relatives à l’inclusion des frais de congrès dans la contribution relative aux dépenses de promotion, à la suite d’un amendement voté par l’Assemblée nationale ; quel sera l’impact exact de cet élargissement de l’assiette ?

Nous ne pourrons pas échapper à une remise à plat d’ensemble du marché du médicament et à une prise en compte à la fois de la santé publique, des équilibres de l’assurance maladie et de la compétitivité de notre pays, ce dernier point constituant, je le sais, une priorité pour le Gouvernement.

Je souhaitais également évoquer la question de l’information du Parlement.

Je dois confesser que, depuis plusieurs années, ce sujet ne m’apporte pas satisfaction. Les annexes aux PLFSS comportent beaucoup d’informations, mais elles ne respectent pas toujours les dispositions de la loi organique. Différents textes prévoient la remise de rapports, certainement trop nombreux, d’ailleurs. Mais ceux-ci nous sont souvent transmis tardivement, quand ils le sont !

Lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement vote plusieurs dotations de l’assurance maladie à des fonds et organismes, d’importance inégale, mais, à mon sens, trop sont fixées par arrêté.

Je pense bien sûr au nouveau fonds d’intervention régional, qui mobilise tout de même 1,5 milliard d’euros de crédits en 2012, dont 1,3 milliard d’euros de la part de l’assurance maladie. Madame la ministre, aucune information n’a pu m’être fournie sur la dotation de ce fonds en 2013 ; je ne peux que le regretter.

Derniers exemples, nous n’avons d’informations ni sur les modalités de la mise en réserve de crédits ni sur le montant et la répartition des MIGAC. Nous en avons d’ailleurs rapidement parlé lors des débats sur la loi de programmation.

Il est vrai que plusieurs dispositifs sont en cours de réforme, et je sais que nous pouvons compter sur votre engagement en faveur d’une meilleure information des parlementaires, madame la ministre.

En conclusion, je réaffirme ce que j’ai dit en commission. Ce projet de loi de financement constitue un réel changement de cap pour notre système de protection sociale : nous réduisons les déficits, nous maîtrisons les dépenses sans dérembourser, ni faire peser de nouvelles charges sur les patients, nous améliorons les droits de certaines catégories de la population et, surtout, nous investissons pour l’avenir.

Nous le savons bien, notre système de santé a été mis à rude épreuve ces dernières années. Les tensions sont nombreuses. Les approches doivent aujourd’hui être globales, et les solutions construites en concertation avec l’ensemble des acteurs, professionnels de santé et patients. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, rapporteur.

M. Ronan Kerdraon, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, dans la continuité des propos de M. le rapporteur général, je veux saluer la triple ambition du Gouvernement : protéger les Français, alors que près d’un quart d’entre eux renoncent à se soigner faute de moyens, redresser les comptes de la sécurité sociale et réorganiser le système de protection sociale pour le rendre plus efficient.

Par là même, mesdames les ministres, vous affichez votre volonté d’assurer la pérennité de notre système de soins. La nouvelle majorité a choisi de jouer la carte de la solidarité ; je m’en félicite !

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 marque un effort important, dans un contexte économique et social particulièrement difficile.

Je veux apporter une précision concernant le champ d’activité qui m’a été confié : la loi de financement ne retrace chaque année qu’une partie de l’ensemble des crédits destinés au secteur médico-social, puisqu’il s’agit de l’ONDAM médico-social, c’est-à-dire de la contribution de l’assurance maladie au financement des établissements et services accueillant des personnes âgées et handicapées.

L’ONDAM médico-social affiche une progression plus soutenue que celle de l’ONDAM dans son ensemble et devrait s’établir l’année prochaine à 17,11 milliards d’euros.

Le secteur médico-social est préservé : les dépenses d’assurance maladie qui lui sont destinées augmentent de 4 % par rapport à l’année 2012. Cette progression est de 4,6 % dans le secteur des personnes âgées, où l’ONDAM s’élève à 8,39 milliards d’euros, et de 3,3 % dans celui des personnes handicapées, où il s’établit à 8,72 milliards d’euros.

L’objectif global de dépenses, ou OGD, quant à lui, est porté à 18,25 milliards d’euros, en hausse de 3,7 % par rapport à 2012.

Sur les 650 millions d’euros de crédits supplémentaires alloués à l’OGD pour l’année 2013, 255 millions d’euros portent sur la reconduction des moyens existants, 147 millions d’euros seront dédiés à la médicalisation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, et 100 millions d’euros à la création de places nouvelles dans le cadre de la poursuite des plans entamés lors des législatures précédentes.

Je me félicite de l’évolution des crédits alloués au secteur, mais je tiens cependant à vous faire partager deux préoccupations.

Ma première préoccupation concerne les mesures, désormais récurrentes, de mise en réserve de crédits.

Conformément à la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, 100 millions d’euros, portant essentiellement sur des aides à l’investissement, ont ainsi été gelés en 2011, puis en 2012, au sein du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

L’an dernier, je m’étais déjà étonné que « le secteur médico-social ait supporté 20 % des mises en réserve de crédits alors qu’il représente moins de 10 % de l’ONDAM ».

J’avais d’ailleurs souligné qu’un tel gel constituait « une entorse au principe de fongibilité asymétrique voulant qu’au sein des enveloppes gérées par les ARS, les crédits médico-sociaux ne puissent être ponctionnés au profit du secteur sanitaire ».

Un premier progrès a été réalisé au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Mesdames les ministres, lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, vous avez présenté un amendement prévoyant que les mesures de gel prendront dorénavant la forme de minorations des tarifs, et non plus de mises en réserve de dotations budgétaires.

Tout en saluant cette disposition, qui va dans le bon sens, j’estime toutefois nécessaire d’aller plus loin. Je souhaite que l’ONDAM médico-social soit désormais exonéré de toute participation à la régulation de l’ONDAM dans son ensemble.

Ma seconde préoccupation porte sur la sous-consommation chronique de l’OGD, qui concerne essentiellement le secteur des personnes âgées.

Le bilan d’exécution du budget pour 2011 de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, montre ainsi un pourcentage de réalisation de l’OGD « personnes âgées » de 97,2 %, soit une sous-consommation de crédits d’environ 245 millions d’euros, et de 270 millions d’euros si l’on prend également en compte les crédits destinés aux personnes handicapées.

Il convient de relever que ce taux est toutefois en amélioration ces deux dernières années, puisqu’il était encore de 90,6 % en 2007 et de 92,2 % en 2008.

Mais il est à craindre que cette sous-consommation systématique ne crée une certaine méfiance à l’égard des taux d’augmentation de l’ONDAM et de l’OGD affichés chaque année au moment de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Il serait regrettable que ces hausses finissent par n’être perçues que comme des mesures d’affichage politique, sans retombées pleines et entières sur les structures qui en ont pourtant un besoin crucial.

Depuis plusieurs années, nombreux sont les rapports ou débats qui font apparaître les raisons de cette sous-consommation.

La principale est sans aucun doute la lourdeur de la procédure de délégation des crédits aux ARS, à laquelle on peut ajouter les décalages récurrents dans la réalisation des opérations d’investissement.

Un autre facteur de retard réside dans le processus de médicalisation des EHPAD. Il porte sur le partage, imposé par circulaire, des dépenses relatives aux aides-soignants et aux aides médico-psychologiques entre l’assurance maladie, à hauteur de 70 %, et les départements, à concurrence de 30 %.

Or un tel partage suppose « que toute augmentation des crédits de l’assurance maladie alloués à la médicalisation puisse être complétée au niveau nécessaire par les départements, ce qui, compte tenu de la situation financière de certains d’entre eux, peut s’avérer difficile ».

Seule la publication du décret d’application de l’article L. 314-2 du code de l’action sociale et des familles prévoyant une déconnexion des enveloppes soins et dépendance permettrait de sortir de cette impasse, mais ce texte est attendu depuis 2009…

Je veux également saluer la prolongation du plan Alzheimer, annoncée le 21 septembre dernier par le Président de la République François Hollande. J’observe toutefois que nombreux sont les acteurs du secteur qui regrettent la lourdeur des procédures d’appel à projets et la rigidité des cahiers des charges exigés par les ARS.

J’en viens maintenant à l’examen des principaux articles portant sur le secteur médico-social.

Deux d’entre eux ne lui sont pas directement rattachés, mais jettent les bases de la réforme de la prise en charge de la perte d’autonomie, tant attendue et annoncée pour l’année 2014.

L’article 16 traduit la réelle volonté du Gouvernement de mobiliser dès à présent les ressources nécessaires au financement de cette réforme.

L’article 41, quant à lui, tend à expérimenter de nouveaux modes d’organisation des soins, de façon à améliorer le parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie.

En autorisant des dérogations aux règles de facturation et de tarification pour le parcours de santé dans son ensemble, cette expérimentation devrait contribuer au décloisonnement des secteurs sanitaire et médico-social.

Au sein même du secteur médico-social, des marges de manœuvre existent pour mieux faire travailler entre eux les intervenants auprès des personnes âgées dépendantes.

Pour cette raison, la commission des affaires sociales a adopté un amendement portant article additionnel et tendant à demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur le dispositif des services polyvalents d’aide et de soins à domicile, les SPASAD. Je remercie Mme la ministre de nous avoir donné son accord tout à l’heure.

Alors que ces structures pourraient être les vecteurs d’une meilleure articulation entre les services intervenant auprès des personnes âgées dépendantes, elles n’ont jusqu’à présent fait l’objet d’aucune évaluation.

L’article 53 a pour objet de limiter à un an le délai dont disposent les établissements accueillant des personnes handicapées et tarifés au prix de journée pour émettre et rectifier leurs données de facturation à l’assurance maladie. Il s’agit d’une mesure technique, et de bonne gestion, destinée à assurer un meilleur suivi de la consommation des crédits alloués à ces établissements.

Cet article a suscité des craintes quant aux difficultés que pourrait soulever son application immédiate.

En effet, pour réceptionner les factures qui leur sont transmises, certaines caisses primaires d’assurance maladie exigent les notifications des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, relatives à la décision d’orientation de la personne accueillie dans l’établissement concerné. Or les délais de notification de ces dernières sont généralement longs, ce qui peut rendre très difficile le respect du délai d’un an.

Devant cette situation, le Gouvernement s’est engagé, à juste titre, à mettre en place des mesures d’accompagnement des établissements et des caisses primaires d’assurance maladie.

Afin de laisser à ces mesures le temps de produire pleinement leurs effets, la commission des affaires sociales a adopté un amendement tendant à reporter du 1er janvier au 1er juillet 2013 la date d’entrée en vigueur de l’article 53.

L’article 55 fixe, pour l’année 2013, le montant du plan d’aide à l’investissement financé par la CNSA à près de 50 millions d’euros. Sur la période 2006-2011, ce sont environ 1,6 milliard d’euros qui ont été mobilisés pour accompagner 2 296 opérations d’investissement. Cet article permet à la CNSA de continuer dans cette voie, au service de la modernisation des établissements médico-sociaux. Je ne reviendrai pas sur les mesures de gel des crédits évoquées précédemment.

L’article 55 bis, inséré à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement, instaure un fonds de restructuration de 50 millions d’euros à destination des services d’aide à domicile, les SAAD.

Un premier dispositif doté de 50 millions d’euros a été créé par la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. Ce montant est destiné à être versé en deux temps, cette année puis en 2013. Au mois de septembre dernier, 576 services d’aide et d’accompagnement à domicile avaient bénéficié de la première tranche.

Contrairement au premier fonds, alimenté à partir du budget de l’État, ce nouveau dispositif sera financé par un prélèvement effectué sur les réserves de la CNSA. Comme en 2012, il donnera lieu à la signature de conventions de financement pluriannuelles devant organiser le retour à l’équilibre pérenne des comptes des services concernés.

Ce fonds est indispensable dans l’attente d’une réforme plus profonde du secteur des SAAD, qui devra notamment porter sur leur tarification.

Or, en même temps qu’elle créait le premier fonds d’urgence, la loi de finances pour 2012 a autorisé des expérimentations sur ce sujet. Plusieurs conseils généraux se sont d’ores et déjà engagés dans de telles démarches ; je pense notamment à celui du Doubs, département cher à notre collègue Claude Jeannerot, ou à celui des Côtes d’Armor, présidé par le président de l’Assemblée des départements de France, M. Claudy Lebreton.

Afin que le nouveau fonds constitue un outil à part entière de restructuration du secteur, la commission des affaires sociales a adopté un amendement prévoyant que les conventions de retour à l’équilibre soient conclues en tenant compte, pour partie, de ces expérimentations.

L’année dernière, j’avais exprimé ma grande déception devant l’abandon du projet de réforme de la prise en charge de la dépendance par le gouvernement précédent, alors même que le débat national organisé au cours du premier semestre de 2011 avait permis de dégager les grandes lignes d’une telle réforme.

Aujourd’hui, je veux dire notre grande satisfaction qu’un projet de loi sur la prise en charge de la perte d’autonomie soit clairement annoncé pour l’année 2014.

Nombreux sont les enjeux, s’agissant notamment du reste à charge pour les personnes âgées dépendantes en établissement ou du vieillissement des personnes handicapées.

L’un d’entre eux me semble devoir être abordé plus spécifiquement dans le cadre de l’examen du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale : celui de la tarification dans les EHPAD.

Aujourd’hui, le processus de tarification au « GIR moyen pondéré soins » est encore loin d’être achevé. La tarification à la ressource prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 reste ineffective, faute de publication du décret nécessaire à sa mise en œuvre.

Enfin, l’expérimentation d’une modulation du forfait soins en fonction d’indicateurs de qualité et d’efficience, inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, demeure au point mort, faute, là encore, de la parution des textes réglementaires indispensables à sa mise en place.

Le sujet est complexe, mais force est de constater que le gouvernement précédent n’a pas fixé de cap clair pour une réforme pourtant essentielle. Ce chantier doit être repris.

Telles sont, mesdames les ministres, mes chers collègues, les observations que voulais vous présenter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, rapporteur.

Mme Isabelle Pasquet, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, traditionnellement excédentaire en raison de la structure particulière de ses recettes et de ses dépenses, la branche famille est entrée, depuis 2008, dans une spirale déficitaire.

À cela, deux causes principales : en premier lieu, la crise économique, qui a engendré la perte de près de 3 milliards d’euros de recettes entre 2008 et 2010 ; en second lieu, les transferts de charges au titre des droits familiaux de retraite, qui ont représenté une dépense de près de 22 milliards d’euros sur cette même période.

Après un déficit record de 2,7 milliards d’euros en 2010, aucune amélioration notable ne se dessine, contrairement à ce que l’on constate pour les autres branches de la sécurité sociale. Le déficit pour 2012 atteindrait encore le niveau très élevé de 2,5 milliards d’euros.

Comme si cela ne suffisait pas, dans ce contexte financier particulièrement contraint, la branche famille a connu une fragilisation inédite de ses recettes sous le précédent quinquennat. Lors de l’élaboration de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, il a en effet été décidé de transférer 0,28 point de CSG qui lui était précédemment affecté à la CADES, pour financer la dette sociale.

Ce transfert s’est révélé un marché de dupes puisque, sur les trois taxes affectées à la CNAF en contrepartie de cette perte de CSG, une voit son rendement diminuer d’année en année et une autre ne rapportera plus rien à compter de 2013.

Certes, le bilan de cette opération a été quasiment neutre pour la CNAF en 2011, mais dès cette année, le compte n’y est plus : le manque à gagner devrait s’élever à 100 millions d’euros, et à 400 millions d’euros l’an prochain !

Fort heureusement, l’actuel gouvernement a pris le contrepied de cette politique, en décidant d’affecter 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires à la branche famille.

Dans un premier temps, par le biais de la loi de finances rectificative votée cet été, un surcroît de recettes de 400 millions d’euros par an lui a été attribué, provenant principalement du maintien de la hausse de deux points du prélèvement social sur les revenus du capital. Ce montant couvre intégralement le coût de la majoration de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire entrée en vigueur en septembre dernier.

Dans un second temps, le présent texte tend à garantir environ 600 millions d’euros de recettes supplémentaires à la branche famille – sur les 3,4 milliards d’euros prévus pour la sécurité sociale –, dont 400 millions d’euros au titre de la réforme de la taxe sur les salaires et 200 millions d’euros au titre de la réduction des niches sociales et de la hausse de la fiscalité sur les tabacs.

Cet apport de recettes nouvelles constitue une véritable bouffée d’oxygène pour la branche. Cela va lui permettre de stabiliser son déficit à 2,6 milliards d’euros en 2013, au lieu des 3,3 milliards d’euros initialement prévus.

C’est une première étape dans le redressement des comptes, mais tout n’est pas réglé pour l’avenir. En effet, les prévisions disponibles montrent combien il sera difficile, pour la branche famille, de revenir à l’équilibre financier à moyen terme, dans un contexte de progression modeste des recettes et de relatif dynamisme des dépenses. Sur la période 2013-2016, le solde continuerait à s’améliorer mais à un rythme très lent. En 2017, il afficherait encore un déficit de 1,2 milliard d’euros.

Je souhaite, madame la ministre, à cet instant de mon intervention, exprimer mon regret que le Gouvernement maintienne le report de trois mois de la date de revalorisation des prestations familiales décidé par la précédente majorité. Ces trois mois sont donc définitivement perdus pour les familles.

Pour 2013, il est envisagé une revalorisation de 1,75 % au 1er avril, mais, en réalité, la hausse ne sera que de 1,6 % en moyenne sur l’année, puisque le report de trois mois de la date de revalorisation minore d’un quart l’effet de celle-ci en moyenne annuelle.

J’en viens maintenant aux mesures du PLFSS concernant les dépenses de la branche famille. Le projet de loi initial n’en contenait qu’une : l’expérimentation sur deux ans du versement en tiers payant du complément de mode de garde pour les familles modestes.

Ce dispositif, déjà expérimenté par la caisse d’allocations familiales de l’Essonne, a un double objectif : d’une part, faciliter l’accès des familles dont les ressources sont inférieures au revenu garanti dans le cadre du revenu de solidarité active à un mode d’accueil individuel, en les dispensant d’une avance de frais ; d’autre part, permettre aux assistants maternels en sous-activité au regard du nombre d’enfants pour lequel ils sont agréés par le conseil général d’en accueillir davantage.

Cette expérimentation, dont un bilan sera dressé avant la fin des deux ans, me semble être une initiative très intéressante. J’insiste néanmoins sur le fait qu’elle nécessitera, à l’heure où le climat social dans les CAF est fortement dégradé – j’y reviendrai –, un dialogue renforcé entre les différents services chargés de sa mise en œuvre.

Après son examen par nos collègues députés, la partie « famille » du PLFSS s’est trouvée enrichie de deux dispositions.

La première prévoit le rétablissement automatique des droits aux allocations de logement à caractère familial et social, l’ALF et l’ALS, lorsqu’un dossier a été déclaré recevable par la commission de surendettement.

Un tel droit existe déjà pour les bénéficiaires de l’aide personnalisée au logement, l’APL, depuis la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. Son extension va permettre d’éviter les expulsions des familles en grande difficulté dont le dossier de surendettement aura été déclaré recevable ; je m’en réjouis.

La seconde disposition a trait à la transformation du congé de paternité en un « congé de paternité et d’accueil de l’enfant », ouvert à la personne vivant avec la mère.

Cette mesure d’équité permettra de reconnaître, pour la première fois, le rôle du ou de la partenaire de la mère dans l’éducation de l’enfant. Je rappelle, à ce titre, que le congé de paternité a été conçu pour permettre une meilleure répartition des tâches éducatives au moment de la naissance et favoriser ainsi le développement d’un lien entre l’enfant et la personne qui l’élève.

Il est donc logique que le ou la partenaire de la mère, qui va vivre quotidiennement avec l’enfant, puisse y être éligible au même titre que le père de l’enfant. Un tel élargissement est, en outre, conforme à la préconisation formulée en 2007 par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE.

J’ajoute que certaines entreprises et collectivités – SFR, Eau de Paris, les conseils généraux de Seine-et-Marne et de l’Essonne, par exemple – ont déjà mis en place un tel congé d’accueil de l’enfant.

En revanche, je m’interroge, madame la ministre, sur le choix du Gouvernement de ne pas étendre le congé de paternité et d’accueil de l’enfant aux couples homosexuels masculins, qui crée une nouvelle rupture d’égalité en fonction du genre.

À l’occasion de l’examen de ce PLFSS, je souhaite enfin alerter sur la situation extrêmement préoccupante des caisses d’allocations familiales, à l’heure où se négocie la prochaine convention d’objectifs et de gestion entre la CNAF et l’État.

Les représentants syndicaux des salariés des caisses, que j’ai reçus à l’occasion d’une table ronde, ont unanimement identifié trois principaux facteurs de dégradation des conditions de travail : la politique de l’emploi menée ces dernières années, qui s’est traduite par la réduction des effectifs et la généralisation du recours aux contrats à durée déterminée, ainsi qu’aux heures supplémentaires ; l’augmentation de la charge de travail induite par l’évolution de la législation, jugée par ailleurs de plus en plus complexe, et par la crise économique ; l’érosion du « cœur de métier » des agents, au profit du développement des missions de gestion des processus.

Tous dénoncent également une réduction de l’offre de service : fermeture, dans certaines CAF, du service d’accueil des allocataires plusieurs jours par mois, développement d’un système d’accueil sur rendez-vous, généralisation des réponses téléphoniques, suppression des antennes locales.

À cela s’ajoute la départementalisation du réseau, achevée fin 2011 avec la création de treize CAF départementales en lieu et place de trente-quatre CAF infra-départementales. Présentée aussi bien par la CNAF que par l’État comme une « réussite technique », cette réforme a engendré de nombreuses difficultés sur le terrain – je pense en particulier à la CAF du Nord – et exacerbé les tensions sociales.

Madame la ministre, comptez-vous dresser un état des lieux exhaustif de cette opération de départementalisation ? Plus globalement, quelles sont vos intentions quant au règlement de la situation de crise qui secoue depuis plusieurs mois le réseau des CAF ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, en remplacement de Mme Christiane Demontès, rapporteur.

M. Ronan Kerdraon, en remplacement de Mme Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames les ministres, mes chers collègues, s’agissant de la branche vieillesse, ce PLFSS s’inscrit clairement dans la continuité des décisions prises l’été dernier avec un double objectif : remédier aux insuffisances des régimes de retraite en matière d’équité et amorcer le redressement de l’assurance vieillesse.

Le décret du 2 juillet 2012 a ainsi élargi aux personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans la possibilité de partir à la retraite à 60 ans lorsqu’elles ont cotisé une carrière complète. Il s’agit d’une première mesure de justice ; elle est largement financée.

Parallèlement, dès cette année, grâce à la loi de finances rectificative du 16 août 2012, le déficit du régime général d’assurance vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, sera réduit de près de 1 milliard d’euros par rapport à ce qu’il aurait été en l’absence de mesures correctrices.

Le PLFSS poursuit dans cette voie : l’année prochaine, la branche vieillesse, FSV compris, bénéficiera au total d’environ 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires, compte tenu des mesures adoptées au cours de l’été dernier et de celles des lois financières pour 2013.

Ce surcroît de recettes fera plus que compenser la croissance des prestations d’assurance vieillesse, qui restera très soutenue.

Le déficit de la branche retraite, tous régimes de base confondus, sera ainsi ramené à 5,4 milliards d’euros en 2013, contre 7,1 milliards d’euros en 2012. Celui du FSV sera réduit à 2,6 milliards d’euros, contre 4,1 milliards d’euros en 2012.

Contrairement à l’an passé, où nous avions d’ailleurs manifesté nos inquiétudes à ce sujet, le PLFSS pour 2013 apporte également des réponses aux difficultés financières croissantes d’autres régimes de retraite de base que le régime général. Je pense à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL, à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, au régime de retraite des exploitants agricoles et au régime spécial de retraite des industries électriques et gazières. Ils se verront attribuer plus de 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires en 2013.

En outre, ce PLFSS comporte de nouvelles mesures d’équité en faveur de certains assurés. Il prévoit notamment de renforcer les droits à la retraite des exploitants agricoles qui ont été contraints d’interrompre leur activité pour cause de maladie ou d’infirmité graves. Il améliore aussi les modalités d’attribution des pensions de réversion pour les professions médicales et dans le régime de retraite des marins. Nous pouvons nous en féliciter.

Ces évolutions positives étant soulignées, je souhaite néanmoins formuler trois observations.

La première porte sur les perspectives pluriannuelles de l’assurance vieillesse après 2013.

Contrairement aux effets attendus de la réforme des retraites de 2010, ces perspectives font apparaître une nouvelle détérioration des comptes de la branche à partir de 2014. En l’absence de mesures correctrices nouvelles, les déficits de la branche vieillesse passeraient de 5,6 milliards d’euros en 2014 à 7,9 milliards d’euros en 2017 pour l’ensemble des régimes obligatoires de base. En 2017, la branche vieillesse représenterait ainsi plus de 85 % du déficit consolidé de l’ensemble des régimes de base. Le poids des déficits de l’assurance vieillesse mis à la charge de la Caisse d’amortissement de la dette sociale se maintiendrait donc à un niveau très élevé.

Ces perspectives confirment, si besoin était, la nécessité de définir de nouvelles évolutions structurantes pour le retour à l’équilibre des comptes de l’assurance vieillesse. Elles ne préjugent donc pas des décisions qui seront prises à l’issue de la concertation prévue au premier semestre de 2013.

Deuxième observation, la place de la solidarité et le rôle du FSV dans notre système de retraite feront inévitablement partie des thèmes des réflexions qui seront engagées dès le début de l’année prochaine dans la perspective d’une réforme globale.

L’un des objectifs de la constitution du FSV était d’isoler clairement les avantages à caractère non contributif et de leur garantir un financement adapté par des impôts généraux bien identifiés.

Cependant, le FSV a été maintenu dans une situation de déficit durable au cours des dernières années et son financement est devenu à la fois insuffisant, instable et illisible.

Cette situation déstabilise les mécanismes de solidarité mis en place au profit des assurés dont les parcours professionnels sont les moins favorables.

Or, compte tenu des tendances démographiques et économiques, le financement des avantages non contributifs successivement mis à la charge du fonds engendrera des dépenses croissantes au cours des prochaines années. Comme l’a récemment indiqué la Cour des comptes, l’arrivée à l’âge de la retraite d’un nombre croissant de personnes ayant eu des carrières incomplètes pourrait contribuer à augmenter le nombre de personnes éligibles, en particulier, à l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

En outre, le FSV a surtout servi à réduire artificiellement les déficits des régimes d’assurance vieillesse, notamment depuis 2011, lorsque lui a été transférée la charge d’une partie des dépenses jusqu’alors engagées par le régime général et les régimes alignés pour le financement du minimum contributif.

Enfin, ma dernière observation porte sur les craintes que nous avions formulées à l’occasion de la réforme des retraites de 2010. Elles se sont, hélas ! confirmées.

Je pense d’abord à la prise en compte de la pénibilité au titre du droit à la retraite. Si l’on en juge d’après le maintien de fortes inégalités d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles, celle-ci constitue un enjeu de grande importance en matière d’équité.

Cependant, comme nous le redoutions, les critères réglementaires de mise en œuvre de la retraite pour pénibilité se sont révélés trop restrictifs et le nombre de demandes très inférieur aux prévisions. À la mi-octobre, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, recensait moins de 5 500 demandes de retraite pour pénibilité : nous sommes loin – très loin ! – des 30 000 demandes annuelles que prévoyait le précédent gouvernement.

Ensuite, le volet « prévention » de la pénibilité ne donne pas toute satisfaction. L’obligation de négocier des accords de prévention de la pénibilité ne s’applique pas aux entreprises comptant moins de 50 % de leurs effectifs exposés à des facteurs de risque.

Je pense enfin, plus généralement, à la situation des seniors.

Les mesures d’âge contenues dans la réforme de 2010 avaient pour ambition, au-delà de l’objectif de dégager des ressources supplémentaires pour les régimes de retraite, d’améliorer le taux d’emploi des seniors. C’était d’ailleurs l’une des conditions du retour à l’équilibre ; on conviendra qu’elle est loin d’avoir été remplie.

Dans ce contexte, la suppression par le précédent gouvernement de l’allocation équivalent retraite, l’AER, n’a pu qu’accroître les situations de grande précarité parmi les demandeurs d’emploi les plus âgés lorsqu’ils arrivent en fin de droits. Des évolutions devront donc nécessairement intervenir rapidement.

Telles sont, monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, les principales observations sur l’assurance vieillesse que Christiane Demontès, rapporteur, souhaitait formuler à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur.

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et maladies professionnelles. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, avec un objectif de dépense pour 2013 de 13,3 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes de base et de 11,9 milliards d'euros pour le régime général, la branche accidents du travail et maladies professionnelles devrait renouer avec les excédents après quatre années de déficit. Les prévisions qui figurent à l’annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 permettent d’espérer que la capacité de la branche à dégager un solde financier positif va non seulement se maintenir, mais même s’accroître sur les cinq prochaines années.

On peut se réjouir de ces perspectives. Néanmoins, elles apparaissent surtout comme un retour à la normale pour une branche dont la vocation assurantielle est établie depuis 1898, qui, à ce titre, a une obligation d’équilibre et dont les charges doivent être assumées par les cotisations patronales à l’exclusion de toute autre forme de financement, ainsi que l’a rappelé le Premier président de la Cour des comptes lors de son audition par notre commission.

Le cumul de déficits entre 2009 et 2012 a entraîné un besoin de financement annuel de 2,2 milliards d’euros de la branche dans les comptes de l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – 1,7 milliard d'euros de déficit structurel et environ 500 millions d'euros de besoins en fonds de roulement –, problème qui n’a pas été traité de manière satisfaisante précédemment.

Le premier objectif de la branche est donc d’apurer ce déficit. Dans cette perspective, le Gouvernement et les partenaires ont pris l’engagement d’affecter les excédents de la branche à la réduction du déficit cumulé et ont accepté une augmentation modérée de 0,05 point de cotisation pour 2013. D’après les prévisions de l’annexe B, la branche aura couvert ses déficits en 2016. Cette perspective est néanmoins lointaine, et j’ai tendance à penser qu’une augmentation légèrement supérieure des cotisations, de l’ordre de 0,1 point par exemple, aurait été préférable afin d’accélérer le processus.

Le Gouvernement a préféré faire un choix acceptable par l’ensemble des partenaires sociaux, ce qui est conforme au paritarisme qui caractérise le régime de la branche : c’est ce qui est ressorti des auditions des représentants des organisations professionnelles, patronales et salariales, que nous avons organisées.

Plusieurs sujets d’inquiétude demeurent néanmoins.

Le premier d’entre eux est que les excédents modestes de 2013 – 400 millions d’euros environ – reposent, pour une large part, sur la baisse de deux des transferts à la charge de la branche, au bénéfice respectivement de la CNAV et du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA. Le transfert à la branche vieillesse lié à la pénibilité est nul cette année et, même s’il doit augmenter, il a sans doute vocation à rester bas, étant donné le caractère très restrictif des critères choisis ; c’est ce qu’a souligné Christiane Demontès dans son rapport. Cependant, tel n’est pas le cas du transfert au bénéfice du FIVA, dont la dotation est réduite de 200 millions d'euros pour 2013 en raison de l’importance du fonds de roulement de cet organisme, mais a vocation à revenir dès 2014 à son niveau de 2012, soit environ 315 millions d’euros, d’autant que le budget de la santé prévoit une absence de dotation de l’État au FIVA pour les trois prochaines années, ce qui me paraît très hypothétique et non conforme au souhait exprimé par notre mission commune d’information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l’amiante de 2005, qui estimait que l’apport de l’État devait représenter 30 % des besoins du fonds.

D’autres transferts supportés par la branche sont susceptibles d’augmenter au cours des prochaines années. La commission Diricq, chargée d’évaluer le montant de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, doit se réunir en 2014. Jusqu’à présent, chacun de ses rapports a conduit à une augmentation du transfert vers la Caisse nationale d’assurance maladie, la CNAM, ce qui, à mon sens, n’est pas une fatalité.

Enfin, les recettes sur les prochaines années sont particulièrement sensibles, chacun le sait, à l’évolution de la masse salariale.

Dans ce contexte, comme Catherine Deroche et moi-même l’avions souligné dans notre rapport devant la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, il apparaît particulièrement important que la branche ne soit pas grevée par des dépenses qui ne lui incombent pas ou qui se révèlent excessives. Une dotation de 10 millions d’euros en faveur du Fonds national de soutien relatif à la pénibilité a ainsi été inscrite dans les dépenses de la branche dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Or ce fonds, créé par la loi portant réforme des retraites, ne distribue des aides aux entreprises que depuis le mois d’avril 2012, et les résultats, après un premier semestre de mise en œuvre, semblent particulièrement décevants : moins de 15 000 euros ont été distribués. Les critères de pénibilité adoptés lors de la réforme des retraites expliquent certainement cette situation, comme nous avions eu l’occasion de le signaler lors des débats. Il est souhaitable que la notion de pénibilité soit redéfinie en concertation avec les partenaires sociaux.

En dehors du régime général, la tentation d’affecter les excédents des régimes accidents du travail-maladies professionnelles aux régimes déficitaires perdure, comme le montre l’affectation cette année de 450 millions d’euros du Fonds d’allocation temporaire d’invalidité des agents des collectivités locales, le FATIACL, au profit de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. Ce point important ne manque pas de susciter des interrogations.

Les régimes AT-MP doivent conserver des marges de manœuvre financières si l’on veut qu’ils puissent faire face aux problèmes essentiels qui se posent à eux. Que l’on ne se fasse pas d’illusions : c’est l’existence même de ces régimes qui sera remise en cause s’ils ne parviennent pas à transformer leur approche de la prévention et de la réparation, qui sont leur raison d’être.

Dix ans après les critiques sévères émises par la Cour des comptes dans son rapport sur la gestion du risque AT-MP, les dépenses de prévention ne représentent que 3 % des dépenses de la branche et les crédits alloués restent sous-utilisés par les entreprises, ce qui pose également question.

Parallèlement, le taux de reconnaissance des maladies professionnelles continue à varier en fonction des caisses. En outre, le caractère forfaitaire de la réparation est l’objet de critiques constantes.

Les partenaires sociaux sont conscients de ces limites et ont déjà engagé des réformes, notamment une réforme de la tarification, qui entre en application à partir de cette année. Dans le cadre de l’élaboration de la prochaine convention d’objectifs et de gestion, la prévention et la meilleure prise en charge des victimes du travail figurent de manière prééminente dans les orientations approuvées par le patronat et les syndicats de salariés. On ne peut que souscrire à cet objectif.

Il est important de noter à quel point le régime mis en place en 1898, si décrié par la doctrine juridique, suscite pourtant l’adhésion des partenaires sociaux, qui souhaitent le faire vivre et évoluer. J’ai pu constater qu’ils se sont engagés dans une démarche d’innovation, en prenant en compte notamment les meilleures pratiques européennes. L’évolution de la branche AT-MP sera l’un des sujets importants des prochaines années.

Ce sont les partenaires sociaux qui font vivre la branche AT-MP, mais, pour cela, il leur faut des moyens.

J’en viens maintenant aux articles relatifs à la branche AT-MP qui figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Après l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale, ils sont au nombre de sept. Au-delà de l’article 70 relatif aux objectifs de dépense et des articles 68 et 69, qui fixent le montant des transferts vers l’assurance maladie et vers les fonds dédiés aux victimes de l’amiante respectivement et dont j’ai déjà abordé les enjeux, quatre articles méritent un examen plus particulier.

L’article 65 met en place une réforme de la prise en charge de la tierce personne pour les victimes du travail ayant besoin d’une aide pour les actes de la vie quotidienne. L’ancien système, qui consistait en une majoration de rente, aboutissait à calculer le montant alloué à la victime sur la base de ses revenus antérieurs. Le Gouvernement propose de mettre en place un système de prestation fondé sur les besoins de la personne handicapée. Sous réserve d’une précision que vous pourrez peut-être nous apporter, madame la ministre, en nous assurant que les aidants familiaux sont bien inclus dans le périmètre de la mesure, cet article très positif reçoit notre totale adhésion.

L’article 66 a pour objet de résoudre une difficulté pratique et procédurale et de garantir que la branche, qui avance à la victime d’une faute inexcusable de l’employeur le montant total de son indemnisation, pourra obtenir le remboursement de cette somme par l’employeur fautif. Les sommes dues seront ainsi perçues en capital, et non plus sous la forme d’une majoration de cotisation, ce qui limitera le risque lié à la disparition de l’entreprise.

Par ailleurs, l’employeur ne pourra plus se prévaloir des carences de la caisse dans le cadre de la procédure administrative pour faire échec au recouvrement des sommes avancées en application d’une décision du juge judiciaire. Cette pratique, qui est essentiellement celle de grands groupes industriels, coûte plusieurs millions d’euros chaque année à la branche et il est heureux qu’il y soit mis fin.

Je souhaite néanmoins que nous abordions la question plus large de l’indemnisation des victimes d’une faute inexcusable, qui n’est pas pleinement tranchée depuis la décision du Conseil constitutionnel de 2010 élargissant le nombre des préjudices indemnisables.

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. Des amendements présentés par certains de nos collègues permettront sans aucun doute d’ouvrir ce débat lors de la discussion de l’article 66.

L’article 67 prévoit les mesures techniques qui permettront à l’ensemble des polypensionnés titulaires d’une allocation de cessation anticipée au titre de leur exposition à l’amiante de liquider leur pension de retraite à l’âge de 60 ans. C’est là l’aboutissement de la disposition que le Sénat avait adoptée à l’unanimité dans le cadre de la réforme des retraites de 2010. Madame la ministre, nous ne pouvons que vous en féliciter.

Enfin, l’article 69 bis, inséré par les députés, repose la question d’une voie d’accès individuelle au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, dont vous savez qu’il n’est aujourd’hui accessible qu’aux employés ayant travaillé sur certains sites limitativement énumérés. Il est regrettable que nous en soyons encore à la demande de rapports, puisque l’étude publiée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, au mois de mai 2011 a clairement établi la faisabilité technique de cette voie d’accès. Avec mes collègues Jean-Marie Vanlerenberghe et Gérard Dériot, nous avons régulièrement demandé cet élargissement depuis la publication du rapport de la mission commune d’information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l’amiante. Madame la ministre, vous avez partiellement répondu à notre interrogation dans votre propos liminaire ; nous souhaitons que ce dossier puisse aboutir rapidement.

Pour ma part, je présenterai trois amendements techniques qui, je l’espère, obtiendront l’accord du Gouvernement.

Le premier a pour objet d’étudier la possibilité, pour les ayants droit d’une personne bénéficiaire de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, de bénéficier de l’assurance décès.

Le deuxième vise à faire reconnaître que le lien entre le décès d’une victime de l’amiante et sa maladie, une fois établi par la caisse, n’a pas à être réexaminé par le FIVA.

Le troisième tend à garantir la possibilité, pour les représentants des salariés au sein des comités techniques de la branche, d’exercer leur mandat.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, telles sont les observations que je souhaitais formuler concernant la branche accidents du travail-maladies professionnelles, dont je tiens à saluer l’évolution très positive. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 s’inscrit parmi les nombreux textes financiers que nous avons à examiner cet automne. Sa logique n’est pas différente de celle des autres textes, le redressement des comptes sociaux devant s’intégrer pleinement dans la stratégie globale de redressement des finances publiques.

Mais je veux le dire avec force : ce redressement s’opère dans la justice. Contrairement aux années précédentes, où l’on avait vu fleurir les franchises médicales, la taxation des complémentaires santé ou encore la sous-indexation de certaines prestations familiales, aucune des mesures d’économie prévues pour 2013 ne pèsera directement sur les assurés sociaux.

Sans doute convient-il de revenir brièvement sur l’état des lieux, c’est-à-dire sur la situation des comptes après dix ans de gouvernement par la droite. Sur les dix dernières années, les déficits cumulés du régime général et du FSV ont atteint 160 milliards d’euros : 70 milliards d’euros entre 2002 et 2008, 90 milliards d’euros entre 2009 et 2012. La crise est certes passée par là, mais elle n’explique pas tout, puisque près de la moitié de ces déficits ont été accumulés avant 2008.

L’année 2012 ne devrait pas faire exception à cette triste règle, dans la mesure où le déficit cumulé du régime général et du FSV devrait s’élever à 19,3 milliards d’euros. Encore faut-il préciser que les prévisions de solde fixées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ne pourront être respectées que grâce aux mesures adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative du 16 août 2012.

J’attire également l’attention sur la situation préoccupante des régimes obligatoires de base autres que le régime général et des autres composantes des administrations de sécurité sociale. En effet, le solde de ces régimes devrait subir une dégradation continue sur la période 2011-2013 et être en déficit de 2,1 milliards d’euros en 2012. Quant à l’UNEDIC, compte tenu de la montée du chômage, son déficit est estimé à environ 3 milliards d’euros en 2012.

En ce qui concerne le déficit pour 2013, il s’établirait tendanciellement, c’est-à-dire sans les mesures de redressement de ce PLFSS, à près de 20 milliards d’euros, soit le double de son niveau d’avant la crise économique. C’est dire la profonde dégradation des comptes sociaux dont nous héritons !

Devant cette situation, il a été nécessaire de prendre des mesures dès l’été 2012, et un nouvel effort s’impose pour 2013.

Les mesures contenues dans la loi de finances rectificative d’août dernier, que je viens d’évoquer très brièvement, ont apporté environ 1,5 milliard d’euros à la sécurité sociale en 2012. Je tiens à rappeler que cet effort a été réalisé selon des principes nouveaux, en tout premier lieu l’alignement progressif de la taxation des rémunérations annexes – participation, intéressement, stock-options, etc. – sur celle des salaires, notamment via la hausse du forfait social.

Les recettes nouvelles qui en ont résulté ont été principalement affectées à la branche vieillesse, non pas, comme on l’entend parfois dire sur les travées de l’opposition, afin de financer le retour à la retraite à 60 ans pour les carrières longues – cette mesure a été financée par d’autres moyens –, mais tout simplement pour remédier aux limites du financement de la réforme des retraites de 2010, qui reposait, comme l’a d’ailleurs souligné la Cour des comptes, sur des hypothèses économiques trop optimistes.

Pour 2013, les mesures proposées dans ce PLFSS représentent un effort d’environ 5,6 milliards d’euros pour le régime général et le FSV : 3,4 milliards d’euros en recettes et 2,2 milliards d’euros en mesures d’économies. Globalement, grâce à ces dispositions, le déficit prévisionnel pour 2013 du régime général et du FSV sera ramené de 19,7 milliards à 14 milliards d’euros.

En matière de recettes, les principales mesures de ce PLFSS visent soit à rééquilibrer des régimes aux comptes profondément dégradés, soit à mettre à contribution le secteur financier, soit à préparer la réponse aux défis de l’avenir, notamment celui de la prise en charge de la dépendance.

Les mesures de rééquilibrage de régimes sociaux en déficit concernent surtout celui des travailleurs indépendants. L’effort est loin d’être négligeable, puisqu’il atteint 1,1 milliard d’euros, mais il s’effectue dans l’équité : si les prélèvements s’accroîtront pour 850 000 travailleurs indépendants en raison du déplafonnement de la cotisation maladie, ils seront allégés pour 450 000 autres grâce à l’introduction de la réduction dégressive de la cotisation maladie minimale.

La mise à contribution du secteur financier passe notamment par la réforme de la taxe sur les salaires : cette disposition s’inscrit dans la suite des mesures prises pour faire participer le secteur bancaire à l’effort de redressement des comptes publics, que ce soit par la taxe de risque systémique, la taxe sur les transactions financières ou encore la taxe exceptionnelle assise sur la part variable de la rémunération des opérateurs de marché.

Enfin, la préparation de l’avenir se traduit par la création d’une nouvelle ressource destinée à financer la prise en charge de la dépendance. Je sais que cet effort demandé aux personnes retraitées fait débat et que certains s’y opposent.

M. Gilbert Barbier. C’est bien de le reconnaître !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Cependant, demander cet effort n’est pas illogique compte tenu de l’amélioration du niveau de vie des retraités. En 2009, déjà, le Conseil d’orientation des retraites montrait que, si l’on prenait en compte l’ensemble des revenus et des loyers non payés par les retraités propriétaires, le niveau de vie moyen des personnes à la retraite était légèrement supérieur à celui des actifs. Bien sûr, il convient de prendre en considération la situation des personnes ne percevant qu’une « petite retraite ». C’est pourquoi le PLFSS pour 2013, tel qu’amendé par l’Assemblée nationale, prévoit que seuls les retraités aujourd’hui assujettis à la CSG au taux de 6,6 %, c’est-à-dire les plus aisés d’entre eux, seront concernés par la mesure.

En ce qui concerne les dépenses, c’est la branche maladie qui supporte la quasi-totalité des économies pour 2013. Le taux d’évolution de l’ONDAM a été fixé à 2,7 %, contre 2,5 % en 2012. La différence peut sembler faible, elle représente pourtant près de 350 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2012, ce qui va permettre de desserrer l’étau financier pour un certain nombre d’établissements. Cette manne supplémentaire permettra en effet de réaliser de nouveaux investissements hospitaliers, à hauteur de 150 millions d’euros, et d’améliorer de façon significative les conditions de fonctionnement des établissements destinés aux personnes âgées et handicapées.

Quoi qu’il en soit, la fixation à 2,7 % du taux d’augmentation de l’ONDAM, au lieu du taux tendanciel de 4,1 %, impose de réaliser 2,4 milliards d’euros d’économies. Toutefois, je le répète, contrairement à certains dispositifs qui ont pu être adoptés entre 2008 et 2012, aucune des mesures d’économies prévues pour 2013 ne pèsera directement sur les assurés sociaux.

S'agissant de la branche vieillesse, de nouvelles mesures d’équilibrage, là aussi bienvenues, sont prévues. Certains régimes obligatoires en difficulté bénéficieront de recettes supplémentaires : la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le régime des professions libérales et celui des anciens salariés des entreprises du secteur des industries électriques et gazières. Il s’agit là de mesures d’ordre réglementaire.

Enfin, la branche famille avait été singulièrement fragilisée, sous la précédente législature, par l’affectation de ressources non pérennes dans le cadre du schéma de financement de la reprise de la dette de 2010 ou par la sous-indexation temporaire de la revalorisation des prestations familiales en 2011. Il faut donc se réjouir que cette branche soit consolidée dans le cadre du présent PLFSS, même si le déficit de 2,6 milliards d’euros prévu en 2013 ne constitue pas une perspective satisfaisante. La branche famille bénéficiera en effet de nouvelles recettes – 680 millions d’euros, soit 30 % des recettes nouvelles affectées au régime général –, pour compenser la progression de ses dépenses en raison notamment de la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire, qui correspondait à un engagement du Président de la République.

Je terminerai par quelques mots sur l’après-2013 et les chantiers qui nous attendent dans les mois et les années à venir.

Dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques, le Gouvernement a défini une trajectoire de rétablissement de la situation financière des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Cette trajectoire repose pour l’essentiel sur l’hypothèse d’une maîtrise de l’ONDAM, avec un taux d’augmentation de l’ordre de 2,5 %, et d’un redémarrage progressif de la croissance à partir de 2013, selon un taux d’environ 2 % à partir de 2014. Sous ces hypothèses, le déficit des régimes obligatoires de base s’établirait à environ 9,1 milliards d’euros en 2017. Au cours de ses travaux, la commission des finances a pu vérifier la crédibilité de cette trajectoire et établir que, sans la programmation arrêtée par le Gouvernement, le solde des régimes obligatoires de base évoluerait spontanément vers un déficit de près de 28 milliards d’euros à l’horizon 2017, ce qui ne serait pas soutenable.

Cela montre, chers collègues, qu’un certain nombre de réflexions devront être menées dans les années à venir.

Tout d'abord, comment financer et à quel rythme assurer la reprise par la CADES des déficits cumulés de la branche famille et de la branche maladie sur la période 2012-2017 ?

Ensuite, quel mode de financement choisir pour notre système de protection sociale ?

Enfin – cette question est cruciale –, quelles réformes apporter à la prise en charge des différents risques de la sécurité sociale ?

Au printemps 2013, une concertation sera engagée au sujet des retraites, à partir du nouveau diagnostic établi par le Conseil d’orientation des retraites. Ce diagnostic est essentiel pour évaluer les effets réels de la réforme de 2010 et l’incidence de la dégradation de la conjoncture économique intervenue depuis lors. Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie et le Haut Conseil de la famille seront mobilisés pour s’assurer de la pertinence des dépenses de soins et de l’adéquation des prestations familiales aux besoins réels des Français. Quant au Haut Conseil du financement de la protection sociale, il devrait être prochainement saisi à nouveau par le Gouvernement. Nous aurons bien entendu à débattre de ces travaux.

Pour l’heure, je conclurai en disant simplement que la commission des finances a émis un avis favorable sur l’adoption de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je voudrais remercier chaleureusement les rapporteurs de leurs observations et de leurs analyses constructives de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Monsieur Caffet, le Gouvernement partage votre conviction que nous devons faire en sorte que les comptes sociaux s’inscrivent dans la trajectoire de rétablissement des comptes publics que nous avons définie. C’est une démarche exigeante, mais elle n’est nullement contradictoire avec la recherche de la justice. C’est précisément parce que nous voulons mettre l’accent sur la justice et mieux répondre aux attentes que nous sommes particulièrement attentifs à la nature des dépenses engagées. Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit tant par M. Caffet que par M. Daudigny sur la nécessité, pour répondre aux nouveaux besoins liés au vieillissement de la population et à l’amélioration des thérapies, de nous montrer extrêmement exigeants à cet égard, étant donné l’évolution spontanée des dépenses, notamment en matière d’assurance maladie. Cela passe par la mise en place de réformes de fond : un certain nombre d’entre elles sont prévues dans le présent PLFSS, d’autres ont été annoncées, s’agissant notamment des retraites.

Monsieur Daudigny, vous avez dit à juste titre que le déficit des comptes sociaux est une anomalie et qu’il est difficilement explicable et justifiable que nous transmettions aux générations futures une dette tenant au fonctionnement de notre sécurité sociale.

Ces propos, que vous aviez d’ailleurs déjà tenus dans cette enceinte l’année dernière, ont été entendus par le Gouvernement. En effet, les mesures du « contre-PLFSS » que vous aviez présenté à l’époque ont inspiré, je tiens à le dire, la loi de finances rectificative de cet été : je pense en particulier à la suppression des exonérations pour les heures supplémentaires, à l’augmentation du forfait social ou encore au renforcement de la taxation des stock-options.

Nous nous sommes également inspirés de vos propositions de l’an passé pour ce qui concerne l’intégration dans l’assiette des cotisations d’une partie des dividendes que peuvent se verser les travailleurs indépendants installés en société. Cette mesure est inscrite dans le présent PLFSS.

Enfin, nous avons aussi tenu compte des préconisations que vous aviez formulées, dans le cadre d’un rapport de la MECSS, sur l’évolution nécessaire du financement de l’hôpital. Les travaux que mène le Sénat sont donc pris en compte par le Gouvernement avec une attention particulière.

Nous aurons l’occasion de revenir, dans la suite de la discussion, sur l’intérêt présenté par la mise en place d’une fiscalité comportementale. Vous avez marqué votre préoccupation en la matière. Il nous faudra déterminer comment mettre en œuvre de telles politiques de santé publique, mais nous partageons la volonté de faire en sorte que les mesures financières du PLFSS s’inscrivent dans cette perspective : il n’y a pas, d’un côté, le financement, et, de l’autre, la santé publique ; les deux dimensions sont liées.

Monsieur le rapporteur général, vous avez consacré de longs développements à la politique du médicament, qui représente en effet un enjeu important. À cet égard, je partage votre sentiment : nous devrons simplifier les dispositifs de taxes et de prélèvements, car ils sont peu lisibles et peu compréhensibles, tant pour les assurés que pour les entreprises. Pour autant, vous le savez, un certain nombre de rapports de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et de l’Inspection générale des finances, l’IGF, indiquent qu’il existe des marges de manœuvre en matière de médicament et de biologie. Il s’agit simplement de les utiliser efficacement.

Je fais mienne l’analyse selon laquelle l’industrie pharmaceutique représente un atout pour notre pays. Elle constitue une source de développement et de croissance tout à fait importante. Je ne trahirai aucun secret en disant que les responsables mêmes de ce secteur économique estiment qu’il est temps de s’engager de manière plus résolue dans l’exploration de nouvelles perspectives, notamment en matière de biomédicaments. On ne peut pas en rester au développement des médicaments « classiques », il faut défricher de nouveaux territoires, à l’instar d’autres pays qui ont pris de l’avance sur nous dans ce domaine. Il s’agit là d’un enjeu majeur au regard de notre capacité de développement. À nos yeux, la compétitivité des laboratoires pharmaceutiques repose non pas uniquement sur les tarifs de remboursement, mais aussi sur leur capacité d’innovation et de recherche. Ce n’est pas en maintenant artificiellement des prix élevés pour des médicaments anciens qui rencontrent beaucoup de succès auprès des malades que nous garantirons dans la durée le maintien de la compétitivité de ce secteur.

Je ne reviens pas sur vos propos tout à fait pertinents sur la structure des prescriptions. Il est vrai qu’existe en la matière une spécificité française, sur laquelle il va nous falloir nous pencher. L’encadrement de la visite médicale et de la publicité, la modification des pratiques de prescription, la prescription selon la DCI sont pour nous des éléments à promouvoir, de même, évidemment, que la politique de substitution de médicaments génériques.

J’ai volontairement laissé de côté, dans mon propos liminaire, la problématique de la promotion, mais une question spécifique m’ayant été posée sur le sujet, j’indique que la taxe sur la promotion, telle qu’elle a été présentée par les députés, a pour objet de contribuer à la régulation de la prescription en modérant les dépenses de promotion de l’industrie pharmaceutique. Elle concerne donc exclusivement les médicaments et dispositifs médicaux remboursables.

Dans ce contexte, lorsque les laboratoires prennent en charge des frais de congrès, il est difficile de considérer que ces dépenses n’ont pas un caractère promotionnel, au moins en partie. En effet, ces manifestations sont des occasions privilégiées pour mettre en œuvre des politiques de promotion de certains dispositifs ou médicaments. Pour autant, il ne s’agit pas de prendre en compte l’ensemble des frais de congrès au titre de la promotion : ils ne le seront qu’à hauteur de 50%. Ainsi, par le jeu des abattements divers et variés prévus par le texte, la taxe sur la promotion n’aura qu’une incidence limitée, voire nulle, pour les petites et moyennes entreprises, particulièrement actives dans le secteur des dispositifs médicaux. D’après les simulations que nous avons réalisées à la suite du dépôt de l’amendement correspondant à l’Assemblée nationale, l’impact financier de l’intégration partielle des frais de congrès aux dépenses de promotion serait d’un peu moins de 10 millions d’euros. Si une telle mesure pouvait contribuer à réorienter les financements des entreprises pharmaceutiques vers la recherche et l’innovation, plutôt que vers la promotion, nous en serions bien évidemment satisfaits. Le montant en jeu est limité, mais il n’est pas insignifiant. Il est notamment prévu que cette somme vienne abonder un fonds permettant de financer les associations œuvrant en faveur de la démocratie sanitaire, c’est-à-dire, pour employer un vocabulaire compréhensible de tous, de la défense des droits des malades. Cela ne nous paraît pas inintéressant ; c’est la raison pour laquelle le Gouvernement a émis un avis favorable sur cet amendement d’origine parlementaire à l’Assemblée nationale.

Je le répète, j’ai la volonté de simplifier les taxes pesant sur les laboratoires pharmaceutiques. Nous avons engagé une étude sur ce point, des rapports ayant été demandés à l’IGAS et à l’IGF. Ils nous permettront de rendre plus lisible un dispositif qui apparaît pour l’heure un peu obscur.

Je veux indiquer à M. Kerdraon que j’ai été évidemment très sensible à l’appréciation d’ensemble qu’il a portée sur le volet médico-social de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui marque un engagement important, avec 650 millions d’euros de crédits supplémentaires et un taux d’évolution du sous-ONDAM maintenu à 4 %, mais qui est en réalité supérieur, compte tenu des compléments apportés.

J’ai bien entendu son observation sur la prise en compte de l’accompagnement du vieillissement de certaines catégories de la population et les difficultés que rencontreraient des associations assurant la prise en charge, notamment, des malades atteints d’Alzheimer et de leurs familles, qui ont le sentiment d’être confrontées à des procédures d’appel d’offres trop lourdes de la part des agences régionales de santé. Dans le cadre de la mise en place du prochain plan Alzheimer, lequel sera en réalité étendu à l’ensemble des maladies neurodégénératives, il est prévu une évaluation non seulement sur le fond, mais aussi sur la forme, afin de déterminer quelles mesures ont bien fonctionné, quels lieux d’accueil, quelles structures, quels dispositifs donnent satisfaction, comment faciliter la relation avec l’administration et valoriser les démarches qui sont efficaces, plutôt que d’en rester à une approche strictement administrative.

De manière générale, je souhaite que les agences régionales de santé puissent simplifier leur manière de travailler en relation avec les acteurs locaux. Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué les associations, mais je pourrais également parler des élus locaux, car je crois qu’on ne peut pas mener de politique territoriale sans lien fort avec l’ensemble des acteurs de terrain, c’est-à-dire les élus locaux, les associations, les représentants des patients dans les territoires, les établissements de santé.

M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il ne doit pas y avoir d’un côté l’administration d’État, de l’autre les acteurs territoriaux. Il faut aboutir à des partenariats, ce qui n’empêche pas que viendra le moment de l’arbitrage et du choix, lequel ne sera pas forcément celui qu’auraient souhaité les acteurs locaux, qui auront du moins été associés à la démarche.

En ce qui concerne l’assurance vieillesse, nous avons effectivement eu la volonté de mettre en place des mesures d’équité visant certaines catégories de la population. Je partage votre souhait, monsieur Kerdraon, que soient mises en place des politiques prenant mieux en compte la pénibilité. C’est la raison pour laquelle, dès le 2 juillet dernier, nous avons pris un décret permettant à des femmes et à des hommes ayant commencé leur carrière avant 20 ans et travaillé depuis sans discontinuer de pouvoir partir à la retraite dès 60 ans. Il s’agit d’une importante mesure de justice et d’équité.

J’ai également été sensible à vos propos sur la situation des personnes ayant été privées du bénéfice de l’AER par le gouvernement précédent. Il nous faut étudier précisément quelle incidence peut avoir l’entrée en vigueur du décret précité, lequel ne s’applique que depuis le 1er novembre dernier. Une partie d’entre elles devraient, selon nous, bénéficier de son application, qui concernera 110 000 personnes l’année prochaine. En tout état de cause, nous devrons à l’évidence avancer sur ce sujet.

M. Godefroy a souligné avec raison que ce PLFSS comporte des avancées importantes, notamment la création d’une nouvelle prestation complémentaire pour le recours à tierce personne, la facilitation du recouvrement des sommes dues par les employeurs quand une faute inexcusable est reconnue. Concernant l’ouverture d’une autre voie d’accès à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le sujet est difficile, mais nous allons le reprendre.

Vous avez manifesté des inquiétudes que je souhaiterais pouvoir dissiper à l’occasion de ce débat, monsieur Godefroy. En particulier, la baisse des dotations de l’État au FIVA ne constitue en aucun cas un désengagement financier. Aucun établissement public, surtout dans la période actuelle, n’a vocation à conserver des réserves équivalentes à un an de dépenses : c’est donc par souci de bonne gestion que nous avons pris en compte les réserves du FIVA.

C’est exactement la même démarche qui nous a amenés à utiliser les réserves non consommées du Fonds d’allocation temporaire d’invalidité des agents des collectivités locales pour réduire les besoins de financement de la CNRACL. Il s’agissait, là encore, de réserves extrêmement importantes dont le maintien est difficilement justifiable en cette période où il convient de gérer de façon serrée les disponibilités des organismes et régimes de sécurité sociale.

En ce qui concerne la prévention, nous ne pouvons que souscrire à votre souhait de la voir renforcer. Ce sera l’enjeu de la prochaine convention d’objectifs et de gestion, dont le calendrier devrait être légèrement décalé pour assurer sa coordination avec celui de la branche maladie. Un certain nombre de thèmes, par exemple celui des systèmes d’information, nécessitent en effet d’être appréhendés conjointement.

Nous aurons l’occasion de revenir sur certaines de vos propositions à l’occasion de l'examen des amendements que vous présenterez. Le Gouvernement l’abordera de la manière la plus constructive possible.

Madame Pasquet, je voudrais vous rassurer : la revalorisation des prestations familiales, telle qu’elle est prévue, permettra de maintenir leur pouvoir d'achat l’année prochaine.

Certes, les comptes de la branche famille restent en déséquilibre, et il n’y aura pas d’amélioration l’année prochaine. Mais si nous n’avions pris aucune mesure dans le cadre de ce PLFSS, c’est une aggravation de la situation que nous connaîtrions ! Notre action marque un coup d’arrêt à la politique qui avait été engagée par le gouvernement précédent et témoigne d’une volonté forte de notre part.

Comme l’a annoncé Mme Bertinotti, la nouvelle convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAF sera signée au début de l’année prochaine. C’est dans ce cadre que seront abordées les évolutions souhaitables du réseau des caisses d’allocations familiales, au vu du bilan de la mise en œuvre de la convention en cours, notamment de la départementalisation. Je vous sais particulièrement attentive à la situation difficile dont nous avons héritée, notamment dans les Bouches-du-Rhône ; à cet égard, je puis vous indiquer que Mme Bertinotti se rendra à Marseille très prochainement. Nous nous sommes efforcés de mettre en place une politique qui permette de maintenir la situation, de garantir les conditions de travail des salariés tout en répondant au mieux aux attentes des familles. Mme Bertinotti aura l’occasion de vous répondre plus longuement dans la suite de la discussion.

Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments que je souhaitais vous apporter. Monsieur le rapporteur général, croyez que je partage votre souhait de voir le Gouvernement mieux remplir ses obligations en matière d’information du Sénat, la situation n’étant pas toujours optimale à cet égard actuellement. Le rapport sur le Fonds d’intervention régional, que vous avez évoqué, devrait vous être transmis aujourd'hui : c’est certes un peu tard, mais mieux vaut tard que jamais ! Je vous exprime mes regrets pour cette transmission tardive. Je serai très attentive à ce que les relations entre le Gouvernement et le Parlement s’inscrivent dans un climat de transparence, seul à même de garantir un travail constructif.

Demande de réserve

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (début)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement demande la réserve jusqu’à demain, quatorze heures trente, des amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 11, des articles 11 à 20 et des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 20.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve ?

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis favorable.

M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de réserve formulée par le Gouvernement.

Il n’y a pas d’opposition ?...

La réserve est ordonnée.

Discussion générale (suite)

Demande de réserve
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, les soldes sociaux s’améliorent : voilà ce que le Gouvernement et les rapporteurs mettent en avant. Cela est vrai cette année, ce le sera l’année prochaine, mais c’était déjà le cas l’année précédente !

Le déficit du régime général est en effet passé de près de 24 milliards d’euros en 2010 à 17,4 milliards d’euros en 2011, pour s’établir à 13,1 milliards d’euros en solde rectifié cette année et, selon vos prévisions, à 11,4 milliards d’euros en 2013. L’ONDAM sera respecté pour la deuxième année consécutive.

Pour nous, l’amélioration est donc continue, mais le Gouvernement évoque un « changement de cap ». (Mme la ministre des affaires sociales et de la santé quitte l’hémicycle.) Il est regrettable, madame la ministre, que vous nous quittiez en cet instant !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Je suis là, moi !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Quel est donc le nouveau cap suivi ? Le Gouvernement a-t-il fixé un calendrier de retour à l’équilibre des comptes sociaux ? Voilà la double question, essentielle, à laquelle il convient de répondre.

En commission, vous nous avez annoncé, monsieur le rapporteur général, que, sur la période 2012-2017, les projections prévoyaient un déficit cumulé des branches famille et maladie de 34,6 milliards d’euros. Cela peut donner à croire que l’équilibre n’est pas, ou pas encore, programmé. Le Gouvernement commence d’ailleurs par porter le taux d’augmentation de l’ONDAM à 2,7 %, alors que la Cour des comptes recommandait de le fixer à 2,35 %. Il se glorifie de l'augmentation des dépenses, mais les recettes ne sont pas à la hauteur. Or cet équilibre est vital, cela a été rappelé, pour faire face au passif accumulé.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Accumulé par qui ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Les déficits cumulés, faut-il le rappeler, sont abyssaux : en 2010, nous avons transféré 130 milliards d’euros à la CADES et allongé sa durée de vie jusqu’en 2024, tandis que l’endettement financier a atteint, au 31 décembre 2011, 170 milliards d’euros. Pour des raisons d’opportunité financière, le présent texte ne prévoit aucune reprise du déficit pour 2012, mais il ne fait pas de doute que ce sera le cas l’année prochaine. Quant aux perspectives pour 2012-2017, elles imposeront une augmentation de 0,25 point du taux de la CRDS. M. Cahuzac et Mme Touraine ont raison de parler d’impôt sur les générations futures : c’est peut-être le plus inéquitable des prélèvements.

Il nous faudra donc, tôt ou tard, renouer avec l’excédent pour rembourser la dette sociale. En évoquant un calendrier de retour à l’équilibre, il ne s’agit donc pas de faire un procès d’intention au Gouvernement. Je le dis en toute franchise, nul, dans cet hémicycle, n’a d’ailleurs de leçons à donner à quiconque. Nos interrogations n’ont pas d’autre objet que de contribuer à faire émerger les solutions dont notre système de protection sociale a si urgemment besoin.

Nous sommes au pied du mur des réformes structurelles. Le Premier ministre a défendu, mardi dernier, le principe d’une « discipline nouvelle » dans le pilotage de l’action publique : « Toute nouvelle dépense devra être financée par des économies en dépense ; le financement par une recette nouvelle ne sera plus possible. » Nous ne pouvons que nous en féliciter, mais, convenons-en, ce principe n’est pas encore appliqué dans le présent PLFSS, qui est donc, comme ses prédécesseurs, un PLFSS de gestion, comportant deux améliorations au dire du Gouvernement : en 2013, l’effort sera mieux réparti entre recettes nouvelles et économies ; il portera prioritairement sur le système, et non sur les assurés.

Le premier objectif semble atteint : l’équilibre entre recettes et économies paraît presque acquis puisque, sur les 5 milliards d’euros de rééquilibrage projetés, 2,4 milliards d’euros proviendraient d’économies sur les dépenses de santé.

En revanche, on nous permettra de nuancer l’affirmation du Gouvernement selon laquelle l’effort porte davantage sur le système que sur les assurés.

Cela m’amène à l’analyse du contenu même des mesures qui nous sont présentées et qui se répartissent, selon nous, en deux catégories.

La première regroupe certaines dispositions à nos yeux difficilement défendables, à tout le moins si elles ne sont pas amendées.

Je pense par exemple à la remise en cause de la niche sociale dont bénéficient les particuliers employeurs, qui ne sert pas l’emploi. Par ailleurs, différer à 2018 l’entrée en vigueur de la facturation individuelle des prestations hospitalières publiques, alors que l’objectif aurait dû être atteint en 2012 et qu’il l’est dans le secteur privé depuis 2005, ralentit la modernisation du système. L’hôpital public a besoin de se mettre d’urgence à l’heure du numérique, comme d’ailleurs la médecine libérale.

Mais l’une des mesures les plus problématiques à nos yeux est sans doute la création, au travers de l’article 16, de la contribution additionnelle de solidarité sur les pensions de retraite et d’invalidité, ou contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la fameuse CASA. Au départ, le Gouvernement refusait d’aligner le taux de CSG pour les retraités sur celui s’appliquant aux actifs ; aujourd’hui, il crée la CASA : n’est-ce pas un peu hypocrite ?

De plus, le produit de la CASA devrait être affecté de manière pérenne à la compensation de l’APA pour les départements. C’est exactement ce que prévoyait la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche, que la Haute Assemblée a adoptée il y a un peu plus de deux semaines.

Autrement dit, avant de penser à financer des réformes futures, il faut assurer le financement des dispositifs existants.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous ne l’avez pas fait avant non plus !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. C’est tout le contraire de ce qu’organise le dispositif gouvernemental : en 2013, les départements perdront en ressources issues de la CSG ce qu’ils gagneront au titre de la CASA ; après quoi la contribution financera la future réforme de la dépendance, dont on ne sait rien aujourd'hui. Il y a là, on l’avouera, quelque chose qui ne va pas…

Ma collègue Muguette Dini reviendra plus en détail sur tous ces points, en présentant les amendements que nous avons déposés.

J’en viens à la seconde catégorie de mesures, qui regroupe des dispositions nous semblant aller dans le bon sens.

Ainsi, nous sommes de ceux qui soutiennent l’élargissement de la couverture sociale des élus locaux.

De même, le développement de la fiscalité comportementale s’impose, même si, jusqu’ici, il s’opère de manière quelque peu anarchique. Il faudra sans doute remettre le système à plat pour y voir plus clair, mais nous sommes favorables à l’introduction d’une contribution sur les boissons énergisantes et sur l’huile de palme, monsieur le rapporteur général.

Dans la même veine, nous souhaitons un relèvement de la part spécifique de la taxe sur les tabacs pour pénaliser les marques pratiquant les prix les plus bas, parce que c’est ainsi que les objectifs de santé publique pourront être atteints.

Au chapitre des bonnes nouvelles, j’évoquerai la branche AT-MP.

Je ne peux que me féliciter, avec Jean-Pierre Godefroy, de la décision prise par Mme la ministre de ne pas demander aux victimes de l’amiante le remboursement de leur indemnisation à la suite de la décision de la cour d’appel de Douai du 27 octobre 2011. Je salue également la réouverture de la liste des bénéficiaires du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante à tous les salariés exposés à ce risque.

Concernant le volet relatif à la santé, un certain nombre de mesures préfigurent la réforme d’ensemble dont la branche maladie a besoin.

C’est le cas des expérimentations relatives à la permanence des soins, aux appels d’offres pour le transport des patients ou à un parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie.

On le sait, il y a là d’importantes sources de maîtrise médicalisée de la dépense. Les gains d’efficience potentiels dans ces domaines ont été soulignés dans le dernier rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Nous ne pouvons que nous féliciter de voir ces propositions trouver une traduction concrète. Cependant, il ne s’agit encore que d’expérimentations, tout cela reste donc bien timide, et parfois peu compréhensible : pourquoi expérimenter durant trois ans un système aussi connu que celui des appels d’offres pour le transport de patients ?

La suppression de la convergence tarifaire entre hôpitaux publics et cliniques privées est une autre bonne initiative, qui concrétise, elle aussi, une proposition que nous avions formulée dans le dernier rapport de la MECSS. Cela ne remet pas le moins du monde en cause la T2A, dont ce rapport soulignait d’ailleurs très explicitement qu’elle représentait un progrès incontestable mais devait néanmoins être améliorée, notamment en ce qui concerne la fixation des tarifs, ni la convergence intrasectorielle, que nous appelons de nos vœux.

Lorsque l’on sait que des écarts de coûts de 30 % subsistent au sein même de chacun des deux secteurs, on mesure à quel point le chemin est encore long !

Je pense aussi aux articles encadrant l’exercice libéral à l’hôpital et abrogeant le secteur optionnel, qui doivent être mis en relation avec l’adoption de l’avenant 8 visant à un meilleur encadrement des dépassements d’honoraires, que nous soutenons naturellement.

Mais, en réalité, toutes ces mesures, aussi positives semblent-elles, se heurtent au mur des réformes structurelles.

Ces réformes s’imposent depuis quelques années déjà, chacun en a bien conscience, et ce tant en recettes qu’en dépenses.

En matière de recettes, il s’agit, bien entendu, de la nécessité de réformer le financement de la protection sociale. C’est une réforme que le Gouvernement a annoncée, et qui ne pourra passer, selon nous, que par un transfert partiel des cotisations famille et santé vers l’impôt, et cela à somme nulle, pour respecter les principes posés par le Premier ministre.

En matière de dépenses, trois immenses chantiers au moins sont devant nous.

En ce qui concerne tout d’abord le médicament, Mme la ministre a dit attendre 1 milliard d’euros d’économies grâce aux dispositions du présent PLFSS. Cela est bien, mais, en réalité, c’est l’ensemble du système qu’il faut remettre à plat. Est-il normal que, à niveau de santé équivalent, la France compte plus de médicaments homologués ou agréés que la Grande-Bretagne et que le poids de l’industrie pharmaceutique dans le PIB soit moins élevé chez nous ?

Ensuite, l’autre grand chantier à ouvrir d’urgence est celui des actes inutiles ou superflus. Selon la MECSS, ils représenteraient 28 % de l’activité, soit entre 12 milliards et 15 milliards d’euros d’économies potentielles, ce qui équivaut au montant du déficit annuel, et même un peu plus ! C’est colossal, avouons-le ! La problématique porte sur l’articulation entre secteur ambulatoire et hôpital, sur le transfert d’actes, sur l’assurance médico-légale des praticiens et sur le dossier médical personnel, qui est le dispositif clef mais que l’on semble enterrer avant qu’il ne soit né !

Enfin, le dernier chantier est celui des retraites. Le Gouvernement a chargé les comptes de la branche vieillesse avec le retour partiel à la retraite à 60 ans et décidé d’augmenter les cotisations retraite pour compenser cette dépense, mais à quand la révision du système ? À quand le régime par points ? La réforme de 2010 en a programmé l’étude : où en est le rapport sur ce sujet prévu et souhaité par la MECSS du Sénat ?

En conclusion, même s’il y a des raisons d’espérer, ici comme ailleurs, tout reste à faire ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, employant un ton qui ne leur est pas familier, M. le rapporteur général et Mme le ministre des affaires sociales et de la santé se sont lancés dans une diatribe à l’antique contre le précédent gouvernement, l’accusant d’erreurs impardonnables.

Nous savons tous que les réformes dans le domaine de la protection sociale sont difficiles. Soyons réalistes : cette difficulté, l’ancienne majorité l’a connue et n’a pas toujours réussi, tant s’en faut, à la surmonter. Je suis le premier à admettre que, par le passé, on aurait peut-être pu mieux faire.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’est déjà bien de le reconnaître !

M. Gilbert Barbier. Mais, monsieur le rapporteur général, vous évitez soigneusement d’évoquer la crise économique qui a frappé le monde en 2008.

Tous les efforts entrepris, année après année, pour parvenir à une vraie réduction du déséquilibre ont été réduits à néant par cette crise. Oui, le régime général a connu un déficit majeur de 23,9 milliards d’euros en 2010, mais, avec une démarche volontariste de la précédente majorité, il a pu être ramené à 17,4 milliards d’euros en 2011 : il faut le reconnaître ! Quant à la prévision pour 2012, elle s’établit à 13,1 milliards d’euros, soit une baisse de 4,3 milliards d’euros par rapport à 2011.

Aujourd’hui, vous arrivez au pouvoir et, selon l’expression maintenant classique, nous passerions de l’ombre à la lumière, y compris pour l’équilibre des comptes sociaux. Je n’ai pourtant pas souvenance que, dans le passé, la gauche ait régulièrement présenté des budgets en équilibre… Mme le ministre a parlé de « rupture du contrat républicain », de « régression sociale » ; c’est là un vocabulaire qui, à mon avis, n’est pas de mise dans cette discussion.

L’an dernier, monsieur le rapporteur général, vous dénonciez « des mesures éparpillées entre divers projets, ce qui rend peu lisible la politique du Gouvernement, sans doute à dessein, et une tâche très difficile pour qui voudrait avoir une approche d’ensemble des comptes sociaux ».

Que faut-il penser aujourd’hui, après les décisions déjà prises au cours de l’été, comme la refiscalisation des heures supplémentaires, de la série de mesures contenues dans ce PLFSS pour 2013 ? Hausse des cotisations sur les emplois à domicile et pour les auto-entrepreneurs, imposition d’un forfait social sur les indemnités de rupture conventionnelle, élargissement du périmètre de la taxe sur les salaires au détriment de l’épargne salariale, prélèvements sur les travailleurs indépendants, taxe supplémentaire sur la bière, contribution additionnelle sur les retraites : la liste est longue ! Mais quels sont les objectifs ? Quelle est la lisibilité de tout cela ?

Certaines mesures peuvent être justifiées, j’en conviens, d’autres ne représentent peut-être pas des augmentations de prélèvements très importantes, j’en conviens aussi, mais, toutes cumulées, elles constituent une atteinte au pouvoir d’achat des salariés, déjà bien écorné en cette période de crise, et elles affectent la compétitivité de nos entreprises, voire l’envie d’entreprendre.

Comment prétendre, comme l’a fait le Premier ministre, que neuf personnes sur dix ne sont pas concernées ? N’y a-t-il que les riches qui boivent de la bière ? Sont-ce ceux-là qui font des heures supplémentaires ou qui mangent du Nutella ? (Sourires.) Il est vrai que cette dernière taxe vous permet, monsieur le rapporteur général, un éclat médiatique exceptionnel !

À l’évidence, il ne suffit pas de dire que les efforts sont justes pour qu’ils soient acceptés. Vos mesures touchent non seulement les riches, mais tous les ménages, ceux des classes moyennes et même les plus modestes.

Vous trouvez aussi de nouveaux champs de prélèvements sur ceux qui ne défilent pas dans la rue, en taxant lourdement les travailleurs indépendants, les petites et moyennes entreprises, et même les très petites entreprises, dont le Gouvernement souhaite, par ailleurs, favoriser le développement. Comprenne qui pourra !

Vous ne manquez pas non plus de vous attaquer aux professionnels de santé : c’est une tradition, à gauche ! (M. Jean Desessard s’exclame.) L’actualité médiatique de ces dernières semaines s’est focalisée sur les dépassements d’honoraires, en jetant l’opprobre sur l’ensemble de la profession médicale, alors que ce ne sont que quelques centaines de médecins qui abusent, ce que je réprouve.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il y a trois syndicats de médecins qui ont voté l’accord conventionnel !

M. Gilbert Barbier. Ce n’est pas l’accord conventionnel qui va résoudre le problème. Malheureusement, les médecins et chirurgiens exerçant en secteur 1 seront bien, selon l’expression en vogue, les dindons de la farce.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Non, pas du tout !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Après les pigeons, on passe aux dindons !

M. Gilbert Barbier. Aucune majoration satisfaisante n’est prévue pour les praticiens relevant du secteur 1, monsieur le rapporteur général, ni aucune révision du « K » pour les chirurgiens !

La vérité est que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, pas plus que les précédents, n’apporte les solutions nécessaires à la sauvegarde de notre système de protection sociale. Il ne résout pas la question des déficits structurels des branches maladie et famille, et les mesures d’abaissement de l’âge de la retraite prises cet été fragilisent la branche vieillesse.

L’augmentation significative des recettes relève davantage d’un réflexe facile que d’une volonté réfléchie de mobiliser les assurés sociaux et les acteurs professionnels autour d’enjeux clairement formulés, dans une perspective de financement durable de notre protection sociale.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Les assurés sociaux sont mobilisés à bloc !

M. Gilbert Barbier. Ces deux dernières années, j’avais présenté, comme l’ancien rapporteur général Alain Vasselle, un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoyant une majoration de la CSG. Vous aviez, à l’époque, soutenu cette proposition, monsieur Daudigny. La CSG est, en effet, un impôt à très large assiette. Pourquoi ne pas avoir proposé son relèvement cette année, au lieu de cibler les retraités ou de taxer les buveurs de bière sous prétexte de santé publique ?

Le rapport Gallois a préconisé un choc de compétitivité à concurrence de 30 milliards d’euros, reposant sur une baisse des cotisations patronales et salariales, compensée par une hausse de deux points de la CSG. Vous faites le choix d’un crédit d’impôt et d’une hausse de la TVA : c’est à n’y rien comprendre, quand on sait que vous aviez crié haro sur la TVA « compétitivité » mise en place par Nicolas Sarkozy et que ce fut la première mesure que vous avez abrogée en arrivant au pouvoir !

Je ne vois pas de cap bien défini dans votre projet. Comment comptez-vous résoudre le problème de l’évolution des dépenses de santé, inéluctablement plus rapide que la progression du PIB ? Quelles décisions allez-vous prendre en matière de retraites face à l’allongement de la vie ? Quelle politique familiale allez-vous, très précisément, mettre en œuvre ? Quelle politique de santé allez-vous mener en termes d’accès aux soins ?

Autant de questions pour lesquelles je ne vois pas, pour l’instant, se dessiner de réponses tangibles dans ce PLFSS. Vous condamnez ce qui a été fait par le passé dans la première et la deuxième partie de celui-ci, mais vous utilisez les mêmes recettes dans la troisième ! Quant à la quatrième partie, pour m’en tenir essentiellement à la branche maladie, elle n’effleure même pas un certain nombre de problèmes, comme ceux des coopérations et complémentarités hospitalières ou du reste à charge des patients.

Après les 7,2 milliards d’euros d’impôts nouveaux instaurés par la loi de finances rectificative, les quelque 20 milliards d’euros d’impôts supplémentaires inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013, vous poursuivez dans la même voie en prévoyant, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, une augmentation des recettes à hauteur de 3,4 milliards d’euros.

En matière de dépenses, disons-le, il n’y a en revanche rien de nouveau, si ce n’est un coup d’arrêt porté aux réformes structurelles engagées par la précédente majorité, avec la fin de la convergence tarifaire entre le public et le privé prévue par la loi HPST ou le report de l’application de la T2A.

Certes, la convergence tarifaire ne saurait être érigée en dogme, mais on ne peut ignorer le fait qu’une appendicectomie coûte jusqu’à quatre fois plus cher dans un centre hospitalier universitaire que dans une clinique. Je vous l’accorde, la comparaison est complexe, puisque les groupes homogènes de séjour, les GHS, en clinique, ne couvrent pas les honoraires, et qu’il existe des variantes dans les modes de prise en charge, mais ce revirement me paraît essentiellement politique.

Je m’interroge également sur l’opportunité de suspendre le passage à la T2A pour les hôpitaux locaux et les soins de suite et de réadaptation, aujourd’hui très coûteux dans le cadre d’un ONDAM fermé.

Par ailleurs, quelles sont les orientations du Gouvernement en matière de restructurations hospitalières ? Il s’agit non pas d’opérer des fusions ou des restructurations pour elles-mêmes, mais de mieux coordonner l’offre hospitalière sur la base d’un diagnostic de l’état sanitaire d’un territoire et, surtout, d’une exigence : la sécurité et la qualité des soins.

L’accident dramatique et regrettable survenu dans le Lot a relancé le débat autour des fermetures de maternités ou de services de chirurgie de proximité, mais nos concitoyens sont-ils prêts à accepter les risques liés au manque de pratique des médecins qui y exercent ou au manque d’équipements de pointe ?

La restructuration des hôpitaux permet une meilleure spécialisation, gage d’une sécurité accrue des soins. J’ajouterai que l’hôpital n’a pas vocation à être un lieu où convergeraient, par défaut, tous les problèmes, y compris sociaux, qui ne peuvent pas trouver de solution ou de réponse organisée. L’hôpital moderne est là pour fournir, au bon moment, un apport puissant de compétences cliniques et techniques.

Nos collègues Le Menn et Milon, dans leur rapport sur le financement des hôpitaux, ont proposé une tarification au parcours ; c’est une notion intéressante. Avec le développement des pathologies chroniques, qui représentent plus de 60 % des dépenses de santé, nous aurions sûrement intérêt à trouver un mode de tarification incitant à une prise en charge plus transversale entre l’hôpital, les soins de ville et le secteur médico-social, appuyée sur des formes d’exercice pluri-appartenantes et pluri-professionnelles.

Vous mettez en œuvre une expérimentation sur le parcours de santé des personnes âgées. Elle est bienvenue ; sans doute gagnerait-elle à être étendue à tous les patients.

Quant aux rémunérations forfaitaires que vous proposez pour la médecine de ville, je ne sais quoi en penser. Elles conduisent inéluctablement à réduire le système français de rémunération à l’acte qui a fait la qualité et la renommée de cette médecine. Plutôt que de réactualiser les cotations de certains actes ou consultations, notamment en chirurgie, vous préférez fonctionnariser la médecine.

Enfin, concernant l’ONDAM, vous proposez une augmentation de 2,7 %, finalement proche de celles que vous aviez dénoncées ces dernières années. Pour contenir cette évolution tendancielle, vous ciblez essentiellement les soins de ville. Il y a, certes, des abus dans le secteur ambulatoire, dans le transport sanitaire, mais je crois qu’il y a aussi des marges d’économies dans le secteur hospitalier.

Pour conclure, je dirais que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale passe à côté de l’essentiel du sujet, qui est de mobiliser les assurés sociaux et les acteurs professionnels autour de réformes partagées. Vous leur demandez des efforts ; encore faut-il leur expliquer vers quels résultats tendent ces efforts. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année dernière, je dénonçais à cette tribune un projet de budget non pas de la sécurité sociale, mais de l’insécurité sociale. Les gouvernements précédents nous avaient en effet habitués à des projets de loi de financement de la sécurité sociale « court-termistes », émaillés de propositions électoralistes venant alourdir les dépenses de santé pour les plus modestes et les classes moyennes : droit d’entrée de 30 euros pour l’aide médicale de l’État ; diminution des indemnités journalières perçues en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, afin de lutter contre les prétendus abus des salariés ; doublement de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance à laquelle sont assujettis les contrats de santé solidaires et responsables ; franchises médicales ; déremboursements, etc. Autant de mauvais souvenirs et de solutions fausses, qui plus est contre-productives !

De ce point de vue, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 marque clairement une rupture. Pour la première fois depuis longtemps, ce budget n’introduit aucune remise en cause du niveau des prestations servies par le régime d’assurance maladie obligatoire, ce dont les écologistes se félicitent.

M. Jean-Pierre Plancade. Ils ont raison !

Mme Aline Archimbaud. Nous accueillons également avec une grande satisfaction certaines mesures que nous attendions depuis longtemps. Je pense par exemple à celle, fondamentale, mettant fin à la convergence tarifaire public-privé ou encore au remboursement à 100 % de l’IVG.

Notre groupe a cependant déposé une quarantaine d’amendements tendant à compléter ce projet de loi. Je n’ai pas le temps de tous les énumérer, mais sachez que nous proposerons, notamment, le tiers payant intégral pour les moins de vingt-huit ans, une demande de rapport sur la formation des médecins et l’influence des visiteurs médicaux sur la prescription de produits de santé, la création d’un répertoire des médicaments génériques, la réforme des critères d’accès à l’aide complémentaire santé en vue d’améliorer l’efficacité de ce dispositif, l’abrogation de la convergence tarifaire pour les EHPAD et les unités de soins de longue durée, l’interdiction du sponsoring de manifestations sportives par des fabricants de boissons sucrées, l’incitation à utiliser le vélo comme mode de déplacement professionnel.

Ces propositions, loin de faire l’objet d’amendements de défiance, constituent des avancées souhaitées par les écologistes. Elles visent à compléter et à prolonger les mesures gouvernementales dans un souci réaffirmé de responsabilité, de prévention et de solidarité.

Vous l’aurez compris, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous interprétons bien comme un texte de transition, va selon nous dans la bonne direction.

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme Aline Archimbaud. Notre principal motif d’insatisfaction – je me permets d’employer ce mot, car la solidarité ne doit en aucun cas exclure la franchise – concerne la santé environnementale, grande absente du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme Aline Archimbaud. C’est d’ailleurs clairement lors de l’atelier « santé environnementale », parent pauvre de la conférence environnementale qui s’est déroulée les 14 et 15 septembre dernier, que les échanges ont achoppé, et ceux de nos collègues, élus ou associatifs, qui y ont assisté en sont ressortis très insatisfaits.

Afin de résoudre ce problème, nous vous proposons de poser les bases d’un système de taxation progressive de substances de grande consommation particulièrement dangereuses pour la santé.

Il s’agit en premier lieu de l’aspartame, un édulcorant qui entre dans la composition de 5 000 produits à travers le monde et dont l’utilisation fait polémique depuis 1974, date de sa première autorisation de mise sur le marché aux États-Unis.

Une étude danoise de 2010 portant sur près de 60 000 femmes enceintes a conclu à un risque accru de naissances prématurées chez les femmes enceintes consommant des boissons gazeuses contenant de l’aspartame.

Selon les conclusions d’une autre étude, celle de la Fondation européenne Ramazzini, institut italien privé de recherche en cancérologie environnementale, l’exposition à de hautes doses d’aspartame induirait des cancers du foie et du poumon chez certains animaux.

Je citerai en deuxième lieu l’huile de palme, qui représente 25 % de la consommation mondiale d’huile en 2010 pour un volume total de 42 millions de tonnes par an, et qui contient des graisses saturées, notamment de grandes quantités d’acide palmitique, l’une des trois mauvaises graisses saturées reconnues comme dangereuses pour la santé humaine. Si la culture artisanale et la consommation parcimonieuse d’huile de palme n’entraînent pas à elles seules de problèmes de santé, l’usage intensif de cette huile et son omniprésence dans les produits alimentaires de consommation courante sont préoccupants sur le plan tant sanitaire qu’environnemental. En effet, la culture industrielle du palmier à huile accapare de plus en plus de territoires, détruisant les forêts, menaçant les écosystèmes et mettant à mal les moyens de subsistance locaux en Indonésie, en Afrique ou ailleurs.

J’évoquerai en dernier lieu le diesel, responsable de l’émission de grandes quantités de particules très fines qui pénètrent facilement dans l’appareil respiratoire et sont à l’origine de cancers et de maladies respiratoires ou dégénératives, comme l’a officiellement confirmé l’OMS dans un rapport rendu public en juin 2012 et faisant suite à une étude de longue durée.

Nous vous proposons d’instaurer pour chacune de ces trois substances une taxe qu’il conviendra d’augmenter chaque année jusqu’en 2016, et dont nous attendons trois effets vertueux.

Premièrement, ces taxes inciteront les producteurs recourant à l’aspartame et à l’huile de palme, ainsi que les acheteurs de voitures diesel neuves, à se reporter sur les solutions de substitution qui existent.

Deuxièmement, elles procureront dès 2013, en année pleine, 795 millions d’euros de ressources supplémentaires pour les finances publiques, qu’il s’agira de mettre au service de la santé des Français. Nous proposons de créer un fonds de prévention auquel seraient affectés 750 millions d’euros et d’augmenter les dépenses de prévention en leur affectant 1 % supplémentaire du budget total de la santé. Les 45 millions d’euros restants seraient affectés à la conduite d’études indépendantes, dont nous manquons cruellement, portant sur les effets sanitaires de plusieurs substances suspectées d’avoir des effets délétères sur la santé et l’environnement, études que les pouvoirs publics ne prennent pas en charge à l’heure actuelle.

Madame la ministre, des études publiques payées par les pouvoirs publics, donc neutres, sont nécessaires et urgentes, et permettraient d’échapper à l’influence de tel ou tel intérêt économique.

Troisièmement, des effets positifs de ces taxes sont attendus sur les dépenses d’assurance maladie, dans la mesure où nous nous attaquerons ainsi aux vraies causes du déficit de la sécurité sociale, c’est-à-dire à l’épidémie de maladies chroniques que l’on observe dans nos sociétés occidentales et qui coûtent très cher.

Vous l’aurez compris, nous proposons ici des mesures favorables tant pour la santé de nos concitoyens que pour les finances publiques, et nous ne comprendrions pas qu’il nous soit opposé une fin brutale de non-recevoir.

Des chercheurs indépendants nous alertent depuis des années, et il est de notre devoir de parlementaires de relayer leur message. Nous ne pourrons pas dire, plus tard, que nous ne savions pas.

Nous nous félicitons que le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Yves Daudigny, se soit saisi de la question de l’huile de palme, ainsi que nos collègues de l’UMP qui proposeront également un amendement tendant à instaurer une taxation spécifique de ce produit.

Nous espérons, mes chers collègues, que vous soutiendrez de la même façon nos amendements visant à taxer l’aspartame et le diesel, qui relèvent de la même philosophie.

Nous, écologistes, entendons dire depuis des années qu’il est trop tôt pour aborder ces questions et que ce n’est pas encore le bon moment. Aujourd’hui, à l’heure du changement, alors que la crise écologique, sanitaire et sociale prend une ampleur inédite, les Français ne comprendraient pas que nous ne passions pas à l’action. Nous ne pouvons pas, à nouveau, remettre ce problème à plus tard. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Alain Milon.

M. Alain Milon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est sans doute le moment le plus important de notre session parlementaire en matière de définition de notre protection sociale et de détermination de son financement. Malheureusement, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 proposé par le Gouvernement est à l’image du projet de loi de finances pour 2013, c’est-à-dire bien léger : il prévoit peu de mesures structurantes et de nombreuses hausses des prélèvements.

À l’origine de ce projet de loi, il y a une utopie ou une tromperie, celle des hypothèses de croissance et des prévisions de recettes. Alors que le contexte économique actuel est particulièrement morose pour la France et pour l’économie européenne, le Gouvernement s’appuie sur des hypothèses macroéconomiques irréalistes, voire fausses. Il prévoit ainsi pour l’année 2013 une augmentation de 0,8 % du PIB et une hausse de la masse salariale de 2,3 %. Pour mémoire, la plupart des économistes font aujourd’hui des prévisions sensiblement inférieures, entre 0,2 % et 0,6 % de croissance pour 2013.

Par ailleurs, le projet de loi qui nous est présenté prévoit de fixer l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, à 2,7 %. Cette orientation nous semble non seulement contraire aux recommandations de la Cour des comptes, qui préconisait de s’en tenir à 2,5 % – cela aurait permis de respecter cet indicateur, comme c’est le cas depuis deux ans –, mais aussi aux engagements internationaux de la France, notamment au traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, que nous avons ratifié voilà quelques jours et qui nous incite à maîtriser nos dépenses publiques. Ce n’est pas dans de telles conditions que nous pourrons réduire le déficit de la France à 3 % de notre PIB !

Ce projet de loi manque d’une vision d’ensemble, d’une ligne cohérente qui en ferait l’acte fondateur de mise en œuvre de la solidarité nationale émanant d’un gouvernement en fonction depuis six mois. Il pouvait être l’occasion d’engager des réformes structurelles sur le plan tant du financement que du fonctionnement de la sécurité sociale. Au lieu de quoi, ce texte est dépourvu de ligne directrice.

Vous êtes rattrapés, sinon débordés, par l’urgence et la gravité de la situation économique du pays. Il ne faut plus « prendre le temps de décider », comme le disait le Président de la République en septembre dernier ; il faut agir pour conjuguer la compétitivité des entreprises et la protection de notre modèle social, dont M. Hollande reconnaissait l’importance dans son discours d’ouverture de la conférence sociale de juillet dernier.

Vous avez attendu le rapport sur la compétitivité de M. Gallois, tout en précisant que celui-ci n’engagerait que son auteur… Et tandis que vous vous apprêtiez à faire tomber, au travers du projet de loi de finances pour 2013, une pluie d’impôts sur les entreprises et les épargnants sans véritablement réduire la dépense publique, voilà que vous prenez la direction opposée en reconnaissant enfin que le coût du travail pose un problème. Or il n’est pas possible, dans la période que nous traversons, de faire preuve d’hésitation et d’approximation.

Je rappelle que, selon un rapport du Trésor de 2011, les cotisations sociales patronales représentent 43,75 % du salaire brut en France, c’est-à-dire plus du double de ce qu’elles coûtent en Allemagne, soit 21,03 %, et que le financement de la protection sociale repose à 53 % sur les salaires en France, contre 47 % en Allemagne où la fiscalité, notamment la TVA, est plus importante.

Je rappelle encore que les taux de chômage et de croissance sont incomparablement plus favorables en Allemagne qu’en France, et que nous aurions grand tort de ne pas nous inspirer de solutions qui ont fait leurs preuves à l’étranger.

En décidant d’instaurer la TVA sociale, le gouvernement précédent voulait mettre à contribution les importations qui font concurrence aux produits français du fait d’une main-d’œuvre à bon marché. Un de vos tout premiers réflexes a été de la supprimer, sans rien prévoir pour la remplacer. Vous voilà donc bien embarrassés : vous savez qu’il s’agissait d’une bonne mesure, mais vous ne pouvez pas la réintroduire sans vous ridiculiser. Alors, vous faites appel à M. Gallois pour trouver des solutions alternatives, des mesures qui auraient les mêmes effets que la TVA sociale, sans qu’il s’agisse pour autant de la TVA sociale.

Qu’est-ce que cela donne ? Manifestement peu préoccupé par la cohérence de son action, le Gouvernement renonce au choc de compétitivité proposé dans ce rapport et nous propose, à la place, une mesure technocratique de crédit d’impôt dont les premiers effets n’interviendront qu’à partir de 2014. Dans une démonstration éclatante de ses propres contradictions, il assure le financement de cette mesure par une hausse de la TVA, alors que le candidat Hollande disait de la TVA sociale proposée par le précédent gouvernement qu’elle était injuste, inefficace et même inconséquente sur le plan du soutien de l’activité économique.

Il n’est pas sûr que la hausse que vous nous proposez soit meilleure puisqu’elle est générale et pénalise des secteurs économiques sensibles, alors que notre TVA sociale était ciblée sur les importations concurrentes des produits français.

Les Français jugeront.

Les Français, justement, que voient-ils ?

Rien, car le Gouvernement refuse de s’aider de tous les travaux menés par le gouvernement et la législature précédents.

Rien, car le Gouvernement perd du temps en missions et commissions diverses alors que les décisions doivent être prises immédiatement.

Rien, car le Gouvernement leur expose ses contradictions. Il parle de concertation à qui veut l’entendre, mais défend un projet de loi qui, je le rappelle, a recueilli les avis défavorables de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, de la Caisse nationale des allocations familiales, de la Caisse nationale d’assurance vieillesse et de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

Ce PLFSS ne prévoit aucune réforme structurelle et abandonne celles qui, mises en place précédemment, étaient en mesure d’assainir durablement les comptes de la sécurité sociale.

En l’absence de propositions concrètes pour une réforme en profondeur de la sécurité sociale, le Gouvernement fait le choix du dogmatisme fiscal, celui du « tout impôt ».

Les taxes inscrites à hauteur de 3,4 milliards d’euros sont économiquement néfastes. En effet, leur disproportion par rapport au faible effort d’économies prévu est de nature à peser très lourdement sur l’ensemble des Français, sur le travail et sur l’économie. Elles ne permettront pas de réaliser dans de bonnes conditions l’équilibre des comptes publics et pourraient même le compromettre en décourageant l’activité.

Je rappelle que la Cour des comptes, dans un rapport dont vous n’avez, là non plus, pas tenu compte, avait suggéré un partage 50/50 entre augmentations des recettes fiscales et économies dans la dépense publique.

À ces préconisations de bon sens, vous préférez une avalanche de taxes. Certaines, en particulier, ont pour effet d’augmenter le coût du travail et portent donc préjudice au financement de la sécurité sociale, que vous prétendez pourtant protéger.

Au-delà, au travers des mesures que vous prenez, vous pointez un doigt injustement accusateur sur les citoyens français concernés par des situations particulières.

Il s’agit des entrepreneurs, dont les cotisations vont augmenter de 2 % à 3 %, même sous le régime d’auto-entrepreneur, qui encourage l’initiative individuelle et nourrit la croissance.

Il s’agit des travailleurs indépendants, commerçants, artisans et professions libérales, sur qui vous allez faire peser une hausse des cotisations de 1,3 milliard d’euros, au risque de décourager l’accès aux professions de l’artisanat.

Il s’agit aussi, au risque de développer le travail clandestin, des particuliers employeurs, qui ne pourront plus déclarer qu’au réel leur employé, dans les secteurs tant de l’aide à domicile que des services à la personne.

Il s’agit enfin de l’industrie pharmaceutique, qui fait partie des domaines d’excellence de l’industrie française et à laquelle vous allez faire payer 1 milliard d’euros de taxes supplémentaires.

Nous aurons, évidemment, l’occasion de revenir sur ces mesures au cours de l’examen des articles et de la défense de nos amendements.

J’en viens à la branche maladie.

Dans ce domaine comme dans les autres, je ne peux qu’exprimer mon incrédulité en constatant l’absence de toute ligne cohérente dans les dispositions proposées. Au lieu de poursuivre l’effort de réforme engagé par le gouvernement précédent, vous supprimez des mesures majeures sans prévoir la moindre réforme structurelle. L’abrogation du secteur optionnel, par l’article 42 du projet de loi, constitue à cet égard une illustration sans équivoque.

M. Alain Milon. Le Gouvernement a qualifié d’« historique » l’accord sur les dépassements d’honoraires, accord qui revient en fait à conserver un secteur optionnel qui ne dit pas son nom.

Comme, dans votre majorité, des voix se sont élevées pour critiquer cet accord, vous avez accepté un amendement à l’Assemblée nationale pour limiter l’exercice libéral à l’hôpital sans aucune concertation avec les syndicats de médecins hospitaliers. Or vous avez confié, il y a tout juste un mois, une mission à Dominique Laurent, membre du Conseil d’État, afin d’examiner le cadre dans lequel se pratiquent les dépassements d’honoraires à l’hôpital public.

La « logique » suivie est la même que celle qui est à l’œuvre pour le rapport Gallois : pour donner des gages à vos amis politiques, vous interdisez ou réfutez par avance des mesures utiles uniquement parce qu’elles vous ont été proposées ou pourraient l’être !

En matière d’accès aux soins sur l’ensemble du territoire, nous sommes tous d’accord sur le constat : dans certaines zones, obtenir un rendez-vous avec un spécialiste peut prendre des mois, et seul un généraliste sur trois partant à la retraite trouve un remplaçant.

Vous proposez la création d’un praticien local de médecine générale pour lutter contre la désertification médicale. Nous nous interrogeons sur la mise en œuvre de cette proposition : quels critères permettront précisément de mesurer l’insuffisance d’offre médicale ? Pouvez-vous nous donner une carte précise des zones concernées ?

En outre, il nous semble prématuré de créer une nouvelle incitation à l’installation alors que l’ensemble des mesures existantes n’est pas encore connu par la grande majorité des internes.

Qui plus est, vous ne tenez pas compte des travaux de la Haute Assemblée et de sa commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire. En effet, un groupe de travail sur la présence médicale sur l’ensemble du territoire a été mis en place depuis le mois de juin dernier et doit rendre ses conclusions, à propos des « déserts médicaux » notamment, au début de l’année prochaine.

Je tiens à souligner que l’Association nationale des étudiants en médecine de France, qui a été auditionnée dans ce cadre, a rappelé l’inefficacité des mesures coercitives et la nécessité du développement de structures pluridisciplinaires, comme les maisons de santé.

En revanche, nous soutenons l’élargissement du contrat d’engagement de service public, mis en place en 2009, sous le gouvernement précédent, à d’autres professionnels de santé, notamment aux chirurgiens-dentistes.

Concernant l’hôpital, nous vous rejoignons sur la suppression de la convergence tarifaire, même si nous préférerions parler de suspension plutôt que d’abrogation pour suivre les recommandations du rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, sur le financement des établissements de santé, rapport que j’ai eu l’honneur de présenter avec mon collègue Jacky Le Menn.

En effet, la mise en place d’une tarification liée à l’acte thérapeutique pratiqué conduit, instinctivement, à l’idée que le financement doit être égal quels que soient le lieu ou les modalités d’exercice, l’acte étant censé être le même et le patient soigné de manière identique. Or des différences fondamentales existent, entre l’ensemble des établissements de santé en France, en ce qui concerne les modes de prise en charge, les contraintes d’organisation, le coût des personnels ou encore la capacité à programmer l’activité.

Mon collègue René-Paul Savary interviendra plus particulièrement sur le volet médico-social, mais je souhaite d’ores et déjà indiquer que nous présenterons un amendement visant à suspendre la convergence tarifaire jusqu’en 2018.

Je précise que nous avions déposé un amendement ayant pour objet la suppression de la convergence tarifaire dans le médico-social, notamment dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ainsi que dans les unités de soins de longue durée, et j’aurais aimé connaître l’avis de Mme Touraine sur celui-ci puisqu’elle avait déposé un amendement à l’objet identique l’an dernier à l’Assemblée nationale. Malheureusement, notre amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution…

Je souhaite réaffirmer que l’instauration, par le précédent gouvernement, du jour de carence sur les arrêts maladie à l’hôpital ne doit pas être remise en cause. En effet, avec la diminution de l’absentéisme de courte durée, et donc une meilleure organisation du travail pour les personnels, cette réforme a atteint son objectif : une meilleure qualité de soins. Elle a en outre permis aux établissements de faire des économies, que la Fédération hospitalière de France estime entre 60 millions et 75 millions d’euros.

En revanche, nous sommes opposés à l’article 43 ter sur les modes de facturation des actes de biologie médicale à l’hôpital. Cet article prévoit de revenir à une facturation par les laboratoires de « seconde intention », c’est-à-dire, pour l’essentiel, les laboratoires de biologie médicale des CHU effectuant pour l’extérieur des analyses très spécialisées, généralement cotées en B hors nomenclature, directement auprès des patients.

Cette disposition réintroduit un déséquilibre public-privé du fait des règles de facturation imposées aux hôpitaux et de l’éloignement vis-à-vis du patient. En outre, elle est en contradiction avec l’esprit de l’ordonnance Ballereau, qui prévoit un dossier biologique unique sous la responsabilité du laboratoire de biologie médicale préleveur.

Je veux par ailleurs vous alerter, mesdames les ministres : le service de médecine de l’adolescent du CHU de Bicêtre, reconnu nationalement et internationalement, est menacé par le départ de son chef de service et par un nouveau projet de spécialité médicale qui pourrait porter préjudice à sa spécificité.

Cet exemple concret renvoie plus généralement à la question de l’approche particulière qui doit prévaloir quant à la santé des adolescents. Aussi pouvez-vous nous donner de plus amples informations sur les projets concernant le service de la médecine de l’adolescent du CHU de Bicêtre et nous rassurer quant à la préservation de ce type d’approche médicale ?

Je souhaite également vous alerter à propos d’un projet de décret résultant de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.

Il reste essentiel que, conformément à ce que nous avions voté, les Français soient bien informés en matière de liens d’intérêt entre les médecins et des laboratoires pharmaceutiques. Or le Gouvernement prépare, semble-t-il, un projet de décret qui va à l’encontre de cette nécessaire information des patients. Malgré la volonté claire du législateur, ce projet de décret ne met en effet pas en œuvre l’obligation pour les industriels de transmettre toutes les conventions conclues avec les médecins, en particulier les contrats d’experts et d’orateurs.

Dans ces conditions, comment le Gouvernement compte-t-il encourager la transparence voulue par le législateur et donner à l’Ordre des médecins les moyens d’accomplir sa mission de contrôle ?

Enfin, le Gouvernement a sans doute été interpellé par les professionnels de la biologie médicale !

Ceux-ci nous ont fait part de leur inquiétude face à la baisse des tarifs de la biologie médicale, que le PLFSS entend imposer pour la septième année consécutive. Ces dispositions ne sont pas de nature à rassurer les laboratoires de petite taille, notamment dans des zones de faible démographie médicale. Je rappelle qu’en France les laboratoires de biologie médicale emploient 45 000 personnes réparties sur 4 000 sites.

Il conviendrait plutôt de prendre en compte le coût réel des laboratoires et de renforcer leur rôle dans la prévention de façon à mieux informer les patients et à réaliser des économies pour le système de santé. Il nous semble nécessaire de raisonner sur l’ensemble de la chaîne médicale, sans se limiter au strict point de vue comptable.

Pour conclure, je veux dire que cette préoccupation comptable est la seule à l’œuvre dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont ne se dégage aucune vision d’ensemble non plus qu’aucune mesure d’envergure ; en ressort uniquement l’obsession de limiter le déficit en recourant au matraquage fiscal.

Les médecins hospitaliers sont mécontents, les biologistes furieux, l’industrie du médicament est étranglée par les taxes et annonce des plans sociaux. C’est ainsi que vous réussissez l’exploit de vous mettre à dos toutes les catégories professionnelles en lien avec la protection sociale !

Qui plus est, vous n’êtes même pas sûrs de pouvoir vous rapprocher de l’équilibre tant toutes ces nouvelles taxes pourraient être contre-productives. Élargissement du forfait social, augmentation des cotisations sociales, hausse des cotisations des travailleurs indépendants, toutes les forces vives du pays vont y passer, et cela en pure perte ! En imposant aux artisans, aux commerçants et aux professions libérales plus de 1 milliard d’euros de cotisations supplémentaires en 2013,…

Mme Catherine Génisson. Ils l’ont accepté !

M. Alain Milon. … vous êtes certains de vider leurs caisses, mais pas de remplir celles de la sécurité sociale !

Bref, il s’agit à notre sens d’un PLFSS « pour rien » en matière de réformes structurelles, notamment de réorganisation de l’offre de soins. Comment voudriez-vous que nous vous suivions sur une telle voie ?

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera, évidemment, contre le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, dans un contexte que chacun s’accorde à reconnaître difficile, tant sur le plan économique que social, dès lors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 est un texte de protection, de redressement des comptes et de modernisation de notre système de santé, je le soutiens. J’ai d’ailleurs été heureuse d’entendre Mme Touraine dire que notre modèle social était un élément déterminant de notre compétitivité dans la mondialisation.

Pour la branche maladie, les dépenses de l’ensemble des régimes obligatoires de base sont estimées à 190 milliards d’euros pour 2013, soit 40 % de l’ensemble des dépenses.

Quant au déficit, il est en légère diminution – pour s’établir à 5,1 milliards d’euros, soit 2,7 % des dépenses, après 8,5 % en 2011 et 5,5 % en 2012 – grâce aux mesures de redressement que nous avons prises dans le cadre des différents collectifs budgétaires de l’été 2012.

C’est un projet de loi de financement de la sécurité sociale de protection qui exprime clairement un changement de cap, après cinq ans de réduction de la protection de nos concitoyens, entraînant 15 % d’entre eux, parmi les plus précaires, à renoncer à des soins.

C’est un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui objective une augmentation de l’ONDAM de 2,7 % sur le plan tant des dépenses de ville que des établissements hospitaliers, soit 0,2 % de plus que l’année dernière. Cela doit améliorer la prise en charge des pathologies chroniques, la qualité des relations entre les professionnels et les patients ainsi que la qualité du travail des professionnels, mieux reconnus et mieux organisés en équipes.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 amorce en profondeur une réorganisation du système de santé autour du patient et du citoyen ; il instaure également des relations rééquilibrées et, dans le même temps, beaucoup plus complémentaires entre les professionnels libéraux, le monde hospitalier et le secteur médico-social.

À ce point de mon propos, je m’attarderai quelques instants sur un sujet qui interroge les usagers comme les professionnels : l’efficience et les économies proposées à hauteur de 2,4 milliards d’euros.

L’efficience est souhaitable dès lors que l’approche est strictement qualitative, prenant en compte l’état actuel des connaissances scientifiques, tant pour des situations générales que pour des situations particulières, tant dans le secteur libéral que dans le secteur hospitalier. L’efficience ne peut être une sanction comptable.

Mesdames les ministres, nous approuvons les 2,4 milliards d’euros d’économies qui sont prévues, mais si nous soutenons l’encadrement des dépenses de l’industrie pharmaceutique, nous pensons qu’il faut reconnaître la force et la compétitivité de ce secteur et dès lors lui permettre ses travaux de recherche. Par ailleurs, au-delà de la poursuite du développement du générique, et nous soutenons le générique français, il me semble que nous devons être attentifs à la prescription médicamenteuse.

M. Gilbert Barbier. Très bien !

Mme Catherine Génisson. De même, le maintien du maillage de la biologie sur notre territoire est une urgence, point vient d’être abordé.

Trois priorités président à l’architecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale : renforcer les soins de proximité, redonner sa force au service public et mettre en place des mesures de justice sociale.

Je dirai un mot des soins de proximité et de leur couverture.

Vous avez souhaité, avec une grande exigence de justice sociale, que les dépassements d’honoraires soient régulés et, pour cela, vous avez choisi la voie de la négociation. Cette dernière a abouti, même si elle laisse pour le moins certains perplexes, voire en colère, en particulier dans les secteurs de grande pénibilité comme la chirurgie, l’obstétrique ou l’anesthésie.

Cela étant, les internes, nos médecins de demain, s’interrogent sur leur avenir. La régulation des honoraires médicaux tant dans le privé que dans le public est une nécessité. Elle ne peut être basée sur le constat des excès inadmissibles d’une minorité, qui doit être simplement sanctionnée. Cette régulation est une nécessité, car elle est un des éléments, même si ce n’est pas le seul, du creusement des inégalités dans l’accès aux soins, inégalités tant territoriales que sociales.

La régulation des dépassements d’honoraires ne doit pas occulter des questions plus structurelles, qui perdurent et pour lesquelles les solutions sont d’autant plus complexes à mettre en œuvre que le contexte socioéconomique est contraint. Il s’agit, en particulier, de la revalorisation d’un certain nombre d’actes chirurgicaux, ainsi que de la possible prise en compte de la pénibilité de l’exercice de certaines spécialités, point qui n’a jamais été tranché par les professionnels eux-mêmes. Concernant les honoraires chirurgicaux, Mme la ministre nous a donné des informations qui vont dans le bon sens.

Très clairement, nous approuvons cette volonté de réguler les dépenses d’honoraires ; nous souhaitons un encadrement efficace et nous demandons que le sujet soit traité dans sa globalité. Les solutions se construiront en toute responsabilité, en tenant compte de l’environnement économique et social.

Pour nos concitoyens, dans le cadre du pacte républicain, nous devons construire la médecine de demain.

En matière de soins de proximité, le Gouvernement fait des propositions très concrètes. Il prévoit ainsi de mobiliser 200 praticiens territoriaux de médecine générale par an sur des zones sous-dotées médicalement. Nous approuvons également le remboursement à 100 % de l’interruption volontaire de grossesse ainsi que la gratuité de la contraception pour les mineures. Nous vous félicitons de ces décisions, mais au-delà de la revalorisation de l’IVG, il faudra remobiliser les jeunes étudiants, car les médecins militants qui ont permis l’existence de la loi défendue avec tant de courage par Mme Veil ne sont peut-être plus là. Il me semble qu’il y a beaucoup à faire sur la question.

Mme Michelle Meunier. C’est vrai !

Mme Catherine Génisson. Félicitons-nous du développement du tiers payant, en particulier pour les étudiants. Nous proposerons, d’ailleurs, des amendements qui vont en ce sens.

Je vous remercie également, mesdames les ministres, de redonner toutes ses couleurs au service public hospitalier. C’était tellement attendu. On ne peut saucissonner les missions de service public. Le service public est un. C’est une obligation pour l’hôpital public que de servir et d’assumer le service public. Sur ce sujet, il me semble que la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », a voulu induire une compétition qui n’avait pas lieu d’être entre le secteur public et le secteur privé. La médecine n’est pas une marchandise ; la médecine est une science humaine.

Je vous remercie également d’avoir retenu la proposition votée à l’unanimité pas les deux rapporteurs de la MECSS, Jacky Le Menn et Alain Milon, d’« abroger » – j’utilise ce terme à dessein – enfin le processus de convergence tarifaire.

Madame la ministre, le texte prévoit d’améliorer la vie quotidienne des hôpitaux. Nous devons poursuivre la réflexion sur le devenir des hôpitaux locaux, qui doivent trouver de nouvelles fonctions dans le système de santé. Félicitons-nous de l’expérimentation de l’optimisation des parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie. Cette initiative illustre le bien-fondé qu’il y a à diversifier la reconnaissance des parcours de soins source du travail tant médical que paramédical, et dès lors d’imaginer de possibles forfaits, sans supprimer pour autant le paiement à l’acte sur des situations simples.

Par ailleurs, saluons l’amélioration de la situation des demandeurs d’emploi et celle des détenus.

Avant de terminer mon propos, j’évoquerai rapidement quelques sujets.

Il me semble nécessaire en matière de fiscalité comportementale de dépasser le choc frontal entre production, tradition et enjeux de santé publique. Certains d’entre nous vous feront des propositions, car il est important de ne pas créer de discriminations entre les différents producteurs sur l’ensemble du territoire. Par ailleurs, il est également important de voter des taxes sur les produits reconnus comme étant éminemment dangereux, je pense à l’huile de palme ou aux produits énergisants.

De surcroît, au nom de la justice sociale, il est important de traiter de l’avenir de la sécurité minière et de l’égalité des territoires quand les indicateurs socio-sanitaires sont si inégaux. Le Président de la République l’a d’ailleurs rappelé à la Mutualité lorsqu’il a évoqué la situation de la région Nord-Pas-de-Calais. Il est nécessaire de mettre en place des mécanismes pour corriger ces inégalités.

Mesdames les ministres, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 est un texte d’engagement, exprimant votre courage politique, votre exigence de justice sociale et votre volonté de moderniser la protection sociale dans notre pays. Je sais que vous êtes ouvertes au débat ; nous vous soutiendrons tout au long de nos échanges, qui, je le crois, seront constructifs. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Jean Desessard. Ah, suspense !

M. Dominique Watrin. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, ce budget sera-t-il celui du changement ?

Voilà plus de dix ans que la Haute Assemblée examine des projets de loi de financement de la sécurité sociale élaborés par la droite. Dix ans que nous constatons, avec toujours plus d’inquiétude, la manière dont les politiques libérales mises en œuvre cassent l’emploi, creusent la dette publique et appauvrissent la sécurité sociale. Dix ans que nous constatons, de manière plus ou moins directe, le basculement d’un régime de protection sociale fondé sur les cotisations vers un système de plus en plus assis sur l’impôt et les contributions personnelles.

Tout cela nous éloigne un peu plus du principe originel de la sécurité sociale : chacun cotise en fonction de ses moyens et reçoit en fonction de ses besoins.

Ce basculement est le fruit de choix politiques que nous n’avons eu de cesse de dénoncer, à savoir la prédominance accordée systématiquement au capital sur le travail, avec ce mythe démenti pourtant chaque jour que la libéralisation du marché du travail et des règles fiscales, ainsi que la libre concurrence profiteraient automatiquement à l’emploi et donc au pays.

Il suffit de regarder autour de nous pour mesurer les effets concrets de ces politiques. Les bas salaires, les contrats précaires, les mauvaises conditions d’emploi et de travail ont augmenté. Des millions de salariés ne parviennent plus à vivre dignement du fruit de leurs efforts et le chômage, indemnisé ou non, connaît un développement continu.

Confrontés aux diktats des actionnaires contre l’économie réelle, les salariés sont de plus en plus souvent victimes de méthodes de management, qui nient leur humanité, les réduisant souvent à de simples variables d’ajustement. La sécurité sociale paie, au final, les pots cassés de tous ces gâchis.

La droite, celle qui voudrait aujourd’hui donner des leçons de gestion et d’équilibre, est pleinement responsable de cette situation.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Eh oui !

M. Dominique Watrin. Entre 2002 et 2012, la dette sociale supportée par la CADES est passée de 29 milliards d’euros à plus de 137 milliards d’euros.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’était avant la crise !

M. Dominique Watrin. Par ailleurs, 700 000 emplois industriels ont été sacrifiés avec le silence complice des précédents gouvernements.

Parallèlement, la part de financement des employeurs à la sécurité sociale n’a eu de cesse de diminuer. À l’inverse, nos concitoyens, y compris les plus modestes, ont été soumis à de nouveaux prélèvements fiscaux, destinés à compenser l’insuffisance des contributions patronales. Franchises, déremboursements et forfaits, instauration d’une journée dite de « solidarité », fiscalisation des indemnités journalières des accidents du travail, taxation des mutuelles, sortie automatique au bout de cinq ans du régime des affections de longue durée, les ALD, réduction de la prise en charge des patients en ALD atteints d’hypertension artérielle, voilà le bilan de la droite !

Malgré ces mesures, toutes plus injustes les unes que les autres, présentées comme devant responsabiliser les patients et réduire les déficits, celui de la branche maladie est passé de 1 milliard d’euros en 2001 à 5,5 milliards d’euros en 2012.

Au vu de ces résultats, nous sommes en droit de soulever une question que se posent d’ailleurs nos concitoyens : à quoi ont servi les sacrifices demandés aux Français, si ce n’est à accroître les dividendes versés aux actionnaires ?

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Exactement !

M. Dominique Watrin. Quelle efficacité ont eu les 170 milliards d’euros d’aides publiques et sociales versées annuellement aux entreprises ?

Quel bilan tirer des 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales consenties tous les ans aux entreprises et dont une part n’est tout simplement jamais compensée ?

Mes chers collègues, si nous défendons la sécurité sociale par rapport au modèle assurantiel, ce n’est pas seulement parce que nous considérons que c’est un héritage utile. Nous la défendons, parce que nous pensons que garantir à chacun une protection contre les aléas économiques, sanitaires et sociaux tout au long de la vie, de la naissance jusqu’à la mort, est à la fois un projet humain de grande actualité et une visée d’avenir. Car tout ce qui est soustrait au secteur commercial, au profit d’un système solidaire, est au final un atout majeur pour notre pays, pour notre économie et pour nos entreprises !

La sécurité sociale ne peut et ne doit pas être déconnectée des richesses créées dans les entreprises. Faire participer ces dernières à l’effort de solidarité n’est que justice ; c’est aussi un moyen de lutter contre le poids trop grand pris par la finance sur l’économie.

Dans ce contexte, l’élection de François Hollande a suscité d’importantes attentes. Le premier projet de loi de financement de la sécurité sociale présenté par un gouvernement de gauche a engendré de l’espérance et même de l’exigence.

Notre niveau d’intervention se situe là ; il n’est certainement pas dans la surenchère ni non plus en en rabattant sur les convictions que nous avons toujours défendues ici et que certains partageaient, pas plus tard que l’année dernière, sur les autres travées de la nouvelle majorité sénatoriale.

Nous attendions donc de ce nouveau gouvernement qu’il rompe clairement avec les logiques que nous avions dénoncées ici ensemble, qu’il revienne sur les dispositions que nous avions combattues, et même qu’il avance sur un projet plus ambitieux, tant il est urgent de redonner un nouveau souffle à notre système de santé.

Certes, ce texte comporte des mesures positives que nous accueillons favorablement, même si nous regrettons que, dans leur ensemble, elles demeurent trop partielles.

En ce qui concerne la branche maladie, nous nous réjouissons que le Gouvernement ait pris la décision de rembourser à 100 % les interruptions volontaires de grossesse. En commission, nous avons déploré que cette augmentation ne s’accompagne pas d’une revalorisation des tarifs de cet acte médical. Nous pensons que cette demande devrait être prise en compte.

Positif également est l’amendement adopté par l’Assemblée nationale permettant aux jeunes filles mineures de bénéficier de la gratuité de la pilule. Nous avons déposé un amendement complétant l’article en question afin que la pilule puisse être distribuée de manière anonyme et que les examens biologiques complémentaires soient également assurés de manière gratuite et anonyme.

Pour ce qui est de la branche famille, nous considérons comme une avancée l’expérimentation du tiers payant pour le complément de mode de garde proposé aux parents recourant à une assistante maternelle. Nous proposons d’étendre cette expérimentation aux parents qui confient leurs enfants à des micro-crèches. Nous regrettons surtout qu’aucune mesure n’ait été prise pour augmenter le nombre de places en crèches.

Pour ce qui est de la branche AT-MP, nous restons là aussi en attente. Certes, permettre aux salariés âgés de soixante ans, indépendamment de leur statut et de leur régime, de pouvoir liquider leurs pensions plus rapidement au titre de l’amiante, est un progrès. Mais le véritable changement aurait été d’élargir les conditions d’accès à l’ACATAA en faisant en sorte que les salariés puissent en bénéficier avant d’être malades. Il aurait non seulement fallu réintroduire la contribution patronale supprimée par la droite, mais aussi – et surtout, ai-je envie de dire – ne pas conditionner l’accès à l’ACATAA à une durée de cotisation de quarante et une annuités, repère légal issu de l’allongement de la durée de cotisation imposé par la contre-réforme des retraites.

Mes chers collègues, pris par le temps, et souhaitant pouvoir laisser ma collègue Laurence Cohen intervenir sur la question des hôpitaux, je ne détaillerai pas ici l’ensemble du PLFSS, mais vous aurez compris qu’au final nous demeurons, pour ce qui relève des recettes, insatisfaits.

M. Jean Desessard. Ah, mince !

M. Dominique Watrin. Nous aurions pu, c’est vrai, trouver quelques motifs de satisfaction dans deux mesures. Je pense à l’élargissement aux éléments de rémunération complémentaire de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, à la charge des sociétés d’assurance ou bien à l’assujettissement au forfait social des indemnités versées par les employeurs en cas de ruptures conventionnelles, mesure ô combien importante, tant il y a eu, on le sait, des abus en ce domaine : 300 000 ruptures conventionnelles en 2011 ! Mais en retenant le principe de taxes plutôt que de cotisations, non seulement le Gouvernement s’est privé de recettes nouvelles pour la sécurité sociale, mais il a aussi privé les salariés de droits nouveaux, notamment pour la retraite, qu’ils auraient pu acquérir par les cotisations.

Vous comprendrez surtout que nous ne pouvons pas laisser passer cette nouvelle taxe sur les retraites dite contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA.

Prévue à l’article 16 du PLFSS, la CASA constitue une taxe sur les pensions de retraite et d’invalidité. Dès le 1er avril 2013, elle devrait s’imposer à plus de 7,5 millions de retraités, qui sont assujettis à la CSG au taux de 6,6 %, soit ceux dont le montant de l’impôt sur le revenu est supérieur à 61 euros.

Je veux le dire avec responsabilité et gravité, nos concitoyens n’ont pas voté en faveur d’un gouvernement de gauche pour recevoir en boomerang une mesure de droite, surtout quand cette mesure est une des plus importantes contenues dans ce premier budget de sécurité sociale du nouveau gouvernement et, qui plus est, quand elle reprend, à peu de choses près, la proposition de notre collègue Gérard Roche du groupe centriste, votée par les sénateurs UMP il y a quelques semaines seulement.

M. Jean-Pierre Plancade. C’est abusif !

M. Dominique Watrin. Les quatre millions d’électeurs qui, au premier tour, se sont reconnus dans les propositions du Front de gauche et se sont reportés au second tour sur François Hollande, pour battre Nicolas Sarkozy et rejeter sa politique d’austérité, attendaient autre chose de ce gouvernement qu’une taxe aussi injuste que celle-ci. Car, comme je l’ai déjà dit, je le répète ici au nom du groupe CRC, on n’est certainement pas un nanti lorsqu’on gagne plus de 1 215 euros par mois.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. Dominique Watrin. Si nous sommes opposés à cette taxe, c’est que nous considérons aussi que le postulat sur lequel elle repose est mauvais. Nous avons entendu le Gouvernement nous dire que cette mesure était une première étape vers une réforme d’ampleur destinée à prendre en charge la perte d’autonomie. Cela reste d’abord à prouver, car nous faisons, pour le moment, le constat, sauf erreur, que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie serait dépouillée parallèlement et pour le même montant financier d’une part de recettes de la CSG.

Plus généralement, permettez-moi de le dire, mesdames les ministres, c’est un bien mauvais signal que de commencer à poser la question de la prise en charge de la perte d’autonomie, non pas en se souciant d’abord des besoins des personnes, mais en se préoccupant de son seul financement.

Au groupe CRC, nous sommes convaincus que la prise en charge des besoins liés à la perte d’autonomie doit relever de la sécurité sociale, et ce dans sa totalité. Son financement doit donc être assuré par les cotisations sociales élargies aux revenus financiers. Nous refusons l’idée selon laquelle le non-assujettissement des retraités à la journée de solidarité serait une niche sociale.

Je note aussi, sur ce sujet, que, pendant que l’Assemblée nationale adoptait la CASA, en en augmentant le taux, elle exonérait, sur l’initiative du Gouvernement, les plus-values réalisées par les fonds d’investissement de la taxe prévue à l’article 14.

M. Dominique Watrin. Cela donnait ainsi l’impression que l’exonération consentie à une minorité de privilégiés devait être compensée par le rehaussement d’une mesure touchant des retraités modestes. À l’issue des travaux de l’Assemblée nationale, le rendement de la CASA est curieusement passé de 350 000 à 500 000 euros quand les prétendus pigeons se voyaient exemptés des 150 000 euros de taxe prévus.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. Dominique Watrin. Alors, mesdames les ministres, s’il faut trouver des moyens nouveaux pour financer notre protection sociale, moyens fondés sur la justice, laissez-moi vous rappeler que les sénateurs communistes et socialistes avaient voté ensemble, l’année dernière, la suppression des exonérations de cotisations sociales consenties à des entreprises qui, en ne respectant pas l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, bafouent les lois de la République.

Rien ne justifie, en effet, que des entreprises qui ne respectent pas les lois puissent bénéficier, en échange de leur comportement délictueux et antisocial, d’exonérations de cotisations sociales, d’où l’amendement que nous proposons en substitution de l’article 16.

Ce PLFSS, le premier d’un gouvernement de gauche depuis dix ans, devrait être la marque du changement et prendre résolument le parti des assurés sociaux contre la finance. Il devrait marquer, selon nous, la première étape d’un financement majeur de la sécurité sociale afin de lui permettre de répondre aux exigences nouvelles nées de la crise, de la spéculation et de l’accaparement par une minorité des richesses produites par le travail.

Tel est le sens des amendements que nous avons déposés, en matière tant de recettes que de dépenses.

En conclusion, je veux le dire ici très clairement, le groupe communiste républicain et citoyen ne se réjouit pas de rejeter ce PLFSS, pas plus qu’il ne s’y résout. Il attend des actes forts sur la partie recettes, étant entendu que le montant et la nature de celles-ci déterminent le niveau de solidarité que nous voulons collectivement atteindre.

Avec nos propositions, nous offrons la possibilité au Gouvernement, non seulement de faire gagner la gauche, mais aussi de renforcer la sécurité sociale. Nous lui offrons la possibilité de porter la protection sociale à un niveau au moins égal, voire supérieur à celui que nous connaissions avant les dix ans de droite, de libéralisme et d’austérité. Telle est la seule ambition, le seul objectif du groupe CRC dans le cadre de l’examen du PLFSS pour 2013. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, M. Jean-Marie Vanlerenberghe a terminé son intervention en évoquant la question du financement de la protection sociale. Je débuterai la mienne par la même question. Notre groupe est en effet convaincu que le mode de financement de notre sécurité sociale est dépassé. Nous le martelons depuis des années. D’ailleurs, le premier état des lieux établi par le nouveau Haut Conseil du financement de la protection sociale nous donne raison.

J’en ai retenu trois observations.

À elles seules, les cotisations sociales effectives constituent 56 % des ressources totales de la protection sociale.

En leur sein, les cotisations acquittées par les employeurs représentent 63 % de cette masse, celles qui sont supportées par les salariés sont de l’ordre de 29 %. Ces cotisations patronales et salariales sont toutes deux assises sur la rémunération brute du travail.

La contribution sociale généralisée, qui s’est, pour une part importante, substituée à des cotisations sociales salariales, constitue le second poste de ressources, 13 % du total. C’est encore l’assiette des revenus d’activité qui contribue de manière prépondérante au rendement de la CSG ; en 2011, la CSG sur les revenus d’activité représentait 70 % du produit total de cette contribution, dont 60 % sur les seuls salaires.

Nous dénonçons cette logique de financement qui n’est plus tenable. Elle pèse trop sur l’emploi et la compétitivité de nos entreprises.

Financer la santé et la famille doit se faire par l’impôt et non plus par les revenus d’activité.

Nous sommes opposés au volet recettes du PLFSS, qui augmente considérablement le poids des prélèvements sociaux sur les revenus d’activité.

Tel est le sens de nos divers amendements.

Je voudrais insister en particulier sur cinq dispositions que nous jugeons inacceptables.

Nous sommes contre le déplafonnement des cotisations maladie des travailleurs indépendants non agricoles, qui touchera de plein fouet les petits commerçants et artisans. Nous préférons à cette mesure un relèvement de la taxe environnementale sur les émissions d’oxyde d’azote, l’écotaxe NOx.

Nous sommes contre la hausse des cotisations des auto-entrepreneurs, plus exactement contre cette analyse grossière de leur activité. La dernière enquête lancée par l’INSEE auprès des créateurs d’entreprise est d’ailleurs fort intéressante, notamment parce qu’elle nous informe précisément sur le portrait type de l’auto-entrepreneur. L’objectif premier de celui-ci est d’assurer son propre emploi : 66 % de ces auto-entrepreneurs sont d’anciens chômeurs. Ils doivent absolument être soutenus, à la différence des salariés et retraités à la recherche d’une activité de complément et sur lesquels pourraient peser les dispositions de l’article 11.

Nous sommes contre une nouvelle atteinte au dispositif des services à la personne, déjà mis à mal ces dernières années. Loin de coûter à l’État, il est à l’origine de recettes substantielles. Contrairement aux entreprises qui cumulent plusieurs dispositifs de soutien à l’emploi – allégements de cotisations, réduction et crédits d’impôts, contrats aidés –, les particuliers employeurs ne bénéficient que de la réduction d’impôt et d’un allégement de charges. Mais surtout, l’efficacité de ce dispositif n’est plus à prouver, particulièrement en termes de créations d’emplois, puisque plus de 700 000 emplois ont été créés depuis ces quinze dernières années. Ces emplois, tous non délocalisables, concernent des publics éloignés du marché du travail ou à faible niveau de qualification. Remettre de nouveau en cause ce soutien aux emplois à domicile entraînera, à coup sûr, une diminution du nombre d’heures déclarées, le développement du travail non déclaré et la destruction d’emplois.

Nous sommes contre l’assujettissement au forfait social des petites indemnités de ruptures conventionnelles.

Enfin, nous sommes contre l’élargissement de la taxe sur les salaires aux participations des employeurs, à la prévoyance et aux assurances complémentaires santé.

Notre critique sera moins vive sur le volet dépenses du PLFSS, sans doute parce que les dispositions qui y figurent ne sont pas de grande envergure.

Nous saluons les efforts faits pour un meilleur accès de tous aux soins. Je pense à la gratuité de la contraception pour les jeunes filles mineures,…

M. Gilbert Barbier. Très bien !

Mme Muguette Dini. … à l’expérimentation du tiers payant pour les étudiants ou à la création d’indemnités journalières maladie pour les exploitants agricoles.

Je m’arrêterai sur les propositions en faveur d’une meilleure répartition territoriale des médecins et d’une plus grande coordination des soins.

La création du praticien territorial de médecine générale, l’assouplissement du contrat d’engagement de service public et la valorisation de la coordination des soins, notamment en niveau pluridisciplinaire, sont des propositions qui nous semblent intéressantes. Nous vous encourageons cependant à aller plus loin et plus vite.

Depuis plusieurs années, notre groupe soutient qu’une meilleure répartition territoriale des professionnels de santé libéraux passe également par une adaptation de la formation des professions de santé et une évolution du mode d’exercice de ces derniers. Nous n’avons que trop tardé à les mettre en œuvre.

Il est indispensable de faire mieux connaître la médecine générale et d’en vanter les attraits à tous les étudiants engagés dans le cursus des études médicales.

Nous devons également répondre aux aspirations des jeunes médecins, mettre un terme à leur isolement, en faisant de l’exercice regroupé la norme et en favorisant les approches pluridisciplinaires.

La question du choix du lieu d’installation et du maintien dans l’activité des professionnels de santé doit être replacée dans un contexte de développement local et d’aménagement du territoire. La problématique simplement sanitaire doit être dépassée. En effet, il est difficile pour un médecin de s’installer avec sa famille dans une zone où son conjoint aura peu de possibilités de trouver un emploi, où ses enfants manqueront d’infrastructures scolaires, où services publics et commerces disparaissent.

La rénovation du cadre de la coopération entre professionnels de santé s’impose également. Il est en effet urgent non seulement de recentrer les médecins sur leur cœur de métier, mais également de libérer du « temps médical ».

Cette hétérogénéité dans la répartition territoriale des professionnels de santé a pour première conséquence un accès inégal de nos concitoyens à l’offre de soins.

Il faut aussi signaler une envolée importante des dépenses de soins de ville dans les zones surdotées.

Pour l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, une offre de soins pléthorique générerait une demande de soins « injustifiée » des patients. Une maîtrise des flux des professionnels de santé dans ces zones à forte densité conduirait donc à une maîtrise des dépenses de santé.

Nous déplorons que le projet de loi de financement de la sécurité sociale n’ait rien d’offensif en matière d’économies. Le dernier rapport de la MECSS fait état de 28 % d’actes superflus, mais aucune mesure n’est envisagée pour remédier à ce dysfonctionnement. Mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe a pourtant rappelé que 12 milliards d’euros sur les 55 milliards d’euros pris en charge dans le cadre de la T2A pourraient ainsi être économisés.

J’en viens à ma dernière remarque, qui porte sur l’hôpital public, ou plutôt sur le portrait qu’en a dressé Mme la ministre des affaires sociales. Elle a déclaré que la politique menée ces dernières années avait été néfaste pour l’hôpital public, à qui elle reproche une gestion d’entreprise. Une bonne gestion serait-elle absolument antinomique avec de bons soins ?

Mes collègues et moi-même avons auditionné les représentants de l’hôpital public, et nous avons été surpris du décalage entre leur discours et celui de Mme la ministre. Ces derniers parlent d’une T2A salutaire pour l’hôpital public, sur lequel elle a eu un véritable effet booster, même s’ils font le constat des limites de ce dispositif. Nous nous étonnons donc de l’analyse de Mme la ministre.

En résumé, nous ne pouvons nous satisfaire d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui tend à préconiser des prélèvements supplémentaires inacceptables sans proposer d’économie substantielle ou de réforme sérieuse et approfondie de l’offre de soins.

Vous l’aurez compris, notre groupe votera donc contre le texte. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.

M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, 190 milliards d’euros, c’est le montant du déficit cumulé de la sécurité sociale depuis 2002 ! La crise économique a largement contribué à l’effondrement des recettes et certains mauvais choix de nos prédécesseurs ont fait le reste.

Dans ces conditions, il faut reconnaître que le redressement des comptes sociaux est une tâche pour le moins ardue. Pour autant, l’équilibre des comptes sociaux ne doit pas être un vain mot, et c’est même, selon nous, un objectif qu’il faudra atteindre avant la fin du quinquennat.

En 2010, la situation de la sécurité sociale était particulièrement alarmante : son déficit avait alors atteint un niveau inégalé et mettait en péril tout notre système de protection sociale. Force est de reconnaître que nous sommes aujourd’hui sur la bonne voie, puisque vous proposez, mesdames les ministres, de ramener le déficit du régime général à 11,4 milliards d’euros et celui du Fonds de solidarité vieillesse à 2,6 milliards d’euros, soit un déficit total de 13,9 milliards d’euros en 2013.

D’ailleurs, comme cela a été rappelé par le rapporteur pour avis de la commission des finances, sans les dispositions votées en loi de finances rectificative cet été et sans les mesures d’économies contenues dans ce PLFSS, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse atteindrait 24,9 milliards d’euros à la fin de 2013. Nous ne pouvons donc qu’affirmer notre accord pour la voie que vous nous proposez, d’autant que vous avez fait le choix de ne pas demander d’efforts supplémentaires aux assurés, mis à rude épreuve – il faut bien le reconnaître – depuis plusieurs années.

Ainsi, d’après une enquête récente, un Français sur cinq renoncerait à se faire soigner : 57 % s’en priveraient par faute de moyens et 41 % en raison d’un mauvais remboursement des soins. Je tiens d’ailleurs à vous alerter sur la situation sanitaire et sociale particulièrement préoccupante de nos étudiants dont l’accès aux soins est de plus en plus difficile. Comment cela est-il encore possible alors que notre système de protection sociale est souvent considéré comme un modèle ? Les nombreux déremboursements de médicaments, les franchises médicales et l’envolée des dépassements d’honoraires, notamment, ont causé de nombreux dégâts.

Les mesures que vous nous proposez aujourd’hui, mesdames les ministres, doivent permettre à la fois de réduire les déficits et d’apporter de véritables réponses aux assurés. Ce texte s’inscrit dans une démarche d’équité et de justice sociale que je tenais à souligner.

Il est important que nous assurions à l’ensemble de nos concitoyens l’accès aux soins dans de bonnes conditions. Cela passe notamment par une meilleure articulation des professionnels de santé autour du parcours de soins du patient. Je pense tout particulièrement à la création des 200 contrats de praticien territorial, destinés à lutter contre la désertification des zones médicales. Se soigner devient parfois un véritable parcours du combattant, et certains patients sont contraints de parcourir de nombreux kilomètres pour se rendre chez un spécialiste, parfois même un généraliste. Garantir l’accès aux soins sur l’ensemble du territoire doit être une priorité, d’autant que le médecin, principalement dans les petits villages, est bien souvent synonyme de survie.

Votre texte comporte également des améliorations de la prise en charge de nos concitoyens les plus vulnérables.

Ainsi, je suis très favorable à l’expérimentation du versement du complément de mode de garde en tiers payant pour les familles modestes. Certaines d’entre elles, obligées de faire l’avance de frais, renoncent à faire garder leur enfant par une assistante maternelle, système jugé trop onéreux. Cette décision impacte très sérieusement le retour à l’emploi des parents ; le plus souvent, c’est la mère qui doit d’ailleurs mettre son activité professionnelle entre parenthèses.

Je pense aussi à la possibilité pour les travailleurs de l’amiante de liquider leur pension dès soixante ans en cas de carrière complète.

Comment ne pas se féliciter également du remboursement à 100 % de la contraception pour les mineures et de l’IVG ? Il s’agit là de deux avancées importantes pour les droits des femmes.

Enfin, vous avez annoncé des moyens supplémentaires pour mener à leur terme le plan Alzheimer et le plan solidarité grand âge, qui correspondent à deux grands défis que nous aurons à relever. Le redressement pérenne de nos comptes sociaux ne saurait toutefois se faire sans de véritables mesures structurelles. S’il est nécessaire de prendre, comme vous le faites, des mesures d’économies, il n’en est pas moins indispensable de repenser le financement de notre système de santé. Il est temps que nous nous engagions sur la voie d’une réforme profonde.

Mesdames les ministres, le projet de loi que vous nous proposez permettra d’amorcer le redressement de la sécurité sociale. Nous devons cependant rester vigilants. Nous proposerons plusieurs amendements pour améliorer le texte voté par nos collègues députés.

C’est dans cet esprit, reposant sur deux axes – soutien et force de proposition – que la majorité des membres du RDSE et l’ensemble des sénateurs radicaux de gauche approuveront le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans le seul but de sauvegarder, d’améliorer et de rendre plus juste notre système de protection sociale, ciment de notre pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Mes collègues, je tiens à vous rappeler que la commission des affaires sociales se réunira immédiatement après la suspension de séance, afin de poursuivre l’examen des amendements.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (suite)

8

Demande d’avis sur un projet de nomination

M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article 10 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983, M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 novembre 2012, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de transports sur le projet de nomination de M. Augustin de Romanet de Beaune pour exercer les fonctions de président-directeur général de la société Aéroports de Paris

Cette demande d’avis a été transmise à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

Acte est donné de cette communication.

9

Nomination de membres de commissions

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe de l’UDI-UC a présenté une candidature pour la commission des affaires économiques et une candidature pour la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :

- M. Jean-Claude Merceron, membre de la commission des affaires économiques, en remplacement de M. Vincent Capo-Canellas, démissionnaire ;

- M. Vincent Capo-Canellas, membre de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique, en remplacement de M. Jean-Claude Merceron, démissionnaire.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

10

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi organique

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de BPI-Groupe, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2012.

11

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2013

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Desessard.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Première partie

M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre de la santé, mes chers collègues, au début de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’impératif d’un redressement des comptes sociaux qui ne soit pas pour autant effectué au détriment de la santé des Français est très souvent revenu dans les propos. Cette idée forte – cet « élément de langage », comme l’on dit maintenant – a été tellement répétée que je me suis demandé si c’était de l’info ou de l’intox.

Bien sûr, nous partageons le souci de répondre aux besoins présents et futurs de nos concitoyens, mais une telle attitude ne relevait-elle pas de la méthode Coué ? Qu’allions-nous proposer de différent ? Comment allions-nous pallier le déficit chronique de la sécurité sociale, ce « marronnier » annuel, comme diraient les journalistes ? Comment allions-nous réagir aux envolées lyriques sur notre incapacité à y faire face ?

Eh bien, je dois dire qu’à la lecture du projet de loi je me suis senti rassuré. En effet, dans la suite logique du projet de loi de finances rectificative pour 2012, adopté cet été, l’accent a été mis sur la participation de chacun en fonction de ses moyens et sur la mise à contribution de formes de revenus jusque-là peu – voire pas – sollicitées, afin de ne pas privilégier une nouvelle fois déremboursements et autres taxations sur les consultations médicales.

L’augmentation de la taxe sur les stock-options pour les entreprises et les bénéficiaires ou encore celle du taux du forfait social sont de bonnes mesures : elles dissuadent les entreprises de verser de trop fortes « rémunérations complémentaires », à l’instar de celles dont on parle souvent depuis 2008, à savoir les bonus des traders.

Toutefois, d’autres formes de contributions doivent être trouvées, de même que d’autres exceptions ou « niches sociales » doivent être minorées.

Parmi les pistes, je pense bien sûr à celles défendues par ma collègue Aline Archimbaud pour taxer des produits dont l’abus est nocif pour la santé, faire évoluer les comportements et permettre des actions de prévention. Ces actions, aux yeux de certains, apparaissent comme des coûts supplémentaires au lancement, mais, à terme, elles viennent diminuer les coûts de prise en charge des maladies auxquelles ces produits concourent.

Ainsi que le souligne le dossier de presse de présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la « progression des besoins de soins résulte notamment d’un nombre croissant de patients soignés pour des pathologies lourdes ou chroniques », comme les cancers.

Il en va un peu de même de notre « problème » économique et écologique : les investissements dans la transition écologique peuvent apparaître comme un luxe en temps de crise, alors même qu’ils lui apportent une réponse.

Bref, en matière de santé comme ailleurs, il s’agit d’anticiper, et de ne pas le faire trop tard.

Mes chers collègues, je vous entends déjà me rétorquer que vous êtes tous écologistes !

M. Jean-Pierre Plancade. On n’a rien dit !

M. Jean Desessard. Mais il y a deux catégories d’écologistes : ceux qui souhaitent agir tout de suite et ceux qui veulent reporter l’action à demain.

M. Jean-Pierre Plancade. Demain, c’est demain !

M. Jean Desessard. Anticiper est d’autant plus nécessaire quand on sait que les scénarios de réduction des déficits du PLFSS se fondent sur des hypothèses de croissance et d’augmentation de la masse salariale, pour 2013 et jusqu’à 2017, largement sujettes à caution.

M. Philippe Bas. Parfaitement !

M. Jean Desessard. Mon cher collègue, nous essaierons de faire mentir les chiffres !

Je ne développerai pas plus avant ces considérations d’ordre général sur les recettes.

S’agissant maintenant des dépenses, à quoi a-t-on décidé de les affecter ? Quelles priorités, quelle vision de la société peut-on lire dans les orientations prises ?

Avec Aline Archimbaud, nous nous sommes répartis l’examen des quatre branches : tandis qu’elle étudiait les dispositions du projet concernant la santé et les accidents du travail, je travaillais sur celles relatives à la vieillesse et à la famille. J’aurais pu être content, car, sur ces deux dernières parties, il n’y avait pas grand-chose à dire, et peu de sujets à traiter. Mais peut-on être satisfait pour autant ? Au contraire, le moindre développement des branches vieillesse et famille traduit un léger malaise, celui de ne toujours pas pouvoir accorder à ces postes l’attention qu’ils exigent.

Commençons, mes chers collègues, par la branche vieillesse. J’y inclurai la question des retraites et des contributions nouvellement demandées aux retraités ; vous comprendrez aisément pourquoi.

Dans cet hémicycle, il y a une quinzaine de jours, nous avons examiné la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche tendant à élargir la contribution de solidarité pour l’autonomie aux travailleurs non salariés et aux retraités et à compenser aux départements la moitié de leurs dépenses d’allocation personnalisée d’autonomie. Intervenant alors dans le débat, j’avais insisté sur la « caducité » de cette proposition, eu égard à l’article 16 du présent projet de loi.

La contribution des retraités a beaucoup été décriée lors de l’examen du texte de M. Roche à l’Assemblée nationale et ici même. D’ailleurs, dans la rue, beaucoup nous ont interpellés. Pourtant, aujourd’hui, les personnes âgées bénéficient, en moyenne, d’un niveau de vie proche de celui des actifs, et la mesure ne concerne pas les petites retraites. Mais, bien sûr, cela ne se sait pas assez…

Il ne s’agit pas de nier les difficultés rencontrées par nombre des retraités. Pensons notamment aux retraités agricoles, dont les pensions restent plus faibles que la moyenne et qui, pour pouvoir accéder à leurs droits, doivent justifier d’un seuil d’années de cotisation qu’on n’exige pas des autres professions, alors même que leurs horaires hebdomadaires ont largement dépassé les 35 heures et que la convergence de leur niveau de vie avec celui des autres actifs – laquelle est un des objectifs de la politique agricole commune – est loin d’être acquise. D’ailleurs, mon collègue Joël Labbé fera des propositions à ce sujet.

Pour tenir compte du spectre important de la situation des retraités, qui est une réalité, je présenterai un amendement, déposé par les membres de mon groupe, visant à introduire une progressivité dans le montant de la contribution de solidarité, mesure qui nous paraît plus juste et qui devrait également inspirer la CSG.

Toujours à ce sujet, je vous rappelle la situation des personnes en fin de parcours professionnel qui ne trouvent pas d’emploi et qui ont acquis suffisamment de trimestres, mais qui n’ont pas atteint l’âge légal de la retraite. L’abandon de l’allocation équivalent retraite au 1er janvier 2011 n’a été que partiellement comblé par la mise en place de l’allocation transitoire de solidarité. J’espère que l’examen prochain du projet de loi de finances permettra à nouveau d’évoquer ce point.

J’en viens maintenant à la branche famille.

Les dispositions la concernant sont peu nombreuses dans le projet de loi. Plusieurs membres du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales l’ont regretté. D’ailleurs, la CNAF a émis un avis défavorable sur le texte, essentiellement, semble-t-il, en raison d’un décalage de calendrier, une avancée vers une meilleure adéquation des dispositifs aux besoins des familles nous ayant été promise lors de la conférence sociale.

À cet égard, l’article 71 du texte, qui prévoit d’étendre les expérimentations du versement en tiers payant menées par le conseil général de l’Essonne, est intéressant puisqu’il permet aux familles à revenus modestes de ne pas faire l’avance des frais pour la garde de leurs enfants. D’ailleurs, nous présenterons des amendements visant à s’assurer que les conditions seront réunies pour réussir ces expérimentations, notamment sur les territoires sous tension, où les offres de garde sont insuffisantes.

C’est de toutes ces questions qu’il conviendra de discuter, s’il nous est permis d’examiner aussi bien le volet recettes que le volet dépenses du présent projet de loi…

Mes chers collègues, j’espère que nous pourrons évoquer ces sujets ! (Mme Laurence Cohen, par un geste, exprime son interrogation.)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Nous l’espérons aussi !

M. Jean Desessard. En conclusion, j’aimerais ouvrir quelques pistes de réflexion.

Dans ce projet de loi, nous essayons autant que possible de traduire une certaine vision de la société. C’est, par exemple, le sens des propositions de nouvelles recettes, que j’évoquais tout à l’heure, découlant de la taxation de produits dont l’abus participe à une dégradation de l’état de santé.

Mais, pour bon nombre de nos concitoyens, cette séquence du PLFSS peut paraître peu compréhensible. En effet, elle semble procéder à des comptes d’apothicaires – ce qui, du reste, nous ne nous éloigne pas trop du sujet ! (Sourires.)

Nous devrions donc nous astreindre à un effort de lisibilité et, peut-être, pour cela, envisager, à terme, l’examen de ce type de textes à la lumière d’indicateurs sensibles de notre société, comme l’indice de santé sociale. Il s’agit de mesurer, en fonction des âges de la vie – et bien en fonction de ce critère –, si les besoins fondamentaux sont satisfaits et, par là même, de sortir des oppositions entre « retraités », « actifs » et « jeunes » et de rejeter les corporatismes, lesquels, se fondant sur le fantasme de privilèges supposés, conduisent à monter les gens les uns contre les autres.

Le PLFSS doit traduire une vision du vivre-ensemble ; il doit unifier pour construire un projet commun.

Permettez-moi d’adresser quelques mots à mes collègues siégeant sur les travées de gauche.

M. Dominique Watrin. Il y en a, en effet !

M. Jean Desessard. La société d’aujourd’hui connaît une mutation. Nous ne sommes plus au lendemain de la guerre. Le monde du travail a changé ; la place du travail a changé. Le temps où l’on exerçait la même activité tout au long de sa vie est révolu. Dès lors, on est bien obligé d’envisager les cotisations sur une autre base que la masse salariale ; on doit bien tenir compte de la santé environnementale, et envisager cette mutation économique.

Par conséquent, vous avez raison, mes chers collègues, il ne faut pas tout abandonner. Mais il faut quand même aussi réfléchir au nouveau contrat social !

Lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont je souhaite, madame la ministre, qu’il soit porteur d’une vision d’avenir, nous devons retrouver le nouveau pacte de la sécurité sociale, de la santé sociale, le nouveau contrat de solidarité sociale, pour tenir compte de cette mutation économique.

M. Dominique Watrin. Et donc taxer la richesse financière !

M. Jean Desessard. Si nous voterons le texte qui est soumis à notre examen, nous serons attentifs à l’avènement d’un projet de sécurité sociale qui tienne compte des mutations économiques, sociales et écologiques de notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.

M. Philippe Bas. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en débattant du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement exerce chaque année une prérogative essentielle que la Constitution ne lui reconnaît d’ailleurs que depuis seize ans. Comme chaque année, je ne peux m’empêcher de penser avec une certaine reconnaissance au Président Jacques Chirac, à Alain Juppé et à Jacques Barrot, qui prirent l’initiative de ce progrès majeur des droits du Parlement.

Il nous appartient d’être à la hauteur de cette grande ambition, qui consiste à ce que le Parlement prenne ses responsabilités pour permettre à la solidarité nationale de s’exercer pleinement, tout en veillant à sauvegarder les équilibres financiers dont dépend l’avenir de la protection sociale. Nous savons bien, en effet, qu’une solidarité durable ne peut être financée à crédit ou alimentée par un excès de prélèvements sur l’activité et sur l’emploi. C’est à cette aune que les mérites d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale se mesurent, et j’avoue que je ne suis guère convaincu, madame la ministre, par la manière dont vous avez tenté de relever, pour la première fois, ce défi.

Je veux revenir, en premier lieu, sur la trajectoire dans laquelle vous inscrivez nos comptes sociaux pour les quatre années à venir, en insistant sur la question des recettes. Les montants et les taux d’évolution que vous avez retenus pour 2013, et au-delà de 2013, ne relèvent pas de prévisions réalistes. Vos engagements resteront un vœu pieux s’ils ne sont pas prolongés par un vigoureux effort de redressement, conduit avec détermination, dans la durée, et portant d’abord sur les dépenses. Or, malgré l’optimisme dont témoignent vos objectifs, ou plutôt vos espérances, vous osez encore prévoir le maintien d’un déficit de 10 milliards d’euros en 2017. C’est à l’évidence un résultat insuffisant au terme d’une si longue période,…

Mme Christiane Demontès. Vous êtes mal placé pour donner des leçons !

M. Philippe Bas. … mais, de surcroît, vous ne vous donnez même pas les moyens d’atteindre cet objectif et vous ne cherchez pas à l’atteindre par les bons moyens !

Certes, les hypothèses de croissance ressemblent, par nature, aux bulletins météorologiques : relativement fiables pour le futur immédiat, elles sont aléatoires à plus de quatre ou six mois. Une chose paraît claire, cependant, si l’on se réfère au consensus des économistes : les mois à venir seront plus proches de la stagnation, voire de la récession, que du taux de croissance pourtant médiocre de 0,8 % sur lequel vous avez fondé vos projets de budget pour 2013.

Les conséquences négatives de cette conjoncture pour les recettes de la sécurité sociale sont déjà fortes et vont encore s’aggraver, ce qui nous inquiète profondément et devrait vous inquiéter aussi.

Vous avez massivement augmenté les prélèvements depuis juillet dernier : 7 milliards d’euros dans le collectif budgétaire, 20 milliards d’euros en loi de finances initiale et, maintenant, près de 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires en loi de financement de la sécurité sociale.

Cette politique ne peut donner les mêmes résultats en termes de réduction des déficits qu’une politique de maîtrise renforcée de la dépense, car elle appauvrit les Français et leurs entreprises, aggravant une crise qui diminue déjà les rentrées fiscales et sociales. La hausse brutale des prélèvements, plutôt que le freinage puissant des dépenses par des réformes structurelles et une gestion exigeante, est une solution de facilité.

Je reviendrai dans un instant sur certaines des hausses de prélèvements proposées pour 2013. Cependant, avant même que cette loi de financement ait été adoptée, le Premier ministre vient de rendre caduc l’engagement, figurant dans l’annexe B du projet de loi, de ne pas créer de nouvelles recettes après l’année 2013. Il a en effet décidé une importante réforme du financement de la sécurité sociale, dont les principes, sinon les modalités, semblent d’ailleurs analogues à ceux de la réforme que nous avions adoptée en février 2012 et que vous aviez décidé, en toute hâte, d’abroger dès juillet.

Les Français ont le tournis ! Ils veulent qu’un cap soit donné et qu’il soit tenu. Il est normal que vous corrigiez le plus vite possible vos erreurs, mais la politique financière et sociale de la France demande de la constance. C’est la condition pour créer la confiance des consommateurs, des épargnants, des opérateurs économiques, de nos partenaires européens et aussi des marchés, car ceux-ci existent, et nous avons besoin d’eux pour financer notre dette au moindre coût. Or, de la constance, justement, vous n’en avez pas !

M. Jean Desessard. On vient d’arriver !

M. Philippe Bas. Soit dit en passant, quitte à regretter vos va-et-vient successifs, je préfère que l’évolution de votre réflexion aille dans notre sens, avec la recherche d’un allégement du coût du travail, plutôt qu’en sens contraire, comme au début du quinquennat.

M. Ronan Kerdraon. On peut toujours rêver !

M. Philippe Bas. Il reste que nous devons non seulement nous prononcer sur cette loi de financement de la sécurité sociale en fonction de ce qu’elle contient, mais aussi en fonction de ce qu’elle ne contient pas et qui en transformera l’économie générale et l’interprétation.

J’admets qu’une réforme structurelle du financement de la sécurité sociale ne puisse produire son plein effet à court terme, mais si vous voulez qu’elle soit utile à moyen terme, en allégeant fortement le coût du travail et en faisant contribuer nos importations, il faut que cette réforme soit mise en œuvre dans toute son ampleur dès son entrée en vigueur, le plus tôt possible. Puisque telle n’est pas votre intention, l’effet que nous pourrions en attendre sur la croissance et l’emploi sera malheureusement dilué et tardif. Nous n’avons pas tant d’atouts face à la crise actuelle que nous puissions nous permettre de les gâcher. Les prélèvements, c’est maintenant ; les baisses de cotisation, c’est peut-être, et plus tard ! Ce n’est sûrement pas le bon choix !

Le système de crédit d’impôt, ou plutôt de crédit de cotisations, que vous avez l’intention de mettre en place soulèvera de très sérieuses difficultés d’application qui en diminueront l’efficacité. Surtout, il a pour conséquence de différer d’un an encore le bénéfice de la réforme pour les entreprises, alors même que la progressivité de celle-ci, qui vient s’ajouter, j’ai le regret de le dire, à vos atermoiements de l’année 2012, la rend déjà peu incitative. Je le regrette.

M. Jean-Jacques Mirassou. Vous n’avez rien fait pendant dix ans !

M. Philippe Bas. Il y a pourtant urgence : les comptes sont mauvais, la conjoncture est atone, le chômage s’étend ainsi que les dépenses résultant du versement du revenu de solidarité active et des allocations de logement.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le chômage ne date pas d’il y a six mois !

M. Philippe Bas. On ne peut répondre à cette situation par des mesures cosmétiques dont on attend le plein effet seulement à compter de l’achèvement d’une montée en régime de quatre ans.

S’agissant, par ailleurs, des mesures de recettes que comporte dès maintenant votre projet de loi de financement de la sécurité sociale, mon sentiment est que vous avez vidé les fonds de tiroirs des administrations.

Mme Christiane Demontès. Vous l’aviez déjà fait !

M. Jean-Jacques Mirassou. Vous aviez tellement raclé, qu’il ne restait même plus de tiroirs !

M. Philippe Bas. Il en résulte un véritable bric-à-brac !

Vous avez vraiment tort de pénaliser les entreprises qui procèdent à la rupture conventionnelle du contrat de travail, car c’est le salarié qui, en réalité, sera pénalisé. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.) Votre politique ne cesse de contredire le sentiment de l’équité dont vous avez pourtant l’habitude de vous prévaloir.

M. Philippe Bas. Ces indemnités ne sont pas un revenu, mais une compensation de la rupture du contrat de travail, une forme de réparation, au moment où un travailleur s’apprête à faire l’expérience du parcours du combattant que représente la recherche d’un emploi. L’application du « forfait social » de 20 %, non pas aux indemnités les plus importantes, mais dès le premier euro d’indemnité, constitue pour l’entreprise une charge que rien ne justifie ; elle transforme la nature de ces indemnités, et elle aura une incidence négative sur leur montant. Vous donnez un coup de canif dans le contrat sur lequel repose le développement remarquable du système de la rupture conventionnelle. Si votre intention est de lui donner un coup d’arrêt, autant le dire franchement et l’assumer clairement devant le monde du travail !

Quant au prélèvement de 0,3 % que vous créez sur une partie importante des pensions de retraite, il est hautement contestable. Il est destiné au financement d’une réforme de la prise en charge de la dépendance que vous aurez du mal à faire aboutir rapidement dans la conjoncture actuelle,…

M. Jean-Jacques Mirassou. Pas ça, pas vous !

M. Ronan Kerdraon. C’était l’Arlésienne du précédent quinquennat !

M. Philippe Bas. … tandis que la taxe, elle, restera. Dans l’attente de cette réforme, le produit de ce prélèvement n’est pas directement affecté au financement de l’allocation personnalisée d’autonomie, qui en aurait pourtant bien besoin.

Enfin, on ne peut qu’être surpris de constater que la recette de 2013 sera versée au Fonds de solidarité vieillesse pour diminuer la participation de l’État à ce fonds, sans venir le moins du monde soulager les personnes dépendantes au nom desquelles ce prélèvement est effectué. Ce choix relève d’une forme d’imposture vis-à-vis des retraités. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Mme Christiane Demontès. Vous n’avez pas de leçons à nous donner après ce que vous leur avez fait !

M. Philippe Bas. Ils ne peuvent être contraints de contribuer ainsi, sans rien recevoir d’autre en échange que des promesses pour plus tard.

Et que dire du sort que vous réservez aux travailleurs indépendants ? Vous affichez l’apparence de bonnes intentions : rendre proportionnel le prélèvement social, alors qu’il est aujourd’hui dégressif à cause du plafond qui s’applique aux revenus pris en compte. Mais la réalité de la mesure proposée est tout autre : il s’agit de prélever, dès 2013, plus de 1 milliard d’euros sur le monde artisanal, sous couvert de justice. C’est une mauvaise action, au moment où vous sembliez vous intéresser enfin à la compétitivité de nos entreprises, car vous oubliez sans doute que les artisans sont aujourd’hui les premiers employeurs de France.

Je pourrais m’appesantir aussi sur les dépenses. En ce qui concerne l’assurance maladie, vous relâchez l’effort, certes légèrement, et la Cour des comptes l’a critiqué à juste titre.

Sur les retraites, vous observez le silence, un silence profond, alors que nous savons que les réformes successives de 1993, 2003 et 2010 doivent être prolongées et se poursuivre. Je regrette, à cet égard, que les conclusions du Conseil d’orientation des retraites ne soient connues que le mois prochain, quand nous aurons terminé l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Qu’allez-vous faire pour prolonger la réforme des retraites ? Nous n’aurons pas de réponse cette année, et je crains, car nous nous souvenons de l’expérience du gouvernement Jospin, que vous ne preniez pas à bras-le-corps cette réforme qui continue à préoccuper les Français. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Mme Christiane Demontès. Vous prétendiez que le problème était réglé !

M. Philippe Bas. La réforme doit être permanente, elle doit se poursuivre, mais nous ne comptons pas sur vous pour le faire !

Madame la ministre, mes chers collègues, telles sont les principales raisons pour lesquelles nous ne voterons pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Philippe Bas. Ce n’est pas que ses ambitions nous paraissent trop élevées. Au contraire, leur modestie,…

M. Jean Desessard. Pour une fois que les socialistes sont modestes ! (Sourires.)

M. Philippe Bas. … l’absence de ligne directrice pour une politique de sécurité sociale soucieuse de préserver notre modèle en l’adaptant, les changements de pied incessants auxquels vous soumettez les Français, l’addition des prélèvements supplémentaires qui résultent de chaque nouveau texte présenté au Parlement depuis six mois, votre silence sur l’avenir des retraites, le peu de gages que vous donnez de votre volonté de mettre en œuvre fermement la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, en particulier à l’hôpital, nous font craindre que les objectifs que vous nous présentez ne puissent être atteints sans nouveaux prélèvements. Cette politique, qui n’en est pas une, conduit à une impasse. Nous ne pouvons donc pas l’approuver. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est une caricature !

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’exercice auquel nous sommes soumis dans le cadre de l’examen du PLFSS pour 2013 est difficile, car il est très contraint. Les marges de manœuvre financières sont serrées, mais l’enjeu est bel et bien de définir une politique plus juste. Gageons qu’il s’agit là d’un projet de loi de financement intermédiaire, qui permettra d’assainir progressivement la situation économique grevée par les erreurs et les déficits accumulés par les précédents gouvernements de droite, quoi qu’en pense M. Bas. C’est en tout cas un PLFSS responsable et solidaire.

Malgré tout, le projet de loi de financement pour 2013 accompagne de grandes orientations sociales visant par exemple à assurer une retraite digne à nos concitoyennes et à nos concitoyens, un égal accès aux soins, une meilleure protection des salariés et un soutien renforcé des familles modestes.

Au total, 600 millions d’euros supplémentaires ont été crédités à la branche famille afin de limiter l’ampleur du déficit à 2,7 milliards d’euros au lieu de 3,3 milliards d’euros. Ce n’est pas rien !

Des mesures nouvelles sont proposées par le Gouvernement, malgré le contexte tendu, afin de soutenir les familles, notamment les plus exposées à la crise.

Le Gouvernement propose ainsi une méthode et des objectifs afin d’adapter l’offre en matière d’accueil de la petite enfance. Mme la ministre Dominique Bertinotti a par exemple engagé une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, non seulement les parents, mais aussi les professionnels et les élus, dans quatre régions françaises métropolitaines. Il s’agit de mieux appréhender les besoins des familles, de faire connaître les bonnes pratiques locales afin, ensuite, de définir les axes prioritaires qui seront intégrés à la convention d’objectifs et de gestion qui sera conclue entre l’État et la CNAF pour la période 2013-2016.

Cette méthode est prometteuse, car il existe de fortes disparités dans les territoires tant en termes de qualité des réponses proposées que de places disponibles. On constate ainsi un écart allant de 26 à 76 places d’accueil pour 100 enfants selon les territoires. Les concertations locales permettront de s’appuyer sur des expériences concrètes qui pourront être analysées, voire généralisées. Cette méthode est la bonne, elle a fait ses preuves.

Les objectifs sont non seulement quantitatifs, mais également qualitatifs, car augmenter le nombre global de places d’accueil ne suffit pas. Il faut adapter l’offre aux lieux de vie des familles et combiner les réponses le plus souvent. Il faut aussi poursuivre la professionnalisation des personnels en charge de la petite enfance. Ces réponses doivent se construire avec l’ensemble des acteurs locaux impliqués.

L’État jouera, en lien avec la CNAF, les collectivités et les familles, son rôle stratégique de cadrage de la politique globale en matière d’accueil de la petite enfance et garantira un accès équitable à ces services sur l’ensemble du territoire national. Agir ainsi, c’est permettre aux parents d’exercer une activité professionnelle. C’est aussi concourir à l’égalité entre les femmes et les hommes sur le plan professionnel et dans la prise en charge des responsabilités familiales.

Parallèlement, le PLFSS pour 2013 vient en aide aux familles modestes confrontées à des difficultés pour financer l’accueil de leurs enfants.

Aujourd’hui, les familles doivent faire l’avance des frais de garde pour l’assistante maternelle ou pour la garde à domicile, en attendant le remboursement de l’aide de la CAF à terme échu. Il est proposé ici de mettre en place, à titre expérimental pour une durée de deux ans, un système de tiers payant pour les ménages ayant des ressources inférieures au montant du RSA dans un premier temps. L’aide de la CAF sera alors versée directement à la salariée. La famille s’acquittera du solde de la rémunération auprès d’elle. Cette mesure sera particulièrement appréciée des familles qui confient leur enfant à une assistante maternelle, notamment en milieu rural, où ce mode d’accueil est le plus fréquent. Nous ferons bien sûr un bilan de cette expérimentation avant de la généraliser.

Voici une méthode qui mérite de devenir plus systématique afin d’innover dans le secteur social : expérimenter grandeur nature, évaluer, analyser avant, le cas échéant, de généraliser.

Une autre mesure est proposée, à la suite des travaux de l’Assemblée nationale, en faveur des familles surendettées risquant d’être expulsées de leur logement. Il s’agit de permettre le rétablissement automatique de toutes les allocations logement, à l’instar de l’aide personnalisée au logement, dès lors qu’un dossier de surendettement est jugé recevable. Le rétablissement de ces droits devrait permettre à ces ménages une sortie plus rapide de l’ornière financière dans laquelle elles se trouvent.

Toutefois, une politique en faveur des familles ne se résume pas aux mesures inscrites à la branche familles du PLFSS. Chaque budget doit pouvoir supporter la part relative aux actions en faveur des enfants, des jeunes et des familles relevant de ses responsabilités. Ainsi, le Fonds national de financement de la protection de l’enfance prévu pour soutenir la politique de protection de l’enfance assurée par les conseils généraux ne peut être abondé uniquement par le budget de la sécurité sociale. En effet, la prise en charge par les départements des mineurs isolés étrangers impacte leurs budgets alors même que ce jeune public relève principalement des politiques liées à l’entrée sur le territoire. Je me réjouis d’ailleurs des discussions qui se sont enfin engagées entre l’Assemblée des départements de France et les ministères concernés afin de trouver des solutions adaptées à la prise en charge de ces jeunes et tenables pour les départements.

Une politique en faveur des familles ne se réduit pas non plus à une politique nataliste. Ce doit être un engagement global misant fortement sur la jeunesse, sur l’avenir. Elle doit prendre en compte les familles dans toute leur diversité, de composition, de lieu d’habitation, de parcours de vie, de niveau de revenus, d’origines culturelles, d’état de santé. Les familles doivent pouvoir trouver des réponses adaptées à leurs besoins tout au long de leur vie et sans discrimination.

Toutes les mesures votées ou actuellement en discussion visant à favoriser l’égalité entre les familles, d’une part, et entre les femmes et les hommes, d’autre part, sont autant de jalons qui construisent l’environnement familial et sociétal de notre jeunesse. Car tout se tient !

L’augmentation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire, soit une hausse de plus de 70 euros par enfant, a été un signe fort pour les trois millions de familles les plus modestes qui en ont bénéficié. Elle a concerné, dans une large majorité, des familles monoparentales. Dans 85 % des cas, ce sont les mères qui sont à la tête de ces familles. De même, se reposer la question de la scolarisation en maternelle dès l’âge de deux ans constitue un axe fort d’une politique familiale plus juste.

Par ailleurs, le PLFSS pour 2013 corrige une iniquité flagrante à l’égard des familles homoparentales, laquelle a d’ailleurs été signalée par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE. À la suite des travaux de l’Assemblée nationale, un amendement visant à créer un « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » sera discuté. Il vise à permettre au compagnon ou à la compagne de la mère qui sera présent lors de l’arrivée de l’enfant de bénéficier de ce congé rémunéré de plein droit.

L’ensemble des mesures d’aide aux familles joue incontestablement un rôle de redistribution, particulièrement en temps de crise. Les collectivités locales, notamment via les centres communaux d’action sociale, les CCAS, soutenus notamment par le milieu associatif, complètent l’aide apportée aux familles rencontrant d’importantes difficultés.

Il nous faudra résolument poursuivre nos efforts pour que les familles les plus modestes soient davantage aidées, comme l’a d’ailleurs souligné Mme la rapporteur Isabelle Pasquet. Je pense notamment aux familles monoparentales, qui sont les plus exposées financièrement, comme le montre le rapport annuel du Secours catholique publié la semaine dernière. Il vaut mieux aider précocement plutôt que de compenser ensuite par des mesures de protection de l’enfance très coûteuses financièrement, mais aussi socialement. Je pense également au congé de maternité, dont sont privées les femmes en situation de précarité face à l’emploi, car elles n’ont pas suffisamment droit aux indemnités journalières. Dans le département de la Loire-Atlantique, la CAF et la CPAM estiment que ces femmes étaient au moins 10 % en 2011. Il nous faut revoir cette question afin de favoriser une plus grande équité.

Nous devons repenser notre système d’aide aux familles afin de renforcer ses fonctions de redistribution et de réduction des inégalités, comme le préconise d’ailleurs la Cour des comptes dans son rapport pour 2012. Une remise à plat s’impose pour redonner une cohérence d’ensemble aux différentes aides. La Cour des comptes insiste sur la nécessité de revoir l’économie d’ensemble des prestations familiales sous conditions et modulables en fonction des ressources des ménages, d’une part, en renforçant l’aide aux familles vulnérables et, d’autre part, en réformant la prestation d’accueil au jeune enfant en ciblant plus étroitement les familles bénéficiaires.

Je souscris tout à fait à ces préconisations, qui vont dans le sens d’une plus grande justice redistributive, car les familles nous attendent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le système hospitalier public français est un atout majeur pour la qualité des soins dispensés aux populations. L’excellence de la médecine qui y est pratiquée, la force de son maillage territorial, bien qu’il ait été mis à mal par les précédents gouvernements, la disponibilité des équipes médicales et paramédicales, le haut niveau de formation dispensé aux internes, l’application des tarifs opposables, l’accueil de tous les patients, sans distinction de pathologie et d’origine, tel est en quelque sorte l’ADN des hôpitaux publics. Je pense, madame la ministre, que nous sommes d’accord pour convenir que ce sont autant de différences avec le secteur privé lucratif.

Vous avez annoncé la présentation prochaine d’un projet de loi contenant une disposition symbolique : la réintroduction, dans le code de la santé publique, de la notion de service public hospitalier. Cela nous apparaît d’autant plus important que Nicolas Sarkozy et son gouvernement, notamment avec la loi HPST, dont nous souhaitons d’ailleurs l’abrogation, avaient entrepris une œuvre de destruction du service public hospitalier, transformant l’hôpital en « entreprise de soins » et réduisant la démocratie en son sein.

M. Philippe Bas. Ce sont les 35 heures qui ont détruit l’hôpital public !

Mme Laurence Cohen. Cela ne vous plaît pas, mais c’est la réalité !

En confiant de plus en plus de missions de service public aux structures commerciales, en permettant l’émergence de groupements de coopération sanitaire alliant établissements publics et lucratifs,…

M. Philippe Bas. Bonne mesure !

Mme Laurence Cohen. … Nicolas Sarkozy a tenté de faire croire que, au final, il n’y avait plus de différences entre les hôpitaux publics et les cliniques privées. Se faisant, il a oublié une réalité : les dépassements d’honoraires dans les structures publiques sont l’exception, quand les tarifs prohibitifs dans les cliniques sont légion. Nous attendons donc avec impatience ce projet de loi.

Cette volonté d’assimilation du public et du privé n’est pas récente. L’instauration de la convergence tarifaire entre les hôpitaux et les cliniques y participe pleinement. Vouloir comparer, puis aligner les prix des établissements publics de santé sur ceux des cliniques privées, c’est méconnaître leurs différences fondamentales, que j’ai mentionnées au début de mon propos. Les soins non programmés coûtent incontestablement bien plus chers que les soins programmés. Les fragilités sanitaires et sociales des publics soignés dans les hôpitaux sont évidemment bien plus importantes que celles des patients ayant les moyens financiers d’opter pour des soins dans des cliniques commerciales. Le gel de cette convergence contre nature est donc heureux. Or, si ce gel permet de limiter les dégâts, le projet de loi ne revient pas sur les erreurs du passé, et les tarifs ayant déjà fait l’objet de cette convergence ne seront malheureusement pas revus. Cela nous apparaîtrait pourtant particulièrement nécessaire.

De même, il nous apparaîtrait indispensable de doter les établissements publics de santé des moyens financiers dont ils ont besoin. Or l’évolution du taux de l’ONDAM, fixé cette année à 2,6 % pour les hôpitaux, nous semble insuffisante. Il faudrait au moins porter ce taux à 3 %, ne serait-ce que pour permettre aux hôpitaux de faire face aux dépenses contraintes, liées par exemple à l’amélioration des rémunérations ou encore à la hausse des prix de l’énergie ou des dépenses propres aux hôpitaux.

D’après les estimations de la Fédération hospitalière de France, cette année encore, l’effort financier exigé des établissements publics de santé serait de 650 millions d’euros, soit, à peu de choses près, le montant exigé en 2012. Chaque établissement aujourd’hui rogne sur le matériel médical, la maintenance, jusqu’à celle des ascenseurs ! Cet effort financier a également eu pour effet la suppression de 8 000 postes, ce qui a aggravé les conditions de travail, déjà mauvaises, des personnels et réduit, de fait, la qualité des soins dispensés aux patients. Les salariés de l’AP-HP, le plus important CHU d’Europe, que j’ai auditionnés la semaine dernière, sont tout à fait éloquents et alarmants. Ils traduisent une réelle souffrance au travail, comme en atteste la hausse du nombre des suicides, dont on ne parle pas.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous sommes inquiets. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous demandons un moratoire sur la fermeture des établissements publics de santé et sur les regroupements de leurs services. On nous oppose l’argument de la sécurité, mais les hôpitaux de proximité, tout comme les cliniques d’ailleurs, constituent parfois la seule structure de soins vers laquelle les patients peuvent s’orienter.

Comment justifier par exemple que, pour des raisons de sécurité, on impose aux femmes enceintes de faire, en Guadeloupe, plus d’une heure de bateau pour se rendre au CHU de Pointe-à-Pitre ? Est-ce véritablement plus sûr que d’accoucher à la maternité de Marie-Galante ? Nous ne le pensons pas.

Vous souhaitez à juste titre, madame la ministre, établir un pacte de confiance pour l’hôpital. Nous soutenons ce pacte, à condition qu’il institue une véritable démocratie sanitaire, qu’il redonne le pouvoir aux personnels, à leurs syndicats, aux patients et aux élus, et qu’il mette fin à la toute-puissance des directeurs des agences régionales de santé.

Bien entendu, les mesures que nous proposons exigent le respect d’une condition préalable : sortir du paiement à l’acte et mieux prendre en compte les missions de service public. La commission des affaires sociales du Sénat a d’ailleurs remis un rapport fort intéressant allant ce sens.

Enfin, ne pouvant intervenir plus longuement, je voudrais dire notre inquiétude face à la proposition, qui a été formulée par le Gouvernement et qui figure au sein du présent PLFSS, visant à autoriser les hôpitaux à émettre des billets de trésorerie. Nous aurions pour notre part préféré que la Caisse des dépôts et consignations puisse être autorisée à proposer des prêts à taux zéro aux hôpitaux.

L’insuffisance de l’ONDAM, l’autorisation d’émettre des billets de trésorerie, la mesure adoptée sur votre initiative, madame la ministre, concernant la biologie hospitalière, ainsi que la hausse de la taxe sur les salaires nous paraissent des mesures peu compatibles avec votre objectif de renforcement du service public hospitalier.

Le groupe CRC n’y souscrit pas. C’est pourquoi nous nous exprimerons sur chacune des mesures touchant à l’hôpital, au cas par cas. Nous espérons que les choses évolueront ainsi dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne me livrerai pas à la critique des propositions budgétaires émises par le Gouvernement, car d’autres l’ont déjà fait, ou le feront.

M. Alain Fauconnier. Comme d’habitude !

M. Serge Dassault. Je tiens simplement à formuler quelques remarques. Tout d’abord, il faut le reconnaître, le déficit de nos installations hospitalières est dû, en grande partie, aux 35 heures. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Ronan Kerdraon. Cela faisait longtemps ! On a bien fait de venir !

M. Jean-Pierre Plancade. M. Dassault est un homme fidèle à ses convictions…

M. Serge Dassault. Or vous ne voulez pas le comprendre.

Les 35 heures ont eu pour conséquence l’augmentation du nombre de personnels et l’aggravation du déficit. Il faut bien que quelqu’un paie. Car lorsqu’on ne travaille pas, cela coûte plus cher !

Je voudrais également vous faire remarquer que, si le budget de la sécurité sociale est indépendant du budget de l’État, il n’y a qu’un seul financeur, le contribuable.

En outre, le déficit de la sécurité sociale ne s’ajoute pas, pour le moment, à celui du budget voté dans la loi de finances. Il est soigneusement rangé dans un organisme, appelé la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, où les déficits accumulés sont financés par des emprunts qui s’ajoutent à ceux du budget de l’État. À la fin de l’année 2012, ils atteindront 1 800 milliards d’euros au sens de Maastricht. C’est ce que l’on appelle pudiquement des dépenses hors budget.

Toutefois, au moment où chacun essaie de réduire les charges sur salaires de façon substantielle, sans pour autant y arriver, je voudrais vous soumettre une solution. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Écoutez bien, car elle n’est pas facile à exposer.

M. Ronan Kerdraon. On est venu pour cela.

M. Serge Dassault. Je vous propose de réduire les charges sur salaires de 55 %, sans aucune augmentation d’impôt ou de TVA, tout en finançant totalement le budget de la sécurité sociale, y compris son déficit. Cette opération facilitera en outre les embauches, les augmentations de salaire et les ventes, tout en réduisant les coûts de production.

Je vous rappelle, avant tout, que les charges pesant sur les salaires des entreprises sont de deux ordres. Il existe, d'une part, des charges liées directement aux salariés, finançant les retraites, les indemnisations du chômage et les accidents de travail, et, d'autre part, des charges liées à la maladie et la famille, la CRDS et la CSG, qui sont déterminées par le Gouvernement.

Je vous propose de dissocier totalement ces deux types de charges.

M. François Marc. Eh voilà !

M. Serge Dassault. Ce système ne s’appliquerait qu’aux entreprises marchandes.

En 2009 – ce sont des chiffres à retenir –, la totalité des charges sur salaires a représenté une somme de 393 milliards d’euros.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Et les produits financiers une somme de 317 milliards d’euros !

M. Serge Dassault. Le financement des retraites ainsi que l’indemnisation du chômage et des accidents du travail représentent un montant de 176 milliards d’euros. Les charges affectées aux dépenses maladie ou famille, financées par la CSG et la CRDS, se sont, quant à elles, établies à 217 milliards d’euros, hors déficit.

Je vous propose de garder seulement, comme charges sur les salaires, les 176 milliards d’euros acquittés par les entreprises, qui financent les retraites, les indemnisations du chômage et des accidents du travail. Les charges pesant sur les salariés des entreprises seront donc réduites de 55 %, puisque, au lieu de payer 393 milliards d’euros, les entreprises ne s’acquitteront que de 176 milliards d’euros de charges sur salaires.

M. Serge Dassault. Vous remarquerez que ces charges, d’un montant de 45 % du salaire, seront toutes patronales, si bien que, désormais, tous les salaires seront nets.

Mme Patricia Schillinger. Oui, mais le reste ?

M. Serge Dassault. Cette opération facilitera les embauches, qui coûteront moins cher, les augmentations de salaire, qui coûteront moins cher, elle réduira les coûts de production et elle permettra d’augmenter les ventes.

Comment payer le reste, me direz-vous ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Eh oui !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. On augmente les dividendes ?

M. Serge Dassault. Les 217 milliards d’euros restants seront payés par entreprises elles-mêmes sous forme de frais généraux, comme les loyers ou les factures EDF. Elles le feront à l’aide d’une formule qui favorisera les entreprises de main-d’œuvre, donc le travail, employant de nombreux salariés. Les charges seront ainsi réparties entre les entreprises utilisant beaucoup de main-d’œuvre, qui payeront moins, et celles, comme les entreprises de services, qui réalisent un gros chiffre d’affaires avec peu de personnel, qui payeront plus.

Il en ira de même pour les entreprises qui emploient du personnel étranger ou qui délocalisent, car la formule de réduction des charges ne prendra en compte que le personnel français. Avec cette formule retranchant la masse salariale du chiffre d’affaires, ces entreprises payeront plus de charges. Les entreprises qui délocalisent et celles qui importent seront donc défavorisées.

M. Jean-Pierre Plancade. C’est une révolution que vous nous proposez ! (Sourires.)

M. Serge Dassault. Pour cela, il faudra mettre en place ce que j’appelle un coefficient d’activité, couvrant toutes les entreprises marchandes. Chaque société calculera ses charges en multipliant ce coefficient par son chiffre d’affaires moins sa masse salariale. C’est là qu’intervient l’astuce : plus la masse salariale est importante, moins l’entreprise paie ; moins la masse salariale est importante, plus elle paie. Cela favorise l’activité et encourage la réduction du chômage.

Mes chers collègues, je ne vous livrerai pas aujourd'hui pas la formule complète, car elle est trop compliquée, mais je vous la donnerai plus tard !

M. Ronan Kerdraon. Nous faisons face à une rafale de chiffres ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Serge Dassault. Je tiens tout de même à vous signaler qu’un coefficient de 6,6 permet d’obtenir une somme de 217 milliards d’euros, c’est-à-dire le total de la part payée pour les branches famille et maladie de la sécurité sociale.

Néanmoins, l’intérêt de l’opération vient également de ce qu’il sera possible d’y intégrer le déficit de la sécurité sociale, quel qu’il soit. Si ce déficit se monte à 20 milliards d’euros, votre dépense sera non plus de 217 milliards d’euros, mais de 237 milliards d’euros. Si le déficit est moins élevé, cette somme diminuera.

Cette formule permettra donc de rapporter à l’État 20 milliards d’euros de plus, et partant de réduire le déficit budgétaire.

Un rapide calcul permet de nous apercevoir d’un point très important sur le plan financier : une simple augmentation de 0,6 point du coefficient d’activité rapporte 20 milliards d’euros à l’État. C’est une sorte de TVA, qui n’en est pas une mais qui rapporte beaucoup parce que son assiette est large et son taux faible.

Il suffira donc de faire passer le coefficient d’activité de 6,6 à 7,2 pour obtenir 20 milliards d’euros supplémentaires et équilibrer ainsi le budget de la sécurité sociale, quel qu’il soit.

Voilà, madame la ministre, ce que je voulais vous proposer : la baisse de 55 % des charges sur salaires – ce n’est pas rien, tout de même ! – sans que cela ne coûte un euro à l’État et sans mise en place d’une quelconque TVA sociale – cela, c’est fini, ça ne sert à rien, on n’en parle plus.

Une telle solution permettra d’équilibrer le budget de la sécurité sociale, sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les d’impôts. Les charges des entreprises de main-d’œuvre seront moins lourdes et celles des entreprises de services plus élevées, sans aucune conséquence pour le budget de l’État. Le chômage pourra diminuer du fait de l’augmentation du nombre d’embauches, la croissance reprendra grâce à l’amélioration du pouvoir d’achat provoquée par la hausse des salaires, sur lesquels pèseront non plus 100 % de charges, mais seulement 55 %.

Je trouve, madame la ministre, que cette mesure méritait de vous être proposée.

M. Ronan Kerdraon. C’est le pays des merveilles !

M. Serge Dassault. Je présenterai une proposition de loi sur ce sujet, qui est quelque peu complexe. J’espère que vous la défendrez ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali.

Mme Samia Ghali. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 traduit la priorité que constitue le secteur médico-social pour le Gouvernement, et ce malgré un contexte budgétaire difficile.

Ainsi, avec une progression de l’ONDAM médico-social de l’ordre de 4 %, quelque 650 millions d’euros de mesures nouvelles seront consacrés à la prise en charge des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

Cette décision traduit dans les faits et les chiffres les engagements pris par le Président de la République.

Au cours des cinq dernières années, les budgets furent trop souvent guidés par la volonté de faire des effets d’annonce. Par exemple, les objectifs de création de places prévues par le plan solidarité grand âge avaient été gonflés, et la lenteur de leur réalisation avait été insuffisamment prise en compte.

A contrario, le PLFSS pour 2013 donne la priorité aux établissements et services, en finançant un taux de reconduction de leurs moyens de 1,4 %, ce qui est beaucoup par rapport à la quasi-stagnation qu’ils ont subie auparavant.

En outre, un effort important est consacré à la médicalisation des établissements, ce qui devrait permettre de créer, à terme, 7 000 postes de personnels soignants.

Pour autant, les plans de création de places ne sont pas délaissés, puisque les crédits prévus permettront l’ouverture de 3 200 places pour les personnes âgées et de 3 000 places pour les personnes handicapées.

Je ne reviendrai pas sur l’examen des quatre principaux articles rattachés spécifiquement au secteur qui nous occupe, ni sur les deux articles complétés par nos collègues de l’Assemblée nationale. Les éléments afférents ont été abondamment développés par notre excellent rapporteur, Ronan Kerdraon, dont je tiens à saluer ici la qualité des travaux.

M. Ronan Kerdraon. Il le mérite ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Samia Ghali. J’insisterai en revanche sur un point, la mise en chantier du dossier de la dépendance et l’annonce d’un projet de loi sur la prise en charge de la perte d’autonomie, prévu pour le début de l’année 2014 par le Gouvernement.

Promise par Nicolas Sarkozy en 2007, indéfiniment repoussée tout au long du quinquennat, cette réforme avait été définitivement abandonnée en septembre 2011.

Il était urgent d’agir et de rassurer nos anciens et leurs familles, qui sont de plus en plus nombreux à être confrontés à des situations difficiles et douloureuses.

Il nous faut donc rapidement dégager des moyens supplémentaires, afin, d’une part, de réduire le reste à charge des personnes hébergées en établissement et, d’autre part, de remédier aux difficultés des départements pour financer l’allocation personnalisée d’autonomie.

Le présent PLFSS prévoit donc, d’ores et déjà, 700 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées à partir de 2014, prévus par l’article 16.

Soyons clairs, mes chers collègues, la progression des cotisations pour assurer le financement était attendue. Réagissant aux conclusions du rapport parlementaire sur la dépendance rédigé par la députée UMP Valérie Rosso-Debord, qui préconisait la souscription obligatoire à une assurance privée, François Hollande, à l’époque candidat, avait affiché sa position sans détour, lors d’une émission télévisée du 12 février dernier, lorsqu’il déclara : « Il n’y aura pas de contrat d’assurance privée ». Lors de cette interview, il annonça en outre, non sans courage, l’instauration d’une cotisation dépendance pour l’ensemble des Français.

Que prévoit donc l’article 16 ? Au 1er avril 2013, les retraités imposables, dont l’impôt dépasserait 61 euros, seront soumis à un prélèvement de 0,3 %. Tous ne seront donc pas touchés – c’est important de le souligner ! – par cette contribution, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire ici ou là.

Concrètement, pour une personne seule percevant une pension de 1 300 euros, le montant prélevé sera de 3,90 euros par mois en 2014. Rapportons cela aux inquiétudes des familles : je crois que c’est tout de même une somme dérisoire, mes chers collègues !

La mesure est bien une mesure solidaire et juste. Globalement, les retraités se disent prêts d’ailleurs à participer à un tel effort de solidarité si l’objectif est clairement défini. Or c’est le cas. Il y a aujourd'hui un gouvernement qui agit !

C’est aussi le sens des dispositions de l’article 41, qui visent à fluidifier les parcours de soin des personnes âgées pour leur permettre de recevoir les bons soins au bon moment et de choisir librement d’aller dans un établissement ou de rester à domicile.

Une telle disposition inaugure la politique de prévention, qui devra être développée et qui permettra de réduire le coût global de la dépendance. Le chantier de la dépendance est engagé. Le Gouvernement agit avec courage et justice. C’est, me semble-t-il, ce qu’attendent aujourd'hui les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai entendu tout à l’heure les déclarations de Mmes Touraine et Bertinotti sur les priorités du projet de loi de financement de la sécurité sociale en matière de famille, mais je demeure frappée par l’indigence du texte sur le sujet. Si je devais qualifier ce budget, j’emploierais volontiers l’adjectif « vide ».

Vide, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale l’est d’un point de vue textuel, puisque seuls deux articles concernent la famille.

Vide, il l’est également d’un point de vue financier. Les 400 millions d’euros de recettes votés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de cet été ont été intégralement dépensés dans l’éphémère augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, déjà été oubliée par tous. En outre, vous n’avez pas cherché à réduire le déficit de la branche, ni à présenter des mesures plus ambitieuses.

J’ai été également très étonnée de découvrir votre position sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, la TSCA, pour les contrats d’assurance maladie dits « responsables et solidaires » ; vous vous êtes résignés à son maintien alors que vous étiez farouchement opposés au mécanisme. Je le rappelle, l’an dernier, la commission avait déposé un amendement – je salue M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui en avait pris l’initiative – tendant à la suppression du dispositif. Ayant toujours été hostile à cette taxe, parce que ce sont les assurés qui, je le répète, paient le surcoût, je vous aurais suivi avec plaisir dans cette voie, même s’il s’agissait d’une des propositions du candidat Hollande. Cependant, pour l’instant, il n’y a rien sur la TSCA !

Je voudrais faire plusieurs remarques concernant les dépenses.

Tout d’abord, le versement en tiers payant du complément mode de garde pour les familles modestes recentre les problématiques d’accueil des jeunes enfants et du choix du mode de garde par leurs parents. J’y suis favorable.

J’en profite pour souligner l’action volontariste du gouvernement de François Fillon, qui aura tenu son engagement d’atteindre 200 000 places d’accueil, dont la moitié en accueil collectif.

La garde à domicile demeure le mode de garde le plus répandu, en raison, d’une part, de la souplesse qu’il offre sur l’ensemble du territoire et, d’autre part, de la flexibilité de ses horaires, plus importante qu’en accueil collectif. Toutefois, c’est aussi le mode le plus coûteux pour les parents. À cet égard, je crains les conséquences du tour de vis donné à la niche « nounou ». (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)

En effet, le projet de loi table naïvement sur l’hypothèse que les familles vont conserver leurs modes de garde et les mêmes modalités de paiement. Or il n’en sera rien. En touchant au crédit d’impôt, vous allez démolir le vecteur fiscal qui a permis de lutter en partie contre le travail dissimulé. Il est donc réaliste de prévoir un retour aux pratiques de fraude et de travail non déclaré, qui étaient si répandues avant l’adoption de la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

De nombreux parents qui ont déjà énormément de difficultés pour trouver une nounou qui accepte d’être déclarée – car telle la réalité en région parisienne, dans mon département et dans ma commune ! – vont revenir au système D, en déclarant moins d’heures ou en optant pour un tarif plus faible.

En Espagne, où le même dispositif a été voté récemment, le volume mensuel d’heures de travail déclarées des nourrices a diminué de 30 %. Cette mesure aura pour conséquence immédiate de faire basculer dans l’illégalité plusieurs milliers de salariés, ainsi que les entreprises spécialisées les employant, et de diminuer les rentrées fiscales. C’est le contraire de l’objectif visé !

En outre, je crains que cela ne touche de plein fouet les femmes, plus encore les femmes seules, car le surenchérissement du coût incitera celles qui perçoivent les salaires les plus modestes à rester chez elles, les éloignant ainsi un peu plus de l’emploi.

À mon avis, vous roulez à contresens, et à grande vitesse. C’est dangereux. Vous allez provoquer un accident démographique en remettant en cause un élément important de la politique familiale.

Un dernier point a attiré toute mon attention et m’a d’autant plus surprise qu’il n’a pas sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, me semble-t-il. Je parle du congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Plusieurs ministres l’ont évoqué pour s’en féliciter.

Or une telle transformation, adoptée par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, me paraît prématurée. Le conseil des ministres vient d’adopter votre projet de mariage entre personnes de même sexe ; le texte devrait être débattu dans quelques mois au Parlement. Non seulement cela constituerait un cadre juridique plus approprié que le PLFSS, mais, en plus, vous n’anticiperiez ainsi pas sur des dispositions souhaitées par une minorité de personnes et que vous voulez opposer à toutes les familles.

Et je n’évoque pas les aspects juridiques d’une telle disposition. En reconnaissant le rôle du ou de la partenaire de la mère en matière de congé, vous niez totalement le père naturel de l’enfant, qui peut, lui aussi, vouloir contribuer à l’accueil de ce dernier. Qui arbitrera ce conflit ? Quels en seront les recours ? Telles sont les raisons pour lesquels, avec mes collègues, nous souhaitons la suppression de cet article.

Enfin, et même si ce point ne relève pas formellement de la branche famille, je souhaite terminer mon intervention sur la contraception des mineures. La limite minimale à quinze ans me paraît incompréhensible. Préférez-vous qu’une jeune fille âgée de quatorze ans et quelques mois soit obligée de subir une IVG plutôt que de rembourser ses contraceptifs ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Nos collègues médecins devraient vous confirmer qu’ils ont déjà dû prendre très souvent en charge des jeunes filles de moins de quinze ans. J’avais déposé un amendement visant à répondre à ce problème, mais le couperet de l’article 40 de la Constitution est tombé, tel celui d’une guillotine.

L’âge de quinze ans a peut-être été choisi parce que c’était auparavant l’âge minimal pour se marier. Toutefois, ce n’est plus le cas aujourd'hui. Et il me paraît très dangereux de limiter les mesures relatives à la contraception des mineures aux jeunes filles de plus de quinze ans.

Contrairement à ce que vous avez déclaré cet après-midi, votre projet de budget pour la branche famille ne traduit absolument pas votre volonté d’aider les familles et de continuer à les inciter à avoir des enfants, ces enfants qui, jusqu’à présent, étaient notre richesse ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je centrerai essentiellement mon propos sur la branche vieillesse. Je tiens d'ailleurs à souligner ici l’excellent travail de Mme la rapporteur Christiane Demontès.

Le redressement de la situation financière de la branche vieillesse s’inscrit parfaitement dans la stratégie globale des finances publiques que le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre.

Le budget qui nous est proposé aujourd’hui pour la branche vieillesse est responsable : le déficit de la branche retraite, tous régimes de base confondus, sera ramené à 5,4 milliards d’euros, contre 7,1 milliards d’euros en 2012. De même, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse s’élèvera à 2,6 milliards d’euros, contre 4,1 milliards d’euros l’année précédente. On ne peut que s’en féliciter. Ainsi, le Gouvernement a pris la pleine mesure de la gravité de la situation, en adoptant des mesures de justice tout en réduisant les déficits.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prend en compte les difficultés financières croissantes que connaissent certains régimes de retraite de base autres que le régime général. Plus d’un milliard d’euros de recettes supplémentaires bénéficiera à la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérables et au régime de retraite spécial des industries électriques et gazières.

Dès sa prise de fonctions, le Gouvernement a montré sa volonté de rétablir la justice sociale. En effet, au mois de juillet dernier, il a élargi aux personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans la possibilité de partir à la retraite dès 60 ans lorsqu’elles ont cotisé une carrière complète. Il s’agit d’une mesure d’équité pour les assurés ayant cotisé la durée nécessaire.

D’autres dispositions mettent fin à des injustices. Je pense à l’attribution de points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles contraints de cesser leurs activités pour infirmité ou maladie grave, ainsi qu’aux nouvelles règles relatives aux pensions de réversion pour les professions médicales et le régime des marins.

Permettez-moi de m’attarder sur la mesure essentielle qui concerne les exploitants agricoles. Aujourd’hui, les non-salariés agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave et bénéficiaires soit d’une pension d’invalidité, soit d’une rente d’incapacité, soit de l’allocation adulte handicapé, l’AAH, ne s’ouvrent des droits qu’à la retraite forfaitaire. Ils n’ont aucun droit à la retraite proportionnelle, qui constitue pourtant, avec la pension forfaitaire, la retraite de base des non-salariés agricoles.

Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, l’article 60 prévoit d’attribuer des points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave.

Les périodes d’interruption de l’activité feront l’objet d’une validation au titre de la retraite proportionnelle des agriculteurs et de l’attribution d’un nombre minimal de points gratuits.

Les non-salariés concernés sont les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, ainsi que les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux, qui bénéficient de la retraite proportionnelle. Selon l’étude d’impact, le nombre forfaitaire de points de retraite proportionnelle sera de vingt-trois pour les chefs d’exploitation et de seize pour les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux. Ces points seront même attribués pour les périodes d’invalidité antérieures à la publication de la loi.

Une telle mesure de justice sociale prouve la volonté du Gouvernement de prendre en compte la condition sociale de nos agriculteurs et de protéger certains salariés lors de leur retraite. Je vous en remercie, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Je souhaiterais également évoquer un problème qui me tient particulièrement à cœur : celui de l’allocation équivalent retraite, l’AER. À mon avis, ce dispositif, qui était essentiel, doit être revu. L’allocation, qui repose sur la solidarité nationale, répondait à une urgence sociale, celle que vivent des dizaines de milliers de personnes sans revenu ayant commencé leur carrière professionnelle très tôt, disposant des trimestres de cotisation requis, souvent au chômage depuis plusieurs années, mais n’ayant pas atteint l’âge de 60 ans pour partir en retraite. Le dispositif a, je le rappelle, permis à des milliers de chômeurs de ne pas sombrer dans la précarité.

Lors du vote du projet de loi de finances pour 2008, la majorité de droite décidait la fin de l’AER pour le 1er janvier 2009 sous prétexte d’économies et surtout au nom du fameux « travailler plus pour gagner plus ». Le calcul était simple : ces anciens allocataires allaient vite retrouver un travail et ne coûteraient ainsi plus rien à la collectivité nationale.

Malheureusement, la crise est passée par là en 2008 et elle a été particulièrement violente pour les plus de 55 ans. Nombre d’entre eux ont été incités à partir en pleine tourmente, pensant sauver une entreprise ou libérer une place pour les plus jeunes, confortés dans l’idée que l’AER allait les aider à passer le cap douloureux d’un chômage de longue durée.

Hélas, ces personnes ont vite découvert avec effroi qu’elles pouvaient tout juste prétendre à l’Allocation spécifique de solidarité, l’ASS. Ainsi, dans l’attente de leur retraite, la moitié des seniors concernés n’ont perçu que 50 % des 960 euros de revenu maximum prévus par l’AER.

Devant l’ampleur de la contestation, mais aussi face à la réalité économique, le gouvernement Fillon a finalement prorogé l’AER à deux reprises, en 2009 et en 2010. L’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, a été mise place au 1er janvier 2012 ; elle est en théorie destinée à résoudre les difficultés de ces chômeurs en fin de droit.

Preuve est faite, jour après jour, que ce dispositif manque sa cible, puisque, comme par hasard, moins de 10 % des allocataires potentiels en sont bénéficiaires.

Aujourd’hui, nous devons agir vite, et je fais confiance au Gouvernement pour qu’il trouve une solution.

Ce PLFSS doit être l’occasion de réparer une faute magistrale de la droite. Il doit aussi permettre de rappeler à nos concitoyens qu’ils peuvent compter sur la solidarité nationale.

Par ailleurs, je me réjouis de la décision du Gouvernement d’entreprendre, en 2013, une réforme globale du système des retraites. Celle-ci permettra non seulement de remettre à plat ces dispositifs, mais aussi de combler les déséquilibres et les inégalités.

Il faudra, par exemple, revenir sur la prise en compte de la pénibilité dans le droit à la retraite. Il s’agit là d’un enjeu d’équité de grande importance.

On constate de fortes inégalités d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles. Or les critères de mise en œuvre de la retraite pour pénibilité se sont révélés trop restrictifs. Le nombre de demandes de retraite pour pénibilité se situe d’ailleurs bien en deçà des prévisions établies en 2010.

De plus, la situation de la branche vieillesse risque fortement de se dégrader à l’horizon 2017, en l’absence de mesures structurelles nouvelles décidées en 2013.

Une réforme globale des retraites est donc très attendue. L’issue de la concertation prévue au premier semestre de 2013 sur le fondement des projections démographiques et financières établies à la fin de 2012 par le Conseil d’orientation des retraites, le COR, permettra de prendre de nouvelles mesures.

Pour finir, ces dernières années, nous avons vu les déficits s’accumuler sans qu’apparaissent des réponses à la hauteur des problèmes.

Après cinq PLFSS de régression, nous passons enfin à un PLFSS de protection, tout en redressant les comptes sociaux.

Le PLFSS présenté par le Gouvernement réduit les injustices faites à certains salariés au moment de leur départ à la retraite, aux familles vulnérables, aux Français en situation difficile et aux femmes.

Face au contexte financier particulièrement difficile et à l’inquiétude grandissante des Français, l’ambition du PLFSS porte sur la protection, le redressement et la modernisation. Il répond aux attentes sociales de justice et de proximité des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le secteur médico-social et sur la politique de la famille, mon confrère Alain Milon ayant déjà développé les arguments de notre groupe sur les dispositions du volet sanitaire.

Le secteur médico-social intéresse des chapitres particulièrement importants de ce PLFSS : plus de 13 milliards d’euros seront notamment consacrés aux établissements pour personnes âgées et personnes handicapées. L’ONDAM médico-social progressera d’ailleurs en 2013 de 4 %, donc plus vite que l’ONDAM global.

En période de disette budgétaire – le mot est faible –, cela intrigue. Ce gouvernement semblerait faire mieux que les précédents, sans propositions nouvelles sur la dépendance. À y regarder de plus près, toutefois, l’affaire est plus subtile que cela. (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Christiane Demontès. Et les conseils généraux ?

M. René-Paul Savary. Je me suis attardé sur les mesures affectant les conseils généraux, acteurs essentiels du secteur médico-social, et cela d’autant plus que le Premier ministre avait déclaré, lors de l’entretien entre le Président de la République et les présidents de conseils généraux, qu’il serait prêt à considérer avec bienveillance les amendements susceptibles de prendre en compte certains problèmes collectivement reconnus.

Il faut en convenir, l’articulation entre le sanitaire et le médico-social n’est pas facile. Les intervenants sont nombreux : sécurité sociale, CNSA, ARS, CNAF…

Dans les territoires, ce sont les présidents de conseils généraux qui sont en première ligne et qui portent cette lourde responsabilité.

Si la situation s’aggrave au fil du temps pour certains – je pense aux conseils généraux –, d’autres ne dépensent pas tout leur budget ; je pense notamment à la CNSA et au fait que certaines sommes ne soient pas affectées à leur destination première, par exemple le Fonds national pour l’enfance.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas la faute du Gouvernement !

M. René-Paul Savary. En ce qui concerne la médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées, la sous-consommation de l’objectif de gestion délégué, l’OGD, de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie devrait atteindre 200 millions d’euros en 2012.

En dépit de cette sous-consommation, vous avez annoncé, madame la ministre, que 160 millions d’euros seraient affectés à la poursuite du programme de médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, les EHPAD, dans le cadre de la généralisation de ce qu’il est convenu d’appeler la « pathossification ».

Il conviendrait peut-être de mettre fin à une situation que l’on peut qualifier, sans exagération aucune, d’absurde.

En effet, si l’État peut librement décider d’améliorer la médicalisation des EHPAD et dégager des financements à travers ce PLFSS, il ne peut exiger que les départements accompagnent systématiquement et mécaniquement cette médicalisation en la complétant à hauteur de 30 % sur l’APA en établissement.

Dans le contexte financier actuel, les départements ne peuvent prendre en compte cette charge incluse sur l’APA en établissement, qui a aussi pour effet d’accroître le ticket modérateur, donc le « reste à charge » des résidents.

Les départements refusant de cofinancer cette médicalisation qui n’était pas prévue au départ, les crédits de l’assurance maladie ne sont pas consommés. Cette situation permet à la CNSA d’être excédentaire.

Cette sous-consommation permettrait opportunément de constituer un fonds d’urgence afin de venir en aide aux départements en difficulté – ils le sont presque tous maintenant ! Ce serait un juste retour : rappelons-le, quelque 54 % du montant de la contribution de solidarité pour l’autonomie, au lieu d’être affectés à la compensation de l’APA et de la PCH, renforceront l’ONDAM de l’assurance maladie.

Cependant, quels que soient les efforts, le compte n’y est pas. C’est près d’un milliard d’euros qui manque aux départements pour compenser l’APA à 50 %.

Permettez-moi de revenir sur la politique de la famille et la prise en charge des mineurs étrangers isolés, car il serait temps de trouver une solution aux problèmes qui se posent en la matière.

Faute de dispositifs d’accueil par l’État – lequel devrait logiquement mettre en place des établissements de protection de l’enfance en amont –, ce sont les structures de droit commun de l’aide sociale à l’enfance des départements qui sont conduites à prendre intégralement en charge les mineurs étrangers isolés, souvent remis directement par les forces de police.

Cette prise en charge devient insupportable. Elle relève de la politique de l’immigration. Les frais d’entretien et d’accompagnement au titre des mineurs étrangers isolés, accueillis par les établissements tarifés par les présidents de conseil généraux, devraient donc être refacturés et, en tout cas, imputés sur le Fonds national de protection de l’enfance. Au cours du débat, nous proposerons plusieurs amendements en ce sens.

En conclusion, madame la ministre, un certain nombre de crédits ne sont pas affectés là où il le faudrait. La prise en charge médico-sociale est une affaire partenariale. Les difficultés des conseils généraux, gravement affaiblis par le manque grandissant de compensation des trois allocations de solidarité, ne sont pas suffisamment prises en compte. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Mirassou. Vous en savez quelque chose, monsieur Savary !

Mme Christiane Demontès. Vous parlez d’expérience !

M. René-Paul Savary. Absolument, chers collègues, et j’y reviendrai.

Pis, certaines décisions contribueront à aggraver leur situation. La médicalisation et la prise en charge des mineurs isolés en offrent deux illustrations, mais certains facteurs d’aggravation sont directement imputables au gouvernement actuel : les cotisations AT-MP des élus, qui porteront, notamment, sur le budget des départements ; l’augmentation des taux de la CNRACL, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ; la hausse du coût des transports scolaires avec une demi-journée d’école supplémentaire ; l’accroissement du nombre des bénéficiaires du RSA – dans un département comme le mien, il s’agit d’1 % d’allocataires en plus chaque mois ; les pénalités URSSAF sur les allocations mensuelles de l’aide sociale à l’enfance – j’ai cru voir qu’un arrêté venait d’être pris à ce sujet. Tout cela va continuer à aggraver le sort des départements.

C’est afin d’améliorer certaines situations sur le terrain, insuffisamment prises en compte dans ce PLFSS trop technique, que des amendements méritent d’être adoptés. Du reste, ils visent simplement à permettre à chaque acteur d’exercer pleinement ses responsabilités.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Pour cela, il faut des recettes !

M. René-Paul Savary. Si, comme l’a annoncé le Premier ministre, le Gouvernement considère avec bienveillance certaines propositions formulées par voie d’amendement afin de soutenir les départements, alors la situation peut s’améliorer. En tout cas, espérons-le : 2014 et la future loi sur l’autonomie sont encore loin, et certains départements n’attendront pas.

Outre la prise en charge intégrale de la médicalisation par l’assurance maladie dans les EPHAD, outre la prise en charge financière des mineurs étrangers isolés par l’État, j’ai formulé des propositions, en accord avec l’Assemblée des départements de France, l’ADF, comme chaque année, sur des modifications de prise en charge des patients entrant dans le cadre du plan Alzheimer ou sur la prise en compte de la progression de la masse salariale liée à des décisions nationales, et non locales, pour les établissements sociaux et médico-sociaux.

Madame la ministre, ces réclamations n’ont pas changé. Elles sont soutenues depuis des années par l’ADF. Elles paraissent comprises par tous. Or aucun signe n’a encore été donné. Et si la proposition de loi Roche, qui envisageait une compensation de l’APA à 50 % pour les départements grâce à l’élargissement des bases prises en compte pour la journée de solidarité a été votée par le Sénat il y a quelques semaines, ce n’est pas avec l’accord du Gouvernement.

Madame la ministre, nous attendons de pied ferme que des actes soient enfin pris dans ce PLFSS, car nous ne voyons encore rien venir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’appréciation de notre groupe sur la branche accidents du travail-maladies professionnelles, ou AT-MP, sur laquelle je souhaite intervenir ce soir, s’inscrit dans une volonté forte et permanente de voir consolidé notre système de protection sociale.

Dans cet esprit, mon intervention portera, tout d’abord, sur l’évocation des dernières statistiques inquiétantes de sinistralité, ensuite, sur la situation financière de la branche ATMP, enfin, sur les mesures de justice ayant trait à cette branche contenues dans le présent PLFSS.

Selon les derniers chiffres officiels disponibles, ceux de l’année 2010, le nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles a augmenté. On compte ainsi 680 000 accidents du travail, soit une hausse de 1,1 %, dont 45 000 accidents graves, et 55 057 maladies professionnelles, soit une augmentation de 2,7 %.

Chaque jour, plus d’une personne décède d’un accident du travail ou des suites d’une maladie professionnelle ; chaque année, 3 000 personnes meurent en France en raison de l’amiante.

Par ailleurs, on observe une augmentation du travail de nuit, qui concerne aujourd’hui 3,5 millions de personnes.

Pour les femmes, cette hausse constitue un facteur de risque supplémentaire. L’étude CECILE, menée en 2010 par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, dans mon département d’Ille-et-Vilaine et dans celui de la Côte-d’Or, montre que le risque de cancer du sein augmente de 30 % chez les femmes ayant travaillé de nuit.

Les conditions de travail ont un impact direct sur la santé. Les personnes les plus exposées à la pénibilité sont celles dont l’espérance de vie à 35 ans est la plus faible.

Les conditions d’emploi ont aussi une incidence non négligeable. Les salariés sous contrat précaire sont plus exposés à des troubles dépressifs, à des accidents et à des maladies, dans la mesure où leur formation à la sécurité est moindre et où ils travaillent sur des postes à risques.

Enfin, il faut rappeler que, sur une longue période, depuis 2001, les dépenses de la branche AT-MP pour les maladies professionnelles sont passées de 1 milliard d'euros à 2,2 milliards d'euros, soit 20 % des dépenses de la branche.

Cette évolution négative de la sinistralité liée au travail n’est pas admissible sur le plan humain et elle est de moins en moins supportable sur le plan financier.

La situation financière de la branche AT-MP est très fragilisée depuis 2003. La dette cumulée a notamment augmenté, et la branche se trouve en déficit après une quarantaine d’années au cours desquelles elle était excédentaire.

Depuis 2003, la branche a connu une succession de déficits allant de 100 millions d'euros à 700 millions d'euros en 2009 et 2010, ce qui explique que la dette cumulée atteigne 1,7 milliard d’euros, selon le rapport sénatorial d’information de Jean-Pierre Godefroy et Catherine Deroche au mois de juillet 2012.

En 2012, pour la deuxième année consécutive, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche AT-MP : « Les insuffisances cumulatives du contrôle interne [...] et de l’activité de recouvrement portent atteinte à l’exhaustivité et à l’exactitude des cotisations sociales affectées à la branche AT-MP. » Vocabulaire inimitable pour qualifier l’obscurité de gestion...

Les causes de la dette sont tout autant structurelles que conjoncturelles.

Les transferts vers d’autres régimes ont été, en 2011, de 2,562 milliards d'euros, en augmentation de 1,8 % par rapport à 2010. Ils représentent maintenant 21,7 % des charges imputables à la branche AT-MP, ce qui, sur le plan structurel, ne manque pas d’étonner.

En 2012, le transfert vers la branche maladie s’élève à 790 millions d’euros, au motif habituel de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance des AT-MP.

En ce qui concerne la branche vieillesse, la contribution pour les départs anticipés à la retraite pour pénibilité est de 110 millions d’euros en 2012, après 35 millions d'euros en 2011. Elle ne figure pas dans l’avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Le Gouvernement indique que les crédits non utilisés de 2012 sont suffisants pour couvrir les prévisions de 2013, à raison de 300 à 400 demandes par mois. Il est prévu que cette contribution n’existe plus à la suite de la prochaine réforme de 2013 sur les retraites, ce qui nous semble sain et opportun.

J’en viens aux fonds destinés aux victimes de l’amiante.

Pour 2013, les montants proposés sont respectivement de 115 millions d’euros pour le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, soit une économie de 200 millions d'euros par rapport à 2011 et à 2012, et de 890 millions d'euros pour le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA. Pour le FIVA, le Gouvernement indique que le fonds de roulement de 350 millions d'euros est suffisant pour couvrir 2013, ce dont nous prenons acte, et que la dotation sera revue au niveau nécessaire pour couvrir les besoins en 2014. Sur ce dernier point, nous faisons totalement confiance au Gouvernement.

La faiblesse de la progression de la masse salariale – chômage partiel, licenciements, précarité, etc. – dans les secteurs à forte sinistralité constitue une autre raison de la dette. Dans ces conditions, il est absolument nécessaire de relancer la croissance. C’est ce à quoi s’attelle le Gouvernement.

Le coût des procédures contentieuses pour la branche AT-MP a explosé depuis plusieurs années. Il a augmenté de 70 millions d'euros par rapport à 2010, pour atteindre 520 millions d'euros en 2011. Il pèse donc de façon non négligeable sur le résultat comptable de la branche.

La réforme de l’instruction des procédures d’AT-MP, prévue par le décret du 29 juillet 2009 et entrée en application le 1er janvier 2010, a pour objet de limiter cette inflation procédurière.

C’est en effet un véritable marché qui s’est peu à peu créé sur ce point avec l’externalisation de la gestion du risque AT-MP vers des cabinets spécialisés et la systématisation des recours. Ce faisant, nombre de grandes entreprises ont cessé de s’impliquer dans la gestion de ce risque, ce qui est particulièrement regrettable.

Quelle solution peut être proposée pour assainir la situation de cette branche ?

Avec un déficit cumulé de 1,7 milliard d’euros, que l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, estime à 2,2 milliards d’euros en prenant en compte les besoins du fonds de roulement et le calendrier des transferts sur d’autres branches, il est évident qu’une augmentation des cotisations des employeurs devient inévitable.

Au demeurant, il convient de rappeler que, si le taux moyen actuel n’est que de 2,385 % de la masse salariale, il était en 1981 de 4 %. Depuis lors, il a connu une série de baisses, dont une importante diminution en 1993, passant alors à 2,6 %, sans que celle-ci soit justifiée par une réduction significative des accidents du travail et maladies professionnelles ou une responsabilisation particulièrement remarquable des entreprises en matière de prévention.

Considérant que 0,1 point de cotisations représente environ 500 millions d'euros payés par 2,3 millions d’employeurs cotisants, une augmentation unique de 0,4 point représenterait immédiatement la résorption de la dette. Ce pourrait être une solution. Toutefois, cette mesure budgétaire est inappropriée dans le contexte économique actuel.

Le Gouvernement propose donc une autre approche, plus adaptée, pour à la fois prendre en compte la fragilité de la situation financière de la branche AT-MP et commencer à apurer la dette cumulée, tout en créant et finançant des mesures de justice pour mieux accompagner les victimes du monde du travail. Cela ne peut que recueillir l’adhésion de notre groupe parlementaire.

Comment améliorer la structure financière de la branche ?

En 2013, en tendanciel, c’est-à-dire sans mesures correctrices, le déficit de la branche devrait atteindre 154 millions d’euros. Avec les nouvelles mesures proposées dans le projet de budget qui nous est présenté, à savoir le relèvement de 0,05 point des cotisations dues par les employeurs, l’amélioration du recouvrement des sommes dues en cas de faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article 66, qui devrait rapporter 10 millions d’euros en 2013, et la diminution, aujourd’hui possible, de la dotation au FIVA, le régime général de la branche AT-MP sera excédentaire à hauteur de 300 millions d’euros. Il s’agit donc là d’un point très positif, puisque serait enfin stoppée l’augmentation de la dette avec, en perspective, sa résorption à moyen terme.

S’agissant des mesures de justice et d’équité prévues dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, elles étaient attendues avec impatience par les intéressés et leurs associations représentatives.

Ainsi, l’actuelle majoration pour tierce personne sera remplacée par la création de la prestation d’aide à l’emploi pour tierce personne pour les victimes d’AT-MP, mesure prévue à l’article 65. Cette dernière disposition répond à une revendication justifiée des partenaires sociaux dans l’accord interprofessionnel du 12 mars 2007 sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels.

Les salariés dont l’incapacité permanente, à la suite d’un sinistre professionnel, est d’au moins 80 % et qui sont dans l’incapacité d’effectuer les actes ordinaires de l’existence sans l’assistance d’autrui bénéficient d’une majoration pour tierce personne.

Aujourd’hui, le montant de cette prestation n’est pas fondé sur leurs besoins réels.

L’article 65, applicable au 1er janvier 2013, crée donc une nouvelle prestation, dont le montant ne dépendra plus de celui de la rente, mais sera fonction des seuls besoins d’assistance de la personne.

Il s’agit bien d’une mesure de justice sociale et d’équité qui est tout à l’honneur du Gouvernement. Le financement de cette mesure représente 0,01 point de hausse des cotisations employeurs, inclus dans le 0,05 point dont j’ai fait état précédemment.

Il en est également ainsi des mesures prévues à l’article 66, comme l’obligation d’un remboursement immédiat par l’employeur du capital représentatif de la hausse de la rente, en cas de faute inexcusable ayant causé un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Enfin, pour les travailleurs victimes de l’amiante, l’article 67 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 étend à tous les régimes de retraite la possibilité pour les bénéficiaires d’une allocation de cessation anticipée d’activité de liquider leur pension dès 60 ans en cas de carrière complète. Auparavant, cette possibilité n’était ouverte que dans certains régimes. Des différences de traitement injustifiées et particulièrement choquantes pourront donc être corrigées.

Je conclurai mon intervention en soulignant que les mesures contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, notamment celles qui concernent le volet AT-MP, vont dans le bon sens. Mon groupe votera donc les articles relatifs à la branche accidents du travail et maladies professionnelles, tout comme il votera, en toute confiance, l’ensemble de ce texte. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Excellente intervention ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.

M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le thème de la transition semble être le fil conducteur de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Tout d’abord, on constate une amélioration, puisqu’à un héritage financier catastrophique succède un effort important de redressement des comptes sociaux.

Ensuite, on note une temporisation, car s’il reprend nombre d’objectifs formulés par le Sénat, ce texte ne porte pas encore les réformes d’ampleur nécessaires au renforcement de notre protection sociale. Cependant, en laissant du temps au Haut Conseil du financement de la protection sociale, ce projet de budget pour 2013 propose des mesures importantes pour protéger notre système de santé contre les atteintes qui lui ont été portées. C’est donc bien de rénovation qu’il s’agit.

Enfin, on remarque une transition dans l’examen législatif. La tension que les élus d’outre-mer connaissent particulièrement bien entre les préoccupations sociales légitimes, les solutions que l’on pense les mieux adaptées pour améliorer la condition de nos concitoyens et la nécessaire solidarité avec un Gouvernement que l’on souhaite toujours plus à l’écoute menace de réduire la discussion de ce texte devant notre assemblée à un bref épisode entre deux prises de décisions de nos collègues du Palais-Bourbon.

Ce risque me conduit à évoquer plus particulièrement deux mesures sur lesquelles je souhaite attirer l’attention.

Il s’agit, tout d’abord, du financement de l’hôpital.

À raison, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 abroge la convergence tarifaire et reporte l’application de la tarification à l’acte.

À raison encore, ce budget double la dotation destinée au Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés et illustre la priorité donnée à l’hôpital.

Il me revient cependant d’insister une nouvelle fois sur la faiblesse de la prise en compte du caractère singulier de la situation des établissements de santé en outre-mer.

L’offre de soins dans ces départements est plus qu’insuffisante, les difficultés y sont multipliées par les charges qui restent bien supérieures à celles qui sont supportées par les établissements métropolitains : frais des évacuations sanitaires de la Guyane vers la Martinique ou la métropole, difficultés de recrutement de praticiens spécialistes, indemnités de vie chère des personnels...

Est-il encore besoin de rappeler ce qui fait le surcoût financier des entreprises de santé en outre-mer ?

Un exemple suffit pour illustrer les conditions d’exercice budgétaire proprement hallucinantes du centre hospitalier de Cayenne : le mètre cube d’oxygène liquide revient à 9 800 euros, alors qu’il coûte environ 300 euros en métropole. Le surcoût dépasse ainsi 1 million d’euros pour le budget annuel de cet établissement.

Il paraît donc nécessaire que la revalorisation du coefficient géographique correcteur et la répartition du financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation se réalisent et tiennent compte des besoins des acteurs locaux de santé pour une offre de soins d’une qualité identique sur l’ensemble du territoire.

Les praticiens ont chiffré à 30 % le coefficient géographique, contre 26 % aujourd’hui, en Guyane, mais également en Martinique ou en Guadeloupe. Cette mesure nécessaire pour éviter l’étranglement financier des centres de soins dans les départements français d’Amérique aura-t-elle une traduction d’ici au mois de mars prochain ?

Par ailleurs, comme dans de nombreuses régions de France, la démographie médicale est sinistrée en outre-mer, notamment en Guyane.

Si, en dehors des différentes incitations financières visant à augmenter l’attractivité d’un territoire vis-à-vis des professionnels de santé, les réponses à apporter interviennent sur plusieurs champs qui vont bien au-delà du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, il est important que cette problématique soit avancée comme une priorité lors de nos débats.

L’offre de soins étant déterminée par l’État, au moyen, notamment, du numerus clausus et de différents schémas d’organisation, peut-être faudrait-il utiliser la voie législative pour mieux organiser, de manière plus égalitaire, la répartition de cette offre de soins sur le territoire français.

Je pense qu’il est inutile de rappeler que les inégalités de santé ont, elles aussi, un impact défavorable sur les dépenses : une prise en charge tardive des patients alourdit le coût de leur traitement.

La seconde transition que je souhaite aborder est celle du régime de cotisation des particuliers employeurs. Le Gouvernement avance de sérieux arguments en faveur de la suppression de l’assiette forfaitaire : l’abrogation de cette niche fiscale qui ne renforce pas la protection sociale des employés se justifie au regard de son coût.

Toutefois, la suppression de la possibilité de choisir la cotisation forfaitaire entraînerait celle d’autres régimes spéciaux fondés sur cette possibilité. Dans les départements d’outre-mer, la cotisation sociale forfaitaire due pour l’emploi à domicile était établie, depuis 1994, sur une assiette de 0,76 SMIC dans les Antilles et la Guyane et de 0,4 SMIC à la Réunion.

L’étude d’impact du PLFSS pour 2013 reste muette sur les conséquences de l’application de cette abrogation générale dans les départements d’outre-mer, qui bénéficiaient de ce régime forfaitaire avantageux. Madame la ministre, je ne peux penser que vous ne serez pas attentive à cette situation particulière, et j’espère donc que vous conserverez le dispositif en l’état, au moins jusqu’à la réception des travaux du Haut Conseil du financement de la protection sociale au printemps prochain, ou d’une étude circonstanciée des effets de l’abrogation de cette cotisation forfaitaire dans les départements d’outre-mer.

Enfin, je souhaite aborder la question du pouvoir d'achat des retraités, qui fait l’objet de plus de débats encore que celui des autres citoyens. En effet, l’augmentation de la pauvreté des personnes âgées conduit de plus en plus de retraités à poursuivre une activité professionnelle au-delà de 70 ans. Cette situation remet en cause le principe même de la protection sociale dans notre démocratie.

L’évolution est particulièrement problématique dans les outre-mer : alors même que le coût de la vie y est élevé, les seniors doivent faire face à une baisse brutale de leurs revenus du fait de la suppression de la majoration de 40 %, qui s’ajoute au manque à gagner résultant du mode de calcul de la pension. La pauvreté étant un déterminant de la santé, si nous n’opérons pas rapidement une transition permettant une hausse du niveau de vie des seniors, il y aura inéluctablement à terme un impact négatif sur les dépenses de santé, d’autant que les seniors représentent une part croissante de la population.

La transition entre notre protection sociale actuelle et celle que nous souhaitons pour les années à venir doit se traduire par une amélioration. L’offre de soins, déjà à l’agonie en outre-mer, ne saurait résister à une nouvelle dégradation.

En conclusion, je voterai le PLFSS pour 2013, mais je resterai vigilant quant aux réponses du Gouvernement aux préoccupations que je viens d’exposer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question des déserts médicaux a pris une large place dans les débats à l’Assemblée nationale. À cette occasion, madame la ministre, vous avez réaffirmé que les difficultés d’accès aux soins étaient une réalité et que le Gouvernement mènerait plusieurs actions pour y remédier.

L’accord sur les dépassements d’honoraires est une première étape dans la lutte contre la barrière financière. La création d’un contrat de praticien territorial en est une autre. Vous avez annoncé qu’un plan global serait mis en œuvre, et nous ne pouvons que nous en féliciter.

La présence ou non de professionnels de santé est un facteur essentiel pour la survie de nos zones rurales, mais aussi périurbaines. Cette question est fondamentale pour l’aménagement du territoire.

C’est la raison pour laquelle la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat s’est saisie de cette problématique, au travers de la création d’un groupe de travail sur la présence médicale, que j’ai l’honneur de présider. Hervé Maurey, qui en est le rapporteur, les autres membres du groupe et moi-même avons d’ores et déjà procédé à de nombreuses auditions. Nous rendrons nos conclusions au début de l’année 2013. Ce sera, je l’espère, madame la ministre, l’occasion de formuler des propositions nouvelles, au plus près des attentes de nos concitoyens, tout en répondant au souhait des professionnels de n’être plus seuls dans l’exercice d’une profession exigeante et de bénéficier de meilleures conditions de travail.

Sans préjuger des conclusions de notre groupe de travail, mais afin que cette question soit très présente au moment où nous examinons le PLFSS pour 2013, j’ai déposé un amendement pour que le débat soit ouvert et différentes pistes explorées. Je souhaite profiter de cette discussion pour rappeler que, sur cette question, l’attente des élus est immense. Nous l’avons vu : l’Association des maires de France et l’Association des maires ruraux de France ont, chacune à leur tour, lancé un appel au secours.

Si la présence médicale est une grande préoccupation des élus, et au premier chef des maires, c’est parce que c’est vers eux que se tournent les administrés quand le service public de la santé est mis à mal. Ce sont les élus qui tentent d’apporter des solutions en investissant dans des pôles ou des maisons de santé, qui doivent constituer de véritables solutions pérennes.

Aujourd’hui, les pharmaciens et les infirmières doivent prendre en compte l’offre existante dans les territoires avant leur installation et orienter leur projet vers les zones en situation de besoin. C’est ce même esprit qui peut nous guider pour améliorer l’offre médicale dans les secteurs en difficulté, que ce soit en milieu rural ou dans les zones périurbaines.

J’ai souhaité déposer deux autres amendements, cosignés par l’ensemble de mes collègues du groupe socialiste. Le premier tend à engager le dialogue sur les conséquences positives qu’aurait la réhabilitation du métier d’herboriste sur les comptes de la sécurité sociale. Cette question me tient particulièrement à cœur, madame la ministre. J’ai en effet déposé, le 12 juillet 2011, une proposition de loi visant à créer un diplôme et organiser la profession d’herboriste.

Le Centre d’analyse stratégique, qui dépend du Premier ministre, a tout récemment publié une étude dans laquelle il plaide pour une reconnaissance des médecines non conventionnelles, et en particulier de la phytothérapie. L’achat de plantes médicinales, écrit son auteur, est « en forte croissance depuis dix ans […], notamment avec la hausse de l’automédication ».

M. Jean Desessard. C’est vrai !

M. Jean-Luc Fichet. Elle ajoute : « En 2003, la vente de plantes médicinales a été estimée à presque 4 milliards d’euros sur le marché européen. La France, où la phytothérapie est la deuxième pratique non conventionnelle la plus utilisée, est le deuxième marché européen des plantes médicinales, derrière l’Allemagne. »

Le Centre d’analyse stratégique classe la phytothérapie et l’aromathérapie parmi les quatre médecines non conventionnelles les plus courantes, avec l’homéopathie et l’acupuncture.

Le développement de l’herboristerie permettrait de protéger le consommateur, de donner des gages de qualité et d’agir efficacement, en complément des traitements traditionnels. Il participerait ainsi à la maîtrise du déficit de notre système de sécurité sociale. Il contribuerait également à améliorer la prévention et le bien-être. En effet, les plantes médicinales interviennent dans les traitements contre le sida ou les cancers, notamment pour éliminer certains effets secondaires des traitements. Les plantes sont entrées à l’hôpital, mais leur utilité dans le processus des soins de support est trop souvent méconnue.

Par ailleurs, des médecins spécialement formés à l’emploi des plantes, les phytothérapeutes, prescrivent déjà l’utilisation de ces dernières. Cet engouement pour les plantes médicinales a très certainement des conséquences financières pour notre système de santé, puisqu’il entraîne une consommation moins importante de médicaments. Il convient donc, madame la ministre, d’avancer vers une reconnaissance de la profession d’herboriste.

Cette reconnaissance permettrait de créer de nouveaux emplois dans de multiples domaines, d’améliorer la protection des consommateurs et de lutter contre les charlatans qui pullulent sur Internet, de favoriser la qualité, la transparence et le respect des ressources dans une volonté de développement durable, de rendre plus dynamique la filière agricole des plantes, en particulier en favorisant sa transition vers l’agriculture biologique, enfin de conserver notre patrimoine culturel commun. Aujourd’hui, plus de 80 % des plantes utilisées en France sont importées.

Le second amendement que j’ai déposé avec mes collègues du groupe socialiste vise à demander au Gouvernement de remettre en vigueur l’allocation équivalent retraite, l’AER, ou, à défaut, d’instaurer un dispositif moins restrictif que l’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, afin de permettre aux anciens salariés concernés, qui seraient près de 30 000, dont de nombreuses femmes, de conserver une vie décente jusqu’à leur retraite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Je voudrais tout d'abord m’adresser à l’opposition, qui s’est évertuée à faire passer l’idée que nous ne proposions pas de ligne directrice ni de mesure forte pour les Français.

À mon sens, c’est plutôt le manque de courage – ou de volonté, je ne sais – de la droite qui a été criant ces dernières années. Le résultat est sans appel, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition : non seulement vous n’avez pas engagé les réformes de fond qui étaient attendues – vous avez dit vous-mêmes qu’elles répondaient à des attentes fortes –, qu’il s’agisse de l’accès aux soins, de la réduction des déserts médicaux, de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, de la réforme des retraites ou encore de la politique familiale,…

Mme Catherine Procaccia. La réforme des retraites, ce n’est pas une réforme de fond ?

Mme Marisol Touraine, ministre. … mais vous avez laissé se creuser un déficit spectaculaire, abyssal même, qui a réduit les protections auxquelles nos concitoyens sont en droit de prétendre. Par conséquent, vous êtes mal placés pour nous accuser aujourd'hui de ne pas présenter une vision cohérente et globale.

Monsieur Milon, vous nous avez reproché de nous en tenir à une vision comptable des problèmes. Je sais cependant que, dans votre bouche, il s'agit d’une critique minimale, puisque certaines de vos propositions ont été intégralement reprises dans ce PLFSS pour 2013. Il vous est donc difficile, malgré vos efforts, de vous démarquer de ces mesures… Il reste que vous vous êtes exprimé avec une courtoise toute républicaine.

Cependant, vos propos entrent avec contradiction avec ceux de Philippe Bas, que j’ai écoutés attentivement. En effet, votre collègue nous a reproché non pas de nous en tenir à une vision comptable, ce qui signifierait que nous ne préoccuperions que des objectifs financiers, mais de faire preuve d’inconstance en matière budgétaire. Il a notamment fait référence aux propositions que nous avons récemment mises en avant pour améliorer la compétitivité de notre économie.

Or il s’agit d’un raccourci difficilement compréhensible, puisque l’un des axes forts du plan de compétitivité annoncé voilà quelques jours est précisément d’établir une distinction claire entre, d'une part, la stratégie de compétitivité de nos entreprises, et, d'autre part, la question du financement de la protection sociale, afin de mettre fin à la confusion des genres qu’avait introduite, au début de l’année, la majorité que vous souteniez, monsieur Bas.

Les travaux du Haut conseil du financement de la protection sociale sont en cours. Ils déboucheront sur des propositions au début de l’année prochaine. L’enjeu est de sécuriser dans la durée le financement d’une protection sociale à laquelle notre majorité est attachée et dont nous savons que son coût ne va pas diminuer dans les années à venir, compte tenu du vieillissement de la population, de l’accroissement des besoins causé par le développement des maladies chroniques et de l’amélioration d’un certain nombre de traitements.

Contrairement à ce que vous avez indiqué, il existe une différence très nette dans notre esprit entre une stratégie en faveur de la compétitivité des entreprises et la mise en place d’un financement pérenne de la protection sociale.

Vous avez regretté avec une mauvaise foi souriante, je dois le reconnaître, mais une mauvaise foi tout de même, que nous ne mettions pas en place suffisamment vite une politique de prise en charge de la perte d’autonomie. Je veux y voir un trait d’humour, compte tenu de la rapidité toute manifeste avec laquelle la droite au pouvoir s’est emparée du sujet ces dernières années… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Quant à la question des retraites, nous avons annoncé l’engagement d’une concertation pour l’année prochaine, mais, dès ce projet de loi, nous avons apporté 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires au régime de retraite, excusez-nous du peu ! C’est bien que nous avons la volonté de mettre en place des réformes structurelles. Pour ce qui est de la mesure de « retour » à 60 ans pour une partie de la population, elle est entièrement financée par une hausse, qui reste minime, d’un prélèvement alimentant la sécurité sociale.

J’ai bien entendu les propositions de M. Dassault, évoquées rapidement, pour un financement pérenne de notre protection sociale.

Monsieur Vanlerenberghe, vous m’avez interrogée sur notre calendrier de retour à l’équilibre. L’engagement du Président de la République et de la majorité est bien celui d’un redressement des comptes publics à l’horizon 2017. Cet objectif sera atteint (M. Jean-Marie Vanlerenberghe manifeste son scepticisme.), ce qui ne signifie pas que, d’ici là, il ne doive pas y avoir de mesure structurelle pour la sécurité sociale. Au contraire, c’est bien parce que nous engageons de telles réformes que nous serons à même de respecter cet engagement en 2017.

Madame Dini, vous avez évoqué la T2A, la tarification à l’activité, et ses prétendus effets salutaires. Je vous rappelle que le rapport de la MECSS – dont les auteurs sont MM. Milon et Le Menn –, voté à l’unanimité, a exprimé fortement la nécessité d’une évolution du système de tarification de l’hôpital vers plus de transparence et de justice dans l’allocation des ressources, pour améliorer la qualité de service. Nous avons pris cela en compte dans le PLFSS.

Pourtant, monsieur Milon, vous en arrivez à critiquer une mesure que vous avez vous-même préconisée, à savoir la fin de la convergence tarifaire, en affirmant qu’une suspension serait plus efficace aujourd’hui qu’une abrogation. (M. Alain Milon fait des signes de dénégation.)

Sachez qu’il n’est pas question pour nous d’une simple parenthèse. Il s’agit d’une mesure forte, attendue par les acteurs du système de santé et par les patients, même si ces derniers, en réalité, se préoccupent assez peu des mécanismes de financement de l’hôpital, car ils veulent surtout que celui-ci soit garanti et conforté dans ses missions.

Enfin, vous m’avez interrogée sur le devenir du service de médecine de l’adolescence du CHU du Kremlin-Bicêtre. Soyez rassuré, il n’est pas menacé. Bien au contraire, cet établissement hospitalier est en train d’élaborer un projet d’envergure, qui permettra la prise en charge globale des adolescents, intégrant également le traitement des maladies chroniques et de l’obésité.

Monsieur Barbier, vous avez estimé que l’accord sur les dépassements d’honoraires emportait une stigmatisation des professionnels de santé, des médecins. À mes yeux, le choix de la négociation est tout le contraire. Le fait que l’accord ait été signé par trois syndicats majoritaires indique que les médecins, dans leur immense majorité, ne se sont pas sentis stigmatisés.

En tout cas, je tiens à le redire, les médecins sont évidemment essentiels au fonctionnement de notre système de santé. Il ne peut pas y avoir de système de santé sans médecins et personne n’a eu l’idée de soutenir le contraire ! J’ajouterai même qu’il ne peut pas y avoir, dans notre pays, compte tenu de son histoire et de la manière dont s’est structurée et organisée l’offre de soins, de système efficace et adapté sans professionnels libéraux.

Est-ce à dire qu’une régulation est inutile ? Je ne le pense pas. Les patients attendent non pas des discours idéologiques sur ces questions, mais précisément la mise en place d’un système qui les sécurise dans leur accès aux soins. Vous le voyez, nous sommes bien loin de la stigmatisation que vous avez évoquée.

Madame Procaccia, vous avez consacré l’essentiel de votre propos à la branche famille. Au travers de ce PLFSS, c’est une politique familiale résolument à gauche, ancrée dans la solidarité entre les familles que nous proposons. Elle reconnaît toutes les familles et tend à l’égalité entre les hommes et les femmes, ainsi qu’à la prise en compte des nouvelles formes familiales existant aujourd’hui.

Monsieur Savary, je vous rappelle que l’ONDAM pour 2013 permet de préserver des moyens en hausse substantielle pour le secteur médico-social. Je ne suis pas certaine d’avoir bien suivi votre démonstration selon laquelle il y aurait un sous-ONDAM à 4 %, qui cacherait en réalité un taux probablement inférieur puisque nous ne faisions pas la réforme de la dépendance – que vous reconnaissez n’avoir pas faite vous-même lorsque vous étiez au pouvoir. En gros, vous nous dites que, dans la mesure où vous n’avez pas fait grand-chose,…

M. Jean Desessard. C’est vrai !

Mme Marisol Touraine, ministre. … vous ne voyez pas bien comment nous pourrions faire plus ! Je vous remercie de cette démonstration, qui a au moins le mérite de montrer que la précédente majorité n’a pas beaucoup agi.

Pour le reste, soyez rassuré, la qualité des relations avec les conseils généraux est une priorité pour nous. Pour ma part, j’y suis extrêmement attachée, puisque je ne peux pas oublier les fonctions que j’ai occupées par le passé.

À l’évidence, nous avons besoin de consolider et de sécuriser les départements dans la prise en charge des allocations universelles leur incombant, en particulier l’allocation personnalisée d’autonomie, qui a été très souvent abordée dans le débat aujourd’hui, y compris par vous, monsieur Savary. On pourrait aussi évoquer le RSA et la PCH, pour ce qui est des conseils généraux, même s’il faut noter la forte montée en puissance, en quelque sorte en miroir, de l’AAH pour l’État.

Vous voyez bien que ce travail suppose de s’inscrire dans la durée et, comme j’ai eu l’occasion de le dire, nous allons organiser des concertations approfondies dans la perspective à la fois de la décentralisation et de la réforme de la perte d’autonomie. Il s’agira d’améliorer les relations entre l’État et les conseils généraux. Cela passe aussi par une réflexion sur les modes de financement pérennes des allocations, qui n’a jamais été menée par le passé.

Je souhaite maintenant remercier les parlementaires de la majorité du soutien fort et affirmé qu’ils m’ont apporté, après celui qui a été exprimé par les différents rapporteurs en introduction de ce débat. Néanmoins, certains d’entre eux ont fait part de quelques interrogations, ce qui me paraît normal et salutaire dans une démocratie comme la nôtre.

Madame Génisson, au-delà du soutien que vous avez manifesté aux mesures fortes, décidées notamment dans le domaine de la santé, vous m’avez interrogée sur la revalorisation des actes dans le cadre de l’accord sur les dépassements d’honoraires. S’agissant d’un enjeu effectivement important, un effort substantiel a été consenti sur le tarif opposable d’une série d’actes. Il faut mesurer la valeur que représente cet engagement en période de crise et de restrictions financières. Cet accord, j’y insiste, a un objet fondamental, l’accès aux soins de nos concitoyens. Il vise aussi à lever les obstacles existants.

Tout d'abord, il comporte tout d’abord des mesures de valorisation du travail des médecins engagés en secteur 1, au travers de l’amélioration du forfait médecin traitant.

Ensuite, il prévoit la revalorisation d’un certain nombre d’actes de médecins exerçant tant en secteur 1 qu’en secteur 2, qui pratiquent donc, ou non, le dépassement d’honoraires. Ainsi, certains actes, en particulier en chirurgie, dont on parle beaucoup aujourd’hui, feront l’objet d’une revalorisation sur les trois prochaines années, ce qui n’avait pas été le cas depuis longtemps. (M. Gilbert Barbier manifeste son scepticisme.)

Monsieur Watrin, vous avez appelé de vos vœux un PLFSS marquant le changement. À mes yeux, c’est bien ce qui caractérise le texte que nous vous présentons. Vous avez vous-même, et je vous en remercie, rappelé les grandes mesures qu’il contient.

Cependant, vous avez affirmé que l’institution d’une contribution additionnelle de solidarité sur les pensions de retraite et d’invalidité, prévue à l’article 16, était « une mesure de droite ». Je ne sais pas si l’opposition, dans cet hémicycle, partagera votre analyse ! En tout cas, pour ma part, je n’y souscris pas. À ce sujet, je tiens d’ailleurs à remercier Mme Ghali et M. Desessard, qui ont rappelé que cette mesure de justice ne touchait pas les petites retraites et qu’elle s’inscrivait dans une logique d’équité.

Je le répète, dans l’opposition comme aujourd'hui dans la majorité, nous avons toujours souhaité une grande réforme pour l’autonomie des personnes âgées, longtemps promise et jamais réalisée jusqu’à ce jour. Pour que cette réforme puisse s’engager sur les bases d’un financement relevant non pas de l’assurance privée, mais de la solidarité, nous avons besoin de solliciter la participation de tous. Personne ne comprendrait que les retraités imposables – j’insiste sur ce qualificatif – soient la seule catégorie de la population à ne pas être mise à contribution pour la dépendance et la perte d’autonomie.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, je serai extrêmement attentive à ce que l’évolution de notre système de protection sociale se fasse bien dans la cohésion et le rassemblement de l’ensemble de la population. L’un des enjeux est la lisibilité de notre système de protection sociale et la confiance que tous les Français, en particulier, aujourd’hui, les jeunes actifs, ont dans sa capacité à leur apporter des garanties dans la durée.

S’agissant de la dépendance, nous évoquons évidemment un phénomène qui arrive tard et même, souhaitons-le, le plus tard possible dans la vie de chacun. Il est compréhensible que les jeunes actifs de 30 ans ou 35 ans, à qui l’on demande d’apporter une contribution pour créer un nouveau droit, car c’est bien de cela qu’il s’agit, au profit de générations qui ont moins connu le chômage que celles d’aujourd'hui, qui ont connu des carrières plus continues, moins interrompues, moins difficiles, s’interrogent sur la légitimité et le bien-fondé de notre système de protection sociale.

M. Jean Desessard. Absolument !

Mme Marisol Touraine, ministre. J’y insiste, la question de la cohérence, de la cohésion, de l’égalité de la contribution demandée à chacun n’est pas simplement d’ordre financier. Il s’agit, certes, de dire qu’à revenu égal la contribution doit être égale, quel que soit l’âge que l’on a. Au fond, un retraité qui touche une pension de 2 000 ou 2 500 euros a autant le devoir de contribuer que l’actif qui bénéficie d’un revenu équivalent.

Toutefois, au-delà de cette exigence d’équité financière, et dès lors, encore une fois, que nous parlons des retraités imposables, il y va de la solidité, de la crédibilité, de la légitimité de notre système de protection sociale. Permettez-moi d’insister sur ce point, car j’entends souvent les jeunes générations s’interroger sur le devenir de ce système, en ayant le sentiment qu’elles sont confrontées à des conditions de vie, de travail, d’acquisition des droits sociaux bien plus difficiles que celles qu’ont connues les générations passées, compte tenu de l’évolution globale de la situation économique.

Il ne s’agit pas de stigmatiser les générations passées, et tant mieux si la situation a pu être pour elles plus facile et meilleure. Pour autant, il nous faut l’entendre, la solidarité entre les générations passe aussi par un financement intergénérationnel des droits que nous voulons construire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Madame Schillinger, je vous confirme que, dans le cadre de ce PLFSS, le Gouvernement a souhaité prendre une mesure immédiate pour relever le niveau des retraites des agriculteurs qui ont dû interrompre leurs activités pour cause d’invalidité ou de longue maladie. Ne l’oublions pas, d’autres mesures devront suivre ; elles seront élaborées l’année prochaine, à l’occasion d’une réflexion d’ensemble sur les retraites, menée notamment dans le cadre d’un groupe de travail conduit avec le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll.

Vous m’avez également interrogée sur la situation des chômeurs âgés, soulignant combien la suppression de l’AER fut éprouvante pour nombre de nos concitoyens. Je le répète une fois de plus, je suis parfaitement consciente des difficultés et très attentive aux situations qui ont pu être ainsi créées. Le Gouvernement a permis le retour à la retraite à 60 ans pour une partie de la population. C’est une première réponse. Nous devons prendre le temps d’évaluer les effets précis de la suppression de l’AER avant de décider si d’autres évolutions sont nécessaires pour y faire face : des études sont en cours et, sur cette base, le Gouvernement examinera les réponses envisageables.

Dans votre propos, madame Cohen, vous avez salué le gel de la convergence tarifaire. Je tiens à vous le préciser, il s’agit non pas simplement d’un gel, mais bel et bien d’une suppression, puisque la convergence est injuste dans ses principes, inéquitable dans son application et inefficace dans ses résultats.

Cette suppression s’inscrit dans la perspective de la réhabilitation du service public hospitalier et de la reconnaissance des missions spécifiques réalisées par l’hôpital public, pour lesquelles des mesures figurent d’ailleurs aussi dans ce PLFSS.

Vous avez fortement regretté que le taux de progression de l’ONDAM ait été fixé à 2,7 % et qu’il n’atteigne pas 3 %, car il s'agit pour vous d’un point important. Dans le contexte financier que nous connaissons, le Gouvernement assume parfaitement ses choix, tant il est vrai que les comptes sociaux doivent participer à la trajectoire de rétablissement de l’équilibre de nos comptes publics.

Pour autant, la santé est une priorité, ce qui explique que le taux de progression ait été porté à 2,7 %, contre 2,5 % en 2012. Il ne s’agit pas d’accompagner l’évolution des dépenses au fil de l’eau, car alors une hausse de 3 % n’aurait même pas été suffisante : il aurait fallu prévoir bien davantage.

Nous nous donnons les moyens d’investir dans des réformes de fond, qui nous permettront à la fois de mieux répondre aux attentes des patients et de réaliser très concrètement des économies.

Pour mieux soigner, pour aboutir à des traitements plus efficaces ou pour accompagner le vieillissement, il nous faut dégager des marges financières suffisantes : cela suppose aussi d’étudier les pistes d’économies possibles.

Il est inenvisageable, je l’affirme clairement, de vouloir répondre aux besoins nouveaux sans procéder à une évaluation des politiques existantes.

Plus généralement, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs de la majorité, je veux vous remercier d’avoir souligné les avancées contenues dans ce PLFSS.

Ainsi, Jean-Pierre Plancade a rappelé que le texte s’inscrivait dans une démarche d’équité et de justice, au travers de la mise en place de praticiens territoriaux de médecine générale, des nouvelles modalités de versement du complément de mode de garde ou des mesures prises en faveur des femmes, en particulier pour ce qui concerne l’IVG.

Pour leur part, Aline Archimbaud et Jean Desessard ont évoqué un PLFSS de rupture, soulignant qu’il n’introduisait aucune remise en cause des prestations tout en permettant de nouvelles avancées essentielles.

Vous avez regretté, madame Archimbaud, qu’il ne comporte pas de mesures plus fortes en faveur de la santé environnementale. Or le projet de loi de santé publique que nous sommes en train de préparer permettra de donner, en 2013, un élan véritable à un domaine qui a en effet été totalement oublié au cours des dernières années. Pour autant, des mesures ont d'ores et déjà été prises. Je pense à l’adoption de la proposition de loi relative à l’interdiction du bisphénol A et à la volonté du Gouvernement d’afficher, dans le PLFSS, une volonté plus marquée en direction des stratégies comportementales, et ce dans la droite ligne des annonces faites à l’issue de la grande conférence environnementale.

Madame Meunier, vous avez rappelé les avancées majeures pour les familles que contient ce PLFSS. Il était en effet important de conforter, de consolider dans notre société, loin de toute vision abstraite, le rôle des familles, de toutes les familles, y compris les plus modestes. D’où l’expérimentation du tiers payant pour le financement des gardes d’enfants et l’instauration d’un congé d’accueil de l’enfant, deux mesures que vous avez particulièrement évoquées.

En ce qui concerne la branche AT-MP, vous avez, monsieur Le Menn, détaillé les mesures de justice présentes dans le texte tout en exprimant votre préoccupation sur le taux de sinistralité observé et la dette cumulée de la branche.

La sinistralité sera l’un des enjeux majeurs de la prochaine convention d’objectifs et de gestion, discutée l’an prochain et qui s’attachera à renforcer les dispositifs de protection.

En outre, le Gouvernement a adopté, dans cette période de crise, une approche équilibrée de la dette de la branche AT-MP : la croissance modérée des cotisations patronales devrait permettre d’enrayer le phénomène d’accumulation constaté.

Par ailleurs, je voudrais dire à Jean-Étienne Antoinette que le Gouvernement prend parfaitement en compte les spécificités de l’outre-mer dans le financement de l’hôpital. Dans le cadre de la réforme de la tarification à l’activité engagée, il conviendra naturellement de mieux intégrer les surcoûts spécifiques de certaines activités hospitalières outre-mer, liés notamment à l’isolement. C’est l’un des objectifs de l’opération « transparence et qualité », qui sera prochainement lancée.

Enfin, je vous remercie, monsieur Fichet, d’avoir mis l’accent dans votre intervention sur l’accès aux soins. Vous l’avez indiqué, je présenterai dans quelques semaines des mesures globales incitatives d’accompagnement en faveur de l’installation des professionnels de santé – des médecins, mais pas uniquement – dans des territoires apparaissant aujourd’hui, souvent injustement, comme peu attractifs et qui connaissent, de ce fait, une certaine désertification. C’est un enjeu important à la fois pour tous les élus locaux et pour le Gouvernement.

Vous avez également marqué votre volonté de voir reconnue l’activité d’herboriste. Je crois savoir que vous serez prochainement reçu à mon cabinet pour évoquer la question. (M. Jean-Luc Fichet acquiesce.) Si je ne doute pas qu’une place puisse être faite à une telle profession, je tiens néanmoins à indiquer que, s’agissant des pathologies graves que vous avez évoquées, il ne faut pas introduire de confusion dans l’esprit des patients.

Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments de réponse que je tenais à vous fournir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Article 1er

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Nous allons examiner la première partie du projet de loi concernant les dispositions relatives à l’exercice 2011.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2011

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Article 2 et annexe A

Article 1er

Au titre de l’exercice 2011, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

171,8

180,3

-8,5

Vieillesse

194,6

202,4

-7,9

Famille

52,7

55,3

-2,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,8

13,0

-0,1

Toutes branches (hors transferts entre branches)

421,7

440,8

-19,1

;

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

148,0

156,6

-8,6

Vieillesse

100,5

106,5

-6,0

Famille

52,2

54,8

-2,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

11,3

11,6

-0,2

Toutes branches (hors transferts entre branches)

302,8

320,3

-17,4

;

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

14,0

17,5

-3,4

;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 166,3 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, s’élevant à 0,4 milliard d’euros ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 11,7 milliards d’euros.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année à pareille époque, l’examen de la première partie et de l’article 1er du PLFSS est pour nous l’occasion de revenir sur les prévisions de recettes et de dépenses du régime général obligatoire de base, telles qu’elles sont issues des travaux du Parlement. Il s’agit d’un exercice important, qui nous permet d’analyser a posteriori l’exactitude des estimations, voire leur sincérité.

Cette année, l’exercice est particulièrement intéressant, puisque, en dépit d’une estimation de croissance abusivement volontariste, les tableaux d’équilibre de l’exercice 2011 se révèlent meilleurs que ce qui était initialement prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Ainsi, le résultat définitif pour 2011 fait apparaître un déficit de 19,1 milliards d’euros, alors que les prévisions tablaient sur 22,4 milliards d’euros.

La démonstration est faite que la sécurité sociale souffre, d’abord et avant tout, d’un manque de recettes. Comment ne pas faire le lien entre la moindre dégradation des comptes sociaux en 2011 et une plus forte progression de la masse salariale ? Cette dernière a rapporté, à elle seule, 1,5 milliard d’euros de cotisations supplémentaires. L’apport de recettes nouvelles à destination de la protection sociale constitue donc le levier le plus fort pour remédier à la dégradation continue des comptes sociaux.

Ainsi, la hausse des prélèvements sociaux sur les revenus du capital a contribué à réduire la dette sociale.

Rechercher du côté du capital une piste de financement de la sécurité sociale est une idée à porter jusqu’au bout, jusqu’à ce que celui-ci soit soumis aux mêmes prélèvements que le travail. Il n’y a en effet aucune raison que les milliards qui servent à la spéculation, qui échappent à la rémunération du travail, voire qui participent à la destruction de l’emploi ne soient pas soumis à cotisations sociales.

Nous ne pouvons nous satisfaire que, dans le même temps, les ménages, c’est-à-dire les salariés, aient été pour leur part soumis à de nouveaux prélèvements injustes, amputant leur pouvoir d’achat.

Je pense plus particulièrement au doublement de la taxe sur les contrats mutualistes dits « complémentaires ». Cette mesure fiscale est prise en dépit du bon sens, puisqu’elle pénalise en fait des contrats dont le principe repose sur une réduction du reste à charge supporté par les patients qui respecteraient un parcours de soins, censé limiter les dépenses supportées par la sécurité sociale.

Au final, le doublement de la taxe se traduit par une augmentation du prix de ces contrats. Certains de nos concitoyens les plus modestes se résolvent à réduire la formule de leur complémentaire et, ainsi, à diminuer le montant de leur prise en charge. D’autres renoncent aux contrats responsables, ce qui induit des dépenses supplémentaires pour la sécurité sociale. D’autres encore vont jusqu’à ne plus souscrire une mutuelle, avec les conséquences que l’on connaît sur la santé et particulièrement sur la prévention. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous continuons à demander la suppression de cette mesure.

Nous mesurons à quel point la politique des gouvernements précédents, qui n’a consisté qu’à réduire les dépenses sociales tout en restant très timide sur la recherche de recettes nouvelles, a eu d’importantes conséquences pour les assurés sociaux.

Ainsi, l’ONDAM enregistre une moindre dépense en 2011, puisqu’il s’élève à 166,3 milliards d’euros, contre 167,1 milliards d’euros prévus au départ. Or, nous ne le savons que trop, ce qu’il est courant d’appeler la maîtrise de l’ONDAM résulte à la fois de l’application stricte de la convergence tarifaire et du gel en début d’année des dotations allouées au titre des missions d’intérêt général. Ce mécanisme, sur lequel entend revenir le Gouvernement, pénalise lourdement les établissements publics de santé, qui supportent seuls les efforts de réduction des dépenses hospitalières, alors que les cliniques commerciales contribuent à les accroître.

De même, force est de constater que la moindre dégradation de la CADES n’est pas le fruit d’un apport nouveau de recettes. Il s’agit, en réalité, pour 2011 du moins, d’une réduction du taux des crédits appliqués à la Caisse par les marchés financiers, non pas, comme nous avons pu le constater à la suite de l’élection présidentielle, parce que les opérateurs présents sur les marchés internationaux ont baissé leur taux, démontrant ainsi qu’ils faisaient plus confiance à la gauche qu’à la droite pour résorber la dette sociale, mais parce que la CADES a refinancé à moyen et long termes des emprunts contractés à court terme.

C’est le fait que le taux des emprunts à long terme soit inférieur à celui des emprunts à court terme qui explique le ralentissement de la dégradation des comptes de la CADES. La situation est pour autant loin d’être satisfaisante, puisque, ce faisant, le coût total des charges de crédits supporté par la CADES va mécaniquement s’accroître dans la durée.

Pour toutes ces raisons, et parce que la situation des comptes pour 2011 résulte d’un manque de volontarisme quant à l’apport de ressources complémentaires à la sécurité sociale, qui soient assises sur une base juste et solidaire, le groupe CRC s’abstiendra sur l’article 1er.

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Levée d'une demande de réserve (début)

Article 2 et annexe A

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2011, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2011 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2011, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2011

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2011

 

(En milliards d’euros)

Actif

2011

2010

Passif

2011

2010

Immobilisations

6,8

6,6

Capitaux propres

-100,6

-87,1

Immobilisations non financières

4,0

3,9

Dotations

32,9

32,8

Régime général

0,5

0,5

Prêts, dépôts de garantie et autres

1,9

1,9

Autres régimes

3,8

3,7

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

0,2

0,2

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

28,3

28,3

Avances, prêts accordés à des organismes de la sphère sociale (Unions pour la gestion des établissements des caisses d’assurance maladie, unions immobilières des organismes de sécurité sociale)

0,9

0,8

Réserves

11,3

13,2

Régime général

2,6

2,6

Autres régimes

6,3

6,7

FRR

2,4

3,9

Report à nouveau

-134,6

-110,0

Régime général

4,9

-13,5

Autres régimes

-0,1

-1,3

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

0,0

-3,2

CADES

-139,4

-92,0

Résultat de l’exercice

-10,7

-23,9

 

Régime général

-17,4

-24,0

 

Autres régimes

-1,9

-1,6

 

FSV

-3,4

-4,1

 

CADES

11,7

5,1

 

FRR

0,3

0,6

 

Autres

0,6

0,7

 

FRR

0,6

0,7

 

Provisions pour risques et charges

17,9

17,0

Actif financier

58,9

50,8

Passif financier

170,1

146,8

Valeurs mobilières et titres de placement

45,1

44,7

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, ECP)

162,6

118,8

Autres régimes

6,9

9,2

CADES

5,3

1,5

Régime général

5,6

17,5

FRR

32,9

33,9

CADES

156,9

101,2

Encours bancaire

13,7

5,9

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

3,7

24,7

Régime général

1,3

0,8

Régime général (y compris prêts Caisse des dépôts et consignations)

1,4

21,0

Autres régimes

1,2

0,7

Autres régimes (y compris prêts Caisse des dépôts et consignations)

1,3

3,7

FSV.

0,3

0,0

CADES

1,0

0,0

CADES

8,4

1,2

Dépôts

0,2

0,8

FRR

2,3

3,2

Régime général

0,2

0,8

Créances nettes au titre des instruments financiers

0,1

0,2

Dettes nettes au titre des instruments financiers

0,1

0,1

CADES

0,1

0,2

FRR

0,1

0,1

Autres

3,5

2,4

 

Régime général

0,0

0,3

 

Autres régimes

0,1

0,1

 

CADES

3,4

2,0

Actif circulant

65,4

60,0

Passif circulant

43,7

40,8

Créances sur prestations

7,3

7,8

Dettes et charges à payer (CAP) à l’égard des bénéficiaires

22,3

21,3

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

7,9

5,6

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et impôts de sécurité sociale

35,5

32,3

Dettes à l’égard des cotisants

1,2

1,4

Créances sur l’État et autres entités publiques

8,9

9,6

Dettes et CAP à l’égard de l’État et autres entités publiques

9,7

8,6

Produits à recevoir de l’État

0,4

0,5

Autres actifs (débiteurs divers, comptes d’attente et de régularisation)

5,5

4,1

Autres passifs (créditeurs divers, comptes d’attente et de régularisation) dont soulte des industries électriques et gazières

10,5

9,5

Total de l’actif

131,0

117,4

Total du passif

131,0

117,4

Nota : Les données figurant dans la colonne « 2010 » ont fait l’objet, par rapport à ce qui figure en LFSS pour 2012, des retraitements méthodologiques décrits en annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

 

Sur le champ de l’ensemble des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres, s’élevait à 100,6 milliards d’euros au 31 décembre 2011, soit l’équivalent de 5 points de produit intérieur brut (PIB). Ce passif net a augmenté de 13,4 milliards d’euros par rapport à celui constaté au 31 décembre 2010 (87,1 milliards d’euros) en raison essentiellement des déficits des régimes et du FSV pour l’année 2011 (soit 22,7 milliards d’euros), minorés de l’amortissement de la dette portée par la CADES (11,7 milliards d’euros), dont une partie (2,1 milliards d’euros) correspond à la mobilisation des réserves du FRR.

Compte tenu des sommes placées ou détenues en trésorerie (58,8 milliards d’euros, dont environ 60 % par le FRR et 23 % par la CADES dans le cadre de sa stratégie d’endettement à fin 2011), du besoin en fonds de roulement (différence de 21,7 milliards d’euros entre les actifs et passifs circulants) ainsi que des immobilisations et provisions, l’endettement financier s’élevait à 170,1 milliards d’euros au 31 décembre 2011 (contre 146,8 milliards d’euros au 31 décembre 2010).

L’ensemble de ces éléments sont détaillés en annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

II. – Couverture des déficits constatés sur l’exercice 2011

Les comptes du régime général ont été déficitaires de 17,4 milliards d’euros en 2011. La branche Maladie a ainsi enregistré un déficit de 8,6 milliards d’euros, la branche Vieillesse un déficit de 6,0 milliards d’euros, la branche Famille un déficit de 2,6 milliards d’euros et la branche Accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) un déficit de 0,2 milliard d’euros. Par ailleurs, le FSV a enregistré un déficit de 3,4 milliards d’euros.

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général, et, au cours de l’année 2012, des déficits 2011 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV. Conformément aux dispositions organiques, la CADES a été affectataire de ressources lui permettant de financer ces sommes.

La plupart des régimes de base autres que le régime général présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des régimes intégrés financièrement au régime général (régimes agricoles hors branche Retraite du régime des exploitants, régimes maladie des militaires, des ministres des cultes et des marins), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins), des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État) équilibrés par ces derniers et enfin du régime social des indépendants dont les déficits sont couverts par une affectation à due proportion du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés.

Cependant, deux régimes ne bénéficiant par de tels mécanismes d’équilibrage ont enregistré en 2011 des résultats déficitaires.

S’agissant, d’une part, de la branche Retraite du régime des exploitants agricoles, le déficit s’est élevé à 1,2 milliard d’euros (contre 1,3 milliard d’euros en 2010) et a fait l’objet d’un financement bancaire dans le respect du plafond fixé par la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 précitée. Il convient de rappeler que cette dernière avait par ailleurs transféré à la CADES les déficits cumulés de cette branche du régime des exploitants agricoles au titre des exercices 2009 et 2010.

S’agissant, d’autre part, de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), devenue déficitaire en 2010, le déficit s’est élevé à 0,4 milliard d’euros (après 0,5 milliard d’euros en 2010).

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.

M. Dominique Watrin. L’examen de ce tableau, mes chers collègues, n’est pas rassurant et atteste de l’ampleur des déficits cumulés par la sécurité sociale et transmis à la CADES. Cette dette est, au demeurant, le fruit de choix politiques et économiques auxquels nous ne souscrivons pas.

La multiplication des mesures d’exonérations de cotisations sociales et d’exemptions d’assiettes ont considérablement réduit les ressources allouées à notre protection sociale, le dernier exemple étant sans doute l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires réalisées dans le cadre de la loi TEPA. La suppression de ce dispositif à l’occasion de l’adoption par le Parlement de la loi de finances rectificative pour 2012 a permis de susciter plus de 3 milliards d’euros de ressources nouvelles, au profit de la sécurité sociale.

Pour autant, mon intervention portera non pas sur ce sujet, mais sur le Fonds de réserve des retraites. Selon les informations communiquées le 27 août dernier sur sa situation économique, son actif s’élevait, au 30 juin 2012, à 34,4 milliards d’euros. Or la valeur de l’actif net du Fonds était, au 31 décembre 2011, de 35,1 milliards d’euros, soit une réduction de 0,7 milliard d’euros en six mois.

Cette réduction aurait pu être plus importante et le rendement être donc encore plus dégradé si la Banque centrale européenne n’avait pas engagé des opérations de refinancement à long terme. Cette décision aurait permis une progression de la valeur des actions de la zone euro de 10 % à 12 %. Toutefois, cette amélioration risque d’être toute relative et de courte durée puisque la crise bancaire espagnole a, de son côté, entraîné des corrections à la baisse.

On le voit bien, le devenir du Fonds de réserve des retraites est étroitement lié, en raison de la composition de son portefeuille, à la situation des marchés financiers. Bien qu’il concoure au niveau élevé de protection sociale de nos concitoyens en reversant 2,1 milliards d’euros à la CADES chaque année entre 2011 et 2024, le Fonds de réserve des retraites est le seul organisme qui tire ses ressources de la spéculation. En somme, mieux la Bourse se tient, c’est-à-dire plus elle suscite de spéculation, avec les conséquences que cela entraîne sur l’emploi, plus les rendements du Fonds de réserve des retraites sont bons ! Néanmoins, je vous pose la question : qu’adviendrait-il si, demain, les marchés financiers s’effondraient ?

En outre, je dois dire que j’ai été particulièrement choqué à la lecture du rapport annuel du Fonds de réserve des retraites. Celui-ci se félicite de la constitution d’un gouvernement technique d’union nationale à Athènes au début du mois de novembre, avec à sa tête l’ancien gouverneur de la Banque centrale grecque et ex-vice-président de la BCE, ainsi que du départ forcé, quelques jours plus tard, du président du Conseil italien, remplacé lui aussi par un technicien, ancien commissaire européen, deux changements qui auraient amorcé un « retour au calme ».

Ce rapport sous-tend donc l’idée qu’il faudrait, pour rassurer les marchés financiers et, par voie de conséquence, garantir le bon rendement du fonds, que les gouvernements soient progressivement remplacés par des gouvernements techniques, en dépit des orientations et des choix politiques exprimés par les peuples. Nous ne pouvons accepter pareille déclaration, qui remet en cause les fondements même de notre démocratie !

Nous ne souscrivons pas davantage à l’idée qu’il faudrait appliquer partout en Europe une politique d’austérité de nature à rassurer les spéculateurs pour que le rendement du Fonds de réserve des retraites progresse.

Au contraire, nous pensons que, pour réduire la dette sociale sur la durée, il faut rompre avec cette logique et investir dans l’emploi.

Pour répondre à notre excellent collègue Jean Desessard, si l’on veut tenir compte des mutations de la société, alors, oui, il faut innover et taxer la richesse financière des entreprises. On ne dira jamais assez que, selon l’INSEE, et contrairement aux chiffres cités par M. Serge Dassault, les entreprises non financières versent deux fois plus de dividendes aux actionnaires et d’intérêts aux banques que de cotisations sociales ! Je n’invente rien : ce sont les chiffres de l’INSEE pour 2011.

Pour finir, nous nous abstiendrons sur cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 et l'annexe A.

(L'article 2 et l'annexe A sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

(La première partie du projet de loi est adoptée.)

Levée d’une demande de réserve

Article 2 et annexe A
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Levée d'une demande de réserve (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous ne sommes pas sur le point de débuter l’examen de la troisième partie de ce texte, loin s’en faut. Je voulais donc, avant la levée de la séance, indiquer que la réserve des articles demandée n’avait plus lieu d’être.

M. le président. J’en prends acte, madame la ministre.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Levée d'une demande de réserve (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale

12

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 13 novembre 2012, à 14 heures 30 et le soir :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (n° 103, 2012-2013) ;

Rapport de MM. Yves Daudigny, Ronan Kerdraon, Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès et M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 107, 2012-2013) ;

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n° 104, 2012 2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 13 novembre 2012, à zéro heure vingt.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART