M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le ministre, je souhaite, à l’occasion de l’examen des prévisions de recettes pour 2012-2014, vous redire les conséquences de vos choix au regard des besoins.

En travaillant sur les comptes de 2010, nous avons vu qu’ils étaient déficitaires et que les réformes entreprises depuis 2004 étaient inefficaces. Les petits progrès constatés ont été réalisés pour l’essentiel à partir des prélèvements supplémentaires sur les assurés sociaux. L’année 2010 a vu l’effondrement de la crédibilité de la ministre de la santé, après l’échec de la politique sanitaire dans le dossier de la grippe aviaire.

Avec cet article, la fuite en avant continue !

Vous tablez ainsi, monsieur le ministre, sur une hypothèse d’évolution moyenne du PIB de 2 % en 2011, puis de 2,5 % les trois années suivantes, et sur une croissance de la masse salariale privée de 2,9 % en 2011, puis de 4,5 % jusqu’en 2014. Soit dit en passant, si cette dernière hypothèse devait se vérifier, cela signifierait qu’une réforme du financement des régimes de retraite était inutile, au moins jusqu’en 2018. Toutefois, tous les analystes s’accordent à dire que l’évolution de la masse salariale sera bien plus faible que vous ne le prédisez.

Vous misez enfin sur un taux de progression de l’ONDAM réduit à 2,9 %, puis à 2,8 %, ce qui est irréaliste.

À cet égard, non seulement les scénarios que vous nous présentez, qu’il s’agisse de la version optimiste ou de la version pessimiste, sont très largement déficitaires, mais ces projections anticipent l’échec des politiques que vous êtes en train de nous proposer. C’est la raison pour laquelle nous avons des questions de fond extrêmement précises à vous poser.

Les scénarios de l’annexe sont fondés sur des hypothèses tellement chimériques qu’elles en deviennent insincères, ce qui nous pose un problème. Après des années de budgets insincères, vous nous présentez encore une fois un texte dépourvu de la moindre vraisemblance.

Quant aux recettes, j’ai déjà dit au début de nos débats que nous les jugions à la fois insuffisantes et inégalitaires. Elles sont insuffisantes parce que vous refusez de prendre l’argent là où il se trouve. Nous vous avons pourtant fait plusieurs propositions à cet égard, qu’il conviendrait d’examiner sérieusement et rapidement si l’on ne veut pas prolonger la situation financière difficile décrite à l’article 28.

De surcroît, le financement que vous prévoyez est désormais enraciné dans une injustice sociale flagrante, et toutes les propositions nouvelles contenues dans ce texte ne font que l’aggraver. Vous continuez ainsi de refuser de taxer sérieusement les revenus des placements financiers spéculatifs. Ceux qui gagnent de l’argent en dormant ne sont pas taxés, alors que ceux qui gagnent de l’argent en travaillant le sont, qui plus est fortement.

Vous trouvez même le moyen, monsieur le ministre, de taxer la maladie quand elle frappe les personnes disposant des plus petits revenus, avec les franchises que vous imposez, par exemple, aux retraités et aux malades en affection de longue durée eux-mêmes ! Les malades vont être taxés parce qu’ils ont eu le malheur d’être victimes – et pourquoi ne pas considérer qu’ils en sont responsables ? – d’un accident de la vie.

Injuste aussi le maintien des exonérations de charges sociales pour le patronat : 31 milliards d’euros cette année, dont seulement 3,5milliards d’euros compensés, ce qui représente un manque à gagner très important pour nos caisses. Et je ne dirai rien des actions gratuites et des stock-options, que vous n’osez pas égratigner afin de ne pas prendre le risque de vous fâcher avec certains de leurs bénéficiaires.

En un mot, ces taxes frappent indifféremment les petits revenus et les plus malades, mais, il faut bien le dire, elles épargnent les plus aisés !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 35 est présenté par MM. Cazeau et Daudigny, Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, M. Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz et Schillinger, MM. Le Menn, Kerdraon, Godefroy, Jeannerot, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 235 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 475 rectifié est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacky Le Menn, pour présenter l’amendement n° 35.

M. Jacky Le Menn. Cet amendement vise à supprimer l’article 29, qui prévoit l’approbation par notre assemblée du rapport figurant en annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Ce rapport décrit, pour les quatre années à venir – 2011 à 2014 – les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.

Or les hypothèses qui sous-tendent les prévisions pluriannuelles inscrites dans ce rapport sont totalement irréalistes. Par exemple, rien ne porte à croire que l’évolution de la masse salariale passera de 2,9 % en 2011 à 4,5 % en 2012.

M. Jacky Le Menn. Madame Soleil est sans doute passée par là !

Il en est de même pour l’ONDAM, fixé à 2,9 % pour 2011 et à 2,8 % pour les années 2012 à 2014. Ces taux sont eux aussi irréalistes. Vous confondez volontarisme et réalisme, monsieur le ministre. C’est dangereux pour nos concitoyens qui auront recours au système de santé.

En 2010, l’ONDAM apparaît comme ayant été respecté, mais uniquement au prix du gel de plus de 500 millions d’euros de crédits – gel dont on n’a pas encore mesuré tous les effets négatifs –, ainsi que d’une hausse du forfait hospitalier et de nouveaux déremboursements au détriment des malades.

Cet objectif pluriannuel ne sera pas respecté, car aucune mesure visant à réformer structurellement l’assurance maladie n’est engagée : l’effort de redressement des comptes se limite à des déremboursements et à des mesures qui pèseront uniquement sur les assurés et les conduiront à payer toujours plus pour se soigner.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 235.

Mme Annie David. L’amendement n° 235 vise à supprimer l’article 29, qui est fondé sur des prévisions macro-économiques pour les années 2011 à 2014 que nous jugeons peu réalistes, c’est le moins que l’on puisse dire !

Ainsi, vous prévoyez une évolution moyenne du PIB de 2 % en 2011, puis de 2,5 % les trois années suivantes. Quant à la croissance de la masse salariale privée, vous prévoyez qu’elle sera de 2,9 % en 2011, puis de 4,5 % jusqu’en 2014. Or ces prévisions sont d’ores et déjà contredites par l’Observatoire français des conjonctures économiques, qui prévoit une hausse, certes, mais une hausse du chômage !

Chose curieuse, alors que vous prévoyez une forte hausse de la masse salariale, qui passerait sans doute par une augmentation importante et inespérée des salaires, ce dont nous doutons fortement, cette hausse serait sans effet sur la sécurité sociale. Pourtant, une partie non négligeable de son financement provient des cotisations sociales assises sur les salaires.

Une hausse du niveau que vous projetez, en termes tant d’emplois créés que de revalorisation de salaires, devrait donc logiquement permettre à la sécurité sociale d’être à l’équilibre. Or tel n’est pas le cas. En effet, en dépit de ces prévisions, surréalistes, les déficits des branches du régime général et de l’ensemble des régimes obligatoires de base persisteront, voire s’aggraveront d’ici à 2014, preuve s’il en fallait que le redressement de nos finances publiques nécessite des mesures structurelles, mais vous refusez bien sûr obstinément de les prendre.

En outre, je regrette que les prévisions de l’article 29, plus précisément de son annexe B, ne vous alertent pas sur l’urgence de la situation. En 2014, du moins en l’absence d’une nouvelle crise économique aggravant la situation, toutes les branches, à l’exception de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, devraient être en déficit : de 7 milliards d’euros pour la branche maladie du régime général, de 3 milliards d’euros pour la branche famille et de 7,3 milliards d’euros pour la branche vieillesse. C’est bien la preuve de l’inefficacité de votre réforme !

Une seule branche fait donc exception : la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Cette branche est aussi la seule à bénéficier d’une mesure de renforcement direct des ressources passant par un léger accroissement du taux de cotisations sociales de 0,1 %.

Vous faites ainsi indirectement la démonstration, monsieur le ministre, que, comme nous ne cessons de vous le dire, une légère augmentation des cotisations sociales, en particulier de la part patronale, laquelle n’a pas connu d’augmentation depuis près de vingt ans, associée à une véritable lutte contre les niches sociales, permettrait d’apporter à notre protection sociale les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions.

M. le président. L’amendement n° 475 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements identiques restant en discussion ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Avis défavorable !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 35 et 235.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 111, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 1, dernière ligne :

Rédiger ainsi cette ligne :

Objectif national de dépenses d’assurance maladie

(en valeur - en milliards d’euros)

162,4

167,1

171,8

176,6

181,6

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 8 du projet de loi de programmation des finances publiques a introduit une innovation discrète, mais essentielle : la programmation de l’ONDAM est désormais définie non plus en pourcentage d’évolution par rapport à l’exécution de l’année précédente, mais en milliards d’euros.

Cela permet d’éviter l’effet cliquet des rebasages, qui conduit en fait à neutraliser les dépassements en les incluant dans la base de l’ONDAM de l’année suivante, créant donc un effet cliquet par rapport aux dépenses constatées.

Par cohérence avec la loi de programmation, il convient, selon la commission des finances, que la programmation pluriannuelle de l’ONDAM proposée en annexe du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale soit également exprimée en milliards d’euros, et non en pourcentage.

C’est l’objet du présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 111.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 592, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 42

Rédiger ainsi le tableau :

Régime général

(En milliards d'euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Maladie

Recettes

140,7

139,7

143,2

148,0

154,4

160,7

167,7

Dépenses

145,2

150,3

154,6

159,3

164,0

169,1

174,5

Solde

-4,4

-10,6

-11,4

-11,3

-9,6

-8,4

-6,8

Accidents du travail / Maladies professionnelles

Recettes

10,8

10,4

10,9

11,7

12,2

12,6

13,2

Dépenses

10,5

11,1

11,3

11,6

11,9

12,1

12,4

Solde

0,2

-0,7

-0,5

0,1

0,3

0,5

0,8

Famille

Recettes

57,2

56,1

50,7

52,6

54,4

56,2

58,3

Dépenses

57,5

57,9

53,3

55,3

56,9

58,6

60,2

Solde

-0,3

-1,8

-2,6

-2,6

-2,5

-2,4

-2,0

Vieillesse

Recettes

89,5

91,5

93,8

100,1

103,8

108,0

112,6

Dépenses

95,1

98,7

102,4

106,8

110,7

115,3

119,4

Solde

-5,6

-7,2

-8,6

-6,7

-6,9

-7,3

-6,7

Toutes branches consolidé

Recettes

293,1

292,4

293,3

307,0

319,3

331,7

345,8

Dépenses

303,3

312,7

316,5

327,6

337,9

349,3

360,5

Solde

-10,2

-20,3

-23,1

-20,6

-18,6

-17,6

-14,7

II. - Alinéa 43

Rédiger ainsi le tableau :

Ensemble des régimes obligatoires de base

(En milliards d'euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Maladie

Recettes

164,0

163,2

167,1

172,4

179,8

187,1

195,2

Dépenses

168,1

173,6

178,4

183,5

189,3

195,3

201,7

Solde

-4,1

-10,4

-11,2

-11,1

-9,5

-8,3

-6,5

Accidents du travail / maladies professionnelles

Recettes

12,3

11,8

12,2

13,1

13,6

14,0

14,6

Dépenses

12,1

12,5

12,7

13,0

13,2

13,4

13,7

Solde

0,2

-0,6

-0,4

0,1

0,4

0,5

0,9

Famille

Recettes

57,7

56,6

51,2

53,2

54,9

56,7

58,8

Dépenses

58,0

58,4

53,8

55,8

57,4

59,1

60,7

Solde

-0,3

-1,8

-2,6

-2,6

-2,5

-2,4

-2,0

Vieillesse

Recettes

175,3

179,4

184,0

193,8

199,6

205,9

212,6

Dépenses

180,9

188,4

194,6

202,3

208,0

214,7

221,1

Solde

-5,6

-8,9

-10,5

-8,4

-8,4

-8,9

-8,4

Toutes branches consolidé

Recettes

404,2

405,6

409,3

426,9

442,3

457,8

475,2

Dépenses

414,0

427,3

434,1

449,0

462,2

476,8

491,2

Solde

-9,7

-21,7

-24,8

-22,1

-19,9

-19,0

-16,1

III. - Alinéa 44

Rédiger ainsi le tableau :

Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards d'euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Recettes

15,4

12,9

13,3

18,0

18,7

19,4

20,5

Dépenses

14,5

16,0

17,6

21,9

22,5

22,7

23,1

Solde

0,8

-3,2

-4,3

-3,9

-3,8

-3,3

-2,6

La parole est à M. le ministre.

M. François Baroin, ministre. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 592.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 112, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Compléter cette annexe par un paragraphe ainsi rédigé :

IV. - Un scénario alternatif

Dans un scénario alternatif où la croissance en moyenne annuelle de la masse salariale serait de 3,5 % en 2012, 2013 et 2014, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, ainsi que les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes s’établissent comme suit :

Régime général

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Maladie

Recettes

140,7

139,7

143,2

147,8

153,1

158,7

164,5

Dépenses

145,2

150,3

154,6

159,3

164,0

169,1

174,5

Solde

-4,4

-10,6

-11,4

-11,5

-10,9

-10,4

-10,0

Accidents du travail/Maladies professionnelles

Recettes

10,8

10,4

10,9

11,7

12,1

12,5

13,0

Dépenses

10,5

11,1

11,3

11,6

11,8

12,1

12,3

Solde

0,2

-0,7

-0,5

0,1

0,3

0,4

0,7

Famille

Recettes

57,2

56,1

50,7

52,6

54,0

54,5

56,2

Dépenses

57,5

57,9

53,3

55,2

56,8

58,6

60,2

Solde

-0,3

-1,8

-2,6

-2,6

-2,8

-4,1

-4,0

Vieillesse

Recettes

89,5

91,5

93,8

100,0

102,9

106,2

109,9

Dépenses

95,1

98,7

102,4

106,8

110,7

115,2

119,3

Solde

-5,6

-7,2

-8,6

-6,9

-7,8

-9,0

-9,4

Toutes branches - consolidé

Recettes

293,1

292,4

293,3

306,6

316,6

326,2

337,5

Dépenses

303,3

312,7

316,5

327,5

337,8

349,2

360,4

Solde

-10,2

-20,3

-23,1

-20,9

-21,2

-23,0

-22,9

 

Ensemble des régimes obligatoires de base

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Maladie

Recettes

164,0

163,2

167,1

172,2

178,4

184,8

191,6

Dépenses

168,1

173,6

178,4

183,5

189,3

195,3

201,8

Solde

-4,1

-10,4

-11,2

-11,3

-10,9

-10,5

-10,2

Accidents du travail/Maladies professionnelles

Recettes

12,3

11,8

12,2

13,1

13,5

14,0

14,3

Dépenses

12,1

12,5

12,7

12,9

13,2

13,4

13,7

Solde

0,2

-0,6

-0,4

0,1

0,3

0,6

0,6

Famille

Recettes

57,7

56,6

51,2

53,1

54,5

55,0

56,7

Dépenses

58,0

58,4

53,8

55,7

57,3

59,1

60,7

Solde

-0,3

-1,8

-2,6

-2,6

-2,8

-4,1

-4,0

Vieillesse

Recettes

175,3

179,4

184,0

193,7

198,0

202,8

207,9

Dépenses

180,9

188,4

194,6

202,3

208,0

214,7

221,1

Solde

-5,6

-8,9

-10,5

-8,5

-10,0

-11,9

-13,2

Toutes branches - consolidé

Recettes

404,2

405,6

409,3

426,6

438,7

450,8

464,6

Dépenses

414,0

427,3

434,1

448,9

462,1

476,7

491,2

Solde

-9,7

-21,7

-24,8

-22,3

-23,4

-25,9

-26,6

Fonds de solidarité vieillesse

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Recettes

15,4

12,9

13,3

18

18,7

19,4

20,5

Dépenses

14,5

16

17,6

21,9

22,5

22,7

23,1

Solde

0,8

-3,2

-4,3

-3,8

-3,8

-3,3

-2,5

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’annexe B du présent projet de loi fixe la prévision de croissance de la masse salariale à compter de 2012 à 4,5 %.

Cette projection paraît, cette année encore, très optimiste. Le présent amendement vise donc à promouvoir un scénario alternatif, fondé sur une croissance de la masse salariale de 3,5 % à compter de 2012.

À cet égard, permettez-moi de vous rappeler les propos de M. le ministre du budget tels qu’ils figurent dans le compte rendu analytique de la séance de lundi dernier : « Nous ne formulons pas nos hypothèses de croissance au doigt mouillé. M. Jégou se souvient-il que les pessimistes parlaient l’an dernier de 0,7 %, alors que nous avons eu 1,6 % ? Se souvient-il que le déficit est non pas de 8,6 %, mais de 7,7 % ? Il n’y a rien d’anormal à supposer une croissance de 2,5 % d’ici 2014. C’est une tendance. »

Si M. le ministre veut nous dire que la tendance de tous les gouvernements qui se sont succédé jusqu’à présent est de retenir une hypothèse de croissance de 2,5 % pour boucler leurs programmations des finances publiques, c’est parfaitement exact. Notre collègue Philippe Marini, le rapporteur général de la commission des finances, nous le rappelle chaque année dans ses différents rapports.

Pourtant, il serait possible de rappeler quelques faits simples. Tous les programmes de stabilité qui se sont succédé depuis la fin des années quatre-vingt-dix ont reposé, pour les trois années suivant l’année couverte par le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, sur une hypothèse de croissance de 2,5 %, à laquelle s’ajoutait une hypothèse de croissance de 3 % dans le cas des programmes de stabilité, qui présentaient un scénario dit « haut ».

Or, en moyenne sur la période, la croissance a été de 1,6 %. Elle n’a été supérieure ou égale à 2,5 % que deux fois depuis le début des années deux mille, en 2000 et en 2004. Elle n’a été supérieure ou égale à 3 % qu’une fois, en 2000.

M. Jacky Le Menn. Ça, ce sont des faits avérés !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Par ailleurs, selon de nombreux économistes, non seulement la croissance sera faible ces prochaines années, ce dont nous sommes tous désolés, mais en plus les entreprises comprimeront leurs coûts salariaux, donc la masse salariale, pour restaurer leur profitabilité.

M. Guy Fischer. Eh oui ! Et ce n’est pas nous qui le disons !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Mais je ne veux pas faire mon Nostradamus, puisque nous évoquions Madame Soleil tout à l’heure… (Sourires.)

Aujourd'hui, personne n’est en mesure de prédire ce que sera la croissance en 2011 et, a fortiori, en 2012, 2013 et 2014.

Tout ce que l’on peut affirmer, c’est que, si les gouvernements continuent de retenir systématiquement une hypothèse de croissance de 2,5 %, comme la croissance structurelle de l’économie est évaluée à environ 2 % par tous les économistes, ils surestimeront la croissance d’environ 0,5 point en moyenne. En revanche, s’ils retiennent une hypothèse de croissance de 2 %, ils seront sûrs de ne pas se tromper de beaucoup.

Un autre scénario, comme le prévoyaient les lois de financement de la sécurité sociale pour 2007 et 2008, permettrait d’améliorer la sincérité de la programmation et de prendre l’exacte mesure des efforts à réaliser pour parvenir à rééquilibrer la situation des comptes sociaux.

M. Jacky Le Menn. Ce qui serait honnête !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. En effet, mes chers collègues, une croissance de la masse salariale de 3,5 % au lieu de 4,5 % augmente de 13 milliards d’euros le déficit cumulé 2012-2014 du régime général.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, car il croit naturellement à ses prévisions de croissance. (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Raymonde Le Texier. Mais non ! Il est trop intelligent pour y croire lui-même !

M. François Baroin, ministre. Comme nous l’avons dit, répété et assumé, nous disposons d’éléments tangibles, structurels, qui traduisent une tendance.

Répondant en début de semaine sur un sujet dont nous avions déjà débattu à l’occasion de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, j’avais effectivement souligné le décalage – M. Marini, le rapporteur général de la commission des finances avait aussi évoqué ce point – entre les analyses effectuées par les prévisionnistes et la réalité : presque la moitié pour la croissance et près d’un point pour l’évolution des déficits !

Cela me rappelle une anecdote. Voilà quelques jours, pendant l’examen de la première partie du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, un député très talentueux a, d’une voix de stentor, pastiché Pierre Dac : « On a inventé les prévisionnistes pour que les météorologues et les cartomanciennes se sentent moins seuls. » (Sourires.) Peut-être pourriez-vous faire vôtre cette maxime, monsieur le rapporteur pour avis…

Quoi qu’il en soit, et vous le comprendrez aisément, le Gouvernement ne partage pas votre position.

En effet, et cela a été évoqué, les bonnes nouvelles que nous avons accumulées à la sortie de l’été sur l’évolution de la masse salariale, sur le taux de croissance du troisième trimestre et sur les perspectives en matière d’investissement nous confortent et nous donnent toutes les raisons de croire en nos prévisions économiques et budgétaires, qui sont un élément, parmi d’autres, dans la construction du projet de loi de programmation des finances publiques, du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances.

Pour autant, et je répète bien volontiers devant vous ce que nous avons déjà indiqué, l’objectif intangible du Gouvernement est la réduction du déficit ! Celui-ci diminuera ainsi de 6 % l’année prochaine, de 4,6 % l’année suivante, de 3 % en 2013, année du retour au niveau de déficit que nous connaissions avant la crise, et de 2 % en 2014.

De toute façon, nous ne reviendrons pas sur cet objectif. Et nous savons qu’une baisse des déficits de deux points – c’est la marche à franchir pour l’année prochaine – correspond à un montant de 40 milliards d’euros environ.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, je vous rappelle que cet amendement a tout simplement pour objet d’esquisser un autre scénario. Il ne s’agit ni de refaire le monde ni de mettre des éléments en ligne, ce qui a d’ailleurs déjà été fait.

Mais permettez-moi tout de même d’évoquer un autre exemple, à propos de la réforme des retraites.

Comme je l’ai souligné lors de l’examen du projet de loi portant réforme des retraites, je suis très dubitatif sur le principe du basculement des cotisations chômage vers les cotisations vieillesse, et plus dubitatif encore sur l’ampleur de ce transfert.

Si nul ne souhaite que le taux de chômage actuel reste constant jusqu’en 2020, les hypothèses retenues à l’horizon 2020-2025 sont particulièrement optimistes, avec des taux de 5,7 % en 2020 et de 4,5 % en 2024.

M. Guy Fischer. C’est fantaisiste !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Or le taux de chômage fluctue autour de 9 % de la population active depuis 1985, et le taux de chômage structurel de la France se situe actuellement – hélas ! – aux alentours de 8 %.

Nous voyons bien qu’il y aura des difficultés pour remédier à cette situation, en raison notamment des destructions d’emplois industriels, qu’il faudra du temps pour reconstituer...

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. … et j’en suis le premier désolé.

La prévision de croissance de la masse salariale pour 2011 est fortement révisée à la baisse. Alors que la loi du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010 prévoyait une croissance de la masse salariale de 5 % pour 2011, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 la révise à 2,9 %.

Le caractère volontariste des hypothèses retenues risque donc de fausser de nouveau le débat en ne permettant pas de prendre l’exacte mesure de l’ampleur des efforts à fournir pour parvenir à rééquilibrer la situation des comptes sociaux.

Je maintiens donc l’amendement n° 112, non pas pour vous être désagréable, monsieur le ministre, mais parce que telle est ma conviction : il faut proposer un autre scénario.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote sur l'ensemble de l’article 29 et de l’annexe B.

Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, clef de voûte de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le rapport figurant en annexe B justifie les prévisions de recettes et de dépenses des organismes de la sécurité sociale en fonction des hypothèses économiques du Gouvernement.

Il s’agit d’hypothèses dont nous dénonçons année après année le caractère illusoire et qui sont année après année révisées à la baisse.

Les prévisions de cette année ne devraient pas déroger à la règle : évolution moyenne du PIB de 2 % en 2011, puis de 2,5 % les trois années suivantes, croissance de la masse salariale de 2,9 % en 2009, puis de 4,5 % jusqu’en 2014, taux de progression de l’ONDAM maintenu en dessous de 3 %. Honnêtement, monsieur le ministre, croire en votre sincérité lorsque vous confirmez de telles prévisions serait faire injure à votre intelligence !

Vos objectifs seraient peut-être crédibles s’ils étaient fondés sur les effets attendus de la mise en place de mesures structurelles et de politiques actives.

Mais, alors que l’emploi est au cœur de la problématique des retraites, vous n’en faites pas la priorité de votre action politique. Alors que l’assurance maladie souffre d’un trop lourd déficit structurel, vous vous contentez de réduire les prestations. Alors que les besoins de prise en charge de la dépendance augmentent, vous vous faites très discret sur la mise en place d’un cinquième risque.

Dans ces conditions, nous pouvons déjà deviner que nous serons amenés une fois de plus à corriger vos chiffres.

Enfin, avec un ONDAM fixé à 2,9 %, puis à 2,8 %, on peut prédire de nouveaux déremboursements aux assurés sociaux et une année difficile, une de plus, à l’hôpital.

Fixer un ONDAM délibérément sous-estimé, afin de pouvoir mettre en place en cours d’année des mesures pénalisantes tout en culpabilisant les assurés sociaux et en rationnant les vivres de l’hôpital, la méthode est à la fois cynique et inefficace !

Notre système de santé souffre, l’accès au soin se restreint et la médecine à deux vitesses est déjà une réalité.

En fondant ainsi des objectifs de réalisation sur des hypothèses irréalistes, votre gouvernement ne fait que nourrir des déficits pour justifier des baisses de prestation. Dès lors, c’est le domaine privé qui s’étend au détriment de la prise en charge solidaire de la santé.

À ce mode de gestion, le groupe socialiste ne saurait s’associer. Nous voterons donc contre cet article.