M. Philippe Dominati. Elle ne comprend pas !

M. Éric Besson, ministre. Il y a eu d’abord des envahisseurs et, plusieurs siècles plus tard, après que l’État a créé la nation française, des vagues d’immigration. L’idéal républicain a été de faire de cette nation une terre d’intégration et d’assimilation.

En refusant le lien entre identité nationale et immigration, d’une part, vous balayez toute l’histoire de France et, d’autre part, vous balayez la réalité d’aujourd’hui.

J’ai indiqué tout à l’heure à M. Yung que 180 000 étrangers arrivent chaque année sur notre sol. Nous sommes le pays le plus généreux en Europe et le deuxième dans le monde en matière d’asile.

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas vrai !

M. Éric Besson, ministre. Nous accordons la nationalité française à 110 000 étrangers par an. Enfin, 30 % des mariages en France sont des mariages mixtes, associant une Française ou un Français à un étranger ou une étrangère.

Par conséquent, le lien entre l’immigration et l’identité nationale est le reflet de notre histoire et celui de la réalité. Le nier est une absurdité.

Mme Éliane Assassi. Qui a dit qu’on le niait ?

M. Éric Besson, ministre. Vous avez dit que le site internet que nous avons créé et qui connaît un immense succès est une incitation au racisme.

M. Éric Besson, ministre. J’ai été désarçonné par une telle accusation. Il n’y a pas de propos racistes ou xénophobes parmi les 37 000 contributions qui ont été mises sur le site, mais nous n’avons pas voulu qu’il soit aseptisé. Nous sommes effectivement en permanence à la limite de l’acceptable et il y a parfois, d’un côté comme de l’autre, des propos qui ne reflètent pas ma pensée, mais qui peuvent refléter celle d’une minorité de la population.

Vous avez dit que l’on peut être choqué du lien que l’on fait entre l’immigration irrégulière et la délinquance. (Mme Éliane Assassi s’exclame.)

Lorsque j’aurai le temps, madame, je vous emmènerai volontiers rencontrer les policiers de l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi d’étrangers sans titre, l’OCRIEST, qui vous donneront des informations sur les passeurs, leurs méthodes, sur le racket, la violence, sur les liens de l’immigration irrégulière avec le proxénétisme, la traite des enfants, la drogue… Vous faites preuve en la matière d’une candeur qui me surprend beaucoup… (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Éliane Assassi. C’est normal !

M. Éric Besson, ministre. Par ailleurs, vous avez tenu des propos très ambigus me concernant, disant avec une sorte de complaisance : « Je vous rappelle, monsieur le ministre, que le racisme est un crime. »

Oui, madame, vous avez entièrement raison, mais je vous répondrai que le contresens, la mauvaise foi, le sectarisme, si ce n’est pas un crime, c’est en tout cas une offense contre l’idéal républicain de citoyen rationnel et a minima contre l’intelligence. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Concernant Calais, je vous dirai que les personnes qui ont été reconduites à la frontière sont des déboutés du droit d’asile, c’est-à-dire des personnes qui ont pu formuler leur demande d’asile auprès de l’OFPRA, auprès du juge civil, auprès du juge administratif et auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.

Derrière les mots et les slogans, il y a une réalité et peut-être votre parti pourrait-il prendre position : considérez-vous que tous les déboutés du droit d’asile, s’ils sont ressortissants d’un pays en guerre, en proie à une guerre civile ou à des attentats, doivent acquérir le droit de rester sur le territoire français ? Si oui, dans la mesure où, au moment où nous parlons, près de vingt-cinq pays entrent dans cette catégorie, cela signifierait que vous acceptez implicitement que des centaines de millions de personnes puissent, sans que l’asile leur ait été accordé, rester sur le territoire européen ou sur le territoire français.

J’aimerais que votre parti dise très clairement que c’est ce qu’il propose aux Français. Vous auriez, me semble-t-il, un succès limité… (Mme Éliane Assassi proteste.)

M. Yung a fait preuve de beaucoup de délicatesse à mon égard, j’y ai été très sensible. Il a le droit d’évoquer la mémoire du général de Gaulle, qui fait partie désormais de notre patrimoine commun, et nombre de ceux qui ne se sentent pas gaullistes peuvent parfaitement se retrouver dans la mémoire de l’homme du 18 juin.

Je n’ai pas de titre particulier pour interpréter les propos et la mémoire du général de Gaulle, mais il suffit de relire ses Mémoires de guerre et ses Mémoires d’espoir pour constater qu’il n’a jamais cessé, au nom de ce qu’il appelait « une certaine idée de la France », de côtoyer son histoire et de s’interroger sur son identité nationale, sa permanence et son avenir. Par conséquent, monsieur Yung, vos propos sont parfaitement déplacés.

M. Richard Yung. Je proteste !

M. Éric Besson, ministre. Monsieur Yung, ce n’est pas ma faute si vous avez aujourd’hui un problème avec la nation et si la nation a été historiquement un concept et une notion défendue par des personnes se revendiquant de la gauche…

M. Richard Yung. Vous n’avez pas le monopole de l’identité nationale : cette posture est insupportable !

M. Éric Besson, ministre. Je connais votre position : identité de la France, pas de problème ; identité républicaine, pas de problème ; mais identité nationale, là il y a visiblement un problème. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Vous avez un problème avec la nation, réglez-le !

Vous m’avez accusé d’être partisan en évoquant mes responsabilités au sein de l’UMP. Très franchement, nous n’avons pas de leçon à recevoir…

M. Richard Yung. Nous non plus !

M. Éric Besson, ministre. Il y a quelques jours, Arnaud Montebourg était interrogé sur Europe 1. À la question : « Vous critiquez beaucoup la politique migratoire française, mais que ferait le parti socialiste s’il était au Gouvernement ? », il a répondu, acculé : « Nous n’avons pas de propositions à faire en ce moment, nous sommes un parti en reconstruction et vous connaîtrez nos propositions en matière d’immigration dans quelques mois. »

Ceux qui s’intéressent à la vie du parti socialiste – cela m’arrive encore (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)  – attendaient ce que, mardi soir, le bureau national devait proposer comme politique alternative en matière d’immigration. Cela aurait été extrêmement intéressant, parce que l’on a vu la méthode de Mme Aubry : je revendique une régularisation large, je flirte avec le mot « massif » sans oser l’assumer, je me tais et, à voix basse, j’ajoute « sur critères ». Autrement dit, c’est très exactement ce que nous faisons.

Il fallait être particulièrement observateur pour découvrir sur le site du parti socialiste les quatre lignes très ambiguës écrites sur le sujet. En fait de politique alternative, je n’ai rien vu, je n’ai rien lu.

S’agissant de l’asile, on peut faire la différence entre le sénateur Yung de la commission et le sénateur Yung de la séance publique. En effet, je cite le compte rendu de la commission : « M. Richard Yung s’est réjoui du fait que la moitié du budget du ministère, soit 300 millions d’euros, soit toujours consacré à la garantie du droit d’asile conformément à la tradition française. » Ce n’est pas exactement la même musique que j’ai entendue à cette tribune, mais tout le monde a le droit de changer d’avis en quelques jours… (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Richard Yung. Tout le monde change d’avis, n’est-ce pas, monsieur le ministre !

M. Éric Besson, ministre. Vous avez évoqué les droits des retenus. Je vous indique que vous pouvez parfaitement, en tant que parlementaire, comme de nombreuses instances de contrôle, visiter les CRA.

M. Éric Besson, ministre. Vous constaterez que les droits y sont toujours respectés. Je les rappelle : droit à une assistance juridique, droit à la santé, à une antenne médicalisée, droit au téléphone – cartes distribuées – droit de contacter et de recevoir un avocat, droit de recevoir des visites.

Donc, contrairement à ce que vous avez dit, les centres de rétention administrative ne sont pas une zone de non-droit. En l’espèce, je rends hommage à la famille politique qui est la vôtre, puisque c’est François Mitterrand qui les a instaurés, en 1981, tandis que le gouvernement Jospin a créé les chambres familiales pouvant accueillir parents et enfants, que vous nous reprochez tant aujourd'hui.

Monsieur Yung, concernant les marchés d’accompagnement juridique, il est normal de prévoir des crédits en hausse sensible, car les exigences sont supérieures en termes de prestations, notamment en matière de formation des intervenants. Ne nous reprochez pas d’être plus exigeants envers les intervenants qui travaillent auprès des étrangers en situation irrégulière ! Il me semble qu’il y a une certaine contradiction dans vos propos !

De plus, le nombre de places en CRA passera de 1 659 en 2009 à 2 058 en 2010. L’augmentation quantitative du nombre de places explique donc aussi l’accroissement des crédits budgétaires.

Par ailleurs, concernant l’accompagnement social, vous avez affirmé à cette tribune – j’ai failli tomber de mon fauteuil en vous entendant ! – que les crédits prévus passeraient de 5 millions d’euros à 500 000 euros. Je ne sais pas où vous avez lu ces chiffres, mais ils sont totalement faux ! Au bénéfice du doute, je dirai que vous avez mal lu…

Globalement, les crédits consacrés à l’accompagnement sanitaire, social et juridique passeront de 10 millions d’euros en 2009 à 11,5 millions d’euros dans le budget qui vous est présenté.

Monsieur Marsin, j’ai pris bonne note de vos observations très intéressantes sur l’écho particulier que doit avoir – et que peut avoir – outre-mer le débat sur l’identité nationale. C’est pourquoi je travaillerai main dans la main sur ce sujet avec Marie-Luce Penchard, qui m’a déjà fait un certain nombre de suggestions.

Vous avez insisté sur la nécessité de réguler les flux migratoires ; c’est vrai pour les Antilles, comme pour l’ensemble de la France.

Concernant ce que vous avez appelé « le délit de solidarité », Mme la ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés a signé une circulaire, que je me suis empressé d’envoyer aux préfets, et qui répond très exactement aux engagements que j’avais pris devant les associations.

Bien évidemment, certaines d’entre elles ne sont pas satisfaites, puisqu’elles voulaient l’abrogation ou la modification substantielle de l’article L-622-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

À ce propos, je tiens à porter deux chiffres à votre connaissance.

Ce sont, chaque année, 5 000 personnes – des passeurs, des trafiquants, des propriétaires de squats, qui exploitent les travailleurs en situation irrégulière, ou, tout simplement, les étrangers en situation irrégulière – qui sont mises en examen au titre de cet article. Pas un seul bénévole humanitaire n’a été condamné de ce chef depuis la Seconde Guerre mondiale ! Pas un seul ! J’ai mis au défi les associations de m’apporter la preuve du contraire ; elles n’ont pas pu le faire !

C’est dire à quel point cet article est indispensable à la lutte contre les filières mafieuses de l’immigration clandestine.

Par ailleurs, la modification apportée, qui ne fait que confirmer ce que j’avais proposé et qui est attendue des associations et des travailleurs sociaux, permettra de sécuriser définitivement les bénévoles humanitaires, qui pouvaient se sentir un tant soit peu en situation d’insécurité.

Enfin, Michèle Alliot-Marie a demandé très clairement aux forces de police et de gendarmerie de respecter ce qui est une spécificité française : plus aucune intervention ne doit avoir lieu à l’encontre des étrangers dans l’enceinte d’une préfecture, dans le périmètre d’action d’une association humanitaire, à l’hôpital ou alentour, …

Mme Odette Terrade. Encore heureux !

M. Éric Besson, ministre. … ni aux abords des écoles ! Voilà quelques années, une telle intervention avait défrayé la chronique ; aucun cas ne s’est reproduit depuis !

Très franchement, on peut, me semble-t-il, considérer que notre pays est exemplaire en la matière. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre, car vous avez dépassé votre temps de parole de dix minutes !

M. Éric Besson, ministre. Pardonnez-moi, monsieur le président. Emporté par mon élan, j’ai oublié de regarder la pendule, mais je vais conclure.

Monsieur Marsin, j’ai apprécié, non pas votre abstention positive, mais ce que vous avez joliment qualifié d’abstention d’encouragement.

Même si le temps me manque, permettez-moi, monsieur le président, d’adresser des remerciements à Jean-René Lecerf.

Monsieur le rapporteur spécial, je vous rejoins sur le triptyque « fermeté, justice et humanité ». Oui, vous avez raison, il nous faut harmoniser les jurisprudences de l’OFPRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, et de la CNDA, la Cour nationale du droit d’asile.

Oui, vous avez encore raison de l’affirmer, car on ne le dit pas assez dans le débat politique français, les premières victimes de l’immigration clandestine sont les immigrés eux-mêmes. L’augmentation des discriminations à l’emploi, au logement, etc. – la liste peut-être longue ! – est en partie liée à l’immigration irrégulière.

Enfin, j’ai été très sensible, monsieur Dominati, au satisfecit que vous avez décerné à l’action du ministère que j’ai l’honneur de diriger.

Nos collègues européens le soulignent à Bruxelles ou à Strasbourg, la France est exemplaire en la matière !

À cet égard, je veux dire à M. Yung que cette politique ne lie pas simplement la France et certains pays européens, elle est la même dans tous les pays d’Europe. Pardonnez-moi d’insister, mais nous avons la même politique que les socialistes espagnols ou les travaillistes britanniques ; nous travaillons ensemble main dans la main. Au demeurant, les deux pays qui durcissent actuellement leur législation en matière d’immigration sont précisément l’Espagne et la Grande-Bretagne, et non pas la France !

M. Richard Yung. Et les 700 000 régularisations ?

M. Éric Besson, ministre. Je vous remercie aussi, monsieur Dominati, de vos propos sur l’aide humanitaire.

Concernant la régularisation, vous avez entièrement raison, il nous faut d’abord respecter nos engagements internationaux, respecter l’article 40 de la loi du 20 novembre 2007 et procéder au cas par cas.

Pour conclure, je ferai allusion à la question personnelle que m’a posée M. Yung, me demandant si j’étais heureux. Monsieur le sénateur, le bonheur relève de la vie privée, et je ne disserterai pas sur ce sujet du haut de cette tribune. En revanche, je veux vous dire ma fierté de mener une mission éminemment républicaine sur laquelle, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays, tous les républicains ne se retrouvent pas, ce que je déplore, alors même qu’il n’existe pas d’autre politique alternative déclarée.

Allez sur le site de mon ministère, monsieur le sénateur, et lisez ma lettre de mission ! Elle est belle, humaniste et éminemment républicaine ! Pour ce qui me concerne, je me contente de la respecter et de la mettre en œuvre avec beaucoup de détermination. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. Nous avons un horaire extrêmement contraint, …

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Tout à fait !

M. le président. … mais, pour des raisons que tout le monde comprendra, il ne m’appartenait pas de vous interrompre, monsieur le ministre…

M. Éric Besson, ministre. Je vous renouvelle toutes mes excuses, monsieur le président !

Immigration, asile et intégration
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Economie - Compte spécial : Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.

État b

(en euros)

Immigration, asile et intégration

564 976 512

557 458 485

Immigration et asile

485 700 770

478 057 110

Dont titre 2

38 465 740

38 465 740

Intégration et accès à la nationalité française

79 275 742

79 401 375

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Je vous propose, mes chers collègues, de passer immédiatement à l’examen des crédits de la mission suivante, car nous avons déjà pris du retard. Nos collègues qui interviendront à une heure avancée de la nuit sur la mission « Médias » nous sauront gré de ne pas avoir gaspillé de temps.

Économie

Compte spécial :

« Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien »

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 35 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Économie » (et articles 53, 54 et 54 bis) et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

La parole est à M. André Ferrand, rapporteur spécial.

M. André Ferrand, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette mission, récente, s’inscrira, cette année, sous le signe de la continuité.

En effet, la mission « Économie » créée par la loi de finances pour 2009, issue de la fusion de deux anciennes missions « Développement et régulation économiques » et « Pilotage de l’économie française », est reconduite sans changement en 2010.

Mon excellent collègue François Rebsamen et moi-même rapportons cette mission suivant la même répartition des tâches qu’en 2009. Aucun changement notable non plus n’est à noter sur le plan budgétaire, car les crédits proposés pour la mission s’élèvent à 1,94 milliard d’euros, soit une évolution annuelle entre 2009 et 2010 de 0,14 % seulement à périmètre constant.

J’évoquerai, pour ma part, les deux programmes dont j’ai la charge, le programme 134 « Développement des entreprises et de l’emploi » et le programme 223 « Tourisme », ainsi que le compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

La maquette budgétaire du programme « Développement des entreprises et de l’emploi » n’a pas été modifiée et, derrière un intitulé toujours ambitieux, ce programme ne regroupe au total que 1 115 millions de crédits de paiement pour 2010. Non pas que ce montant soit dérisoire, mais, en comparaison, les 74 dépenses fiscales rattachées au programme, qui constituent l’axe majeur de la politique du programme, représentent, quant à elles, 7,8 milliards d’euros ; j’y reviendrai ultérieurement.

S’agissant du volet budgétaire, ce programme peut être qualifié de « multidirectionnel ». Il regroupe, en effet, un ensemble très divers de politiques publiques mises en œuvre par différents services de l’État : la nouvelle direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, la DGCIS, qui regroupe depuis janvier 2009 la direction du commerce, de l’artisanat, des services et des professions libérales, la direction du tourisme et la direction générale des entreprises ; les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRECCTE, qui déclineront au niveau régional les services de la DGCIS, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, et de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, la DGEFP.

Il faut noter que ce programme accueille les moyens de la DGEFP, dont le champ d’activité relève entièrement de la mission « Travail et emploi » rapportée par notre collègue Serge Dassault.

L’exercice 2010 sera marqué par l’achèvement de la dévolution de l’activité de service aux entreprises sur les marchés extérieurs à UBIFRANCE, pour laquelle une subvention de 91 millions d’euros est prévue.

Au total, le programme est composé de 12 actions aux finalités très diverses, allant du soutien au PME au développement des télécommunications, en passant par l’action en faveur des entreprises industrielles, les relations économiques avec l’extérieur ou encore la régulation des marchés et de la concurrence. Il couvre ainsi l’ensemble du champ de compétences des ministres et secrétaires d’État du ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.

De ce fait, l’étendue et la diversité de tous ces dispositifs nous conduisent à nous montrer très modestes quant à notre capacité à exprimer un jugement approfondi sur leur efficacité et sur les résultats obtenus.

J’en reviens au chapitre des dépenses fiscales.

J’avais déjà regretté en 2009 que le rattachement des quelque 74 mesures du programme « Développement des entreprises et de l’emploi » – autant de niches fiscales – ait été le résultat d’une accumulation regrettable, au fil des années, de mesures supposées incitatives, dont la lecture est de plus en plus difficile pour les entreprises, appelant à un toilettage simplificateur.

Or, force est de constater que le millefeuille fiscal s’étoffe encore pour 2010 d’une nouvelle niche fiscale, et non des moindres, puisqu’il agit de l’abaissement de 19,6 % à 5,5 % de la TVA dans le secteur de la restauration.

Je ne relancerai pas aujourd’hui le débat sur les résultats de ce sacrifice fiscal accompli par la Nation... Le sujet a été, nous le savons, très récemment évoqué et traité dans cet hémicycle, en votre présence, monsieur le secrétaire d'État.

Le programme 223 « Tourisme » est beaucoup plus modeste, puisqu’il ne regroupe que 58 millions d’euros en autorisations d’engagement et 56,7 millions d’euros en crédits de paiement, soit seulement 2,9 % des crédits de la mission.

Les crédits de ce programme sont principalement axés autour de deux chantiers : d'une part, la création d’Atout France – par parenthèse, je me suis interrogé sur la pertinence d’une telle appellation, qui devra être prononcée dans diverses langues, pour un organisme à vocation internationale… –, issue de la fusion de Maison de la France avec ODIT France, qui recevra 34,7 millions d’euros pour 2010 ; d'autre part, la construction du pavillon de la France pour l’exposition universelle de Shanghai 2010, qui mobilisera 7 millions d’euros de crédits. Le coût prévisionnel de ce projet, emblématique pour l’image de la France, s’élève, nous le savons, à quelque 50 millions d’euros.

Or, en particulier du fait de la crise, le cofinancement public-privé à 50-50 qui était envisagé se trouve largement remis en cause, les entreprises n’ayant apporté à ce jour que 5 millions d’euros... Sans faire preuve d’un excès de pessimisme, il est à craindre que l’effort de l’État ne doive être largement plus important. C’est un sujet qu’il nous faudra suivre avec attention en 2010.

S’agissant des dépenses fiscales – en l’occurrence, les taux réduits de TVA pour les séjours en hôtel ou en camping –, il faut noter que, avec 1,86 milliard d’euros, elles représentent trente fois les crédits budgétaires et sont de très loin le premier levier d’action de l’État en matière de politique touristique.

Là encore, une évaluation de l’efficacité de ces dispositifs s’impose, en particulier dans le domaine de l’hôtellerie et des résidences de tourisme, ainsi que l’ont demandé le rapporteur général de la commission des finances et les membres de la commission de l’économie.

L’importance de l’industrie touristique pour notre pays n’est pas à démontrer. Représentant en moyenne annuelle quelque 900 000 emplois, elle apportait en 2007 à notre balance des paiements un solde excédentaire de 12,8 milliards d’euros.

Toutefois, si nous nous enorgueillissons de demeurer la première destination touristique au monde, nous savons qu’un sérieux effort reste à accomplir en ce qui concerne la dépense moyenne par touriste étranger sur notre sol. C’est pourquoi il nous faut souhaiter le rétablissement d’un indicateur de performance qui permettrait de mesurer l’évolution du niveau de ces dépenses, car il s’agit bien là d’un objectif prioritaire.

Après l’étude de ces deux programmes, j’en viens à la présentation du compte d’affectation spéciale, le CAS, « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

Il s’agit également d’une création de la loi de finances pour 2009, et il est destiné à optimiser la gestion des bandes hertziennes et à procurer à l’État des recettes nouvelles issues de la vente de fréquences libérées aux différents professionnels de l’audiovisuel, des télécommunications et de la radio.

Si, en 2009, aucune fréquence civile ne devait être concernée, il avait été envisagé que le ministère de la défense libère des bandes hertziennes dans le cadre de la rationalisation de l’équipement futur du fantassin sur le « champ de bataille numérisé », grâce à la tenue de combat « Félin », et du système « Rubis » de communication de la gendarmerie. Les recettes correspondant au montant total attendu de ces cessions avaient été estimées à 600 millions d’euros.

Néanmoins, il faut rappeler que le CAS est demeuré inopérant en 2009, car aucune des procédures de mise sur le marché annoncées n’a encore abouti, en raison de délais de consultation plus longs que ceux qui avaient été initialement prévus.

Les opérations de cessions de fréquences ont donc été reconduites à l’identique pour 2010. Nous avions considéré que l’estimation de recettes de 600 millions d’euros pour 2009 était très approximative ; cette observation demeure évidemment valable pour 2010.

En effet, viendrait s’ajouter au produit des ventes potentielles des fréquences issues de « Félin » et de « Rubis » la cession future de tout ou partie des systèmes de communication militaire par satellite « Syracuse », dont la durée de vie est estimée à environ dix ans.

L’article 29 du projet de loi de finances pour 2010, qui relève de la première partie de ce texte, prévoit d’autoriser la cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellite et, ainsi, d’élargir le périmètre du compte d’affectation spéciale, afin que celui-ci puisse accueillir ce nouveau type de recettes.

Pour le réseau satellitaire « Syracuse », le modèle économique est le suivant : la gestion du système serait confiée à un opérateur moyennant une soulte payée à l’État, dont le montant, de l’ordre de 400 millions d’euros, reste à préciser. L’État verserait ensuite une redevance annuelle, qui pourrait être comprise entre 40 millions d'euros et 70 millions d’euros, pour l’utilisation des services de l’opérateur, à charge pour ce dernier de commercialiser les capacités non utilisées, qui sont évaluées à 10 %, afin d’assurer la rentabilité économique de l’opération.

Mes chers collègues, la commission des finances ne voit aucune raison de s’opposer par principe à cette cession de l’usufruit de tout ou partie du système satellitaire de communications militaires à un opérateur, mais elle constate que le modèle économique sur lequel se fonde l’opération demeure une hypothèse qui reste à valider par l’expérimentation.

C'est pourquoi, dans la mesure où le ministère de la défense est susceptible aujourd'hui de libérer des fréquences, aucun crédit n’a été inscrit pour le désendettement de l’État en 2010, car, pour obtenir un tel résultat, il serait nécessaire que des ministères « civils » identifient et cèdent des bandes de fréquences hertziennes.

Mes chers collègues, au bénéfice de ces observations, je vous propose d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale, tout en souhaitant que, à l’avenir, un effort soit fourni pour libérer des fréquences civiles afin de participer au désendettement de l’État.