M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. M. Mauroy disait que le débat sur les conseillers territoriaux était au cœur de la réforme. Moi, je ne crains pas d’affirmer qu’ils sont des facteurs fondamentaux du changement. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est çà, la question !

M. Jacques Blanc. Pour que ce changement soit réussi – c’est ce que je souhaite –, il sera indispensable que les conseillers territoriaux soient tous membres de l’assemblée départementale et de l’assemblée régionale.

M. Bruno Sido. Bien sûr !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur de la mission temporaire. M. Balladur a évolué, sur ce point !

M. Jacques Blanc. Par ailleurs, nous ne devrons pas nous borner à adopter des critères de population ; nous devrons retenir des critères relatifs aux territoires. Les assemblées régionales, de par leur composition, devront refléter non pas exclusivement la population, mais, au contraire, la réalité des territoires.

M. Jean-Pierre Chevènement. La majorité pour la Lozère !

M. Jacques Blanc. Un département comme le mien ne saurait être représenté proportionnellement à sa seule population, d’autant que, le nombre des députés étant exclusivement fonction de celui des habitants, il va déjà perdre l’un de ses députés. Il faut donc que soit assurée au moins une juste représentation des territoires.

Voilà pourquoi je souhaite, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement s’engage résolument dans cette voie, mais en tenant compte des territoires.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. M. Jacques Blanc, vous avez raison : dans le système actuel, la représentation des plus petits départements est un problème.

Si je ne me trompe, votre département compte quatre conseillers régionaux.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. J’étais encore trop optimiste ! Ils sont donc deux sur un total de quatre-vingts conseillers régionaux.

Je reconnais que, pour un territoire aussi vaste que celui de la Lozère, où ne vivent, certes, que 75 000 ou 80 000 habitants, mais qui s’étend sur environ 550 000 hectares,…

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. …n’être représenté que par deux conseillers régionaux à Montpellier pose un réel problème, d’autant que, de surcroît, se rendre de Mende à Montpellier n’est guère aisé.

Le problème se pose aussi pour d’autres départements, dans la région Midi-Pyrénées ou dans la région Auvergne.

M. Jean-Pierre Bel. L’Ariège !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Il est vrai que nous n’assistons pas à un mouvement dynamique de créations de sièges supplémentaires, bien au contraire. Il serait utile de repenser la représentation d’un certain nombre de petits départements au sein des conseils régionaux, tant leur sous-représentation actuelle peut paraître choquante à beaucoup d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, vice-président de la mission temporaire.

M. Pierre-Yves Collombat, vice-président de la mission temporaire. Je tiens à indiquer à M. Jacques Blanc que la création des conseillers territoriaux soulève un certain nombre de problèmes, comme l’a d’ailleurs dit tout à l’heure M. Yves Krattinger.

D’un côté, le nombre de conseillers généraux va diminuer, ce qui fait que le département de la Lozère sera administré par trois ou quatre personnes, voire six,…

M. Pierre-Yves Collombat, vice-président de la mission temporaire. … quand, de l’autre, le nombre de conseillers régionaux doublera par rapport à ce qu’il est aujourd’hui.

Je veux bien qu’il existe un distinguo subtil entre les fonctions et les mandats, mais le problème n’est pas tant celui du cumul des mandats que celui du cumul des fonctions. C’est une façon très élégante de régler le problème du cumul des mandats : deux, trois, voire quatre élus feront la même chose.

Sur le fond, deux choses justifient la création du conseiller territorial : le problème des financements croisés et un manque de coordination.

Est-ce par vice que les financements croisés sont apparus dans notre pays ? Non ! C’est parce que la réalisation de grands projets nécessitait l’intervention de plusieurs financements. Et l’État a bien montré le chemin à cet égard.

Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt ! On aura beau répartir précisément les compétences : si, en aval, les financements ne sont pas assurés, les collectivités ne pourront plus agir.

Par ailleurs, les conseillers territoriaux permettront, paraît-il, une meilleure coordination des politiques. Cela suppose toutefois que tous les départements et la région soient gouvernés par la même majorité, et qu’une harmonie préétablie règne.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Pierre-Yves Collombat, vice-président de la mission temporaire. Les conseils des exécutifs, au sein desquels les responsabilités sont précisément réparties, donnent, eux, d’excellents résultats. Selon moi, la création des conseillers territoriaux entraînera beaucoup plus de difficultés qu’elle n’en résoudra.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a des termes que je regrette de ne pas avoir entendus au cours de ce débat, par ailleurs extrêmement intéressant.

Lorsque l’on fait une réforme des institutions, on doit avoir une ligne directrice.

Or, aujourd’hui, les communes sont quand même le lieu où la démocratie locale s’exerce le mieux, avec le maire, dont le rôle de lien social est extrêmement important. Si on transforme le maire en chef de village, on nie toute son autorité !

Au niveau départemental s’exercent les solidarités territoriales et sociales, mais, si la compétence générale des communes est supprimée, c’est tout l’édifice qui sera anéanti.

Or, si l’on prévoit de faire cette réforme, c’est aussi, me semble-t-il, pour assurer un aménagement harmonieux et équilibré du territoire national. On n’en prend pas le chemin ! Cet objectif n’a même pas été énoncé parmi les lignes directrices essentielles.

Enfin, j’ai tout de même le sentiment – et les interventions précédentes des membres de ce groupe ne m’empêcheront pas de le penser – que la contribution du groupe UMP est arrivée bien tardivement !

Peut-être, en définitive, l’UMP n’est-elle pas animée de la volonté de tailler en pièces le travail de la mission Belot, mais cela y ressemble énormément ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Je ne peux être que d’accord avec M. Fortassin : il n’est pas question de toucher à nos communes ! Nous savons tous qu’elles sont les cellules de base de la démocratie locale, ainsi que le lieu par excellence de la solidarité sociale. Elles sont d’une importance vitale dans l’organisation de notre territoire.

Il n’est pas question non plus, bien entendu, d’ôter à nos communes la clause de compétence générale. Personne n’en a jamais parlé !

Au contraire, nous voulons que les communes puissent disposer de moyens plus importants et participer à de vrais projets en rejoignant, là où ce n’est pas encore le cas, des intercommunalités.

Dans ce domaine, monsieur Fortassin, votre département est d’ailleurs tout à fait exemplaire, car le taux de couverture de l’intercommunalité y est remarquable. Je sais que vous avez contribué à cette situation et vous en félicite.

Les communes, convenons-en, peuvent développer plus facilement des projets structurants et importants dans le cadre de l’intercommunalité qu’en restant isolées. Tout en maintenant la clause de compétence générale pour les communes, nous entendons par conséquent encourager le développement de l’ensemble des communes dans un cadre intercommunal.

M. le président. La parole est à M. Robert Navarro.

M. Robert Navarro. Avant tout, je tiens à exprimer ma fierté de participer depuis le mois d’octobre dernier aux travaux de cette assemblée.

Sur des sujets tels que l’avenir des collectivités territoriales, on mesure à quel point le Sénat est capable de dépasser les discours démagogiques. Cela est particulièrement clair quand on compare les conclusions de la mission temporaire avec d’autres propositions qui se sont fait jour.

Certains, donnant dans le populisme, vont jusqu’à proposer une réduction de 30 % à 50 % du nombre des élus départementaux et régionaux, sous le prétexte que ces élus coûtent cher et ne servent pas à grand-chose. C’est peut-être vrai de ceux qui tiennent ce discours, mais c’est faux dans l’immense majorité des cas ! (Sourires.)

Les élus de tous bords sont dévoués à la cause qu’ils défendent. On peut ne pas partager les mêmes orientations, mais on n’a pas le droit de dire que l’élu qui les porte est inutile !

Je dois remercier M. Claude Belot et les membres de la mission du courage qu’ils ont eu en maintenant leurs positions et en restant fidèles au contenu de leur rapport.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela n’a pas servi à grand-chose !

M. Robert Navarro. On ne peut pas faire de la suppression de 2 000 conseillers généraux l’alpha et l’oméga d’une politique d’aménagement du territoire.

Mme Nathalie Goulet. Ce n’est pas là une idée qui nous soulage !

M. Robert Navarro. Ici, au Sénat, la mission s’est saisie des questions de fond. Par exemple, la création de conseillers territoriaux remplaçant les conseillers généraux et les conseillers régionaux dès 2014 n’a pas été retenue.

La politique, pour intéresser nos concitoyens, a besoin de lisibilité. Or, ces conseillers territoriaux fragiliseraient le maillage du territoire. Pour autant, il faut bien sûr clarifier davantage l’organisation territoriale.

La mission s’est accordée pour dire que chacun des échelons territoriaux doit remplir des missions bien distinctes. Les départements jouent un rôle essentiel en matière de solidarités sociales et de proximité. Les régions, quant à elles, ont des missions stratégiques pour le développement futur du territoire.

Pourquoi donc veut-on casser ces deux institutions qui fonctionnent très bien ?

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Robert Navarro. Les deux mandats de conseiller général et de conseiller régional n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Il serait aberrant de les regrouper. J’espère que, les vacances aidant, les travaux de la mission seront reconnus et écoutés à la rentrée !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. M. Navarro est l’élu d’un département que j’aime beaucoup. Il m’a d’ailleurs fourni par avance des éléments de réponse. Le Gouvernement n’a pas l’intention de « casser » quoi que ce soit. Nous voulons simplement restructurer et clarifier la répartition des compétences entre les départements et les régions.

Cela nous semble obligatoire ; c’est tout le débat que nous avons depuis le début de cet après-midi et que nous reprendrons à la rentrée, lors de l’examen des projets de loi.

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Je me félicite d’abord de l’excellent rapport de la mission présidée par M. Belot. Il apporte sur le sujet un éclairage dont la portée est historique. En effet, depuis la Révolution française, nous n’avions pas connu une évolution institutionnelle aussi puissante. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Guillaume. Quelle lecture de l’histoire !

M. Louis Nègre. Merci donc pour ce travail de fond.

Au-delà de ce constat, je voudrais marquer mon accord et apporter mon soutien au Gouvernement. En effet, les grandes orientations définies tout à l’heure par le ministre de l’intérieur, M. Brice Hortefeux, me conviennent parfaitement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Qu’est-ce que cela a à voir avec le rapport Belot ?

M. Louis Nègre. Je pense en particulier à ce qu’il a dit sur la simplification. Il est grand temps d’améliorer les choses. M. Fourcade l’a rappelé, aujourd’hui, nos concitoyens ne s’y retrouvent plus ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Par ailleurs, nous n’avons pas été élus pour gérer l’immobilisme. Dans ces conditions, vouloir faire avancer les choses au xxie siècle me semble être une bonne initiative !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur de la mission temporaire. Bravo !

M. Louis Nègre. Cela dit, monsieur le secrétaire d’État, j’ai une question à vous poser.

C’est avec satisfaction que je viens de vous entendre répondre à l’un de nos collègues que la commune reste une institution privilégiée. M. Brice Hortefeux a d’ailleurs exprimé la même position.

En ce qui me concerne, je suis très favorable à un renforcement, voire à une augmentation des compétences structurelles des futures métropoles par rapport à celles dont disposent les communautés urbaines.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur de la mission temporaire. Eh oui !

M. Louis Nègre. Je pense notamment à ce qui concerne l’aménagement du territoire, le développement économique, voire les transports.

La mission conduite par Claude Belot propose de créer une autorité organisatrice unique. En tant que rapporteur du projet de loi dit « Grenelle II », je proposerai d’aller au-delà de ce qui est prévu à l’article 18 de ce texte.

Ma question est donc simple : quelle sera la place des communes dans les futures métropoles ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le débat est lancé sur cette question des métropoles. Il s’agit d’ailleurs d’un des points forts de la future réforme.

Je sais en outre qu’une ville qui vous est chère, monsieur le sénateur, fait partie du groupe de huit métropoles qui devraient voir le jour. (Sourires.)

Sur ce point, il est toutefois nécessaire d’avoir un débat technique approfondi. Contrairement à ce qui a été dit tout à l’heure, le projet n’est pas écrit, il reste à faire !

La notion de métropole elle-même et la définition que l’on en donne peuvent s’avérer très différentes selon les pays. À cet égard, on va parfois un peu vite. Il ne faut pas, par exemple, confondre les métropoles et les aires métropolitaines.

Même en Europe, il existe toutes sortes de « métropoles ». Barcelone a eu ce statut, puis l’a perdu, et il est maintenant question qu’elle le retrouve. Milan n’a quant à elle jamais vraiment été une métropole. En ce qui concerne Londres, et plus largement le « Grand Londres », il vaut mieux parler d’une aire métropolitaine, de même, d’ailleurs, que pour Berlin : il y a la ville, mais pas grand-chose autour.

Bref, il faut déjà s’entendre sur la définition du terme. Il faut se mettre d’accord aussi bien sur le contenant que sur le contenu. Nous n’allons donc pas entrer ce soir dans ce débat lourd et technique, mais je pense qu’il en va de l’avenir de nos très grandes villes sur l’échiquier européen, de leur dynamisme économique et de leur développement.

Le statut de métropole est avant tout un instrument. Il faut donc réfléchir très sérieusement à ce qu’on veut en faire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la mission temporaire.

M. Yves Krattinger, rapporteur de la mission temporaire. La question posée par M. Nègre m’a semblé porter sur l’avenir des communes à l’intérieur des métropoles. (C’est çà ! sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elles enregistreront les enterrements et les mariages !

M. Yves Krattinger, rapporteur de la mission temporaire. Je vais donc essayer de préciser la vision que nous en avons, qui s’appuie sur les témoignages des personnes que nous avons rencontrées, tout particulièrement à Lyon et à Bordeaux.

Quand nous les avons rencontrés, les grands élus étaient tous rassemblés : à la tribune étaient présents les présidents de régions, de départements et de communautés de communes, ainsi que les maires de villes centres. Dans la salle, se trouvaient les maires des communes des futures métropoles en question. En effet, quel que soit le contenu que l’on met dans ce terme, les deux villes que j’ai citées me semblent incontestablement mériter ce statut.

Les maires veulent vivre. Ils veulent continuer à être des maires, même si, au fond d’eux, ils accepteraient probablement d’envisager qu’une partie de leurs moyens d’intervention leur soit attribuée par la métropole.

Mais il s’agit là d’un chemin que les uns et les autres doivent parcourir ensemble. Les maires ne veulent pas que de telles décisions résultent de la délibération d’autres personnes, car ils ont besoin de les expliquer à la population qui les a élus.

En ce qui nous concerne, nous avons voulu ouvrir deux portes.

Nous avons tout d’abord suggéré que les différents élus, s’ils le décident ensemble, puissent mettre en place une fiscalité métropolitaine unique.

Une telle démarche a bien été adoptée pour la taxe professionnelle, même si, dans ce cas, la décision était prise sur la base d’une loi reposant sur le volontariat. La loi a donc ouvert la porte, et les élus se sont engouffrés massivement.

Pour ma part, je parie toujours sur le fait que les élus sont intelligents, et qu’ils le sont même encore plus collectivement que quand ils sont tout seuls ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons intitulé notre rapport : Faire confiance à l’intelligence territoriale. Il s’agit donc là d’une porte ouverte.

Nous ouvrons également une seconde porte en proposant aux élus de partager, sur le territoire d’une aire métropolitaine, la dotation globale de fonctionnement.

En effet, il peut être intéressant pour un certain nombre d’élus qu’une répartition transparente entre les membres d’une métropole existe. Mais c’est à eux d’en décider. La loi, quant à elle, se contente d’ouvrir des possibilités, comme l’avait fait la loi Chevènement.

Telle est notre vision de la question : les métropoles ne tueront donc pas les communes.

À Lyon, Gérard Collomb, maire et président de la communauté urbaine, a créé des « conférences des maires » à l’intérieur de l’agglomération pour que les maires puissent se réunir et travailler ensemble. Il a considéré que ce n’était pas à lui de s’occuper des écoles, des crèches ou encore des squares. Ces responsabilités incombent aux maires, qui doivent rester de vrais maires.

Pour autant, vous avez entendu tout à l’heure avec quel talent il a défendu l’avenir de la métropole lyonnaise ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.

Mme Bernadette Bourzai. J’ai organisé dans mon département cinq réunions intercantonales, auxquelles se sont rendus deux cents grands électeurs. Je leur avais adressé la synthèse du rapport Balladur, avec ses propositions, ainsi que celle du rapport d’étape de notre mission temporaire, avec ses vingt-sept propositions initiales. Eh bien, je peux vous dire que je n’ai pas rencontré un seul défenseur des conclusions du comité Balladur ! En revanche, je me dois de transmettre les félicitations de nombreux élus à la mission temporaire pour le caractère responsable et raisonnable de ses propositions.

J’ajoute que j’ai retrouvé les réflexions de ces deux cents personnes et les miennes propres dans les propos qu’a tenus tout à l’heure Mme Gourault.

Mes observations porteront sur la montagne.

Je souhaitais d’abord évoquer la représentation des territoires de montagne, mais, cette question ayant été abordée tout à l’heure par M. Jacques Blanc, je n’y insisterai pas. Je dirai simplement à M. le secrétaire d’État, qui est originaire du Cantal, département très proche de la Corrèze, qu’il peut venir me voir quand il le souhaite : je l’emmènerai sur le plateau de Millevaches et nous ferons le tour des six cantons nécessaires pour élire un conseiller territorial ! Je souhaite bon courage et surtout bonne santé audit conseiller pour assumer ses fonctions aussi bien à Tulle qu’à Limoges, et particulièrement en l’absence de tout statut de l’élu, puisque, jusqu’à présent, je n’ai rien entendu sur cette question…

Je veux attirer l’attention sur les organismes qui existent depuis la loi montagne de 1985, c'est-à-dire le Conseil national de la montagne et les comités de massif. Il serait temps de penser à actualiser les missions de ces organismes, car ils peuvent être des outils extrêmement importants et des facteurs de cohésion territoriale, même si la situation varie d’un massif à l’autre.

Je citerai, en particulier, le programme opérationnel plurirégional du Massif central, qui a permis de mobiliser des fonds structurels européens sur une durée de six ans.

Enfin, les élus de la montagne souhaitent recevoir une juste contrepartie des dépenses qu’ils engagent, à quelques-uns, pour entretenir un espace mis à la disposition de tous. Cela suppose sans doute une fiscalité environnementale spécifique ou une dotation globale de fonctionnement majorée et, surtout, une péréquation entre les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Madame le sénateur, je regrette que vous ne m’ayez pas lancé votre invitation lorsque j’étais à Tulle, à l’occasion de l’assemblée générale des maires de Corrèze ! Cela étant, je reviendrai avec grand plaisir pour visiter le plateau de Millevaches. J’ai, moi aussi, l’habitude des territoires quelque peu désertifiés : ma circonscription d’origine, située dans un département voisin du vôtre, s’étend sur 380 000 hectares et compte près de 200 communes de montagne.

S’agissant des aides à la montagne, il existe d’ores et déjà de nombreux outils : la DSR, la DGE majorée, la DDR, la DFM. En outre, la répartition de ces dotations répond à des critères qui sont tout de même très favorables puisqu’un certain nombre de majorations sont prévues en fonction de la superficie, de la densité et de la voirie.

Pour autant, vous avez raison, il conviendrait de recentrer ces aides spécifiques à la montagne et à ses territoires sur les départements les plus concernés. Un tel recentrage des aides fait d’ailleurs l’objet d’une revendication récurrente de l’Association nationale des élus de montagne.

Lorsqu’elles ont été créées, ces aides concernaient quatre massifs – central, alpin, vosgien et pyrénéen – et une petite vingtaine de départements. Aujourd’hui, plus de cinquante départements en sont bénéficiaires : certains comprennent en fait des zones de piémont présentant des caractéristiques montagnardes, sans être pour autant de véritables départements de montagne.

Il nous faut donc parvenir à un consensus pour recentrer ces aides et leur conférer plus d’efficacité, en les réservant aux départements qui ont des besoins et des problèmes tout à fait spécifiques, liés à leur enclavement, à un long hivernage et à une faible densité de population, laquelle tend d’ailleurs à s’amoindrir d’année en année.

M. le président. La parole est à M. Pierre Bordier.

M. Pierre Bordier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous prie par avance de bien vouloir excuser la naïveté de mes propos, car je n’irai pas forcément dans le sens de ce que j’ai pu entendre jusqu’à présent.

Pour ma part, je pensais que la réforme des collectivités territoriales serait l’occasion de tout remettre à plat en vue de créer un nouveau système, idéal, en fonction de notre environnement actuel, et répondant à l’ensemble des besoins de nos concitoyens, notamment dans le domaine des transports ou des nouvelles technologies de l’information et de la communication. J’espérais que nous adopterions une démarche identique à celle – même si elle date un peu – des Constituants, qui, en créant les départements, ont fait fi des structures préexistantes, de quelque ordre qu’elles fussent : militaire, administratif, religieux, fiscal.

Même si la perfection est ce vers quoi il faut toujours tendre tout en sachant qu’on ne l’atteindra jamais, nous aurions eu, en procédant de cette manière, une démarche innovante, quitte à procéder à des adaptations ultérieures.

Or force est de constater que le comité Balladur, la mission d’information de l’Assemblée nationale et la mission temporaire du Sénat sont tous les trois partis de l’existant,…

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur de la mission temporaire. On ne peut pas partir de rien !

M. Pierre Bordier. … en l’adaptant.

Cet après-midi, la quasi-totalité des intervenants ont évoqué une « ambition ». Personnellement, je n’en vois pas beaucoup dans ce qui nous est proposé. M. le ministre de l’intérieur nous a dit tout à l’heure que nous avions rendez-vous avec l’histoire institutionnelle. J’ai bien peur que nous ne rations ce rendez-vous ! (MM. Philippe Dallier, Jean-François Humbert et Alain Vasselle applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger, rapporteur de la mission temporaire.

M. Yves Krattinger, rapporteur de la mission temporaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je m’efforcerai de rester mesuré dans mon propos.

Je veux bien me prêter à l’exercice qui consiste à construire, à partir de la carte de France, un modèle théorique. Je n’en aurai pas pour plus d’une quinzaine de jours avant de rendre ma copie – soit beaucoup moins de temps que n’en a pris l’élaboration du rapport de la mission temporaire ! –, car il me suffira de concevoir ce modèle en fonction de ma propre vision des choses, en laissant aux autres le soin de le mettre en œuvre et en leur souhaitant bon vent ! (Sourires.)

Nous en sommes tous d’accord, une réforme est nécessaire ; encore faut-il qu’elle puisse, une fois votée, être appliquée. Si c’est pour la mettre immédiatement au placard par aveu d’impuissance, cela n’a aucun sens !

Pour formuler nos propositions, nous ne sommes pas partis de l’idée que tout ce qui existe est forcément mauvais. Nous l’avons dit, répété et justifié, nous entendons nous appuyer sur le modèle existant pour essayer de l’améliorer le plus possible, dans la durée, car il est extrêmement difficile de tout traiter d’un seul coup.

En la matière, il ne s’agit pas de proclamer : « Du passé faisons table rase ! » Telle n’a pas été notre intention, et nous assumons complètement notre démarche.

M. le président. La parole est à M. René Vestri.

M. René Vestri. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les propositions du comité pour la réforme des collectivités locales.

Si celui-ci plaide en faveur d’une synthèse entre la légitimité démocratique des communes, l’efficacité et la vision stratégique que mettent en œuvre leurs structures intercommunales, il faut toutefois noter que les maires s’opposent à toute supracommunalité qui ne serait pas fondée sur une démarche volontaire, car cela conduirait à une dilution imposée des communes dans des ensembles plus larges.

Dans la préparation de la réforme prochaine, qui s’annonce historique, les maires insistent également sur la nécessité d’engager simultanément une réflexion sur la commande publique et sur le maintien d’un lien avec les activités économiques des PME.

En effet, le regroupement des marchés publics à un niveau plus important en volume est susceptible d’écarter, dans les zones rurales, mais aussi périurbaines, les petites entreprises, qui constituent autant d’acteurs économiques de proximité. Or ces petites entreprises ne seraient plus à même de répondre à des appels d’offre portant sur des marchés d’un montant significativement plus élevé et, par là même, soumis à des contraintes formelles plus lourdes.

Les maires demandent surtout que la réforme soit menée en association avec les élus locaux, de façon à « coller » aux spécificités des territoires et à obtenir le plus large consensus.

Je vous prie donc, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir nous préciser la position du Gouvernement sur ces trois points : volontariat, regroupement de la commande publique en zones rurales et périurbaines, concertation.