Art. 15 bis
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école
Art. additionnels après l'art. 15 ter

Article 15 ter

L'article L. 321-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 321-4 - Dans les écoles, des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévus par l'équipe enseignante au profit des élèves qui éprouvent des difficultés et au profit des élèves intellectuellement précoces, afin de répondre à leur besoin. »

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 295 est présenté par MM. Bodin,  Assouline,  Dauge,  Guérini,  Lagauche,  Mélenchon,  Repentin et  Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 561 est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 295.

M. Yannick Bodin. Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, me semble inopportun pour deux raisons.

D'une part, il mélange les genres : il intègre au dispositif général de cet article, qui concerne l'ensemble des « élèves qui éprouvent des difficultés », les « élèves intellectuellement précoces », terme médical qui désigne les enfants qu'on qualifiait, il y a quelques années, de « surdoués ».

Ces enfants, en raison de leur précocité intellectuelle, ne bénéficient pas toujours d'une situation scolaire enviable. Cette précocité se traduit souvent par une inadaptation aux enseignements, par un blocage dans certains apprentissages, voire par un rejet scolaire. Ils font généralement l'objet d'un suivi psychologique. Il ne s'agit donc aucunement d'enfants « qui éprouvent des difficultés », au sens classique du terme. De ce fait, il est difficile d'intégrer les élèves pour lesquels un tel diagnostic a été dressé au dispositif prévu à l'article L. 321-4.

Un amendement de notre collègue Hugues Portelli tendant à insérer un article additionnel après l'article 11 visait à apporter des solutions sur mesure pour les enfants intellectuellement précoces. Ce dispositif était nettement plus adapté à leur particularité que celui qui nous est proposé à l'article 15 ter.

Par ailleurs, les solutions proposées à l'article 15 ter en faveur des enfants en difficulté sont en retrait par rapport au dispositif en vigueur. Actuellement, le code de l'éducation dispose que les « élèves qui éprouvent des difficultés » reçoivent « un enseignement adapté » lorsque celles-ci sont « graves et permanentes ». Le présent article se borne à renvoyer à l'équipe enseignante le soin de prévoir « des aménagements particuliers et des actions de soutien ». Le mot « enseignement » ne figure pas dans ce dispositif, non plus que le mot « adapté ». Cette formule floue de remplacement ne laisse augurer aucune action efficace à destination des enfants qui éprouvent des difficultés.

Ces deux raisons nous poussent à demander la suppression de cet article incongru.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 561.

Mme Annie David. Nous demandons la suppression de l'article 15 ter pour les mêmes raisons que celles que vient d'exposer M. Bodin.

M. le président. L'amendement n° 101, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 321-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Des aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités. Le rythme scolaire peut être accéléré, en fonction des capacités de l'enfant. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'Assemblée nationale a adopté un article additionnel visant à étendre au profit des élèves intellectuellement précoces les dispositions prévues par l'article L. 321-4 du code de l'éducation.

La commission partage pleinement le souci - déjà exprimé hier par M. Portelli - de voir reconnus les besoins particuliers des élèves intellectuellement précoces, ces « oubliés de la difficulté scolaire », comme le soulignent M. Jean-Pierre Delaubier dans son rapport de 2002 et les inspections générales dans leur rapport annuel pour 2004. Il semble en effet qu'en l'absence d'un dispositif adapté un tiers de ces élèves soient en difficulté scolaire en classe de troisième.

La commission propose d'améliorer en la complétant, la rédaction proposée pour cet article additionnel.

Il s'agit, d'une part, de rétablir la référence à l'enseignement adapté pour les élèves dont les difficultés sont graves et permanentes, que l'Assemblée nationale a malencontreusement supprimée.

Il s'agit, d'autre part, de préciser la portée des dispositions introduites par l'Assemblée nationale au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières. Ainsi, il est indiqué que le rythme scolaire peut être accéléré, en fonction des capacités de l'enfant.

M. le président. Le sous-amendement n° 650, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

I. Au début de la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 101 pour compléter l'article L. 321-4 du code de l'éducation, remplacer les mots :

Des aménagements appropriés sont prévus au profit des

par le mot :

Les

II. Dans la même phrase, remplacer les mots :

, afin de

par les mots :

bénéficient d'aménagements appropriés pour

III. A la fin de la même phrase, remplacer le mot :

potentialités

par le mot :

capacités

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 207, présenté par M. Lecerf et Mme Desmarescaux, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 321-4 du code de l'éducation :

« Art. L. 321-4 - Tout au long de leur scolarité, des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévus par l'équipe enseignante au profit des élèves qui éprouvent des difficultés, au profit des élèves porteurs de troubles spécifiques du langage oral et/ou écrit et au profit des élèves intellectuellement précoces, afin de répondre à leur besoin ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 146, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 321-4 du code de l'éducation, après les mots :

Dans les écoles,

insérer les mots :

lorsque cela est possible,

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 295 et 561 ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission ayant proposé une nouvelle rédaction pour l'article 15 ter afin de rétablir les dispositions de l'article L. 321-4 sur l'enseignement adapté, ces amendements seront satisfaits par l'adoption de son propre amendement. Je demande à leurs auteurs de bien vouloir les retirer.

Faut-il supprimer les établissements spécialisés qui accueillent les enfants en difficulté ? Cela me semble paradoxal !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 295 et 561 et favorable à l'amendement n° 101.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 295 et 561.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 101.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 15 ter est ainsi rédigé.

Art. 15 ter
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Art. additionnel avant l'art. 16

Articles additionnels après l'article 15 ter

M. le président. L'amendement n° 208 rectifié bis, présenté par M. Lecerf, Mme Desmarescaux, MM. Dériot,  Girod et  Cambon, Mme Garriaud-Maylam et M. Del Picchia, est ainsi libellé :

Après l'article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l'article L. 321-4 du code de l'éducation est complétée par les mots : « , notamment les élèves atteints de troubles spécifiques du langage oral et/ou écrit, tels la dyslexie. »

La parole est à M. Robert Del Picchia.

M. Robert Del Picchia. Les élèves dyslexiques présentent des difficultés spécifiques qui doivent faire l'objet d'une prise en charge adaptée et systématique, au sein du milieu scolaire.

Actuellement, ces enfants ne bénéficient d'aucun suivi particulier et rencontrent trop souvent des difficultés dans l'apprentissage scolaire, en l'absence de méthodes qui tiendraient compte de leurs besoins particuliers.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Favorable également.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre sur le fait que, pour faire progresser ces enfants dyslexiques, alors que l'on dispose aujourd'hui d'une large palette de méthodes, seules quelques-unes d'entre elles sont mises en pratique et font éventuellement l'objet d'un remboursement par la sécurité sociale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 208 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.

L'amendement n° 102, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Après l'article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 321-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Des actions particulières sont prévues pour l'accueil et la scolarisation des élèves non francophones nouvellement arrivés en France. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement concerne les primo-arrivants.

Le principe du droit à l'instruction s'applique de la même manière quelle que soit la nationalité des élèves. Les élèves de nationalité étrangère âgés de six à seize ans sont donc soumis à l'obligation scolaire.

La commission propose de rappeler que des conditions de scolarisation adaptées doivent être prévues, dans les écoles, pour l'accueil des enfants nouvellement arrivés en France.

En effet, l'école est un lieu déterminant pour favoriser l'intégration sociale et culturelle de ces élèves et de leurs familles dans leur nouvel environnement, et la maîtrise de la langue française constitue un facteur essentiel de cette intégration.

Il convient donc de proposer à ces élèves, en priorité, un apprentissage intensif et accéléré du français. De telles structures d'accueil sont déjà prévues. Mais, en l'absence de pilotage national clair, les politiques mises en oeuvre sont disparates.

Aussi, cet article additionnel a vocation à souligner que la scolarisation des élèves dits « primo-arrivants » est une mission de l'école de la République.

Toutefois, dans la mesure où les situations et les flux sont par nature imprévisibles, et éminemment variables sur le territoire, la scolarisation de ce public exige une grande souplesse dans son organisation. C'est pourquoi le dispositif proposé prévoit que des établissements peuvent se regrouper pour mettre en place des structures adaptées.

M. le président. Le sous-amendement n° 651, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 102 pour compléter l'article L. 321-4 du code de l'éducation, après les mots :

sont prévues

insérer les mots :

chaque fois que possible

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 102 ?

M. François Fillon, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 102.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.

Section 2

Enseignement du second degré

Art. additionnels après l'art. 15 ter
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Art. 16

Article additionnel avant l'article 16

M. le président. L'amendement n° 210 rectifié, présenté par MM. Ferrand,  Guené et  Cambon et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article L.  331-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les jurys des examens conduisant à la délivrance du diplôme national du brevet option internationale et du baccalauréat option internationale peuvent comprendre des membres de corps d'inspection ou d'enseignement étrangers. Les jurys des baccalauréats binationaux peuvent comprendre des membres de corps d'inspection ou d'enseignement des pays concernés. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je le reprends, monsieur le président.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 210 rectifié bis.

Vous avez la parole pour présenter cet amendement, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement, qui avait fait l'objet d'un avis favorable de la commission, favorise l'ouverture des jurys des diplômes à option internationale, ce qui est conforme à l'orientation retenue par le projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 210 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 16.

Art. additionnel avant l'art. 16
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Art. 17

Article 16

Le troisième alinéa de l'article L. 331-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« En vue de la délivrance des diplômes, il peut être tenu compte, éventuellement en les combinant, des résultats d'examens terminaux, des résultats des contrôles en cours de formation, des résultats du contrôle continu des connaissances, et de la validation des acquis de l'expérience.

« Lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte dans un diplôme national, les garanties sont prises pour assurer l'égale valeur du diplôme sur l'ensemble du territoire national. »

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 296 est présenté par MM. Bodin,  Assouline,  Dauge,  Guérini,  Lagauche,  Mélenchon,  Repentin et  Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 562 est présenté par Mme David, MM. Ralite,  Renar,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter l'amendement n° 296.

M. Jean-Marc Todeschini. En cohérence avec votre décision de suspendre la réforme du baccalauréat, monsieur le ministre, nous demandons la suppression de cet article.

Les lycéens prétendument manipulés ont eu raison de votre réforme du bac.

Cette réforme, on ne le rappelle pas assez, faisait l'objet d'un groupe de travail, se réunissant parallèlement à l'examen de ce projet de loi et placé sous votre égide, monsieur le ministre. Ce groupe de travail rassemblait divers partenaires de la communauté éducative, dont les syndicats représentatifs, qui, les uns après les autres, ont quitté ce groupe afin de ne pas cautionner des propositions aberrantes. Mais eux aussi étaient sans doute manipulés !

Tout le monde s'accorde à dire que cette réforme était mal ficelée : contrôle continu, suppression des TPE... Les élèves de terminale voyaient tout ce à quoi ils avaient été préparés bouleversé d'un trait de plume.

Puisqu'il n'y a plus de réforme du baccalauréat, cet article n'a plus de raison d'être. Nous en demandons donc la suppression.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 562.

Mme Annie David. Nous demandons également la suppression de cet article 16 qui nous conduit au coeur d'un des sujets forts du mécontentement de la communauté éducative dans son ensemble et des élèves en particulier.

Monsieur le ministre, votre annonce selon laquelle le contrôle continu serait dorénavant pris en compte pour la validation du bac a été perçue par une part importante des membres de la communauté éducative comme la manifestation d'une volonté de remettre en cause la valeur du bac.

Tous redoutent un risque majeur : la fin de la valeur nationale de ce diplôme, avec des bacs différenciés suivant les lycées.

Certes, devant ce mécontentement très large, vous avez déclaré remettre à plus tard la réforme du bac. Mais il ne s'agit là que d'un retrait tactique, répondant au seul souci de freiner le développement du mécontentement.

En fait, avec l'article 16, vous laissez dans la loi les éléments qui vous permettront de mettre plus tard en oeuvre cette réforme, quand bon vous semblera et selon les modalités que vous avez annoncées. Et là, il ne sera plus question de demander son avis à la représentation nationale !

En transformant l'article L. 331-1 du code de l'éducation, vous vous laissez les mains libres pour la réforme que vous souhaitez. En fait, vous refusez d'entendre les propositions alternatives.

Ainsi, le mouvement lycéen qui se développe actuellement demande que soient organisés des partiels nationaux afin d'assurer la valeur nationale du baccalauréat. Pourquoi ne pas prendre en compte cette demande ?

M. François Fillon, ministre. Quel culot !

Mme Annie David. Vous allez me répondre que la réforme du bac est ajournée. Mais, en faisant voter cet article 16 ainsi rédigé, vous ne permettez pas qu'une telle revendication puisse être ultérieurement prise en compte.

Qui plus est, le bac est d'ores et déjà modifié. En effet, en supprimant les TPE, vous avez transformé les conditions de préparation, de passage et d'obtention de ce diplôme. Pourquoi, là encore, ne pas entendre ce que tout le monde vous demande, à savoir le rétablissement des TPE ? En fait, derrière cette mesure, nous le savons tous, il n'y a qu'une volonté de redéploiement des dépenses.

Ne pouvant justifier pédagogiquement cette réforme, vous avez décidé de la rendre exécutoire en passant par le règlement, en ne l'inscrivant pas dans votre projet de loi.

Puisque vous nous dites régulièrement être attentif aux préoccupations qui se font jour dans le mouvement actuel et que votre réforme porte pour partie les modifications que beaucoup attendent, monsieur le ministre, je vous propose de donner un signe fort de votre capacité d'écoute.

Deux petites décisions seraient des grands pas : d'une part, rétablissez les TPE et, d'autre part, acceptez de retirer l'article 16 de votre projet de loi, afin de laisser réellement toutes les portes ouvertes pour une réforme du bac, cette fois négociée avec l'ensemble de la communauté éducative.

Je vous rappelle que l'une des justifications de cet article était, selon vos propres termes, d'« énumérer les différentes modalités de contrôle de l'acquisition des savoirs et des compétences qui peuvent être prises en compte pour la délivrance des diplômes sanctionnant les formations secondaires ».

Le bac est, si je ne me trompe, un diplôme sanctionnant une formation secondaire. Et puisque vous avez décidé d'en ajourner la réforme, je demande que soit, de la même façon, ajournée l'application de cet article, afin de mettre en cohérence le texte de cette réforme avec les intentions politiques que vous affichez, monsieur le ministre.

M. le président. L'amendement n° 564, présenté par Mme David, MM. Ralite,  Renar,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation.

La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Cet amendement s'inscrit dans la même logique que celui qui vient d'être défendu par Mme David.

Le contenu d'un examen terminal, quel qu'il soit, n'est pas une évaluation « patchwork » d'un segment de vie ; c'est l'évaluation d'un cursus défini par les experts de l'éducation nationale selon des critères pédagogiques transparents. C'est ce qui en fait la force et la valeur. Un diplôme, surtout national, n'est pas un « fourre-tout », mais doit être vu comme le moyen de vérifier la validation d'acquis accumulés au cours d'un cursus.

Le caractère national d'un examen, menacé par le contrôle en cours de formation, doit être préservé, et des critères d'évaluation doivent être définis clairement pour éviter des disparités selon les disciplines, les formations, les inspecteurs, voire les établissements.

M. le président. L'amendement n° 565, présenté par Mme David, MM. Ralite,  Renar,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation, supprimer les mots :

, des résultats du contrôle continu des connaissances,

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, il faut vraiment remettre sur le métier cette réforme du baccalauréat.

Mes collègues viennent d'évoquer un certain nombre de problèmes. D'autres se posent, qui tiennent au fait que, avec la contrôle continu, c'est la même personne qui enseigne et qui évalue, à la disparité du contrôle selon les disciplines, les formations et les établissements, à la question de l'évaluation dans les établissements privés hors contrat ou à la situation des candidats au baccalauréat qui ne sont pas scolarisés.

Je crois donc nécessaire de supprimer complètement ces dispositions, conformément aux engagements pris par M. le ministre.

M. le président. L'amendement n° 563, présenté par Mme David, MM. Ralite,  Renar,  Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation, supprimer le mot :

continu

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Nous tenons à réaffirmer notre attachement au caractère national et anonyme du baccalauréat, afin que ce diplôme soit le même pour tous et garde la même valeur reconnue sur l'ensemble du territoire de la République.

La suppression du contrôle continu est, du point de vue des élèves, la garantie de l'égalité et de l'objectivité et, du point de vue des enseignants, celle de l'indépendance et du respect des programmes nationaux.

Par ailleurs, le contrôle continu possède une connotation péjorative de « diplôme au rabais ». Inconsciemment, on soupçonne toujours le contrôle continu de servir à « donner » le diplôme. Ce sentiment n'est sans doute pas étranger au manque de considération dont souffre, par exemple, le BEPC.

Au demeurant, nous avons souvent dénoncé les difficultés et les risques que peut entraîner le contrôle continu en cours de formation.

On peut en effet s'inquiéter du cumul de la fonction de formateur et de la responsabilité d'évaluateur vis-à-vis des mêmes élèves, de la charge de travail supplémentaire supportée par les professeurs, de la « pression » qui s'exerce sur certains d'entre eux, des disparités dans la mise en oeuvre de ce contrôle selon les disciplines, les formations, les inspecteurs, voire les établissements, de la perte du caractère d'« épreuve de passage » de l'examen, etc.

Le contrôle en cours de formation risque de remettre en cause le caractère national de l'examen, même s'il est précisé dans l'article que, « lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte dans un diplôme national, les garanties sont prises pour assurer l'égale valeur du diplôme sur le territoire national » : nous ne savons pas quelles sont ces garanties. Cet alinéa semble destiné plutôt à calmer les craintes des lycéens qu'à organiser, selon les principes de justice et d'égalité qui régissent notre droit, ce mode d'évaluation.

M. le président. L'amendement n° 103, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation :

« Lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte pour la délivrance d'un diplôme national, l'évaluation des connaissances des candidats s'effectue dans le respect des conditions d'équité. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'amendement n° 103 tend à modifier un alinéa ajouté par l'Assemblée nationale afin de répondre aux inquiétudes manifestées à propos de l'introduction d'une part de contrôle continu pour la délivrance d'un diplôme national.

En effet, il apparaît redondant de parler de l'égale valeur d'un diplôme national sur l'ensemble du territoire : c'est le propre même d'un diplôme national !

Notre amendement précise la portée de la disposition ainsi introduite en prévoyant que, lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte pour la délivrance d'un diplôme national, l'évaluation des connaissances des candidats s'effectue dans le respect des conditions d'équité.

La commission est défavorable aux amendements identiques nos 296 et 562, car l'article 16 ne concerne pas seulement le baccalauréat. Il faut rappeler que le brevet ainsi que d'autres examens comportent d'ores et déjà une part de contrôle continu.

La commission est également défavorable aux amendements nos 564 et 565.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Avec ce débat, nous pouvons mesurer combien il est difficile pour certains mouvements politiques de rester toujours dans le sens du vent, surtout quand le vent tourne aussi vite !

M. François Fillon, ministre. Pendant plusieurs dizaines d'années, les mouvements lycéens ont réclamé l'introduction du contrôle continu dans les épreuves du baccalauréat. Il n'y a pas si longtemps, en 1998, ils manifestaient même dans la rue contre le gouvernement socialiste avec deux revendications principales : l'introduction du contrôle continu au baccalauréat et la renonciation à la mise en place des TPE en classes de première et de terminale !

M. François Fillon, ministre. Lionel Jospin, en 1991, devant le Conseil supérieur de l'éducation, avait annoncé une réforme du baccalauréat comprenant l'introduction du contrôle continu. Il avait même indiqué que 1995 serait l'année de l'entrée en vigueur de cette réforme du baccalauréat !

M. David Assouline. Mais pas celle-là !

M. François Fillon, ministre. Et voilà que vous nous demandez de prendre en compte la demande des lycéens d'introduire le contrôle en cours de formation. Or c'est justement une proposition que j'avais faite puisque la commission que j'avais mise en place avait pour mission de déterminer la meilleure façon de réduire le nombre d'épreuves terminales et travaillait à la fois sur le contrôle continu et sur le contrôle en cours de formation.

Ceux qui ne font que courir après des mouvements conjoncturels devraient se souvenir qu'ils ont en charge, eux aussi, l'intérêt général ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Peut-être leur arrivera-t-il demain de gouverner notre pays. Qu'ils s'attendent à se voir alors rappeler les déclarations définitives qu'ils ont faites un peu trop promptement sur des sujets qui mériteraient, pourtant, de donner lieu à une réflexion globale et sereine.

Les amendements qui visent à supprimer l'article 16 sont tout à fait étranges.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cet article L. 331-1 du code de l'éducation, qui est ancien, prévoit d'ores et déjà le contrôle continu. L'objectif de l'article 16 est simplement d'ajouter à toutes les formes de contrôle des connaissances existantes le contrôle en cours de formation, que Mme David réclamait à l'instant et qui, lui, n'est pas inscrit dans les textes législatifs.

Lorsque vous nous demandez de supprimer cet article du code de l'éducation, qui existe depuis des années et qui permet d'organiser le contrôle continu pour un certain nombre d'examens - baccalauréat professionnel, brevet ou bac général à travers les TPE -, votre objectif est en fait simplement d'envoyer un signe aux lycéens qui manifestent.

Ceux-ci expriment une inquiétude, que j'ai prise en compte. Mais cela ne nous exonère pas de leur dire la vérité : le baccalauréat est un examen en danger, non seulement parce que son organisation n'est pas satisfaisante, mais aussi parce que, de mon point de vue, il n'est pas très juste, notamment à l'égard des enfants issus des quartiers défavorisés et de ceux auxquels leur famille ne peut pas apporter le soutien nécessaire.

Préparer onze ou douze épreuves pour le mois de juin n'est pas la meilleure façon de vérifier et d'évaluer les connaissances des lycéens. C'est la raison pour laquelle, lorsque ce projet de loi sera voté, je demanderai de nouveau aux organisations syndicales et aux représentants des lycéens de bien vouloir s'asseoir autour d'une table afin de réfléchir à la modernisation du baccalauréat.

Pour ces raisons, je suis défavorable aux amendements nos 296, 562, 564, 565, 563, et favorable à l'amendement n° 103.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 296 et 562.

M. David Assouline. Monsieur le ministre, vous « remettez sur le tapis » l'historique de la question du contrôle continu au baccalauréat. Il ne s'agit pourtant pas d'une question idéologique divisant la droite et la gauche dans ce pays ! Il s'agit d'un débat qui prend un sens nouveau en fonction de chaque situation et du climat qui existe, à un moment donné, au sein de l'éducation nationale.

A mon époque, si je puis dire, en tout cas lorsque j'étais plus jeune, le principe et la forme de ce mode de contrôle étaient encore à définir. Le contrôle continu apparaissait alors comme un progrès par rapport au bachotage, qui pose effectivement des problèmes et peut être source d'injustice. On peut en effet être bon toute l'année et dépressif le jour du baccalauréat !

Pourquoi, aujourd'hui, la perspective du contrôle continu suscite-t-elle tant d'émotion chez les jeunes ? Interrogés au cours des premières manifestations, ces jeunes considéraient que l'introduction du contrôle continu serait un moyen de les « sacquer ». En effet, petit à petit, au cours des derniers mois et des dernières années, l'idée a été introduite, en partie par votre ministère, selon laquelle les professeurs devraient dorénavant « sacquer » les élèves pour asseoir leur autorité.

M. François Fillon, ministre. Vous aimez beaucoup les professeurs !

M. David Assouline. Vous avez créé une incertitude et le rapport entre les élèves et les enseignants s'est donc quelque peu modifié, du fait de l'appréciation portée par les jeunes sur ce que pourrait être le contrôle continu au baccalauréat.

Ce que réclament certains lycéens aujourd'hui, ce n'est pas la suppression du contrôle continu, mais une épreuve impartiale - sur le principe des partiels à l'université -, unique pour tous et excluant l'appréciation des candidats selon des critères subjectifs.

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Nous demandons la suppression de cet article 16 non pas pour laisser les choses en l'état, monsieur le ministre, mais pour faire avancer la discussion et pour proposer des idées nouvelles sur la réforme du baccalauréat !

Pourquoi ne pas diversifier les formes d'évaluation ? Selon certaines études internationales, comme le PISA, le programme international pour le suivi des acquis des élèves, auquel participent trente-deux pays de l'OCDE, il manque aux élèves de notre pays la capacité de transférer leurs savoirs pour les mettre en oeuvre dans des situations nouvelles.

Pourquoi l'évaluation ne porterait-elle pas en particulier, dans le cadre du brevet et du baccalauréat, sur de nouveaux dispositifs comme les itinéraires de découverte et les travaux personnels encadrés ?

Le contrôle continu comme mode d'évaluation existe certes déjà dans certaines disciplines, telle l'éducation physique et sportive. Mais nous avons souvent dénoncé les difficultés et les risques entraînés par le contrôle continu en cours de formation, notamment pour la légitimité nationale du diplôme.

Nous proposons la suppression de l'article 16, car celui-ci ne définit pas suffisamment les modalités de la réforme du baccalauréat. Il faut redonner sa place à la consultation et à la réflexion pour aboutir à une véritable réforme, qui corresponde à ce que nous voulons aujourd'hui pour le baccalauréat.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, notre acharnement à vouloir supprimer cet article vaut bien le vôtre à vouloir le maintenir ! L'existence de cet article n'est nullement nécessaire pour que soit entamée une réflexion nouvelle sur la réforme du baccalauréat.

J'ajoute qu'il serait bon de s'interroger sur les raisons qui expliquent la réaction actuelle des lycéens. Cela nous amènerait à constater que ceux-ci nourrissent un sentiment d'injustice, à l'évidence justifié - inutile, pour s'en assurer, de suivre les manifestations ou de questionner les manifestants ! - par l'existence d'inégalités entre les établissements en matière de fonctionnement comme d'enseignement, et donc entre les élèves.

Cela nous conduirait aussi à mener une réflexion plus vaste, sur les raisons de l'échec de certains élèves.

Sans doute les jeunes ont-ils aussi le sentiment que la valeur nationale de ce diplôme et sa valeur de premier diplôme universitaire sont menacées ; de fait, le baccalauréat leur ouvre de moins en moins l'accès aux études supérieures qu'ils voudraient entreprendre.

Décidément, tout cela mérite réflexion et il convient donc de supprimer cet article.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je ne peux pas laisser passer sans réagir les propos que vient de tenir David Assouline.

Mon cher collègue, l'évolution des mentalités est perceptible, notamment dans votre propre discours.

Ce que vous avez dit tout à l'heure est absolument indigne : d'un côté, vous défendez le corps enseignant, les professeurs, les instituteurs, les professeurs des écoles, mais, de l'autre, vous laissez planer une suspicion sur la valeur des notes que ces enseignants sont amenés à attribuer à leurs élèves ou à leurs étudiants, sur la valeur des appréciations qu'ils sont amenés à formuler à leur endroit. C'est proprement scandaleux ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Legendre. Très bien !

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur Assouline, vous ne pouvez à la fois prétendre défendre le corps dont vous faites partie, dont je fais partie et dont nombre de sénateurs font ou ont fait partie, et mettre en doute la sincérité et l'honnêteté des appréciations que ce corps formule.

Je ne peux vous laisser dire qu'il faut éliminer le contrôle des connaissances, que vous avez réclamé, que nous avons été plusieurs à réclamer, au prétexte qu'il ne pourrait être ni totalement sincère ni totalement honnête. Ou alors il faudrait également mettre en doute la valeur des appréciations portées dans le carnet scolaire ! Or le carnet scolaire est très important, notamment lors des délibérations des jurys de baccalauréat. Au-delà des notes qui sont fournies, les appréciations sont en effet fondamentales pour éclairer la décision finale du jury sur l'opportunité de recevoir ou non à l'examen tel ou tel élève.

Je le répète, on ne saurait à la fois défendre le corps enseignant, comme nous le faisons tous ensemble, puis mettre en doute la sincérité de ses appréciations et envisager que tel ou tel comportement puisse avoir une incidence sur les notes qu'un enseignant attribuera.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. Avant que le Sénat ne se prononce sur les amendements de suppression de l'article 16, je veux simplement lui indiquer quelle serait la conséquence de cette suppression : ce serait la suppression de toute base légale pour tous les examens dans notre pays !

J'ai rappelé tout à l'heure que cet article n'était pas nouveau : il figure déjà dans notre code de l'éducation. Nous ne faisons qu'y ajouter une disposition relative au contrôle en cours de formation.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 296 et 562.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 128 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 322
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l'adoption 121
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l'amendement n° 564.

M. David Assouline. Je souhaite surtout répondre à M. Valade,...

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Alors, ce n'est pas une explication de vote !

M. David Assouline. ...dont je mets l'intervention sur le compte ou d'un malentendu sur le sens de mes propos ou de l'habileté politique.

A aucun moment, monsieur Valade, je n'ai mis en cause dans mes propos les professeurs,...

M. François Fillon, ministre. Vous avez tout de même employé le verbe « sacquer » !

M. David Assouline. ...comme la lecture du compte rendu des débats vous en convaincra.

J'essaie seulement de comprendre pourquoi, à un moment donné, la colère des jeunes s'est focalisée sur la question du contrôle continu, question dont on peut pourtant légitimement débattre et qui n'avait jamais suscité un tel rejet de la part des jeunes,...

M. François Fillon, ministre. Si !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il serait intéressant de se demander pourquoi !

M. David Assouline. ...et je vous fournis mon explication.

On a instauré, au cours des dernières années, un certain climat, et d'abord un certain climat social, qui, notamment dans les territoires les plus en difficulté, a alimenté un sentiment d'exclusion, de rejet, l'idée selon l'égalité des chances n'était pas réelle. Cela explique pour une large part leur comportement.

En outre, au plus haut niveau, a été tenu dans l'éducation nationale un discours laissant entendre que, pour rétablir l'autorité, on allait privilégier la sanction - y compris dans les jugements sur le comportement -, ce qui a créé un climat de défiance chez les jeunes.

Jusqu'à ce que j'entre dans cet hémicycle, j'ai été de ces professeurs qui doivent se « coltiner » le problème quotidiennement, et ce n'est pas moi qui mettrais en accusation ce corps, que vous n'aimez pas, vous, à droite ! (Vives protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Christian Cointat. C'est scandaleux ! On ne peut pas vous laisser dire cela !

M. David Assouline. A moi, on peut dire que je tiens des propos scandaleux !

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Ils ne sont pas scandaleux, ils sont injurieux !

M. David Assouline. Je vous renvoie le propos, et je peux l'étayer !

Lorsque, dans la discussion générale, j'ai dit que vous vous méfiiez de ce corps, j'ai entendu vos rigolades, et, chaque fois qu'il est question des professeurs, j'entends parler - certes pas en séance publique, bien sûr - de ces « planqués », de ces gens qui ne travaillent pas, et cela vient toujours de votre camp ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

M. Christian Demuynck. N'importe quoi !

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. M. le ministre nous a dit que le vote des amendements de suppression ou de nos amendements suivants sur l'article 16 remettrait complètement en cause la délivrance des diplômes dans notre pays.

M. François Fillon, ministre. C'est la vérité !

Mme Annie David. Mais, monsieur le ministre, si nous demandons la suppression de l'article 16 de votre projet de loi, c'est justement pour laisser en l'état le code de l'éducation, dont article L. 331-1 prévoit déjà que l'Etat sanctionne par des diplômes nationaux les formations secondaires.

Si nous demandons la suppression de l'article 16, c'est pour permettre à la commission qui doit être mise en place d'étudier sérieusement et sereinement la réforme qu'il est nécessaire d'apporter au baccalauréat.

Voter en l'état l'article 16 serait un déni de démocratie. Ce serait le rejet de ce que vous avez négocié avec les élèves, ou tout au moins ce que vous leur avez octroyé en leur disant : « Nous rediscuterons ultérieurement de la réforme du bac. »,

M. François Fillon, ministre. Oui, nous en discuterons ultérieurement !

Mme Annie David. Vous ne pouvez dire cela d'un côté et, de l'autre, nous demander le maintien de l'article 16 au motif que sa suppression remettrait tout en cause.

Nous, nous vous demandons de maintenir le code de l'éducation en l'état, puis d'entamer les discussions en vue d'une véritable réforme de notre baccalauréat, afin de l'adapter à la société actuelle en tenant compte des évolutions qu'elle a subies.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. Vous vous enferrez ! Vous demandez, dans votre amendement n° 564, la suppression du premier alinéa de l'article L. 331-1 du code l'éducation,...

Mme Annie David. Dans la rédaction proposée à l'article 16 !

M. François Fillon, ministre. ...mais, je l'ai dit et c'est la vérité, supprimer cet alinéa enlèverait toute base légale aux examens qui intègrent le contrôle continu, qui est déjà prévu dans notre code de l'éducation.

Il s'agit d'un discours polémique et il n'a absolument aucun sens : il n'y aura pas de réforme du baccalauréat tant qu'il n'y aura pas d'accord entre l'ensemble des acteurs de la communauté éducative sur la question et il n'est vraiment pas utile de supprimer les bases légales des examens qui utilisent le contrôle continu aujourd'hui pour parvenir à cet accord !

M. Christian Cointat. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Nous ne sommes pas là pour faire des procès d'intention. Or David Assouline vient d'en faire deux d'un seul coup !

Le premier vise les professeurs ; c'est du moins ainsi que beaucoup d'entre nous, monsieur Assouline, ont compris votre intervention. Vous avez tenté de justifier votre position, mais je confirme la mienne : il serait indigne d'imaginer qu'un professeur, parce qu'il aurait, comme vous le sous-entendez, perdu le contrôle de sa classe se rattrape en « sacquant » les élèves qui lui sont confiés. C'est un procès d'intention que ni le ministre ni les parlementaires ne peuvent admettre.

Le second vise le Sénat, en laissant penser que notre Haute Assemblée, dont vous faites partie, monsieur Assouline, se livrerait, à l'encontre du corps enseignant, à une chasse aux sorcières. Nous avons, en vérité, la plus grande considération pour celles et ceux à qui nous confions nos enfants, nos adolescents, non seulement pour qu'ils leur enseignent les disciplines dont ils sont responsables et dont ils ont la maîtrise, mais également pour qu'ils fassent leur éducation.

En mettant en cause cette réalité, on touche au fameux socle républicain auquel nous sommes unanimement attachés.

De grâce, pas de procès d'intention entre nous ! Nous respectons la totalité du corps enseignant. Comme tout groupe humain, il connaît naturellement des dérives, mais nous lui faisons une totale confiance : nous ne mettons pas une seconde en doute l'honnêteté qui doit être et qui est celle des enseignants quant aux jugements qu'ils peuvent porter sur les enfants et les adolescents qui leur sont confiés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Je tiens d'abord à dire que, en tant qu'enseignant et que parlementaire, j'ai trouvé curieux d'être accusé d'appartenir à un groupe politique qui n'aimerait pas les enseignants ! Comment pourrait-on ne pas s'aimer soi-même ? (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est fréquent : étudiez la psychanalyse !

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est ce qu'on appelle l'« anti-narcissisme » !

M. Jacques Legendre. Sur toutes les travées de cet hémicycle, siègent des enseignants et des gens qui se préoccupent sincèrement de l'organisation de l'éducation nationale, de la qualité de notre éducation et, surtout, du devenir des élèves, qui est l'objet même de notre débat.

L'amendement n° 564, que je ne voterai pas, me paraît, sinon constituer une fausse accusation, du moins mettre le doigt sur un faux problème en oubliant quelles sont les véritables questions que pose le baccalauréat. Ce qui devrait constituer l'essentiel de notre débat, c'est non l'organisation des modalités de cet examen, mais son rôle et la façon, après son obtention, de réussir dans l'enseignement supérieur.

S'il y a un scandale, c'est bien le pourcentage effrayant de titulaires du baccalauréat qui échouent dans l'enseignement supérieur : 60 %. Cette situation appelle une réflexion et mérite un véritable débat à l'Assemblée nationale et au Sénat, et non pas des mauvais procès laissant planer le soupçon que nous voudrions organiser de bons baccalauréats dans certains lycées et de mauvais baccalauréats dans d'autres.( Mme Borvo s'esclaffe.)

L'enjeu est de permettre aux titulaires du baccalauréat de poursuivre leurs études avec quelque succès, comme nous le souhaitons à tous ceux qui en ont la capacité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur Legendre, nombreux sont ceux qui ne s'aiment pas eux-mêmes. C'est même un thème qui fait l'objet de nombreux travaux psychanalytiques que vous connaissez certainement. Franchement, en matière d'argumentation, nous attendions mieux de vous !

Pour en revenir au sujet qui nous intéresse, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, je dirai qu'en amour, comme chacun le sait, seuls les actes comptent. Or les enseignants ont vraiment eu beaucoup à pâtir de l'attitude que vous avez adoptée à leur égard, depuis votre arrivée au pouvoir.

M. Jacques Valade., président de la commission des affaires culturelles. Qu'est-ce qui a changé ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ont été pénalisés quant au décompte de leurs jours de grève. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Françoise Henneron. C'est normal !

M. Robert Del Picchia. Dans le privé, les grévistes ne sont pas payés !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bien sûr, vous avez applaudi des deux mains parce que vous faisiez sans doute partie de ceux qui pensaient que les jours de grève des fonctionnaires leur étaient payés ! Vous êtes mal informés ! En fait, la pénalisation a même été double !

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Pas du tout !

M. François Fillon, ministre. On a leur a retenu trois jours sur un mois de grève !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Par ailleurs, les enseignants vous parlent, revendiquent, demandent à être associés à la concertation, et ils exercent un métier qui devient de plus en plus difficile, non pas de leur fait, mais du fait de la société, de ses dirigeants et de leurs politiques qui aboutissent aux résultats que nous savons.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Vous avez été au pouvoir !

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Vous y avez pris votre part !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les enseignants ne sont pour rien dans les difficultés actuelles.

En revanche, ils ont des besoins en matière de formation, de formation continue notamment.

Puisque vous dites aimer les enseignants, nous attendons de vous des actes. Entendez-les, travaillez avec eux pour mettre sérieusement en oeuvre vos réformes, écoutez leurs revendications, revalorisez leur métier et étudiez de plus près ce qui se passe dans les classes : cela ne pourra vous faire que du bien ! (M. Assouline applaudit.)

Pour ce qui est de la réponse que vous venez de nous apporter, monsieur le ministre, ne nous prenez pas pour des idiots : nous vous demandons de supprimer le premier alinéa du texte proposé par votre article et donc de revenir simplement à l'actuelle rédaction du code.

M. François Fillon, ministre. Cela ferait tomber l'article du code ! C'est stupide de tenir de tels propos ! Quand on fait une erreur, on la reconnaît !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 564.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 565.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 563.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 103.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.

(L'article 16 est adopté.)