SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2002


La parole est à M. Raymond Courrière, pour explication de vote.
M. Raymond Courrière. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des anciens combattants qui nous est soumis en cette fin de semaine, le premier de cette douzième législature, n'est pas à la hauteur de ceux qui ont parfois sacrifié leur vie pour notre pays.
Comme je le disais l'an passé, ce budget doit, en francs constants, rester identique pour permettre le règlement des problèmes de fond auxquels la nation n'a toujours pas apporté de réponse. A titre d'exemple, je rappelle que les anciens combattants d'Algérie souhaitent notamment que soit poursuivie la revalorisation progressive du montant de la retraite du combattant, avec précisément une revalorisation de cinq points dès le présent budget.
Ce budget, qui ne correspond pas à l'attente, n'a seulement été amendé que de 1,51 million d'euros pour rétablir les crédits d'action sociale de l'ONAC, sévèrement amputés dans le budget initial.
Alors que le précédent gouvernement s'était engagé à préservé l'ONAC comme outil privilégié de la solidarité à l'égard des anciens combattants, malgré le geste que vous avez fait en cours de discussion, des inquiétudes nombreuses subsistent au sein du monde associatif à ce propos. En effet, si ce budget pérennise l'ONAC pour le moment, nous remarquons que la subvention de fonctionnement que vous lui versez accusera une baisse de 2,34 %. A titre de comparaison, le budget avait été augmenté de 3,51 % en 2002 ; à l'époque, la commission des finances le trouvait abominable ! Son avenir n'est donc plus aussi assuré qu'il l'était précédemment.
Vous nous présentez la décristallisation comme une « grande nouvelle mesure », monsieur le secrétaire d'Etat. Permettez-moi de vous faire part de ma surprise, car je n'ai pas oublié que cette même assemblée avait adopté l'an dernier, sur proposition de l'ancien secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants, M. Jacques Floch, un début de décristallisation avec la levée de forclusion au bénéfice des anciens combattants originaires des anciennes colonies françaises. Je vous pose la question : où est la nouveauté ?
Vous nous dites y consacrer 72,5 millions d'euros. Très bien, mais ce n'est pas une mesure nouvelle, puisqu'il s'agit d'un redéploiement à partir de l'allocation préparatoire à la retraite et de l'allocation différentielle pour les anciens combattants d'Algérie. Comme le disait mon collègue Gilbert Chabroux, les moyens doivent être pris non pas sur ce budget, mais bien sur les crédits du Premier ministre, puisqu'il s'agit d'une dette morale et d'une dette de l'Etat.
Quant à la carte du combattant, il faut revoir ses conditions d'attribution. Nous avions abouti à une mesure qui permettait son obtention par tous ceux qui avaient passé douze mois de leur jeunesse en Algérie pour répondre à l'appel de la France. Par la suite, une autre mesure a fixé à quatre mois la durée de présence nécessaire pour les policiers et les CRS. Je pense qu'il serait juste et équitable d'étendre cette mesure à tous les anciens combattants d'Algérie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, en conclusion, vous nous présentez un budget de redéploiement plus qu'un budget d'innovation ; quant à en faire un budget de transition, n'en parlons pas ! Il laisse sans réponse un certain nombre d'interrogations, et nous regrettons qu'il n'ouvre pas de perspectives pour le monde combattant, contrairement à ce qui a été dit.
J'aimerais notamment que ne soit pas enterré le projet de faire définitivement du 19 mars, date officielle de la fin des combats en Algérie, la journée du souvenir et du recueillement, comme le souhaite l'écrasante majorité des anciens combattants d'Algérie...
M. Bernard Murat. Non !
M. Marcel-Pierre Cleach. Ce n'est pas vrai !
M. Raymond Courrière. ... et, avec eux, l'écrasante majorité du peuple français. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)

Organisez un référendum, vous verrez bien ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Masseret, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Masseret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'assiste à ce débat par respect pour le monde combattant, mais je n'avais pas l'intention d'intervenir. Cependant, j'ai entendu dans la bouche du rapporteur de la commission des finances, M. Jacques Baudot, des propos qui me poussent à prendre la parole. Ainsi donc, monsieur le rapporteur spécial, les prédécesseurs de M. Mékachéra auraient érigé la division en principe de l'action gouvernementale ?
M. Raymond Courrière. Il l'a dit !
M. Guy Fischer. Oui, il l'a dit !
M. Jean-Pierre Masseret. Je ne peux pas rester sans réaction devant cette accusation tout à fait infondée. Je ne sais pas où M. Jacques Baudot place le curseur, c'est pourquoi je me sens un petit peu impliqué...
M. Raymond Courrière. Le curseur ? Il le place à droite !
M. Jean-Pierre Masseret. Je rappelle à M. Jacques Baudot les propos qu'il tenait il y a quelques années quand, déjà rapporteur spécial du budget des anciens combattants, il montait à la tribune pour vanter les qualités du secrétaire d'Etat, homme de dialogue, courtois, disponible, qui créait les conditions du rassemblement...
M. Gilbert Chabroux. Et en plus, c'est vrai !
M. Jean-Pierre Masseret ... pour apporter les réponses les moins insatisfaisantes possible. Mais il votait contre le budget en invoquant l'insuffisance des crédits.
Je sais bien qu'au moment de voter contre il faut trouver le bon argument, mais je ne crois pas qu'il faille pour autant travestir la vérité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Je ne reviens pas sur ce que j'ai dit de l'homme, c'est-à-dire de l'ancien secrétaire d'Etat ; je ne reviens pas plus sur ses qualités, il les a toujours. Je maintiens, en revanche, qu'il menait à l'époque une politique de division des anciens combattants. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Raymond Courrière. C'est de la diffamation ! (Exclamations sur les travées de l'Union centriste.) On travestit la vérité !
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Ce n'est pas de la diffamation. (Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Laissez-moi parler. On a le droit de s'expliquer, tout de même !
Mais je me tourne vers le secrétaire d'Etat de l'époque, notre collègue Jean-Pierre Masseret : ne pensiez-vous pas que le fait d'accorder le bénéfice de la carte aux policiers et aux CRS dès quatre mois de séjour allait susciter des problèmes ?
C'était une véritable bombe à retardement, et elle est en train d'exploser, car nous sommes maintenant saisis de demandes d'anciens combattants qui réclament les mêmes conditions d'octroi de la carte. Et ils ont raison !
M. Jean-Pierre Schosteck. Eh oui ! Evidemment !
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Etait-il vraiment nécessaire d'agir avec cette brutalité, et au bénéfice d'une seule catégorie d'anciens combattants d'Algérie, je veux parler des CRS et des policiers ?
Voilà ce que je vous reproche, mais en toute amitié, mon cher collègue.
Pendant cinq ans, nous avons connu une période de croissance.
M. Jean-Pierre Schosteck. La cagnotte !
Mme Marie-Claude Beaudeau. On diminue de 2 % les crédits, ils ne les votent pas ; on les diminues de 4 %, et ils les votent !
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. Et qu'a-t-on fait de plus pendant cette période de croissance ? On s'est contenté de suivre la pente de la diminution des crédits consacrés au secrétariat d'Etat aux anciens combattants ! Vous n'aviez pas mis beaucoup plus pour réellement faire quelques chose de plus, mon cher collègue. Que de dossiers ont été abandonnés, pas de votre faute, monsieur Masseret, mais par la faute de Bercy ! Je le disais d'ailleurs moi-même, et je le répéterai encore au secrétaire d'Etat actuel. Il y avait cependant des choses à faire, et vous en aviez les moyens lorsque vous étiez secrétaire d'Etat.
Les donneurs de leçons, oui, mais point trop n'en faut ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Schosteck. Très bien !
M. Jean-Pierre Masseret. Je ne répondrai pas parce que je ne veux pas intervenir sur le fond !
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour explication de vote.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai déjà dit que la façon dont M. Baudot avait présenté ce projet de budget était partisane et il vient de l'illustrer à l'instant en reprenant ses propos sur les opérations de division qu'aurait menées le précédent gouvernement. Nous ne pouvons l'admettre !
Je voudrais rappeler, parce qu'il me semble qu'il faut clarifier le débat et que nous ne pouvons pas voter sans cette clarification, le rôle qui a été joué par le précédent gouvernement pour mettre fin au contentieux des anciens d'Afrique du nord. S'il n'y a pas eu rassemblement, je ne sais pas ce que ce mot signifie...
En effet, il a fallu, tout d'abord, faire reconnaître officiellement la guerre d'Algérie : cela a été fait par l'ancien gouvernement ; c'est à son honneur et l'on ne peut pas dire que cela ait été une opération de division !
Il a fallu, ensuite, revoir les conditions d'attribution des titres - la carte de combattant et le titre de reconnaissance de la nation : cela a été fait !
Il peut rester encore quelques points en discussion, mais ce n'est pas ce qui s'appelle de la division. Il y a eu rassemblement autour du gouvernement précédent...
M. Raymond Courrière. Oui !
M. Gilbert Chabroux. ... et les associations l'ont largement reconnu. Je ne peux donc pas admettre les propos qui ont été tenus : il s'agit de politique politicienne, de propos partisans et même, d'une certaine manière, sectaires. Je regrette de devoir le dire.
M. le président. Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.

(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion les articles 62 et 62 bis , qui sont rattachés pour leur examen aux crédits affectés aux anciens combattants, ainsi que, en accord avec la commission des finances, les amendements n°s II-6 rectifié, II-25, II-26 et II-27 tendant à insérer des articles additionnels.

Article 62